Média indocile – nouvelle formule
Yves Tenret
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Quand il fait soleil ou quand il pleut, c’est parce qu’Elle en a besoin.</p> <p>Des hommes en manque comme s’il en pleuvait, se soumettent avec docilité à tous ses caprices, elle leur demande de creuser, ils creusent. Des hommes avec des cheveux frisés, des cheveux raides, chauves, des casquettes, des lunettes, des cravates, des hommes nus, des hommes en pierre, en terre, assis, couchés, debout, enlacés entre eux, sur un banc, en tablier devant un barbecue, des paons, une centaine de candidats corvéables à merci. 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Quand il fait soleil ou quand il pleut, c’est parce qu’Elle en a besoin.</p> <p>Des hommes en manque comme s’il en pleuvait, se soumettent avec docilité à tous ses caprices, elle leur demande de creuser, ils creusent. Des hommes avec des cheveux frisés, des cheveux raides, chauves, des casquettes, des lunettes, des cravates, des hommes nus, des hommes en pierre, en terre, assis, couchés, debout, enlacés entre eux, sur un banc, en tablier devant un barbecue, des paons, une centaine de candidats corvéables à merci. Nous avons aussi un code couleur, blanc, noir, vert, dans une multitude de dégradés, vingt maisons, vingt trous, quarante vases, vingt bols, dix assiettes, des sexes en érection, des sexes au repos, des larmes, beaucoup de visages d’hommes en larmes, un jardin enchanté et bouleversant de quotidienneté sublimée, une gifle, des enlacements de substitution entre hommes, une femme seule entre deux âges, un site de rencontre, un semblant d’ordre monastique avec ses règles propres, un monde fantasmatique avec sa trivialité d’une infinité de possibles et elle en maîtresse de ce grand jeu érotique, donc deux récits parallèles, le sien, le leur, ni libertinage, ni misère sexuelle, juste la langue du désir, avec ses lourdeurs, ses légèretés, ses lapsus, ses aveux, ses refoulements, ses grossièretés, ses finesses.</p> <hr /> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1710927703_jardin_couverture_rgbbassedef.jpg" class="img-responsive img-fluid left " width="200" height="262" /></p> <h4>«Le Jardin des Candidats», Dominique Goblet et Kai Pfeiffer, Editions FRMK, 256 pages.</h4> <h4>Le livre accompagne la <a href="https://cartoonmuseum.ch/ausstellungen/dominique-goblet" target="_blank" rel="noopener">rétrospective Dominique Goblet</a> au Cartoonmuseum à Bâle qui a lieu du 2 mars au 26 mai.</h4>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'dominique-goblet-un-livre-envoutant-et-une-exposition-a-bale', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 23, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 6, 'person_id' => (int) 2107, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'tags' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Tag) {} ], 'attachments' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ '*' => true, 'id' => false ], '[dirty]' => [], '[original]' => [], '[virtual]' => [], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [], '[invalid]' => [], '[repository]' => 'Posts' }count - [internal], line ?? 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Culture / Dominique Goblet, un livre envoûtant et une exposition à Bâle
«Le Jardin des Candidats» de Dominique Goblet et Kai Pfeiffer est un livre grand format où se croisent bande dessinée et art contemporain, céramiques, sculptures, ready-mades, aquarelles et strips narratifs, dans une totale liberté de ton. Ouvrage d’une grande invention offrant des dessins de jardins, de trous dans ces jardins, d’hommes nus ou habillés, de visages d’hommes en pleurs, de vases, photographiés ou dessinés, dus aux deux artistes ou chinés sur des marchés.
Yves Tenret
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Leur contre-société est pour eux la seule communauté qui existe. Ils nomment leur milieu le Milieu et ils se nomment eux-mêmes les Hommes. Le reste de la société n’étant qu’un ramassis de pue-la-sueur soumis aux politiciens et craignant les flics.</p> <h3>Ultragauche, le néo-polar</h3> <p>Après Mai 68, le roman noir français reconvertit le genre en acte critique, en radiographie politique de la société et de ses institutions, en instrument d’intervention sociale. Le néo-polar intègre dans ses récits les banlieues, les grands ensembles, les HLM, et décrit de nouveaux espaces tels les caves, les terrains vagues, les cages d’escaliers. La violence sociale n’y est plus un écart mais la norme et toute révolte individuelle y est, par nature, vouée à échouer. Paranoïa et haine de soi y dominent.</p> <p>Jean-Patrick Manchette, invité à l'émission <i>Apostrophes</i> par Bernard Pivot, en utilisant le terme de néo-polar devant des millions de spectateurs, rend son usage universel. L’époque est aux positions tranchées mais c’est A.D.G., sympathisant du Front national, qui brosse avec tendresse des portraits de hippies contestataires, et Manchette qui endosse dans ses livres le point de vue des fascistes.</p> <p>Sur les seize auteurs pratiquant ce nouveau genre, dix ont un passé de militants de gauche, dans des organisations telles que les Jeunesses communistes, le PCF, la Gauche prolétarienne ou Lutte ouvrière, tous, nés après 1945, sont des <i>baby-boomers</i>, ayant fait des études supérieures, et ayant des bac +4, ou +5. Ils sont journalistes, scénaristes, traducteurs, éditeurs ou cinéastes. 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Dantec sont recrutés, les ventes repartent à la hausse.</p> <h3>Féminisation du roman noir</h3> <p>Dans les années 1990, on assiste à une entrée progressive d’auteurs femmes et ensuite, au siècle suivant, massive, à la fois comme productrices d’ouvrages et comme lectrices de ceux-ci, la lecture de roman devenant une activité de plus en plus essentiellement féminine.</p> <p>En 2024, 60% des acheteurs et du lectorat de romans policiers sont des acheteuses et des lectrices. Il paraît beaucoup d’articles sur les femmes auteures de polars dont certaines avaient néanmoins choisi un pseudonyme androgyne, telles Fred Vargras, Dominique Manotti ou Claude Amoz. 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Par le polar, ils peuvent raconter tout ce qu’ils ne peuvent plus dire par le journalisme. Ils utilisent dans l’écriture leur méthodologie d’investigation: collecte de données, recueil de témoignages, enquête de terrain, étude d’archives.</p> <p>Carlos Ginsburg dans <i>Signes, traces et pistes,</i> son article paru en 1980, article faisant lui-même référence à l’article <i>Attribution</i> d’Enrico Castelnuovo paru en 1968 dans l’Encyclopédie Universalis: en 1876, il y a beaucoup de fausses attributions dans les musées, G. Morelli postule que pour distinguer les originaux des copies, il ne faut pas se baser sur les caractères les plus apparents et, par conséquent, les plus faciles à imiter mais examiner les détails les plus négligeables: les lobes des oreilles, les ongles, la forme des doigts des mains et des pieds. 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Auguste le Breton renouvelle ensuite l’exploit avec <i>Du rififi chez les hommes</i>.</p> <h3>Le roman noir à la française</h3> <p>La classe moyenne, tout en se consolidant dans les années 50 et 60, aura son Homère en la personne de Georges Simenon et ses 75 romans mettant en scène le commissaire <i>Maigret.</i> Cette épopée d’une société rurale et ouvrière mutant vers le tertiaire rencontrera un succès planétaire et, en nombre d’exemplaires vendus, sera en concurrence avec la Bible. Auscultant inlassablement le capitalisme moderne, le Liégeois captera ses heurts, ses changements, ses frictions et pour lui, comme pour le roman noir en général, le cinéma sera fondamental. Une adaptation d’un de ses livres avec Jean Gabin dans le rôle-titre, c’est la certitude d’atteindre des tirages phénoménaux.</p> <p>Pour le reste, Manchette le notera dans l’une de ses chronique, les truands du roman noir sont réac et ne cessent de se plaindre du temps qui passe. Leur contre-société est pour eux la seule communauté qui existe. Ils nomment leur milieu le Milieu et ils se nomment eux-mêmes les Hommes. Le reste de la société n’étant qu’un ramassis de pue-la-sueur soumis aux politiciens et craignant les flics.</p> <h3>Ultragauche, le néo-polar</h3> <p>Après Mai 68, le roman noir français reconvertit le genre en acte critique, en radiographie politique de la société et de ses institutions, en instrument d’intervention sociale. Le néo-polar intègre dans ses récits les banlieues, les grands ensembles, les HLM, et décrit de nouveaux espaces tels les caves, les terrains vagues, les cages d’escaliers. La violence sociale n’y est plus un écart mais la norme et toute révolte individuelle y est, par nature, vouée à échouer. Paranoïa et haine de soi y dominent.</p> <p>Jean-Patrick Manchette, invité à l'émission <i>Apostrophes</i> par Bernard Pivot, en utilisant le terme de néo-polar devant des millions de spectateurs, rend son usage universel. L’époque est aux positions tranchées mais c’est A.D.G., sympathisant du Front national, qui brosse avec tendresse des portraits de hippies contestataires, et Manchette qui endosse dans ses livres le point de vue des fascistes.</p> <p>Sur les seize auteurs pratiquant ce nouveau genre, dix ont un passé de militants de gauche, dans des organisations telles que les Jeunesses communistes, le PCF, la Gauche prolétarienne ou Lutte ouvrière, tous, nés après 1945, sont des <i>baby-boomers</i>, ayant fait des études supérieures, et ayant des bac +4, ou +5. Ils sont journalistes, scénaristes, traducteurs, éditeurs ou cinéastes. Manchette se définira d’ailleurs lui-même comme étant un indécrottable intello pas honteux de l’être.</p> <h3>La reconnaissance du genre</h3> <p>Pendant que la contre-culture se dote de ses propres outils de communication, journaux satiriques, BD, fanzines, l’éditeur Plon réagit et crée des collections qui rencontrent un succès phénoménal comme <i>SAS</i> de Gérard de Villiers, avec ses romans d’espionnage racistes et sexistes, homophobes et anticommunistes. De même, la série Brigade spéciale associe toujours l’acte sexuel à des coups et de la torture, d’un racisme appuyé, elle use de termes comme «bougnoule», «négresse» et est riche en descriptions de traitements dégradants. </p> <p>Les années 1980 voient l’entrée en scène de l’amateur érudit et naissent des almanachs, des chroniques, des fanzines, des revues spécialisées vendues en kiosque, comme <i>Gang</i>, <i>Polar</i> ou <i>813</i>, un Festival du roman et du film policier, une exposition au Centre Pompidou, l’ouverture en 1983 de la Bilipo, Bibliothèque des littératures policières à Paris, des thèses sur le sujet sont soutenues et en 1994 paraissent 471 nouveaux titres, en 1995, 700, en 2001, 1'709. </p> <p>Lors du cinquantième anniversaire de la <i>Série noire</i>, Patrick Raynal en devient directeur. <i>Œdipe roi</i> de Sophocle y est publié, Jean-Claude Izzo et Maurice G. Dantec sont recrutés, les ventes repartent à la hausse.</p> <h3>Féminisation du roman noir</h3> <p>Dans les années 1990, on assiste à une entrée progressive d’auteurs femmes et ensuite, au siècle suivant, massive, à la fois comme productrices d’ouvrages et comme lectrices de ceux-ci, la lecture de roman devenant une activité de plus en plus essentiellement féminine.</p> <p>En 2024, 60% des acheteurs et du lectorat de romans policiers sont des acheteuses et des lectrices. Il paraît beaucoup d’articles sur les femmes auteures de polars dont certaines avaient néanmoins choisi un pseudonyme androgyne, telles Fred Vargras, Dominique Manotti ou Claude Amoz. La plus célèbre de toutes, Virginie Despentes, décrit des personnages qui n’ont rien de victimes soumises, ni de douceur féminine et retourne, avec brio, la violence contre les hommes dans des récits urbains, violents, crus et nihilistes.</p> <h3>Auteurs enquêteurs, profs, journalistes et policiers</h3> <p>Le polar du XXIème siècle marque l’avènement d’une prise de parole qui n’est ni le fruit d’un engagement ni le résultat d’une déception militante.</p> <p>Chercheurs, enseignants-chercheurs, journalistes, documentaristes, médecins, psychanalystes, avocats pénalistes, policiers, ils sont très nombreux à exercer ou avoir exercé des professions qui relèvent du paradigme indiciaire. Beaucoup d’auteurs travaillent dans l’audiovisuel, sont profs ou policiers – généralement des officiers. D’autres sont journalistes, donc précarisés ou en voie de l’être, et trouvent dans le polar une liberté dont ne disposent plus les médias d’information. Par le polar, ils peuvent raconter tout ce qu’ils ne peuvent plus dire par le journalisme. Ils utilisent dans l’écriture leur méthodologie d’investigation: collecte de données, recueil de témoignages, enquête de terrain, étude d’archives.</p> <p>Carlos Ginsburg dans <i>Signes, traces et pistes,</i> son article paru en 1980, article faisant lui-même référence à l’article <i>Attribution</i> d’Enrico Castelnuovo paru en 1968 dans l’Encyclopédie Universalis: en 1876, il y a beaucoup de fausses attributions dans les musées, G. Morelli postule que pour distinguer les originaux des copies, il ne faut pas se baser sur les caractères les plus apparents et, par conséquent, les plus faciles à imiter mais examiner les détails les plus négligeables: les lobes des oreilles, les ongles, la forme des doigts des mains et des pieds. Castelnuovo rapproche cette méthode à celle de Sherlock Holmes découvrant l’auteur d’un délit sur la base d’indices imperceptibles pour la plupart des gens.</p> <h3>Extension du domaine de la lutte</h3> <p>De nos jours, le roman noir affronte le post-moderne, les <i>fake news</i> et la post-vérité. Dans de nombreux romans, le dénouement est ouvert. Le texte se clôt sur un assaut, sur une poursuite, sur une disparition non expliquée, sur la recherche non aboutie d’un meurtrier. Il n’y a plus de point de vue surplombant, unifié, de narration organisatrice, il ne reste que dissensus et brouillard narratif. </p> <p>Bref, comme le disait le sociologue Luc Boltanski: que s’est-il passé pour qu’au début du XXème siècle surgisse cette littérature entièrement consacrée à l’énigme? L’émergence du roman policier ne coïncide-t-elle pas à la fois avec la construction de l’Etat-nation, la naissance de la sociologie et avec une nouvelle pathologie décrite par la psychiatrie, la paranoïa? 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Culture / Le roman noir en France, incarnations diverses
Roman gothique anglais, roman-feuilleton, roman à énigme, roman prolétarien, fait divers criminel, «hardboiled» américain, roman réaliste, Série noire, néo-polar, les racines du roman policier français sont multiples et chaque génération a les siennes. «Le roman noir: une histoire française» de Natacha Levet retrace, avec une constante acuité critique et une érudition consciencieuse, l’histoire plus que centenaire du roman policier français.
Yves Tenret
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Après deux années d’échanges, Rachel signe ses lettres d’un <i>ILY</i> (I Love You). C’est chaud. Elle lui écrit tous les jours. Le soir, de son lit. Le matin, avant d’aller travailler. En fin d’après-midi, dans le train, après avoir été travailler. Elle signe aussi <i>Always</i> <i>Rachel</i>. Elle le fera pendant les onze ans de leur correspondance, un échange de 900 lettres. Conscientes que celles-ci pourraient être rendues publiques, elles inventent un code, avec deux possibles, <i>Darling</i> et <i>Dearest</i>, les premières strictement intimes, les secondes pouvant être lues par la famille de Dorothy. </p> <p>Hannah Arendt et Mary McCarthy ont entretenu 26 années de correspondance entre 1949 et 1975. Là, la barre est très haute car ces deux déracinées cosmopolites sont géniales. Née en Allemagne en 1906, l'une était juive, réfugiée aux Etats-Unis en 1940 après avoir fui l'Europe sept ans plus tôt et vivait à New York une vie d'intellectuelle déracinée. L'autre était née à Seattle en 1912 dans une famille catholique et s'était installée à New York en 1936, bien décidée à y faire une carrière de critique et d'écrivain. Entre elles, on découvre un dialogue profond dans lequel la romancière s'ouvre aux problèmes de la pensée, tandis que la philosophe se montre passionnée de littérature. Elles partagent leurs enthousiasmes et s'avouent leurs angoisses, passant sans cesse du registre de l’intimité à celui du débat intellectuel, commentant les événements politiques et se protégeant mutuellement dans les controverses, comme celle suscitée par le livre d'Arendt sur Eichmann. </p> <p>Leur amitié s’intensifie au fur et à mesure. Elles s’écrivent des choses comme: Tu me manques, j’aspire à nos journées de dialogues. Je pense à toi avec une intimité et une tendresse nouvelle. Comment écrire à quelqu’un qui ne vous quitte jamais? Jusqu’à ces dix mots dans une lettre d’Arendt en 1974: «Tu ne peux pas raisonnablement douter de <i>moi</i>. Je t’aime.» </p> <h3>La meilleure amie de Pier Paolo Pasolini</h3> <p>Avec Silvana Mauri, ils ont échangé des centaines de lettres, lettres qui ont malheureusement disparu. Ils s’aimaient. Elle est la première personne à qui il a avoué et décrit par le menu son homosexualité. Amitié, tendresse pour toi, dit-il, mais pas d’attirance physique. Ils se rencontrent à Bologne, aux début des années 40, il va souvent la voir dans le Frioul. Elle lui écrit tous les jours, elle aussi, le matin avant d’aller au bureau. </p> <h3>Jules et Jim</h3> <p>En décembre 1916, Marcel Duchamp, devenu célèbre outre-Atlantique grâce à son <i>Nu descendant un escalier</i>, <i></i>exposé à l'Armory Show en 1913, fait la connaissance de Henri-Pierre Roché, diplomate, collectionneur et homme de lettres. La séduction est immédiate et réciproque. Roché, marchand d’art, critique, journaliste, a une vie sexuelle libérée, aime les formes artistiques débridées et fait preuve d’une constante ouverture d’esprit. Après 1919, leur amitié se renforce à Paris. Duchamp tient son ami au courant de ses travaux, entre autres pour lui demander des fonds. D’année en année, la complicité va s’intensifiant.</p> <p>Cette relation, fidèle et exemplaire, est transcrite dans une correspondance que le choix de Marcel Duchamp de vivre aux Etats-Unis rend abondante. Roché conserve toutes les lettres de son ami. Duchamp, qui ne conserve rien, gardera néanmoins celles de Roché postérieures à 1953 – date à laquelle celui-ci publie son roman <i>Jules et Jim.</i> Leurs échanges sont continus, vifs, drôles, affectueux et cela jusqu'à la disparition de Henri-Pierre Roché en 1959.</p> <h3>Amitié et antisémitisme</h3> <p>L’amitié entre Vassily Kandinsky et Arnold Schoenberg va buter sur l’antisémitisme, le premier écrivant au second, suite à une demande d’être engagé au Bauhaus, qu’il le rejette en tant que Juif mais qu’il l’apprécie en tant qu’homme: «… je vous rejette en tant que Juif, mais néanmoins je vous écris une bonne lettre et vous assure que j’aimerais tellement<i> vous</i> avoir ici pour que nous travaillions<i> ensemble!</i>»</p> <p>A quoi le second répond: «Et vous vous joignez à cela et "me rejetez en tant que Juif". Me suis-je donc offert à vous? Croyez-vous que quelqu’un comme moi se laisse rejeter! Pensez-vous qu’un homme qui connait sa valeur accorde à quiconque le droit de critiquer ne serait-ce que ses traits de caractère les plus insignifiants? Qui serait-il donc, celui qui aurait ce droit? En quoi serait-il meilleur? Oui, me critiquer derrière mon dos, il y a là beaucoup de place, c’est loisible à chacun. Mais si je l’apprends, il est alors à ma merci, livré à mes représailles.»</p> <h3>En Belgique dans les années 20</h3> <p>En 1922, le jeune Henri Michaux, complètement paumé, se cherche un parrain littéraire et en Belgique, ça ne court pas vraiment les rues. Il tombe sur Franz Hellens, de 20 ans son ainé, auteur d’un récit onirique, <i>Mélusine</i>, récit qu’il l’a ébloui. Loin de l’homme sans concession qu’il deviendra, à ce moment-là, Michaux manquant de tout, même de livres, aspire à des mondanités, a le souci de parvenir, de trouver une place et de réussir dans la milieu littéraire parisien. Et ça marche, Hellens le prend dans sa revue<i> Le Disque vert</i>. Ils s’écriront pendant vingt ans. Plus tard, l’auteur d’un <i>Barbare en Asie</i> souhaitera voir détruite cette correspondance preuve de ses peu glorieuses errances de jeunesse. </p> <h3>En Suisse dans les années 40</h3> <p>Deux êtres aux antipodes l’un de l’autre, excès contre réserve, volubilité contre frugalité du langage, débordements contre nuances, improbables amis mais nourrissant quand même un généreux dialogue et partageant leurs doutes pendant 60 ans! Maurice Chappaz bouillonne et insuffle de sa tonicité à Philippe Jaccottet qui en manque mais qui, par contre, est attentif, fidèle et patient. Au départ, il y a une note de lecture du second qui a alors 20 ans, à propos de <i>Verdure de la nuit</i> du premier, cantique célébrant la femme, le désir, le Valais. Pendant que le Vaudois Jaccottet déprime et se ronge, Chappaz, le Valaisan, chante l’amour, la vie vagabonde, la bohême. Jaccottet, rongé par les soucis d’argent, ses tâches de traducteur et de critique littéraire, ses inhibitions devant le devoir d’écrire, s’exile à Paris puis à Grignan et même si tout les oppose, une amitié désintéressée et au long cours va se développer et se fortifier, entre l’austère Jaccottet et l’explosif globe-trotteur et contempteur des remonte-pentes.</p> <h3>En guise de conclusion, une merveille merveilleuse</h3> <p>Entre Robert Walser et Frieda Mermet, pendant vingt ans, de 1913 à 1923, s’échange une correspondance joueuse, ludique et facétieuse. Liberté de ton, ferveur, badinage, relation amoureuse à distance, orgueil, sincérité et rétention, tous les sortilèges de la prose walsérienne sont ici à l’œuvre. Quand ils font connaissance, il a 35 ans et elle, 36. Il revient de Berlin où il a passé sept ans à fréquenter les avant-gardes artistiques et a beaucoup publié. Walser vit maintenant chez sa sœur, institutrice puis, en 1920, déménage à Berne. Frieda qui est divorcée et lingère dans une clinique psychiatrique lui sert aussi d’archiviste et de bibliothécaire car Walser n’a jamais possédé de bibliothèque ni conservé quoi que ce soit. Elle satisfait fidèlement ses nombreuses demandes de vivres – fromage, beurre, saucisson, thé. Leur relation épistolaire est entrecoupée de rencontres épisodiques. Walser effectue souvent à pied le trajet entre Bienne et l’asile de Bellelay. Il donne toujours du «vous» à sa «chère Madame Mermet» tout en embrassant l’ourlet de sa ravissante petite culotte et parfois, il joue avec l'idée de l'épouser: «J'aimerais être dès demain matin votre mari, serviable, sage en tout temps, économe, solide, fidèle, toujours, bien sûr», lui écrit-il.</p> <hr /> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1707986152_correspondancescouverture1046x1536.jpg" class="img-responsive img-fluid left " width="200" height="294" /></p> <h4>«L’amitié dans tous ses états. 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Après deux années d’échanges, Rachel signe ses lettres d’un <i>ILY</i> (I Love You). C’est chaud. Elle lui écrit tous les jours. Le soir, de son lit. Le matin, avant d’aller travailler. En fin d’après-midi, dans le train, après avoir été travailler. Elle signe aussi <i>Always</i> <i>Rachel</i>. Elle le fera pendant les onze ans de leur correspondance, un échange de 900 lettres. Conscientes que celles-ci pourraient être rendues publiques, elles inventent un code, avec deux possibles, <i>Darling</i> et <i>Dearest</i>, les premières strictement intimes, les secondes pouvant être lues par la famille de Dorothy. </p> <p>Hannah Arendt et Mary McCarthy ont entretenu 26 années de correspondance entre 1949 et 1975. Là, la barre est très haute car ces deux déracinées cosmopolites sont géniales. Née en Allemagne en 1906, l'une était juive, réfugiée aux Etats-Unis en 1940 après avoir fui l'Europe sept ans plus tôt et vivait à New York une vie d'intellectuelle déracinée. L'autre était née à Seattle en 1912 dans une famille catholique et s'était installée à New York en 1936, bien décidée à y faire une carrière de critique et d'écrivain. Entre elles, on découvre un dialogue profond dans lequel la romancière s'ouvre aux problèmes de la pensée, tandis que la philosophe se montre passionnée de littérature. Elles partagent leurs enthousiasmes et s'avouent leurs angoisses, passant sans cesse du registre de l’intimité à celui du débat intellectuel, commentant les événements politiques et se protégeant mutuellement dans les controverses, comme celle suscitée par le livre d'Arendt sur Eichmann. </p> <p>Leur amitié s’intensifie au fur et à mesure. Elles s’écrivent des choses comme: Tu me manques, j’aspire à nos journées de dialogues. Je pense à toi avec une intimité et une tendresse nouvelle. Comment écrire à quelqu’un qui ne vous quitte jamais? Jusqu’à ces dix mots dans une lettre d’Arendt en 1974: «Tu ne peux pas raisonnablement douter de <i>moi</i>. Je t’aime.» </p> <h3>La meilleure amie de Pier Paolo Pasolini</h3> <p>Avec Silvana Mauri, ils ont échangé des centaines de lettres, lettres qui ont malheureusement disparu. Ils s’aimaient. Elle est la première personne à qui il a avoué et décrit par le menu son homosexualité. Amitié, tendresse pour toi, dit-il, mais pas d’attirance physique. Ils se rencontrent à Bologne, aux début des années 40, il va souvent la voir dans le Frioul. Elle lui écrit tous les jours, elle aussi, le matin avant d’aller au bureau. </p> <h3>Jules et Jim</h3> <p>En décembre 1916, Marcel Duchamp, devenu célèbre outre-Atlantique grâce à son <i>Nu descendant un escalier</i>, <i></i>exposé à l'Armory Show en 1913, fait la connaissance de Henri-Pierre Roché, diplomate, collectionneur et homme de lettres. La séduction est immédiate et réciproque. Roché, marchand d’art, critique, journaliste, a une vie sexuelle libérée, aime les formes artistiques débridées et fait preuve d’une constante ouverture d’esprit. Après 1919, leur amitié se renforce à Paris. Duchamp tient son ami au courant de ses travaux, entre autres pour lui demander des fonds. D’année en année, la complicité va s’intensifiant.</p> <p>Cette relation, fidèle et exemplaire, est transcrite dans une correspondance que le choix de Marcel Duchamp de vivre aux Etats-Unis rend abondante. Roché conserve toutes les lettres de son ami. Duchamp, qui ne conserve rien, gardera néanmoins celles de Roché postérieures à 1953 – date à laquelle celui-ci publie son roman <i>Jules et Jim.</i> Leurs échanges sont continus, vifs, drôles, affectueux et cela jusqu'à la disparition de Henri-Pierre Roché en 1959.</p> <h3>Amitié et antisémitisme</h3> <p>L’amitié entre Vassily Kandinsky et Arnold Schoenberg va buter sur l’antisémitisme, le premier écrivant au second, suite à une demande d’être engagé au Bauhaus, qu’il le rejette en tant que Juif mais qu’il l’apprécie en tant qu’homme: «… je vous rejette en tant que Juif, mais néanmoins je vous écris une bonne lettre et vous assure que j’aimerais tellement<i> vous</i> avoir ici pour que nous travaillions<i> ensemble!</i>»</p> <p>A quoi le second répond: «Et vous vous joignez à cela et "me rejetez en tant que Juif". Me suis-je donc offert à vous? Croyez-vous que quelqu’un comme moi se laisse rejeter! Pensez-vous qu’un homme qui connait sa valeur accorde à quiconque le droit de critiquer ne serait-ce que ses traits de caractère les plus insignifiants? Qui serait-il donc, celui qui aurait ce droit? En quoi serait-il meilleur? Oui, me critiquer derrière mon dos, il y a là beaucoup de place, c’est loisible à chacun. Mais si je l’apprends, il est alors à ma merci, livré à mes représailles.»</p> <h3>En Belgique dans les années 20</h3> <p>En 1922, le jeune Henri Michaux, complètement paumé, se cherche un parrain littéraire et en Belgique, ça ne court pas vraiment les rues. Il tombe sur Franz Hellens, de 20 ans son ainé, auteur d’un récit onirique, <i>Mélusine</i>, récit qu’il l’a ébloui. Loin de l’homme sans concession qu’il deviendra, à ce moment-là, Michaux manquant de tout, même de livres, aspire à des mondanités, a le souci de parvenir, de trouver une place et de réussir dans la milieu littéraire parisien. Et ça marche, Hellens le prend dans sa revue<i> Le Disque vert</i>. Ils s’écriront pendant vingt ans. Plus tard, l’auteur d’un <i>Barbare en Asie</i> souhaitera voir détruite cette correspondance preuve de ses peu glorieuses errances de jeunesse. </p> <h3>En Suisse dans les années 40</h3> <p>Deux êtres aux antipodes l’un de l’autre, excès contre réserve, volubilité contre frugalité du langage, débordements contre nuances, improbables amis mais nourrissant quand même un généreux dialogue et partageant leurs doutes pendant 60 ans! Maurice Chappaz bouillonne et insuffle de sa tonicité à Philippe Jaccottet qui en manque mais qui, par contre, est attentif, fidèle et patient. Au départ, il y a une note de lecture du second qui a alors 20 ans, à propos de <i>Verdure de la nuit</i> du premier, cantique célébrant la femme, le désir, le Valais. Pendant que le Vaudois Jaccottet déprime et se ronge, Chappaz, le Valaisan, chante l’amour, la vie vagabonde, la bohême. Jaccottet, rongé par les soucis d’argent, ses tâches de traducteur et de critique littéraire, ses inhibitions devant le devoir d’écrire, s’exile à Paris puis à Grignan et même si tout les oppose, une amitié désintéressée et au long cours va se développer et se fortifier, entre l’austère Jaccottet et l’explosif globe-trotteur et contempteur des remonte-pentes.</p> <h3>En guise de conclusion, une merveille merveilleuse</h3> <p>Entre Robert Walser et Frieda Mermet, pendant vingt ans, de 1913 à 1923, s’échange une correspondance joueuse, ludique et facétieuse. Liberté de ton, ferveur, badinage, relation amoureuse à distance, orgueil, sincérité et rétention, tous les sortilèges de la prose walsérienne sont ici à l’œuvre. Quand ils font connaissance, il a 35 ans et elle, 36. Il revient de Berlin où il a passé sept ans à fréquenter les avant-gardes artistiques et a beaucoup publié. Walser vit maintenant chez sa sœur, institutrice puis, en 1920, déménage à Berne. Frieda qui est divorcée et lingère dans une clinique psychiatrique lui sert aussi d’archiviste et de bibliothécaire car Walser n’a jamais possédé de bibliothèque ni conservé quoi que ce soit. Elle satisfait fidèlement ses nombreuses demandes de vivres – fromage, beurre, saucisson, thé. Leur relation épistolaire est entrecoupée de rencontres épisodiques. Walser effectue souvent à pied le trajet entre Bienne et l’asile de Bellelay. Il donne toujours du «vous» à sa «chère Madame Mermet» tout en embrassant l’ourlet de sa ravissante petite culotte et parfois, il joue avec l'idée de l'épouser: «J'aimerais être dès demain matin votre mari, serviable, sage en tout temps, économe, solide, fidèle, toujours, bien sûr», lui écrit-il.</p> <hr /> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1707986152_correspondancescouverture1046x1536.jpg" class="img-responsive img-fluid left " width="200" height="294" /></p> <h4>«L’amitié dans tous ses états. Correspondances», conçu et présenté par Nicole Marchand-Zañartu et Jean Lauxerois, Médiapop Editions, 212 pages.</h4>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'l-amitie-dans-les-milieux-lettres-et-artistiques-aux-xixeme-et-xxeme-siecles', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 34, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 6, 'person_id' => (int) 2107, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'tags' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Tag) {} ], 'attachments' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ '*' => true, 'id' => false ], '[dirty]' => [], '[original]' => [], '[virtual]' => [], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [], '[invalid]' => [], '[repository]' => 'Posts' }count - [internal], line ?? 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Culture / L’amitié dans les milieux lettrés et artistiques aux XIXème et XXème siècles
Goethe et Schiller, Nietzsche et Paul Rée, Wagner et Bakounine, Karl Marx et Engels, clair que l’amitié, ce n’est pas rien. Qu’aurait été Sam Shepard sans Johnny Dark? Et Hannah Arendt sans Mary McCarthy? Godard sans Gorin? Ou sans Serge Daney? Van Gogh sans Gauguin? Bien sûr celle-ci peut se décliner en mille et une variantes, de la dépendance à l’épanouissement, de la soumission à la libre égalité fraternelle. Ce sont ces déclinaisons qu’aborde «L’amitié dans tous ses états», ce livre aux horizons divers.
Yves Tenret
B Article réservé aux abonnés
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Un parcours, la reconstitution d’un paysage avec ses hauts, ses bas, ses impressions sonores, visuelles, tactiles, ses zones de brouillard. La laiterie, les ponts de grange typiques de son «petit coin de terre vaudoise», le tas de fumier avec sa planche en bois qui permet à la brouette de passer dessus, la remorque à lisier, la fosse à purin, le convoyeur, tapis roulant, avec au centre du village, solide et massive, une grande fontaine de campagne à deux bassins.</p> <h3>Le sol</h3> <p>Cela commence par le sol parce que l’on passe beaucoup de temps au sol lorsqu’on est un petit enfant. On ne sait pas encore marcher, on se fatigue vite, on tombe, et la vue est plus courte. Il y a cette myopie enfantine, on regarde le proche, ce qu’on trouve sous la main, ce qu’on tâte, et puis à partir de ce point de vue, petit à petit la vue se développe et on voit l’environnement de manière un peu plus large mais toujours à partir d’un point très précis du sol. Au début donc, pour l'auteur, tout est sol et rien que sol, sol de l’enfance, sol socle. Il commence par décrire ce sol là où il est le plus dur, la route goudronnée, goudron et gravillons mêlés, son odeur forte, puis il passe au sable, à l’herbe, à la terre sèche ou boueuse, au gravier, au parquet, aux dalles, au tapis, aux couvertures. Oui, il s’agit d’arpenter ce territoire, et ce défilement va se retrouver dans l’écriture et avec le mouvement, ce détachement, cette impression de glisser sur les choses. Il s’agit aussi de prendre conscience de l’immensité de ce qui nous entoure, de la distance entre deux poteaux d’un but de football. </p> <h3>Son style</h3> <p>Plus intéressé par la vérité des sensations, des impressions, des sens, des perceptions que par celle des souvenirs, Alain Freudiger effeuille, effleure, prend son temps, ne brûle pas les étapes et use d’une grande précision dans l’usage du vocabulaire, et de peu de qualificatifs. C’est très fluide et pour ce faire, il n’y a pas de chapitres. Son travail est triple: il parcourt mentalement sa propre mémoire par l’écriture: tous ses lieux, ses maisons, ses chemins, ses bois, ses champs. Ensuite après ce premier jet, il consulte un certain nombre de photographies, non seulement de son enfance mais aussi de la région à cette époque-là, et a quelques discussions avec des proches et des gens qui ont vécu là-bas, non pour vérifier tel ou tel détail mais pour faire sauter des verrous mémoriels, pour s’ouvrir à de nouvelles choses. </p> <h3>Le vocabulaire</h3> <p>L’un des enjeux du livre était d’arriver à une grande précision dans le vocabulaire, pour retrouver ces sensations d’enfant, ces finesses tactiles, olfactives, ces perceptions, ces émotions. Nanti d’une très bonne mémoire, il remonte donc le fleuve de cette enfance pour décrire précisément ce moment où pour lui, entre ses quatre et sept ans, tout était neuf.</p> <p>Temps où chaque paysage, chaque situation, chaque personnage, animal, plante, tout était l’objet d’un étonnement, d’une impression plus ou moins forte. </p> <h3>Le père</h3> <p>Un grand l’ennuie, son père lui dit qu’il se venge parce qu’il n’aime pas le catéchisme car, oui, son père est pasteur. Ce père explique aussi qu’on ne peut dire ni «nom de Dieu», ni «j’adore le chocolat», qu’on ne doit pas jurer et qu’il n’y a que Dieu qu’on adore. Ce père qui regardait toujours ses fils avec bienveillance et qui leur lit chaque soir un chapitre de l’<i>Iliade </i>ou de l’<i>Odyssée</i>. Néanmoins, le soir, avant d’aller dormir, tout est agité, alors, tous ensemble, ils chantent d’une voix très douce une chanson au pouvoir apaisant:</p> <p><em>Demeure par ta grâce, Avec nous Dieu sauveur!</em></p> <p><em>Quoi que l’Ennemi fasse, Protège notre cœur</em> </p> <h3>Le corps, les mouvements, les seuils</h3> <p>Le corps est bien là et les blessures font partie de la vie de tous les jours. A un moment, il y a la morsure par un chien, la blessure qui pourrit et les croûtes, qui peu à peu se détachent, les ecchymoses, les entailles, le corps griffé par les ronces, le corps qui change de forme après avoir été piqué par un insecte ou par la pointe en silice des orties se plantant comme une aiguille dans l'épiderme. </p> <p>Rien d’aérien ou d’évaporé, il y a incarnation. La dynamique de l’écriture est mouvement car l’auteur est très sensible à l’oralité, au rythme, au côté marcheur. Il accorde une grande importance aussi aux seuils, au fait de les franchir, de passer d’un lieu à l’autre, d’un extérieur à un intérieur, d’un chemin à une route, d’un bois à un pré, de toutes les perceptions et des effets de surprise. </p> <h3>Les animaux et les plantes</h3> <p>Il insiste également sur l’importance des animaux, les abeilles, les chiens, les corneilles, les taupes, les hérissons écrasés au bord de la route, les oies, le dindon qui fait peur, les vaches qui traversent le village, les coccinelles, les chenilles, les vertes et les brunes, les poux, les chevaux, les chèvres, les moutons.</p> <p>Et le champ de maïs avec ses innombrables couloirs qui avancent à l’infini et qui cachent les enfants de tous les regards. Les bottes de paille, le seigle, le blé, l’orge. Et dans les bois, surgit un ruisseau, des branches moussues, le bruit de l’écoulement, doux, calme, léger, persistant, les pissenlits, les marguerites, les pâquerettes, le bouton d’or – simplicité, le platane, le sureau, les peupliers sur la place centrale, le cyprès.</p> <h3>Le côté pop</h3> <p>Le chewing-gum, les Lego, les cigarettes filtres, les jeux électroniques avec leur écran à cristaux liquides, une maquette d’avion. L'auteur, enfant, reconnaît très bien les voitures, sait différencier très tôt une Mini Cooper d’une Alfa Roméo, et il est admiré par les adultes pour cela. Une petite poignée de dessinateurs, cinéastes ou groupes, Agnès Rosenstiehl, Yves Yersin, Etienne Delessert, Jörg Müller, les Forbans ou Téléphone, la télévision – où on la place dans la maison, dans quelle position on se met pour la regarder, son premier film: <i>La Grande Vadrouille</i>. </p> <h3>Les autres enfants</h3> <p>Chacun a son caractère. Chez Yves, les tracteurs, chez les Lenz, l’atelier de réparation de voitures, chez Stéphane, après avoir passé le rideau de lamelles plastiques jaune-verte-rose-brune-orange-turquoise, le tapis doux et la table basse.</p> <h3>Le bonheur</h3> <p>Partout où il y a un chemin à deux sillons, à l’orée d’une forêt, il est chez lui, dit-il. La question du paradis, du bonheur, n’est pas liée à des événements, à une exaltation. C’est un bonheur animiste qui est décrit en termes de lumières, de sons, de sensations, et qui n’a pas vocation à durer, qui ne s’appesantit pas. Un rai de lumière, ses millions de grains de poussière, apportant une vague idée cosmique. </p> <p>Ce bonheur est à l’échelle des choses et des événements, petit. Ce n’est pas le paradis perdu. Oui, s’il y a une mélodie dans ce livre, c’est celle du bonheur, d’un bonheur calme, tendre et paisible.</p> <p>Le moulin du village, l’endroit le plus paradisiaque de sa prime enfance, dit-il – un bassin en pierre plein d’eau dans lequel les enfants peuvent se baigner en jouant avec des chambres à air. </p> <p>Au soir tombant, en rentrant au crépuscule, après le portail toujours ouvert, être accueilli par les lumières jaunes aux fenêtres, par une chaleureuse image d’un foyer chaud et lumineux, oui, accueilli par le père ou la mère. Heureux les pacifiques. Un jour, il dit à son petit frère de manger une feuille d’ortie, celui-ci le fait, il ne se passe rien mais l’auteur, ébranlé par cette obéissance aveugle, ne lui fera plus jamais de semblable sale coup.</p> <p>Il écrit aussi qu’au village, il y a peu de classes sociales, que les enfants sont sur une même ligne d’égalité, qu’il n’y a pas de différence entre fils de paysan et fils de notable local. </p> <h3>Le paradis d'avant la Chute</h3> <p>Ce qui importe, c’est de grandir, de bouger, de découvrir, d’aimer, bref de vivre. Oui, en un étonnant coup de maître, Alain Freudiger nous décrit tout simplement sa jouissance à être.</p> <p>Nous ne sommes pas sur le chemin de Damas, il n’y a pas de rédemption, il n’y a pas eu de Chute mais au contraire, conquête de la station verticale. Ce n’est pas l’enfance de tout un chacun. Aux uns, une pente douce, aux autres, des montagnes russes, peu ont eu un rapport aussi harmonieux à leur fratries, peu ont été aussi aimés par leurs parents et moins encore se sentaient les égaux de tous. C’est bien là qu’est le tour de force d’Alain Freudiger. Avec lui, nous sommes dans le paradis de Jérôme Bosch, chez le Breughel de La Chute d’Icare. Mais l’enfer et l’occupation espagnole, cela sera pour une autre fois. Nous sommes dans la campagne romande au début des années 80 et dans les derniers temps heureux de l’histoire de l’humanité. Juste avant l’arrivée massive de la microinformatique, des séries HBO et du réchauffement climatique.</p> <hr /> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1705961015_arpente2.jpg" class="img-responsive img-fluid left " width="200" height="300" /></p> <h4>«Arpenté», Alain Freudiger, Editions La Baconnière, 152 pages.</h4>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'une-enfance-heureuse-a-la-cure-de-pailly-dans-le-gros-de-vaud', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 51, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 6, 'person_id' => (int) 2107, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'tags' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Tag) {} ], 'attachments' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ '*' => true, 'id' => false ], '[dirty]' => [], '[original]' => [], '[virtual]' => [], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [], '[invalid]' => [], '[repository]' => 'Posts' }
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Au début donc, pour l'auteur, tout est sol et rien que sol, sol de l’enfance, sol socle. Il commence par décrire ce sol là où il est le plus dur, la route goudronnée, goudron et gravillons mêlés, son odeur forte, puis il passe au sable, à l’herbe, à la terre sèche ou boueuse, au gravier, au parquet, aux dalles, au tapis, aux couvertures. Oui, il s’agit d’arpenter ce territoire, et ce défilement va se retrouver dans l’écriture et avec le mouvement, ce détachement, cette impression de glisser sur les choses. Il s’agit aussi de prendre conscience de l’immensité de ce qui nous entoure, de la distance entre deux poteaux d’un but de football. </p> <h3>Son style</h3> <p>Plus intéressé par la vérité des sensations, des impressions, des sens, des perceptions que par celle des souvenirs, Alain Freudiger effeuille, effleure, prend son temps, ne brûle pas les étapes et use d’une grande précision dans l’usage du vocabulaire, et de peu de qualificatifs. C’est très fluide et pour ce faire, il n’y a pas de chapitres. Son travail est triple: il parcourt mentalement sa propre mémoire par l’écriture: tous ses lieux, ses maisons, ses chemins, ses bois, ses champs. Ensuite après ce premier jet, il consulte un certain nombre de photographies, non seulement de son enfance mais aussi de la région à cette époque-là, et a quelques discussions avec des proches et des gens qui ont vécu là-bas, non pour vérifier tel ou tel détail mais pour faire sauter des verrous mémoriels, pour s’ouvrir à de nouvelles choses. </p> <h3>Le vocabulaire</h3> <p>L’un des enjeux du livre était d’arriver à une grande précision dans le vocabulaire, pour retrouver ces sensations d’enfant, ces finesses tactiles, olfactives, ces perceptions, ces émotions. 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Néanmoins, le soir, avant d’aller dormir, tout est agité, alors, tous ensemble, ils chantent d’une voix très douce une chanson au pouvoir apaisant:</p> <p><em>Demeure par ta grâce, Avec nous Dieu sauveur!</em></p> <p><em>Quoi que l’Ennemi fasse, Protège notre cœur</em> </p> <h3>Le corps, les mouvements, les seuils</h3> <p>Le corps est bien là et les blessures font partie de la vie de tous les jours. A un moment, il y a la morsure par un chien, la blessure qui pourrit et les croûtes, qui peu à peu se détachent, les ecchymoses, les entailles, le corps griffé par les ronces, le corps qui change de forme après avoir été piqué par un insecte ou par la pointe en silice des orties se plantant comme une aiguille dans l'épiderme. </p> <p>Rien d’aérien ou d’évaporé, il y a incarnation. La dynamique de l’écriture est mouvement car l’auteur est très sensible à l’oralité, au rythme, au côté marcheur. Il accorde une grande importance aussi aux seuils, au fait de les franchir, de passer d’un lieu à l’autre, d’un extérieur à un intérieur, d’un chemin à une route, d’un bois à un pré, de toutes les perceptions et des effets de surprise. </p> <h3>Les animaux et les plantes</h3> <p>Il insiste également sur l’importance des animaux, les abeilles, les chiens, les corneilles, les taupes, les hérissons écrasés au bord de la route, les oies, le dindon qui fait peur, les vaches qui traversent le village, les coccinelles, les chenilles, les vertes et les brunes, les poux, les chevaux, les chèvres, les moutons.</p> <p>Et le champ de maïs avec ses innombrables couloirs qui avancent à l’infini et qui cachent les enfants de tous les regards. Les bottes de paille, le seigle, le blé, l’orge. Et dans les bois, surgit un ruisseau, des branches moussues, le bruit de l’écoulement, doux, calme, léger, persistant, les pissenlits, les marguerites, les pâquerettes, le bouton d’or – simplicité, le platane, le sureau, les peupliers sur la place centrale, le cyprès.</p> <h3>Le côté pop</h3> <p>Le chewing-gum, les Lego, les cigarettes filtres, les jeux électroniques avec leur écran à cristaux liquides, une maquette d’avion. L'auteur, enfant, reconnaît très bien les voitures, sait différencier très tôt une Mini Cooper d’une Alfa Roméo, et il est admiré par les adultes pour cela. Une petite poignée de dessinateurs, cinéastes ou groupes, Agnès Rosenstiehl, Yves Yersin, Etienne Delessert, Jörg Müller, les Forbans ou Téléphone, la télévision – où on la place dans la maison, dans quelle position on se met pour la regarder, son premier film: <i>La Grande Vadrouille</i>. </p> <h3>Les autres enfants</h3> <p>Chacun a son caractère. Chez Yves, les tracteurs, chez les Lenz, l’atelier de réparation de voitures, chez Stéphane, après avoir passé le rideau de lamelles plastiques jaune-verte-rose-brune-orange-turquoise, le tapis doux et la table basse.</p> <h3>Le bonheur</h3> <p>Partout où il y a un chemin à deux sillons, à l’orée d’une forêt, il est chez lui, dit-il. La question du paradis, du bonheur, n’est pas liée à des événements, à une exaltation. C’est un bonheur animiste qui est décrit en termes de lumières, de sons, de sensations, et qui n’a pas vocation à durer, qui ne s’appesantit pas. Un rai de lumière, ses millions de grains de poussière, apportant une vague idée cosmique. </p> <p>Ce bonheur est à l’échelle des choses et des événements, petit. Ce n’est pas le paradis perdu. Oui, s’il y a une mélodie dans ce livre, c’est celle du bonheur, d’un bonheur calme, tendre et paisible.</p> <p>Le moulin du village, l’endroit le plus paradisiaque de sa prime enfance, dit-il – un bassin en pierre plein d’eau dans lequel les enfants peuvent se baigner en jouant avec des chambres à air. </p> <p>Au soir tombant, en rentrant au crépuscule, après le portail toujours ouvert, être accueilli par les lumières jaunes aux fenêtres, par une chaleureuse image d’un foyer chaud et lumineux, oui, accueilli par le père ou la mère. Heureux les pacifiques. Un jour, il dit à son petit frère de manger une feuille d’ortie, celui-ci le fait, il ne se passe rien mais l’auteur, ébranlé par cette obéissance aveugle, ne lui fera plus jamais de semblable sale coup.</p> <p>Il écrit aussi qu’au village, il y a peu de classes sociales, que les enfants sont sur une même ligne d’égalité, qu’il n’y a pas de différence entre fils de paysan et fils de notable local. </p> <h3>Le paradis d'avant la Chute</h3> <p>Ce qui importe, c’est de grandir, de bouger, de découvrir, d’aimer, bref de vivre. Oui, en un étonnant coup de maître, Alain Freudiger nous décrit tout simplement sa jouissance à être.</p> <p>Nous ne sommes pas sur le chemin de Damas, il n’y a pas de rédemption, il n’y a pas eu de Chute mais au contraire, conquête de la station verticale. Ce n’est pas l’enfance de tout un chacun. Aux uns, une pente douce, aux autres, des montagnes russes, peu ont eu un rapport aussi harmonieux à leur fratries, peu ont été aussi aimés par leurs parents et moins encore se sentaient les égaux de tous. C’est bien là qu’est le tour de force d’Alain Freudiger. Avec lui, nous sommes dans le paradis de Jérôme Bosch, chez le Breughel de La Chute d’Icare. Mais l’enfer et l’occupation espagnole, cela sera pour une autre fois. Nous sommes dans la campagne romande au début des années 80 et dans les derniers temps heureux de l’histoire de l’humanité. 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Culture / Une enfance heureuse à la cure de Pailly dans le Gros-de-Vaud
Dans «Arpenté», livre tour de force au niveau du rythme, du mouvement et dans son économie de moyens, Alain Freudiger, en un long traveling à travers ses lieux d’enfance, explore une géographie fondatrice, les expériences qui y prennent corps, et confie l’illumination de la découverte de soi-même et de ses origines.
Yves Tenret
B Article réservé aux abonnés
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Ces formes montrent que l’abstraction n’est pas une invention européenne car elle existait dès le XVIIème siècle en Inde. Flèches, triangles, cercles, rayures, signes elliptiques décrivant les forces de l’univers, l’énergie des saisons, de la mousson, des montagnes et des plaines, le sexe féminin et le sexe masculin, les jeux de séduction des divinités, les points cardinaux d’un monde ésotérique sublimé en un lexique de formes aux significations polyvalentes. Agencement rythmé dans lequel un point peut être le symbole de l’indifférencié absolu contenant la totalité du cosmos et en même temps le transcendant.</p> <h3>Un univers insondable, une boule d'énergie</h3> <p>Nous parlons donc d’œuvres de petite taille, anonymes pour la plupart, faites sur du papier pauvre, d’œuvres aux motifs parfois proches de celles de Mark Rothko ou de Robert Ryman par exemple, et qui ont étés réalisées anonymement par des adeptes au Rajasthan, et qui sont utilisées pour éveiller des états de conscience élargie. Bref, ayant pris son essor, depuis le milieu de notre premier millénaire, l’art tantrique possède tout d’abord, par-delà l’esthétique d’une géométrie ramenée à ses coordonnées les plus pures, une fonction spirituelle: permettre l’éveil de la conscience. Ces peintures sont le fruit de traités religieux manuscrits et illustrés, datant du XVIIème siècle, qui ont été copiés sur plusieurs générations. Comme les musiciens jouant des ragas de la musique classique indienne, les adeptes peignant dans un certain état mental, répètent et réinterprètent à l’infini des structures mélodiques de lignes et de couleurs.</p> <h3>Avant tout et une fois encore, une pratique</h3> <p>La particularité principale de cet art, insiste donc Franck André Jamme, c’est bien qu’il s’agit avant tout d’une pratique. Les œuvres sont faites pour qu’on médite sur elles. L’improvisation est permise, même recommandée. Elles ne sont pas tradition, et encore moins copie mais interprétation. Des vides, de l’air et du souffle. En se focalisant, on saisit que l’on peut voir le monde dans un grain de sable et dans le même mouvement dépasser ce truisme afin d’ouvrir son âme à la plénitude et au pur vide absolu de la déité suprême, aux mantras visibles et invisibles, à la sensuelle beauté, cet attribut fondamental de l’Inde, ce mouvement ascendant d’identification à la divinité.</p> <p> «Par ailleurs, il se pourrait bien, souligne le poète, qu’une espèce d’émulation soit née, petit à petit, comme si les tantrikas jouaient à essayer d’exécuter la plus remarquable peinture possible – car le fait est que souvent ils se connaissent, d’un nid à l’autre, qu’il leur arrive de se communiquer des images, des photos de ce qu’ils ont fait, qu’en somme l’esprit de perfection (on pourrait même peut-être dire: de beauté) s’est mis lui aussi à sérieusement circuler.»</p> <h3>Sur la palette des désirs sèche le pinceau de la vie</h3> <p>Répétons-le: <i>Tantra Song</i> est un poème spatial mais aussi musical en ce sens que chaque pièce est à sa place, à la fois autonome et reliée aux autres par un jeu d’échos et d’harmoniques. Tout y apparaît en surface mais en fait tout y est profondeur. Et en même temps, cela reste ludique, souriant, enfantin, amical.</p> <p>Oui, l’auteur concepteur de ce livre effleure le sujet sans le déflorer et ceci avec une parole à la fois précise et aérée, accessible, parole nous permettant de comprendre ces images, de décrypter le discours qu’elles véhiculent tout en respectant leur insondable part de mystère.</p> <p>Oui, pure vibration du geste, ces petites peintures dévorent les grandes. </p> <p> Citons pour finir Franck André Jamme: «Au fond, personne au monde ne pourra jamais rêver d’une image plus brève, plus concise, comment dire? plus distillée. Divin alcool, en somme, de l’abstraction chauffée à blanc. Plus la conscience est pure, plus le bleu de son ciel est clair. Et voilà tout. Et tout commentaire s’estompe, se perd dans la clarté même de ce ciel.» </p> <hr /> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1703090981_arton459.jpg" class="img-responsive img-fluid left " width="200" height="286" /></p> <h4>«Tantra song, Peintures tantriques du Rajasthan»,<b></b>choisies et présentées par Franck André Jamme, préface de Renaud Ego, L’Atelier contemporain, 160 pages.</h4>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'presque-tout-dans-presque-rien-tantra-song', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 58, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 6, 'person_id' => (int) 2107, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'tags' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Tag) {} ], 'attachments' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ '*' => true, 'id' => false ], '[dirty]' => [], '[original]' => [], '[virtual]' => [], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [], '[invalid]' => [], '[repository]' => 'Posts' }count - [internal], line ?? 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Culture / Presque tout dans presque rien: «Tantra song»
Choisi et présenté par l’homme de lettres Franck André Jamme, le passionnant et très surprenant «Tantra song», publié par les éditions L’Atelier contemporain, accueille des œuvres d’artistes tantristes datant de la fin du XXème et du début du XXIème siècle, peintures qui rappellent de façon époustouflante certaines œuvres de El Lissitzky, de Malevitch ou de Paul Klee.
Yves Tenret
B Article réservé aux abonnés
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Après ça, Tiphaine Rivière a vu le monde complètement différemment. C’était comme une énorme psychanalyse sociale et elle s’est dit: c’est quand même monstrueux que ce livre ne soit pas accessible aux gens qui auraient le plus besoin de le lire, les gens des classes populaires, les gens qui n’ont pas de capital scolaire.</p> <h3>La mise en récit</h3> <p>Jeune enseignant en sciences économiques et sociales dans un lycée de banlieue, Michel Coëtker, propose à sa classe d’essayer de comprendre les déterminismes sociaux.</p> <p>Qu'est-ce qui fait que l'on appartient à une classe sociale? Les lycéens répondent en mentionnant l'argent, ce à quoi leur nouveau prof répond: que nenni, c’est beaucoup plus compliqué que cela! Et il sort de son cartable les 680 pages, les 40 tableaux, les 21 graphiques, les 38 illustrations photographiques et l’index des concepts, de <i>La Distinction - Critique sociale du jugement </i>de Pierre Bourdieu, ouvrage paru en 1979 dans la collection Le sens commun aux Editions de Minuit.</p> <h3>A chacun son style de vie</h3> <p>Les uns vont au théâtre, les autres le vivent. Les uns ont une villa à la mer, les autres, la mer, ils ne l’ont jamais vue. Vous pensez que tous les goûts sont dans la nature, que chacun a son goût et que des goûts et des couleurs on ne discute pas. Mais pas du tout, nous dit Bourdieu. Pour lui, toutes ces assertions sont mensongères. Chacun a et n’a que les goûts de sa classe sociale. Chacun déploie des stratégies de distinction propres au milieu par lequel il veut être reconnu </p> <p>La dimension symbolique du social ne reflète pas seulement les inégalités mais contribue à les reproduire.</p> <p>Le beau n’est pas un concept <em>a priori</em>, il dépend de notre position de classe. Selon que l’on a fait telles études, on pratique tel sport, on consomme tels aliments et l’on s’habille de telle façon. Les manières de sentir, de penser, de décorer sa maison, de faire du sport, de voter, de cuisiner, de s’amuser, bref l’habitus, qui fait que chacun désire ce qu’il est en mesure d’obtenir et rien d’autre que cela.</p> <p>Prétendre ne pas aimer ce qu’on ne peut pas avoir est là l’un des concepts centraux de cette démonstration. On intériorise les contraintes, et l’idée du goût est typiquement bourgeoise car elle suppose une liberté absolue de choix. 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A 14 ans, j’ai quitté la campagne, et à Rennes, au début, restant très en retrait des autres, j’ai observé les manières de parler de mes camarades, de rire, leurs rapports aux filles. La première fois que je suis allé chez un copain, tout m’a surpris, il n’y avait pas de télévision mais des livres, sa mère portait des souliers fins et elle était mince. Chez mes parents, on mange la bouche ouverte, sur des nappes à carreaux, on a des rires gras, on parle fort, on est timide face au maire ou au médecin. Ça sonne. Les lycéens sont sidérés. Leur prof vient de chez les pauvres. Aucun ne bouge. Il a gagné la troisième manche!</p> <h3>L'art moderne</h3> <p>D’après Pierre Bourdieu, l’art moderne n’est pas fait pour les prolétaires. Mais pas pour les bourgeois non plus. L’art moderne est une manifestation d’autonomie des artistes et des intellectuels. Les grands bourgeois veulent reproduire le système, les artistes et les intellectuels veulent le transformer. 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A 14 ans, j’ai quitté la campagne, et à Rennes, au début, restant très en retrait des autres, j’ai observé les manières de parler de mes camarades, de rire, leurs rapports aux filles. La première fois que je suis allé chez un copain, tout m’a surpris, il n’y avait pas de télévision mais des livres, sa mère portait des souliers fins et elle était mince. Chez mes parents, on mange la bouche ouverte, sur des nappes à carreaux, on a des rires gras, on parle fort, on est timide face au maire ou au médecin. Ça sonne. Les lycéens sont sidérés. Leur prof vient de chez les pauvres. Aucun ne bouge. Il a gagné la troisième manche!</p> <h3>L'art moderne</h3> <p>D’après Pierre Bourdieu, l’art moderne n’est pas fait pour les prolétaires. Mais pas pour les bourgeois non plus. L’art moderne est une manifestation d’autonomie des artistes et des intellectuels. Les grands bourgeois veulent reproduire le système, les artistes et les intellectuels veulent le transformer. 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Culture / «La culture, c’est ce qui reste quand on a tout oublié»: Pierre Bourdieu revisité par la bande dessinée
Après avoir, dans des formats et sur des supports divers, pas mal exploré l’infini domaine de la bêtise, la quadragénaire Tiphaine Rivière décide d’orienter, à présent, sa focale du côté de l’intelligence en s’emparant du classique de Pierre Bourdieu, «La Distinction», dont elle propose une vive relecture libre, impertinente et allègre.
Yves Tenret
B Article réservé aux abonnés
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Pour lui, la question ne se pose pas. L’art brut, ce n’est ni le Vatican ni Al-Azhar, dit-il. Il n’y a pas une haute autorité qui puisse trancher. La collection s’est constituée empiriquement. Et quand d’autres objets apparaissent, on les intègre dans cette collection et la définition de celle-ci change.</p> <p>Bref, la photo brute réunit des prises de vue, des tirages, des photomontages, des photocollages, réalisés par des auteurs autodidactes, produits en dehors des circuits artistiques conventionnels, dans un cadre asilaire ou dans la solitude et la marginalité. 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Pour lui, la question ne se pose pas. L’art brut, ce n’est ni le Vatican ni Al-Azhar, dit-il. Il n’y a pas une haute autorité qui puisse trancher. La collection s’est constituée empiriquement. Et quand d’autres objets apparaissent, on les intègre dans cette collection et la définition de celle-ci change.</p> <p>Bref, la photo brute réunit des prises de vue, des tirages, des photomontages, des photocollages, réalisés par des auteurs autodidactes, produits en dehors des circuits artistiques conventionnels, dans un cadre asilaire ou dans la solitude et la marginalité. 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Les éphémères peintures corporelles, toujours associées à des fêtes, des cérémonies, des pratiques magiques, nous font pénétrer dans le domaine du sacré, c’est-à-dire de la transgression rituelle des tabous.</p> <p>Ses marques corporelles signifiaient l’inclusion, l’appartenance au groupe. Avec l’arrivée des Etats centralisés, elle vont devenir la marque de l’exclusion.</p> <p>Pensez à ce sujet à l’extraordinaire nouvelle <i>La colonie pénitentiaire</i> de Franz Kafka.</p> <h3>Le corps sauvage</h3> <p>En bandant son biceps, le marin gonfle les voiles de la caravelle tatouée sur son bras. L’image fluctuant au gré des dilatations musculaires ne peut pas ne pas évoquer la tumescence. 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Joseph Beuys se passe le visage à la dorure. </p> <p>Mais c’est avec l'actionnisme viennois, dans les années 60, que les valeurs humanistes sont le plus intensément violées: exhibition d’anus, de parties génitales, masturbation, défécation, miction, agneaux éventrés, porcs crucifiés, artistes se maculant d’entrailles, de sang et d’excréments, corps souillés, agressés, mutilés, autocastration.</p> <h3>Le punk et le tatouage</h3> <p>L’esthétique punk se distingue de toutes les modes occidentales antérieures par le fait qu’elle se passe de toute justification naturaliste. L’accoutrement punk se donne comme un attentat délibéré aux détermination anatomiques et à l’hygiénisme corporel. Le corps punk évoque le corps primitif. 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Culture / Art brut, trois publications inédites
Lucienne Peiry qui a dirigé la Collection de l’Art Brut à Lausanne durant dix années, de 2001 à 2011, nous livre, chez l’éditeur L’Atelier contemporain, un recueil inédit de tous les écrits théoriques, monographiques et de la correspondance de Jean Dubuffet concernant l’art brut.
Yves Tenret
B Article réservé aux abonnés
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Culture / Camus est-il vraiment celui que l'on croit?
Neuf millions d'exemplaires de «L’Etranger» (traduit en soixante-dix langues) et quatre millions sept cent mille exemplaires de «La Peste» ont été à ce jour vendus en France. Editorialistes ou hommes politiques, tous revendiquent l’héritage d’Albert Camus, l’auteur français le plus lu dans le monde. Est-il vraiment le saint laïc dont tous se réclament? Non, non et non, avance Olivier Gloag.
Yves Tenret
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