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Yves Tenret
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Le 6 février, elle est arrêtée rue Champollion. Elle n’a pas répondu à une convocation parce qu’elle ne l’a pas reçue. On lui demande de rédiger elle-même sa déclaration. «Je vis avec un Américain marié. Je me pique à l’héroïne. Etc». Le 19 février, elle est soumise à un examen médico-psychologique. Elle ne répond plus aux convocations suivantes.</p> <p>Le 27 novembre 1953, Kaki passe au domicile de sa famille pour voir sa fille qui a deux ans et demi. Elle plaisante, rit et joue avec elle. C’est inhabituel. Boris et elle ont arrêté l’héroïne et compensent en buvant mais sans exagération. Ils vivent avec l’argent que ses parents à lui envoient tous les mois. Après, ils vont voir Patrick Straram qui vient de sortir de l’hôpital psychiatrique de Ville-Evrard et Riquet, le petit frère de Kaki. Elle a apporté des concombres et du caviar. Tout le monde est gai. Vers minuit, ils retrouvent Daniel et Marguerite, son autre frère et sa sœur, les quatre enfants Harispe sont réunis. 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Ses parents étant juifs, communistes et résistants, il a vécu de 6 à 11 ans loin d’eux. </p> <p>En 1952, il va rendre visite à Debord à l’hôtel où celui-ci habite et le futur situationniste lui ouvre sa porte vêtu d’une robe de chambre bordeaux. Une robe de chambre! La honte…</p> <h3>Centre d’observation et de rééducation de Chevilly-Larue</h3> <p>Institution centrale dans notre histoire tenue par de sinistres religieuses qui, à leur arrivée, vérifient la virginité des filles en leur enfonçant, de dos, un doigt dans le vagin. Si les filles protestent, elles leur tapent le front sur le bord d’un lavabo.</p> <p>Les premiers jours, Sarah Abouaf y vomit souvent parce qu’elle n’a pas l’habitude de manger à heures régulières et en quantité normale. Ses dessins sont précis. «Quand les Allemands ont emmené maman» est le titre de l’un d’eux. Un autre représente une petite pièce sans fenêtre avec comme légende «A Chevilly, je pleure». Elle y passera cinq mois. Ensuite, elle sera envoyée dans un «home» à Strasbourg.</p> <p>Le 28 mars 1952, Louis Papaï, ivre, estimant que le ménage est mal fait, bat sa fille. Elle a seize ans. Elle s’enfuit. Le 7 avril, elle se fait embarquer par la maréchaussée et se retrouve aussi à Chevilly.</p> <p>Sarah et Eliane ne font aucune faute quand elles écrivent. Que l’une veuille devenir photographe et l’autre chirurgienne sidère les bonnes sœurs. Le psychiatre, en revanche, s'inquiète des périodes d'excitations sexuelles prémenstruelles d'Eliane. Ce qui est signe de bonne santé pour les garçons, pour les filles est péché. Eliane a de fréquents fous rires. Selon le thérapeute, ils proviennent du choc qu’elle a subi à 14 ans, quand elle a dû s’occuper toute seule de la toilette mortuaire de sa mère. 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Elle est définitivement partie avec Jean-Louis Brau.</p> <h3>Debord et les moineaux</h3> <p>Au printemps 1953, Debord fait «une tentative de suicide réussie ratée» (Mension) puis revient ensuite fréquemment dans ses différentes productions, notamment dans son album <i>Mémoires</i> publié en 1958, dans son film <i>In girum imus nocte et consumimur igni</i> en 1978 et dans <i>Panégyrique, tome second</i>, publié en 1997. </p> <p>Eh oui, après avoir passé 18 mois avec eux et les avoir ensuite rejetés avec mépris, il va les louer dans ses écrits, ses collages et ses films et c’est donc sans doute pour cela que le titre de ce livre est l’une de ses phrases.</p> <hr /> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1732723327_61bylcohbl._sx195_.jpg" class="img-responsive img-fluid left " width="200" height="303" /></p> <h4>«La désinvolture est une bien belle chose», Philippe Jaenada, Mialet-Barrault Editeurs, 496 pages.</h4>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'enquete-sur-un-suicide-dans-la-mouvance-internationale-lettriste', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 45, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 6, 'person_id' => (int) 2107, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'tags' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Tag) {} ], 'attachments' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ '*' => true, 'id' => false ], '[dirty]' => [], '[original]' => [], '[virtual]' => [], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [], '[invalid]' => [], '[repository]' => 'Posts' }count - [internal], line ?? 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Culture / Enquête sur un suicide dans la mouvance internationale lettriste
Dans son dernier opus, «La désinvolture est une bien belle chose», Philippe Jaenada mène une enquête sur le suicide de Jacqueline Harispe, dite Kaki, jeune femme libre, intelligente, entourée d'amis et amoureuse d'un beau soldat américain, ayant été mannequin chez Dior, et qui, après une soirée arrosée, s’est jetée par la fenêtre d’un hôtel et s’est écrasée sur un trottoir. Un petit morceau de culotte noire sur la balustrade l’attestant, son amant a tenté de la retenir.
Yves Tenret
B Article réservé aux abonnés
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Donc tout un chacun coïte dès 16-17 ans et s’en cache. C’est <i>hchouma</i> (la honte) et on risque la <i>hogra</i> (l’exclusion). Le garçon qui ne doit jamais avoir peur, ne jamais pleurer, être romantique ou mielleux, vit en général sa première expérience sexuelle avec une prostituée. Ensuite, pour se marier, il doit prouver sa capacité financière. S’il croise les jambes, traîne avec les filles, rit de façon aiguë, porte des habits colorés et n’est pas agressif, on le traitera de <i>bnita</i> (fillette), de <em>3niba</em> (petit raisin), de <em>loubya</em> (petit haricot) et d’<i>attaï</i> (qui se donne). Et de la jeune femme qui a perdu sa virginité, qualifiée de perforée, pourrie et puante, on dit <em><i>17em moujoud</i></em>, y a de la viande à profusion, ou <em><i>Iguezzar mechdou</i></em>, la boucherie est fermée. Un iman tangérois, en 2012, a émis une fatwa autorisant les femmes à se masturber avec des objets pour éviter les relations extra maritales. 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Culture / Vœux pieux
En ces temps de fortes tensions raciales, il nous semble plus salutaire que jamais d’essayer de nous défaire des idées toutes faites, des stéréotypes qu’on nous a inculqués, d’apprendre à connaître l’autre, à ne pas l’essentialiser et à aimer la différence pour ce qu’elle est. Pour ce faire, nous avons lu «Amour: révolutionner l’amour grâce à la sagesse arabe et/ou musulmane» de Jamal Ouazzani.
Yves Tenret
B Article réservé aux abonnés
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Du coup, il rencontre de nombreux artistes tel Marcel Duchamp ou Andy Warhol et écrit le premier article en français sur le minimalisme américain.</p> <h3>Les années<i> Robho</i> </h3> <p>Avec le performeur Julien Blaine, en 1966, il fonde la revue <i>Robho</i>, périodique qui tout en relayant des pratiques artistiques n’en dénonce pas moins les excès de la société du spectacle. </p> <p>Dans les écrits qu’il consacre à l’art optique, l’art du mouvement, l’art-événement et l’art-environnement, il utilise un vocabulaire étendu de la description et fait preuve d’une observation minutieuse et aiguë. </p> <p>Il se montre grand défenseur de Jesús Rafael Soto, le destructeur méthodique de toute forme stable, de toute forme figée. Dorénavant, toute évaluation vivante du réel doit englober des données comme l’espace-temps, la transformabilité permanente des choses, la fluidité et la ductilité des phénomènes naturels, le caractère corpusculaire et ondulatoire de la matière énergie.</p> <p>C’est Clay qui trouve l’appellation <i>Pénétrable</i> pour l’œuvre de 400 m<sup>2</sup> accrochée entre les deux ailes du Palais de Chaillot: une pluie faite de milliers de fils de nylon suspendus provoquant, d’après lui, ivresse et joie chez le spectateur.</p> <p>La peinture est finie, dit-il, et cette intuition, on pouvait déjà la pressentir dans les formes rongées de Rembrandt, vaporeuses de Watteau, noyées de Turner. Dès 1960, Allan Kaprow a proposé l’abandon de l’idée de permanence et l’utilisation de matériaux de la vie de tous les jours.</p> <p>Chaque individu, passif et actif, doit devenir partie intégrante de l’œuvre, spectateur et acteur. 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Du coup, il rencontre de nombreux artistes tel Marcel Duchamp ou Andy Warhol et écrit le premier article en français sur le minimalisme américain.</p> <h3>Les années<i> Robho</i> </h3> <p>Avec le performeur Julien Blaine, en 1966, il fonde la revue <i>Robho</i>, périodique qui tout en relayant des pratiques artistiques n’en dénonce pas moins les excès de la société du spectacle. </p> <p>Dans les écrits qu’il consacre à l’art optique, l’art du mouvement, l’art-événement et l’art-environnement, il utilise un vocabulaire étendu de la description et fait preuve d’une observation minutieuse et aiguë. </p> <p>Il se montre grand défenseur de Jesús Rafael Soto, le destructeur méthodique de toute forme stable, de toute forme figée. 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Culture / D'Edouard Manet à Robert Ryman et vice-versa
Remarquable et passionnant, «Atopiques. De Manet à Ryman», de Jean Clay, qui vient de paraître à L’Atelier contemporain, nous fait revivre le rapport de la génération mai 68 avec les pratiques artistiques les plus avancées de l’époque.
Yves Tenret
B Article réservé aux abonnés
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A Francfort, des universitaires, dont Adorno, ayant bloqué la candidature de Günther Stern, le couple déménage à Berlin où Günther contacte Bertolt Brecht, qui le recommande à un quotidien dont il devient, sous le pseudonyme de Gustave Anders, l’homme à tout faire et à tout écrire.</p> <h3>Hitler chancelier</h3> <p>Le 30 janvier 1933, Hitler est nommé chancelier de la République allemande. Le 27 février a lieu l'incendie du Reichstag. Aussitôt toutes les libertés civiles et politiques sont suspendues. 4'000 personnes sont arrêtées. Hannah Arendt entre résolument en politique et décide d’aider les persécutés. En juillet 1933, sa mère et elle sont arrêtées. Sa mère est relâchée rapidement et elle, huit jours plus tard. Elles sont accueillies ensuite par une amie à Genève où Hannah travaillera pendant deux mois à la SDN avant de partir pour Paris.</p> <h3>Paris, capitale des Années folles</h3> <p>Sa mère, jeune, a passé trois ans à Paris et y a toujours des amis. 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Culture / Hannah Arendt et les parias à Paris
Au Danemark, lors d’une remise de prix, Hannah Arendt (1906-1975) déclara que, née et élevée en Allemagne, elle avait vécu ensuite huit années heureuses en France; pour éclairer cette surprenante déclaration les 500 pages du livre de Marina Touilliez ne sont pas de trop. «Parias» est un livre sur l’amitié et sur l’amour. On y rencontre Günther Stern (Günther Anders), Heinrich Blücher, Walter Benjamin, Dora Benjamin, Fränkel et Rudolph Neumann, Chanan et Lotte Klenbort, Eric et Herta Cohn-Bendit, Lisa Fittko, Fritz Lieb, Arthur Koestler, Daphné Hardy et deux, trois encore.
Yves Tenret
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Une fois le combat du metteur en scène mené et remporté, c’est un culte du réalisateur-démiurge qui s’impose, une sacralisation de l’art au mépris de l’éthique et du droit, et un cinéma et une cinéphilie au masculin singulier, exaltant les tourments intérieurs de leurs héros, tourments maintes et maintes fois invoqués pour cautionner, justifier ou excuser les pires maltraitances à l’égard de très jeunes actrices.</p> <h3>Les journaux nous en parlent tous les jours</h3> <p>Le reportage sur Gérard Depardieu en Corée a eu un écho énorme.</p> <p>A-t-on le droit d’organiser un viol pour les besoins d’une scène dans un film? La cinéaste Catherine Breillat aurait fabriqué une scène de sexe oral non simulée sans prévenir son actrice qu’un inconnu allait introduire sa langue dans son sexe, puis tenter de la sodomiser, lors du tournage de <i>Romance</i>. C’est l’accusation que porte aujourd’hui la comédienne Caroline Ducey dans un récit intitulé <i>la Prédation</i>.</p> <p>Julie Delpy, sexuellement harcelée par certains réalisateurs français, raconte qu’à l’époque où elle a débuté, une jeune fille de 12 ans en couple avec un metteur en scène de 50 ans était une chose normale. Adèle Haenel débute à 12 ans dans <i>Les Diables</i> de Christophe Ruggia. Geneviève Sellier cite une douzaine de comédiennes dans le même cas, telle qu’Ariel Besse ou Judith Godrèche.</p> <p>Et dans le <i>turnover</i> de jeunes actrices que l’on jette après usage, un cas, entre tous, est emblématique, celui de Maria Schneider dans <i>Le Dernier Tango à Paris </i>en 1972.</p> <p>Séduire, modeler de très jeunes actrices et en abuser, être un Pygmalion, le schéma perdure donc depuis plus de 60 ans, avec des cinéastes nés dans les années 40, tels Jacques Doillon, Benoît Jacquot ou Philippe Garrel; dans les années 50 avec Olivier Assayas et Bruno Dumont; dans les années 60, avec Arnaud Desplechin, Leos Carax, Mathieu Amalric; et encore dans les années 70 avec Christophe Honoré et Emmanuel Mouret.</p> <p>Dans un film, Doillon se phantasme en Rodin, Jacquot en Marquis de Sade, Constant en Casanova! Et tous en soi-disant victimes des femmes.</p> <h3>Films subventionnés et entre-soi</h3> <p>Le cinéma d’auteur oppose l’individu, le mâle qui pense, qui écrit et qui crée, à sa compagne qui, elle, se gave de feuilletons télévisuels sentimentaux.</p> <p>Dans ce cinéma, les femmes sont lycéenne, étudiante ou prostituée. Les rares fois où elles exercent un métier, il est tourné en dérision. </p> <p><i>Fin août début septembre</i> d’Olivier Assayas est typique de cela: la vie du créateur est une longue souffrance, le péril qui le guette est l’intégration sociale et les femmes qui essayent de l’y attirer. 200'000 entrées seulement malgré les critiques élogieuses. Philippe Garrel, lui, n’a jamais eu plus de 95'000 entrées, et dans <i>L’Amant d’un jour</i>, il proclame que si les professeurs d’université couchent avec leurs étudiantes, c’est parce que celles-ci leur sautent dessus.</p> <p>Dans <i>Les Fantômes d’Ismaël</i> d’Arnaud Desplechin, le héros est un cinéaste, incarné par Mathieu Amalric, alcoolique et colérique, que toutes les femmes s’arrachent et en particulier des stars telles que Marion Cotillard ou Charlotte Gainsbourg.</p> <p>Benoît Jacquot s’est vanté publiquement de s’être <em>payé</em> une fille de 15 ans alors qu’il en avait 40. </p> <p>Pendant le tournage de <i>La Fille de quinze ans</i>, Jacques Doillon, 45 ans, pelote quarante-cinq fois de suite Judith Godrèche qui en a 15 et ceci en présence, sur le plateau, de sa compagne d’alors, Jane Birkin.</p> <h3>Le cinéma des hommes</h3> <p>Bref, nous dit l’autrice, les études de cinéma doivent devenir critiques, doivent tenir compte du genre, de la classe et de la race, et non pas être d’éternelles exégèses de phantasmes de cinéastes intronisés «auteur», de cinéastes qui dénient le poids du social et ceci grâce à un système d’aides qui leur permet d’échapper aux déterminismes économiques.</p> <p>L’autrice précise bien que le nombre d’entrées n’est pas son critère dominant, néanmoins, elle insiste à plusieurs reprises sur la proximité des cinéastes avec les critiques, avec les décideurs de la commission d’avance sur recettes et les animateurs des émissions spécialisées de radio du service public. Système qui pousse à produire, d’après elle, trop de films, un tiers des films français ayant réuni moins de 20'000 spectateurs en 2019, contre un quart en 2009.</p> <h3>Le cinéma des femmes</h3> <p>Soixante-trois réalisatrices françaises sont recensées sur une page Wikipédia et cela est unique au monde: Coline Serreau, Diane Kurys, Claire Denis, Nicole Garcia, etc. Oui, ça n’existe nulle part ailleurs. </p> <p>Depuis les années 1990, un bonus de 15% est accordé par le CNC (Centre National du Cinéma) pour les équipes paritaires. Le pourcentage de films tournés par des femmes s'élève à 40% en 2024. Néanmoins, l’accès aux gros budgets, qui conditionnent la visibilité des films pour le grand public, leur reste impossible.</p> <h3>Une nouvelle génération aux accents féministes assumés</h3> <p>Depuis les années 2000, des premiers films de réalisatrices portent un regard acéré sur les discriminations, harcèlements, agressions que subissent les femmes, genre <i>Baise-moi</i> de Virginie Despentes ou <i>Naissance des pieuvres</i> de Céline Sciamma. Mais le poids de la domination masculine dans le milieu du cinéma a pour conséquence que les films suivants perdent souvent leur acuité dans la critique des discriminations genrées. </p> <p>Valérie Donzelli, dans <i>L’Amour et les Forêts</i>, en 2023, traite des violences conjugales et de l’emprise avec l’espoir de permettre aux femmes qui y sont soumises de s’y soustraire.</p> <p>Le récent<i> Anatomie d’une chute</i> de Justine Triet se distingue par la maitrise de son écriture qui a nécessité quarante-deux semaines de montage. C’est l’homme, le mari, qui, suite à diverses péripéties, y est en charge du <i>care</i> et Sandra, l’épouse, qui multiplie les rencontres sexuelles. </p> <p>Alors que chez un réalisateur comme Abdellatif Kechiche, lors des scènes de sexe on voit tout, nous dit Geneviève Sellier, on ne ressent rien; chez les réalisatrices, on ne voit pas grand-chose, mais on ressent tout. </p> <h3>Le cinéma du <em>milieu</em></h3> <p>Le film social souffre en France de dramatisation abusive. Il est souvent caricatural. N’est pas Ken Loach qui veut. On retrouve donc ici et aujourd’hui le débat qui existait entre les revues <i>Positif</i> (1952) et <i>Les</i> <i>Cahiers du Cinéma</i> (1951). Vu bien sûr, à présent, à l’aune d’un regard féministe mais pas seulement. Il peut même sembler que l’entre-soi élitiste des cinéastes et critiques du cinéma d’auteur, ne vivant principalement que de subventions, soit encore plus nocif que la misogynie crasse et le paternalisme inusable régnant dans ce petit milieu consanguin. L’autrice défend l’aspect sociologique qui déplait tant à la critique cinéphilique. Par exemple les films de Jaoui-Bacri, le cinéma du «milieu».</p> <p>Un film avec des acteurs professionnels et des acteurs non-professionnels, c’est bien, écrit-elle. Cela donne de la «saveur» au film. Et si ça se passe en province, c’est encore mieux.</p> <p>La plupart des films de réalisatrices relèvent donc de ce cinéma du «milieu», se situant entre le cinéma commercial et celui d’auteur, avec une volonté de sortir de l’entre-soi. Côté travail, <i>Vénus Beauté (Institut)</i> de Tonie Marshall prend au sérieux les clients et les employées d’un institut de beauté. Autre thématique absente du cinéma masculin: dans <i>Le Lait de la tendresse humaine,</i> de Dominique Cabrera, film sur le «baby blues», la maternité. Blandine Lenoir, dans <i>Aurore</i>, traite, elle, de la ménopause. <i>La Pupille</i>, de Jeanne Herry, décrit la prise en charge des enfants nés sous X. Rebecca Zlotowski, dans <i>Les Enfants des autres,</i> donne une version positive de la garde alternée et de la belle-mère. Catherine Corsini, dans <i>La Fracture</i>, rend compte du mouvement des Gilets jaunes et de la crise de l’hôpital public, en écho direct aux événements de 2019 à La Pitié-Salpêtrière, une réussite qui s’apparente justement aux meilleurs œuvres de Ken Loach. </p> <h3>La France, pays de l'impunité artistique</h3> <p>En France, si l’antisémitisme ou le racisme ne sont plus acceptés, la violence contre les femmes continue à être banalisée, voire valorisée. </p> <p>En se débarrassant de la monarchie, la France a inventé le culte laïc du génie, l’écrivain romantique qui doit lutter contre la femme qui peut le priver de son autonomie artistique car du fait de son aliénation aux fonctions reproductives, celle-ci ne peut accéder au ciel des idées. </p> <h3>Aujourd'hui</h3> <p>Voilà donc la tâche qui s’impose à présent: revisiter – sans forcément les renier entièrement – les admirations qui nous ont construits, en ouvrant les yeux sur les abus de pouvoir que nos «grands hommes» pratiquaient au nom de l’Art. Et en s’efforçant de ne pas les perpétuer ni de les cautionner.</p> <p>Au lieu de s’attendrir sur la «douleur» de l’homme violent, d’en faire une excuse, clamer une nouvelle volonté de prendre plutôt en compte la douleur des femmes qui l’accusent.</p> <p>La bulle de rêve et de nostalgie doit voler en éclats et il faut en finir avec ce raisonnement pour le moins déconcertant selon lequel, si on refusait les abus de pouvoir, si on arrêtait de faire des blagues racistes ou sexistes, la vie deviendrait sinistre et le rire disparaitrait à tout jamais.</p> <p>On nous répète que cela serait attentatoire à la liberté de créer. Naïvement, on a envie de demander: pourquoi? Pourquoi ne pourrait-on pas garder la liberté, l’exubérance, la fantaisie, tout en s’assurant que cette liberté est bien la liberté de tout le monde, et en étant attentifs aux rapports de pouvoir, et en refusant d’infliger ou de tolérer des violences, réelles ou symboliques, sexuelles, physiques ou psychologiques?</p> <hr /> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1726136078_gs.jpeg" class="img-responsive img-fluid left " width="200" height="315" /></p> <h4>«Le culte de l’auteur. 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Culture / Les dérives du cinéma français
En prônant un cinéma d’auteur, François Truffaut visait à défendre le metteur en scène face à des puissances rivales – les scénaristes, les acteurs et les producteurs, nous explique Geneviève Sellier dans «Le culte de l’auteur. Les dérives du cinéma français» qui vient de paraître aux éditions La Fabrique. Une défense absolue qui ouvre la voie aux scandales émaillant aujourd'hui la chronique du cinéma français.
Yves Tenret
B Article réservé aux abonnés
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D’où cette épopée, récit d’un tête à tête mortifère et tour de force réalisé au stylo Bic quatre couleurs. Entre canapé et lit, la vie d’un couple et la naissance de deux enfants non désirés par leur génitrice avec donc, en filigrane, du début à la fin de cette aventure, la question de l’avortement.</p> <p>Quoi d’autre? Rien. Ou si peu. Au début, les salles de classe, ensuite, les lieux de travail, les parcs pour enfants et elle, notre artiste, qui, perpétuellement, n’ose pas ceci ou cela. Peu d’extérieur et tout à l’intérieur d’un appartement, quand ce n’est pas dans le sexe ou la matrice de la narratrice.</p> <h3>Les débuts, les Beaux-Arts, Stéphane</h3> <p>La narratrice a dix-huit ans et sa mère, catholique militante, lui prend sans cesse la tête avec l’avortement. Elle, rebelle, annonce à celle-ci qu’elle ne croit plus en Dieu. Mais cette rupture n’étant pas facile à vivre, doutant d’elle-même, isolée, pour ne pas trop déprimer, elle se met à dessiner jours et nuits. </p> <p>Aux Beaux-Arts de Nantes, où elle entre sans difficulté et se sent bien, son travail étant apprécié par les enseignants, elle découvre les dernières nouveautés de l’époque, Internet et les jeux vidéo, ainsi qu’un condisciple, Stéphane, chez qui elle aime tout: chanteur dans un groupe de rock et fumeur de joints, Stéphane se dit d’extrême gauche, et, très vite, la narratrice va s'installer chez lui.</p> <p>Mais lui, la jugeant trop introvertie, se dessine avec une hache brandie très haut, hache qu’il aimerait abattre sur son bunker caractériel pour le faire exploser. Comment peut-il ne pas sentir que ce dont elle a besoin, c’est de douceur et non de violence? Chacun de leurs rapports sexuels est un viol et elle, en silence, souffre. Jusqu’à en vomir. Quand, enfin, elle parvient à le lui dire et à le supplier d’y aller plus doucement, contre toute attente, il rit: à ses yeux, faire mal, c’est être viril et c’est super bien.</p> <h3>Il la façonne</h3> <p>Aux Beaux-Arts, où ils suivent tous deux les classes de dessin et de peinture, elle est bonne et lui mauvais. Il toise les profs avec mépris; elle, marchant sur des œufs, n’ose pas lui avouer qu’elle pense qu’ils ont raison. Il dessine passablement mais ses personnages sont bizarres, surtout leur regard, toujours rigide et froid. Bref, ce mâle la sculpte, la façonne, lui reproche ses fréquentations, ses goûts musicaux, sa famille, lui présente ses amis, tous des hommes.</p> <p>Son père étant mort, Stéphane bénéficie d’une bourse et ses études sont payées. Elle a dû contracter un emprunt et à contrecœur, travaille à la caisse d’une supérette le vendredi soir et le samedi: elle veut être indépendante. </p> <p>Quand elle veut coïter, il ne veut pas, mais si quand lui veut, elle ne veut pas, il boude et ça, pauvrette, elle ne le supporte pas. </p> <p>En 1999, grand événement entre tous, Internet arrive chez eux.</p> <p>Rejeté par son groupe de rock, Stéphane l’est aussi par l’école où il n’obtient pas son diplôme. Rancunier, attribuant la faute aux autres, cela ne le pousse malheureusement pas à se remettre en question. Ayant perdu sa bourse, ce glandeur joue à la victime et devient hyper jaloux. Elle n’a plus le droit de parler avec un autre homme. Ils passent ainsi un an repliés sur eux-mêmes principalement adonnés à leur permanente addiction à la beuh.</p> <h3>Les jeux vidéos et leur premier enfant</h3> <p>Heureusement, la narratrice finit par être engagée par une boîte parisienne de jeux vidéo. Elle peut s’extirper un temps de ce marasme de fumeurs de joints. Et bien sûr, ça lui plait de fréquenter d’autres gens que le pesant Stéphane. Le fait que son travail soit très apprécié la gratifie aussi beaucoup. Néanmoins, elle retourne tous les week-ends à Nantes, continue à payer le loyer, pendant que lui, n’ayant aucun projet à part celui de se plaindre tout le temps, n’en branle toujours pas une. Elle rêve de le quitter mais, horreur au carré, elle se retrouve enceinte. Avorter? Le vieux credo maternel le lui interdit. Prise au piège, elle loue un petit appartement à Paris, et y emmène un Stéphane amorphe, tellement défoncé qu’il en est devenu parano et s’imagine que les RG le suivent. Lui? Quelle bonne blague!</p> <p>L’échographie leur apprend que c’est un garçon qu’elle attend. Oui, elle va générer son futur propre oppresseur. Stéphane lui répète que dans sa boite, s’ils l’ont engagée, c’est parce qu’elle est une femme. Elle en est estomaquée: ce jean-foutre est vraiment misogyne.</p> <p>Elle le fait embaucher pour faire des recherches de personnages. Se retrouvant sa supérieure, elle dirige son travail. Hélas, deux mois plus tard, jugé trop mauvais par la direction, Stéphane est renvoyé.</p> <h3>Alain Soral</h3> <p>A défaut d’avoir une vie, il s’invente des exploits extraordinaires, s’intoxique à Internet et commence à suivre Alain Soral, l’idéologue antisémite exilé à Lausanne. Devenu crypto nazi et masculiniste, portant en étendard un pénis et ses bourses pendantes, il va, de plus en plus et à l’infini, fantasmer tanks, croix gammées, fusils, haches, couteaux et, tout cela, en consommant, de façon paradoxale, force herbe ou pâte qui se fument.</p> <p>Il la harangue: la Shoah a été inventée, Big Pharma et les Juifs, agents du Nouvel Ordre Mondial, veulent asservir les Français...</p> <h3>Les enfants</h3> <p>A la maternité, où Stéphane arrive complètement défoncé, les choses ne se passent pas bien. Le docteur la charcute. Résultat: elle reste tout un long mois allongée, ne pouvant pas marcher tant la douleur est atroce. Stéphane s’en fout, ce qu’il veut lui, c’est sa dose de chair fraiche. Evidemment de tous les possibles, elle, c’est celui qu’elle désire le moins, mais lui insiste tellement qu’elle cède.</p> <p>Ecœurée, elle envisage de tout quitter, de se barrer ou même de se suicider. Seulement, il y a le bébé et il faut quelqu’un pour s’en occuper. Tournant follement en rond, elle finit par essayer de le changer lui, l’encourage à se reprendre en main et, par exemple, à réaliser une BD. Il acquiesce, la réalise mais aucun éditeur ne s’y intéresse. Après ça, toujours plus aigri, son ressentiment vis-à-vis des femmes décuple: celles-ci, inaptes à la politique et à la culture, doivent impérativement rester au foyer.</p> <h3>Retour à Nantes</h3> <p>La narratrice est à nouveau enceinte. La famille retourne à Nantes où Stéphane bosse comme serveur. Illustratrice, invitée au salon du livre, elle va mieux. Mais lui avec ses colères, ses insatiables besoins sexuels et ses constantes diatribes sur les <i>journalopes</i>, les <i>féminazies</i>, les <em>bougnoules</em> et les <em>tantouzes</em>, plombe tout. </p> <p>A part apprendre l’allemand, il ne fait plus que deux choses: la cuisine et offrir des armes aux gosses, à chacun de leurs anniversaires. Puis, désireux de privilégier le corps contre l’esprit, il se lance dans une formation de maçon. De plus en plus brutal et sombre, à la moindre bêtise de leur part, il frappe désormais les enfants.</p> <h3>La révolte</h3> <p>Elle, enceinte une troisième fois, décide d’aller avorter. Stéphane est contre mais elle s’en fout. Comme il lui fait la gueule pendant des semaines, ne pouvant plus encadrer cet abruti, elle l’ignore, part tous les week-ends et, à la première occasion, le trompe.</p> <p>Au bout d’un mois, Stéphane découvre son aventure et lui dit: «il faut qu’on discute». Coup de théâtre! Lui aussi a rencontré une fille! Vierge et qui ne voulait le faire qu’avec lui. Elle n’arrêtait pas de crier: «moins fort, moins fort, tu me fais mal», lui raconte-t-il. Et il éclate de rire.</p> <h3>Après la séparation</h3> <p>Restée seule dans l’appartement, ce qu’elle apprécie infiniment, elle se purge à coup de douches interminables. Mais cette libération est loin d’être complète vu qu’il y a les enfants. D'accord, il paie la cantine mais c’est elle qui s’occupe des vêtements, des devoirs, des factures, des sorties, des vacances, des médecins. Au détour d’une conversation, il lui dit que ce serait bien qu’elle lui verse une pension alimentaire. Incroyable! Ce mec n’est pas un homme mais un parasite qui veut encore et encore lui sucer le sang. Quand elle récupère les enfants, l’un d’eux a le crâne rasé et porte un véritable casque allemand. Un mois après l’attentat contre <i>Charlie Hebdo</i>, à la sortie de l’école, elle les retrouve avec des cagoules noires.</p> <p>Stéphane, devenu maçon comme il le souhaitait avec un corps dur, pleure néanmoins sa pseudo masculinité perdue avec ses amis masculinistes du web. Quand il voyage avec les enfants, c’est pour aller au musée du Tank à Saumur, y disserter sur les mérites comparés du Panzer IV, du Tigre et du M4 Sherman...</p> <p>Il la traite de sale bourgeoise mais elle ne peut plus payer le chauffage (électrique) et mange des pâtes au rabais. Lui se pense en petit blanc mais, sans arrêt, touche des héritages. L’un d’eux s'élève à quatre-vingt mille euros! Le bourgeois, c’est lui.</p> <h3>Désastre</h3> <p>La narratrice contemple ses deux petits et se rend compte qu’elle a engendré l’ennemi, des enfants mâles qui la saluent d’un <i>Heil Hitler</i>!</p> <p>Pendant des années, elle a patienté, les enfants ont grandi. Quand elle regarde en arrière, elle voit Stéphane, tout seul, attendant la guerre. Le constat est plus qu’amer. Le poison diffusé sur les réseaux a fait effet. Partout en Europe l’extrême droite prospère.</p> <p>L’un des enfants lui annonce qu’il arrête ses études et s'engage dans l’armée. Ça l’achève. Elle marche dans les rues. Il n’y a plus d’immeubles, d’arbres, de ciel nuageux mais partout, hallucinante, une armée de phallus géant. Cauchemar des cauchemars: elle vit en <i>virilie</i>.</p> <hr /> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1724312561_enterritoireennemi_couv520x768.jpg" class="img-responsive img-fluid left " width="200" height="295" /></p> <h4>«En territoire ennemi», Carole Lobel, L’Association, 224 pages.</h4>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'carole-lobel-la-redemption-par-le-dessin', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 105, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 6, 'person_id' => (int) 2107, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'tags' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Tag) {} ], 'attachments' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ '*' => true, 'id' => false ], '[dirty]' => [], '[original]' => [], '[virtual]' => [], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [], '[invalid]' => [], '[repository]' => 'Posts' }
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D’où cette épopée, récit d’un tête à tête mortifère et tour de force réalisé au stylo Bic quatre couleurs. Entre canapé et lit, la vie d’un couple et la naissance de deux enfants non désirés par leur génitrice avec donc, en filigrane, du début à la fin de cette aventure, la question de l’avortement.</p> <p>Quoi d’autre? Rien. Ou si peu. Au début, les salles de classe, ensuite, les lieux de travail, les parcs pour enfants et elle, notre artiste, qui, perpétuellement, n’ose pas ceci ou cela. Peu d’extérieur et tout à l’intérieur d’un appartement, quand ce n’est pas dans le sexe ou la matrice de la narratrice.</p> <h3>Les débuts, les Beaux-Arts, Stéphane</h3> <p>La narratrice a dix-huit ans et sa mère, catholique militante, lui prend sans cesse la tête avec l’avortement. Elle, rebelle, annonce à celle-ci qu’elle ne croit plus en Dieu. Mais cette rupture n’étant pas facile à vivre, doutant d’elle-même, isolée, pour ne pas trop déprimer, elle se met à dessiner jours et nuits. </p> <p>Aux Beaux-Arts de Nantes, où elle entre sans difficulté et se sent bien, son travail étant apprécié par les enseignants, elle découvre les dernières nouveautés de l’époque, Internet et les jeux vidéo, ainsi qu’un condisciple, Stéphane, chez qui elle aime tout: chanteur dans un groupe de rock et fumeur de joints, Stéphane se dit d’extrême gauche, et, très vite, la narratrice va s'installer chez lui.</p> <p>Mais lui, la jugeant trop introvertie, se dessine avec une hache brandie très haut, hache qu’il aimerait abattre sur son bunker caractériel pour le faire exploser. Comment peut-il ne pas sentir que ce dont elle a besoin, c’est de douceur et non de violence? Chacun de leurs rapports sexuels est un viol et elle, en silence, souffre. Jusqu’à en vomir. Quand, enfin, elle parvient à le lui dire et à le supplier d’y aller plus doucement, contre toute attente, il rit: à ses yeux, faire mal, c’est être viril et c’est super bien.</p> <h3>Il la façonne</h3> <p>Aux Beaux-Arts, où ils suivent tous deux les classes de dessin et de peinture, elle est bonne et lui mauvais. Il toise les profs avec mépris; elle, marchant sur des œufs, n’ose pas lui avouer qu’elle pense qu’ils ont raison. Il dessine passablement mais ses personnages sont bizarres, surtout leur regard, toujours rigide et froid. Bref, ce mâle la sculpte, la façonne, lui reproche ses fréquentations, ses goûts musicaux, sa famille, lui présente ses amis, tous des hommes.</p> <p>Son père étant mort, Stéphane bénéficie d’une bourse et ses études sont payées. Elle a dû contracter un emprunt et à contrecœur, travaille à la caisse d’une supérette le vendredi soir et le samedi: elle veut être indépendante. </p> <p>Quand elle veut coïter, il ne veut pas, mais si quand lui veut, elle ne veut pas, il boude et ça, pauvrette, elle ne le supporte pas. </p> <p>En 1999, grand événement entre tous, Internet arrive chez eux.</p> <p>Rejeté par son groupe de rock, Stéphane l’est aussi par l’école où il n’obtient pas son diplôme. Rancunier, attribuant la faute aux autres, cela ne le pousse malheureusement pas à se remettre en question. Ayant perdu sa bourse, ce glandeur joue à la victime et devient hyper jaloux. Elle n’a plus le droit de parler avec un autre homme. Ils passent ainsi un an repliés sur eux-mêmes principalement adonnés à leur permanente addiction à la beuh.</p> <h3>Les jeux vidéos et leur premier enfant</h3> <p>Heureusement, la narratrice finit par être engagée par une boîte parisienne de jeux vidéo. Elle peut s’extirper un temps de ce marasme de fumeurs de joints. Et bien sûr, ça lui plait de fréquenter d’autres gens que le pesant Stéphane. Le fait que son travail soit très apprécié la gratifie aussi beaucoup. Néanmoins, elle retourne tous les week-ends à Nantes, continue à payer le loyer, pendant que lui, n’ayant aucun projet à part celui de se plaindre tout le temps, n’en branle toujours pas une. Elle rêve de le quitter mais, horreur au carré, elle se retrouve enceinte. Avorter? Le vieux credo maternel le lui interdit. Prise au piège, elle loue un petit appartement à Paris, et y emmène un Stéphane amorphe, tellement défoncé qu’il en est devenu parano et s’imagine que les RG le suivent. Lui? Quelle bonne blague!</p> <p>L’échographie leur apprend que c’est un garçon qu’elle attend. Oui, elle va générer son futur propre oppresseur. Stéphane lui répète que dans sa boite, s’ils l’ont engagée, c’est parce qu’elle est une femme. Elle en est estomaquée: ce jean-foutre est vraiment misogyne.</p> <p>Elle le fait embaucher pour faire des recherches de personnages. Se retrouvant sa supérieure, elle dirige son travail. Hélas, deux mois plus tard, jugé trop mauvais par la direction, Stéphane est renvoyé.</p> <h3>Alain Soral</h3> <p>A défaut d’avoir une vie, il s’invente des exploits extraordinaires, s’intoxique à Internet et commence à suivre Alain Soral, l’idéologue antisémite exilé à Lausanne. Devenu crypto nazi et masculiniste, portant en étendard un pénis et ses bourses pendantes, il va, de plus en plus et à l’infini, fantasmer tanks, croix gammées, fusils, haches, couteaux et, tout cela, en consommant, de façon paradoxale, force herbe ou pâte qui se fument.</p> <p>Il la harangue: la Shoah a été inventée, Big Pharma et les Juifs, agents du Nouvel Ordre Mondial, veulent asservir les Français...</p> <h3>Les enfants</h3> <p>A la maternité, où Stéphane arrive complètement défoncé, les choses ne se passent pas bien. Le docteur la charcute. Résultat: elle reste tout un long mois allongée, ne pouvant pas marcher tant la douleur est atroce. Stéphane s’en fout, ce qu’il veut lui, c’est sa dose de chair fraiche. Evidemment de tous les possibles, elle, c’est celui qu’elle désire le moins, mais lui insiste tellement qu’elle cède.</p> <p>Ecœurée, elle envisage de tout quitter, de se barrer ou même de se suicider. Seulement, il y a le bébé et il faut quelqu’un pour s’en occuper. Tournant follement en rond, elle finit par essayer de le changer lui, l’encourage à se reprendre en main et, par exemple, à réaliser une BD. Il acquiesce, la réalise mais aucun éditeur ne s’y intéresse. Après ça, toujours plus aigri, son ressentiment vis-à-vis des femmes décuple: celles-ci, inaptes à la politique et à la culture, doivent impérativement rester au foyer.</p> <h3>Retour à Nantes</h3> <p>La narratrice est à nouveau enceinte. La famille retourne à Nantes où Stéphane bosse comme serveur. Illustratrice, invitée au salon du livre, elle va mieux. Mais lui avec ses colères, ses insatiables besoins sexuels et ses constantes diatribes sur les <i>journalopes</i>, les <i>féminazies</i>, les <em>bougnoules</em> et les <em>tantouzes</em>, plombe tout. </p> <p>A part apprendre l’allemand, il ne fait plus que deux choses: la cuisine et offrir des armes aux gosses, à chacun de leurs anniversaires. Puis, désireux de privilégier le corps contre l’esprit, il se lance dans une formation de maçon. De plus en plus brutal et sombre, à la moindre bêtise de leur part, il frappe désormais les enfants.</p> <h3>La révolte</h3> <p>Elle, enceinte une troisième fois, décide d’aller avorter. Stéphane est contre mais elle s’en fout. Comme il lui fait la gueule pendant des semaines, ne pouvant plus encadrer cet abruti, elle l’ignore, part tous les week-ends et, à la première occasion, le trompe.</p> <p>Au bout d’un mois, Stéphane découvre son aventure et lui dit: «il faut qu’on discute». Coup de théâtre! Lui aussi a rencontré une fille! Vierge et qui ne voulait le faire qu’avec lui. Elle n’arrêtait pas de crier: «moins fort, moins fort, tu me fais mal», lui raconte-t-il. Et il éclate de rire.</p> <h3>Après la séparation</h3> <p>Restée seule dans l’appartement, ce qu’elle apprécie infiniment, elle se purge à coup de douches interminables. Mais cette libération est loin d’être complète vu qu’il y a les enfants. D'accord, il paie la cantine mais c’est elle qui s’occupe des vêtements, des devoirs, des factures, des sorties, des vacances, des médecins. Au détour d’une conversation, il lui dit que ce serait bien qu’elle lui verse une pension alimentaire. Incroyable! Ce mec n’est pas un homme mais un parasite qui veut encore et encore lui sucer le sang. Quand elle récupère les enfants, l’un d’eux a le crâne rasé et porte un véritable casque allemand. Un mois après l’attentat contre <i>Charlie Hebdo</i>, à la sortie de l’école, elle les retrouve avec des cagoules noires.</p> <p>Stéphane, devenu maçon comme il le souhaitait avec un corps dur, pleure néanmoins sa pseudo masculinité perdue avec ses amis masculinistes du web. Quand il voyage avec les enfants, c’est pour aller au musée du Tank à Saumur, y disserter sur les mérites comparés du Panzer IV, du Tigre et du M4 Sherman...</p> <p>Il la traite de sale bourgeoise mais elle ne peut plus payer le chauffage (électrique) et mange des pâtes au rabais. Lui se pense en petit blanc mais, sans arrêt, touche des héritages. L’un d’eux s'élève à quatre-vingt mille euros! Le bourgeois, c’est lui.</p> <h3>Désastre</h3> <p>La narratrice contemple ses deux petits et se rend compte qu’elle a engendré l’ennemi, des enfants mâles qui la saluent d’un <i>Heil Hitler</i>!</p> <p>Pendant des années, elle a patienté, les enfants ont grandi. Quand elle regarde en arrière, elle voit Stéphane, tout seul, attendant la guerre. Le constat est plus qu’amer. Le poison diffusé sur les réseaux a fait effet. Partout en Europe l’extrême droite prospère.</p> <p>L’un des enfants lui annonce qu’il arrête ses études et s'engage dans l’armée. Ça l’achève. Elle marche dans les rues. Il n’y a plus d’immeubles, d’arbres, de ciel nuageux mais partout, hallucinante, une armée de phallus géant. 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Culture / Carole Lobel: la rédemption par le dessin
Patiente exploration d’une double aliénation, celle du parasite mâle et de sa victime femelle, porté par un dessin minimaliste et expressif, le roman graphique «En territoire ennemi» de Carole Lobel décrit les mécanismes qui mènent progressivement une jeune femme à l’isolement, et son compagnon à une idéologie masculiniste d’extrême droite.
Yves Tenret
B Article réservé aux abonnés
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Faire le portrait d’un artiste, rapporter ses propos, décrire l’ordre ou le désordre de l’atelier, est-ce écrire sur l’art? Il n’en sait rien et ne s’en soucie pas. Ce qui lui importe est de trouver le ton juste pour habiller ses souvenirs, ses observations, ses impressions, anecdotes et autres descriptions.</p> <p>Avec lui, nous visitons ainsi les ateliers d’Antoni Tàpies, de Pierre Alechinsky et de Fabienne Verdier, approchons la manière dont Kiki Smith raisonne; nous le suivons devant les peintures de Christine Safa, Jean Degottex ou Richard Tuttle ou encore avec David Hockney pendant un long séjour que celui-ci fit en Normandie pendant la période du Covid.</p> <h3>Connaître</h3> <p>En cinquante ans de pratique du terrain, Frémon a connu et connaît tous les artistes et tous les gens qui comptent dans ce milieu. Ce protestant apprécie une certaine distance dans les rapports sociaux, et, autant que possible, pas trop de chaleur humaine. Friand d’anecdotes sur les artistes, il a réalisé la première exposition de Louise Bourgeois à Paris, et, depuis la fin des années nonante, fréquente assidument David Hockney. Le marchand d'art aime aussi plus que tout les ateliers d’artistes, tels le vaste loft de Louise Bourgeois à Brooklyn, celui de Robert Ryman à Tribeca, la cave de Jannis Kounellis à Rome ou encore celui de Fabienne Verdier qui abrite un pinceau géant pesant 60 kilos, pinceau suspendu au plafond et formé d’une vingtaine de queues de cheval que l’artiste manie à l’aide d’un guidon. Car oui, l’autrice de <i>La passagère du silence</i>, dont 120'000 exemplaires ont été vendus en grand format, livre contant ses dix années de formation en Chine, a depuis longtemps, comme la plupart des peintres d’aujourd’hui, renoncé au chevalet et à la toile-fenêtre sur le monde, et travaille au sol.</p> <h3>Kiki Smith et le dessin</h3> <p>En 2023, l’exposition de Kiki Smith (1'025ème dans le top des ventes) à New York se nommait <i>Prints, Books and Things</i>. Dans un temps où la tendance est au gigantisme et à l’autocélébration, elle œuvre dans la modestie et l’humilité, écrit Jean Frémon. Ayant reçu une éducation catholique, passionnée de reliquaires, de rosaires, de médailles et d’ex-voto, utilisant peu la couleur, juste de petits rehauts rouges aux ongles de pieds d’une figure en plâtre ou une trace couleur sang dans la gueule d’un tigre qui dévore une femme, ayant l’obsession du détail, elle aime représenter le corps – son corps. Elle dessine comme ses aînées, Nancy Spero et Louise Bourgeois, un corps morcelé.</p> <p>S’étant forgé un vocabulaire d’images qu’elle combine entre elles comme les lettres d’un alphabet, elle crée des œuvres polymorphes, sexuelles, provocantes qui n’hésitaient pas à affronter la figure – humaine comme animale – car ce sont souvent des corps, entiers ou morcelés, qui se couchent ou se dressent, prétendant à l’existence en habitant une forme, corps de bronze, de cire, de résine ou de papier mâché, dérisoires et sublimes. Avec le leitmotiv du loup, il s’agit d’une étreinte amoureuse, pas d’idée mais d’attitude et d’un corps défini par ses douze fluides: <i>semen, mucus, vomit, oil, tears, blood, milk, saliva, diarrhea, urine, sweat, pus</i>. Sécrétions corporelles, toutes plus ou moins taboues. Ou à l’inverse, d’un corps enfantin comme ceux de l’artiste d’art brut Henry Darger. 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Lui aussi, Jaccottet, il l’a bien connu: un homme fin et délicat, nous apprend-il. Rentré chez lui, il feuillette les <i>Pensées sous les nuages</i>. Au cours d’une promenade, le mot joie a traversé l’esprit du barde, tel un oiseau qu’on n'attendait pas traversant le ciel. La rime? Soie. Parce que le ciel ce jour-là était particulièrement lisse, brillant et précieux comme une pièce d’étoffe de prix. </p> <h3>David Hockney et le printemps</h3> <p>En 2018, Jean Frémon retrouve David Hockney et son ami Jean-Pierre dans l’ancien atelier d’Eugène Boudin qui surplombe l’estuaire de la Seine et le pont de Normandie, et leur offre le spectacle d’un magnifique coucher de soleil. Le lendemain, à Bayeux, ils sont quasiment les seuls visiteurs devant la Tapisserie de la reine Mathilde. Hockney est fasciné par l’efficacité graphique et narrative de cette œuvre du XIème siècle sans, bien sûr, de perspective ni d’ombre et développant un long récit courant de gauche à droite. Faire sentir le passage du temps, pour ce lecteur assidu de Marcel Proust, a toujours été l’un de ses désirs majeurs. Et voici qu’alors germe en lui l’idée de peindre l’arrivée du printemps dans le paysage normand. </p> <p>Pour ce faire, Hockney acquiert une maison isolée. Une rangée de hauts peupliers borde la rivière, un cours d’eau traverse le terrain qui l’entoure, un ancien pressoir peut servir d’atelier. Il retourne à Los Angeles, passe par Amsterdam pour son exposition au musée Van Gogh, <i>The Joy of the Nature</i>. Van Gogh et lui étant exposés côte à côte! Jean Frémon le retrouve là-bas et ils visitent cette fois-ci une exposition Rembrandt honorant le 350ème anniversaire de la mort du maitre batave.</p> <p>Le 2 mars 2020, Hockney est en Normandie. Le Covid venant, sûr de ne pas être dérangé, il peut enfin se concentrer sur le but qu’il s’est fixé. Il dessine sur des carnets en accordéon un panorama à 360 degrés et ceci, quatre fois de suite. Nous sommes à la fin de l’hiver, les couleurs arrivent petit à petit. Il ne dessine pas le ciel parce que, dit-il, celui-ci change trop vite. Il fait réaliser des agrandissements de ses carnets pour pouvoir les accrocher au mur et pour finir, ce sont deux de ces carnets agrandis qui seront exposés. Douze mètres de longueur (le mur de la galerie Lelong mesure 13,50 mètres), l’un au-dessus de l’autre pour que l’on puisse voir le même motif à deux moments de l’année. L’été venu, Hockney peint à l’acrylique quatre arbres fruitiers du jardin avec un ciel bleu formé de centaines de marques qui se tortillent. C’était voulu vibrant et ça l’est. Puis un double tableau horizontal, ce qu’on voit en arrivant sur la propriété mais transposé en une puissante image transcendant cette réalité. </p> <p>Un tableau d’Hockney doit toujours être regardé deux fois nous apprend Jean Frémon, grand connaisseur. Une fois de près, pour la singularité du langage, la touche, une fois de loin, pour la magie de l’image. Réfléchissez: quels sont les tableaux dont vous avez gardé une image mentale claire? Un Manet, un Degas, un Ensor, un Malévitch? Et un Hockney, non?</p> <p>David Hockney porte une grande attention au titre. Au dernier moment, il décide d’ajouter un tableau dans l’exposition, le seul de 2020, la pluie tombant dans une mare, <i>Some Small Splashes</i>, référence à son vieux tableau <i>A Bigger Splash</i>, (80 millions d’euros). Hockney va continuer son cycle du printemps sur l’iPad. En quelques mois, privé donc de toutes visites par le confinement, il va achever plus de cent images. Le cycle <i>L’Arrivée du Printemps 2020</i> fera l’objet d’une grande exposition à Londres puis à Paris.</p> <h3>Deux, trois artistes parmi d'autres</h3> <p>On peut citer par exemple, le vibrant et zen Jean Degottex, «rien avant, rien après, tout en faisant»; le spectaculaire Jaume Plensa, le luministe Sean Scully, touche ample, véhémente, une vague, un flux, vertical ou horizontal, blocs de peinture, murs de lumière, compression de couleurs que Jean Frémon n’hésite pas à comparer à Monet et à Rothko. 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Le résultat, hypertendu, vibrant et plein de sonorités muettes n’étant pas sans évoquer la musique répétitive de Philip Glass.</p> <hr /> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1722338093_arton489.jpg" class="img-responsive img-fluid left " width="200" height="258" /></p> <h4>«Probité de l'image», Jean Frémon, L'Atelier contemporain, 248 pages.</h4>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'jean-fremon-vendeur-d-art', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 108, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 6, 'person_id' => (int) 2107, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'tags' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Tag) {} ], 'attachments' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ '*' => true, 'id' => false ], '[dirty]' => [], '[original]' => [], '[virtual]' => [], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [], '[invalid]' => [], '[repository]' => 'Posts' }
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Faire le portrait d’un artiste, rapporter ses propos, décrire l’ordre ou le désordre de l’atelier, est-ce écrire sur l’art? Il n’en sait rien et ne s’en soucie pas. Ce qui lui importe est de trouver le ton juste pour habiller ses souvenirs, ses observations, ses impressions, anecdotes et autres descriptions.</p> <p>Avec lui, nous visitons ainsi les ateliers d’Antoni Tàpies, de Pierre Alechinsky et de Fabienne Verdier, approchons la manière dont Kiki Smith raisonne; nous le suivons devant les peintures de Christine Safa, Jean Degottex ou Richard Tuttle ou encore avec David Hockney pendant un long séjour que celui-ci fit en Normandie pendant la période du Covid.</p> <h3>Connaître</h3> <p>En cinquante ans de pratique du terrain, Frémon a connu et connaît tous les artistes et tous les gens qui comptent dans ce milieu. Ce protestant apprécie une certaine distance dans les rapports sociaux, et, autant que possible, pas trop de chaleur humaine. Friand d’anecdotes sur les artistes, il a réalisé la première exposition de Louise Bourgeois à Paris, et, depuis la fin des années nonante, fréquente assidument David Hockney. Le marchand d'art aime aussi plus que tout les ateliers d’artistes, tels le vaste loft de Louise Bourgeois à Brooklyn, celui de Robert Ryman à Tribeca, la cave de Jannis Kounellis à Rome ou encore celui de Fabienne Verdier qui abrite un pinceau géant pesant 60 kilos, pinceau suspendu au plafond et formé d’une vingtaine de queues de cheval que l’artiste manie à l’aide d’un guidon. Car oui, l’autrice de <i>La passagère du silence</i>, dont 120'000 exemplaires ont été vendus en grand format, livre contant ses dix années de formation en Chine, a depuis longtemps, comme la plupart des peintres d’aujourd’hui, renoncé au chevalet et à la toile-fenêtre sur le monde, et travaille au sol.</p> <h3>Kiki Smith et le dessin</h3> <p>En 2023, l’exposition de Kiki Smith (1'025ème dans le top des ventes) à New York se nommait <i>Prints, Books and Things</i>. Dans un temps où la tendance est au gigantisme et à l’autocélébration, elle œuvre dans la modestie et l’humilité, écrit Jean Frémon. Ayant reçu une éducation catholique, passionnée de reliquaires, de rosaires, de médailles et d’ex-voto, utilisant peu la couleur, juste de petits rehauts rouges aux ongles de pieds d’une figure en plâtre ou une trace couleur sang dans la gueule d’un tigre qui dévore une femme, ayant l’obsession du détail, elle aime représenter le corps – son corps. Elle dessine comme ses aînées, Nancy Spero et Louise Bourgeois, un corps morcelé.</p> <p>S’étant forgé un vocabulaire d’images qu’elle combine entre elles comme les lettres d’un alphabet, elle crée des œuvres polymorphes, sexuelles, provocantes qui n’hésitaient pas à affronter la figure – humaine comme animale – car ce sont souvent des corps, entiers ou morcelés, qui se couchent ou se dressent, prétendant à l’existence en habitant une forme, corps de bronze, de cire, de résine ou de papier mâché, dérisoires et sublimes. Avec le leitmotiv du loup, il s’agit d’une étreinte amoureuse, pas d’idée mais d’attitude et d’un corps défini par ses douze fluides: <i>semen, mucus, vomit, oil, tears, blood, milk, saliva, diarrhea, urine, sweat, pus</i>. Sécrétions corporelles, toutes plus ou moins taboues. Ou à l’inverse, d’un corps enfantin comme ceux de l’artiste d’art brut Henry Darger. 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Lui aussi, Jaccottet, il l’a bien connu: un homme fin et délicat, nous apprend-il. Rentré chez lui, il feuillette les <i>Pensées sous les nuages</i>. Au cours d’une promenade, le mot joie a traversé l’esprit du barde, tel un oiseau qu’on n'attendait pas traversant le ciel. La rime? Soie. Parce que le ciel ce jour-là était particulièrement lisse, brillant et précieux comme une pièce d’étoffe de prix. </p> <h3>David Hockney et le printemps</h3> <p>En 2018, Jean Frémon retrouve David Hockney et son ami Jean-Pierre dans l’ancien atelier d’Eugène Boudin qui surplombe l’estuaire de la Seine et le pont de Normandie, et leur offre le spectacle d’un magnifique coucher de soleil. Le lendemain, à Bayeux, ils sont quasiment les seuls visiteurs devant la Tapisserie de la reine Mathilde. Hockney est fasciné par l’efficacité graphique et narrative de cette œuvre du XIème siècle sans, bien sûr, de perspective ni d’ombre et développant un long récit courant de gauche à droite. Faire sentir le passage du temps, pour ce lecteur assidu de Marcel Proust, a toujours été l’un de ses désirs majeurs. Et voici qu’alors germe en lui l’idée de peindre l’arrivée du printemps dans le paysage normand. </p> <p>Pour ce faire, Hockney acquiert une maison isolée. Une rangée de hauts peupliers borde la rivière, un cours d’eau traverse le terrain qui l’entoure, un ancien pressoir peut servir d’atelier. Il retourne à Los Angeles, passe par Amsterdam pour son exposition au musée Van Gogh, <i>The Joy of the Nature</i>. Van Gogh et lui étant exposés côte à côte! Jean Frémon le retrouve là-bas et ils visitent cette fois-ci une exposition Rembrandt honorant le 350ème anniversaire de la mort du maitre batave.</p> <p>Le 2 mars 2020, Hockney est en Normandie. Le Covid venant, sûr de ne pas être dérangé, il peut enfin se concentrer sur le but qu’il s’est fixé. Il dessine sur des carnets en accordéon un panorama à 360 degrés et ceci, quatre fois de suite. Nous sommes à la fin de l’hiver, les couleurs arrivent petit à petit. Il ne dessine pas le ciel parce que, dit-il, celui-ci change trop vite. Il fait réaliser des agrandissements de ses carnets pour pouvoir les accrocher au mur et pour finir, ce sont deux de ces carnets agrandis qui seront exposés. Douze mètres de longueur (le mur de la galerie Lelong mesure 13,50 mètres), l’un au-dessus de l’autre pour que l’on puisse voir le même motif à deux moments de l’année. L’été venu, Hockney peint à l’acrylique quatre arbres fruitiers du jardin avec un ciel bleu formé de centaines de marques qui se tortillent. C’était voulu vibrant et ça l’est. Puis un double tableau horizontal, ce qu’on voit en arrivant sur la propriété mais transposé en une puissante image transcendant cette réalité. </p> <p>Un tableau d’Hockney doit toujours être regardé deux fois nous apprend Jean Frémon, grand connaisseur. Une fois de près, pour la singularité du langage, la touche, une fois de loin, pour la magie de l’image. Réfléchissez: quels sont les tableaux dont vous avez gardé une image mentale claire? Un Manet, un Degas, un Ensor, un Malévitch? Et un Hockney, non?</p> <p>David Hockney porte une grande attention au titre. Au dernier moment, il décide d’ajouter un tableau dans l’exposition, le seul de 2020, la pluie tombant dans une mare, <i>Some Small Splashes</i>, référence à son vieux tableau <i>A Bigger Splash</i>, (80 millions d’euros). Hockney va continuer son cycle du printemps sur l’iPad. En quelques mois, privé donc de toutes visites par le confinement, il va achever plus de cent images. Le cycle <i>L’Arrivée du Printemps 2020</i> fera l’objet d’une grande exposition à Londres puis à Paris.</p> <h3>Deux, trois artistes parmi d'autres</h3> <p>On peut citer par exemple, le vibrant et zen Jean Degottex, «rien avant, rien après, tout en faisant»; le spectaculaire Jaume Plensa, le luministe Sean Scully, touche ample, véhémente, une vague, un flux, vertical ou horizontal, blocs de peinture, murs de lumière, compression de couleurs que Jean Frémon n’hésite pas à comparer à Monet et à Rothko. Ou encore, Richard Tuttle (4'179ème dans le classement des ventes), exemple parfait de ces artistes, comme Calder et ses tôles découpées, Robert Ryman avec ses jeux entre toile et mur, Oldenbourg et ses sculptures molles, tous ces artistes qui, sans proclamations tonitruantes, travaillent avec constance à déplacer les perceptions de l’œuvre d’art.</p> <p>Quant à Juan Uslé (4'821ème), travaillant au rythme de son cœur détraqué, il dispose sa toile à plat sur une table basse et recouvre la surface, de haut en bas et de gauche à droite, de petites touches parallèles appliquées verticalement l’une à côté de l’autre, jusqu’à former une bande horizontale qui traverse le tableau et se répète avec régularité de bande en bande pour recouvrir tout l’espace. La largeur de la touche est celle de la brosse choisie. Sa longueur est celle de la durée du battement du pouls de l’artiste. A chaque battement, il s’arrête. Systole, diastole et bis, bis, bis. 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Culture / Jean Frémon, vendeur d’art
«Probité de l’image», recueil de vingt-huit textes rédigés entre 1991 et 2022 pour des catalogues par le directeur de la galerie Lelong, sise rue de Téhéran à Paris, c’est-à-dire l’ancienne et fameuse galerie Maeght, nous livre un riche et précieux témoignage des rencontres infiniment variées de Jean Frémon (1946) avec les plus prestigieux des artistes actuels et leur travail.
Yves Tenret
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Architectures qui résistent à l’interprétation et semblent mener leur vie propre, comme détachées de leurs concepteurs, symptômes de crise molle et de désordre mou, hologrammes stupéfiant les touristes car monstres ils sont, et monstres il faut les laisser.</p> <h3>Sa décennie situationniste</h3> <p>Dans le n°1 de la revue <i>Utopie</i>, en mai 1967, Henri Lefebvre, dont Baudrillard est l’assistant, relève que la plaie du monde moderne est l’ennui. A la ville éternelle, Lefebvre oppose des villes éphémères et oppose aux centres inamovibles des centralités mouvantes. Baudrillard, quant à lui, postule que l’éphémère est sans doute la vérité de l’habitat du futur, que tout ce qui se consomme s’oppose à l’<i>habiter</i> qui est fondation et investissement. Et dans <i>Utopie</i> 2/3, en 1969, il affirme que la contestation est un bien de consommation comme un autre et que la répression moderne, devenue parfaite, se fait à présent au nom du jeu. Notre société s’appuie autant sur la consommation que sur sa dénonciation et la contestation artistique n’est plus qu’une modalité de la consommation. Nous n’avons plus de prise sur le réel parce que celui-ci n’existe plus.</p> <p>Le freudo-marxisme sonne la fin du désir et de la révolution. Ne reste plus qu’une catastrophe virtuelle qui sans cesse et sans trêve nous menace.</p> <h3>L'architecture</h3> <p>Oui. Il n’y a plus de projet, le lieu du pouvoir est vide, ne restent que des objets et ceux-ci nous racontent des histoires, jouent le spectacle de la chose, le simulent et agencent des espaces dans un monde d’infinies galeries marchandes virtuelles. Alors qu’il s’est démonétisé partout ailleurs, l’auteur, en architecture, est devenu <i>starchitecte</i> et dans les concours actuels, chacun va dans le sens de la mode du moment. Le talent, de nos jours, est défini, dans tous les domaines, start-up, sport, cuisine (<i>Masterchef</i>), chant (<i>The Voice</i>), architecture, par la compétition. </p> <p>Le commerce formate les espaces de flux, aussi bien le Louvre avec la Pyramide de Ieoh Ming Pei que toutes les gares parisiennes. Sous la présidence de François Hollande, un projet pour Notre-Dame propose de transformer les pavés du parvis de cette cathédrale chère à Victor Hugo en la toiture transparente d’un vaste centre commercial permettant à ses 13 millions de visiteurs annuels d’acquérir divers produits dérivés.</p> <h3>L'architecture post-moderne</h3> <p>L’architecture moderne s’est inspirée de l’industrie, la post-moderne marque sa connivence avec l’esthétique pop, les sciences humaines, la communication et le structuralisme.</p> <p>Une nouvelle condition intellectuelle caractérisée par l'abandon des grands récits de la modernité et marquée par le passage, un peu partout dans le monde occidental, des «masses», ces sujets uniformes, aux «multitudes», subjectivités fragmentées et agrégées suivant des formes variables. En écho à ce phénomène social, se dessine une nouvelle logique architecturale, qui prend acte de l’épuisement définitif de la notion de <i>standard</i>. Transparence, absence de profondeur, espaces inextricables mais sans mystère, tout communique sans que jamais deux regards ne se croisent. Derrière ses façades de verre, l’architecture est aveugle car quand tout est donné à voir, il n’y a plus rien à voir. L’un des modèles en est Las Vegas, ville du désert, entourée de boîtes de bière rouillées, n’exposant que des façades spectaculaires, ayant relégué toutes les fonctions, machineries et maintenances à la face obscure, au dos de ses palais-hangars et de ses <i>canards</i>! Ce qui, en Europe est dans l’esprit, là-bas est dans les choses, l’ordinaire y est extraordinaire, et ces choses, stations-services, parking, appartements ou immeubles quelconques, sont comme douées d’une infinie indulgence envers leur propre banalité.</p> <h3>Disneyland</h3> <p>Pour Baudrillard, Disneyland est le nouveau Versailles et la plus somptueuse des fêtes du vide, une copie dont l’original s’est perdu, une simulation aveuglante, qui produit un simulacre qui se trouve au-delà du faux. La Californie est le seul lieu du monde où le simulacre est d’origine, et où la mobilité l’emporte sur la monumentalité patrimoniale et figée.</p> <h3>Beaubourg</h3> <p>Le centre Pompidou de Richard Rogers et Renzo Piano est chimère spatiale et simulacre, point de vue panoramique sur une ville <i>carte postale</i> et, si le président Giscard ne s’y était pas opposé, la façade en aurait été un écran géant. Cet édifice léger, lumineux et transparent temple de la consommation culturelle, avec son look de raffinerie de pétrole, offre une négation des plus réussies de la fonction de sacralisation inhérente à toute entreprise muséologique, et échappe avec brio à tous les stigmates de la préfabrication.</p> <h3><em>Twin Towers</em></h3> <p>Alors que Baudrillard attendait un tremblement de terre en Californie, c’est sur la côte est, à Manhattan, le 11 septembre 2001 que finit la grève des événements qu’il avait diagnostiquée une décennie plus tôt.</p> <p>Pour lui, l’effondrement des <i>Twin Towers</i>, cœur de la finance internationale, préfigure l’aboutissement dramatique de cette forme d’architecture et du système qu’elles incarnent. Quelque chose se produit là sans jamais avoir été possible. Cette réversion de la toute-puissance du spectacle, cet écroulement du symbole de son arrogance, comme tout événement venant rompre le fil d’un quotidien mortifère, suscite une irrépressible jubilation inconsciente. </p> <h3>Jean Nouvel</h3> <p>La pensée de Baudrillard sert à m’inquiéter, dit Jean Nouvel, car les choses ne se développant jamais comme elles étaient prévues, l’architecte doit se faire du tracas. Pour lui, qui s’exprime plus en sociologue qu’en architecte, l’avenir de l’architecture n’est plus architectural mais littéraire. Le bâti doit parler, raconter, se focaliser sur les liens qu’il entretient avec le social. Comme Baudrillard, sociologue qui ne croit plus à ce social, Nouvel est un architecte qui ne croit plus en l’architecture. Il en résultera la publication d’un livre d’échanges entre eux, en 2000, intitulé <i>Les Objets singuliers. 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Les médias sont la matrice des choses, ce ne sont plus des intermédiaires, ce sont eux qui donnent ou qui retirent le sens: le médium est là avant l'évènement, dans une forme d’anticipation. Virus informatique, biologique, sociologique, il ne peut rien en lui-même sinon se répliquer. Emprunter des voies détournées et même muter s’il le faut. Pour circuler, il doit envahir d’autres cellules.</p> <p>Pour Baudrillard, la société contemporaine résistait par l’hyper conformisme, par le silence et par l’indifférence. Mélancolique et désenchanté de la modernité, jonglant avec des concepts tels que simulacre, simulation, séduction, réversibilité et dématérialisation, prophète criant sur des places publiques désertes, il sonnait le glas tout en pressentant qu’allait advenir le temps de toutes les sombres régressions qui nous menacent si brutalement aujourd’hui.</p> <hr /> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1720691232_61wzrjtdbzl._ac_uf10001000_ql80_.jpg" class="img-responsive img-fluid left " width="200" height="291" /></p> <h4>«Baudrillard et le monstre (l’architecture)», Jean-Louis Violeau, Editions Parenthèses, 144 pages.</h4>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'jean-baudrillard-et-l-architecture', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 127, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 6, 'person_id' => (int) 2107, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'tags' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Tag) {} ], 'attachments' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ '*' => true, 'id' => false ], '[dirty]' => [], '[original]' => [], '[virtual]' => [], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [], '[invalid]' => [], '[repository]' => 'Posts' }
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Architectures qui résistent à l’interprétation et semblent mener leur vie propre, comme détachées de leurs concepteurs, symptômes de crise molle et de désordre mou, hologrammes stupéfiant les touristes car monstres ils sont, et monstres il faut les laisser.</p> <h3>Sa décennie situationniste</h3> <p>Dans le n°1 de la revue <i>Utopie</i>, en mai 1967, Henri Lefebvre, dont Baudrillard est l’assistant, relève que la plaie du monde moderne est l’ennui. A la ville éternelle, Lefebvre oppose des villes éphémères et oppose aux centres inamovibles des centralités mouvantes. Baudrillard, quant à lui, postule que l’éphémère est sans doute la vérité de l’habitat du futur, que tout ce qui se consomme s’oppose à l’<i>habiter</i> qui est fondation et investissement. Et dans <i>Utopie</i> 2/3, en 1969, il affirme que la contestation est un bien de consommation comme un autre et que la répression moderne, devenue parfaite, se fait à présent au nom du jeu. Notre société s’appuie autant sur la consommation que sur sa dénonciation et la contestation artistique n’est plus qu’une modalité de la consommation. Nous n’avons plus de prise sur le réel parce que celui-ci n’existe plus.</p> <p>Le freudo-marxisme sonne la fin du désir et de la révolution. Ne reste plus qu’une catastrophe virtuelle qui sans cesse et sans trêve nous menace.</p> <h3>L'architecture</h3> <p>Oui. Il n’y a plus de projet, le lieu du pouvoir est vide, ne restent que des objets et ceux-ci nous racontent des histoires, jouent le spectacle de la chose, le simulent et agencent des espaces dans un monde d’infinies galeries marchandes virtuelles. Alors qu’il s’est démonétisé partout ailleurs, l’auteur, en architecture, est devenu <i>starchitecte</i> et dans les concours actuels, chacun va dans le sens de la mode du moment. Le talent, de nos jours, est défini, dans tous les domaines, start-up, sport, cuisine (<i>Masterchef</i>), chant (<i>The Voice</i>), architecture, par la compétition. </p> <p>Le commerce formate les espaces de flux, aussi bien le Louvre avec la Pyramide de Ieoh Ming Pei que toutes les gares parisiennes. Sous la présidence de François Hollande, un projet pour Notre-Dame propose de transformer les pavés du parvis de cette cathédrale chère à Victor Hugo en la toiture transparente d’un vaste centre commercial permettant à ses 13 millions de visiteurs annuels d’acquérir divers produits dérivés.</p> <h3>L'architecture post-moderne</h3> <p>L’architecture moderne s’est inspirée de l’industrie, la post-moderne marque sa connivence avec l’esthétique pop, les sciences humaines, la communication et le structuralisme.</p> <p>Une nouvelle condition intellectuelle caractérisée par l'abandon des grands récits de la modernité et marquée par le passage, un peu partout dans le monde occidental, des «masses», ces sujets uniformes, aux «multitudes», subjectivités fragmentées et agrégées suivant des formes variables. En écho à ce phénomène social, se dessine une nouvelle logique architecturale, qui prend acte de l’épuisement définitif de la notion de <i>standard</i>. Transparence, absence de profondeur, espaces inextricables mais sans mystère, tout communique sans que jamais deux regards ne se croisent. Derrière ses façades de verre, l’architecture est aveugle car quand tout est donné à voir, il n’y a plus rien à voir. L’un des modèles en est Las Vegas, ville du désert, entourée de boîtes de bière rouillées, n’exposant que des façades spectaculaires, ayant relégué toutes les fonctions, machineries et maintenances à la face obscure, au dos de ses palais-hangars et de ses <i>canards</i>! Ce qui, en Europe est dans l’esprit, là-bas est dans les choses, l’ordinaire y est extraordinaire, et ces choses, stations-services, parking, appartements ou immeubles quelconques, sont comme douées d’une infinie indulgence envers leur propre banalité.</p> <h3>Disneyland</h3> <p>Pour Baudrillard, Disneyland est le nouveau Versailles et la plus somptueuse des fêtes du vide, une copie dont l’original s’est perdu, une simulation aveuglante, qui produit un simulacre qui se trouve au-delà du faux. La Californie est le seul lieu du monde où le simulacre est d’origine, et où la mobilité l’emporte sur la monumentalité patrimoniale et figée.</p> <h3>Beaubourg</h3> <p>Le centre Pompidou de Richard Rogers et Renzo Piano est chimère spatiale et simulacre, point de vue panoramique sur une ville <i>carte postale</i> et, si le président Giscard ne s’y était pas opposé, la façade en aurait été un écran géant. Cet édifice léger, lumineux et transparent temple de la consommation culturelle, avec son look de raffinerie de pétrole, offre une négation des plus réussies de la fonction de sacralisation inhérente à toute entreprise muséologique, et échappe avec brio à tous les stigmates de la préfabrication.</p> <h3><em>Twin Towers</em></h3> <p>Alors que Baudrillard attendait un tremblement de terre en Californie, c’est sur la côte est, à Manhattan, le 11 septembre 2001 que finit la grève des événements qu’il avait diagnostiquée une décennie plus tôt.</p> <p>Pour lui, l’effondrement des <i>Twin Towers</i>, cœur de la finance internationale, préfigure l’aboutissement dramatique de cette forme d’architecture et du système qu’elles incarnent. Quelque chose se produit là sans jamais avoir été possible. Cette réversion de la toute-puissance du spectacle, cet écroulement du symbole de son arrogance, comme tout événement venant rompre le fil d’un quotidien mortifère, suscite une irrépressible jubilation inconsciente. </p> <h3>Jean Nouvel</h3> <p>La pensée de Baudrillard sert à m’inquiéter, dit Jean Nouvel, car les choses ne se développant jamais comme elles étaient prévues, l’architecte doit se faire du tracas. Pour lui, qui s’exprime plus en sociologue qu’en architecte, l’avenir de l’architecture n’est plus architectural mais littéraire. Le bâti doit parler, raconter, se focaliser sur les liens qu’il entretient avec le social. Comme Baudrillard, sociologue qui ne croit plus à ce social, Nouvel est un architecte qui ne croit plus en l’architecture. Il en résultera la publication d’un livre d’échanges entre eux, en 2000, intitulé <i>Les Objets singuliers. Architecture et philosophie</i>.</p> <h3>Jean Baudrillard</h3> <p>Ayant rompu avec le marxisme à la quarantaine, romantique théoricien pop et télégénique séducteur nonchalant, producteur d’aphorismes à la G. C. Lichtenberg, s’amusant à contredire systématiquement le sens commun et à retourner les expressions toutes faites, post dadaïste s’en remettant au hasard, adepte du paradoxe et de la pensée fragmentaire, traqueur d’impostures et remarquablement dénué de tout ressentiment, Baudrillard se veut avant tout et essentiellement lucide. </p> <p>Aux yeux de ce germaniste de formation, au tournant du siècle passé, nous avons assisté à la fin de la modernité et au début de l’ère de la simulation et du devenir-image de toute chose. La base démocratique s’est effritée, le corps électoral épuisé, d’où le pouvoir, dans un état d’urgence permanent, se retrouve contraint de passer toujours plus en force. Or, par sa situation transversale, au carrefour de l’esthétique et du scientifique, du politique et de l’artistique, de l’économique et du sociologique, l’architecture offre la possibilité d’une analyse de la synthèse de ces influences contradictoires. </p> <p>Grâce à sa pratique constante d’une écriture disruptive, Baudrillard semble être le seul parmi les célébrités de son temps, les Lyotard, Deleuze, Derrida et autres Foucault, dont les textes soient restés d’actualité. Le seul à avoir pressenti que tous les quidams, enfermés dans une hyper réalité et incapables de distinguer le vrai de l’imaginaire, pris dans un flux incessant d’informations et de représentations fausses, perdraient toute singularité, et subiraient une hypertrophie de l’information et de la communication qui dévorerait le sens.</p> <p>Oui. Les médias sont la matrice des choses, ce ne sont plus des intermédiaires, ce sont eux qui donnent ou qui retirent le sens: le médium est là avant l'évènement, dans une forme d’anticipation. Virus informatique, biologique, sociologique, il ne peut rien en lui-même sinon se répliquer. Emprunter des voies détournées et même muter s’il le faut. Pour circuler, il doit envahir d’autres cellules.</p> <p>Pour Baudrillard, la société contemporaine résistait par l’hyper conformisme, par le silence et par l’indifférence. Mélancolique et désenchanté de la modernité, jonglant avec des concepts tels que simulacre, simulation, séduction, réversibilité et dématérialisation, prophète criant sur des places publiques désertes, il sonnait le glas tout en pressentant qu’allait advenir le temps de toutes les sombres régressions qui nous menacent si brutalement aujourd’hui.</p> <hr /> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1720691232_61wzrjtdbzl._ac_uf10001000_ql80_.jpg" class="img-responsive img-fluid left " width="200" height="291" /></p> <h4>«Baudrillard et le monstre (l’architecture)», Jean-Louis Violeau, Editions Parenthèses, 144 pages.</h4>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'jean-baudrillard-et-l-architecture', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 127, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 6, 'person_id' => (int) 2107, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'tags' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Tag) {} ], 'attachments' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ '*' => true, 'id' => false ], '[dirty]' => [], '[original]' => [], '[virtual]' => [], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [], '[invalid]' => [], '[repository]' => 'Posts' }count - [internal], line ?? 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Culture / Jean Baudrillard et l’architecture
Dans son livre qui vient de paraître «Baudrillard et le monstre (l’architecture)», Jean-Louis Violeau examine, à travers le cas de Jean Baudrillard, les fécondes interactions qui se sont tissées entre la philosophie, la sociologie et l'architecture contemporaine. Baudrillard ne s'est jamais défini comme un penseur ou un théoricien de l'architecture, néanmoins son intérêt s'est très tôt porté sur l'objet architectural et il a développé, dans la foulée du philosophe Henri Lefebvre, un vif intérêt pour l’urbanisme en général comme élément de la critique de la vie quotidienne.
Yves Tenret
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