Nathalie Baye, Audrey Tautou et Mathilde Seigner dans "Vénus Beauté (Institut)" de Tonie Marshall (1999).
En prônant un cinéma d’auteur, François Truffaut visait à défendre le metteur en scène face à des puissances rivales – les scénaristes, les acteurs et les producteurs, nous explique Geneviève Sellier dans «Le culte de l’auteur. Les dérives du cinéma français» qui vient de paraître aux éditions La Fabrique. Une défense absolue qui ouvre la voie aux scandales émaillant aujourd'hui la chronique du cinéma français.
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D’où cette épopée, récit d’un tête à tête mortifère et tour de force réalisé au stylo Bic quatre couleurs. Entre canapé et lit, la vie d’un couple et la naissance de deux enfants non désirés par leur génitrice avec donc, en filigrane, du début à la fin de cette aventure, la question de l’avortement.</p> <p>Quoi d’autre? Rien. Ou si peu. Au début, les salles de classe, ensuite, les lieux de travail, les parcs pour enfants et elle, notre artiste, qui, perpétuellement, n’ose pas ceci ou cela. Peu d’extérieur et tout à l’intérieur d’un appartement, quand ce n’est pas dans le sexe ou la matrice de la narratrice.</p> <h3>Les débuts, les Beaux-Arts, Stéphane</h3> <p>La narratrice a dix-huit ans et sa mère, catholique militante, lui prend sans cesse la tête avec l’avortement. Elle, rebelle, annonce à celle-ci qu’elle ne croit plus en Dieu. 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Faire sentir le passage du temps, pour ce lecteur assidu de Marcel Proust, a toujours été l’un de ses désirs majeurs. Et voici qu’alors germe en lui l’idée de peindre l’arrivée du printemps dans le paysage normand. </p> <p>Pour ce faire, Hockney acquiert une maison isolée. Une rangée de hauts peupliers borde la rivière, un cours d’eau traverse le terrain qui l’entoure, un ancien pressoir peut servir d’atelier. Il retourne à Los Angeles, passe par Amsterdam pour son exposition au musée Van Gogh, <i>The Joy of the Nature</i>. Van Gogh et lui étant exposés côte à côte! Jean Frémon le retrouve là-bas et ils visitent cette fois-ci une exposition Rembrandt honorant le 350ème anniversaire de la mort du maitre batave.</p> <p>Le 2 mars 2020, Hockney est en Normandie. Le Covid venant, sûr de ne pas être dérangé, il peut enfin se concentrer sur le but qu’il s’est fixé. Il dessine sur des carnets en accordéon un panorama à 360 degrés et ceci, quatre fois de suite. Nous sommes à la fin de l’hiver, les couleurs arrivent petit à petit. Il ne dessine pas le ciel parce que, dit-il, celui-ci change trop vite. Il fait réaliser des agrandissements de ses carnets pour pouvoir les accrocher au mur et pour finir, ce sont deux de ces carnets agrandis qui seront exposés. Douze mètres de longueur (le mur de la galerie Lelong mesure 13,50 mètres), l’un au-dessus de l’autre pour que l’on puisse voir le même motif à deux moments de l’année. L’été venu, Hockney peint à l’acrylique quatre arbres fruitiers du jardin avec un ciel bleu formé de centaines de marques qui se tortillent. C’était voulu vibrant et ça l’est. Puis un double tableau horizontal, ce qu’on voit en arrivant sur la propriété mais transposé en une puissante image transcendant cette réalité. </p> <p>Un tableau d’Hockney doit toujours être regardé deux fois nous apprend Jean Frémon, grand connaisseur. 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Architectures qui résistent à l’interprétation et semblent mener leur vie propre, comme détachées de leurs concepteurs, symptômes de crise molle et de désordre mou, hologrammes stupéfiant les touristes car monstres ils sont, et monstres il faut les laisser.</p> <h3>Sa décennie situationniste</h3> <p>Dans le n°1 de la revue <i>Utopie</i>, en mai 1967, Henri Lefebvre, dont Baudrillard est l’assistant, relève que la plaie du monde moderne est l’ennui. A la ville éternelle, Lefebvre oppose des villes éphémères et oppose aux centres inamovibles des centralités mouvantes. Baudrillard, quant à lui, postule que l’éphémère est sans doute la vérité de l’habitat du futur, que tout ce qui se consomme s’oppose à l’<i>habiter</i> qui est fondation et investissement. Et dans <i>Utopie</i> 2/3, en 1969, il affirme que la contestation est un bien de consommation comme un autre et que la répression moderne, devenue parfaite, se fait à présent au nom du jeu. Notre société s’appuie autant sur la consommation que sur sa dénonciation et la contestation artistique n’est plus qu’une modalité de la consommation. Nous n’avons plus de prise sur le réel parce que celui-ci n’existe plus.</p> <p>Le freudo-marxisme sonne la fin du désir et de la révolution. Ne reste plus qu’une catastrophe virtuelle qui sans cesse et sans trêve nous menace.</p> <h3>L'architecture</h3> <p>Oui. Il n’y a plus de projet, le lieu du pouvoir est vide, ne restent que des objets et ceux-ci nous racontent des histoires, jouent le spectacle de la chose, le simulent et agencent des espaces dans un monde d’infinies galeries marchandes virtuelles. Alors qu’il s’est démonétisé partout ailleurs, l’auteur, en architecture, est devenu <i>starchitecte</i> et dans les concours actuels, chacun va dans le sens de la mode du moment. Le talent, de nos jours, est défini, dans tous les domaines, start-up, sport, cuisine (<i>Masterchef</i>), chant (<i>The Voice</i>), architecture, par la compétition. </p> <p>Le commerce formate les espaces de flux, aussi bien le Louvre avec la Pyramide de Ieoh Ming Pei que toutes les gares parisiennes. Sous la présidence de François Hollande, un projet pour Notre-Dame propose de transformer les pavés du parvis de cette cathédrale chère à Victor Hugo en la toiture transparente d’un vaste centre commercial permettant à ses 13 millions de visiteurs annuels d’acquérir divers produits dérivés.</p> <h3>L'architecture post-moderne</h3> <p>L’architecture moderne s’est inspirée de l’industrie, la post-moderne marque sa connivence avec l’esthétique pop, les sciences humaines, la communication et le structuralisme.</p> <p>Une nouvelle condition intellectuelle caractérisée par l'abandon des grands récits de la modernité et marquée par le passage, un peu partout dans le monde occidental, des «masses», ces sujets uniformes, aux «multitudes», subjectivités fragmentées et agrégées suivant des formes variables. En écho à ce phénomène social, se dessine une nouvelle logique architecturale, qui prend acte de l’épuisement définitif de la notion de <i>standard</i>. Transparence, absence de profondeur, espaces inextricables mais sans mystère, tout communique sans que jamais deux regards ne se croisent. Derrière ses façades de verre, l’architecture est aveugle car quand tout est donné à voir, il n’y a plus rien à voir. L’un des modèles en est Las Vegas, ville du désert, entourée de boîtes de bière rouillées, n’exposant que des façades spectaculaires, ayant relégué toutes les fonctions, machineries et maintenances à la face obscure, au dos de ses palais-hangars et de ses <i>canards</i>! Ce qui, en Europe est dans l’esprit, là-bas est dans les choses, l’ordinaire y est extraordinaire, et ces choses, stations-services, parking, appartements ou immeubles quelconques, sont comme douées d’une infinie indulgence envers leur propre banalité.</p> <h3>Disneyland</h3> <p>Pour Baudrillard, Disneyland est le nouveau Versailles et la plus somptueuse des fêtes du vide, une copie dont l’original s’est perdu, une simulation aveuglante, qui produit un simulacre qui se trouve au-delà du faux. La Californie est le seul lieu du monde où le simulacre est d’origine, et où la mobilité l’emporte sur la monumentalité patrimoniale et figée.</p> <h3>Beaubourg</h3> <p>Le centre Pompidou de Richard Rogers et Renzo Piano est chimère spatiale et simulacre, point de vue panoramique sur une ville <i>carte postale</i> et, si le président Giscard ne s’y était pas opposé, la façade en aurait été un écran géant. Cet édifice léger, lumineux et transparent temple de la consommation culturelle, avec son look de raffinerie de pétrole, offre une négation des plus réussies de la fonction de sacralisation inhérente à toute entreprise muséologique, et échappe avec brio à tous les stigmates de la préfabrication.</p> <h3><em>Twin Towers</em></h3> <p>Alors que Baudrillard attendait un tremblement de terre en Californie, c’est sur la côte est, à Manhattan, le 11 septembre 2001 que finit la grève des événements qu’il avait diagnostiquée une décennie plus tôt.</p> <p>Pour lui, l’effondrement des <i>Twin Towers</i>, cœur de la finance internationale, préfigure l’aboutissement dramatique de cette forme d’architecture et du système qu’elles incarnent. Quelque chose se produit là sans jamais avoir été possible. Cette réversion de la toute-puissance du spectacle, cet écroulement du symbole de son arrogance, comme tout événement venant rompre le fil d’un quotidien mortifère, suscite une irrépressible jubilation inconsciente. </p> <h3>Jean Nouvel</h3> <p>La pensée de Baudrillard sert à m’inquiéter, dit Jean Nouvel, car les choses ne se développant jamais comme elles étaient prévues, l’architecte doit se faire du tracas. Pour lui, qui s’exprime plus en sociologue qu’en architecte, l’avenir de l’architecture n’est plus architectural mais littéraire. Le bâti doit parler, raconter, se focaliser sur les liens qu’il entretient avec le social. Comme Baudrillard, sociologue qui ne croit plus à ce social, Nouvel est un architecte qui ne croit plus en l’architecture. Il en résultera la publication d’un livre d’échanges entre eux, en 2000, intitulé <i>Les Objets singuliers. Architecture et philosophie</i>.</p> <h3>Jean Baudrillard</h3> <p>Ayant rompu avec le marxisme à la quarantaine, romantique théoricien pop et télégénique séducteur nonchalant, producteur d’aphorismes à la G. C. Lichtenberg, s’amusant à contredire systématiquement le sens commun et à retourner les expressions toutes faites, post dadaïste s’en remettant au hasard, adepte du paradoxe et de la pensée fragmentaire, traqueur d’impostures et remarquablement dénué de tout ressentiment, Baudrillard se veut avant tout et essentiellement lucide. </p> <p>Aux yeux de ce germaniste de formation, au tournant du siècle passé, nous avons assisté à la fin de la modernité et au début de l’ère de la simulation et du devenir-image de toute chose. La base démocratique s’est effritée, le corps électoral épuisé, d’où le pouvoir, dans un état d’urgence permanent, se retrouve contraint de passer toujours plus en force. Or, par sa situation transversale, au carrefour de l’esthétique et du scientifique, du politique et de l’artistique, de l’économique et du sociologique, l’architecture offre la possibilité d’une analyse de la synthèse de ces influences contradictoires. </p> <p>Grâce à sa pratique constante d’une écriture disruptive, Baudrillard semble être le seul parmi les célébrités de son temps, les Lyotard, Deleuze, Derrida et autres Foucault, dont les textes soient restés d’actualité. Le seul à avoir pressenti que tous les quidams, enfermés dans une hyper réalité et incapables de distinguer le vrai de l’imaginaire, pris dans un flux incessant d’informations et de représentations fausses, perdraient toute singularité, et subiraient une hypertrophie de l’information et de la communication qui dévorerait le sens.</p> <p>Oui. Les médias sont la matrice des choses, ce ne sont plus des intermédiaires, ce sont eux qui donnent ou qui retirent le sens: le médium est là avant l'évènement, dans une forme d’anticipation. Virus informatique, biologique, sociologique, il ne peut rien en lui-même sinon se répliquer. Emprunter des voies détournées et même muter s’il le faut. Pour circuler, il doit envahir d’autres cellules.</p> <p>Pour Baudrillard, la société contemporaine résistait par l’hyper conformisme, par le silence et par l’indifférence. Mélancolique et désenchanté de la modernité, jonglant avec des concepts tels que simulacre, simulation, séduction, réversibilité et dématérialisation, prophète criant sur des places publiques désertes, il sonnait le glas tout en pressentant qu’allait advenir le temps de toutes les sombres régressions qui nous menacent si brutalement aujourd’hui.</p> <hr /> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1720691232_61wzrjtdbzl._ac_uf10001000_ql80_.jpg" class="img-responsive img-fluid left " width="200" height="291" /></p> <h4>«Baudrillard et le monstre (l’architecture)», Jean-Louis Violeau, Editions Parenthèses, 144 pages.</h4>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'jean-baudrillard-et-l-architecture', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 81, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 6, 'person_id' => (int) 2107, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [[maximum depth reached]], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 4992, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => false, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => null, 'readed' => null, 'subhead' => null, 'title' => 'Voyeurs!', 'subtitle' => 'Dans son livre «Voyeur!», la journaliste-reporter Clémentine Thiebault a mené l'enquête, ausculté la littérature, la presse et la loi pour comprendre ce qu'est le voyeurisme. 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Au XXIème siècle, le voyeurisme est désormais viral et se répand comme une trainée de poudre à travers une foultitude inouïe de réseaux sociaux.</p> <h3>A l'ancienne: le gérant du motel</h3> <p>En janvier 1980, à New York, le célèbre journaliste Gay Talese reçoit une lettre anonyme en provenance du Colorado qui débute par: «Je crois être en possession d’informations importantes qui pourraient vous être utiles.» Dans cette missive, un certain Gerald Foos confesse être un voyeur et avoir acquis un motel à Denver dans l’unique but de le transformer en moyen d’exercer son vice. Il a donc, sans jamais être découvert, épié sa clientèle pendant plusieurs décennies, annotant dans le moindre détail ce qu’il observait et entendait. Aidé de son épouse et ayant découpé dans le plafond d’une douzaine de chambres des orifices rectangulaires de 15 centimètres sur 35, puis les ayant masqués avec de fausses grilles d’aération, il a pu, à l’infini, voir sans être vu. Parfois en se masturbant, parfois en faisant l’amour avec sa femme. Eprouvant un sentiment de puissance et d’exaltation, en 1973, par exemple, il observe 184 orgasmes masculins, 33 orgasmes féminins, et en 1974, l’année de la sortie de <i>Gorge profonde</i>, constate que la pratique de la fellation passe de 12 à 44%. Il a assisté à des vols, des trafics, des viols, des incestes, des actes de zoophilie, des morts et, digne d’une scène de <i>Psychose</i>, un meurtre. Sans jamais intervenir bien sûr.</p> <p>Ceci dit la plupart du temps, reconnaît-il, les gens ne font rien et un ennui désespérant règne en maître.</p> <p>Accroché, Gay Talese rencontre l’homme mais le <em>deal</em> ne se fait pas car l’homme demande à rester anonyme, et ce n’est que 18 ans plus tard qu’il acceptera d’assumer publiquement ses agissements et que le livre racontant son histoire pourra enfin paraître.</p> <h3>Les années 70: Jean-Luc Hennig et Jean Eustache</h3> <p>En 1981, Jean-Luc Hennig, ami de Grisélidis Réal et responsable pendant sept ans du supplément <i>Sandwich</i> de <i>Libération</i>, auquel collaborèrent, entre autres, Duras, Barthes, Sempé, Topor et F. Pajak, publie son très dense <i>Le Voyeur. Enquête sur une passion singulière</i>. Et dans cet ouvrage, ce qu’il décrit, c’est un groupe d’hommes qui se refilent des bons plans: des portes d’hôtel, des toilettes de café, des lieux publics de rencontres d’amoureux.</p> <p>L’un des mateurs confiant à Henning que ce qu’on voit n’a pas grand intérêt et que c’est ce qu’on risque de voir qui vaut le coup. Eh oui, nous sommes en pleine métaphysique. Mais surtout dans une complète réification de l’autre et dans une non-réciprocité absolue. Certains se masturbent en fantasmant un viol, d’autres, un meurtre. </p> <p>Hennig va voir le voyeur d’<i>Une sale histoire</i>, 1977, de Jean Eustache, film en deux volets, l’un documentaire, l’autre fictionnel avec Michael Lonsdale. Le voyeur lui raconte en détails comme il observait des femmes en train d’uriner car si, dans le film, il reconnait que les femmes n’aiment pas son histoire, lui, dans la réalité, ne se lasse pas de la raconter. Cela se passait dans un café à la Motte-Picquet-Grenelle et c’est en se mettant à quatre pattes, la joue collée au sol, qu’il fallait regarder sous la porte. Au comptoir, des types trépignaient, sueur au front, en attendant leur tour d’y aller. Notre raconteur a fini par ne faire plus que ça, cinq heures par jour, et même à y amener des filles et à les pousser à boire, jusqu'au moment où il a réussi, juste avant de devenir complètement cinglé, à arrêter. </p> <h3><em>Peeping Tom</em></h3> <p>Côté voyeur au cinéma, le film quintessentiel et mythique est le<i> Peeping Tom</i> de Michael Powell. Dès le premier plan, nous sommes le jeune cameramen Mark Lewis et nous traquons la peur de la mort sur le visage de jeunes femmes en les filmant au moment où nous les tuons. Tout comme le Norman Bates de <i>Psychose</i>, Mark Lewis n’épie, ne traque et ne tue que des femmes. Et si la critique lambda lui sera hostile, <i>Midi-Minuit Fantastique</i>, la grande revue du cinéma de genre de l’époque le choisira comme étant son film de référence et le fera projeter semaine après semaine dans une multitude de ciné-club.</p> <h3>Cinéma et voyeurisme</h3> <p><i>Fenêtre sur cour</i> d’Hitchcock produit une autre démonstration magistrale de voyeurisme cinématographique. Jeff, non pas cinéaste lui mais photographe de presse, en pyjama dans un fauteuil roulant, la jambe plâtrée jusqu’au bassin, est coincé depuis six semaines dans son deux-pièces. Il a sorti ses jumelles et son téléobjectif. Le décor est fait de façades de briques rouges, d’escaliers métalliques, de miteux parterres de fleurs, de palissades, de ruelles pisseuses. Lors d’un été caniculaire, à Greenwich village, où passe un chat noir, pendant qu’un homme se rase et qu’une femme en sous-vêtements se prépare un café. Six semaines que cela dure et l’infirmière qui vient chaque jour pour ses soins lui dit qu’on voit à l’état de ses yeux qu’il a regardé par la fenêtre pendant des heures. Y a de quoi! Jeff est persuadé que son voisin d’en face vient de tuer sa femme et de la couper en morceaux.</p> <p>Voilà. Un homme regarde et attend pendant que nous regardons cet homme et attendons ce qu’il attend, philosophent Chabrol et Rohmer dans <i>Les Cahiers du cinéma</i>. Tous spectateurs et tous voyeurs, le message est clair et confirmé à Truffaut par le maître du suspense. Pour lui, neuf personnes sur dix sont des voyeurs. Et dans <i>Psychose</i>, il poussera la compulsion scopique à son paroxysme en nous transformant en Norman Bates observant par un trou la cliente qu’il va bientôt poignarder sous la mythique douche.</p> <h3>En Corée du Sud</h3> <p>Ce pays, où 90% des gens possèdent un Smartphone et qui est 117ème au classement mondial égalité homme-femme, est le premier au monde en terme de caméras espion en circulation. Rien qu’en 2017, 6'500 cas de victimes filmées pendant leur sommeil, dans les toilettes, des vestiaires ou sous leur jupe, sont signalées. Soit 17 cas par jour.</p> <p>Soranet, fermé en 2016, était un site qui comptait plus d’un million de membres et allait jusqu’à diffuser du <i>revenge porn</i>, ou le viol d’une femme inconsciente parce que droguée. </p> <p>En mars 2019, un site internet payant hébergé à l’étranger diffuse en direct des images de 1'600 clients espionnés dans 30 hôtels différents.</p> <p>Bref, le 9 juin 2018, révoltées par l’impunité notoire de tous ces voyeurs, 22'000 Sud-Coréennes défilent dans les rues de Séoul en martelant ce slogan: «<i>Ma vie n’est pas ton film porno</i>».</p> <h3>De nos jours: voyeurisme et révolution technologique</h3> <p>Aujourd’hui, les voyeurs usent de détecteurs de mouvements à vision nocturne et de caméras sans fil de la taille d’une clef USB, de caméras stylo et de lunettes caméra.</p> <p>En France, par exemple, 107'000 photos et 206 vidéos de femmes en train d’uriner sont découvertes dans l’ordinateur portable de Florent C., ingénieur chez Arcelor Mittal en Moselle. Il est inscrit au fichier des délinquants sexuels, condamné à trois ans de suivi socio-judiciaire et à indemniser ses victimes de 2'000 euros chacune.</p> <p>Ceci admis, on peut signaler que dans cette nouvelle pratique du voyeurisme ultra-équipée, deux éléments, la compulsion et l’impunité, ont résisté au changement, et que la plupart des articles sur le sujet parlent du voyeur mais toujours pas des femmes victimes et du traumatisme qu’elles peuvent avoir vécu . Cela continue à être vu par la presse comme des faits divers aguicheurs, ragots croustillants et autres étrangetés malséantes.</p> <h3>Nouveau terrain de chasse</h3> <p>Après les toilettes, la rue et les transports publics, un nouveau continent a été découvert par nos amis compulsifs: les Airbnb, créés en 2008.</p> <p>En 2017 en Floride, un couple ayant loué un logement découvre une caméra dissimulée dans le détecteur de fumée de la chambre à coucher. En janvier 2018, à Cran-Gevrier dans la banlieue d’Annecy, sept amis qui ont loué l’appartement d’un informaticien de 45 ans découvrent une caméra cachée dans un radio-réveil placé dans la salle de bains face à la douche et un autre de ces engins au-dessus du lit. En 2019, en Irlande, c’est une caméra cachée qui enregistre et diffuse en direct ce qui se passe dans le logement. Et en Seine-et-Marne, deux mille vidéos sont trouvées dans le téléphone portable du loueur. Il ne les a pas diffusées et il fera donc l’objet d’un simple rappel à la loi. En septembre 2021, à Tourcoing, un loueur a placé une caméra dans la salle de bains de l’appartement et les policiers découvrent dans son téléphone des dizaines de femmes nues filmées à leur insu. En décembre 2022, à Rouen, la locataire emporte avec elle le réveil et la multiprise qui une fois démontés dévoileront des images d’elle sous la douche et de ses amis aux toilettes. Au Canada, en 2023, un cas de voyeurisme 2.0 est rapporté tous les dix jours, trois fois plus qu’en 2017. En France, où on ne recense pas ce phénomène, on a quand même 857 infractions constatées en 2017.</p> <p>Interrogée à ce sujet, la plateforme Airbnb relativise le problème et déclare que sur un milliard d’arrivées de voyageurs enregistrées sur son site, ce genre d’incident est «incroyablement rare».</p> <p>Une histoire qu’on s’obstine à ne pas vouloir voir et encore moins punir. Clémentine Thiebault, l’autrice de <i>Voyeur!</i> dit avoir eu des moments de doute, de découragement et d’envie de juger. L’impression de fouiller dans une poubelle. Mais un élément a fini par émerger: les voyeurs sont des hommes, leurs victimes sont des femmes. Il s’agit d’une affaire de domination et on peut poser comme hypothèse que seules les femmes pensent que le voyeurisme est un problème. 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Entre 1958 et 1962, cent cinquante nouveaux cinéastes réalisent leur premier film. Une fois le combat du metteur en scène mené et remporté, c’est un culte du réalisateur-démiurge qui s’impose, une sacralisation de l’art au mépris de l’éthique et du droit, et un cinéma et une cinéphilie au masculin singulier, exaltant les tourments intérieurs de leurs héros, tourments maintes et maintes fois invoqués pour cautionner, justifier ou excuser les pires maltraitances à l’égard de très jeunes actrices.
Les journaux nous en parlent tous les jours
Le reportage sur Gérard Depardieu en Corée a eu un écho énorme.
A-t-on le droit d’organiser un viol pour les besoins d’une scène dans un film? La cinéaste Catherine Breillat aurait fabriqué une scène de sexe oral non simulée sans prévenir son actrice qu’un inconnu allait introduire sa langue dans son sexe, puis tenter de la sodomiser, lors du tournage de Romance. C’est l’accusation que porte aujourd’hui la comédienne Caroline Ducey dans un récit intitulé la Prédation.
Julie Delpy, sexuellement harcelée par certains réalisateurs français, raconte qu’à l’époque où elle a débuté, une jeune fille de 12 ans en couple avec un metteur en scène de 50 ans était une chose normale. Adèle Haenel débute à 12 ans dans Les Diables de Christophe Ruggia. Geneviève Sellier cite une douzaine de comédiennes dans le même cas, telle qu’Ariel Besse ou Judith Godrèche.
Et dans le turnover de jeunes actrices que l’on jette après usage, un cas, entre tous, est emblématique, celui de Maria Schneider dans Le Dernier Tango à Paris en 1972.
Séduire, modeler de très jeunes actrices et en abuser, être un Pygmalion, le schéma perdure donc depuis plus de 60 ans, avec des cinéastes nés dans les années 40, tels Jacques Doillon, Benoît Jacquot ou Philippe Garrel; dans les années 50 avec Olivier Assayas et Bruno Dumont; dans les années 60, avec Arnaud Desplechin, Leos Carax, Mathieu Amalric; et encore dans les années 70 avec Christophe Honoré et Emmanuel Mouret.
Dans un film, Doillon se phantasme en Rodin, Jacquot en Marquis de Sade, Constant en Casanova! Et tous en soi-disant victimes des femmes.
Films subventionnés et entre-soi
Le cinéma d’auteur oppose l’individu, le mâle qui pense, qui écrit et qui crée, à sa compagne qui, elle, se gave de feuilletons télévisuels sentimentaux.
Dans ce cinéma, les femmes sont lycéenne, étudiante ou prostituée. Les rares fois où elles exercent un métier, il est tourné en dérision.
Fin août début septembre d’Olivier Assayas est typique de cela: la vie du créateur est une longue souffrance, le péril qui le guette est l’intégration sociale et les femmes qui essayent de l’y attirer. 200'000 entrées seulement malgré les critiques élogieuses. Philippe Garrel, lui, n’a jamais eu plus de 95'000 entrées, et dans L’Amant d’un jour, il proclame que si les professeurs d’université couchent avec leurs étudiantes, c’est parce que celles-ci leur sautent dessus.
Dans Les Fantômes d’Ismaël d’Arnaud Desplechin, le héros est un cinéaste, incarné par Mathieu Amalric, alcoolique et colérique, que toutes les femmes s’arrachent et en particulier des stars telles que Marion Cotillard ou Charlotte Gainsbourg.
Benoît Jacquot s’est vanté publiquement de s’être payé une fille de 15 ans alors qu’il en avait 40.
Pendant le tournage de La Fille de quinze ans, Jacques Doillon, 45 ans, pelote quarante-cinq fois de suite Judith Godrèche qui en a 15 et ceci en présence, sur le plateau, de sa compagne d’alors, Jane Birkin.
Le cinéma des hommes
Bref, nous dit l’autrice, les études de cinéma doivent devenir critiques, doivent tenir compte du genre, de la classe et de la race, et non pas être d’éternelles exégèses de phantasmes de cinéastes intronisés «auteur», de cinéastes qui dénient le poids du social et ceci grâce à un système d’aides qui leur permet d’échapper aux déterminismes économiques.
L’autrice précise bien que le nombre d’entrées n’est pas son critère dominant, néanmoins, elle insiste à plusieurs reprises sur la proximité des cinéastes avec les critiques, avec les décideurs de la commission d’avance sur recettes et les animateurs des émissions spécialisées de radio du service public. Système qui pousse à produire, d’après elle, trop de films, un tiers des films français ayant réuni moins de 20'000 spectateurs en 2019, contre un quart en 2009.
Le cinéma des femmes
Soixante-trois réalisatrices françaises sont recensées sur une page Wikipédia et cela est unique au monde: Coline Serreau, Diane Kurys, Claire Denis, Nicole Garcia, etc. Oui, ça n’existe nulle part ailleurs.
Depuis les années 1990, un bonus de 15% est accordé par le CNC (Centre National du Cinéma) pour les équipes paritaires. Le pourcentage de films tournés par des femmes s'élève à 40% en 2024. Néanmoins, l’accès aux gros budgets, qui conditionnent la visibilité des films pour le grand public, leur reste impossible.
Une nouvelle génération aux accents féministes assumés
Depuis les années 2000, des premiers films de réalisatrices portent un regard acéré sur les discriminations, harcèlements, agressions que subissent les femmes, genre Baise-moi de Virginie Despentes ou Naissance des pieuvres de Céline Sciamma. Mais le poids de la domination masculine dans le milieu du cinéma a pour conséquence que les films suivants perdent souvent leur acuité dans la critique des discriminations genrées.
Valérie Donzelli, dans L’Amour et les Forêts, en 2023, traite des violences conjugales et de l’emprise avec l’espoir de permettre aux femmes qui y sont soumises de s’y soustraire.
Le récent Anatomie d’une chute de Justine Triet se distingue par la maitrise de son écriture qui a nécessité quarante-deux semaines de montage. C’est l’homme, le mari, qui, suite à diverses péripéties, y est en charge du care et Sandra, l’épouse, qui multiplie les rencontres sexuelles.
Alors que chez un réalisateur comme Abdellatif Kechiche, lors des scènes de sexe on voit tout, nous dit Geneviève Sellier, on ne ressent rien; chez les réalisatrices, on ne voit pas grand-chose, mais on ressent tout.
Le cinéma du milieu
Le film social souffre en France de dramatisation abusive. Il est souvent caricatural. N’est pas Ken Loach qui veut. On retrouve donc ici et aujourd’hui le débat qui existait entre les revues Positif (1952) et Les Cahiers du Cinéma (1951). Vu bien sûr, à présent, à l’aune d’un regard féministe mais pas seulement. Il peut même sembler que l’entre-soi élitiste des cinéastes et critiques du cinéma d’auteur, ne vivant principalement que de subventions, soit encore plus nocif que la misogynie crasse et le paternalisme inusable régnant dans ce petit milieu consanguin. L’autrice défend l’aspect sociologique qui déplait tant à la critique cinéphilique. Par exemple les films de Jaoui-Bacri, le cinéma du «milieu».
Un film avec des acteurs professionnels et des acteurs non-professionnels, c’est bien, écrit-elle. Cela donne de la «saveur» au film. Et si ça se passe en province, c’est encore mieux.
La plupart des films de réalisatrices relèvent donc de ce cinéma du «milieu», se situant entre le cinéma commercial et celui d’auteur, avec une volonté de sortir de l’entre-soi. Côté travail, Vénus Beauté (Institut) de Tonie Marshall prend au sérieux les clients et les employées d’un institut de beauté. Autre thématique absente du cinéma masculin: dans Le Lait de la tendresse humaine, de Dominique Cabrera, film sur le «baby blues», la maternité. Blandine Lenoir, dans Aurore, traite, elle, de la ménopause. La Pupille, de Jeanne Herry, décrit la prise en charge des enfants nés sous X. Rebecca Zlotowski, dans Les Enfants des autres, donne une version positive de la garde alternée et de la belle-mère. Catherine Corsini, dans La Fracture, rend compte du mouvement des Gilets jaunes et de la crise de l’hôpital public, en écho direct aux événements de 2019 à La Pitié-Salpêtrière, une réussite qui s’apparente justement aux meilleurs œuvres de Ken Loach.
La France, pays de l'impunité artistique
En France, si l’antisémitisme ou le racisme ne sont plus acceptés, la violence contre les femmes continue à être banalisée, voire valorisée.
En se débarrassant de la monarchie, la France a inventé le culte laïc du génie, l’écrivain romantique qui doit lutter contre la femme qui peut le priver de son autonomie artistique car du fait de son aliénation aux fonctions reproductives, celle-ci ne peut accéder au ciel des idées.
Aujourd'hui
Voilà donc la tâche qui s’impose à présent: revisiter – sans forcément les renier entièrement – les admirations qui nous ont construits, en ouvrant les yeux sur les abus de pouvoir que nos «grands hommes» pratiquaient au nom de l’Art. Et en s’efforçant de ne pas les perpétuer ni de les cautionner.
Au lieu de s’attendrir sur la «douleur» de l’homme violent, d’en faire une excuse, clamer une nouvelle volonté de prendre plutôt en compte la douleur des femmes qui l’accusent.
La bulle de rêve et de nostalgie doit voler en éclats et il faut en finir avec ce raisonnement pour le moins déconcertant selon lequel, si on refusait les abus de pouvoir, si on arrêtait de faire des blagues racistes ou sexistes, la vie deviendrait sinistre et le rire disparaitrait à tout jamais.
On nous répète que cela serait attentatoire à la liberté de créer. Naïvement, on a envie de demander: pourquoi? Pourquoi ne pourrait-on pas garder la liberté, l’exubérance, la fantaisie, tout en s’assurant que cette liberté est bien la liberté de tout le monde, et en étant attentifs aux rapports de pouvoir, et en refusant d’infliger ou de tolérer des violences, réelles ou symboliques, sexuelles, physiques ou psychologiques?
«Le culte de l’auteur. Les dérives du cinéma français», Geneviève Sellier, La Fabrique Editions, 160 pages.
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D’où cette épopée, récit d’un tête à tête mortifère et tour de force réalisé au stylo Bic quatre couleurs. Entre canapé et lit, la vie d’un couple et la naissance de deux enfants non désirés par leur génitrice avec donc, en filigrane, du début à la fin de cette aventure, la question de l’avortement.</p> <p>Quoi d’autre? Rien. Ou si peu. Au début, les salles de classe, ensuite, les lieux de travail, les parcs pour enfants et elle, notre artiste, qui, perpétuellement, n’ose pas ceci ou cela. Peu d’extérieur et tout à l’intérieur d’un appartement, quand ce n’est pas dans le sexe ou la matrice de la narratrice.</p> <h3>Les débuts, les Beaux-Arts, Stéphane</h3> <p>La narratrice a dix-huit ans et sa mère, catholique militante, lui prend sans cesse la tête avec l’avortement. Elle, rebelle, annonce à celle-ci qu’elle ne croit plus en Dieu. 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Faire sentir le passage du temps, pour ce lecteur assidu de Marcel Proust, a toujours été l’un de ses désirs majeurs. Et voici qu’alors germe en lui l’idée de peindre l’arrivée du printemps dans le paysage normand. </p> <p>Pour ce faire, Hockney acquiert une maison isolée. Une rangée de hauts peupliers borde la rivière, un cours d’eau traverse le terrain qui l’entoure, un ancien pressoir peut servir d’atelier. Il retourne à Los Angeles, passe par Amsterdam pour son exposition au musée Van Gogh, <i>The Joy of the Nature</i>. Van Gogh et lui étant exposés côte à côte! Jean Frémon le retrouve là-bas et ils visitent cette fois-ci une exposition Rembrandt honorant le 350ème anniversaire de la mort du maitre batave.</p> <p>Le 2 mars 2020, Hockney est en Normandie. Le Covid venant, sûr de ne pas être dérangé, il peut enfin se concentrer sur le but qu’il s’est fixé. Il dessine sur des carnets en accordéon un panorama à 360 degrés et ceci, quatre fois de suite. 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Architectures qui résistent à l’interprétation et semblent mener leur vie propre, comme détachées de leurs concepteurs, symptômes de crise molle et de désordre mou, hologrammes stupéfiant les touristes car monstres ils sont, et monstres il faut les laisser.</p> <h3>Sa décennie situationniste</h3> <p>Dans le n°1 de la revue <i>Utopie</i>, en mai 1967, Henri Lefebvre, dont Baudrillard est l’assistant, relève que la plaie du monde moderne est l’ennui. A la ville éternelle, Lefebvre oppose des villes éphémères et oppose aux centres inamovibles des centralités mouvantes. Baudrillard, quant à lui, postule que l’éphémère est sans doute la vérité de l’habitat du futur, que tout ce qui se consomme s’oppose à l’<i>habiter</i> qui est fondation et investissement. Et dans <i>Utopie</i> 2/3, en 1969, il affirme que la contestation est un bien de consommation comme un autre et que la répression moderne, devenue parfaite, se fait à présent au nom du jeu. Notre société s’appuie autant sur la consommation que sur sa dénonciation et la contestation artistique n’est plus qu’une modalité de la consommation. Nous n’avons plus de prise sur le réel parce que celui-ci n’existe plus.</p> <p>Le freudo-marxisme sonne la fin du désir et de la révolution. Ne reste plus qu’une catastrophe virtuelle qui sans cesse et sans trêve nous menace.</p> <h3>L'architecture</h3> <p>Oui. Il n’y a plus de projet, le lieu du pouvoir est vide, ne restent que des objets et ceux-ci nous racontent des histoires, jouent le spectacle de la chose, le simulent et agencent des espaces dans un monde d’infinies galeries marchandes virtuelles. Alors qu’il s’est démonétisé partout ailleurs, l’auteur, en architecture, est devenu <i>starchitecte</i> et dans les concours actuels, chacun va dans le sens de la mode du moment. Le talent, de nos jours, est défini, dans tous les domaines, start-up, sport, cuisine (<i>Masterchef</i>), chant (<i>The Voice</i>), architecture, par la compétition. </p> <p>Le commerce formate les espaces de flux, aussi bien le Louvre avec la Pyramide de Ieoh Ming Pei que toutes les gares parisiennes. Sous la présidence de François Hollande, un projet pour Notre-Dame propose de transformer les pavés du parvis de cette cathédrale chère à Victor Hugo en la toiture transparente d’un vaste centre commercial permettant à ses 13 millions de visiteurs annuels d’acquérir divers produits dérivés.</p> <h3>L'architecture post-moderne</h3> <p>L’architecture moderne s’est inspirée de l’industrie, la post-moderne marque sa connivence avec l’esthétique pop, les sciences humaines, la communication et le structuralisme.</p> <p>Une nouvelle condition intellectuelle caractérisée par l'abandon des grands récits de la modernité et marquée par le passage, un peu partout dans le monde occidental, des «masses», ces sujets uniformes, aux «multitudes», subjectivités fragmentées et agrégées suivant des formes variables. En écho à ce phénomène social, se dessine une nouvelle logique architecturale, qui prend acte de l’épuisement définitif de la notion de <i>standard</i>. Transparence, absence de profondeur, espaces inextricables mais sans mystère, tout communique sans que jamais deux regards ne se croisent. Derrière ses façades de verre, l’architecture est aveugle car quand tout est donné à voir, il n’y a plus rien à voir. L’un des modèles en est Las Vegas, ville du désert, entourée de boîtes de bière rouillées, n’exposant que des façades spectaculaires, ayant relégué toutes les fonctions, machineries et maintenances à la face obscure, au dos de ses palais-hangars et de ses <i>canards</i>! Ce qui, en Europe est dans l’esprit, là-bas est dans les choses, l’ordinaire y est extraordinaire, et ces choses, stations-services, parking, appartements ou immeubles quelconques, sont comme douées d’une infinie indulgence envers leur propre banalité.</p> <h3>Disneyland</h3> <p>Pour Baudrillard, Disneyland est le nouveau Versailles et la plus somptueuse des fêtes du vide, une copie dont l’original s’est perdu, une simulation aveuglante, qui produit un simulacre qui se trouve au-delà du faux. La Californie est le seul lieu du monde où le simulacre est d’origine, et où la mobilité l’emporte sur la monumentalité patrimoniale et figée.</p> <h3>Beaubourg</h3> <p>Le centre Pompidou de Richard Rogers et Renzo Piano est chimère spatiale et simulacre, point de vue panoramique sur une ville <i>carte postale</i> et, si le président Giscard ne s’y était pas opposé, la façade en aurait été un écran géant. Cet édifice léger, lumineux et transparent temple de la consommation culturelle, avec son look de raffinerie de pétrole, offre une négation des plus réussies de la fonction de sacralisation inhérente à toute entreprise muséologique, et échappe avec brio à tous les stigmates de la préfabrication.</p> <h3><em>Twin Towers</em></h3> <p>Alors que Baudrillard attendait un tremblement de terre en Californie, c’est sur la côte est, à Manhattan, le 11 septembre 2001 que finit la grève des événements qu’il avait diagnostiquée une décennie plus tôt.</p> <p>Pour lui, l’effondrement des <i>Twin Towers</i>, cœur de la finance internationale, préfigure l’aboutissement dramatique de cette forme d’architecture et du système qu’elles incarnent. Quelque chose se produit là sans jamais avoir été possible. Cette réversion de la toute-puissance du spectacle, cet écroulement du symbole de son arrogance, comme tout événement venant rompre le fil d’un quotidien mortifère, suscite une irrépressible jubilation inconsciente. </p> <h3>Jean Nouvel</h3> <p>La pensée de Baudrillard sert à m’inquiéter, dit Jean Nouvel, car les choses ne se développant jamais comme elles étaient prévues, l’architecte doit se faire du tracas. Pour lui, qui s’exprime plus en sociologue qu’en architecte, l’avenir de l’architecture n’est plus architectural mais littéraire. Le bâti doit parler, raconter, se focaliser sur les liens qu’il entretient avec le social. Comme Baudrillard, sociologue qui ne croit plus à ce social, Nouvel est un architecte qui ne croit plus en l’architecture. Il en résultera la publication d’un livre d’échanges entre eux, en 2000, intitulé <i>Les Objets singuliers. Architecture et philosophie</i>.</p> <h3>Jean Baudrillard</h3> <p>Ayant rompu avec le marxisme à la quarantaine, romantique théoricien pop et télégénique séducteur nonchalant, producteur d’aphorismes à la G. C. Lichtenberg, s’amusant à contredire systématiquement le sens commun et à retourner les expressions toutes faites, post dadaïste s’en remettant au hasard, adepte du paradoxe et de la pensée fragmentaire, traqueur d’impostures et remarquablement dénué de tout ressentiment, Baudrillard se veut avant tout et essentiellement lucide. </p> <p>Aux yeux de ce germaniste de formation, au tournant du siècle passé, nous avons assisté à la fin de la modernité et au début de l’ère de la simulation et du devenir-image de toute chose. La base démocratique s’est effritée, le corps électoral épuisé, d’où le pouvoir, dans un état d’urgence permanent, se retrouve contraint de passer toujours plus en force. Or, par sa situation transversale, au carrefour de l’esthétique et du scientifique, du politique et de l’artistique, de l’économique et du sociologique, l’architecture offre la possibilité d’une analyse de la synthèse de ces influences contradictoires. </p> <p>Grâce à sa pratique constante d’une écriture disruptive, Baudrillard semble être le seul parmi les célébrités de son temps, les Lyotard, Deleuze, Derrida et autres Foucault, dont les textes soient restés d’actualité. Le seul à avoir pressenti que tous les quidams, enfermés dans une hyper réalité et incapables de distinguer le vrai de l’imaginaire, pris dans un flux incessant d’informations et de représentations fausses, perdraient toute singularité, et subiraient une hypertrophie de l’information et de la communication qui dévorerait le sens.</p> <p>Oui. Les médias sont la matrice des choses, ce ne sont plus des intermédiaires, ce sont eux qui donnent ou qui retirent le sens: le médium est là avant l'évènement, dans une forme d’anticipation. Virus informatique, biologique, sociologique, il ne peut rien en lui-même sinon se répliquer. Emprunter des voies détournées et même muter s’il le faut. Pour circuler, il doit envahir d’autres cellules.</p> <p>Pour Baudrillard, la société contemporaine résistait par l’hyper conformisme, par le silence et par l’indifférence. Mélancolique et désenchanté de la modernité, jonglant avec des concepts tels que simulacre, simulation, séduction, réversibilité et dématérialisation, prophète criant sur des places publiques désertes, il sonnait le glas tout en pressentant qu’allait advenir le temps de toutes les sombres régressions qui nous menacent si brutalement aujourd’hui.</p> <hr /> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1720691232_61wzrjtdbzl._ac_uf10001000_ql80_.jpg" class="img-responsive img-fluid left " width="200" height="291" /></p> <h4>«Baudrillard et le monstre (l’architecture)», Jean-Louis Violeau, Editions Parenthèses, 144 pages.</h4>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'jean-baudrillard-et-l-architecture', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 81, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 6, 'person_id' => (int) 2107, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [[maximum depth reached]], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 4992, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => false, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => null, 'readed' => null, 'subhead' => null, 'title' => 'Voyeurs!', 'subtitle' => 'Dans son livre «Voyeur!», la journaliste-reporter Clémentine Thiebault a mené l'enquête, ausculté la littérature, la presse et la loi pour comprendre ce qu'est le voyeurisme. 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Au XXIème siècle, le voyeurisme est désormais viral et se répand comme une trainée de poudre à travers une foultitude inouïe de réseaux sociaux.</p> <h3>A l'ancienne: le gérant du motel</h3> <p>En janvier 1980, à New York, le célèbre journaliste Gay Talese reçoit une lettre anonyme en provenance du Colorado qui débute par: «Je crois être en possession d’informations importantes qui pourraient vous être utiles.» Dans cette missive, un certain Gerald Foos confesse être un voyeur et avoir acquis un motel à Denver dans l’unique but de le transformer en moyen d’exercer son vice. Il a donc, sans jamais être découvert, épié sa clientèle pendant plusieurs décennies, annotant dans le moindre détail ce qu’il observait et entendait. Aidé de son épouse et ayant découpé dans le plafond d’une douzaine de chambres des orifices rectangulaires de 15 centimètres sur 35, puis les ayant masqués avec de fausses grilles d’aération, il a pu, à l’infini, voir sans être vu. Parfois en se masturbant, parfois en faisant l’amour avec sa femme. Eprouvant un sentiment de puissance et d’exaltation, en 1973, par exemple, il observe 184 orgasmes masculins, 33 orgasmes féminins, et en 1974, l’année de la sortie de <i>Gorge profonde</i>, constate que la pratique de la fellation passe de 12 à 44%. Il a assisté à des vols, des trafics, des viols, des incestes, des actes de zoophilie, des morts et, digne d’une scène de <i>Psychose</i>, un meurtre. 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Et dans cet ouvrage, ce qu’il décrit, c’est un groupe d’hommes qui se refilent des bons plans: des portes d’hôtel, des toilettes de café, des lieux publics de rencontres d’amoureux.</p> <p>L’un des mateurs confiant à Henning que ce qu’on voit n’a pas grand intérêt et que c’est ce qu’on risque de voir qui vaut le coup. Eh oui, nous sommes en pleine métaphysique. Mais surtout dans une complète réification de l’autre et dans une non-réciprocité absolue. Certains se masturbent en fantasmant un viol, d’autres, un meurtre. </p> <p>Hennig va voir le voyeur d’<i>Une sale histoire</i>, 1977, de Jean Eustache, film en deux volets, l’un documentaire, l’autre fictionnel avec Michael Lonsdale. Le voyeur lui raconte en détails comme il observait des femmes en train d’uriner car si, dans le film, il reconnait que les femmes n’aiment pas son histoire, lui, dans la réalité, ne se lasse pas de la raconter. Cela se passait dans un café à la Motte-Picquet-Grenelle et c’est en se mettant à quatre pattes, la joue collée au sol, qu’il fallait regarder sous la porte. Au comptoir, des types trépignaient, sueur au front, en attendant leur tour d’y aller. Notre raconteur a fini par ne faire plus que ça, cinq heures par jour, et même à y amener des filles et à les pousser à boire, jusqu'au moment où il a réussi, juste avant de devenir complètement cinglé, à arrêter. </p> <h3><em>Peeping Tom</em></h3> <p>Côté voyeur au cinéma, le film quintessentiel et mythique est le<i> Peeping Tom</i> de Michael Powell. Dès le premier plan, nous sommes le jeune cameramen Mark Lewis et nous traquons la peur de la mort sur le visage de jeunes femmes en les filmant au moment où nous les tuons. Tout comme le Norman Bates de <i>Psychose</i>, Mark Lewis n’épie, ne traque et ne tue que des femmes. 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Six semaines que cela dure et l’infirmière qui vient chaque jour pour ses soins lui dit qu’on voit à l’état de ses yeux qu’il a regardé par la fenêtre pendant des heures. Y a de quoi! Jeff est persuadé que son voisin d’en face vient de tuer sa femme et de la couper en morceaux.</p> <p>Voilà. Un homme regarde et attend pendant que nous regardons cet homme et attendons ce qu’il attend, philosophent Chabrol et Rohmer dans <i>Les Cahiers du cinéma</i>. Tous spectateurs et tous voyeurs, le message est clair et confirmé à Truffaut par le maître du suspense. Pour lui, neuf personnes sur dix sont des voyeurs. 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Soit 17 cas par jour.</p> <p>Soranet, fermé en 2016, était un site qui comptait plus d’un million de membres et allait jusqu’à diffuser du <i>revenge porn</i>, ou le viol d’une femme inconsciente parce que droguée. </p> <p>En mars 2019, un site internet payant hébergé à l’étranger diffuse en direct des images de 1'600 clients espionnés dans 30 hôtels différents.</p> <p>Bref, le 9 juin 2018, révoltées par l’impunité notoire de tous ces voyeurs, 22'000 Sud-Coréennes défilent dans les rues de Séoul en martelant ce slogan: «<i>Ma vie n’est pas ton film porno</i>».</p> <h3>De nos jours: voyeurisme et révolution technologique</h3> <p>Aujourd’hui, les voyeurs usent de détecteurs de mouvements à vision nocturne et de caméras sans fil de la taille d’une clef USB, de caméras stylo et de lunettes caméra.</p> <p>En France, par exemple, 107'000 photos et 206 vidéos de femmes en train d’uriner sont découvertes dans l’ordinateur portable de Florent C., ingénieur chez Arcelor Mittal en Moselle. Il est inscrit au fichier des délinquants sexuels, condamné à trois ans de suivi socio-judiciaire et à indemniser ses victimes de 2'000 euros chacune.</p> <p>Ceci admis, on peut signaler que dans cette nouvelle pratique du voyeurisme ultra-équipée, deux éléments, la compulsion et l’impunité, ont résisté au changement, et que la plupart des articles sur le sujet parlent du voyeur mais toujours pas des femmes victimes et du traumatisme qu’elles peuvent avoir vécu . Cela continue à être vu par la presse comme des faits divers aguicheurs, ragots croustillants et autres étrangetés malséantes.</p> <h3>Nouveau terrain de chasse</h3> <p>Après les toilettes, la rue et les transports publics, un nouveau continent a été découvert par nos amis compulsifs: les Airbnb, créés en 2008.</p> <p>En 2017 en Floride, un couple ayant loué un logement découvre une caméra dissimulée dans le détecteur de fumée de la chambre à coucher. En janvier 2018, à Cran-Gevrier dans la banlieue d’Annecy, sept amis qui ont loué l’appartement d’un informaticien de 45 ans découvrent une caméra cachée dans un radio-réveil placé dans la salle de bains face à la douche et un autre de ces engins au-dessus du lit. En 2019, en Irlande, c’est une caméra cachée qui enregistre et diffuse en direct ce qui se passe dans le logement. Et en Seine-et-Marne, deux mille vidéos sont trouvées dans le téléphone portable du loueur. Il ne les a pas diffusées et il fera donc l’objet d’un simple rappel à la loi. En septembre 2021, à Tourcoing, un loueur a placé une caméra dans la salle de bains de l’appartement et les policiers découvrent dans son téléphone des dizaines de femmes nues filmées à leur insu. En décembre 2022, à Rouen, la locataire emporte avec elle le réveil et la multiprise qui une fois démontés dévoileront des images d’elle sous la douche et de ses amis aux toilettes. Au Canada, en 2023, un cas de voyeurisme 2.0 est rapporté tous les dix jours, trois fois plus qu’en 2017. En France, où on ne recense pas ce phénomène, on a quand même 857 infractions constatées en 2017.</p> <p>Interrogée à ce sujet, la plateforme Airbnb relativise le problème et déclare que sur un milliard d’arrivées de voyageurs enregistrées sur son site, ce genre d’incident est «incroyablement rare».</p> <p>Une histoire qu’on s’obstine à ne pas vouloir voir et encore moins punir. Clémentine Thiebault, l’autrice de <i>Voyeur!</i> dit avoir eu des moments de doute, de découragement et d’envie de juger. L’impression de fouiller dans une poubelle. Mais un élément a fini par émerger: les voyeurs sont des hommes, leurs victimes sont des femmes. Il s’agit d’une affaire de domination et on peut poser comme hypothèse que seules les femmes pensent que le voyeurisme est un problème. 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