Culture / L'irrépressible amour de Gérard Prunier pour un continent insensé
Paysage rwandais. © Joachim Huber - CC BY SA 2.0
Comme le dessinateur Robert Crumb auquel par moments il peut faire penser, Gérard Prunier va sur ses 80 ans, et, avec un indéniable brio, il vient de réussir sa première incursion dans le domaine de la fiction. Son recueil de treize nouvelles, «L’Amour est plus dangereux que la mâchoire des crocodiles», navigue sur une trentaine d'années et entre six pays d’Afrique de l’Est.
Il ne s’agit pas d’une autobiographie mais d’une série de vignettes sur les spécimens incroyablement divers d’individus mâles et femelles que Gérard Prunier a croisés, aimés, détestés, de gens avec qui il a fraternisé ou pas et que, parfois, il a vu mourir.
A mi-chemin entre le Corto Maltese d’Hugo Prat et le Charles Marlow d’Au cœur des ténèbres de Joseph Conrad, avec un côté délires sexuels à la Crumb donc, décrivant à la fois des moments quotidiens et des trips hallucinés, burlesques et saccadés, son livre se passe entièrement dans une région du monde dont il est un spécialiste universitaire reconnu et pour nous, de langue française, une région restée exotique parce qu’anglophone, et dont nos médias ne nous parlent quasi jamais, celle de la Corne de l’Afrique et des Grands Lacs.
Enseignant
La première nouvelle, «Rites funéraires», se passe en Ouganda. Au loin, mais très loin, on entend des rafales de tirs d’armes à feu, on tue. Nous sommes au crépuscule, à l’heure du gin and tonic, au bord du fleuve avec des aigrettes, des hérons gris, des hippopotames, des vipères, des orchidées et des hibiscus. Puis au matin, arrivant d’Entebbe, cela fait une semaine qu’ils dérivent, des cadavres apparaissent, de grotesques ballons entourés de nuages de mouches vrombissantes et gonflés par des gaz de décomposition. Qui va les enterrer? Les collègues africains ne peuvent pas. On pourrait les considérer comme des complices de ceux qui les ont exécutés. Robert se propose mais il veut un muzungu (un blanc) avec lui. C’est la première récurrence de ce terme, leitmotiv du livre. Le narrateur se propose. Avec Robert, ils se partagent une bouteille de waragi et d’acres petits cigares rwandais. Sortir les corps de l’eau est archi galère car ils éclatent en dégageant d’épouvantables gaz méphitiques.
Un salaire de coopérant représente quatre fois un salaire de métropolitain. Notre conteur est, selon la tradition anglo-saxonne qui veut qu’on s’occupe du corps et de l’esprit, prof d’histoire et de natation dans la meilleure école secondaire catholique du pays. Au cours d’un coup d’Etat organisé par les Anglais, Idi Amin Dada a pris le pouvoir et tout ce qui pense, journalistes, universitaires, politiciens, s’est enfui en Tanzanie. Les soldats des ethnies qui soutenaient Milton Obote disparaissent. On jette leurs corps en tas dans la brousse et les hyènes viennent les dévorer. On fait de même avec les journalistes américains trop curieux.
«Pourquoi veux-tu rester en Afrique?» demande Robert à notre héros.
«Parce que vous êtes vivants. Avec tout votre pus et tout votre sang. Avec toute votre folie. Parce que l’Europe est morte et que vous êtes vivants», lui répond-il.
«Votre jupe est trop courte», la seconde nouvelle, se passe aussi en Ouganda.
Idi Amin Dada, de retour de Libye, décide d’expulser tous les Indiens du pays. Le récit nous parle de Maria, une Indienne catholique, dont le frère est prof, collègue du narrateur. Tous leurs amis sont noirs mais elle, elle veut épouser un Indien issu d’une famille de brahmanes. Ou un muzungu catholique. Suite à une énième attaque des partisans de l’ex président Obote, attaque facilement repoussée, Idi Amin Dada décide de faire interdire les coiffures afro, les cheveux longs, les minijupes, les perruques, les barbes et les produits éclaircissant la peau. Du coup, Maria est arrêtée, car elle porte une pseudo minijupe. Mais la fliquette qui l’a arrêtée se laisse acheter, elle veut qu’on lui offre une vraie minijupe en cuir de Carnaby Street, lieu qui incarnait à l’époque, en 1972, tout ce qu’il y avait de plus désirable en matière de vêtements. Le narrateur, lui, part rejoindre la guérilla en Tanzanie.
Journaliste
Journaliste africaniste, touchant de maigres piges assurant sa survie, ça n’était pas un vrai métier, écrit-il, juste une vocation issue de l’irrépressible amour qu’il ressentait pour ce continent insensé. «Le monde était beau et tout neuf et la guerre n’était qu’un vague prétexte pour le serrer contre ma poitrine.» Dans la nouvelle «Nyabiingi», il situe l’action en 1991 et au Rwanda où a lieu une petite guerre négligée. Perdu dans les nuages et les Grands Lacs, il y a d’énormes cactus vert sombre, des fleurs qui poussent en étant déjà sèches sur leur tige, des arbres monstrueux aux noms inconnus, une flasque de cognac, des cigarillos, une hutte, une femme nue aux petits seins pointus, à la taille moyenne, mince et nantie d’un pubis modeste d’une toute jeune fille, qui du bas ventre avale son sexe turgescent, un tremblement de terre les accompagne. Il coïte avec le divin! il éjacule et s’évanouit, c’était une apparition, la déesse Nyabiingi.
Trois ans plus tard, le 6 avril 1994, deux missiles abattent l’avion du président Habyarimana et les radicaux hutu massacrent 800'000 Tutsi et Hutu modérés. Et lui, devant cette horreur insondable, pleure de toute l’impuissance qui l’habite.
Interprète
«Virginité» est sise à Nairobi, au Kenya, en 1977, où le narrateur est interprète pour une équipe de la RAI qui tourne un documentaire sur les autruches. Il y rencontre Sarah, femme à la poitrine plantureuse, à la bouche charnue, à la peau ébène et mate, qui irradie la santé et dont l’apparence est modeste, et sa prononciation de l’anglais excellente, et qui lui donne l’occasion de nous apprendre qu’il aime à pratiquer le cunnilingus, qu’il considère son pénis comme étant l’archet d’un violon qui permet de voler au-dessus des nuages et qu’il est un adorateur de ce «vagin africain» auquel il attribue «la maturité d’une figue, la splendeur d’un fruit de la passion et la douceur de la pulpe de la papaye».
Fermier et chauffeur de camion
Dans «Ananas», à Bahar el-Fil, au Soudan, en 1983, il joue au fermier. Mais là, il se retrouve avec des milliers de fruits détruits, des milliers de dollars perdus, 40 poulets volés, son airedale décapité. Il a envie de pleurer. Cela fait quatre ans qu’il est là. Il fait moitié-moitié avec le propriétaire. Les deux premières années, il n’a rien gagné. Il cultive des mangues et des ananas, écrit des articles pour des périodiques américains genre National Geographic Magazine, boit du gin Melotti. La troisième année, il remet plusieurs milliers de dollars au proprio qui lui dit: «Tu es le diable. Tous les Blancs sont des diables. Cinq mille dollars! Et avec une terre pareille!»
Là, Osman, son aide, qui a la démarche souple, féline et silencieuse des Dinka, lui annonce qu’il doit le tuer mais qu’il ne veut pas le faire. Par contre, il doit partir et vite. On raconte partout qu’il est un ami des Arabes, ce qui équivaut à un baiser de la mort. Ainsi, après quatre ans d’épreuves, de lutte et de danger partagés, ils finissent sa dernière bouteille de bordeaux ensemble avant qu’il ne fuie en Ethiopie.
Dans «Les moutons de l’aube», en Somalie, en 1989, on voit passer une Kalachnikov avec deux chargeurs collés ensemble à coup de gros ruban adhésif, un avion qui vole trop haut pour être un bombardier, et Abdi qui a vécu longtemps à Aubervilliers et qui chauffe du café sur un feu d’épines craquantes pendant que notre conteur, qui a très bien dormi, ouvre lentement les yeux et découvre encore et à nouveau une beauté sauvage qui va droit au cœur, un ciel sans nuage, des épineux frangés de verdure. Eh oui, ainsi qu’il l’écrit: «Ils ont tout le temps du monde mais tout de suite ils n’ont pas beaucoup de temps. Dans l’immensité temporelle indifférenciée où ils vivent, il y a de subites accélérations suivies d’immenses plages d’indifférence.»
Un dernier mot sur l'auteur
Gérard Prunier, chercheur au CNRS, a écrit une vingtaine de livres, décrivant des ethnies de l'Afrique de l'Est, la crise rwandaise, la famine au Darfour, l’Ethiopie contemporaine ou une description fouillée de ce pays qui existe mais qu’aucun Etat ne reconnaît, le Somaliland. Il a effectué des missions en Egypte, au Soudan, en Ouganda, au Kenya, en Ethiopie, à Djibouti, en Somalie, au Rwanda, au Burundi et au Congo-Kinshasa. En 1994, il conseille les militaires français dans le cadre de l'opération Turquoise qui se déploie au Rwanda et assiste Jean-Christophe Rufin qui a pour mission de tenter d’éviter des affrontements entre les troupes du Front patriotique rwandais (FPR) et les militaires français. Il est détaché du CNRS comme directeur du Centre français des études éthiopiennes à Addis-Abeba de 2001 à 2006.
Bref
Dans ce revivifiant petit livre, on tranche la gorge à un ancien Premier ministre, on châtre le maire de la capitale, on massacre à tour de bras. Tout ce qu’il raconte est tellement horrible! Et après, paradoxalement, cette vie fait tellement envie. Cet humour noir, ce burlesque si abrasif. Cette fresque qui fuse de noms de chefs d’Etat, d’un feu d’artifice de dictateurs, Idi Amin Dada, Milton Obote, Yoweri Museveni, Juvénal Habyarimana, d’une foultitude de mouvements politiques, genre NRM, UFM, FPR, KANU, ou IPK, étrange poésie lettriste, d’une infinité de routes, de villes, de Zanzibar à Djibouti, d’engagements, d’affiliations partisanes, de langues, tel l’amharique, le somali, le luganda et le swahili, de dialectes, de tribus, d’ethnies, d’Acholi, Langi, Alur, Lugbara, de Luo et autres Kikuyu, de fruits, de fleurs, d’arbres, d’animaux.
Oui, cet ouvrage rend grâce et justice à la vie mouvementée et aventureuse dans laquelle, sans jamais être dupe, Gérard Prunier a aimé, adoré tout, terre et gens, où, en toute modestie, il fait l’amour à l’Afrique, à un fleuve de vie qui charrie des cris, des cadavres mais aussi de l’amour, tellement d’amour, et de la vie donc, de l’énergie et du mouvement, la vitalité elle-même telle qu’elle fut incarnée en ces décennies insensées.
«L'amour est plus dangereux que la mâchoire des crocodiles», Gérard Prunier, Gallimard, 176 pages.
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Au loin, mais très loin, on entend des rafales de tirs d’armes à feu, on tue. Nous sommes au crépuscule, à l’heure du <i>gin and tonic</i>, au bord du fleuve avec des aigrettes, des hérons gris, des hippopotames, des vipères, des orchidées et des hibiscus. Puis au matin, arrivant d’Entebbe, cela fait une semaine qu’ils dérivent, des cadavres apparaissent, de grotesques ballons entourés de nuages de mouches vrombissantes et gonflés par des gaz de décomposition. Qui va les enterrer? Les collègues africains ne peuvent pas. On pourrait les considérer comme des complices de ceux qui les ont exécutés. Robert se propose mais il veut un <i>muzungu </i>(un blanc<i>)</i> avec lui. C’est la première récurrence de ce terme, leitmotiv du livre. Le narrateur se propose. Avec Robert, ils se partagent une bouteille de <i>waragi</i> et d’acres petits cigares rwandais. 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Parce que l’Europe est morte et que vous êtes vivants», lui répond-il.</p> <p>«Votre jupe est trop courte», la seconde nouvelle, se passe aussi en Ouganda.</p> <p>Idi Amin Dada, de retour de Libye, décide d’expulser tous les Indiens du pays. Le récit nous parle de Maria, une Indienne catholique, dont le frère est prof, collègue du narrateur. Tous leurs amis sont noirs mais elle, elle veut épouser un Indien issu d’une famille de brahmanes. Ou un<i> muzungu </i> catholique. Suite à une énième attaque des partisans de l’ex président Obote, attaque facilement repoussée, Idi Amin Dada décide de faire interdire les coiffures afro, les cheveux longs, les minijupes, les perruques, les barbes et les produits éclaircissant la peau. Du coup, Maria est arrêtée, car elle porte une pseudo minijupe. Mais la fliquette qui l’a arrêtée se laisse acheter, elle veut qu’on lui offre une vraie minijupe en cuir de Carnaby Street, lieu qui incarnait à l’époque, en 1972, tout ce qu’il y avait de plus désirable en matière de vêtements. Le narrateur, lui, part rejoindre la guérilla en Tanzanie. </p> <h3>Journaliste</h3> <p>Journaliste africaniste, touchant de maigres piges assurant sa survie, ça n’était pas un vrai métier, écrit-il, juste une vocation issue de l’irrépressible amour qu’il ressentait pour ce continent insensé. «Le monde était beau et tout neuf et la guerre n’était qu’un vague prétexte pour le serrer contre ma poitrine.» Dans la nouvelle «Nyabiingi», il situe l’action en 1991 et au Rwanda où a lieu une petite guerre négligée. Perdu dans les nuages et les Grands Lacs, il y a d’énormes cactus vert sombre, des fleurs qui poussent en étant déjà sèches sur leur tige, des arbres monstrueux aux noms inconnus, une flasque de cognac, des cigarillos, une hutte, une femme nue aux petits seins pointus, à la taille moyenne, mince et nantie d’un pubis modeste d’une toute jeune fille, qui du bas ventre avale son sexe turgescent, un tremblement de terre les accompagne. Il coïte avec le divin! il éjacule et s’évanouit, c’était une apparition, la déesse Nyabiingi.</p> <p>Trois ans plus tard, le 6 avril 1994, deux missiles abattent l’avion du président Habyarimana et les radicaux hutu massacrent 800'000 Tutsi et Hutu modérés. Et lui, devant cette horreur insondable, pleure de toute l’impuissance qui l’habite.</p> <h3>Interprète</h3> <p>«Virginité» est sise à Nairobi, au Kenya, en 1977, où le narrateur est interprète pour une équipe de la RAI qui tourne un documentaire sur les autruches. Il y rencontre Sarah, femme à la poitrine plantureuse, à la bouche charnue, à la peau ébène et mate, qui irradie la santé et dont l’apparence est modeste, et sa prononciation de l’anglais excellente, et qui lui donne l’occasion de nous apprendre qu’il aime à pratiquer le cunnilingus, qu’il considère son pénis comme étant l’archet d’un violon qui permet de voler au-dessus des nuages et qu’il est un adorateur de ce «vagin africain» auquel il attribue «la maturité d’une figue, la splendeur d’un fruit de la passion et la douceur de la pulpe de la papaye». </p> <h3>Fermier et chauffeur de camion</h3> <p>Dans «Ananas<i>»</i>, à Bahar el-Fil, au Soudan, en 1983,<b> </b>il <b></b>joue au fermier. Mais là, il se retrouve avec des milliers de fruits détruits, des milliers de dollars perdus, 40 poulets volés, son airedale décapité. Il a envie de pleurer. Cela fait quatre ans qu’il est là. Il fait moitié-moitié avec le propriétaire. Les deux premières années, il n’a rien gagné. Il cultive des mangues et des ananas, écrit des articles pour des périodiques américains genre <i>National Geographic Magazine</i>, boit du gin Melotti. La troisième année, il remet plusieurs milliers de dollars au proprio qui lui dit: «Tu es le diable. Tous les Blancs sont des diables. Cinq mille dollars! Et avec une terre pareille!»</p> <p>Là, Osman, son aide, qui a la démarche souple, féline et silencieuse des Dinka, lui annonce qu’il doit le tuer mais qu’il ne veut pas le faire. Par contre, il doit partir et vite. On raconte partout qu’il est un ami des Arabes, ce qui équivaut à un baiser de la mort. Ainsi, après quatre ans d’épreuves, de lutte et de danger partagés, ils finissent sa dernière bouteille de bordeaux ensemble avant qu’il ne fuie en Ethiopie.</p> <p>Dans «Les moutons de l’aube», en Somalie, en 1989, on voit passer une Kalachnikov avec deux chargeurs collés ensemble à coup de gros ruban adhésif, un avion qui vole trop haut pour être un bombardier, et Abdi qui a vécu longtemps à Aubervilliers et qui chauffe du café sur un feu d’épines craquantes pendant que notre conteur, qui a très bien dormi, ouvre lentement les yeux et découvre encore et à nouveau une beauté sauvage qui va droit au cœur, un ciel sans nuage, des épineux frangés de verdure. Eh oui, ainsi qu’il l’écrit: «Ils ont tout le temps du monde mais tout de suite ils n’ont pas beaucoup de temps. Dans l’immensité temporelle indifférenciée où ils vivent, il y a de subites accélérations suivies d’immenses plages d’indifférence.»</p> <h3>Un dernier mot sur l'auteur</h3> <p>Gérard Prunier, chercheur au CNRS, a écrit une vingtaine de livres, décrivant des ethnies de l'Afrique de l'Est, la crise rwandaise, la famine au Darfour, l’Ethiopie contemporaine ou une description fouillée de ce pays qui existe mais qu’aucun Etat ne reconnaît, le Somaliland. Il a effectué des missions en Egypte, au Soudan, en Ouganda, au Kenya, en Ethiopie, à Djibouti, en Somalie, au Rwanda, au Burundi et au Congo-Kinshasa. En 1994, il conseille les militaires français dans le cadre de l'opération Turquoise qui se déploie au Rwanda et assiste Jean-Christophe Rufin qui a pour mission de tenter d’éviter des affrontements entre les troupes du Front patriotique rwandais (FPR) et les militaires français. 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Cette fresque qui fuse de noms de chefs d’Etat, d’un feu d’artifice de dictateurs, Idi Amin Dada, Milton Obote, Yoweri Museveni, Juvénal Habyarimana, d’une foultitude de mouvements politiques, genre NRM, UFM, FPR, KANU, ou IPK, étrange poésie lettriste, d’une infinité de routes, de villes, de Zanzibar à Djibouti, d’engagements, d’affiliations partisanes, de langues, tel l’amharique, le somali, le luganda et le swahili, de dialectes, de tribus, d’ethnies, d’Acholi, Langi, Alur, Lugbara, de Luo et autres Kikuyu, de fruits, de fleurs, d’arbres, d’animaux.</p> <p>Oui, cet ouvrage rend grâce et justice à la vie mouvementée et aventureuse dans laquelle, sans jamais être dupe, Gérard Prunier a aimé, adoré tout, terre et gens, où, en toute modestie, il fait l’amour à l’Afrique, à un fleuve de vie qui charrie des cris, des cadavres mais aussi de l’amour, tellement d’amour, et de la vie donc, de l’énergie et du mouvement, la vitalité elle-même telle qu’elle fut incarnée en ces décennies insensées.</p> <hr /> <h4><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1655904779_71acfs4vcbl.jpg" class="img-responsive img-fluid left " width="194" height="284" /></h4> <h4>«L'amour est plus dangereux que la mâchoire des crocodiles», Gérard Prunier, Gallimard, 176 pages.</h4>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'l-irrepressible-amour-de-gerard-prunier-pour-un-continent-insense', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 323, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 6, 'person_id' => (int) 2107, 'post_type_id' => (int) 1, 'poster_attachment' => null, 'editions' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Edition) {} ], 'tags' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Tag) {} ], 'locations' => [], 'attachment_images' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'attachments' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'comments' => [], 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ '*' => true, 'id' => false ], '[dirty]' => [], '[original]' => [], '[virtual]' => [], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [], '[invalid]' => [], '[repository]' => 'Posts' } $relatives = [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 4911, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => false, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => null, 'readed' => null, 'subhead' => null, 'title' => 'Oskar Kokoschka: apologie du dessin', 'subtitle' => 'Aglaja Kempf, conservatrice de la Fondation Oskar Kokoschka, présente dans un splendide nouvel ouvrage publié ces jours-ci aux Cahiers dessinés,150 dessins du maitre. 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Il a revendiqué ce point de vue dès le début de sa très longue carrière. Appartenant donc à un genre souverain et indépendant, ses dessins proposent une très grande variété d’approches et de couleurs, dans des palettes de tons différenciés, et dégagent souvent une impression de grande vitalité, de plaisir, de sensualité, l’impression d’une perception subjective plutôt qu’objective. L’expression est émotion immédiate et dans ses productions, il ne cherche jamais à rendre la réalité mais bien plutôt le fourmillement des sensations qui le traversent, quand, concentré, il s’exerce à capter l’expression d’un visage, un geste, un paysage, un mouvement. Ses nus, devenus très vite non conventionnels, accordent une attention particulière aux chevelures et aux mains. Auguste Rodin, Ferdinand Hodler, Gustav Klimt, Aubrey Beardsley sont ceux qu’il espère dépasser. 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En 1909, il expose des nus qui plaisent beaucoup et sont très rapidement vendus. Dans les années 1910, il réalise des dessins très travaillés, entre autres pour la revue <i>Sturm</i>. Traits secs et nerveux, densification des lignes, portraits expressionnistes d’hommes et de femmes, suites d’illustrations, passage à la lithographie, il expérimente à tout va. En 1911, il donne des cours dans une école privée et en 1912 et 1913, enseigne le nu au sein d’une institution qu’il a lui-même créée. 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Adolf Loos, en 1913, organise au Kunsthaus de Zurich une présentation d’une douzaine de ceux-ci, présentation ressentie par la plupart des indigènes helvètes comme un conte d’épouvante.</p> <p>Mais, événement entre tous historique, voici que Dada débarque et que la comédie de Kokoschka, <i>Le sphinx et l’homme de paille, </i>est jouée le 14 avril 1917 au Cabaret Voltaire à Zurich. Marcel Janco en signe les masques que portent les comédiens et la mise en scène, Tristan Tzara joue le rôle du perroquet, Emmy Hennings celui de l’infidèle Anima, Friedrich Glauser, la mort et Hugo Ball, Firdusi, l’époux trompé. Dans <i>La fuite hors du temps</i>, qu’il écrit et publie dix ans plus tard, Ball nous raconte le chaos qui règne ce soir-là sur la scène: «Malgré le prix d’entrée élevé, la Galerie était trop petite pour contenir tous les visiteurs. Dans une pièce du fond, Tzara était responsable de l’éclair et du tonnerre et, comme un perroquet, il devait répéter "Anima, douce Anima!". Mais il confondait les entrées et les sorties, faisait éclater l’orage aux mauvais moments et donnait, à tout prendre, l’impression que c’étaient des effets spéciaux, une confusion calculée des arrière-plans. Finalement, lorsque Monsieur Firdusi était censé tomber, tout s’est embrouillé dans une pagaille de fils électriques et de lampes. Pendant quelques minutes, ce fut la nuit noire et la confusion totale; après quoi la Galerie a retrouvé son aspect habituel.» </p> <p>La Seconde Guerre mondiale passée, la Suisse offrant à Kokoschka des perspectives de commandes de portraits et une clientèle prospère, en 1951, il décide de se faire construire une petite villa sur les bords du lac Léman: «Ce n’est pas par fierté de propriétaire, mais simplement le désir de pouvoir souffler de temps en temps quelque part au cœur de l’Europe dans un lieu politiquement paisible», écrit-il à sa sœur.</p> <p>En 1953, il s’établit définitivement non loin du Château de Chillon, à Villeneuve. Il y passe les vingt-sept dernières années de son existence, et décède en 1980, à Montreux, à l’âge de nonante-quatre ans et en ayant donc vécu un tiers de sa vie en pays vaudois.</p> <h3>Portrait de l'artiste dessinant</h3> <p>Il existe de nombreuses photographies le montrant, regard vif, main souple, dessinant avec agilité des vestiges archéologiques, noircissant des centaines de pages dans ses carnets de croquis, explorant des thèmes liés à l’Antiquité ou effectuant des reproductions dans des musées, redessinant inlassablement des bribes de tragédies grecques ou de récits mythologiques afin d’y trouver le ferment commun de toutes les sociétés, des décors et des costumes de théâtre ou d’opéras. Bref, c’est son destin, il l’a accepté et il dessine et redessine sans trêve ni repos.</p> <p>Pendant septante ans, à coups de traits outrés et fracturés, de visions oniriques, il alterne des représentations d’insectes, de nus, de scènes bibliques ou mythologiques et des paysages aux perspectives bizarres, Kokoschka préférant une vue bifocale à la perspective cavalière, vue embrassant l’étendue du paysage, des représentations de fleurs, d’animaux. Dans le paysage, ce qui l’intéresse, ce n’est pas l’idylle, mais la nature à l’état sauvage, indomptée. 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Oui, de porter une attention soutenue à ce qui nous environne, car si le dessin, comme il l’écrit, déplie le visible, cela ne peut être que pour le pénétrer plus intensément.</p> <h3>Les débuts</h3> <p>Le dessin est une activité solitaire, peinture des jours de pluie, enfermé dans une pièce et l’infini plaisir de n’avoir à faire que ça, ok, d’accord, mais c’est avec sa main dans le bac à sable que Philippe Comar a commencé à dessiner, ou avec un doigt sur des meubles couverts de poussière, sur des vitres embuées, dans de la farine, de la pâte à tarte, en piétinant la neige, en courant dans le sable. Il a dessiné dans le noir avec la pointe de sa langue dans le creux de sa main. En crachant sur les murs, en envoyant gicler des gouttes à la brosse à dent, à la craie sur les trottoirs, au canif sur les arbres. Il a dessiné sur ses mains avec un stylo à bille et comme Léonard de Vinci, il a aimé contempler sans penser à rien les tâches fortuites sur les murs, les traces de moisissure. Il a eu une période labyrinthes, dédales, passerelles, escaliers dérobés, tout un monde à la Piranèse. Il s’est essayé à l’anamorphose, aux dessins étirés, gonflés, dilatés. Pour lui, le dessin n’est jamais au service de quelque chose d’autre. Il est une fin en soi, un moment de grâce durant lequel on peut enfin s’abandonner à un afflux de sensations. Bien sûr, croyant observer, on ne fait qu’effleurer ce qu’on voit et c’est en cela que l’acte de dessiner est plus important que le dessin fini. Comme l’écrivait en 1971 le célèbre historien d’art John Berger, il s’agit de voir le voir. Et même en dessinant d’après nature, de trouver non pas ce que l’on voit mais ce que l’on sent.</p> <h3>Les fluides</h3> <p>Ces <i>Premiers traits</i>, indiqués dans le titre de ce nouvel opus, sont ceux que tracent, depuis l’enfance, tous les fluides qui s’écoulent du corps: salive, lait, larmes, urine. A l’école primaire, un jour, la maitresse le sermonne: il a couvert pendant des mois son bureau de centaines de petits dessins. Et pourquoi pas faire pipi sur les pupitres, s’exclame-t-elle. Toute la classe se gondole et en guise de punition, le petit Philippe est enfermé toute une longue et interminable journée dans les toilettes, et ceci sans manger ni boire et sans lumière. D’où que depuis ce jour-là, il associe l’acte d’uriner et le dessin. Et effectivement, tel Gargantua, du haut des tours de Notre-Dame, il adore dessiner ainsi sur le sable. 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Répétons-le: pour lui, il ne s’agit pas d’imiter mais de traduire un ressenti.</p> <h3>Le trait, la tache</h3> <p>Lorsqu’il a sept ans, sensible à l’application qu’il met à copier des tableaux, ceux du Greco par exemple, ses parents l’inscrivent dans une Académie dite «du Jeudi». Les enfants y peignent debout et n’y apprennent rien mais pratiquent assidument la chose. Et notre jeune futur artiste y prend plaisir à tracer des lignes parallèles et à s’y s’entraîner à tracer des lignes régulières, à main levée ou à la règle. C’est une technique qu’il connaît par les illustrations exécutées au burin figurant dans ses livres de classe. Dans son ouvrage, après une vibrante apologie de la gomme, il enchaîne avec celle d’une roulotte de bohémiens, de leur osier tressé pour les paniers, et de la petite bohémienne, pieds nus et cheveux sales pour laquelle il ressent une forte attirance physique. Sujet à sa première érection spontanée, il apprend ce jour-là que le sale et le sexuel ont affaire ensemble et que la découverte de l’outil peut précéder la connaissance de sa fonction. D’un côté, le trait aigu qui cerne. De l’autre, la tâche qui bave. Deux bornes: idéalisme et réalisme. Rodin, dans ses dessins érotiques, associe d’ailleurs ces deux démarches.</p> <h3>Le dessin: une habitude</h3> <p>Notre artiste, cent pour cent sédentaire, habitant depuis cinquante ans la même maison, homme d’habitudes, retrouve ce trait de caractère dans l’acte même de dessiner: le désir de retenir à tout prix, de saisir ce qui fuit. Très tôt sensible au pouvoir du dessin et des mots, la frontière entre les deux n’étant pas aussi nette qu’il y paraît, pour lui les mots ne sont pas que des signes arbitraires. Leur graphie suggère des figures. Ne parle-on pas en typographie de corps de la lettre, de jambage et d’empattement.</p> <h3>Palimpsestes, copies et détournements</h3> <p>En 1961, un sigle <i>OAS</i> ayant été transformé dans son quartier en <i>ONASSIS</i>, nom de l’amant de la Callas et de l’époux de Jacqueline Kennedy, il découvre l’art du détournement. On peut donc masquer le mot originel sans le rayer ou le biffer. Dès lors, il s’applique à faire disparaître ses propres dessins obscènes sous des dessins anodins. Ces palimpsestes sont suivis du détournement de photos de magazines sur lesquelles il modifie le sens d’une image sans que la retouche y soit visible. Il devient aussi, très tôt, faussaire. A dix, onze ans, il réalise déjà de faux tickets d’autobus et de faux timbres-poste, chaque ticket lui demandant plusieurs heures de travail. Une bonne copie doit être plus allusive que descriptive, pas trop précise pour ne pas se faire remarquer. Et petit-à-petit, il se met à remplacer la Marianne sur les lettres et cartes postales par des fragments de corps nus de dame. Oblitéré par la Poste, le timbre devient œuvre.</p> <h3>S'auto créer par et pour le dessin</h3> <p>Ses parents n’ont pas une sensualité marquée, son père lui inflige des fessées pantalon baissé, sa mère répugne au contact physique avec ses enfants et lui, il dessine en cachette des femmes nues, dessins qu’il détruit ensuite. Il rêve aussi d’auto-fellation et de s’auto-dévorer lui-même et retrouve cela dans un personnage de Saul Steinberg, personnage s’auto-dessinant et dans certains dessins de Hans Bellmer, un corps s’auto-dessinant également; et finit par penser que le phantasme d’auto-engendrement est l’essence même de l’art.</p> <h3>Dessin d'enfant</h3> <p>Les dessins d’enfant permettent-ils de retracer les fondements d’une œuvre à venir? Rien n’est moins certain, tant les choix individuels et les partis pris d’un artiste ne se dégagent que lentement des archétypes propres aux dessins d’enfant. Tout en tentant de saisir ce qui, dans ses premières expériences graphiques, a nourri sa pratique actuelle de dessinateur, Philippe Comar n’est guère porté à leur attribuer plus d’attention qu’ils n’en méritent. </p> <p>Pourtant, le XXème siècle a préféré cette naïveté à tous les savoirs. Lui, à l’inverse, défend la maitrise du dessin en tant que plaisir originel secondant phantasme jouissance et hédonisme. Il n’angélise rien, goûte à tout, nous raconte ses émois les plus anciens, scatologie et signes fortement sexués. Oui, décidément, dessiner, c’est voir et voir mieux.</p> <h3>Epitaphe</h3> <p>Très tôt, il a été obnubilé par la représentation des rayons lumineux. Fasciné donc par tout ce qui trace, que ce soit droit ou courbe, une ligne dans l’air, sans écran, ni feuille de papier: étoile filante, sillage d’avion, etc. Les traités de balistique en sont pleins. Un trait est un signe, une abstraction, les rayons de soleil, la ligne d’horizon en sont aussi mais dans la nature rien n’est parfait et tout a une dimension charnelle. Aux lignes droites qu’il observe dans le ciel s’ajoutent les cercles concentriques entourant le caillou qu’il vient de jeter dans l’eau. Et la courbe que trace en l’air, écrit-il, le jet mictionnel et qui se retrouve chez les peintres Lorenzo Lotto, Jean Cousin, Titien, Rubens, Rembrandt, Guido Remi et tant d’autres encore. Et les coquillages, les vignes, les crosses de fougère. Mais de toutes les lignes, celles qui l’ont le plus fasciné sont les herbes. Toutes les sortes d’herbes qui existent, le gazon dru, le chiendent, les hautes graminées et la <i>Grande touffe d’herbes </i>de Dürer lui paraît être le plus beau dessin jamais exécuté. Une douzaine d’espèces d’herbacés y sont représentées. A l’âge adulte, de la pousse native jusqu’à la pourriture, il a lui aussi tenté de relever le défi et exécuté plusieurs séries de cet inépuisable sujet. Et c’est pourquoi, il propose qu’on grave en guise d’épitaphe sur son futur humble tombeau: <i>Ci-gît un dessinateur en herbe</i>.</p> <hr /> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1713367235_arton465.jpg" class="img-responsive img-fluid left " width="200" height="247" /></p> <h4>«Premiers traits», Philippe Comar, Editions L'Atelier contemporain, 112 pages.</h4>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'ci-git-un-dessinateur-en-herbe', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 35, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 6, 'person_id' => (int) 2107, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [ [maximum depth reached] ], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 4818, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => false, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => null, 'readed' => null, 'subhead' => null, 'title' => 'Dominique Goblet, un livre envoûtant et une exposition à Bâle', 'subtitle' => '«Le Jardin des Candidats» de Dominique Goblet et Kai Pfeiffer est un livre grand format où se croisent bande dessinée et art contemporain, céramiques, sculptures, ready-mades, aquarelles et strips narratifs, dans une totale liberté de ton. 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Les salles suivantes retracent l'ensemble de son parcours artistique, des carnets y côtoyant des planches dessinées et de grands formats peints, mêlant fantasmes et plongées dans l'intime. Dans les dernières salles, partant d’annonces de sites de rencontre, Dominique Goblet et Kai Pfeiffer, les deux auteurs du <i>Jardin des candidats</i>, imbriquent leurs dessins, décloisonnent les disciplines et incluent dans leur scénographie installations et fresques murales.</p> <p>Par ailleurs, dans une vidéo qui figure sur le site du musée, on peut entrapercevoir Dominique Goblet pleine de vie et d’énergie pétillante bloquant un tram à Bâle pour laisser passer la fanfare invitée en l’honneur de son show.</p> <h3>Le livre</h3> <p><i>Le</i> <i>Jardin des Candidats</i> est totalement convaincant et on ne peut qu’en vanter l’indéniable réussite plastique. Toutes les expérimentations formelles y sont au service d'une écriture et tout y est rendu comme étant nécessaire et parfait.</p> <p>En ouverture, un paon déclare dans une bulle: «cherche relation suivie pour moments câlins dans le jardin». <i>Aléa jacta es</i>, les dés sont jetés, toutes les citations sont issues de véritables textes de profils sur des sites de rencontre, apprend-t-on ensuite. Il y a ainsi de la végétation et une voix, celle de la Mère, figure mythique de l’adoration. Elle est «La Grande Absence». Elle possède un amas de livres détrempés et une piscine inachevée. Elle est l’Unique Divin Problème et quand il fait soleil ou quand il pleut, c’est parce qu’elle en a besoin. Les candidats repérés sur internet sont rassemblés dans le parc parmi des buissons, des vases, des paons, des trous et un barbecue. Ils y errent, ils y besognent, jardinent ou se délassent. 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Quand il fait soleil ou quand il pleut, c’est parce qu’Elle en a besoin.</p> <p>Des hommes en manque comme s’il en pleuvait, se soumettent avec docilité à tous ses caprices, elle leur demande de creuser, ils creusent. Des hommes avec des cheveux frisés, des cheveux raides, chauves, des casquettes, des lunettes, des cravates, des hommes nus, des hommes en pierre, en terre, assis, couchés, debout, enlacés entre eux, sur un banc, en tablier devant un barbecue, des paons, une centaine de candidats corvéables à merci. 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La majeure partie des faits divers relatés par la presse du XIXème siècle ne sont pas des crimes spectaculaires, de grandes affaires retentissantes, mais de minuscules incidents de la vie quotidienne, des crimes sans éclats.</p> <p>Le roman réaliste et naturaliste, Dostoïevski, Flaubert et Balzac, ce sont eux, l’héritage revendiqué du roman noir. Il s’agit de représenter la réalité sociale et, comme le disait Zola dans la préface de <i>L’Assommoir</i>, de rédiger une œuvre de vérité qui ait la vitalité et l’odeur du peuple.</p> <h3>Prolétaires et classes moyennes</h3> <p>Le roman dit prolétarien ne sera pas grand-chose et, contrairement à Céline, n’usant pas de la vraie langue du peuple, il ne rencontrera jamais son public. 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Pas mal de vitres cassées remplacées par des morceaux de carton, des tuyaux de poêle pointant par diverses ouvertures, du linge étendu sur des barres d’appuis. On dirait une enquête de Zola, mais lui, Malet, a tout inventé et en ne s’inspirant non pas de Dashiell Hammett ou de <i>Scarface</i>, mais d’Arsène Lupin, Fantômas et Fu Manchu d’où est tiré le patronyme Burma; et en usant de nombreux emprunts à l’anglais: trench-coats, cop, docks, drugstore, building, policemen, barmaid ou knock-out.</p> <h3>La Série noire</h3> <p>En 1964, Sartre, dans son autobiographie, <i>Les Mots</i>, déclare qu’il lit plus volontiers un <i>Série</i> <i>noire</i> que Wittgenstein. Cette nouvelle collection a été lancée par Gallimard en 1945, pour publier des romans <i>hardboiled</i>. Peu de titres au début mais dès 1948 la collection entre dans l’ère fordiste des littératures de genre, standardisation et mode de fabrication contraints aussi bien dans la matérialité des volumes que dans l’identité des textes, avec imprimé sur les rabats de la jaquette. Donnés comme les traits principaux des ces ouvrages: l’immoralité, l’anticonformisme, l’action, la violence, la tension, l’humour et l’angoisse.</p> <p>En 1953, six titres français paraissent. Albert Simonin avec <i>Touchez pas au grisbi!</i> remporte un énorme succès, <i></i>100'000 exemplaires vendus. 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Leur contre-société est pour eux la seule communauté qui existe. Ils nomment leur milieu le Milieu et ils se nomment eux-mêmes les Hommes. Le reste de la société n’étant qu’un ramassis de pue-la-sueur soumis aux politiciens et craignant les flics.</p> <h3>Ultragauche, le néo-polar</h3> <p>Après Mai 68, le roman noir français reconvertit le genre en acte critique, en radiographie politique de la société et de ses institutions, en instrument d’intervention sociale. Le néo-polar intègre dans ses récits les banlieues, les grands ensembles, les HLM, et décrit de nouveaux espaces tels les caves, les terrains vagues, les cages d’escaliers. La violence sociale n’y est plus un écart mais la norme et toute révolte individuelle y est, par nature, vouée à échouer. Paranoïa et haine de soi y dominent.</p> <p>Jean-Patrick Manchette, invité à l'émission <i>Apostrophes</i> par Bernard Pivot, en utilisant le terme de néo-polar devant des millions de spectateurs, rend son usage universel. L’époque est aux positions tranchées mais c’est A.D.G., sympathisant du Front national, qui brosse avec tendresse des portraits de hippies contestataires, et Manchette qui endosse dans ses livres le point de vue des fascistes.</p> <p>Sur les seize auteurs pratiquant ce nouveau genre, dix ont un passé de militants de gauche, dans des organisations telles que les Jeunesses communistes, le PCF, la Gauche prolétarienne ou Lutte ouvrière, tous, nés après 1945, sont des <i>baby-boomers</i>, ayant fait des études supérieures, et ayant des bac +4, ou +5. Ils sont journalistes, scénaristes, traducteurs, éditeurs ou cinéastes. 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De même, la série Brigade spéciale associe toujours l’acte sexuel à des coups et de la torture, d’un racisme appuyé, elle use de termes comme «bougnoule», «négresse» et est riche en descriptions de traitements dégradants. </p> <p>Les années 1980 voient l’entrée en scène de l’amateur érudit et naissent des almanachs, des chroniques, des fanzines, des revues spécialisées vendues en kiosque, comme <i>Gang</i>, <i>Polar</i> ou <i>813</i>, un Festival du roman et du film policier, une exposition au Centre Pompidou, l’ouverture en 1983 de la Bilipo, Bibliothèque des littératures policières à Paris, des thèses sur le sujet sont soutenues et en 1994 paraissent 471 nouveaux titres, en 1995, 700, en 2001, 1'709. </p> <p>Lors du cinquantième anniversaire de la <i>Série noire</i>, Patrick Raynal en devient directeur. <i>Œdipe roi</i> de Sophocle y est publié, Jean-Claude Izzo et Maurice G. Dantec sont recrutés, les ventes repartent à la hausse.</p> <h3>Féminisation du roman noir</h3> <p>Dans les années 1990, on assiste à une entrée progressive d’auteurs femmes et ensuite, au siècle suivant, massive, à la fois comme productrices d’ouvrages et comme lectrices de ceux-ci, la lecture de roman devenant une activité de plus en plus essentiellement féminine.</p> <p>En 2024, 60% des acheteurs et du lectorat de romans policiers sont des acheteuses et des lectrices. Il paraît beaucoup d’articles sur les femmes auteures de polars dont certaines avaient néanmoins choisi un pseudonyme androgyne, telles Fred Vargras, Dominique Manotti ou Claude Amoz. La plus célèbre de toutes, Virginie Despentes, décrit des personnages qui n’ont rien de victimes soumises, ni de douceur féminine et retourne, avec brio, la violence contre les hommes dans des récits urbains, violents, crus et nihilistes.</p> <h3>Auteurs enquêteurs, profs, journalistes et policiers</h3> <p>Le polar du XXIème siècle marque l’avènement d’une prise de parole qui n’est ni le fruit d’un engagement ni le résultat d’une déception militante.</p> <p>Chercheurs, enseignants-chercheurs, journalistes, documentaristes, médecins, psychanalystes, avocats pénalistes, policiers, ils sont très nombreux à exercer ou avoir exercé des professions qui relèvent du paradigme indiciaire. Beaucoup d’auteurs travaillent dans l’audiovisuel, sont profs ou policiers – généralement des officiers. D’autres sont journalistes, donc précarisés ou en voie de l’être, et trouvent dans le polar une liberté dont ne disposent plus les médias d’information. Par le polar, ils peuvent raconter tout ce qu’ils ne peuvent plus dire par le journalisme. Ils utilisent dans l’écriture leur méthodologie d’investigation: collecte de données, recueil de témoignages, enquête de terrain, étude d’archives.</p> <p>Carlos Ginsburg dans <i>Signes, traces et pistes,</i> son article paru en 1980, article faisant lui-même référence à l’article <i>Attribution</i> d’Enrico Castelnuovo paru en 1968 dans l’Encyclopédie Universalis: en 1876, il y a beaucoup de fausses attributions dans les musées, G. Morelli postule que pour distinguer les originaux des copies, il ne faut pas se baser sur les caractères les plus apparents et, par conséquent, les plus faciles à imiter mais examiner les détails les plus négligeables: les lobes des oreilles, les ongles, la forme des doigts des mains et des pieds. Castelnuovo rapproche cette méthode à celle de Sherlock Holmes découvrant l’auteur d’un délit sur la base d’indices imperceptibles pour la plupart des gens.</p> <h3>Extension du domaine de la lutte</h3> <p>De nos jours, le roman noir affronte le post-moderne, les <i>fake news</i> et la post-vérité. Dans de nombreux romans, le dénouement est ouvert. Le texte se clôt sur un assaut, sur une poursuite, sur une disparition non expliquée, sur la recherche non aboutie d’un meurtrier. Il n’y a plus de point de vue surplombant, unifié, de narration organisatrice, il ne reste que dissensus et brouillard narratif. </p> <p>Bref, comme le disait le sociologue Luc Boltanski: que s’est-il passé pour qu’au début du XXème siècle surgisse cette littérature entièrement consacrée à l’énigme? L’émergence du roman policier ne coïncide-t-elle pas à la fois avec la construction de l’Etat-nation, la naissance de la sociologie et avec une nouvelle pathologie décrite par la psychiatrie, la paranoïa? Qu’ont-elles à voir entre elles? C’est simple. Elles utilisent toute l’enquête comme outil principal.</p> <hr /> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1709203606_9782130841982_1_75.jpg" class="img-responsive img-fluid left " width="200" height="318" /></p> <h4>«Le roman noir: une histoire française», Natacha Levet, Presses Universitaires de France, 416 pages.</h4>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'le-roman-noir-en-france-incarnations-diverses', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 53, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 6, 'person_id' => (int) 2107, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [[maximum depth reached]], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' } ] $embeds = [] $images = [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) { 'id' => (int) 9350, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Rwandan_landscape_(2043178762).jpg', 'type' => 'image', 'subtype' => 'jpeg', 'size' => (int) 145788, 'md5' => '472781188d3b814ff39dd4febadd8773', 'width' => (int) 1024, 'height' => (int) 681, 'date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'title' => '', 'description' => 'Paysage rwandais.', 'author' => '', 'copyright' => '© Joachim Huber - CC BY SA 2.0', 'path' => '1655905041_rwandan_landscape_2043178762.jpg', 'embed' => null, 'profile' => 'default', '_joinData' => object(Cake\ORM\Entity) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Attachments' } ] $audios = [] $comments = [] $author = 'Yves Tenret' $description = 'Comme le dessinateur Robert Crumb auquel par moments il peut faire penser, Gérard Prunier va sur ses 80 ans, et, avec un indéniable brio, il vient de réussir sa première incursion dans le domaine de la fiction. 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