"El Rio y la Muerte", Luis Buñuel, 1954.
La belle rétrospective du Festival de Locarno consacrée à l'âge classique du cinéma mexicain aura tenu ses promesses, avant d'envoyer une part de ses pépites à la Cinémathèque suisse. Un peu bizarrement intitulée «Du spectacle tous les jours», elle a tenu à représenter ce cinéma populaire dans sa plus grande variété tout en privilégiant redécouvertes et curiosités.
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Ceci jusque dans des films plus strictement de genre comme <i>Sensualidad</i> (Alberto Gout, 1951), dans lequel la danseuse de cabaret Ninón Sevilla séduit le digne juge Fernando Soler qui l'avait condamnée à la prison, <i>El suavecito</i> (Fernando Méndez, 1951), qui voit une fille sage s'éprendre d'un voisin qui a pourtant choisi la «mauvaise vie», ou encore <i>El Medallón del crimen</i> (Juan Bustillo Oro, 1956), amusant film noir dans lequel un brave père de famille tenté par un écart doit se dépêtrer d'un crime qu'il n'a pas commis. Sur la plupart de ces scénarios planent les spectres du machisme et de la prostitution, clairement désignés dans un film réalisé par la seule femme réalisatrice de la période, Matilde Landeta. Dans <i>Trotacalles</i> (1951), elle oppose deux sœurs victimes d'une même réalité aux deux bouts de la société, la rue mal famée et les belles villas de Mexico. Quel dommage que par ailleurs ce film ne témoigne pas d'un talent supérieur!</p> <p>Au total, du bien poussiéreux classique <i>En tiempos de Don Porfirio</i> de Juan Bustillo Oro (1940), qui regarde en arrière, au magnifique documentaire <i>Olimpiada en México</i> d'Alberto Isaac (1969), qui pointe en avant, on aura ainsi vu un peu de tout dans cette rétrospective. Y compris des films anecdotiques juste chargés de mettre en valeur des vedettes mythiques comme le boxeur Kid Azteca <i>(El gran campéon</i> de Chano Urueta, 1949) ou la danseuse de rumba Tongolele <i>(Han matado a Tongolele</i> de Roberto Gavaldón, 1948) et des films «fantastiques» le disputant entre un réel sens du macabre <i>(Misterios de ultratumba</i> de Fernando Mendez, 1958; <i>El espejo de la bruja</i> de Chano Urueta, 1960) et une parfaite crétinerie <i>(Santo vs. las mujeres vampiro,</i> d'Alfonso Corona Blake, 1962; <i>La mujer murciélago</i> de René Cardona, 1968).</p> <p>Au travers de ces choix plus discutables s'est dessinée une image plus précise du goût populaire auquel répondaient ces cinéastes si inégaux, appelés à réaliser à la chaîne et presque toujours en y intercalant des intermèdes musicaux. Mais on aura aussi compris l'inexorable déclin d'une génération, une fois le noir et blanc supplanté par la couleur, les budgets resserrés et les grandes stars disparues, avant même leur désacralisation par un cinéma d'auteur politisé et la mode érotico-sexy des années 1970. Il n'empêche qu'on en redemanderait presque, sans oublier les présentations à la fois érudites et «rock'n'roll» du bateleur Olaf Müller. Et pour finir, ce constat plus général: dans le grand bain de 7ème art qu'est le festival de Locarno, ces sacrés Mexicains auront fait apparaître plus clairement que jamais le fossé entre un cinéma de passions (populaire, d'autrefois, dépassé?) et un cinéma de vague à l'âme (moderne, d'aujourd'hui, pour toujours?) qui a envahi la compétition. 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Depuis son hameau de Quincy (commune de Mieussy) niché derrière le Môle, une montagne bien connue des habitants du bout du Léman, il mène une carrière unique en son genre, qui prouve qu'on peut traiter du global à partir du local. En témoignent une vingtaine de titres, dont une dizaine de longs-métrages de <i>Ma Mondialisation</i> (2006), sur l'industrie du décolletage dans la vallée de l'Arve toute proche, à deux films récents avec le député Insoumis François Ruffin <i>(J'veux du soleil!</i> et <i>Debout les femmes!).</i></p> <p>Après un premier détour par la fiction tenté avec l'aide de sa compagne Marion Richoux, <i>Reprise en main</i> (ancré dans cette même réalité ouvrière, avec Pierre Deladonchamps et Laetitia Dosch), le voici qui revient au sujet de son premier film, <i>Trois frères pour une vie</i> (1999), portrait de paysans de son village. 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Et pour la Suisse, tout finit par arriver. En fait, même en restant très local, j'aspire toujours à une forme d'universalité. Et les retours dans les débats qu'on a pu faire entre Bulle, La Chaux-de-Fonds ou Morges prouvent que la réalité des paysans d'ici n'est pas si différente.</p> <p><strong>Vous-même n'êtes pas d'une famille paysanne, mais ouvrière. Pourtant, vous revenez ici sur des gens que vous aviez déjà filmés à vos débuts?</strong></p> <p><strong>GP</strong>: A l'époque, c'était juste la réalité que j'avais sous les yeux: j'ai grandi à 80 mètres de cette ferme! Depuis tout petit je suis monté sur le tracteur des frères Bertrand et je dois avoir passé des centaines d'heures avec eux. J'avais donc profité de cette proximité pour essayer de réaliser un film qui leur corresponde vraiment, qui soit attentif à leurs gestes et à leur façon de s'exprimer, en montrant que ce sont des gens qui ont su se projeter dans l'avenir. Pour la nouvelle génération, que j'ai connue comme bébés, le regard s'est un peu inversé, puisque là, c'est moi l'aîné.</p> <p><strong>Marion Richoux</strong>: De mon côté, je suis d'Annecy. J'ai fait des études de cinéma et j'ai travaillé à la Cinémathèque des Pays de Savoie et de l'Ain. Je connaissais ce premier film de Gilles, <i>Trois frères pour une vie,</i> dont la frontalité m'avait frappée mais qui n'avait presque pas eu de visibilité. Je me disais que c'était dommage et quand, après <i>Reprise en main,</i> on a cherché quel serait le projet suivant, j'ai proposé d'y revenir. C'était l'occasion de parler de tout ce qui avait changé depuis.</p> <p><strong>GP</strong>: En fait, tout est parti de Suisse, parce que ce premier film autoproduit a été primé au Festival du film alpin des Diablerets et de ce fait, acheté pour une version raccourcie par la TSR. C'est cet achat qui a lancé la machine... </p> <p><strong>On voit aussi dans le film une achive TV en noir et blanc avec les trois frères, Jean, Joseph et André, en 1972. D'où provient-elle?</strong></p> <p><strong>GP</strong>: Elle figurait déjà dans le film de 1999. Je m'étais souvenu de l'événement qu'avait été la venue de la télé dans notre hameau – je devais avoir 4 ou 5 ans – et j'étais donc parti à sa recherche. Avant l'apparation de reportages télévisés plus formatés, c'était une sorte d'émission de promotion rurale à l'intention des paysans eux-mêmes, diffusée sur un créneau spécifique de FR3. Retrouver ça n'a pas été une mince affaire!</p> <p><strong>MR</strong>: En fait, je pense que ces images ont aussi influencé Gilles dans sa manière de faire. On y sent une approche bienveillante, pas intimidante, qui laisse un vrai temps de parole et permet d'aborder des questions existentielles tout sauf évidentes.</p> <p><strong>GP</strong>: A l'époque, j'avais encore tout à apprendre. Je me suis formé sur le tas, avec une approche très télé-journalistique. C'est intuitivement que j'ai découvert qu'en me plaçant à hauteur d'homme, dans une interaction naturelle et sans pression, cela fonctionnait mieux. Dès qu'il y a trop de gens, ça peut devenir le bazar. Depuis, j'ai continué de tout faire tout seul, l'image et le son – sauf pour des scènes de groupe où il faut forcément une perche. Ce qu'on perd en qualité technique, on le gagne largement en termes de prise de parole et de réactivité.</p> <p><strong>A l'encontre de la crise agricole actuelle, on découvre ici une agriculture de montagne qui s'en sort plutôt bien. D'où peut-être votre film le moins militant à ce jour!</strong></p> <p><strong>GP</strong>: C'est vrai. Contre les discours politiques qui simplifient, cela rappelle qu'il existe en France beaucoup de réalités rurales très différentes. Ici, derrière les trois frères qui ont souffert pour tout mettre en place, on a une génération qui a vraiment choisi ce métier et qui en vit bien, parvenant à réinvestir sans surendettement. A priori, on peut ne pas voir la robotisation de la traite d'un très bon œil, mais de leur point de vue c'est un réel progrès. Leur modèle fonctionne bien, sous la protection de l'AOC Reblochon. Car il faut se rendre compte que c'est grâce à elle que leur lait est payé deux fois plus cher qu'un lait de plaine, qui lui est en concurrence avec d'autres laits européens.... Même si ce n'est pas explicite dans le film, je tiens à ramener cette dimension politique dans les débats. 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Mais c'était des gens étonnamment érudits et intéressés, capables de discuter d'autres sujets que juste leur travail! Le grand-père était un grand lecteur et il leur avait transmis ça. André, celui qui est encore en vie et qui tire un bilan plutôt amer de leur existence, sans femmes pour la partager, lit toujours le <i>Courrier International!</i> Ils ont aussi un peu regardé la TV, même si on ne la voit pas: elle était cachée dans un coin sous un tissu, dans cet intérieur d'une totale austérité.</p> <p><strong>MR</strong>: Il a bien fallu se focaliser sur la ferme, la question de sa survie économique et de sa transmission. Si la nouvelle génération est parvenue à prendre sa place dans le film, ce n'était pas du tout évident au début, face à des personnages tels que ces trois oncles! Au bout du compte, malgré les inévitables «oublis», ils se sont tous déclarés satisfaits de l'image qu'on donne du métier. 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Malgré l'aura du cinéaste palmé et oscarisé de <i>The Pianist</i> et de son co-scénariste Jerzy Skolimowski <i>(EO),</i> le projet était devenu comme pestiféré déjà avant le premier clap. Et à présent que toute chance de succès commercial a disparu, c'est la débandade.</p> <p>Certes, <i>The Palace </i>est encore sorti plus ou moins normalement dans une poignée de pays (Italie, Pologne, Russie, Hongrie, Suède et Allemagne). Mais dans le monde anglo-saxon, personne n'ose s'en approcher, surtout après son assassinat en règle par les donneurs de ton <i>Variety, The Hollywood Reporter</i> et <i>Screen.</i> En France, après six mois de tergiversations, seule une petite compagnie spécialisée dans la réédition de classiques américains, Swashbuckler Films, a fini par assumer le risque d'une distribution, en espérant que suffisamment de salles suivront d'ici la date annoncée du 15 mai. Et en Suisse, autre pays co-producteur derrière l'Italie et la Pologne? Ici aussi, c'est un mini-distributeur occasionnel, Mont-Blanc, qui est venu à la rescousse, sortant d'abord le film en Suisse allemande le 18 janvier (flop à 4'600 d'entrées) tandis que presque tous les exploitants romands se défilaient. Même notre Cinémathèque se cache courageusement. Ne reste pour l'instant plus que le Ciné 17 de Genève, qui sort le film le 10 avril – qu'on se le dise.</p> <h3>C'est quoi, ce <i>Palace?</i></h3> <p>Car enfin, ce n'est «que» d'une œuvre qu'il sagit, pas d'anciennes affaires de mœurs sur lesquelles nous n'avons ni les moyens ni l'autorité pour juger! Et <i>The Palace,</i> malgré tous les bâtons mis dans ses roues, vaut largement le détour. Peut-être que seuls ceux qui se souviennent encore de <i>What? </i>(1972), la dernière franche comédie de Polanski, comprendront vraiment d'où sort ce film absurde et grotesque, cosmopolite en diable et peuplé de monstres tous plus ou moins escrocs. 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Ce règlement de comptes est donc avec l'ancien monde, celui du XXème siècle qu'a traversé Polanski, aujourd'hui âgé de 90 ans. Mais il concerne tout autant une certaine «belle» société huppée qu'il a aussi côtoyée. Et là, il y a peu de chances que quoi que ce soit ait changé depuis, les nouveaux riches valant bien les anciens.</p> <h3>Jeunesse qui s'enfuit, argent aux abris</h3> <p>Tout commence donc avec l'arrivée des convives pour un réveillon du millénaire qui s'annonce festif tandis que le personnel s'active pour leur accueil. Hansueli Kopf, l'impeccable directeur du palace (Oliver Masucci, un des principaux acteurs allemands actuels), sera particulièrement mis à contribution. Il est le clown blanc de l'affaire, qui se plie aux exigences les plus extravagantes de ses hôtes, arrangeant des services discrets par-ci et éteignant des incendies par-là avec l'aide de ses adjoints Tonino (Fortunato Cerlino) et Mrs. Frautschi (Beatrice Frey). Et parmi les habitués déjà installés, qui d'autre pour ouvrir le bal que... Sydne Rome, l'héroïne de <i>What?</i></p> <p>Las! Ex-beauté d'une fraîcheur exquise, cette juive américaine installée en Italie n'est plus que l'ombre d'elle-même après trop de passages sous les bistouris (à sa décharge, dans la vie réelle, c'est suite à un accident de voiture lors duquel un airbag lui explosa au visage). Vitrine de tous les autres «monstres» à venir, elle remercie un certain Dr. Lima (Joaquim de Almeida, star portugaise du cinéma international) pour les années de jeunesse qu'il lui aurait fait gagner. Très demandé, ce prince de la chirurgie esthétique ne se souvient pas des noms de ses innombrables patientes, plus préoccupé qu'il est par une épouse gagnée par Alzheimer. Claquemurée dans sa suite, une autre de ses clientes, une marquise française (Fanny Ardant), voue son affection à son petit chien Mr. Toby. Mais un souci d'écoulement lui fait bientôt reporter son intérêt sur Karol, un beau plombier polonais.</p> <p>Et ainsi vogue la comédie, de chambre en chambre et de nouvel arrivant en nouvelle crise. Il y a là l'octogéraire milliardaire américain Arthur William Dallas III (John Cleese, des Monty Python) et Magnolia, sa jeune épouse texane enveloppée (la non moins britannique Bronwyn James), surtout intéressée à hériter. Autre Américain quoique d'âge indéfinissable grâce à sa moumoute et son fond de teint orangé, Bill Crush (Mickey Rourke, ou ce qu'il en reste) est un escroc qui s'est invité sans réservation pour faire affaire avec Jacob Tell (Milan Peschel, autre excellent comédien allemand), un timide banquier suisse. Mais qui est donc ce Vaclav, surgi de quelque pays d'Europe centrale avec femme et enfants, qui se présente soudain comme son fils? A l'autre bout du spectre, voici un groupe de jeunes et bruyants oligarques russes avec leurs blondes escorts venus retrouver un ambassadeur corrompu avec des sacs remplis de billets à «blanchir». Trop volumineux pour être accueillis par le safe de l'hôtel, ils trouveront place dans l'abri anti-atomique...</p> <h3>La vanité des monstres</h3> <p>On peut trouver le trait gros, mais la caricature à la Daumier est précise et cruelle, de même que la mise en scène reste affûtée. Par moments, Polanski manque visiblement de moyens (l'envol depuis un balcon qui révèle enfin l'ensemble du bâtiment, réalisé en effets spéciaux) et ses blagues ne sont pas toujours du meilleur goût, comme celles concernant le signor Minetti, alias Bongo, ancienne star du porno bien membré (Luca Barbareschi, complice de longue date et principal producteur du film). Mais un pansement bien placé en souvenir de <i>Chinatown</i> a tôt fait de nous le rendre plus amusant. En fait, tous se valent dans cette grande course à l'argent, contre le temps qui file et qui finira tout de même par les rattraper.</p> <p>Mr. Crush veut convaincre Tell de parier avec lui sur le «bug» informatique prédit pour l'an 2000. A la télévision, en direct, un Boris Eltsine épuisé passe la main à un jeune successeur prometteur, un certain Vladimir Poutine, lequel assure un peu plus tard à tous la protection d'un Etat de droit. Un pingouin offert par le vieux milliardaire à sa petit-fille – pardon, sa jeune épouse – s'échappe dans les couloirs de l'hôtel, pauvre petit intrus dans ce monde de fous. Pour finir, il y aura des morts, mais on ne dévoilera pas ici lesquelles. Par contre, il n'y pas de mal à révéler que, de manière parfaitement réaliste, les riches resteront riches et la Suisse saura en profiter. Quant à Tell, il sortira de là tout ébaudi, déclarant avoir vécu là «la plus belle soirée de sa vie». Clin d'œil au titre du film qu'Ettore Scola tira en 1972 de <i>La Panne</i> de Friedrich Dürrenmatt?</p> <p>Toujours est-il que c'est bien la satire jusqu'au-boutiste des dernières grandes comédies italiennes qui vient ici à l'esprit (bien plus que les récents <i>Youth</i> de Paolo Sorrentino ou <i>Sans filtre/Triangle of Sadness</i> de Ruben Östlund). C'est comme si Polanski avait choisi de rester un cinéaste du siècle passé, pour le meilleur et pour le pire. Quant à l'humour, il n'y a bien sûr rien de plus personnel. Par le passé, il est arrivé au cinéaste de toucher le grand public <i>(Cul-de-sac, Le Bal des vampires)</i> comme de rater sa cible <i>(What?, Pirates). </i>Pour notre part, nous nous sommes bien amusés. En tous cas, ne croyez pas ceux qui clament que Polanski serait soudain devenu gâteux et aurait perdu tout talent. Secondé par ses fidèles collaborateurs, le monteur Hervé de Luze (12ème film en commun), le chef opérateur Pawel Edelman (8ème) et le compositeur Alexandre Desplat (6ème), réunis depuis <i>The Ghost Writer</i> et ses ennuis helvétiques de 2009, cet éternel fugitif a réalisé le film qu'il voulait. Sans doute le dernier d'un esprit libre, qui aura estimé qu'il n'avait plus rien à perdre.</p> <hr /> <p>(<strong>Rédaction</strong>) <em>Nous apprenons que le producteur-délégué du film de Polanski, Jean-Louis Porchet, a été victime d’un grave accident de circulation le dimanche 24 mars, près de Rivaz. Il se trouve dans un état grave au CHUV, à Lausanne. Sa société, CAB-Productions, établie à Lausanne, connaît de sérieuses difficultés en raison du boycott dans quasiment toutes les salles suisses de cette œuvre tournée à Gstaad, avec un grand nombre de techniciens locaux. 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Il y a pourtant de quoi être inquiet devant un générique assez hideux qui se charge de nous rappeler à quel point ce morceau est populaire et a fait le tour du monde, resservi (toutes les 15 minutes, à ce qu'il paraît) à toutes les sauces. Pauvre Ravel, très contrarié que ce qu'il considérait comme un simple exercice de style éclipse toute son œuvre, au point de regretter l'avoir composé! Heureusement qu'une séquence pré-générique située dans une usine, avec Ravel qui tente vainement d'expliquer la musicalité de cet environnement sonore à sa commanditaire, la danseuse Ida Rubinstein, a déjà posé d'autres bases, qui font la part d'une certaine modernité.</p> <p>Evidemment, personne n'attend plus un film novateur de la part d'Anne Fontaine, 64 ans, cinéaste dont le principal mérite est d'avoir su se maintenir à un niveau honorable depuis trois décennies. 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Quel lien entre le drame d'amour et de rivalités rurales Pueblerina (Emilio Fernández, 1949), exaltées par une splendide mise en scène en noir et blanc, et le film de superhéroïne La mujer murciélago (René Cardona, 1968), sorte de Batwoman du pauvre tourné en couleurs à Acapulco? Un même musicien, Andres Diáz Conde, et un même acteur, Robert Cañedo, héros viril et attachant dans l'un et savant fou créateur de monstres dans l'autre – chacun avec plus 300 crédits à leur actif. Ainsi en va le cinéma mexicain d'autrefois, dans cet âge classique où il était le divertissement suprême partagé par les foules et capable de forger un imaginaire collectif.
A Locarno, cet «âge d'or» qui selon les Mexicains eux-mêmes ne va que de 1936 (un essor lié à la Guerre civile espagnole) à 1956 (une crise produite par l'arrivée de la télévision dans les ménages) s'est transfomé en trois décennies, de 1940 à 1969. Une période qui voit l'essor, la splendeur et la décadence d'une industrie et de son personnel, lesquels finiront bousculés et contestés comme un peu partout ailleurs dans le monde. Pas de problème pour le programmateur allemand Olaf Möller, omnivore mu par un esprit de curiosité et de réévaluation qui a pour l'essentiel porté ses fruits.
Certes, même le canon officiel de ce cinéma nous est aujourd'hui à peu près inconnu, d'où une certaine frustration: alors que les principaux films mexicains envoyés dans les festivals étaient distribués à travers l'Europe, leur mémoire s'est dissoute dans les oubliettes des cinémathèques, sans résurrection durant l'ère du DVD. Ne subsistent aujourd'hui à l'international plus guère que le passage de Luis Buñuel par le Mexique (20 films) et le nom d'Emilio «El Indio» Fernández – et encore, plutôt comme acteur chez Sam Peckinpah que comme auteur de 40 films! Pourtant cet âge classique a connu d'autres cinéastes talentueux et généré un vrai star system. D'où le désir d'en apprendre plus et de le ramener à la lumière, d'autant plus que les deux cinémathèques du pays (l'universitaire Filmoteca de la UNAM et la Cineteca Nacional, chargée du dépôt légal) ainsi que certaines archives de producteurs privés se sont lancées dans la restauration de ce patrimoine.
Le haut du panier
Résumer une telle production – près de 3'000 films en trente ans – à travers 36 titres seulement tenait de la gageure. En cherchant à sortir des sentiers battus, du cinéma le plus «noble» au plus populaire, la rétrospective a d'abord offert un formidable voyage dans le passé, les mythes et les réalités de cette grande nation. Pourtant, on aura aussi eu confirmation de l'absence d'auteurs majeurs chez les cinéastes mexicains. Comme par hasard, c'est l'Espagnol Buñuel qui a dominé les débats d'une bonne tête, même avec l'un de ses films les moins caractéristiques: El rio y la muerte (1954) est en effet un «film à thèse», sans rien de surréaliste, qui s'attaque à la tradition des vendettas dans les campagnes et plus largement au machisme. Jamais son intelligence de tous les instants et les émotions suscitées par une mise en scène parfaitement maîtrisée n'étaient apparus aussi clairement.
Dans le même ordre d'idées, les deux autres cinéastes les plus représentés dans les festivals de l'époque, Emilio Fernández et Roberto Gavaldón, sont bien les plus intéressants du pays. Pueblerina est ainsi venu rappeler à quel point Fernández (1904-1986), avec l'aide du grand chef opérateur Gabriel Figueroa, a forgé une image du Mexique: un pays de grands espaces, de grandes passions et de grands sombreros sous des cieux immenses. A la fois romantique et macho, le réalisateur y magnifie son épouse Columba Domínguez dans le rôle d'une femme devenue mère suite à un viol mais que son amoureux sorti de prison vient malgré tout retrouver pour l'épouser, au grand dam de son violeur, l'homme le plus puissant du village. Cinéaste plus urbain, Roberto Gavaldón (1909-1986) a quant à lui commencé par décevoir par le schématisme de La noche avanza (1952), drame d'une vedette arrogante de pelote basque (Pedro Armendáriz) prise au piège de ses amours parallèles et de paris truqués. Mais il s'est ensuite racheté avec un Días de otoño (1963, d'après une nouvelle du mystérieux B. Traven) de toute beauté: un film synchrone avec la modernité naissante qui raconte l'histoire d'une provinciale venue travailler à Mexico dans une boulangerie et qui s'invente un mariage, une maternité et même un veuvage pour échapper à la pression sociale. Déjà magique dans One-Eyed Jacks, le génial western réalisé par Marlon Brando, l'étoile filante Pina Pellicer y confirme son attachante singularité, servie par une mise en scène d'une rare délicatesse.
Pas vraiment d'auteurs
Certains critiques mexicains tentent de hisser au même statut d'auteurs mineurs Julio Bracho, Alejandro Galindo et Ismael Rodríguez, mais leur talent aura paru plus incertain. Chez Bracho, après l'amusante mais trop théâtrale zarzuela olé olé La corte de faraón (1940), les mélodrames Rostros olvidados (1952, avec la diva argentine Libertad Lamarque) et Llévame en tus brazos (1954, avec la star d'origine cubaine Ninón Sevilla) ont surtout révélé des lacunes d'autant plus criantes que la rétrospective de l'an dernier était consacrée à l'un des maîtres du genre, Douglas Sirk. Pleins de coups de théâtre artificiels, d'incohérences et d'impensé, ses films ne sont jamais à la hauteur de leur potentiel, même si le second au moins vaut le coup d'œil, avec son histoire de fille de pêcheur qui sacrifie son amour, devient star de cabaret puis de cinéma grâce à des «protecteurs» avant de retrouver le syndicaliste macho de son cœur.
Galindo, lui, aura brillé le temps d'une charmante comédie sociale, Esquina, bajan...! (1948) à base de compagnies de tram rivales dans une capitale en pleine expansion. Mais son réputé Espaldas mojadas (1955), rare film sur la question de l'émigration clandestine vers les Etats-Unis traitée selon un point de vue mexicain, manque par trop de réalisme malgré quelques idées mémorables comme cet exilé qui se refuse à être exploité et donc à travailler. Quant à l'autoproduit La mente y el crimen (1961), semi-documentaire qui suit l'élucidation d'un meurtre par la police scientifique, il en aura perdu plus d'un avec son sensationnalisme doublé d'une narration pleine de digressions douteuses. Reste le cas Ismael Rodríguez, dont la «comédie ranchera» Los tres Garcia (1947), avec ses trois frères rivaux à la botte d'une matriarche, a beau être «culte» dans son pays, elle aura semblé bien rudimentaire vue d'ici. Mais le dramatique Los hermanos Del Hierro (1961) serait d'un tout autre calibre, à en croire le principal critique mexicain Jorge Ayala Blanco. A vérifier lors d'un projection à Lausanne!
Enfin, la rétrospective a également permis de faire connaissance avec les deux grands comiques nationaux, Mario Moreno «Cantinflas» et Germán Valdéz «Tin-Tan» – jamais une proposition évidente à l'étranger. Test réussi pour tous deux, tant El gendarme desconocido (Miguel M. Delgado, 1941), avec son bon-à-rien devenu gendarme matricule 777 et héros malgré lui, et El rey del barrio (Gilbert Martínez Solares, 1949), avec son protagoniste menant une double vie de brave travailleur et de chef de bande criminelle, se sont avérés hilarants malgré leurs réalisations très routinières. Cantinflas donne dans la nonchalance et la comédie verbale, entre Charlot et Totó, tandis que Tin-Tan est un roi de la grimace et de la comédie physique façon Jerry Lewis ou Jim Carrey.
Cosmopolitisme insoupçonné
Mais la sélection d'Olaf Müller aura surtout rendu attentif au cosmopolitisme de ce cinéma aux nombreux échanges avec les Etats-Unis, l'Espagne, l'Argentine, Cuba et d'autres pays encore. C'est ainsi qu'on a eu la surprise de découvrir une excellente version du classique allemand Jeunes filles en uniforme (Muchachas de uniforme, 1951, d'Alfonso B. Crevenna, cinéaste prolifique né en Allemagne), histoire d'un amour lesbien dans une école de jeunes filles tenue par des religieuses, juste gâchée par un retour à la fin moralisatrice de la pièce d'origine. Encore mieux, Amok (1944) de l'Espagnol de passage Antonio Momplet, avec les stars María Félix et Julián Soler, est un somptueux drame de l'obsession amoureuse d'après un roman de Stefan Zweig qui se déroule sur un paquebot et en Malaisie, réalisé avec des moyens et un talent impressionnants. De même, Más fuerte que el amor de l'Argentin Tulio Demicheli s'est imposé comme un mélodrame d'une belle intensité avec sa lutte des classes sur une plantation cubaine doublée d'une histoire d'amour-haine torride entre les très glamour Jorge Mistral et Miroslava (Sternova, une juive de Prague).
Autres exilés espagnols, Carlos Velo signait avec son classique Torero (1956) un semi-documentaire frappant sur un toréador gagné par la peur, et Luis Aloriza (par ailleurs scénariste de Buñuel et plus tard cinéaste-auteur phare du cinéma mexicain «moderne»), signait le scénario d'El esqueleto de la señorara Morales (1960), farce anticléricale et macabre un peu trop appuyée réalisée par Rogelio Antonio González. Quant au Chilien Tito Davison, cinéaste plus routinier, il a surpris en bien grâce à El caso de la mujer asasinada (1955), comédie au scénario extravagant dans lequel une femme rêve son meurtre prochain par son mari sans parvenir à l'empêcher dans la réalité. Et c'est aussi à lui qu'est revenu l'honneur de réaliser le «film cosmopolite ultime» Que dios me perdone (1948), mélodrame simili-hollywoodien à base d'espionnage et de mémoire des camps de concentration nazis qui prouve que la splendide María Félix était aussi une immense actrice.
Machos, victimes féminines et fin d'une époque
Un peu partout, le pesant moralisme catholique qui tient la société mexicaine aux côtés du pouvoir sans partage du PRI (Parti révolutionnaire Institutionnel) est bousculé par un cinéma qui tente d'y échapper par la fiction. Ceci jusque dans des films plus strictement de genre comme Sensualidad (Alberto Gout, 1951), dans lequel la danseuse de cabaret Ninón Sevilla séduit le digne juge Fernando Soler qui l'avait condamnée à la prison, El suavecito (Fernando Méndez, 1951), qui voit une fille sage s'éprendre d'un voisin qui a pourtant choisi la «mauvaise vie», ou encore El Medallón del crimen (Juan Bustillo Oro, 1956), amusant film noir dans lequel un brave père de famille tenté par un écart doit se dépêtrer d'un crime qu'il n'a pas commis. Sur la plupart de ces scénarios planent les spectres du machisme et de la prostitution, clairement désignés dans un film réalisé par la seule femme réalisatrice de la période, Matilde Landeta. Dans Trotacalles (1951), elle oppose deux sœurs victimes d'une même réalité aux deux bouts de la société, la rue mal famée et les belles villas de Mexico. Quel dommage que par ailleurs ce film ne témoigne pas d'un talent supérieur!
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Crevenna, cinéaste prolifique né en Allemagne), histoire d'un amour lesbien dans une école de jeunes filles tenue par des religieuses, juste gâchée par un retour à la fin moralisatrice de la pièce d'origine. Encore mieux, <i>Amok</i> (1944) de l'Espagnol de passage Antonio Momplet, avec les stars María Félix et Julián Soler, est un somptueux drame de l'obsession amoureuse d'après un roman de Stefan Zweig qui se déroule sur un paquebot et en Malaisie, réalisé avec des moyens et un talent impressionnants. De même, <i>Más fuerte que el amor</i> de l'Argentin Tulio Demicheli s'est imposé comme un mélodrame d'une belle intensité avec sa lutte des classes sur une plantation cubaine doublée d'une histoire d'amour-haine torride entre les très glamour Jorge Mistral et Miroslava (Sternova, une juive de Prague).</p> <p>Autres exilés espagnols, Carlos Velo signait avec son classique <i>Torero</i> (1956) un semi-documentaire frappant sur un toréador gagné par la peur, et Luis Aloriza (par ailleurs scénariste de Buñuel et plus tard cinéaste-auteur phare du cinéma mexicain «moderne»), signait le scénario d'<i>El esqueleto de la señorara Morales</i> (1960), farce anticléricale et macabre un peu trop appuyée réalisée par Rogelio Antonio González. Quant au Chilien Tito Davison, cinéaste plus routinier, il a surpris en bien grâce à <i>El caso de la mujer asasinada</i> (1955), comédie au scénario extravagant dans lequel une femme rêve son meurtre prochain par son mari sans parvenir à l'empêcher dans la réalité. Et c'est aussi à lui qu'est revenu l'honneur de réaliser le «film cosmopolite ultime» <i>Que dios me perdone</i> (1948), mélodrame simili-hollywoodien à base d'espionnage et de mémoire des camps de concentration nazis qui prouve que la splendide María Félix était aussi une immense actrice.</p> <h3>Machos, victimes féminines et fin d'une époque</h3> <p>Un peu partout, le pesant moralisme catholique qui tient la société mexicaine aux côtés du pouvoir sans partage du PRI (Parti révolutionnaire Institutionnel) est bousculé par un cinéma qui tente d'y échapper par la fiction. Ceci jusque dans des films plus strictement de genre comme <i>Sensualidad</i> (Alberto Gout, 1951), dans lequel la danseuse de cabaret Ninón Sevilla séduit le digne juge Fernando Soler qui l'avait condamnée à la prison, <i>El suavecito</i> (Fernando Méndez, 1951), qui voit une fille sage s'éprendre d'un voisin qui a pourtant choisi la «mauvaise vie», ou encore <i>El Medallón del crimen</i> (Juan Bustillo Oro, 1956), amusant film noir dans lequel un brave père de famille tenté par un écart doit se dépêtrer d'un crime qu'il n'a pas commis. Sur la plupart de ces scénarios planent les spectres du machisme et de la prostitution, clairement désignés dans un film réalisé par la seule femme réalisatrice de la période, Matilde Landeta. Dans <i>Trotacalles</i> (1951), elle oppose deux sœurs victimes d'une même réalité aux deux bouts de la société, la rue mal famée et les belles villas de Mexico. Quel dommage que par ailleurs ce film ne témoigne pas d'un talent supérieur!</p> <p>Au total, du bien poussiéreux classique <i>En tiempos de Don Porfirio</i> de Juan Bustillo Oro (1940), qui regarde en arrière, au magnifique documentaire <i>Olimpiada en México</i> d'Alberto Isaac (1969), qui pointe en avant, on aura ainsi vu un peu de tout dans cette rétrospective. Y compris des films anecdotiques juste chargés de mettre en valeur des vedettes mythiques comme le boxeur Kid Azteca <i>(El gran campéon</i> de Chano Urueta, 1949) ou la danseuse de rumba Tongolele <i>(Han matado a Tongolele</i> de Roberto Gavaldón, 1948) et des films «fantastiques» le disputant entre un réel sens du macabre <i>(Misterios de ultratumba</i> de Fernando Mendez, 1958; <i>El espejo de la bruja</i> de Chano Urueta, 1960) et une parfaite crétinerie <i>(Santo vs. las mujeres vampiro,</i> d'Alfonso Corona Blake, 1962; <i>La mujer murciélago</i> de René Cardona, 1968).</p> <p>Au travers de ces choix plus discutables s'est dessinée une image plus précise du goût populaire auquel répondaient ces cinéastes si inégaux, appelés à réaliser à la chaîne et presque toujours en y intercalant des intermèdes musicaux. Mais on aura aussi compris l'inexorable déclin d'une génération, une fois le noir et blanc supplanté par la couleur, les budgets resserrés et les grandes stars disparues, avant même leur désacralisation par un cinéma d'auteur politisé et la mode érotico-sexy des années 1970. Il n'empêche qu'on en redemanderait presque, sans oublier les présentations à la fois érudites et «rock'n'roll» du bateleur Olaf Müller. Et pour finir, ce constat plus général: dans le grand bain de 7ème art qu'est le festival de Locarno, ces sacrés Mexicains auront fait apparaître plus clairement que jamais le fossé entre un cinéma de passions (populaire, d'autrefois, dépassé?) et un cinéma de vague à l'âme (moderne, d'aujourd'hui, pour toujours?) qui a envahi la compétition. 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Depuis son hameau de Quincy (commune de Mieussy) niché derrière le Môle, une montagne bien connue des habitants du bout du Léman, il mène une carrière unique en son genre, qui prouve qu'on peut traiter du global à partir du local. En témoignent une vingtaine de titres, dont une dizaine de longs-métrages de <i>Ma Mondialisation</i> (2006), sur l'industrie du décolletage dans la vallée de l'Arve toute proche, à deux films récents avec le député Insoumis François Ruffin <i>(J'veux du soleil!</i> et <i>Debout les femmes!).</i></p> <p>Après un premier détour par la fiction tenté avec l'aide de sa compagne Marion Richoux, <i>Reprise en main</i> (ancré dans cette même réalité ouvrière, avec Pierre Deladonchamps et Laetitia Dosch), le voici qui revient au sujet de son premier film, <i>Trois frères pour une vie</i> (1999), portrait de paysans de son village. 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Et pour la Suisse, tout finit par arriver. En fait, même en restant très local, j'aspire toujours à une forme d'universalité. Et les retours dans les débats qu'on a pu faire entre Bulle, La Chaux-de-Fonds ou Morges prouvent que la réalité des paysans d'ici n'est pas si différente.</p> <p><strong>Vous-même n'êtes pas d'une famille paysanne, mais ouvrière. Pourtant, vous revenez ici sur des gens que vous aviez déjà filmés à vos débuts?</strong></p> <p><strong>GP</strong>: A l'époque, c'était juste la réalité que j'avais sous les yeux: j'ai grandi à 80 mètres de cette ferme! Depuis tout petit je suis monté sur le tracteur des frères Bertrand et je dois avoir passé des centaines d'heures avec eux. J'avais donc profité de cette proximité pour essayer de réaliser un film qui leur corresponde vraiment, qui soit attentif à leurs gestes et à leur façon de s'exprimer, en montrant que ce sont des gens qui ont su se projeter dans l'avenir. Pour la nouvelle génération, que j'ai connue comme bébés, le regard s'est un peu inversé, puisque là, c'est moi l'aîné.</p> <p><strong>Marion Richoux</strong>: De mon côté, je suis d'Annecy. J'ai fait des études de cinéma et j'ai travaillé à la Cinémathèque des Pays de Savoie et de l'Ain. Je connaissais ce premier film de Gilles, <i>Trois frères pour une vie,</i> dont la frontalité m'avait frappée mais qui n'avait presque pas eu de visibilité. Je me disais que c'était dommage et quand, après <i>Reprise en main,</i> on a cherché quel serait le projet suivant, j'ai proposé d'y revenir. C'était l'occasion de parler de tout ce qui avait changé depuis.</p> <p><strong>GP</strong>: En fait, tout est parti de Suisse, parce que ce premier film autoproduit a été primé au Festival du film alpin des Diablerets et de ce fait, acheté pour une version raccourcie par la TSR. C'est cet achat qui a lancé la machine... </p> <p><strong>On voit aussi dans le film une achive TV en noir et blanc avec les trois frères, Jean, Joseph et André, en 1972. D'où provient-elle?</strong></p> <p><strong>GP</strong>: Elle figurait déjà dans le film de 1999. Je m'étais souvenu de l'événement qu'avait été la venue de la télé dans notre hameau – je devais avoir 4 ou 5 ans – et j'étais donc parti à sa recherche. Avant l'apparation de reportages télévisés plus formatés, c'était une sorte d'émission de promotion rurale à l'intention des paysans eux-mêmes, diffusée sur un créneau spécifique de FR3. Retrouver ça n'a pas été une mince affaire!</p> <p><strong>MR</strong>: En fait, je pense que ces images ont aussi influencé Gilles dans sa manière de faire. 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Contre les discours politiques qui simplifient, cela rappelle qu'il existe en France beaucoup de réalités rurales très différentes. Ici, derrière les trois frères qui ont souffert pour tout mettre en place, on a une génération qui a vraiment choisi ce métier et qui en vit bien, parvenant à réinvestir sans surendettement. A priori, on peut ne pas voir la robotisation de la traite d'un très bon œil, mais de leur point de vue c'est un réel progrès. Leur modèle fonctionne bien, sous la protection de l'AOC Reblochon. Car il faut se rendre compte que c'est grâce à elle que leur lait est payé deux fois plus cher qu'un lait de plaine, qui lui est en concurrence avec d'autres laits européens.... Même si ce n'est pas explicite dans le film, je tiens à ramener cette dimension politique dans les débats. Alors que de nombreux paysans clament qu'ils veulent moins de règles, surtout environnementales, ici, ce sont bien les règles contraignantes édictées par l'AOC qui les protègent!</p> <p><strong>MR</strong>: C'est un film où il y a beaucoup de thèmes sous-jacents, en particulier du fait que tout est appréhendé sur le temps long. Le montage non-chronologique, qui fait des retours dans le passé, permet de se rendre compte de tout ce qui a évolué. Cadré sous le même angle, le paysage n'a peut-être pas changé, mais on voit la ferme se moderniser, le travail se mécaniser, les gens prendre de l'âge et la vie passer...</p> <p><strong>Tout documentaire est forcément sélectif. Ici, on se demande ce que ces paysans font à part travailler du matin au soir. Il n'y a donc pas de place pour d'autres passions?</strong></p> <p><strong>GP</strong>: Les trois frères n'ont pas vraiment connu de loisirs, encore moins pris de vacances. Et l'heure de la retraite arrivée, ils n'en manifestent pas le désir. Mais c'était des gens étonnamment érudits et intéressés, capables de discuter d'autres sujets que juste leur travail! Le grand-père était un grand lecteur et il leur avait transmis ça. André, celui qui est encore en vie et qui tire un bilan plutôt amer de leur existence, sans femmes pour la partager, lit toujours le <i>Courrier International!</i> Ils ont aussi un peu regardé la TV, même si on ne la voit pas: elle était cachée dans un coin sous un tissu, dans cet intérieur d'une totale austérité.</p> <p><strong>MR</strong>: Il a bien fallu se focaliser sur la ferme, la question de sa survie économique et de sa transmission. Si la nouvelle génération est parvenue à prendre sa place dans le film, ce n'était pas du tout évident au début, face à des personnages tels que ces trois oncles! Au bout du compte, malgré les inévitables «oublis», ils se sont tous déclarés satisfaits de l'image qu'on donne du métier. Même le vieil André, en général si négatif.</p> <p><strong>Les thèmes du regroupement des terres, de la construction galopante, de l'écologie et du réchauffement climatique sont juste effleurés. Que peut-on en dire?</strong></p> <p><strong>GP</strong>: Le regroupement foncier s'est fait naturellement, en parallèle à la mécanisation. A présent, les Bertrand possèdent la moitié des terres à Quincy et gèrent tout le reste. Mais si le hameau est resté inchangé, au contraire d'autres villages de la même commune où la population a doublé, c'est bien grâce à son classement comme terrain agricole. Encore une règle salutaire! Parce qu'entre l'industrie de la vallée de l'Arve, le tourisme et la proximité de Genève, la pression démographique est très forte dans la région. Sans même parler des résidences secondaires...</p> <p><strong>MR</strong>: Même si André paraît se moquer de ces écologistes citadins, il faut aussi voir que dans la pratique, on trouverait difficilement plus vertueux que lui! 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Et aussi que la question de son importance littéraire restait suspendue, forcément en retrait des polémiques. Puis le cinéma a commencé à s'intéresser à elle, Laëtitia Masson (non-)adaptant de manière originale <i>Pourquoi (pas) le Brésil</i> bien avant qu'une Claire Denis peu inspirée n'illustre ses scénarios <i>Un Beau soleil intérieur</i> et <i>Avec amour et acharnement.</i> Quant à l'adaptation d'<i>Un amour impossible</i> par Catherine Corsini, elle est hélas restée inédite sous nos cieux.</p> <p>Tout cela pour dire que lorsque dame Angot décide de faire un film, ce n'est pas en oie blanche qu'elle débarque, mais entourée de grands professionnels, de ses producteurs (Alice Girard et Bertrand Faivre) à sa cheffe opératrice (Caroline Champetier). Et qu'il convient donc de prendre le résultat au sérieux, d'autant plus qu'elle est devenue une icône pour toute une nouvelle vague féminine. 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N'obtenant que de vagues excuses de cette digne bourgeoise germanique qui prétend n'avoir rien su de l'inceste qui a eu lieu sous ce même toit, elle repart à peine moins fâchée. Qui croire? La violence employée ne plaide pas forcément en faveur de celle qui réclame des excuses...</p> <p>Suit heureusement toute une remise en contexte, avec narration en voix off et images d'archives familiales qui montrent l'enfant puis la belle jeune femme, épouse et mère, que Christine Angot a aussi été. Les mots choisis sonnent juste, les images habilement amenées touchent, sa jeunesse saccagée ne fait aucun doute derrière une apparence faussement tranquille. S'ensuivent d'autres rencontres, avec son ex-mari, sa mère et pour finir sa propre fille, qui justifient pleinement le titre d'<i>Une famille.</i> Drôle de famille, ou plutôt infiniment triste.</p> <h3>Posture victimaire problématique</h3> <p>Et puis, il y a aussi l'évocation du tribunal médiatique qu'Angot a subi depuis la publication de <i>L'Inceste,</i> en 1999. Pièce à conviction, cet extrait devenu célèbre qui la voit quitter le plateau de l'émission <i>Tout le monde en parle</i> alors que Thierry Ardisson insiste qu'ils «s'amusaient si bien». Là, on est totalement de son côté et on les bafferait tous volontiers. Mais n'est-ce pas la même Angot qui un peu plus tard, «bonne cliente» du petit écran malgré tout, alla jusqu'à en devenir une chroniqueuse zélée? Bref, il y a là une dimension de plaidoyer <em>pro</em> <em>domo</em> sélectif dont il convient de de pas être dupe.</p> <p>La rencontre la plus révélatrice est celle, douce-amère, avec son ex-mari, qui fut lui-même victime d'un viol dans son enfance. Survient alors ce moment où elle lui reproche de ne pas être intervenu alors que, dans leur maison à Nice, elle «rechutait» avec son père à l'étage. Lui se défend en affirmant que c'était par respect pour sa personne, supposant qu'à ce moment de sa vie elle devait savoir ce qu'elle faisait. Ignoble lâcheté ou au contraire retenue admirable? Apparaît alors, aveuglante, l'infinie complexité de ces histoires d'emprise et de consentement, de désir et de honte, de demande d'amour et de responsabilité qui peut fluctuer avec le temps. 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Dès lors, à moins d'aller la chercher dans d'autres histoires, l'écrivain-cinéaste autocentrée se condamne à tourner en rond.</p> <h3>Creuser son trou ou en sortir</h3> <p>«J'en ai marre de parler de ça, j'en ai marre que mon travail soit envahi par ça…» se lamente vers la fin Christine Angot, aujourd'hui 65 ans. Et encore une fois, ses accents sonnent parfaitement sincères. Mais la réalité, c'est qu'on peut aussi la soupçonner d'avoir creusé son propre trou, de se complaire dans ce malheur, surtout depuis qu'il est devenu la clé de son succès. Même la prise de connaissance du journal intime de sa mère, qui s'arrête le jour où celle-ci a décidé de passer à autre chose après trop de malentendus, ne saurait l'aider. Elle-même ne peut ou ne veut pas. 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Malgré l'aura du cinéaste palmé et oscarisé de <i>The Pianist</i> et de son co-scénariste Jerzy Skolimowski <i>(EO),</i> le projet était devenu comme pestiféré déjà avant le premier clap. Et à présent que toute chance de succès commercial a disparu, c'est la débandade.</p> <p>Certes, <i>The Palace </i>est encore sorti plus ou moins normalement dans une poignée de pays (Italie, Pologne, Russie, Hongrie, Suède et Allemagne). Mais dans le monde anglo-saxon, personne n'ose s'en approcher, surtout après son assassinat en règle par les donneurs de ton <i>Variety, The Hollywood Reporter</i> et <i>Screen.</i> En France, après six mois de tergiversations, seule une petite compagnie spécialisée dans la réédition de classiques américains, Swashbuckler Films, a fini par assumer le risque d'une distribution, en espérant que suffisamment de salles suivront d'ici la date annoncée du 15 mai. Et en Suisse, autre pays co-producteur derrière l'Italie et la Pologne? Ici aussi, c'est un mini-distributeur occasionnel, Mont-Blanc, qui est venu à la rescousse, sortant d'abord le film en Suisse allemande le 18 janvier (flop à 4'600 d'entrées) tandis que presque tous les exploitants romands se défilaient. Même notre Cinémathèque se cache courageusement. Ne reste pour l'instant plus que le Ciné 17 de Genève, qui sort le film le 10 avril – qu'on se le dise.</p> <h3>C'est quoi, ce <i>Palace?</i></h3> <p>Car enfin, ce n'est «que» d'une œuvre qu'il sagit, pas d'anciennes affaires de mœurs sur lesquelles nous n'avons ni les moyens ni l'autorité pour juger! Et <i>The Palace,</i> malgré tous les bâtons mis dans ses roues, vaut largement le détour. Peut-être que seuls ceux qui se souviennent encore de <i>What? </i>(1972), la dernière franche comédie de Polanski, comprendront vraiment d'où sort ce film absurde et grotesque, cosmopolite en diable et peuplé de monstres tous plus ou moins escrocs. Après une villa isolée au bord la Méditerranée, c'est dans un grand hôtel de l'Oberland bernois – à Gstaad, où il possède un chalet et passa une année en résidence surveillée sous la menace d'une extradition aux Etats-Unis – que notre auteur a situé sa nouvelle farce. Et à la place de son vieux complice Gérard Brach, décédé en 2006, c'est cette fois son ami de jeunesse Skolimowski qui, avec son épouse Ewa Piaskowska, co-signe le scénario. Soixante ans après leur mémorable collaboration du <i>Couteau dans l'eau,</i> un bel exemple de fidélité.</p> <p>Pays hôte, la Suisse n'en sort pas grandie, et on peut dès lors comprendre que la Confédération n'ait pas lâché le moindre centime au courageux co-producteur CAB Films. Mais elle n'est de loin pas la seule à en prendre pour son grade dans ce qui s'apparente à un grand jeu de massacre géopolitique. Seul épargné, ce «reste du monde», pays du Golfe, Chine, Inde ou Brésil, qui n'a atteint le statut puissance mondiale qu'après l'an 2000. Ce règlement de comptes est donc avec l'ancien monde, celui du XXème siècle qu'a traversé Polanski, aujourd'hui âgé de 90 ans. Mais il concerne tout autant une certaine «belle» société huppée qu'il a aussi côtoyée. Et là, il y a peu de chances que quoi que ce soit ait changé depuis, les nouveaux riches valant bien les anciens.</p> <h3>Jeunesse qui s'enfuit, argent aux abris</h3> <p>Tout commence donc avec l'arrivée des convives pour un réveillon du millénaire qui s'annonce festif tandis que le personnel s'active pour leur accueil. Hansueli Kopf, l'impeccable directeur du palace (Oliver Masucci, un des principaux acteurs allemands actuels), sera particulièrement mis à contribution. Il est le clown blanc de l'affaire, qui se plie aux exigences les plus extravagantes de ses hôtes, arrangeant des services discrets par-ci et éteignant des incendies par-là avec l'aide de ses adjoints Tonino (Fortunato Cerlino) et Mrs. Frautschi (Beatrice Frey). Et parmi les habitués déjà installés, qui d'autre pour ouvrir le bal que... Sydne Rome, l'héroïne de <i>What?</i></p> <p>Las! Ex-beauté d'une fraîcheur exquise, cette juive américaine installée en Italie n'est plus que l'ombre d'elle-même après trop de passages sous les bistouris (à sa décharge, dans la vie réelle, c'est suite à un accident de voiture lors duquel un airbag lui explosa au visage). Vitrine de tous les autres «monstres» à venir, elle remercie un certain Dr. Lima (Joaquim de Almeida, star portugaise du cinéma international) pour les années de jeunesse qu'il lui aurait fait gagner. Très demandé, ce prince de la chirurgie esthétique ne se souvient pas des noms de ses innombrables patientes, plus préoccupé qu'il est par une épouse gagnée par Alzheimer. Claquemurée dans sa suite, une autre de ses clientes, une marquise française (Fanny Ardant), voue son affection à son petit chien Mr. Toby. Mais un souci d'écoulement lui fait bientôt reporter son intérêt sur Karol, un beau plombier polonais.</p> <p>Et ainsi vogue la comédie, de chambre en chambre et de nouvel arrivant en nouvelle crise. Il y a là l'octogéraire milliardaire américain Arthur William Dallas III (John Cleese, des Monty Python) et Magnolia, sa jeune épouse texane enveloppée (la non moins britannique Bronwyn James), surtout intéressée à hériter. Autre Américain quoique d'âge indéfinissable grâce à sa moumoute et son fond de teint orangé, Bill Crush (Mickey Rourke, ou ce qu'il en reste) est un escroc qui s'est invité sans réservation pour faire affaire avec Jacob Tell (Milan Peschel, autre excellent comédien allemand), un timide banquier suisse. Mais qui est donc ce Vaclav, surgi de quelque pays d'Europe centrale avec femme et enfants, qui se présente soudain comme son fils? A l'autre bout du spectre, voici un groupe de jeunes et bruyants oligarques russes avec leurs blondes escorts venus retrouver un ambassadeur corrompu avec des sacs remplis de billets à «blanchir». Trop volumineux pour être accueillis par le safe de l'hôtel, ils trouveront place dans l'abri anti-atomique...</p> <h3>La vanité des monstres</h3> <p>On peut trouver le trait gros, mais la caricature à la Daumier est précise et cruelle, de même que la mise en scène reste affûtée. Par moments, Polanski manque visiblement de moyens (l'envol depuis un balcon qui révèle enfin l'ensemble du bâtiment, réalisé en effets spéciaux) et ses blagues ne sont pas toujours du meilleur goût, comme celles concernant le signor Minetti, alias Bongo, ancienne star du porno bien membré (Luca Barbareschi, complice de longue date et principal producteur du film). Mais un pansement bien placé en souvenir de <i>Chinatown</i> a tôt fait de nous le rendre plus amusant. En fait, tous se valent dans cette grande course à l'argent, contre le temps qui file et qui finira tout de même par les rattraper.</p> <p>Mr. Crush veut convaincre Tell de parier avec lui sur le «bug» informatique prédit pour l'an 2000. A la télévision, en direct, un Boris Eltsine épuisé passe la main à un jeune successeur prometteur, un certain Vladimir Poutine, lequel assure un peu plus tard à tous la protection d'un Etat de droit. Un pingouin offert par le vieux milliardaire à sa petit-fille – pardon, sa jeune épouse – s'échappe dans les couloirs de l'hôtel, pauvre petit intrus dans ce monde de fous. Pour finir, il y aura des morts, mais on ne dévoilera pas ici lesquelles. Par contre, il n'y pas de mal à révéler que, de manière parfaitement réaliste, les riches resteront riches et la Suisse saura en profiter. Quant à Tell, il sortira de là tout ébaudi, déclarant avoir vécu là «la plus belle soirée de sa vie». Clin d'œil au titre du film qu'Ettore Scola tira en 1972 de <i>La Panne</i> de Friedrich Dürrenmatt?</p> <p>Toujours est-il que c'est bien la satire jusqu'au-boutiste des dernières grandes comédies italiennes qui vient ici à l'esprit (bien plus que les récents <i>Youth</i> de Paolo Sorrentino ou <i>Sans filtre/Triangle of Sadness</i> de Ruben Östlund). C'est comme si Polanski avait choisi de rester un cinéaste du siècle passé, pour le meilleur et pour le pire. Quant à l'humour, il n'y a bien sûr rien de plus personnel. Par le passé, il est arrivé au cinéaste de toucher le grand public <i>(Cul-de-sac, Le Bal des vampires)</i> comme de rater sa cible <i>(What?, Pirates). </i>Pour notre part, nous nous sommes bien amusés. En tous cas, ne croyez pas ceux qui clament que Polanski serait soudain devenu gâteux et aurait perdu tout talent. Secondé par ses fidèles collaborateurs, le monteur Hervé de Luze (12ème film en commun), le chef opérateur Pawel Edelman (8ème) et le compositeur Alexandre Desplat (6ème), réunis depuis <i>The Ghost Writer</i> et ses ennuis helvétiques de 2009, cet éternel fugitif a réalisé le film qu'il voulait. Sans doute le dernier d'un esprit libre, qui aura estimé qu'il n'avait plus rien à perdre.</p> <hr /> <p>(<strong>Rédaction</strong>) <em>Nous apprenons que le producteur-délégué du film de Polanski, Jean-Louis Porchet, a été victime d’un grave accident de circulation le dimanche 24 mars, près de Rivaz. Il se trouve dans un état grave au CHUV, à Lausanne. Sa société, CAB-Productions, établie à Lausanne, connaît de sérieuses difficultés en raison du boycott dans quasiment toutes les salles suisses de cette œuvre tournée à Gstaad, avec un grand nombre de techniciens locaux. 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