Actuel / Mario Cortesi «La presse écrite va survivre!»
Mohamed Hamdaoui
Journaliste, député au Grand Conseil bernois
Les premiers membres du Bureau Cortesi en 1967 (2 ans après sa création) avec son créateur Mario Cortesi (4e à gauche, le seul avec une cravate), Peter Rothenbühler (3e depuis la droite) et Franck A. Meyer (2e à droite) © DR
Début février, l’hebdomadaire gratuit bilingue «BIEL BIENNE», qui tire à plus de 100'000 exemplaires, fêtera ses 40 ans. Malgré ses doutes et ses critiques à l’encontre de l’évolution du métier de journaliste, son créateur Mario Cortesi pense que la presse écrite peut encore avoir de beaux jours.
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Il trouvait que ça claquait bien…</p> <p>Au pilori aussi tous les opéras et l’ensemble des symphonies de Richard Wagner. Comme cet antisémite notoire était idolâtré par des dignitaires du IIIe Reich, cela risquerait de faire de moi un «complice par contumace temporelle» d’un sympathisant nazi, moi qui ne me suis jamais remis d’avoir appris, enfant, la monstrueuse existence de la Shoah.</p> <p>Je ne devrai plus jamais tenter de me déhancher sur une chanson de Khaled. Il y a une dizaine d’années en effet, le «roi du raï» avait décidé de quitter la France car ce pays y autorise le mariage entre hommes. Il avait préféré s’exiler dans un autre qui les condamne.</p> <p>Plus jamais je ne fredonnerai les <em>Lacs du Conemara</em>, puisque par pure provocation, Michel Sardou et son génial parolier Pierre Delanoé (auteur notamment de très bienveillants tubes comme <em>Champs Elysées</em>, <em>Salma, ya salama</em>, ou <em>Fais comme l’oiseau</em>) avaient commis<em> Le temps des colonies</em>, un soir où ils avaient tellement picolé qu’ils étaient complètement noirs.</p> <p>Je bannirai tous mes CD de Johnny Cash et de Jerry Lee Lewis (il vit encore, youppie!). Ils étaient Blancs, venaient du sud des Etats-Unis et il n’est pas exclu que certains membres du KKK passaient leurs chansons dans les radio-cassettes de leurs bagnoles quand ils allaient se «faire un Noir».</p> <p>Plus mon armoire à disques se viderait, plus je risquerais de devenir parano. Quand Brassens, mon Brassens adoré, chantait <em>Gare au gorille</em>, ne faisait-il pas allusion à ma couleur de peau et à mon organe démesuré (même pas vrai!)? Et l’album blanc des Beatles? Pourquoi Ringo, Paul, John et George, tous de peau matte, ne l’avaient-ils pas baptisé <em>Album de toutes les couleurs du gentil monde dans lequel nous avons la chance de vivre entre frères et sœurs du même sang</em>? Et Mozart? Qui peut me prouver que lorsqu’il avait composé <em>L’enlèvement au sérail</em>, il n’était pas mû par des arrière-pensées islamophobes?</p> <p><em>Ad libitum. Ad nauseam</em> (c’est du latin).</p> <p>Croyant avoir expurgé mon armoire de tous les disques qui risqueraient de heurter mes identités multiples, je suis tombé sur un coffret comportant des raretés de la chanson française. Des perles. Dont celle-ci de Charles Trenet: <em>La biguine à Bango</em>.</p> <p>Je l’ai écoutée en boucle. Elle illustre à quel point il y a quelques décennies, les stéréotypes frappant les personnes «de couleur» étaient encore ancrés dans les têtes:</p> <p><em>Connaissez-vous la Martinique?</em> C<em>onnais-tu là-bas le Bango?</em> <em>Dès qu'il entend jolie musique</em> <em>Le voilà debout tout de go</em> <em>Pour danser avec demoiselle,</em> <em>Ah, c'est un galant damoiseau,</em> <em>Demoiselle, tu as des ailes,</em> <em>Quand tu fais Biguine à Bango…</em></p> <p>Aujourd’hui, le dernier couplet chanté sur une biguine entraînante serait non seulement interdit, mais carrément inconcevable. Non seulement les lois ont changé, mais les mentalités aussi:</p> <p><em>Bango, Bango a des petits frères </em> <em>Des petites sœurs qui dansent à Paris </em> <em>À Paris aussi on sait faire </em> <em>La Biguine comme au pays. </em> <em>Et tout comme à la Martinique, </em> <em>Demoiselles ont le ventre gros, </em> <em>On travaille pour la République </em> <em>Quand on fait Biguine à Bango! </em></p> <p>Or, cinquante ans après avoir enregistré cette chanson aux paroles aujourd’hui franchement choquantes, Trenet permettait que son inoubliable <em>Douce France</em> devienne l’hymne antiraciste des années 80.</p> <p>Tel est sans doute l’enjeu du surréaliste débat mémoriel actuel. L’histoire ne se réécrit pas. Elle doit être lue, écoutée, analysée et remise dans son contexte. Et l’on découvrira peut-être qu’au lieu de vouloir lâchement déboulonner des statues, il est plus enrichissant de tenter de connaître leur histoire.</p> <p>Je sais, cela demande un certain effort.</p>', 'content_edition' => null, 'slug' => 'brulons-aussi-charles-trenet', 'headline' => false, 'homepage' => 'col-md-6', 'like' => (int) 756, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 2424, 'homepage_order' => (int) 2664, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 4, 'person_id' => (int) 2604, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [ [maximum depth reached] ], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 1900, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => false, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => 'NORMAL', 'readed' => null, 'subhead' => 'Cinéma ', 'title' => 'Algérie: le deuil, enfin?', 'subtitle' => 'Coup de cœur pour «Papicha», premier long-métrage de Mounia Meddour racontant avec force, humour et poésie l’absurdité de la guerre civile algérienne et l’incroyable courage des femmes de ce pays pour faire face à l’obscurantisme islamiste.', 'subtitle_edition' => null, 'content' => '<p>Et soudain, j’ai enfin eu la force de pleurer. </p> <p>Enfin. </p> <p>Laisser un quart de siècle de tristesse solitaire s’exprimer publiquement.</p> <p>Pourtant, je ne voulais pas craquer. Un quart de siècle que je refusais de fondre publiquement.</p> <p>Un mec, ça ne chiale pas. Je ne suis pas une gonzesse. </p> <p>J’étais simplement un con. Comme tant d’autres. Comme trop d’autres.</p> <p>Une éternité à intérioriser l’insupportable. A écrire mes souffrances sur des mouchoirs en papier. A les noyer dans des boissons interdites. A dire «tout va bien.»</p> <p>Deuil impossible. Deuil inutile.</p> <p>Jusqu’à ce qu’un soir. Dans ma ville adorée de Bienne. Dans cette salle de cinéma où j’allais, adolescent, regarder tant de films. Où j’étais Alain Souchon, tenant Isabelle Adjani dans ses bras. Où j’espérais que Joss Beaumont ne se ramasse pas une balle dans le dos à la fin du «Professionnel». Je m’y trouvais beau et invulnérable.</p> <p>Jusqu’à ce moment où sur ce même grand écran, des jeunes femmes ont commencé à danser en criant «Viva l’Algérie» en écoutant Raina Raï chanter «Ya Zina» - «Que tu es belle.» Voir ces jeunes femmes s’éclater dans cette mer peu accueillante, avec ses vagues grises qui donnent envie de traverser à la nage la Méditerranée pour patauger au plus vite dans les flots calmes du lac Léman.</p> <p>Et pouvoir enfin pleurer. Chialer. Hurler. Gueuler : «Pourquoi?»</p> <p>Cette petite séquence de «Pachita» a failli me réconcilier avec la vie.</p> <p>Dans cette séquence, je me voyais, un quart de siècle plus tôt, sur une plage près d’Alger. On fumait des «Garos», des clopes épouvantables, en sirotant des bières qui avaient le goût du désespoir. On avait des projets plein la tête. Les nôtres étaient littéraires.</p> <p>On causait des «blédards» qui avaient réussi. Camus, bien sûr. Mais aussi Kateb Yacine et Mouloud Mammeri. On se faisait des clins d’œil. On n’imaginait pas la suite de cet atroce roman. On l’imaginait rose. Il fut noir.</p> <h3>Héroïnes </h3> <p>Un quart de siècle après cette monstrueuse et absurde deuxième guerre d’Algérie, voilà enfin un film qui décrit avec minutie et justesse cette époque épouvantable.</p> <p>Un film réalisé par une femme, Mounia Meddour, et essentiellement interprété par des femmes. Ce n’est pas un hasard. Il a quasi entièrement été tourné en Algérie. C’est un pur bonheur.</p> <p>Dans ce film, il y a Mokhtar, le gardien de la Cité universitaire. Si la vie s’était comportée mieux pour lui, il serait sans doute devenu camelot ou receleur dans la banlieue de Lyon, de Lille ou de Montpellier. Il serait peut-être un pote de bistrot ici, à Bienne. On se bourrerait la gueule en se moquant des couillons de tous bords. Mais non. Lui aussi fut entraîné dans le tourbillon lâche qui avait englouti tant de mecs algériens de l’époque. Lui aussi s’était rendu complice des atrocités islamistes. 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A l’entendre, on imagine à quel point elle rêve de traverser elle aussi la mer, quitte à devenir simple pionne dans un lycée de Montreuil.</p> <p>Il y a ces femmes qui dansent, mâtent les mecs de leur âge et rêvent de défilés de mode, s’interrogent sur leur sexualité et font des doigts d’honneur aux types en djellaba qui leur crachent à la gueule parce qu’elles ne portent pas le voile.</p> <p>Des affiches, de plus en plus d’affiches, les avaient pourtant mises en garde.</p> <p>Nulle n’était censée ignorer la pseudo loi divine. </p> <p>Il y a ces rues sublimes d’Alger, ces échoppes et ces petits bars où l’on a envie de s’arrêter pour oublier un instant le tumulte de la modernité.</p> <p>Cette nuit où l’héroïne et son tourtereau s’enlacent pudiquement. Il rêve de Canada, elle veut se battre. Ici.</p> <p>T’en souviens-tu?</p> <p>Cette nuit-là, alors que la mer nous ouvrait les bras, pourquoi n’avais-je pas réussi à te convaincre de partager mon exil? 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Les automobilistes exigeaient au contraire davantage de places de parcs et une partie de la population voulait profiter de ce scrutin pour manifester son mécontentement. Résultat: cette année-là, 61,5% des votants avaient rejeté ce projet pourtant en grande partie financé par la Confédération. Taux de participation: 35%. Presque un record dans cette ville résignée à des abstentions massives.</p> <h3><strong>«La force transformatrice des moments vécus»</strong></h3> <p>Désigné par la Fondation Exposition suisse de sculpture, Thomas Hirschhorn avait décidé de dédier cette 13<sup>e</sup> édition à l’écrivain biennois Robert Walser. Cet autodidacte tourmenté né en 1897 avait exercé de nombreux emplois précaires, tout en écrivant de nombreux textes alternant nouvelles et poèmes, romans et récits, pièces de théâtre et d’innombrables articles dans la presse. Il finit ses jours un triste 25 décembre (en 1956) de fortes neiges et marchant, seul, jusqu’à l’épuisement et la mort, pour s’évader de l’asile psychiatrique d’Herisau où il était interné. «Mon rêve, c'est que cet événement soit tellement fort, tellement intense qu'on n'oublie plus jamais Robert Walser. Et que l'on arrive à cette soi-disant éternité non pas par l'objet ou le matériau, mais par la densité, la beauté, et peut-être la force transformatrice des moments vécus sur place. C'est ça que je veux créer.» Mais Thomas Hirschhorn ne s’imaginait pas le nombre d’obstacles qui allaient se dresser devant lui.</p> <h3><strong>Taxis et «Neinsager»</strong></h3> <p>L’exposition aurait dû se dérouler en 2018. Les permis de construire avaient été accordés et le financement en partie assuré. C’était sans compter les nombreuses oppositions. «Je les avais totalement sous-estimées», reconnaîtra-t-il. L’opposition de la puissante Association des chauffeurs de taxis craignant de voir le chiffre d’affaires de ses membres baisser durant la manifestation. Oppositions aussi et peut-être surtout de nombreux pisse-vinaigre rancuniers, les tristes «Neinsager», qui n’avaient pas oublié que, 15 ans plus tôt, le nom de Thomas Hisrchhorn avait été au cœur d’un des plus absurdes règlements de compte politiques.</p> <h3>Christoph Blocher</h3> <p>Dix décembre 2003. Christoph Blocher accède au Conseil fédéral. La Suisse est divisée en deux camps: les pro et les anti. Domicilié à Paris depuis 1984, Thomas Hirschhorn présente une exposition au Centre culturel suisse de la Ville Lumière. Dans une pièce de théâtre, il n’hésite pas à démonter le mythe de Guillaume Tell. Une actrice vomit dans une urne de scrutin et un acteur adopte la position d’un chien pour uriner sur une image qui semble représenter le nouveau conseiller fédéral. Tollé! Sacrilège! En guise de représailles, les Chambres fédérales décident alors de raboter l’enveloppe financière de Pro Helvetia, qui avait soutenu financièrement cette exposition. Très peu de députés et de sénateurs ne l’avaient vue, mais la rumeur et l’indignation sélective avaient triomphé. «Je ne m'étais pas douté que je trainerais encore longtemps cette casserole», soupire Thomas Hirschhorn.</p> <h3><strong>Plier sans rompre</strong></h3> <p>Car Bienne la rouge change parfois de couleurs. Jusque-là groupusculaire, l’UDC compte désormais 11 sièges au Conseil de Ville (sur 60) et est même désormais le plus grand groupe parlementaire. Elle a largement bénéficié de l’image négative de cette cité horlogère de 56'000 habitants, multiethnique (plus de 130 nationalités représentées), avec un fort taux de bénéficiaires de l’aide sociale (11% de la population). Cette formation est localement très active, multiplie les pétitions et les actions de rues, est très présente sur les réseaux sociaux et inonde les médias locaux de lettres de lecteurs. Du pain béni! Au point qu’en raison de l’hostilité grandissante, Thomas Horschhiron finit par plier. Sans pour autant rompre. Avec la bénédiction des autorités de majorité rose-verte, il accepte de repousser d’un an son projet d’Exposition suisse de sculpture. Mais il n’en démord pas: elle aura lieu sur la place de la Gare de Bienne et sera consacrée à Robert-Walser.</p> <h3><strong>Bâton de pélerin</strong></h3> <p>L’artiste au caractère bien trempé change alors de stratégie. Il loue un petit appartement en haut d’un immeuble surplombant la place de la gare et multiplie les réunions publiques pour expliquer son projet. Dans des bistrots ou à la bibliothèque municipale, dans d’autres lieux culturels ou même dans la rue, il s’explique, brandit son bâton de pèlerin, s’emporte, s’enthousiasme, se prend au jeu et finit par convaincre. Les chauffeurs de taxis retirent leur opposition et le préfet donne son feu vert. Mais le plus dur est à venir.</p> <h3><strong>Obtus et téméraire</strong></h3> <p>«C’est toujours difficile de concevoir une œuvre d’art dans l’espace public, où les conflits d’intérêts sont fréquents. Je me bats comme un chien pour chaque centimètre de terrain, sinon rien ne se passe. J’ai toujours été clair. Je ne suis pas extravagant mais obtus, téméraire et surtout dingue de Robert Walser. Je conçois dans sa ville natale un travail qui va marquer les esprits et entrer dans l’histoire de l’art», s’enflamme-t-il. Alors, depuis le début du mois d’avril, au risque de priver les automobilistes d’une vingtaine de places de parc dans cet endroit stratégique, lui et son équipe se sont activés. 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C’est quelque chose que j’ai appris en France, notamment. Les Français respectent les grévistes, qu’ils fassent eux-mêmes grève ou non. </p> <p>La grève à venir a ceci de pertinent, spécifiquement, qu’elle s’inscrit dans la queue de la comète #MeToo, et qu’elle vise, par ses très nombreuses revendications, à transformer ce mouvement de prise de conscience en un mouvement de propositions et de changement.</p> <p><strong>Comptez-vous vous associer d’une manière ou d’une autre à ce mouvement?<br /></strong>Depuis que j’ai arrêté la politique, en 2003, n’ayant pas été réélue, j’ai choisi de m’engager autrement pour les causes qui m’importent le plus, que ce soit l’emprisonnement ou les questions de genre. 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Peut-on vous qualifier de «féminosceptique», doutant parfois des inégalités entre hommes et femmes et de la forte implication des hommes dans ce phénomène? <br /></strong>Absolument pas. Je comprends votre question au regard de certaines de mes positions du siècle dernier (et parfois encore du début de ce siècle), mais depuis j’ai beaucoup étudié les questions de genre telles qu’elles se posent non seulement en Suisse ou en France, mais aussi ailleurs dans le monde et je pense que mon dernier livre notamment, <em>Le Nouveau Féminisme</em>, <em>combats et rêves de l’ère post-Weinstein</em> (Odile Jacob, 2019), répond sans ambiguïté à cette question.</p> <p><strong>Durant quelques mois, entre 2010 et 2011, le Conseil fédéral avait été majoritairement féminin. Avez-vous eu le sentiment que cette particularité avait eu des conséquences notables sur la politique menée? 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L’attitude des parents face à un bébé fille ou un bébé garçon est totalement différente: amour inconditionnel des mères pour leurs fils, conditionné à une certaine ressemblance pour leurs filles, alors que pour les pères il s’agira de protéger (ou d’ignorer) les filles et d’endurcir les garçons. Comment savoir la part du biologique vs la part du social? La question finalement devrait probablement se poser en termes d’individus et non de genre: «quelles sont, au fond, les principales différences entre vous et moi» – outre le fait que vous êtes un homme et que je suis une femme? Nous sommes des êtres complexes et ne serons jamais définis par un seul critère. </p> <p><strong>Comme écrivaine, quel regard portez-vous sur l’écriture inclusive? Et d‘ailleurs, préférez-vous que l’on vous qualifie d’écrivaine ou d’écrivain?<br /></strong>La littérature française aura du mal à s’accommoder de cette inclusion là. Je travaille en ce moment à une correspondance amoureuse et j’avais ce désir, de faire en sorte que le lecteur ne sache ni qui écrit ni qui est le destinataire, femme, homme, ou autre. 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C’est une maison jaune adossée à la colline et les pieds dans l’eau. A la sortie de Bienne, sur la route en direction de Neuchâtel, au 140, ce bâtiment de deux étages est depuis plus d’un demi-siècle le siège d’un des plus vieux bureaux de presse indépendants du pays. Il porte le nom de son principal créateur, Mario Cortesi: le «Bureau Cortesi». Se relancerait-il aujourd’hui dans une telle aventure? «Non. Le paysage médiatique a totalement changé. A l’époque, le journalisme d’investigation n’existait pratiquement pas en Suisse. Les bureaux de presse indépendant étaient inexistants. En 1965, lors de la création du bureau, nous étions si enthousiastes que nous croyions avoir réinventé le journalisme. Nous nous retrouvions chaque matin à 6 heures pour prendre le petit-déjeuner et discuter de ce que nous pourrions produire dans la journée.»
Sous écoute
En réalité, le 20 septembre 1965, ils étaient quatre à se lancer dans cette aventure: Mario Cortesi, donc, mais aussi son éternel compère Ludwig Hermann, Guido Noth et Ella Sollberger, qui vient de décéder. Leur but initial était d’assurer leur revenu professionnel au moyen d’une caisse et d’une infrastructures communes. Chaque jour, ils produisaient une page d’actualité régionale dans le journal bâlois Nationalzeitung. «Nous étions sans limites et capables de réveiller un conseiller fédéral à minuit pour avoir sa réaction. Rudolf Knägi disait de nous: "Ce sont les diables"», s’amuse-t-il. Plus tard, le chef du département fédéral de Justice et Police Kurt Furgler avait d’ailleurs donné son feu vert pour mettre sur écoute certains journalistes du Bureau Cortesi, surveiller leur courrier et même glisser des micros dans la salle de conférence…
En 1971, Mario Cortesi (avec l’appareil photo) et Franck A. Meyer. © DR
Séance matinale
A bientôt 78 ans, ce Biennois aux ascendances italiennes conserve une inextinguible foi dans sa profession. Tous les matins avant 7 heures, il est le premier à ouvrir les portes de son antre, invariablement tiré à quatre épingles. Dans la salle de conférence aux murs décorés d’affiches de films originaux, surtout de Charles Chaplin, autour d’une vaste table en bois, il dirige chaque matin la «conférence», à savoir la séance de rédaction quotidienne. Elle débute systématiquement…. à 7 heures 45 précises, heure à laquelle certains journalistes aimeraient pouvoir enfin se coucher!
«Aujourd’hui, je ne pourrais plus créer un tel bureau de presse. Serait-il encore concevable de pouvoir compter sur des journalistes prêts à travailler 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24? Aujourd’hui, ils commencent par se poser les questions suivantes: Combien vais-je gagner? A combien de semaines de vacances aurais-je droit? Devrai-je travailler le samedi? Mes heures supplémentaires seront-elles payées?», soupire ce patron de presse qui gagne bien sa vie et dont les éditoriaux assument des positions assez conservatrices.
Un an après la création du Bureau Cortesi, la Télévision suisse alémanique mettait un équipement cinématographique à la disposition de ces passionnés de l’image. Un tournant pour cette entreprise qui allait faire de la production de films, des fictions et surtout énormément de documentaires et de films d’entreprises plutôt bien rémunérés, pour la Confédération, la SSR, des collectivités politiques ou des firmes privées.
Plumes réputées
Faire ses premières gammes au Bureau Cortesi, qui comptera jusqu’à plus de 50 collaborateurs, devient alors presque un must. Des plumes ayant laissé des traces indélébiles dans la presse suisse pousseront les portes du bâtiment de la route de Neuchâtel, comme par exemple Franck A. Meyer ou Peter Rothenbühler. Ils y ont d’ailleurs toujours leurs entrées.
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Politique active
Cet engagement politique n’était pas anodin: il préfigurait aussi la volonté de ces journalistes de mettre un grand coup de pied dans la fourmilière médiatique de cette région où dominait de manière monopolistique le groupe de presse Gassmann. D’où le lancement d’un projet qui allait bouleverser le Landerneau politique et économique de la région de Bienne, du Jura bernois et du Seeland: créer un hebdomadaire gratuit entièrement bilingue diffusé dans l’ensemble de cette région. Le 2 février 1978, il y a donc presque 40 ans, BIEL BIENNE paraissait pour la première fois. Quatre décennies plus tard, il existe toujours et est imprimé à plus de 100'000 exemplaires. Son mode de production demeure immuablement le même: il ne recourt à aucune dépêche d’agence, repose sur des articles originaux et la totalité de ses articles sont traduits à l’interne, sans avoir recours à des traducteurs extérieurs.
Publicité
Et surtout: il demeure financé par la seule publicité. Non sans risques. «En 1980, quand nous avions décidé de faire un film pour dénoncer les dangers du tabac, nous savions que BIEL BIENNE perdrait les annonceurs présents dans ce secteur», se souvient Mario Cortesi. «Mais les journalistes avaient décidé de se serrer les coudes et de tous œuvrer à la réalisation de ce film. Résultat: Marlboro et Camel ont cessé de faire passer leurs annonces, mais notre film fut un immense succès: 70 millions de personnes en Europe l’ont vu et il a incité des dizaines de milliers de personnes a arrêter de fumer», rigole-t-il.
Mais cette indépendance a un coût et des limites. Les conditions salariales et sociales ont plusieurs fois été dénoncées par d’anciens collaborateurs du Bureau Cortesi et les syndicats. Et aujourd’hui, la crise du marché publicitaire l’oblige parfois à mettre son indépendance journalistique en sourdine pour ne pas heurter certains gros annonceurs. Les responsables du marketing n’hésitent d’ailleurs pas à tirer les oreilles des auteurs d’articles ayant pu heurter certaines grosses entreprises.
Salon de beauté
Les membres du «bureau», en quelque sorte son conseil d’administration, sont depuis longtemps les mêmes. Ils y sont allés de leur poche pour y figurer et ne se privent pas de varier leurs investissements. Certains d’entre eux avaient par exemple acheté un hôtel à Ibiza où tenir certaines de leurs réunions ou investi une partie de leur fortune pour créer un salon de beauté et de bien-être, le «Beauty Biel-Bienne». «Dans les deux cas, il s’agissait de coups de tête», affirme un des propriétaires du Bureau Cortesi, le graphiste Roland Fischer. «A Ibiza, c’était une occasion que nous ne pouvions pas laisser passer et en ce qui concerne le "Beauty Biel-Bienne”, cela nous permettait de disposer de notre propre endroit où nous prélasser», sourit-il en ajoutant: «Mais c’était notre argent personnel et personne n’était obligé de participer à de tels investissements.»
50 ans après la création du BC, Ludwig Hermann, Mario Cortesi, Ella Sollberger et Guido Noth (les 4 créateurs). © DR
En sursis
Cinquante-trois ans après sa création, le Bureau Cortesi sait qu’il est en sursis. Il ne compte plus qu’une vingtaine de collaborateurs (dont la moitié est active dans le domaine du marketing et de la publicité), n’engage de nouveaux stagiaires qu’au compte-goutte et ses journalistes sont soumis à des rythmes de travail parfois usants. De ses créateurs, seuls Ludwig Hermann et Mario Cortesi demeurent actifs. Ce dernier est de plus en plus désabusé. «Il y a bien sûr des exceptions et il existe toujours des journalistes d’investigations. Mais le journalisme en Suisse est devenu de plus en plus docile. Il n’a parfois carrément plus de crocs. Il manque de passion. C’est presque devenu un métier comme un autre. Le journalisme sérieux et responsable des années 80 et 90 est en perte de vitesse. Il est en voie de disparition», affirme-t-il.
Les limites d’internet
Mais paradoxalement, la presse écrite conserve selon lui une réelle chance de subsister. «Parce que les enquêtes d’opinion montrent que la publicité dans la presse écrite conserve sa crédibilité par rapport aux nouveaux médias. Plus de la moitié des personnes interrogées en Suisse expriment leur ras-le-bol face à la pub sur internet. Raison pour laquelle au lieu de céder à la tentation de la digitalisation à outrance, les éditeurs devraient se cibler sur les médias écrits de qualité. On a souvent annoncé la mort de certains, par exemple du livre, de la radio, du cinéma ou du cirque. Mais je crois que la presse écrite aussi va survivre parce qu’elle demeure un bon média. Internet ne remplacera pas les journaux. Il y a de la place pour les deux.» Raison pour laquelle ce patron de presse n’est pas près de raccrocher malgré ses 77 ans. Lequel vient de publier dans «son» journal un violent éditorial contre l’initiative «No Billag», une «action précipitée et irréfléchie autour d’une table de bistrot». Sa conclusion en guise de quasi-testament: «Le Bureau de Cortesi ne me survivra peut-être pas. Mais BIEL BIENNE, si. J’en suis sûr!»
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Il trouvait que ça claquait bien…</p> <p>Au pilori aussi tous les opéras et l’ensemble des symphonies de Richard Wagner. Comme cet antisémite notoire était idolâtré par des dignitaires du IIIe Reich, cela risquerait de faire de moi un «complice par contumace temporelle» d’un sympathisant nazi, moi qui ne me suis jamais remis d’avoir appris, enfant, la monstrueuse existence de la Shoah.</p> <p>Je ne devrai plus jamais tenter de me déhancher sur une chanson de Khaled. Il y a une dizaine d’années en effet, le «roi du raï» avait décidé de quitter la France car ce pays y autorise le mariage entre hommes. Il avait préféré s’exiler dans un autre qui les condamne.</p> <p>Plus jamais je ne fredonnerai les <em>Lacs du Conemara</em>, puisque par pure provocation, Michel Sardou et son génial parolier Pierre Delanoé (auteur notamment de très bienveillants tubes comme <em>Champs Elysées</em>, <em>Salma, ya salama</em>, ou <em>Fais comme l’oiseau</em>) avaient commis<em> Le temps des colonies</em>, un soir où ils avaient tellement picolé qu’ils étaient complètement noirs.</p> <p>Je bannirai tous mes CD de Johnny Cash et de Jerry Lee Lewis (il vit encore, youppie!). Ils étaient Blancs, venaient du sud des Etats-Unis et il n’est pas exclu que certains membres du KKK passaient leurs chansons dans les radio-cassettes de leurs bagnoles quand ils allaient se «faire un Noir».</p> <p>Plus mon armoire à disques se viderait, plus je risquerais de devenir parano. Quand Brassens, mon Brassens adoré, chantait <em>Gare au gorille</em>, ne faisait-il pas allusion à ma couleur de peau et à mon organe démesuré (même pas vrai!)? Et l’album blanc des Beatles? Pourquoi Ringo, Paul, John et George, tous de peau matte, ne l’avaient-ils pas baptisé <em>Album de toutes les couleurs du gentil monde dans lequel nous avons la chance de vivre entre frères et sœurs du même sang</em>? Et Mozart? Qui peut me prouver que lorsqu’il avait composé <em>L’enlèvement au sérail</em>, il n’était pas mû par des arrière-pensées islamophobes?</p> <p><em>Ad libitum. Ad nauseam</em> (c’est du latin).</p> <p>Croyant avoir expurgé mon armoire de tous les disques qui risqueraient de heurter mes identités multiples, je suis tombé sur un coffret comportant des raretés de la chanson française. Des perles. Dont celle-ci de Charles Trenet: <em>La biguine à Bango</em>.</p> <p>Je l’ai écoutée en boucle. Elle illustre à quel point il y a quelques décennies, les stéréotypes frappant les personnes «de couleur» étaient encore ancrés dans les têtes:</p> <p><em>Connaissez-vous la Martinique?</em> C<em>onnais-tu là-bas le Bango?</em> <em>Dès qu'il entend jolie musique</em> <em>Le voilà debout tout de go</em> <em>Pour danser avec demoiselle,</em> <em>Ah, c'est un galant damoiseau,</em> <em>Demoiselle, tu as des ailes,</em> <em>Quand tu fais Biguine à Bango…</em></p> <p>Aujourd’hui, le dernier couplet chanté sur une biguine entraînante serait non seulement interdit, mais carrément inconcevable. Non seulement les lois ont changé, mais les mentalités aussi:</p> <p><em>Bango, Bango a des petits frères </em> <em>Des petites sœurs qui dansent à Paris </em> <em>À Paris aussi on sait faire </em> <em>La Biguine comme au pays. </em> <em>Et tout comme à la Martinique, </em> <em>Demoiselles ont le ventre gros, </em> <em>On travaille pour la République </em> <em>Quand on fait Biguine à Bango! </em></p> <p>Or, cinquante ans après avoir enregistré cette chanson aux paroles aujourd’hui franchement choquantes, Trenet permettait que son inoubliable <em>Douce France</em> devienne l’hymne antiraciste des années 80.</p> <p>Tel est sans doute l’enjeu du surréaliste débat mémoriel actuel. L’histoire ne se réécrit pas. Elle doit être lue, écoutée, analysée et remise dans son contexte. Et l’on découvrira peut-être qu’au lieu de vouloir lâchement déboulonner des statues, il est plus enrichissant de tenter de connaître leur histoire.</p> <p>Je sais, cela demande un certain effort.</p>', 'content_edition' => null, 'slug' => 'brulons-aussi-charles-trenet', 'headline' => false, 'homepage' => 'col-md-6', 'like' => (int) 756, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 2424, 'homepage_order' => (int) 2664, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 4, 'person_id' => (int) 2604, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [ [maximum depth reached] ], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 1900, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => false, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => 'NORMAL', 'readed' => null, 'subhead' => 'Cinéma ', 'title' => 'Algérie: le deuil, enfin?', 'subtitle' => 'Coup de cœur pour «Papicha», premier long-métrage de Mounia Meddour racontant avec force, humour et poésie l’absurdité de la guerre civile algérienne et l’incroyable courage des femmes de ce pays pour faire face à l’obscurantisme islamiste.', 'subtitle_edition' => null, 'content' => '<p>Et soudain, j’ai enfin eu la force de pleurer. </p> <p>Enfin. </p> <p>Laisser un quart de siècle de tristesse solitaire s’exprimer publiquement.</p> <p>Pourtant, je ne voulais pas craquer. Un quart de siècle que je refusais de fondre publiquement.</p> <p>Un mec, ça ne chiale pas. Je ne suis pas une gonzesse. </p> <p>J’étais simplement un con. Comme tant d’autres. Comme trop d’autres.</p> <p>Une éternité à intérioriser l’insupportable. A écrire mes souffrances sur des mouchoirs en papier. A les noyer dans des boissons interdites. A dire «tout va bien.»</p> <p>Deuil impossible. Deuil inutile.</p> <p>Jusqu’à ce qu’un soir. Dans ma ville adorée de Bienne. Dans cette salle de cinéma où j’allais, adolescent, regarder tant de films. Où j’étais Alain Souchon, tenant Isabelle Adjani dans ses bras. Où j’espérais que Joss Beaumont ne se ramasse pas une balle dans le dos à la fin du «Professionnel». 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On n’imaginait pas la suite de cet atroce roman. On l’imaginait rose. Il fut noir.</p> <h3>Héroïnes </h3> <p>Un quart de siècle après cette monstrueuse et absurde deuxième guerre d’Algérie, voilà enfin un film qui décrit avec minutie et justesse cette époque épouvantable.</p> <p>Un film réalisé par une femme, Mounia Meddour, et essentiellement interprété par des femmes. Ce n’est pas un hasard. Il a quasi entièrement été tourné en Algérie. C’est un pur bonheur.</p> <p>Dans ce film, il y a Mokhtar, le gardien de la Cité universitaire. Si la vie s’était comportée mieux pour lui, il serait sans doute devenu camelot ou receleur dans la banlieue de Lyon, de Lille ou de Montpellier. Il serait peut-être un pote de bistrot ici, à Bienne. On se bourrerait la gueule en se moquant des couillons de tous bords. Mais non. Lui aussi fut entraîné dans le tourbillon lâche qui avait englouti tant de mecs algériens de l’époque. Lui aussi s’était rendu complice des atrocités islamistes. 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A l’entendre, on imagine à quel point elle rêve de traverser elle aussi la mer, quitte à devenir simple pionne dans un lycée de Montreuil.</p> <p>Il y a ces femmes qui dansent, mâtent les mecs de leur âge et rêvent de défilés de mode, s’interrogent sur leur sexualité et font des doigts d’honneur aux types en djellaba qui leur crachent à la gueule parce qu’elles ne portent pas le voile.</p> <p>Des affiches, de plus en plus d’affiches, les avaient pourtant mises en garde.</p> <p>Nulle n’était censée ignorer la pseudo loi divine. </p> <p>Il y a ces rues sublimes d’Alger, ces échoppes et ces petits bars où l’on a envie de s’arrêter pour oublier un instant le tumulte de la modernité.</p> <p>Cette nuit où l’héroïne et son tourtereau s’enlacent pudiquement. Il rêve de Canada, elle veut se battre. Ici.</p> <p>T’en souviens-tu?</p> <p>Cette nuit-là, alors que la mer nous ouvrait les bras, pourquoi n’avais-je pas réussi à te convaincre de partager mon exil? 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Et bientôt à Alger, Oran, Annaba et Tamanrasset.</p> <p>Fatiha et toutes les autres « Papicha » le mériteraient bien.</p> <hr /> <p>De <a href="http://www.allocine.fr/personne/fichepersonne_gen_cpersonne=543957.html">Mounia Meddour</a> </p> <p>Avec <a href="http://www.allocine.fr/personne/fichepersonne_gen_cpersonne=706237.html">Lyna Khoudri</a>, <a href="http://www.allocine.fr/personne/fichepersonne_gen_cpersonne=871603.html">Shirine Boutella</a>, <a href="http://www.allocine.fr/personne/fichepersonne_gen_cpersonne=871605.html">Amira Hilda Douaouda</a></p> <p>Durée : 1 heure 45 minutes</p> <p> </p> <p><a href="http://www.allocine.fr/video/player_gen_cmedia=19584003&cfilm=273587.html?jwsource=cl" target="_blank" rel="noopener">La bande-annonce du film.</a></p>', 'content_edition' => null, 'slug' => 'algerie-le-deuil-enfin', 'headline' => false, 'homepage' => 'col-md-12', 'like' => (int) 850, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1942, 'homepage_order' => (int) 2202, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 6, 'person_id' => (int) 2604, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [[maximum depth reached]], 'tags' => [[maximum depth reached]], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 1763, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => false, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => 'NORMAL', 'readed' => null, 'subhead' => 'ACTUEL / Exposition nationale de sculpture ', 'title' => 'Don Quichotte contre les pisse-vinaigres biennois', 'subtitle' => 'Jusqu’au début du mois de septembre, Bienne abrite la 13e édition de l’Exposition suisse de sculpture. 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Les automobilistes exigeaient au contraire davantage de places de parcs et une partie de la population voulait profiter de ce scrutin pour manifester son mécontentement. Résultat: cette année-là, 61,5% des votants avaient rejeté ce projet pourtant en grande partie financé par la Confédération. Taux de participation: 35%. Presque un record dans cette ville résignée à des abstentions massives.</p> <h3><strong>«La force transformatrice des moments vécus»</strong></h3> <p>Désigné par la Fondation Exposition suisse de sculpture, Thomas Hirschhorn avait décidé de dédier cette 13<sup>e</sup> édition à l’écrivain biennois Robert Walser. Cet autodidacte tourmenté né en 1897 avait exercé de nombreux emplois précaires, tout en écrivant de nombreux textes alternant nouvelles et poèmes, romans et récits, pièces de théâtre et d’innombrables articles dans la presse. Il finit ses jours un triste 25 décembre (en 1956) de fortes neiges et marchant, seul, jusqu’à l’épuisement et la mort, pour s’évader de l’asile psychiatrique d’Herisau où il était interné. «Mon rêve, c'est que cet événement soit tellement fort, tellement intense qu'on n'oublie plus jamais Robert Walser. Et que l'on arrive à cette soi-disant éternité non pas par l'objet ou le matériau, mais par la densité, la beauté, et peut-être la force transformatrice des moments vécus sur place. C'est ça que je veux créer.» Mais Thomas Hirschhorn ne s’imaginait pas le nombre d’obstacles qui allaient se dresser devant lui.</p> <h3><strong>Taxis et «Neinsager»</strong></h3> <p>L’exposition aurait dû se dérouler en 2018. Les permis de construire avaient été accordés et le financement en partie assuré. C’était sans compter les nombreuses oppositions. «Je les avais totalement sous-estimées», reconnaîtra-t-il. L’opposition de la puissante Association des chauffeurs de taxis craignant de voir le chiffre d’affaires de ses membres baisser durant la manifestation. Oppositions aussi et peut-être surtout de nombreux pisse-vinaigre rancuniers, les tristes «Neinsager», qui n’avaient pas oublié que, 15 ans plus tôt, le nom de Thomas Hisrchhorn avait été au cœur d’un des plus absurdes règlements de compte politiques.</p> <h3>Christoph Blocher</h3> <p>Dix décembre 2003. Christoph Blocher accède au Conseil fédéral. La Suisse est divisée en deux camps: les pro et les anti. Domicilié à Paris depuis 1984, Thomas Hirschhorn présente une exposition au Centre culturel suisse de la Ville Lumière. Dans une pièce de théâtre, il n’hésite pas à démonter le mythe de Guillaume Tell. Une actrice vomit dans une urne de scrutin et un acteur adopte la position d’un chien pour uriner sur une image qui semble représenter le nouveau conseiller fédéral. Tollé! Sacrilège! En guise de représailles, les Chambres fédérales décident alors de raboter l’enveloppe financière de Pro Helvetia, qui avait soutenu financièrement cette exposition. Très peu de députés et de sénateurs ne l’avaient vue, mais la rumeur et l’indignation sélective avaient triomphé. «Je ne m'étais pas douté que je trainerais encore longtemps cette casserole», soupire Thomas Hirschhorn.</p> <h3><strong>Plier sans rompre</strong></h3> <p>Car Bienne la rouge change parfois de couleurs. Jusque-là groupusculaire, l’UDC compte désormais 11 sièges au Conseil de Ville (sur 60) et est même désormais le plus grand groupe parlementaire. Elle a largement bénéficié de l’image négative de cette cité horlogère de 56'000 habitants, multiethnique (plus de 130 nationalités représentées), avec un fort taux de bénéficiaires de l’aide sociale (11% de la population). Cette formation est localement très active, multiplie les pétitions et les actions de rues, est très présente sur les réseaux sociaux et inonde les médias locaux de lettres de lecteurs. Du pain béni! Au point qu’en raison de l’hostilité grandissante, Thomas Horschhiron finit par plier. Sans pour autant rompre. Avec la bénédiction des autorités de majorité rose-verte, il accepte de repousser d’un an son projet d’Exposition suisse de sculpture. Mais il n’en démord pas: elle aura lieu sur la place de la Gare de Bienne et sera consacrée à Robert-Walser.</p> <h3><strong>Bâton de pélerin</strong></h3> <p>L’artiste au caractère bien trempé change alors de stratégie. Il loue un petit appartement en haut d’un immeuble surplombant la place de la gare et multiplie les réunions publiques pour expliquer son projet. Dans des bistrots ou à la bibliothèque municipale, dans d’autres lieux culturels ou même dans la rue, il s’explique, brandit son bâton de pèlerin, s’emporte, s’enthousiasme, se prend au jeu et finit par convaincre. Les chauffeurs de taxis retirent leur opposition et le préfet donne son feu vert. Mais le plus dur est à venir.</p> <h3><strong>Obtus et téméraire</strong></h3> <p>«C’est toujours difficile de concevoir une œuvre d’art dans l’espace public, où les conflits d’intérêts sont fréquents. Je me bats comme un chien pour chaque centimètre de terrain, sinon rien ne se passe. J’ai toujours été clair. Je ne suis pas extravagant mais obtus, téméraire et surtout dingue de Robert Walser. Je conçois dans sa ville natale un travail qui va marquer les esprits et entrer dans l’histoire de l’art», s’enflamme-t-il. Alors, depuis le début du mois d’avril, au risque de priver les automobilistes d’une vingtaine de places de parc dans cet endroit stratégique, lui et son équipe se sont activés. 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Et une des nombreuses participantes à cette sculpture d’un genre unique a promis d’aller bientôt dans son Maroc natal faire une lecture publique de certains de ses textes.</p> <h3><strong>«Affabulateur», «profiteur»</strong></h3> <p>De quoi apaiser les esprits? Que nenni. Les titres des courriers des lecteurs parus depuis 2018 à Bienne sur cette Exposition n’ont pas été avares en quolibets: «affabulateur», «profiteur», «manipulateur»... Réplique de Thomas Hirschhorn: «La noblesse d’un travail dans l’espace public est de se confronter à la réalité. Certains râlent, d’autres exagèrent ou avancent des arguments tirés par les cheveux». Comme le coût soit-disant exorbitant de cette manifestation. Car en réalité, la Ville de Bienne n’aura dépensé «que» 300'000 francs. Le reste du budget étant assuré par le Canton de Berne (aussi 300'000 francs) et par des donateurs privés, des fondations et un crowdfunding qui n’a d’ailleurs pas encore obtenu le succès escompté. 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C’est quelque chose que j’ai appris en France, notamment. Les Français respectent les grévistes, qu’ils fassent eux-mêmes grève ou non. </p> <p>La grève à venir a ceci de pertinent, spécifiquement, qu’elle s’inscrit dans la queue de la comète #MeToo, et qu’elle vise, par ses très nombreuses revendications, à transformer ce mouvement de prise de conscience en un mouvement de propositions et de changement.</p> <p><strong>Comptez-vous vous associer d’une manière ou d’une autre à ce mouvement?<br /></strong>Depuis que j’ai arrêté la politique, en 2003, n’ayant pas été réélue, j’ai choisi de m’engager autrement pour les causes qui m’importent le plus, que ce soit l’emprisonnement ou les questions de genre. 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Peut-on vous qualifier de «féminosceptique», doutant parfois des inégalités entre hommes et femmes et de la forte implication des hommes dans ce phénomène? <br /></strong>Absolument pas. Je comprends votre question au regard de certaines de mes positions du siècle dernier (et parfois encore du début de ce siècle), mais depuis j’ai beaucoup étudié les questions de genre telles qu’elles se posent non seulement en Suisse ou en France, mais aussi ailleurs dans le monde et je pense que mon dernier livre notamment, <em>Le Nouveau Féminisme</em>, <em>combats et rêves de l’ère post-Weinstein</em> (Odile Jacob, 2019), répond sans ambiguïté à cette question.</p> <p><strong>Durant quelques mois, entre 2010 et 2011, le Conseil fédéral avait été majoritairement féminin. Avez-vous eu le sentiment que cette particularité avait eu des conséquences notables sur la politique menée? 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Pour répondre plus spécifiquement à votre question, les «Gay Pride» sont pour les personnes homosexuelles une action similaire à une grève, me semble-t-il; on peut mentionner en Afrique du Sud la marche du 1<sup>er</sup> août 2018, #TheTotalShudown, commémorative de la marche contre l’apartheid à Pretoria en 1956 et qui s’élève tout particulièrement contre les violences sexuelles perpétrées à l’encontre des femmes noires.</p> <p><strong>Outre les dispositions anatomiques évidentes, quelles sont, au fond, les principales différences entre un homme et une femme?<br /></strong>On ne naît pas femme on le devient. Mais on le devient très, très vite. Tout se décide probablement dès les premières heures, voire avant la naissance lorsque le genre du futur enfant est connu. L’attitude des parents face à un bébé fille ou un bébé garçon est totalement différente: amour inconditionnel des mères pour leurs fils, conditionné à une certaine ressemblance pour leurs filles, alors que pour les pères il s’agira de protéger (ou d’ignorer) les filles et d’endurcir les garçons. Comment savoir la part du biologique vs la part du social? La question finalement devrait probablement se poser en termes d’individus et non de genre: «quelles sont, au fond, les principales différences entre vous et moi» – outre le fait que vous êtes un homme et que je suis une femme? Nous sommes des êtres complexes et ne serons jamais définis par un seul critère. </p> <p><strong>Comme écrivaine, quel regard portez-vous sur l’écriture inclusive? Et d‘ailleurs, préférez-vous que l’on vous qualifie d’écrivaine ou d’écrivain?<br /></strong>La littérature française aura du mal à s’accommoder de cette inclusion là. Je travaille en ce moment à une correspondance amoureuse et j’avais ce désir, de faire en sorte que le lecteur ne sache ni qui écrit ni qui est le destinataire, femme, homme, ou autre. 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VOS RÉACTIONS SUR LE SUJET
3 Commentaires
@mirafavre 19.01.2018 | 17h18
«Des Passionnés, comme on n'en fait plus !
Bon vent Biel-Bienne :-)
Michel F.
P.S. J'ai habité Bienne de 1964 à 1967. Une ville comme on n'en fait plus .. non plus »
@ecocit 20.01.2018 | 17h28
«Je suis heureux que Mario Cortesi soit toujours aussi dynamique !
Il avait remporté un prix cinématographique pour son film « Yesterday when I was Young ». Un film sur les perdants de la route. Ce film retraçait les conséquences des accidents de vélomoteurs dans les années soixante.
J’ai souvent projeté ce documentaire en classe afin de sensibiliser mes élèves face aux dangers de la route.
Ce film est bouleversant.
Un grand merci à Monsieur Cortesi.
Christian Reichle
»
@Gorbounova 21.01.2018 | 23h46
«Bravo, sans aucune réserve... article très très intéressant. Si j'avais déjà entendu le nom de Mario Cortési, j'étais loin d'imaginer ce parcours si fécond... qu'il semble d'ailleurs poursuivre avec un enthousiasme intact.»