Abbatiale Saint-Maurice d'Agaune (VS). © Paul Bissegger - CC BY-SA 4.0
Après la publication le 12 septembre du rapport qui a documenté plus de mille cas d’abus sexuels dans l’Eglise catholique romaine en Suisse depuis le milieu du XXème siècle, des hauts prélats ont été inquiétés, et des victimes se sont exprimées. Dans ce climat difficile, l’Eglise a pris différentes initiatives. L’une d’entre elles n’a pas beaucoup attiré l’attention. Elle aurait pourtant le potentiel de révolutionner la tant décriée culture du secret de l’Institution.
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Le jour précédent recourrait le cinquantième anniversaire du début de la Guerre du Kippour. Surtout, la cruauté des actes perpétrés à cette occasion rappelle les razzia des tribus habitant la Péninsule arabe qui, en tuant et en violant, attaquaient les tribus adverses et repartaient en emportant les enfants. L’attaque du 7 octobre fut nommée en arabe par ses initiateurs le «Déluge d’al-Aqsa», qui invoque celui, envoyé par Allah, qui noya tous les mécréants. La référence au déluge souligne le caractère virtuose du massacre. En 628, Mahomet a lui-même mené une razzia contre les Juifs vivant dans l’oasis de Khaïbar, pendant laquelle les hommes furent torturés, passés au fil de l’épée, les femmes capturées et réparties dans les harems des vainqueurs, les enfants réduits en esclavage.</p> <p><strong>Comment s’expliquer qu’une telle opération ait pu réussir?</strong></p> <p>Le Premier ministre israélien Netanyahou est otage d’une minorité, qui occupe seulement 14 sièges sur 120 à la Knesset, mais qui a la capacité de dicter son agenda. Au centre de ce programme figure l’accélération de la colonisation en Cisjordanie. Ceci s’est traduit en une stratégie qui a amené à renforcer le Hamas afin d’affaiblir l’Autorité palestinienne. Ce faisant, Netanyahou a largement sous-estimé Sinwar, qu’il avait lui-même libéré en 2011 dans le cadre d’un échange de 1'027 prisonniers palestiniens contre le caporal Gilad Shalit. Jusqu’aux Printemps arabes, le Hamas était proche de la ligne des Frères musulmans, et suivait une stratégie que l’un pourrait dire gestionnaire: il vitupérait Israël, mais avait instauré un <i>modus vivendi</i> qui semblait s’accommoder de la situation. Ceci faisait le jeu d’Israël. Après 2011, le Hamas se radicalise et s’éloigne des Frères, en se rapprochant de l’Iran, grâce à l’unique voyage à l’étranger de Sinwar. Netanyahou continue de croire que «chien qui aboie, ne mord pas», et fait en sorte que chaque semaine passent par l’aéroport Ben Gurion 40 millions de dollars en cash, provenant du Qatar à destination de Gaza. Une partie de ces sommes servira à construire les tunnels dont maintenant tout le monde est au courant. L’aveuglement du gouvernement israélien a été absolument remarquable. En octobre 2023, le mandataire Sinwar a pris l’ascendant sur ses mandants iraniens, et a marqué un énorme coup symbolique, qui ne fait pas forcément les intérêts de l’Iran, ni peut-être même pas des Palestiniens, en tout cas à court-terme. On peut penser que les services de renseignement israéliens avaient idée de ce qui allait venir, mais ils n’ont pas été entendus par Netanyahou.</p> <p><strong>Vu que la razzia du Hamas a été menée en grande autonomie et que la riposte d’Israël n’avait pas été planifiée, n’est-il pas étonnant que ces actions aient été inscrites dans un affrontement Nord-Sud?</strong></p> <p>La razzia du 7 octobre a mis à mal un des fondements de la création de l’Etat d’Israël. Elle a remis en question le «plus jamais ça» référé aux exterminations subies par les Juifs à travers les âges. Or, la création de l’Etat juif et le déplacement de la population palestinienne sont une des conséquences de l’organisation du monde voulu par les vainqueurs de la Deuxième Guerre mondiale. La Guerre contre l’Occident est menée par les pays de ce qui est appelé Sud Global sur le front des valeurs morales. Il s’agit essentiellement des pays BRICS+: Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud, Arabie Saoudite, Egypte, Emirats arabes unis, Ethiopie et Iran. D’après eux, la Shoah ne serait pas le pire qui soit arrivé: la colonisation est bien pire. De plus, la Shoah serait un «truc entre Blancs», qui a eu lieu il y a longtemps, et dont certains doutent même qu’elle ait eu lieu. Voilà le genre de position qui est soutenu par les leaders <i></i>de ces pays, et qui demandent maintenant aux colonisateurs de payer pour leurs méfaits. Je ne mets pas en doute la gravité de l’Apartheid, ni la posture morale d’un Mandela, mais je m’interroge sur le bien-fondé de telles revendications faites au nom de populations qui pour la plupart vivent sous des régimes autoritaires, et dont une grande partie n’a qu’une aspiration, à savoir émigrer vers le Nord tant vilipendé, qui semble donc encore fournir un espoir. C’est pourquoi je souligne l’inanité du clivage entre le Sud Global et le Nord occidental. Au nom de la morale on occulte la question démocratique, faisant ainsi le jeu de personnages comme Netanyahou ou Trump. Dans mon livre j’appelle l’Europe à mettre en avant ses valeurs démocratiques et sa capacité intégratrice, mais je constate avec dépit que l’idéologie et le clientélisme prennent de plus en plus de place, en se substituant à la recherche de la connaissance.</p> <hr /> <h4> <sup>1</sup>Dans sa longue carrière académique, le Professeur Gilles Kepel a formé des milliers d’étudiants à Sciences Po Paris, auprès de l’Ecole Normale Supérieure, et aux Etats-Unis aux universités Columbia et de New York. Il est l’auteur de nombreux ouvrages traduits dans une vingtaine de langues, où il élabore des éléments de pensée précieux pour analyser les enjeux d’événements qui ont secoué notre monde.</h4> <hr /> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1714565128_9782259319621ori.jpg" class="img-responsive img-fluid left " width="200" height="319" /></p> <h4>«Holocaustes. Israël, Gaza et la guerre contre l'Occident», Gilles Kepel, Editions Plon, 216 pages.</h4>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'le-7-octobre-et-l-inanite-du-conflit-nord-sud', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 13, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 8, 'person_id' => (int) 12725, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [[maximum depth reached]], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 4896, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => false, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => null, 'readed' => null, 'subhead' => null, 'title' => 'L'appel des paysans suisses', 'subtitle' => 'Voilà, on ne les entend presque plus, les paysans. 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Vu que les paysans dépendent de manière importante de paiements directs, certains les considèrent comme des sortes de fonctionnaires à leur service. Ainsi, si ces citadins pensent qu’il faut faire place au loup dans les montagnes au loin, les paysans n’ont qu’à s’exécuter. D’autres considèrent les paysans comme des paysagistes, ou pensent qu’ils sont carrément inutiles vu que la Suisse aurait les moyens d’acheter à l’étranger ce dont sa population a besoin. Ceux qui ne les connaissent pas peuvent avoir été surpris ou dérangés par les manifestations que les paysans ont organisées depuis le début de l’année.</p> <p>Lorsqu’ils ont commencé à manifester ils ont simplement retourné des panneaux à l’entrée de villages, pour dire que le monde marche sur la tête. Plus tard ils se sont réunis autour de feux avec leurs tracteurs, et ont explicité leur appel, leur SOS. Au dire des organisateurs les manifestations avaient pour objectif de rompre l’isolement, demander une plus grande reconnaissance, et rassembler afin de souder une profession traditionnellement morcelée, ainsi qu’établir un dialogue avec la population. Il s’est donc agi d’un appel pour attirer l’attention sur une situation ressentie comme difficile. Ce n’était pas une plainte, ni une demande de moyens. Cet appel quelque peu vague laisse transparaître un malaise profond, que les revendications plus précises, transmises au Conseil fédéral et à quatre détaillants, ne capturent pas complètement, même si elles ont été soutenues par 65'000 signatures récoltées en seulement 15 jours. L’appel demande une réflexion d’ensemble pour une refonte du système. Outre la reconnaissance pour le travail et les efforts accomplis, notamment pour l’environnement, les revendications portent sur les revenus, et dénoncent le poids du travail administratif. </p> <h3>Le système agroalimentaire suisse</h3> <p>De fait, même si les paysans ne représentent qu’environ 3% de la population active (soit environ 200'000 personnes), pour répondre à leurs inquiétudes il faut considérer le système agroalimentaire dans son ensemble. Le système suisse n’est pas très différent des autres systèmes agroalimentaires, par exemple européens. Dans ces systèmes aussi l’agriculture est très contrôlée par une réglementation serrée et des paiements nécessaires pour assurer la viabilité de la plupart des exploitations. Partout, le besoin d’avoir une approche de plus en plus soutenable en matière d'environnement est source de tensions. 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De plus, le système est efficient: depuis les années 1960, la productivité du travail agricole a beaucoup augmenté et même davantage que dans d’autres secteurs de l’économie. Ainsi par exemple de nos jours dans une ferme certifiée bio la traite d’une centaine de vaches ne nécessite presqu’aucune intervention humaine, vu qu’elle peut être assurée par un robot. </p> <p>Il y a pourtant un revers à cette <i>success story</i>. Le taux de suicides est plus élevé dans le monde agricole, la solitude y est plus répandue, et les conditions de travail y sont très contraignantes. C’est un monde soumis à de nombreuses tensions. La réglementation changeante, les nombreux contrôles, les relations difficiles avec la grande distribution ajoutent de la pression à un travail déjà largement dépendant des conditions météorologiques et des aléas liés au vivant. Les difficultés ne sont pas les mêmes pour tout le monde, mais le système doit davantage ménager tous ses acteurs de base.</p> <h3>Demi-mesures et contre-feux</h3> <p>La politique et les organisations agricoles ont bien sûr réagi afin d’éviter une escalade des manifestations. Il fallait que les paysans se rangent. Le président de l’Union suisse des paysans s’est inquiété pour l’image des agriculteurs. Une conseillère d’Etat a donc promis de réduire d’un tiers la charge administrative pour les paysans de son canton. Dans un autre canton des aides pour les vignerons ont été décidées. Au niveau fédéral des gestes ont été faits pour les producteurs de lait, et le Conseiller fédéral Parmelin a reçu les paysans en colère. Par ailleurs, le secteur agricole a été préservé dans le cadre du récent accord de libre-échange signé avec l’Inde, et malgré que cela aille à l’encontre des engagements pris pour le réduire les émissions de CO<sub>2</sub>, le prix du gasoil agricole n’a pas été augmenté. 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Le rapport se veut rassurant, et indique une évolution positive des revenus au cours de ces dernières années, bien qu’il y ait des situations très disparates. De manière analogue il y a eu ceux qui ont souligné que les paysans se sont rendus à leur rencontres nocturnes avec des tracteurs dernier cri, sous-entendant par là que les moyens ne doivent donc pas leur manquer…</p> <h3>Comment répondre à l'appel?</h3> <p>Il ne suffit pas de simplement essayer de préserver l’actuel en l’ajustant quelque peu. Il faut affronter les questions de fond. Les agriculteurs déplorent une perte de sens et de respect. Il se sentent incompris, bien que – comme cela a été rappelé lors des manifestations – derrière ce que nous avons dans notre assiette il y a toujours un paysan. 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Ceci permettrait en particulier de justifier clairement la nécessité de tenir compte de l’impact environnemental de l’agriculture. L’autre est celui du clivage ville-campagne, qui dans notre pays, où trois-quarts de la population vit dans des agglomérations urbaines, est particulièrement marqué. 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Mais c’est mal apprécier la situation, car une société ne fonctionne plus si sa population est malade.</p> <p>Actuellement, notre système d’assurance sociale se concentre, non plus sur le financement de soins, mais sur celui de prestations qui figurent dans un catalogue, et ceux qui détiennent les clés du catalogue n’ont pas intérêt à le faire évoluer ou accueillir d’autres prestataires dans le jeu. Le système est donc figé et le rôle de l’Etat malheureusement peu clair. La Confédération n’a pas de compétence générale en matière de santé, et n'est tentée d’intervenir que quand les autres acteurs ne s’entendent pas. Les Cantons, qui devraient en principe être souverains pour la gestion de leur système de santé, sont dans des rôles multiples: ils sont propriétaires d’hôpitaux, planificateurs, financeurs, et subventionneurs de primes, tout ceci dans un cadre LAMal fédéral auquel il ne peuvent déroger. 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Il faudrait inscrire dans la Constitution que la santé est une tâche publique et que l’Etat fédéral a une responsabilité en matière de santé. On ne peut pas uniquement prôner la responsabilité des individus et la liberté économique, comme c’est le cas actuellement. Seulement l’Etat peut espérer contrôler la teneur en sucre ou l’excès de graisses dans notre alimentation, de même que veiller sur la consommation de tabac et autres nuisibles pour la santé.</p> <p>La Confédération et les Cantons devraient aussi repenser la coordination de leurs actions, sans arriver pour autant à un pur fédéralisme d’exécution. La Confédération pourrait s’occuper de la planification hospitalière, des soins très spécialisés, de la convergence des systèmes d’information, ainsi que de la gestion des risques environnementaux comme la pollution. 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En parallèle, il faudrait créer une instance indépendante qui puisse disposer de toutes les données nécessaires pour informer le politique dans ses décisions. Pour terminer, il faudrait que les acteurs-clés du système et les parlementaires s’engagent à être force de proposition, et à être liés par une charte d’engagement. Nous devrions aussi changer notre imaginaire, en sortant par exemple de la toute-puissance de l’hôpital.</p> <p><strong>Qu’entendez-vous par toute-puissance de l’hôpital?</strong></p> <p>D’après mon expérience, pour la population et pour les administrations il y a l’hôpital et puis le reste. On le voit dans les batailles menées par les communes pour garder les hôpitaux sur leurs territoires. Ceci explique en partie le fait qu’il y a encore trop d’hospitalisations en Suisse. L’hôpital est important, mais ça devrait se jouer davantage dans la communauté, avec les soins à domicile, les EMS, la médecine de premier recours. 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Ce serait un vœu pieux de penser que sans une vision politique claire les acteurs-clés seraient capables de repenser le fonctionnement global du système, de réarticuler les besoins de promotion de santé et de soins, de réajuster les structures tarifaires au profit des généralistes et des soins infirmiers, et de revaloriser la Médecine humaniste. Surtout que cela va comporter la re-discussion de certains privilèges historiques. Réaliser un nouveau cadre légal pour la santé n’est pas étatiser. Mais la loi ne peut pas tout. Mon activité de médecin m’a enseigné la solidarité, le respect de l’humain, et la compassion. Il faut déconstruire le pouvoir médical tel qu’il s’est érigé et le ramener vers plus d’humilité. Il y a actuellement une perte de sens chez les professionnels. Les médecins et les soignants en général sont écartelés entre des contraintes administratives et le besoin de temps pour les soins. 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Ses promoteurs mettent en avant la situation déplorable d’une partie de la population âgée, et la possibilité de trouver un financement suffisant pour la nouvelle rente. L’essentiel du bloc appelé bourgeois s’y oppose, en arguant qu’une treizième rente coûtera trop cher, et en dénonçant le «principe de l’arrosoir», à savoir que tout le monde touchera cette rente, même ceux qui n’en auront pas besoin. N’entrons pas dans le détail de ces arguments. Rappelons seulement que le principe de l’arrosoir est à la base du fonctionnement de l’AVS: tout le monde paie, et tout le monde a droit à une rente. Sauf que les cotisations sont fonction des revenus, et donc les riches paient plus qu’ils ne reçoivent. Ce sera aussi le cas pour la treizième rente, d’autant plus si celle-ci était financée par une (petite) augmentation des contributions salariales.</p> <h3>Tragique de répétition</h3> <p>Une fois ces arguments développés que peut-on faire d’autre? On peut les répéter souvent! C’est ce qu’a fait la <em>NZZ</em> depuis trois mois, au cours desquels elle a consacré non moins d’une quarantaine d’articles à contrer l’initiative. Fin novembre 2023, elle annonce la couleur avec un article intitulé «La 13ème rente ne résout aucun problème de la prévoyance vieillesse». Début décembre, le quotidien zurichois rappelle que la 13ème rente est déjà versée au Liechtenstein, mais ne perd pas l’occasion de la comparer à un cadeau de Noël. Deux jours après, un point de vue extérieur (!) explique pourquoi le principe de l’arrosoir est anti-social, et quelques numéros plus tard ce principe est à nouveau critiqué en relation avec une décision du Conseil national, qui venait de voter à l’unanimité l’augmentation des rentes des personnes âgées «dans le besoin» (guillemets repris du texte).</p> <p>Juste après Noël, la Conseillère fédérale libérale Karin Keller-Sutter explique dans une interview que contrairement à l’augmentation du budget de l’armée, AVS13 porterait à une hausse des impôts. Dans la première édition dominicale de l’année 2024 apparaît un nouveau thème: si AVS13 passe, ce seraient encore plus de milliards qui partiront à l’étranger au profit des 800'000 retraités suisses expatriés. Cette édition contient aussi une interview du socialiste Pierre-Yves Maillard, qui en tant que président de l’USS est considéré par beaucoup comme le principal défenseur de l’initiative. Les expatriés sont présentés comme des profiteurs, et les questions posées à Maillard sont peu complaisantes. Le lendemain on affirme que AVS13 menace le pouvoir d’achat des jeunes, et on fait appel à l’UDC pour qu’elle entreprenne le combat contre AVS13. Il se trouve que des sections locales du parti ont décidé de soutenir l’initiative. Encore la même semaine un titre insinue hypocrisie et mensonge dans les discours tenus sur la prévoyance vieillesse. On le voit, cette déferlante d’articles sur AVS13 loin d’avoir un objectif (seulement) pédagogique vise aussi à convaincre le lecteur de l’imminence d’une tragédie.</p> <h3>Une argumentation douteuse</h3> <p>Le 12 janvier une petite colonne dans la rubrique «Suisse» rapporte une conversation entre quatre seniors, réellement entendue dans la première classe d’un train. L’échange s’ouvre avec une première dame qui se félicite de son achat d’un abonnement général de première classe, qu’elle a utilisé la veille pour faire l’aller-retour dans la journée au sud des Alpes pour déjeuner. Puis, une deuxième dame raconte qu’avec son mari, ils vont partir au Cap pour jouer au golf, et qu’ils étaient heureux d’avoir eux aussi un abonnement général de première classe, ce qui leur permet de ne pas devoir acheter de billets pour se rendre à l’aéroport. Ensuite, il est question de leurs voyages à Las Vegas et au Texas, et finalement de celui d’une amie qui, avec ses six sœurs, toutes octogénaires, part pour Strasbourg. Ce projet surprend le mari de la première dame, vu que l’amie ne peut compter que sur une rente AVS. Sa femme profite de cette remarque pour inviter ses trois compagnons de voyage à soutenir AVS13. Fin de cette scénette, dont le message semble être que l’objectif de AVS13 est de permettre aux riches seniors de voyager.</p> <p>On dirait que la <em>NZZ</em> a fait sien l’adage que la fin justifie les moyens. <b></b>(Notons, en passant, que celui qui raconte l’histoire voyageait aussi en première classe.) La pluie d’articles se poursuit avec deux fois la dénonciation du «mythe des retraités pauvres», mais aussi la mise au jour de «l’inconfortable secret de l’AVS», à savoir que l’on touche plus que ce que l’on verse, tout en se persuadant de l’avoir entièrement mérité. De surcroît, AVS13 serait carrément une remise en question du modèle de la réussite de la Suisse. C’est sûr, est-il dit, AVS13 va obliger à augmenter l’âge de la retraite. Ce n’est que du rafistolage, et le financement de l’AVS doit préoccuper. Un rédacteur lance un appel au parti des Vert.e.s, qui est invité à enfin abandonner son hypocrisie, et à se préoccuper de la durabilité de ce financement comme il se soucie du climat. Vu que par ailleurs il est question du frein à l’endettement, on propose un tel mécanisme pour l’AVS.</p> <p>Dans l’analyse économique, on avoue qu’il est difficile de déterminer la pauvreté des retraités, ce qui n’empêche pas d’intituler un article «Les pauvres vont mieux après la retraite». Suit un autre titre choc: «L’AVS est en feu et nous y versons de l’huile». On continue avec des témoignages d’experts. Le trésorier en chef de l’AVS exprime son inquiétude que AVS13 ne passe. Le président de l’Association suisse d’assurances défend le fonctionnement actuel du système de prévoyance sociale. Les rédactrices ne sont pas en reste: l'une pose la question de savoir à quel point la Suisse veut devenir socialiste, et si elle se considère un «Pays-Club-Med», c’est-à-dire où l’on se sert tant que la table est garnie; une autre ironise sur le fait que beaucoup de «petites gens» envoient de toutes petites sommes d’argent en soutien aux promoteurs de AVS13.</p> <h3>Prendre parti</h3> <p>Il y a à peine quelques jours, dans le court texte qui précède une présentation sous forme graphique des mots d’ordre des partis et de diverses organisations, le journal écrit: «la <em>NZZ</em> refuse l’initiative». Etait-ce bien utile? N’est-ce pas une pratique déplacée? Il y a des quotidiens suisses dont on ne s’étonne pas qu’ils défendent explicitement des positions politiques, par exemple la <em>Weltwoche</em>, <em>Le Courrier</em>, ou <em>Republik</em>. Aux Etats-Unis il est courant que lors d’élections les rédactions s’expriment ouvertement en faveur de tel ou tel candidat, mais celles-ci le font dans un espace séparé de celui consacré à l’information.</p> <p>La <em>NZZ</em> occupe une place à part dans le panorama médiatique suisse, on sait qu’elle est proche du parti libéral, mais il est difficile de comprendre pourquoi elle a ressenti le besoin de prendre ainsi parti. Les opposants à AVS13 ont les moyens de se faire entendre autrement, et contrairement à ce que l’on veut faire croire, AVS13 n’est pas soutenue que par les partis de gauche. En effet, de nombreux adhérents à des organisations qui s’y opposent, comme l’UDC ou l’Union suisse des paysans, voteront pour AVS13. La <em>NZZ</em> se sent le devoir d’affirmer une identité idéologique. Nous l’avons mis en évidence au sujet de AVS13, d’autres ont observé dans ses pages une dérive philo-atlantiste. 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Les abus sexuels posent un problème grave. Une étude de 2012 estimait qu’en Suisse 20 à 30% des jeunes de moins de 18 ans ont été victimes d’une agression sexuelle avec contact physique. Ces violences sont le plus souvent commises profitant d’une confiance mal placée. Ce sont des adultes de référence, des enseignants, des médecins, des prélats proches des victimes qui commettent les abus. Pour combattre le problème il est important de le reconnaître et d’en parler. Il faut donc saluer le fait que la Conférence des évêques suisses (CES), la Conférence centrale catholique romaine de Suisse (RKZ), et la Conférence des Unions des Ordres et des autres communautés de vie consacrée en Suisse (KOVOS) aient ensemble décidé de confier le mandat à des historiennes et des historiens de l’Université de Zürich pour une étude qui retrace l’histoire des abus sexuels dans le contexte de l’Eglise catholique depuis la moitié du siècle passé. Il était grand temps que ces organisations, qui servent un peu moins de 3 millions de fidèles, emboîtent le pas de leurs homologues dans d’autres pays, notamment en France et au Portugal.
Un problème complexe
De nombreuses voix se sont élevées pour dénoncer des responsabilités individuelles, en premier lieu de ceux qui exercent des fonctions importantes dans cette institution très hiérarchisée. Ces hauts responsables, évêques ou administrateurs, auraient permis de couvrir des agissements répréhensibles en déplaçant des prélats, en occultant des preuves, ou en négligeant d’instruire correctement des cas avérés. Il est certain que de tels agissements ont eu lieu; il serait simpliste de penser qu’ils expliquent l’étendue du problème.
Certains pointent des dysfonctionnements plus structurels. On reparle du célibat des prêtres, et du rôle des femmes dans l’Eglise. Ce sont certes des questions importantes, mais on comprend mal comment cette solution pourrait à elle seule résoudre le problème, vu qu’il y a tant d’abus sexuels dans notre société au sens large. D’autres encore promeuvent une plus forte «organisation duale» de l’Eglise, qui donnerait à des unités de droit public ecclésiastique ou de droit privé un rôle important dans la gestion des affaires. De telles unités existent dans différents diocèses et y jouent le rôle d’employeur des collaborateurs et collaboratrices du côté pastoral, ayant ainsi la responsabilité de leur embauche et de leur éventuel licenciement. Le rapport de l’Université de Zürich souligne qu’une telle «répartition des responsabilités et du pouvoir, ainsi que la structure démocratique de la partie de droit public ecclésiastique pouvaient parfois empêcher les schémas de dissimulation, de silence et de transferts» qu’il a mis en évidence. Une organisation duale ne résoudra pas non plus le problème toute seule. Une affaire concernant l’Abbaye de Saint-Maurice, très récemment mise au jour par les médias, montre que même lorsque les pouvoirs publics sont impliqués, les dénonciations peuvent être archivées sans suite.
Le secret imposé par le droit canon
Si un regard extérieur peut aider l’Eglise à mieux faire, celle-ci peut aussi travailler elle-même sur ses propres structures et fonctionnements. Elle le fait à son rythme, notamment en adaptant son droit interne, le droit canon (ou canonique). Ce recueil de règles qui a sa source première dans les livres de l’Ancien et du Nouveau Testament, tente à travers ses versions successives d’adapter l’application des lois ecclésiastiques aux exigences du temps. Le Code de l’Eglise a ainsi été réécrit en 1917 et –après 18 ans de travail – en 1983. Depuis cette date une trentaine de canons (ou règles) ont déjà été revus, et sa version courante compte 1'752 canons distribués en sept livres.
Ce corpus juridique ne se justifie pas du fait que – par exemple – le Vatican est reconnu comme un Etat. En effet, comme l’a dit en 1965 le Pape Paul VI lors de son allocution devant l’Assemblée des Nations Unies: cette «minuscule et quasi symbolique souveraineté temporelle» n’est que «le minimum nécessaire» pour que l’Eglise soit libre d’exercer sa mission spirituelle». Le droit canon sert plutôt à assurer une juste conduction des affaires au sein de la communauté des baptisés. Institué sur le modèle du droit romain, dont il est le seul vrai héritier, il est beaucoup plus ouvert sur la société civile que par exemple le droit coranique. Si par ses racines qui puisent dans des textes datant de plusieurs millénaires, il est résistant aux vicissitudes politiques, économiques et sociales, la très grande diversité des personnes qu’il embrasse fait qu’il est le plus adéquat aux cas particuliers, et traduit ce que, dans le discours cité, Paul VI a appelé l’expertise en humanité de l’Institution.
Ainsi, depuis 1917 les abus sexuels sur mineurs de moins de 16 ans sont reconnus explicitement comme un délit moral par le droit canon. En 2019, le Pape François a publié deux décisions qui concernent notre question: d’une part l’obligation de signalement aux supérieurs de tout délit contre le 6ème commandement du Décalogue, entendu dans un sens qui comprend les abus sexuels; d’autre part la levée du secret pontifical lorsqu’il s’agit de ce type de délit, permettant ainsi une plus grande transparence.
Un canon entrave pourtant toujours gravement la solution du problème des abus sexuels: le can. 489 §2. Celui-ci dispose: «Chaque année, les documents de causes criminelles en matière de mœurs dont les coupables sont morts, ou qui ont été achevées par une sentence de condamnation datant de dix ans, seront détruits; un bref résumé du fait avec le texte de la sentence définitive en sera conservé». Le Code canon stipule par ailleurs qu’il est légitime de prévoir dans chaque diocèse des archives secrètes, dont seul l’évêque aura les clés. Comme le souligne le rapport, ces dispositions sur la destruction des dossiers n’entravent pas seulement la recherche historique, elles peuvent également avoir des conséquences dramatiques pour les personnes concernées, qui ne peuvent plus accéder à leurs dossiers, ou seulement en partie, surtout si les résumés prévus sont rédigés de manière lacunaire.
Les diocèses suisses prêts à évoluer
Il n’y pas unanimité parmi les experts de droit canon sur la possibilité de faire exception à la destruction des documents demandée par le can. 489 §2. Il y a pourtant une interprétation autorisée, qui donnerait la faculté aux évêques de décider de cela, sans recourir au Souverain pontife. De fait, il semblerait que la majorité des diocèses suisses n’applique plus, ou seulement partiellement, les dispositions liées à la suppression des documents. En cohérence avec ces pratiques, et dans la foulée du travail sur le rapport de l’Université de Zürich, lors d’entretiens qui ont eu lieu les 14 et 15 novembre, le président de la Conférence des évêques suisses, Mgr Felix Gmür, a porté la demande de pouvoir assouplir ces dispositions à l’attention du Pape François. Le Pape aurait bien entendu cette demande. L’Eglise catholique suisse pourra ainsi faire un pas en avant significatif dans la résolution du problème des abus sexuels en son sein.
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Le jour précédent recourrait le cinquantième anniversaire du début de la Guerre du Kippour. Surtout, la cruauté des actes perpétrés à cette occasion rappelle les razzia des tribus habitant la Péninsule arabe qui, en tuant et en violant, attaquaient les tribus adverses et repartaient en emportant les enfants. L’attaque du 7 octobre fut nommée en arabe par ses initiateurs le «Déluge d’al-Aqsa», qui invoque celui, envoyé par Allah, qui noya tous les mécréants. La référence au déluge souligne le caractère virtuose du massacre. 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Jusqu’aux Printemps arabes, le Hamas était proche de la ligne des Frères musulmans, et suivait une stratégie que l’un pourrait dire gestionnaire: il vitupérait Israël, mais avait instauré un <i>modus vivendi</i> qui semblait s’accommoder de la situation. Ceci faisait le jeu d’Israël. Après 2011, le Hamas se radicalise et s’éloigne des Frères, en se rapprochant de l’Iran, grâce à l’unique voyage à l’étranger de Sinwar. Netanyahou continue de croire que «chien qui aboie, ne mord pas», et fait en sorte que chaque semaine passent par l’aéroport Ben Gurion 40 millions de dollars en cash, provenant du Qatar à destination de Gaza. Une partie de ces sommes servira à construire les tunnels dont maintenant tout le monde est au courant. L’aveuglement du gouvernement israélien a été absolument remarquable. En octobre 2023, le mandataire Sinwar a pris l’ascendant sur ses mandants iraniens, et a marqué un énorme coup symbolique, qui ne fait pas forcément les intérêts de l’Iran, ni peut-être même pas des Palestiniens, en tout cas à court-terme. On peut penser que les services de renseignement israéliens avaient idée de ce qui allait venir, mais ils n’ont pas été entendus par Netanyahou.</p> <p><strong>Vu que la razzia du Hamas a été menée en grande autonomie et que la riposte d’Israël n’avait pas été planifiée, n’est-il pas étonnant que ces actions aient été inscrites dans un affrontement Nord-Sud?</strong></p> <p>La razzia du 7 octobre a mis à mal un des fondements de la création de l’Etat d’Israël. Elle a remis en question le «plus jamais ça» référé aux exterminations subies par les Juifs à travers les âges. Or, la création de l’Etat juif et le déplacement de la population palestinienne sont une des conséquences de l’organisation du monde voulu par les vainqueurs de la Deuxième Guerre mondiale. La Guerre contre l’Occident est menée par les pays de ce qui est appelé Sud Global sur le front des valeurs morales. Il s’agit essentiellement des pays BRICS+: Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud, Arabie Saoudite, Egypte, Emirats arabes unis, Ethiopie et Iran. D’après eux, la Shoah ne serait pas le pire qui soit arrivé: la colonisation est bien pire. De plus, la Shoah serait un «truc entre Blancs», qui a eu lieu il y a longtemps, et dont certains doutent même qu’elle ait eu lieu. Voilà le genre de position qui est soutenu par les leaders <i></i>de ces pays, et qui demandent maintenant aux colonisateurs de payer pour leurs méfaits. Je ne mets pas en doute la gravité de l’Apartheid, ni la posture morale d’un Mandela, mais je m’interroge sur le bien-fondé de telles revendications faites au nom de populations qui pour la plupart vivent sous des régimes autoritaires, et dont une grande partie n’a qu’une aspiration, à savoir émigrer vers le Nord tant vilipendé, qui semble donc encore fournir un espoir. C’est pourquoi je souligne l’inanité du clivage entre le Sud Global et le Nord occidental. Au nom de la morale on occulte la question démocratique, faisant ainsi le jeu de personnages comme Netanyahou ou Trump. Dans mon livre j’appelle l’Europe à mettre en avant ses valeurs démocratiques et sa capacité intégratrice, mais je constate avec dépit que l’idéologie et le clientélisme prennent de plus en plus de place, en se substituant à la recherche de la connaissance.</p> <hr /> <h4> <sup>1</sup>Dans sa longue carrière académique, le Professeur Gilles Kepel a formé des milliers d’étudiants à Sciences Po Paris, auprès de l’Ecole Normale Supérieure, et aux Etats-Unis aux universités Columbia et de New York. Il est l’auteur de nombreux ouvrages traduits dans une vingtaine de langues, où il élabore des éléments de pensée précieux pour analyser les enjeux d’événements qui ont secoué notre monde.</h4> <hr /> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1714565128_9782259319621ori.jpg" class="img-responsive img-fluid left " width="200" height="319" /></p> <h4>«Holocaustes. 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Vu que les paysans dépendent de manière importante de paiements directs, certains les considèrent comme des sortes de fonctionnaires à leur service. Ainsi, si ces citadins pensent qu’il faut faire place au loup dans les montagnes au loin, les paysans n’ont qu’à s’exécuter. D’autres considèrent les paysans comme des paysagistes, ou pensent qu’ils sont carrément inutiles vu que la Suisse aurait les moyens d’acheter à l’étranger ce dont sa population a besoin. Ceux qui ne les connaissent pas peuvent avoir été surpris ou dérangés par les manifestations que les paysans ont organisées depuis le début de l’année.</p> <p>Lorsqu’ils ont commencé à manifester ils ont simplement retourné des panneaux à l’entrée de villages, pour dire que le monde marche sur la tête. Plus tard ils se sont réunis autour de feux avec leurs tracteurs, et ont explicité leur appel, leur SOS. Au dire des organisateurs les manifestations avaient pour objectif de rompre l’isolement, demander une plus grande reconnaissance, et rassembler afin de souder une profession traditionnellement morcelée, ainsi qu’établir un dialogue avec la population. Il s’est donc agi d’un appel pour attirer l’attention sur une situation ressentie comme difficile. Ce n’était pas une plainte, ni une demande de moyens. Cet appel quelque peu vague laisse transparaître un malaise profond, que les revendications plus précises, transmises au Conseil fédéral et à quatre détaillants, ne capturent pas complètement, même si elles ont été soutenues par 65'000 signatures récoltées en seulement 15 jours. L’appel demande une réflexion d’ensemble pour une refonte du système. Outre la reconnaissance pour le travail et les efforts accomplis, notamment pour l’environnement, les revendications portent sur les revenus, et dénoncent le poids du travail administratif. </p> <h3>Le système agroalimentaire suisse</h3> <p>De fait, même si les paysans ne représentent qu’environ 3% de la population active (soit environ 200'000 personnes), pour répondre à leurs inquiétudes il faut considérer le système agroalimentaire dans son ensemble. Le système suisse n’est pas très différent des autres systèmes agroalimentaires, par exemple européens. Dans ces systèmes aussi l’agriculture est très contrôlée par une réglementation serrée et des paiements nécessaires pour assurer la viabilité de la plupart des exploitations. Partout, le besoin d’avoir une approche de plus en plus soutenable en matière d'environnement est source de tensions. 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En parallèle, il faudrait créer une instance indépendante qui puisse disposer de toutes les données nécessaires pour informer le politique dans ses décisions. Pour terminer, il faudrait que les acteurs-clés du système et les parlementaires s’engagent à être force de proposition, et à être liés par une charte d’engagement. Nous devrions aussi changer notre imaginaire, en sortant par exemple de la toute-puissance de l’hôpital.</p> <p><strong>Qu’entendez-vous par toute-puissance de l’hôpital?</strong></p> <p>D’après mon expérience, pour la population et pour les administrations il y a l’hôpital et puis le reste. On le voit dans les batailles menées par les communes pour garder les hôpitaux sur leurs territoires. Ceci explique en partie le fait qu’il y a encore trop d’hospitalisations en Suisse. L’hôpital est important, mais ça devrait se jouer davantage dans la communauté, avec les soins à domicile, les EMS, la médecine de premier recours. 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C’est ce qu’a fait la <em>NZZ</em> depuis trois mois, au cours desquels elle a consacré non moins d’une quarantaine d’articles à contrer l’initiative. Fin novembre 2023, elle annonce la couleur avec un article intitulé «La 13ème rente ne résout aucun problème de la prévoyance vieillesse». Début décembre, le quotidien zurichois rappelle que la 13ème rente est déjà versée au Liechtenstein, mais ne perd pas l’occasion de la comparer à un cadeau de Noël. Deux jours après, un point de vue extérieur (!) explique pourquoi le principe de l’arrosoir est anti-social, et quelques numéros plus tard ce principe est à nouveau critiqué en relation avec une décision du Conseil national, qui venait de voter à l’unanimité l’augmentation des rentes des personnes âgées «dans le besoin» (guillemets repris du texte).</p> <p>Juste après Noël, la Conseillère fédérale libérale Karin Keller-Sutter explique dans une interview que contrairement à l’augmentation du budget de l’armée, AVS13 porterait à une hausse des impôts. Dans la première édition dominicale de l’année 2024 apparaît un nouveau thème: si AVS13 passe, ce seraient encore plus de milliards qui partiront à l’étranger au profit des 800'000 retraités suisses expatriés. Cette édition contient aussi une interview du socialiste Pierre-Yves Maillard, qui en tant que président de l’USS est considéré par beaucoup comme le principal défenseur de l’initiative. Les expatriés sont présentés comme des profiteurs, et les questions posées à Maillard sont peu complaisantes. Le lendemain on affirme que AVS13 menace le pouvoir d’achat des jeunes, et on fait appel à l’UDC pour qu’elle entreprenne le combat contre AVS13. Il se trouve que des sections locales du parti ont décidé de soutenir l’initiative. Encore la même semaine un titre insinue hypocrisie et mensonge dans les discours tenus sur la prévoyance vieillesse. On le voit, cette déferlante d’articles sur AVS13 loin d’avoir un objectif (seulement) pédagogique vise aussi à convaincre le lecteur de l’imminence d’une tragédie.</p> <h3>Une argumentation douteuse</h3> <p>Le 12 janvier une petite colonne dans la rubrique «Suisse» rapporte une conversation entre quatre seniors, réellement entendue dans la première classe d’un train. L’échange s’ouvre avec une première dame qui se félicite de son achat d’un abonnement général de première classe, qu’elle a utilisé la veille pour faire l’aller-retour dans la journée au sud des Alpes pour déjeuner. Puis, une deuxième dame raconte qu’avec son mari, ils vont partir au Cap pour jouer au golf, et qu’ils étaient heureux d’avoir eux aussi un abonnement général de première classe, ce qui leur permet de ne pas devoir acheter de billets pour se rendre à l’aéroport. Ensuite, il est question de leurs voyages à Las Vegas et au Texas, et finalement de celui d’une amie qui, avec ses six sœurs, toutes octogénaires, part pour Strasbourg. Ce projet surprend le mari de la première dame, vu que l’amie ne peut compter que sur une rente AVS. Sa femme profite de cette remarque pour inviter ses trois compagnons de voyage à soutenir AVS13. Fin de cette scénette, dont le message semble être que l’objectif de AVS13 est de permettre aux riches seniors de voyager.</p> <p>On dirait que la <em>NZZ</em> a fait sien l’adage que la fin justifie les moyens. <b></b>(Notons, en passant, que celui qui raconte l’histoire voyageait aussi en première classe.) La pluie d’articles se poursuit avec deux fois la dénonciation du «mythe des retraités pauvres», mais aussi la mise au jour de «l’inconfortable secret de l’AVS», à savoir que l’on touche plus que ce que l’on verse, tout en se persuadant de l’avoir entièrement mérité. De surcroît, AVS13 serait carrément une remise en question du modèle de la réussite de la Suisse. C’est sûr, est-il dit, AVS13 va obliger à augmenter l’âge de la retraite. Ce n’est que du rafistolage, et le financement de l’AVS doit préoccuper. Un rédacteur lance un appel au parti des Vert.e.s, qui est invité à enfin abandonner son hypocrisie, et à se préoccuper de la durabilité de ce financement comme il se soucie du climat. Vu que par ailleurs il est question du frein à l’endettement, on propose un tel mécanisme pour l’AVS.</p> <p>Dans l’analyse économique, on avoue qu’il est difficile de déterminer la pauvreté des retraités, ce qui n’empêche pas d’intituler un article «Les pauvres vont mieux après la retraite». Suit un autre titre choc: «L’AVS est en feu et nous y versons de l’huile». On continue avec des témoignages d’experts. Le trésorier en chef de l’AVS exprime son inquiétude que AVS13 ne passe. Le président de l’Association suisse d’assurances défend le fonctionnement actuel du système de prévoyance sociale. Les rédactrices ne sont pas en reste: l'une pose la question de savoir à quel point la Suisse veut devenir socialiste, et si elle se considère un «Pays-Club-Med», c’est-à-dire où l’on se sert tant que la table est garnie; une autre ironise sur le fait que beaucoup de «petites gens» envoient de toutes petites sommes d’argent en soutien aux promoteurs de AVS13.</p> <h3>Prendre parti</h3> <p>Il y a à peine quelques jours, dans le court texte qui précède une présentation sous forme graphique des mots d’ordre des partis et de diverses organisations, le journal écrit: «la <em>NZZ</em> refuse l’initiative». Etait-ce bien utile? N’est-ce pas une pratique déplacée? Il y a des quotidiens suisses dont on ne s’étonne pas qu’ils défendent explicitement des positions politiques, par exemple la <em>Weltwoche</em>, <em>Le Courrier</em>, ou <em>Republik</em>. Aux Etats-Unis il est courant que lors d’élections les rédactions s’expriment ouvertement en faveur de tel ou tel candidat, mais celles-ci le font dans un espace séparé de celui consacré à l’information.</p> <p>La <em>NZZ</em> occupe une place à part dans le panorama médiatique suisse, on sait qu’elle est proche du parti libéral, mais il est difficile de comprendre pourquoi elle a ressenti le besoin de prendre ainsi parti. Les opposants à AVS13 ont les moyens de se faire entendre autrement, et contrairement à ce que l’on veut faire croire, AVS13 n’est pas soutenue que par les partis de gauche. En effet, de nombreux adhérents à des organisations qui s’y opposent, comme l’UDC ou l’Union suisse des paysans, voteront pour AVS13. La <em>NZZ</em> se sent le devoir d’affirmer une identité idéologique. Nous l’avons mis en évidence au sujet de AVS13, d’autres ont observé dans ses pages une dérive philo-atlantiste. 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VOS RÉACTIONS SUR LE SUJET
2 Commentaires
@Bogner Shiva 212 01.12.2023 | 14h49
«On aurait quand même dû se méfier non ? Laissez venir à moi les petits enfants ... et de voir ces messieurs en robes et chapeaux ridicules annoner à longueur de dimanche des fables d'un autre temps d'un air pénétré par la vérité ultime d'un coît Divin, je sais je sais ....
L'église demande pardon, haaa ouaiiiiiis coooool les gars ,mais bon sang on est oû là ? PARDON ? Vous fournissez la vaseline aussi ?
On tripote gaiement des petites filles, les doigts régulièrement rincés à l'eau bénite...tout en se tripotant voire plus si possible...on se fait suc... par des mômes quand ce n'est pas la totale en s'assurant d'une totale impunité de par le silence glacial des victimes terrifiées ... des vies DETRUITES à jamais !!! Et on demande pardon ?
On va réciter 12 Ave etcetc et parcourir à pieds nus la cour en hiver ... mais pardonnez-nous parce que l'on ne savait pas ce que l'on faisait . J'ai lu ça quelque part mais je ne me rappelle plus, où ça ne devait pas être très important comme bouquin !
Je ne comprends pas la réticence du pénal à se saisir purement et simplement de ces affaires, bon je ne connais personnes qui va vouloir mettre son nez dans des slips tachés et gluants ! Le scandale prends des airs d'iceberg là ! ET ? Ben oui, on nomme un membre éminament érigé, celle là non plus n'est pas voulue ...quoique, en pare-feu de ces joyeuses congrégations de pédophiles avérés ! Celui-ci rapidement écarté pour des agissements similaires et nauséabonds, remplacé dans l'urgence par un autre qui me semble ... complétement dépassé, bref un magnifique fusible si ça merd.. ! Je vous rassure Messieurs , ça sent DEJA la mer.., et depuis longtemps !
Ces sinistres individus drapés dans des attitudes qui donnent envie d'ériger des croix sont des criminels ! Point barre !
Une question me taraude quand même , il y a encore des gens qui accordent toute leur confiance en une Eglise qui ressemble de plus à un bordel médiéval ? Heuuu ... il est où le taulier ? J'ai quelque chose à lui demander
Maintenant...on entends pas grand chose de l'autre côté, les différentes congrégations protestantes et autres schysmes de cette religion en souffrance salie, dégueulassée par d'infâmes salop...?
Immense silence assourdissant et si par hasard la Justice , la vraie, celle qui va me mettre en taule pour une faute grave, dans un élan souhaité de vertu effarouchée mettait son nez aussi dans la corbeille à linge ? Bon pour leur défense ils y en a qui ont une vie sexuelle normale donc à priori moins sujette aux dérapages parfaitements contrôlés de l'autre bord mais ... laissez venir à moi les petits enfants, tentant pour certains de se référer aux écrits de livres qui dans ces ca..cas n'ont absolument plus rien de sain !
Commentaire dicté par un écoeurement grandissant face à la bassesse de certains et de la LACHETE d'autres, politiques en 1ere place ! Ce qui explique mon ton acerbe à la mesure de ma colère »
@stef 03.01.2024 | 18h16
«Je plussoie aux propos de Bogner Shiva 212 »