Accueil de Vladimir Poutine par Xi Jinping lors d'une visite officielle en Chine, en juin 2018. © kremlin.ru - source officielle
Dans les romans de jeunesse des années 1950, l'Eurasie était déjà à la mode. On y parlait de la mystérieuse et menaçante Ombre jaune et de sa belle et vénéneuse complice au «parfum d’ylang-ylang» et «au sourire énigmatique» qui, à l'aide de leurs légions de sicaires, s'apprêtaient à fondre sur les innocents Européens. Aujourd'hui, l'Ombre jaune a pris la figure de Xi Jinping et Miss Ylang-Ylang celle de Vladimir Poutine. Le romanesque et le glamour ont disparu mais la phobie des «perfides Asiates» perdure.
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Une guerre n’éclate jamais par hasard ou par caprice. Les raisons en sont toujours multiples, politiques, économiques, culturelles, sociales, émotionnelles. On peut en débattre sans fin. Pour la paix, l’équation est plus simple. On y parvient en remplissant deux conditions: la justice et la vérité. Simple à exprimer mais très difficile à réaliser.</p> <h3><strong>Faisons un peu de philosophie</strong></h3> <p>La justice est la condition de la paix: une paix durable ne peut exister sans justice. Lorsque des injustices subsistent, elles nourrissent la haine, les conflits et les revendications sans fin. De plus, la justice restaure l’équilibre social et répare les dommages, permettant ainsi aux individus et aux communautés de coexister pacifiquement dans la durée.</p> <p>La vérité est la condition de la justice: la justice repose sur la vérité, car elle nécessite des faits établis et vérifiés pour évaluer les torts et prendre des décisions équitables. 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En principe, cette fonction de recherche de la vérité a été déléguée aux médias et aux journalistes dans les sociétés modernes. Pour des raisons diverses, l’immense majorité d’entre eux se sont fait les relais des pouvoirs et des intérêts en place, renonçant à leur mission de recherche de vérité, et cela dans tous les pays, à Gaza et en Russie certes, mais aussi, et peut-être surtout, en Ukraine, en Israël et en Occident.</p> <p>Dans ces conditions on pourra signer autant de cessez-le-feu et d’accords qu’on voudra, ils ne tiendront jamais longtemps. Le plus fort, sûr de son impunité et de sa capacité à imposer sa version mensongère des faits, sera toujours prêt à les violer, et le plus faible attendra son heure pour riposter ou contre-attaquer. 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Pour dresser un état des lieux, j’ai fait une petite recherche sur ChatGPT, Google et autres moteurs de recherche courants pour voir comment l’on se représentait la chose. ', 'subtitle_edition' => 'Lors de la dernière Conférence sur la sécurité en Eurasie à Minsk, j’ai eu le redoutable honneur de modérer le panel sur les sanctions, en présence de représentants des pays les plus vilipendés au monde. Pour dresser un état des lieux, j’ai fait une petite recherche pour voir comment l’on se représentait la chose. ', 'content' => '<p>Le moins qu’on puisse dire est que le résultat est assez édifiant. Voyez plutôt.</p> <p>Le pays le plus sanctionneur de la planète est, sans surprise, les Etats-Unis. En deuxième place sur le podium trône l’Union européenne, suivie du Royaume-Uni puis du Canada, de l’Australie et, en sixième position seulement, la Suisse, par le Conseil de sécurité des Nations Unies. 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Montagneuses, semi-désertiques, au climat très rude et peuplées d’une dizaine de millions d’habitants pour un territoire grand comme quatre fois la France, elles forment à elles deux le cœur des hauts plateaux et du bouddhisme tibétains. Contrairement au stéréotype qui en fait un espace soumis au seul dalaï-lama, elles abritent des sectes bouddhiques de différentes obédiences et de nombreuses minorités religieuses et ethniques, Musulmans, Chrétiens, Taoïstes, Han, Hui, Tu, Salar, Mongols. 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La dislocation de l'Union soviétique en 1991, et surtout le départ des troupes américaines d'Afghanistan en 2021 peuvent être considérées comme les dernières tentatives d'une puissance étrangère de diviser, d'occuper ou de soumettre le continent eurasien à sa volonté, après l'échec de l'empire britannique dans le Grand Jeu du XIXème siècle et de l'empire du Shah suite au renversement de Mossadegh en 1953. Le récent accord signé par l'Iran et l'Arabie saoudite sous les auspices de la Chine a complété ce mouvement avec l'intégration de l'Iran chiite et du monde arabo-sunnite. Même le gouvernement taliban afghan est en passe d'être digéré dans l'espace eurasien. Jamais le projet d'un continent eurasien pacifié n'a été aussi tangible.
Qui aurait pu imaginer, il y a 20 ans, que le parti communiste chinois puisse discuter et coopérer avec la République islamique d'Iran? Qui aurait pu imaginer, en 2015, que la Russie puisse coopérer avec la Turquie en Syrie? Imaginer il y a deux ans encore que l'Iran chiite puisse collaborer avec les wahhabites saoudiens? Et qu'en 2018 après trente ans de tractations, les pays riverains de la Caspienne parviendraient à un accord qui déverrouillerait la région et en ferait un carrefour des Routes de la soie Est-Ouest et Nord-Sud en excluant toute ingérence étrangère?
Durant les siècles passés, les grandes puissances régionales, Russie, Perse, Empires ottoman et japonais principalement, rivalisaient entre elles pour gagner des territoires aux dépens des voisins, et notamment de la Chine, de l'Asie centrale, du Caucase ou de l'Inde. Mais depuis l'effondrement de l'Union soviétique, une approche plus collaborative s'est lentement et patiemment construite malgré les conflits de frontières et les invasions: guerres de Tchétchénie, guerres d'Irak, occupation afghane et maintenant conflit ukrainien, la plupart provoqués par des interventions extérieures et des ingérences sous le masque de révolutions orange, de soutien financier à des ONG séparatistes, de luttes contre le terrorisme et la démocratie.
Certes, cet espace reste terriblement fragile et sa sécurité très aléatoire. Les risques sont internes, comme on l'a vu avec la reconquête violente du Haut-Karabagh par les Azéris, les violentes disputes à la frontière kirghiz-tadjik-ouzbèke dans la vallée de Fergana l'année dernière, les frictions entre l'Inde et le Pakistan, à la frontière himalayenne entre l'Inde et la Chine, ainsi que les tensions entre la Chine et le Viêt Nam dans la Mer de Chine.
Mais ils sont surtout externes. Depuis que la guerre en Ukraine a révélé les faiblesses de la position occidentale dans le Sud global, l'Asie centrale fait d'objet d'une cour assidue de la part des Occidentaux, que cette belle unanimité inquiète fort. Le président Biden a invité les cinq présidents d'Asie centrale à Washington durant l'été et Emmanuel Macron visite le Kazakhstan et l'Ouzbékistan ces jours-ci, tandis que des indices de changements de régime s'accumulent en Moldavie, en Arménie et en Géorgie, après l'échec des manifestations en Biélorussie en 2020. Dans le Pacifique, les tensions autour de Taiwan sont attisées par les Etats-Unis qui cherchent à briser l'unité et la souveraineté de la Chine qu'ils avaient pourtant légalement reconnues avec les traités qu'ils ont signé avec la République populaire de Chine dans les années 1970.
Le projet d'intégration eurasien met en effet en péril la suprématie occidentale théorisée par la doctrine Wolfowitz (1992), Zbigniew Brzezinski (1997), la Rand Corporation (2019) et d'autres organismes néoconservateurs américains. La lutte s'intensifie entre les puissances maritimes et continentales pour garder le contrôle du commerce, de la finance, des ressources naturelles, de l'économie et de l'environnement planétaires, l'Eurasie constituant l'épine dorsale du monde multipolaire émergent et le principal couloir de prospérité du XXIème siècle.
Pour consolider l'édifice, un vaste réseau d'accords et d'institutions de coopération régionale a été mis en place au cours des deux dernières décennies dans tous les domaines, à savoir l'économie, la sécurité, l'énergie, les transports et les échanges culturels. Ces accords et ces organisations de coopération constituent un réseau de connectivité très dense. Ils sont fluides, adaptés, flexibles, très diversifiés en termes de taille, de portée et d'objectifs. La CEI, l'OCS, l'OSTC, la BRI, l'Union économique eurasienne, le Caucase 3+, l'OPEP+, les BRICS et bien d'autres formats témoignent de cette intense volonté d'intégration eurasienne.
Son bon fonctionnement repose sur trois conditions: 1/le délicat équilibre des pouvoirs entre les principaux grands acteurs (Russie, Chine, Iran, Turquie, Inde principalement) doit être préservé; 2/le respect de l'indépendance et un traitement égal vis-à-vis des plus petits pays du Caucase et d'Asie centrale doivent être garantis; 3/le système de résolution des conflits au sein de l'espace eurasiatique doit être limité aux pays membres, sans aucune interférence étrangère.
Comme j'ai pu le constater au Sommet de Pékin et lors d'une récente conférence sur la sécurité à Minsk, les acteurs de la région sont très conscients des opportunités mais aussi des risques liés à leur projet. Les ministres présents, le Russe Lavrov, le Hongrois Szijjarto et les autres ministres et représentants des diverses organisations invitées l'ont rappelé.
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Une guerre n’éclate jamais par hasard ou par caprice. Les raisons en sont toujours multiples, politiques, économiques, culturelles, sociales, émotionnelles. On peut en débattre sans fin. Pour la paix, l’équation est plus simple. On y parvient en remplissant deux conditions: la justice et la vérité. Simple à exprimer mais très difficile à réaliser.</p> <h3><strong>Faisons un peu de philosophie</strong></h3> <p>La justice est la condition de la paix: une paix durable ne peut exister sans justice. Lorsque des injustices subsistent, elles nourrissent la haine, les conflits et les revendications sans fin. De plus, la justice restaure l’équilibre social et répare les dommages, permettant ainsi aux individus et aux communautés de coexister pacifiquement dans la durée.</p> <p>La vérité est la condition de la justice: la justice repose sur la vérité, car elle nécessite des faits établis et vérifiés pour évaluer les torts et prendre des décisions équitables. 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Montagneuses, semi-désertiques, au climat très rude et peuplées d’une dizaine de millions d’habitants pour un territoire grand comme quatre fois la France, elles forment à elles deux le cœur des hauts plateaux et du bouddhisme tibétains. Contrairement au stéréotype qui en fait un espace soumis au seul dalaï-lama, elles abritent des sectes bouddhiques de différentes obédiences et de nombreuses minorités religieuses et ethniques, Musulmans, Chrétiens, Taoïstes, Han, Hui, Tu, Salar, Mongols. 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Avec 1'200 gigawatts de puissance solaire et éolienne installée à ce jour (Cf. <em>Le Temps</em> du 14 décembre), la Chine est devenue de loin le premier producteur mondial de ces formes d’énergie renouvelable.</p> <p>Au Xizang (province autonome du Tibet), le programme était tout aussi concentré: palais du Potala, avec ses murs blanchis au lait de yack, temple du Jokhang, haut lieu de pèlerinage, musée d’art moderne et galerie d’art contemporain Jieguan avec des œuvres valant plusieurs millions de dollars, Centre de médecine tibétaine, Université, Académie du bouddhisme tibétain (un vaste campus de théologie comprenant 700 moines et une centaine de nonnes des différentes écoles), et même une fabrique de casseroles et de poêles antiadhésives hightech à base de titane! </p> <p>La fin du périple a été consacrée aux beautés naturelles de la préfecture de Nyingchi («Le trône du soleil» pour les Tibétains et «la Suisse du Tibet» pour les touristes), qu’on atteint par une autoroute flambant neuve qui s’élève jusqu’à 5'000 mètres d’altitude. 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1 Commentaire
@stef 28.12.2023 | 15h16
«Dire non aux USA et oui à l'Eurasie, tout "simplement" !»