Actuel / Le CICR sous le feu des critiques
Conférence de presse donnée le 24 mars dernier par Peter Maurer et le ministre russe des Affaires étrangères Serguei Lavrov. © Ruptly TV/Capture d'écran
La grande machine humanitaire basée à Genève apporte beaucoup à la population ukrainienne frappée par la guerre. Médicaments, vivres, matériel sanitaire par centaines de tonnes. Avec de nombreux délégués de nationalités diverses (plus de 600) et avec l’aide de diverses Croix rouges nationales, celle d’Ukraine en tête. Elle a fait ce qu’elle pouvait pour évacuer de Marioupol les civils bloqués, et tout récemment, avec l’ONU, les militaires de Azovstal qui rendaient les armes, désormais dûment enregistrés. On ne peut que s’en féliciter. Mais au chapitre de la protection des prisonniers des deux camps et du sort des personnes déplacées en masse, aucun mot fort. Signe d’impuissance? Ou changement de priorités? Troublant. Pour d’autres raisons aussi le climat est lourd à la tête du CICR.
Des organisations humanitaires internationales qui apportent des aides aux populations en détresse à travers le monde, il y en a plusieurs. Mais une seule a pour mandat spécifique et historique, la protection des prisonniers de guerre et des détenus en raison d’un conflit armé, spécifié dans les Conventions de Genève (1949), signées par la plupart des Etats. La Russie et l’Ukraine les ont ratifiées. Cette mission – visites, information et soutien aux familles – s’est révélée très difficile, le plus souvent impossible dans les guerres récentes qui n’opposaient pas des Etats mais des groupes armés à l’intérieur même des Etats. Ceux-ci acceptaient souvent l’aide humanitaire du CICR mais refusaient l’application de cette clause centrale des Conventions de Genève. Or en l’occurrence, ce sont bel et bien deux Etats qui se font la guerre. Cette prestigieuse institution aurait l’autorité et toutes les raisons de réclamer haut et fort la lumière sur le sort des prisonniers. Elle ne le fait pas dans sa communication officielle, d’ailleurs étonnamment parcimonieuse. Interrogée, elle nous fait savoir que «le CICR est en discussion avec les parties au conflit en Ukraine en ce qui concerne notre accès aux prisonniers de guerre. Ce processus s'inscrit dans le cadre de notre dialogue confidentiel, et nous ne pouvons communiquer aucune autre information actualisée pour le moment».
La discrétion est requise bien sûr, mais pourquoi ne pas dire que ces pourparlers ont lieu s’ils se tiennent vraiment? A quel niveau? A quel rythme? Avec quelles perspectives? Avec quelle écoute chez les dirigeants interpelés?
Les belligérants usent et abusent de la communication dont on connaît le rôle immense. Pourquoi le CICR ne pourrait-il pas, lui aussi, y recourir davantage, élever la voix, dans la pondération et l’équité, pour rappeler à la face de l’opinion mondiale les principes essentiels en situation de guerre? Il dispose pour cela d’un appareil puissant (50 millions lui sont dédiés). Multiplier les tweets et retweets succincts ne suffit pas. Les chuchotements diplomatiques, c’est bien. Mais une parole publique forte, dans le fond et la forme, peut aussi avoir son effet. Surtout si elle est soutenue par tous les relais diplomatiques dont dispose l’institution. Elle exercerait une utile pression sur les pouvoirs concernés. Comme ce fut le cas à plusieurs reprises dans les années 70 et 90 au sujet des visites de prisons. L’actuel président paraît plus préoccupé par l’aide humanitaire en général, moins litigieuse. Elle ne fâche personne. Alors que la question des détenus irrite fort les Etats, dont les dirigeants pourraient être moins portés aux chaudes poignées de main, dûment photographiées, avec le président en charge de l’application des Conventions de Genève, si embarrassantes pour certains.
L’ampleur et l’horreur de la guerre actuelle bouleversent le jeu. La situation, à ce chapitre négligé, est désastreuse. Des vidéos diffusées sur le net, authentifiées par Le Monde, montrent par exemple des prisonniers russes ensanglantés, ligotés, aux mains de combattants ukrainiens qui vont jusqu’à leur tirer dans les jambes. Dans ce cas, l’examen minutieux du document fait apparaître la responsabilité de la milice néo-nazie Slobozhanshchyna, créée en 2014, puis dissoute par le gouvernement en raison d’atrocités et de détournements de fonds, réapparue le 24 février 2022 et réintégrée dans le cadre de l’armée. Qui élève le plus la voix sur les violations des Conventions de Genève? L’organisation Human Rights Watch qui s’y réfère souvent. En l’occurence elle dénonce en détails, de façon probante, des cas de torture, d’exactions, d’exécutions sommaires, d’enlèvements, commis par les troupes russes notamment lorsqu’elles se trouvaient dans les régions de Kiev et de Tchernihiv. L’ONG reste plus discrète sur les dérapages côté ukrainien.
Autre défi: on en sait peu sur le sort promis aux soldats capturés par les Russes. Des blessés auraient été hospitalisés à Donetsk. Des tweets vengeurs réclament leur mise à mort. L’inquiétude des familles, de part et d’autre, est immense. Seule avancée connue: le CICR a été autorisé, depuis le 17 mai, à enregistrer et donc contacter les proches des combattants d’Azovstal qui se sont rendus. Mais la guerre dure depuis deux mois et demi. Des milliers de détenus, dans les deux camps, restent hors de tout radar humanitaire. La possibilité d’échanges de prisonniers a été évoquée. Certains ont déjà eu lieu, convenus par les Russes et les Ukrainiens. Le CICR parviendra-t-il à en obtenir d’autres et à les accompagner?
A cela s’ajoute le casse-tête du transfert de plusieurs centaines de milliers de civils extirpés des zones de combat et conduits vers la Russie. Ont-ils tous choisi cette destination de leur plein gré? Il est permis d’en douter. D’après un examen attentif des médias locaux et de photos aériennes, il y aurait 66 centres d’accueil à travers cet immense territoire. Selon le gouvernement, les personnes qui préféreraient aller à l’ouest de l’Ukraine le pourraient avec l’aide de l’ONU et du CICR. Mais aucune confirmation factuelle n’atteste de cette bonne volonté. A Kiev, plusieurs personnalités politiques, dont la déléguée du Parlement aux droits humains, accuse l’organisation de faciliter ces transferts de populations d’entente avec les Russes. Ce qui a été énergiquement démenti.
Le climat politique en Ukraine autour du CICR est tout sauf bon. Les photos de la rencontre chaleureuse entre son président et le ministre russe des Affaires étrangères Lavrov ont crispé les Ukrainiens. Certains ressortent les tweets où Peter Maurer évoquait ses chaleureuses relations avec le dit ministre. La Russie l’a d’ailleurs honoré, l’an passé, à sa Mission de Genève, en lui attribuant la médaille Martens, la plus haute distinction du ministère des Affaires étrangères russe, «pour la promotion des valeurs du droit international humanitaire». Etait-ce habile d’accepter? Les diplomates suisses, eux, non sans raison, ont l’interdiction de se parer de telles décorations. Le président de l’institution n’est pas près de recevoir une telle distinction à Kiev! On y a la dent dure à son endroit. C’en est au point que nombre de délégués du CICR sur place en Ukraine évitent d’arborer son sigle sur leurs brassards et leurs véhicules.
Deux autres sujets rendent la fin prochaine du mandat de Peter Maurer particulièrement délicate. Des voix s’élèvent, notamment chez les anciens de la maison, pour dénoncer un rapprochement excessif avec le gouvernement suisse. Alors que le CICR doit rester, selon ses statuts et son mandat, indépendant par rapport à tous les Etats. Il a sa propre définition de sa neutralité. Qui ne colle pas avec celle, à géométrie fort variable, de la Suisse. Or il arrive à son président, ex-secrétaire d’Etat, resté fort familier du DFAE, d’accompagner notre ministre des Affaires étrangères en tournée internationale pour promouvoir la Suisse humanitaire et accessoirement l’adhésion au Conseil de sécurité de l’ONU. Instrumentalisation?
En mai 2021, un curieux tandem a même officiellement vu le jour. Le CICR et le DFAE ont annoncé, fort discrètement, une «Alliance mondiale pour les disparus». Noble cause. D’innombrables personnes disparaissent en effet dans tant de pays. En temps de guerres, de répressions, de migrations. Une première réunion s’est tenue à Berne le 7 avril 2022. Problème: seulement dix Etats ont adhéré: l'Argentine, l'Azerbaïdjan, l'Estonie, le Koweït, le Mexique, le Nigeria, la Norvège, le Pérou, la République de Corée et la Suisse. Ce qu’il faut bien appeler un machin aux contours flous – on ne sait rien de son fonctionnement et de son financement – est passé totalement inaperçu. Bien des diplomates helvétiques en poste n’en ont même jamais entendu parler! Espérons qu’ils mettront ce beau projet sous le nez des dirigeants chinois qui, au chapitre des disparitions politiques, en connaissent un bout.
Enfin une polémique ressurgit. Est-il bien convenable que le président du CICR siège dans la haute instance du World Economic Forum? Cette fondation, dotée d’un gros appareil à Genève, dirigée par son fondateur Klaus Schwab (84 ans), soutenue par les plus puissantes entreprises du monde occidental, brasse une foule de thèmes, de «l’intelligence globale» à l’humanitaire, avec un fatras de préoccupations économiques, philosophiques, sociétales… et politiques. Libre à elle de bannir toute présence russe à Davos ces prochains jours et d’inviter aux honneurs le maire de Kiev, le bouillant Vitaly Klitschko, sinon l’incontournable Volodymyr Zelensky. Mais la présence au plus haut niveau du WEF de Peter Maurer, par ailleurs encore président du CICR, pose un vrai problème quant à la neutralité de celui-ci, telle qu’elle est perçue dans les pays traumatisés par la guerre, aux nerfs à vif.
Cette double casquette a amené un attelage concret. En 2020, le Forum économique mondial s’est officiellement engagé avec le CICR «afin de développer une plateforme permettant de mettre en relation des porteurs de projet et des investisseurs dans le domaine de l'aide humanitaire et du développement». Avec quels résultats? Mystère. Les plus grands patrons du monde ont peut-être d’autres sujets de préoccupations… Ces deux entités, celle fondée en 1863 par Henry Dunant et celle créée – à de toutes autres fins – par Klaus Schwab en 1971, ont ceci de commun dans leurs discours actuels: elles promeuvent de grands idéaux – par nature pas forcément convergents! –, elles disent s’engager pour un monde meilleur, elles appellent à la générosité des donateurs, mais elles restent floues quant à l’information sur leurs résultats effectifs et sur leur gestion, notamment sur leurs coûts internes de fonctionnement.
Mais à travers ce lien on retrouve la grande idée de Peter Maurer: associer le privé à l’humanitaire. Ainsi fut aussi créé un curieux système d’«obligations à impact humanitaire» («humanitarian impact bonds»). Les entreprises privées sont invitées à financer des projets conduits par le CICR. Avec une étude d’impact après un certain temps. En cas de succès, ces «philanthropes» sont remboursés avec versement d’intérêts. En cas d’échecs, une part de la mise est perdue. Le tout garanti par des Etats bienveillants. Bilan? Les fonds ainsi levés – 26 millions de francs – ont permis de créer et faire fonctionner trois centres de réadaptation physique en Afrique (au Nigéria, au Mali et en République démocratique du Congo). Bien modeste contribution au regard du budget du CICR: 2,2 milliards. Dont plus de 80% fournis par quelques Etats et l’Union européenne. Quant à la Suisse, elle verse 156 millions dont 80 millions voués au fonctionnement de la centrale genevoise. C’est dire que le public, ici comme ailleurs, a droit à une information claire et la plus complète possible sur son action.
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Multiplier les tweets et retweets succincts ne suffit pas. Les chuchotements diplomatiques, c’est bien. Mais une parole publique forte, dans le fond et la forme, peut aussi avoir son effet. Surtout si elle est soutenue par tous les relais diplomatiques dont dispose l’institution. Elle exercerait une utile pression sur les pouvoirs concernés. Comme ce fut le cas à plusieurs reprises dans les années 70 et 90 au sujet des visites de prisons. L’actuel président paraît plus préoccupé par l’aide humanitaire en général, moins litigieuse. Elle ne fâche personne. Alors que la question des détenus irrite fort les Etats, dont les dirigeants pourraient être moins portés aux chaudes poignées de main, dûment photographiées, avec le président en charge de l’application des Conventions de Genève, si embarrassantes pour certains.</span></p> <p><span>L’ampleur et l’horreur de la guerre actuelle bouleversent le jeu. La situation, à ce chapitre négligé, est désastreuse. Des vidéos diffusées sur le net, authentifiées par <em>Le Monde</em>, montrent par exemple des prisonniers russes ensanglantés, ligotés, aux mains de combattants ukrainiens qui vont jusqu’à leur tirer dans les jambes. Dans ce cas, l’examen minutieux du document fait apparaître la responsabilité de la milice néo-nazie Slobozhanshchyna, créée en 2014, puis dissoute par le gouvernement en raison d’atrocités et de détournements de fonds, réapparue le 24 février 2022 et réintégrée dans le cadre de l’armée. Qui élève le plus la voix sur les violations des Conventions de Genève? L’organisation Human Rights Watch qui s’y réfère souvent. En l’occurence elle dénonce en détails, de façon probante, des cas de torture, d’exactions, d’exécutions sommaires, d’enlèvements, commis par les troupes russes notamment lorsqu’elles se trouvaient dans les régions de Kiev et de Tchernihiv. L’ONG reste plus discrète sur les dérapages côté ukrainien.</span></p> <p><span>Autre défi: on en sait peu sur le sort promis aux soldats capturés par les Russes. Des blessés auraient été hospitalisés à Donetsk. Des tweets vengeurs réclament leur mise à mort. L’inquiétude des familles, de part et d’autre, est immense. Seule avancée connue: le CICR a été autorisé, depuis le 17 mai, à enregistrer et donc contacter les proches des combattants d’Azovstal qui se sont rendus. Mais la guerre dure depuis deux mois et demi. Des milliers de détenus, dans les deux camps, restent hors de tout radar humanitaire. La possibilité d’échanges de prisonniers a été évoquée. Certains ont déjà eu lieu, convenus par les Russes et les Ukrainiens. Le CICR parviendra-t-il à en obtenir d’autres et à les accompagner?</span></p> <p><span>A cela s’ajoute le casse-tête du transfert de plusieurs centaines de milliers de civils extirpés des zones de combat et conduits vers la Russie. Ont-ils tous choisi cette destination de leur plein gré? Il est permis d’en douter. D’après un examen attentif des médias locaux et de photos aériennes, il y aurait 66 centres d’accueil à travers cet immense territoire. Selon le gouvernement, les personnes qui préféreraient aller à l’ouest de l’Ukraine le pourraient avec l’aide de l’ONU et du CICR. Mais aucune confirmation factuelle n’atteste de cette bonne volonté. A Kiev, plusieurs personnalités politiques, dont la déléguée du Parlement aux droits humains, accuse l’organisation de faciliter ces transferts de populations d’entente avec les Russes. Ce qui a été énergiquement démenti. </span></p> <p><span>Le climat politique en Ukraine autour du CICR est tout sauf bon. Les photos de la rencontre chaleureuse entre son président et le ministre russe des Affaires étrangères Lavrov ont crispé les Ukrainiens. Certains ressortent les tweets où Peter Maurer évoquait ses chaleureuses relations avec le dit ministre. La Russie l’a d’ailleurs honoré, l’an passé, à sa Mission de Genève, en lui attribuant la médaille Martens, la plus haute distinction du ministère des Affaires étrangères russe, «pour la promotion des valeurs du droit international humanitaire». Etait-ce habile d’accepter? Les diplomates suisses, eux, non sans raison, ont l’interdiction de se parer de telles décorations. Le président de l’institution n’est pas près de recevoir une telle distinction à Kiev! On y a la dent dure à son endroit. C’en est au point que nombre de délégués du CICR sur place en Ukraine évitent d’arborer son sigle sur leurs brassards et leurs véhicules. </span></p> <p><span>Deux autres sujets rendent la fin prochaine du mandat de Peter Maurer particulièrement délicate. Des voix s’élèvent, notamment chez les anciens de la maison, pour dénoncer un rapprochement excessif avec le gouvernement suisse. Alors que le CICR doit rester, selon ses statuts et son mandat, indépendant par rapport à tous les Etats. 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Ce qu’il faut bien appeler un machin aux contours flous – on ne sait rien de son fonctionnement et de son financement – est passé totalement inaperçu. Bien des diplomates helvétiques en poste n’en ont même jamais entendu parler! Espérons qu’ils mettront ce beau projet sous le nez des dirigeants chinois qui, au chapitre des disparitions politiques, en connaissent un bout.</span></p> <p><span>Enfin une polémique ressurgit. Est-il bien convenable que le président du CICR siège dans la haute instance du World Economic Forum? Cette fondation, dotée d’un gros appareil à Genève, dirigée par son fondateur Klaus Schwab (84 ans), soutenue par les plus puissantes entreprises du monde occidental, brasse une foule de thèmes, de «l’intelligence globale» à l’humanitaire, avec un fatras de préoccupations économiques, philosophiques, sociétales… et politiques. Libre à elle de bannir toute présence russe à Davos ces prochains jours et d’inviter aux honneurs le maire de Kiev, le bouillant Vitaly Klitschko, sinon l’incontournable Volodymyr Zelensky. Mais la présence au plus haut niveau du WEF de Peter Maurer, par ailleurs encore président du CICR, pose un vrai problème quant à la neutralité de celui-ci, telle qu’elle est perçue dans les pays traumatisés par la guerre, aux nerfs à vif. </span></p> <p><span>Cette double casquette a amené un attelage concret. En 2020, le Forum économique mondial s’est officiellement engagé avec le CICR «afin de développer une plateforme permettant de mettre en relation des porteurs de projet et des investisseurs dans le domaine de l'aide humanitaire et du développement». Avec quels résultats? Mystère. 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En cas de succès, ces «philanthropes» sont remboursés avec versement d’intérêts. En cas d’échecs, une part de la mise est perdue. Le tout garanti par des Etats bienveillants. Bilan? Les fonds ainsi levés – 26 millions de francs – ont permis de créer et faire fonctionner trois centres de réadaptation physique en Afrique (au Nigéria, au Mali et en République démocratique du Congo). Bien modeste contribution au regard du budget du CICR: 2,2 milliards. Dont plus de 80% fournis par quelques Etats et l’Union européenne. Quant à la Suisse, elle verse 156 millions dont 80 millions voués au fonctionnement de la centrale genevoise. C’est dire que le public, ici comme ailleurs, a droit à une information claire et la plus complète possible sur son action.</span></p>', 'content_edition' => 'Des organisations humanitaires internationales qui apportent des aides aux populations en détresse à travers le monde, il y en a plusieurs. 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Syndicats et autorités politiques ont pourtant tout fait pour sauver l’entreprise historique, aux mains d’une multinationale qui compare avantages et inconvénients de chaque lieu de production. Ici, hauts salaires, franc fort et dans ce cas, retard technologique. Donc, départ. Chapeau aux travailleurs qui cherchaient des solutions, des innovations. Les voilà licenciés. Les messages de solidarité font du bien mais n’assurent pas leur avenir. Qu’ils puissent être aidés à rebondir.</span></p> <p><span>Est-ce à dire que notre pays est menacé de désindustrialisation comme il en est beaucoup question chez nos voisins? Gare aux réponses trop simples. Les faits. Face au secteur des services comptant les banques et les assurances, le tourisme, le commerce de gros et de détail, l'administration publique et les assurances sociales, qui pèse pour 75% du PIB, l’industrie résiste, avec environ 24% (contre moins de 14% en France!). L’agriculture pour 1 %. </span></p> <p><span>La grosse tranche du gâteau industriel, c’est évidemment les médicaments et les montres. Mais on aurait tort d’ignorer tout un tissu de plus petites entreprises qui fabriquent toutes sortes de produits technologiques performants. En dépit de tous les handicaps de la place. Sait-on par exemple que du Valais partent des pièces destinées à Mercedes, Jaguar, ou Ferrari? Se doute-t-on qu’une lame de scie sauteuse sur deux dans le monde est fabriquée à Sankt Niklaus (Saint-Nicolas), quelques kilomètres en aval de Zermatt. Ou qu’Airbus et Dassault se fournissent en tôles aéronautiques d’aluminium dans la région de Sierre?</span></p> <p><span>Ce canton est en pointe. En 2023, il était en tête des investissements industriels. <em>L’Agefi</em> fournit une explication: «C’est dans le Haut Valais que le boom économique est le plus visible. Le groupe pharmaceutique Lonza, dont le siège est à Bâle mais le site de production à Viège, y a investi plus d’un milliard de francs. Un nouveau complexe de production high-tech fournit des solutions adaptées pour le développement et la fabrication de nouveaux médicaments. Ce site et ses possibilités inédites dans la pharma ancrent Viège et le Valais au cœur des chaînes mondiales de création de valeur. Les investissements dans la recherche et la formation ont joué un rôle majeur pour le développement économique du canton. A la génération précédente, c’est la HES, la Haute école spécialisée, qui a formé des ingénieurs précieux pour alimenter une industrie en plein essor. Petit à petit tout un écosystème propice à l’émergence d’idées innovantes s’est installé en Valais. La Fondation The Ark favorise l’établissement et l’éclosion de start-ups dans les domaines de l’informatique, de l’énergie, des sciences de la vie et de l’environnement. Au coude du Rhône, à Martigny, est basé l’institut de recherche Idiap, qui regroupe une centaine de chercheurs permanents spécialisés dans les interactions homme-machine et l’intelligence artificielle.» Bref on est en plein dans les perspective de mariage entre l’algorithme et la matière.</span></p> <p><span>A la différence des universités lémaniques qui vouent tant d’attention et de moyens aux études dites «sociétales», les hautes écoles valaisannes sont donc dans le concret. Dans l’avenir. Puissent-elles, et les entreprises championnes aussi, faire parler plus encore d’elles. Que d’autres régions suivent plus activement cet exemple. Et parlons-en à nos rejetons qui se tâtent quant à leurs choix d'avenir professionnel…</span></p> <p><span>Tout cela nous interroge sur la réalité de notre pays. Le vacarme médiatique oriente notre attention sur ceci, pas assez sur cela. Davantage sur les raisons de s’inquiéter que sur celles d’espérer. 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Ou leur politique dite verte conduira-t-elle à la décroissance? La concentration des efforts sur la course aux armements et l’aide à l’Ukraine, telle qu’elle est brandie aujourd’hui, peut aider certains secteurs industriels mais coûtera extrêmement cher. On articule à Bruxelles le chiffre de 100 milliards à cette fin d’ici 2029. Ce sera forcément au détriment d’autres attentes, dans les infrastructures, l’éducation, la recherche, la cohésion sociale. Sans compter que la transition écologique, nous assure-t-on, nécessitera en plus une pluie de milliards. Quelles priorités fixera le nouveau Parlement? Selon les choix, les retombées sur l’économie suisse seront différentes. Le surarmement de l’Europe ne nous rapporte quasiment rien, sa santé économique et sociale nous est bien plus bien profitable.</span></p> <p><span>Deuxième point. Le fonctionnement même de l’Union. Deux tendances s’affrontent. 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VOS RÉACTIONS SUR LE SUJET
6 Commentaires
@willoft 20.05.2022 | 01h36
«La Suisse, berceau d'Henri Dunant, aidé par le radeau de la méduse, est devenue la pute du monde.
Et malgré le Sieur de l'OECD, St Armand mon colon, ce n'est pas prêt de s'arrêter :)»
@Apitoyou 20.05.2022 | 07h28
«Merci de cet éclairage, de ce spot sur le CICR actuel !»
@simone 20.05.2022 | 08h06
«Merci une fois de plus de dire les choses avec une présentation générale et non pas unilatérale. Est-ce que vous êtes vraiment le seul à savoir du "pour" et du "contre"?
Suzette Sandoz
»
@Roger R. 20.05.2022 | 09h11
«Merci Jacques Pilet pour toutes ces précisions. Elles sont fort utile
pour une réflexion saine et horizontale.
»
@Ancetre 20.05.2022 | 10h27
«Votre article met en lumière, une fois de plus, une forme de compromission qui semble régner au sein des instances dirigeantes de notre pays. Contrairement à la corruption, il ne s'agit pas de versement d'argent, mais cela prend par exemple la forme de renvois d'ascenseur ou de partage d'infos confidentielles, et permet ainsi des associations floues, comme celles que vous citez dans votre article. J'ai eu par le passé des contacts avec le CICR . Et, si je me rappelle bien, il était impensable que son Président accepte quelque mandat d'administrateur que ce soit ou mette la neutralité de l'organisation en péril en s'associant à quelqu' organisation que ce soit, même humanitaire ou à but non lucratif. On s'est offusqué quand un Conseiller fédéral a rejoint un Conseil d'administration peu après son départ du CF. On ne s'offusque pas quand le Président du CICR soutient une alliance avec le WEF. Pourtant, sur certains théâtres de guerre, les belligérants ne font peut être plus confiance à un CICR qui collabore avec le représentant le plus éminent d'une forme de société qu'ils n'approuvent pas, à tort ou à raison, là n'est pas la question. A mon humble avis ce n'est pas que sur le fonctionnement du CICR qu'une information claire et le la plus complète serait la bienvenue. Etendre ce besoin au fonctionnement de nos institutions politiques et économiques pourrait s'avérer instructif !!»
@TEG 20.05.2022 | 13h36
«L'article de M. Pilet donne une idée très fidèle de la réalité du CICR après 10 ans sous la présidence de M. Peter Maurer. Demander "une information claire et la plus complète possible sur son action" est une exigence à laquelle le CICR se doit de répondre. N'est-il pas pour le mois surprenant qu'avec un financement public à hauteur de 95% de son budget de 2,2 milliards, le CICR ne fasse l'objet d'aucun contrôle de gestion indépendant ? En effet, l'unique contrôle de gestion extérieur est de nature exclusivement comptable et n'a pas pour objet de vérifier l'adéquation des programmes avec le mandat du CICR, notamment les dépenses administratives et non-opérationnelles ne bénéficiant pas directement aux victimes de conflits. De plus, ce contrôle est exercé par une grande société internationale d'audit, partenaire stratégique du World Economic Forum! Thierry Germond»