La gare d'Irkoutsk, en Sibérie orientale. © DR
«Dans les geôles de Sibérie» a été publié en février 2020 par Yoann Barbereau, ancien directeur de l’Alliance française à Irkoutsk. A sa sortie, le roman a fait beaucoup de bruit et nombre de médias ont donné la parole à son auteur, qui fustigeait le «régime de Poutine». La réalité est quelque peu différente. Contre-enquête.
Félix Baumann, Suisse résidant à Irkoutsk où il a fondé une école de langues
Dans ce roman autobiographique, Yoann Barbereau donne sa version des faits concernant l’affaire qui lui a valu une condamnation par contumace à 15 ans de colonie pénitentiaire en 2016 pour diffusion de matériel à caractère pornographique, et raconte sa fuite de Russie. Très présent dans les médias, il se présente comme une victime des services secrets russes, du système judiciaire russe ainsi que des relations politiques franco-russes. Il se livre aussi à une critique acerbe du ministère des Affaires étrangères français ainsi que de l’Ambassade de France à Moscou.
Suite à une décision du tribunal administratif de Paris, l’Etat français a par ailleurs été condamné à lui verser 300'000 euros pour ne pas avoir appliqué la «protection fonctionnelle» jugeant que la procédure qui le visait «s'inscrivait dans un contexte de poursuites concomitantes menées par les autorités russes contre le réseau des Alliances françaises installées sur le territoire, et visait en réalité le requérant en raison de ses fonctions et de la coopération qu'elles impliquaient avec les autorités locales» (France Bleu 24 avril 2020).
L'affaire vue d'Irkoutsk
Fêté comme un héros par la presse française, invité sur les plateaux de télévision, l’autoproclamé meilleur Directeur de l’Alliance française d’Irkoutsk de tous les temps n’a pas laissé que de bons souvenirs sur place. Contrairement à ce qu’il crie sur tous les toits, son bilan professionnel à la tête de l’Alliance française d’Irkoutsk est catastrophique. Alors que le portrait d’un Casanova assoiffé de liberté cavalant à travers les plaines de Russie séduit les lectrices et lecteurs de son roman, on a dans les faits plutôt affaire à un mari volage parfois violent (voir le témoignage de son ex-épouse sur Radio Svoboda du 28 novembre 2017).
A Irkoutsk, je me suis entretenu avec différentes personnes qui ont collaboré avec Yoann Barbereau au sein de l’Alliance française locale: la Directrice, le Président, d’anciennes employées et des enseignantes y travaillant actuellement, la comptable. J’ai également rencontré des traductrices qui ont travaillé pendant le procès de Barbereau. Certaines de mes interlocutrices ont connu quatre prédécesseurs à la tête de l’Alliance française à Irkoutsk de 1997 à ce jour. Les points suivants ont été mentionnés:
1. Yoann Barbereau a géré l’argent de l’Alliance française, donc celui du contribuable français, de façon désastreuse. Pire, il a utilisé des fonds publics à des fins privées. De plus, il s’est énormément engagé dans le but de développer un projet (ouverture d’une boulangerie française à Irkoutsk avec un boulanger d’Annecy) ne relevant pas de ses compétences et ne répondant pas aux objectifs de l’organisation, à savoir la promotion de la langue et de la culture française. Conséquences : des caisses vides, des salaires qui peinent à être versés et des relations avec les employés qui se détériorent. Dans un procès intenté par trois collaboratrices pour licenciement abusif décidé par Yoann Barbereau, l’Alliance française d’Irkoutsk a été condamnée pour n’avoir pas respecté le code du travail russe. Etant donné que Barbereau était déjà aux arrêts au moment du jugement (mars 2015), la Directrice actuelle a dû assumer les conséquences : c’est elle qui a dû représenter l’Alliance au tribunal, réintégrer les personnes injustement licenciées et gérer les conflits au sein du personnel liés à la pagaille de l’ère de Barbereau. Aussi bien sur le plan financier que juridique, il y a eu des manquements graves de la part de Barbereau.
2. On me raconte que ses problèmes sur le plan privé (relations houleuses avec son ex-épouse) ont eu une influence sur ses relations professionnelles qui ont conduit à des conflits avec le personnel, notamment avec ses éléments les plus expérimentés. Ses multiples conquêtes féminines au vu et au su de toutes ont provoqué des remous au sein de l’équipe.
3. Les employés soulignent que l’affaire Barbereau a eu des conséquences très néfastes pour l’Alliance française d’Irkoutsk en tant qu’organisation, mais aussi sur le plan personnel pour le président de l’Alliance française qui occupait un poste élevé au sein de l’administration de la région d’Irkoutsk et qui a été licencié suite à l’affaire. Perquisitions, contrôles, ennuis administratifs, rien n’a été épargné à l’Alliance dont la réputation a été ternie et les effectifs d’élèves se sont réduits comme peau de chagrin. Le scandale provoqué par cette histoire a également détruit le travail accompli pendant des décennies afin de développer la culture et la langue française, les échanges et le dialogue interculturel. Finalement, le rayonnement de la France et sa réputation en ont pris un coup et un sentiment d’amertume et de gâchis prévaut chez leurs plus ardents défenseurs sur place.
4. On ajoute, à Irkoutsk, que contrairement à ce qu’il affirme dans la presse et dans son roman, Yoann Barbereau a été extrêmement soutenu de toutes parts après son arrestation, aussi bien sur le plan judiciaire – il a été défendu par deux des meilleurs avocats d’Irkoutsk – que privé, puisque la famille de Yoann Barbereau a été accueillie et aidée lors de son séjour en Russie. Ses avocats ont par ailleurs obtenu qu’il soit transféré en résidence surveillée, fait exceptionnel au regard de l’accusation qui pesait sur lui. Il n’a donc en aucun cas été lâché par le ministère des Affaires étrangères français, a disposé de bien plus de soutien qu’un citoyen ordinaire et obtenu plus que le maximum durant son procès.
Services secrets et épicerie fine
Comment se fait-il qu’un personnage dont le bilan et le portrait sont si peu reluisants jouisse d’une image aussi positive dans les médias? La stratégie mise en place par Yoann Barbereau est extrêmement simple et efficace: politiser une affaire à caractère privé. Pour ce faire, il explique ses déboires à Irkoutsk par ses liens avec l’ancien maire de la ville, qu’il qualifie d’opposant au président Poutine. Cette affirmation est trompeuse à double titre: d’une part, il n’était pas ami avec V. Kondrachov et d’autre part, celui-ci n’a rien d’un opposant. Homme d’affaires brillant reconverti en politique, il a adhéré au parti communiste, puis à Russie Unie, pour ensuite terminer sa carrière comme vice-gouverneur sous la bannière communiste suite à sa non-réélection au poste de maire en 2015. Cette distorsion de la réalité est fondamentale, puisqu’elle fait penser que Barbereau est victime de ses relations avec l’opposition politique.
Dans son roman, il tire sur les plus grosses ficelles pour décrire Irkoutsk et la Russie: pauvreté, services secrets, asile psychiatrique, prison, violence, tout y est dépeint avec noirceur. Cette description est formatée pour les lecteurs et lectrices européens qui voient en Barbereau un Don Quichotte ou un James Bond fuyant un pays horrible. En réalité, la politisation de son cas était sa seule chance de sortir du guêpier dans lequel il était fourré. Pour cela, il a utilisé le besoin de sensationnalisme de la presse française et des stéréotypes iniques à propos de la Russie. Les médias ont de façon générale servi de caisse de résonance au discours tenu par Yoann Barbereau pour la simple raison qu’il répond parfaitement à leurs attentes quand il s’agit de traiter de la Russie.
Or, certaines informations fausses auraient été très simples à vérifier et d’autres renseignements pertinents faciles à trouver. En se présentant comme victime du système judiciaire russe et comme prisonnier, il ose des comparaisons en citant Soljenitsyne pour créer l’illusion d’avoir partagé une expérience similaire. En réalité, Barbereau a passé 71 jours en détention provisoire et pas en colonie pénitentiaire, puis une année en résidence surveillée, nourri et blanchi par le contribuable français, ripaillant dans les meilleurs restaurants de la ville et faisant ses emplettes dans la plus fine épicerie! On ne sait pas si Yoann Barbereau est coupable de diffusion de matériel pornographique, mais le personnage qu’il a créé dans son roman et dans les médias relève de l’imposture. La presse, elle, serait bien inspirée de s’intéresser aux faits qu’elle relaie, faute de quoi elle risque de desservir la cause qu’elle prétend défendre, à savoir la quête de la vérité. Les véritables victimes de cette affaire sont malheureusement celles et ceux qui s’emploient depuis des décennies à promouvoir la langue et la culture française ainsi que le dialogue interculturel.
Avec la collaboration d’Inna Gorbunova, Ana Mukomel, Elena Vyssokikh, Philippe Guichardaz et Guy Mettan.
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La presse, elle, serait bien inspirée de s’intéresser aux faits qu’elle relaie, faute de quoi elle risque de desservir la cause qu’elle prétend défendre, à savoir la quête de la vérité. Les véritables victimes de cette affaire sont malheureusement celles et ceux qui s’emploient depuis des décennies à promouvoir la langue et la culture française ainsi que le dialogue interculturel.</p> <p style="text-align: right;"><em>Avec la collaboration d’Inna Gorbunova, Ana Mukomel, Elena Vyssokikh, Philippe Guichardaz et Guy Mettan.</em></p>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'bons-baisers-d-irkoutsk', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 489, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 5, 'person_id' => (int) 85, 'post_type_id' => (int) 1, 'poster_attachment' => null, 'editions' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Edition) {} ], 'tags' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Tag) {} ], 'locations' => [], 'attachment_images' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'attachments' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'comments' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Comment) {} ], 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ '*' => true, 'id' => false ], '[dirty]' => [], '[original]' => [], '[virtual]' => [], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [], '[invalid]' => [], '[repository]' => 'Posts' } $relatives = [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 4937, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => true, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => null, 'readed' => null, 'subhead' => null, 'title' => 'Géopolitique du sport: l’affrontement entre la Russie et l’Ukraine', 'subtitle' => 'Impossible apolitisme du sport mondial face à la guerre en Ukraine. 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Cette déclaration est catégorique : « La guerre non provoquée et injustifiable de la Russie contre l’Ukraine, soutenue par le gouvernement biélorusse, est répugnante et constitue une violation flagrante de ses obligations internationales. » Ainsi, du point de vue sportif et diplomatique, la Russie se retrouve isolée.</p> <h3>La création d’un nouvel ordre mondial du sport ?</h3> <p>Dans les paroles et les actions, le pouvoir russe privilégie depuis le début de l’invasion la création d’un pôle sportif alternatif à l’échelle mondiale pour contrer les institutions sportives internationales traditionnelles telles que le CIO ou la Fifa.</p> <p>En pratique, cela impliquerait de se passer du sport mondial, de le remplacer ou de rivaliser avec lui. En Russie, par exemple, l’idée de diviser le mouvement olympique gagne du terrain. Il s’agirait de séparer les Jeux en deux parties : à l’Ouest, les Jeux occidentaux, et à l’Est, les Jeux russes « traditionnels ». Ces Jeux à la russe se dérouleraient en été en Crimée et en hiver à Sotchi. Ils puiseraient leur légitimité dans les liens historiques plus ou moins confirmés de ces régions avec la Grèce antique. En 2007, pour obtenir les Jeux de Sotchi, Vladimir Poutine avait rappelé aux membres du CIO que « les Grecs anciens ont vécu près de Sotchi. J’ai vu le rocher près de Sotchi où, selon la légende, Prométhée était enchaîné. Prométhée qui a donné le feu aux hommes, le feu qui est finalement la flamme olympique ». Depuis, l’argument du mythe est souvent utilisé pour évoquer cette région russe, composée du Caucase et de la péninsule de Crimée. 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Concomitante à une dynamique plus générale de désoccidentalisation du monde, cette influence dépasse très largement le cadre sportif.</p> <h3>Le sport ukrainien, c’est la guerre avec les balles</h3> <p>Depuis le 24 février 2022, pour Volodymyr Zelensky et l’Ukraine, le sport, c’est la <a href="https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/culturesmonde/le-sport-c-est-la-guerre-les-fusils-en-moins-g-orwell-1945-2-4-la-guerre-un-sport-comme-les-autres-7282852">guerre avec les balles</a>. En effet, à l’heure du conflit russo-ukrainien, le domaine sportif en Ukraine a subi une transformation significative.</p> <p>Initialement, au lendemain de l’invasion et sur une période de moins de deux mois, les autorités nationales ont suspendu l’ensemble des activités sportives en Ukraine. L’accent était alors mis sur l’effort de guerre, et les installations sportives ont été utilisées par les militaires ukrainiens comme bases de repli ou de déploiement. Cela explique pourquoi les installations sportives, telles que les stades ou les gymnases, sont souvent la cible des forces russes, car elles pourraient potentiellement abriter des unités ukrainiennes entières.</p> <p>Par la suite, lorsque l’armée russe a commencé à faire du surplace voire à reculer sur le terrain, le secteur sportif ukrainien a pris une nouvelle orientation. Certains clubs de football ont obtenu la permission de jouer des matchs de charité à l’étranger, malgré la loi martiale interdisant aux hommes âgés de 18 à 60 ans de quitter le territoire. Ces matchs visaient à sensibiliser à la cause ukrainienne. De même, les athlètes en préparation pour d’importantes compétitions ont pu s’entraîner à l’étranger.</p> <p>Par exemple, l’équipe nationale de football a été autorisée à s’entraîner en Slovénie pendant un mois en mai 2022 en vue des qualifications pour la Coupe du monde de football 2022 au Qatar. Ainsi, le soft power sportif a contribué symboliquement à l’effort de guerre. Les autorités estimaient qu’un athlète ukrainien était plus utile sur le terrain sportif que sur le front militaire. Selon elles, il offrait un double avantage en donnant à l’Ukraine une visibilité internationale et en pouvant potentiellement rehausser le moral des troupes déployées sur le terrain. Cette dimension ne doit pas être sous-estimée : une victoire sportive pour un athlète ukrainien procurait aux soldats, qui suivaient régulièrement les matchs et les résultats, un certain espoir et un regain de moral.</p> <p>À partir de la mi-juin 2022, le sport à l’échelle nationale a progressivement retrouvé sa place, bien que dans des conditions exceptionnelles. Par exemple, la Première Ligue ukrainienne de football a obtenu l’autorisation de débuter la saison 2022-2023 fin août. Toutefois, les règles ont été adaptées à la situation du moment. Les spectateurs ne sont plus autorisés à assister aux matchs, et ceux-ci nécessitent une autorisation systématique de l’administration militaire pour avoir lieu. Si une alerte de raid aérien potentiel retentit dans un rayon de moins de 500 mètres, le match est interrompu et les joueurs se réfugient dans les vestiaires, ce qui se produit régulièrement. Après un an et demi de guerre, aucun footballeur ukrainien n’a été blessé. Cependant, certains matchs ont duré plus de cinq heures au total.</p> <p>Paradoxalement, l’Ukraine continue de participer activement aux événements sportifs européens et mondiaux. Chaque compétition internationale offre l’opportunité aux autorités de promouvoir les intérêts du pays dans un contexte de guerre. De plus, certains clubs ukrainiens sont accueillis par les alliés géopolitiques les plus proches de l’Ukraine. Par exemple, le Dynamo Kyiv s’entraîne et joue certains de ses matchs à Cracovie, en Pologne. Dnipro, quant à lui, joue et s’entraîne à Košice, en Slovaquie, de manière permanente. En général, de nombreux athlètes et entraîneurs ukrainiens, actifs ou non, ont choisi de rejoindre le front dans l’est de l’Ukraine, mettant leur carrière en suspens. Le cas emblématique est peut-être celui de Yuriy Vernydub, entraîneur ukrainien du Sheriff Tiraspol, qui est parti au front dès le lendemain de l’invasion. Il est important de noter que ces professionnels du sport proviennent souvent de divisions sportives moins importantes. En effet, les athlètes de renom préfèrent généralement contribuer à l’effort de guerre d’un point de vue sportif et symbolique.</p> <p>Le cas des supporters des clubs ukrainiens est également notable. Depuis 2014 et surtout depuis l’invasion russe en Ukraine, de nombreux ultras ont rejoint le front pour combattre ensemble, mettant de côté leur rivalité sportive. En temps de paix rivaux, les supporters du Shakhtar Donetsk et du Dynamo Kyiv combattent ensemble contre leur ennemi commun.</p> <h3>La stratégie politique et sportive de Volodymyr Zelensky après l’invasion russe</h3> <p>Depuis le 24 février 2022, la stratégie internationale de Volodymyr Zelensky s’est intensifiée dans le domaine sportif, trouvant écho dans l’espace médiatique mondial. Les ministères, les organisations privées et le comité olympique ukrainien, tous les organes politiques, économiques et sportifs du pays sont mobilisés pour transmettre un message : l’exclusion de la Russie doit durer tant que l’invasion se poursuit.</p> <figure><iframe frameborder="0" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/YQiSJ3AO5CI?wmode=transparent&start=0" width="440"></iframe></figure> <p>Le hashtag #boycottrussiansport en est devenu le symbole. De manière concrète, les arguments ukrainiens peuvent être résumés en cinq points. La Russie devrait être exclue des événements sportifs mondiaux et des Jeux olympiques de Paris 2024 car elle est un État envahisseur et terroriste ; les athlètes russes sont de quelque manière liés à l’État russe ou à l’armée russe ; le régime de Vladimir Poutine exploite le sport à des fins de propagande ; dans de telles conditions, l’équité des compétitions sportives (Jeux olympiques, Coupe du monde, etc.) ne peut être maintenue ; les athlètes ukrainiens perdent la vie au front ou ne peuvent pas s’entraîner convenablement pour les grandes compétitions internationales, par conséquent la Russie et la Biélorussie ne devraient pas être autorisés à y participer.</p> <p>Pour diffuser ces arguments, le gouvernement ukrainien utilise divers canaux. Tout comme Volodymyr Zelensky utilise son smartphone pour communiquer avec différentes générations, les principaux porte-parole du sport ukrainien exploitent les canaux et les codes contemporains pour diffuser leur message. Les réseaux sociaux tels que TikTok, Facebook ou Instagram sont fréquemment utilisés pour diffuser des propos politiques liés au sport. On peut souvent voir circuler des vidéos de quelques secondes transmettant un message percutant. Par exemple, l’une de ces vidéos virales montre un athlète russe lançant un javelot dans les airs. Le javelot se transforme ensuite en obus, suit la trajectoire de l’athlète et finit par s’écraser sur un bâtiment ukrainien. Un message s’affiche alors à l’écran : « Boycott Russian Sport. »</p> <h4 style="text-align: center;"><a href="https://images.theconversation.com/files/592021/original/file-20240503-16-h8q7b1.jpeg?ixlib=rb-4.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img src="https://images.theconversation.com/files/592021/original/file-20240503-16-h8q7b1.jpeg?ixlib=rb-4.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" alt="" /></a></h4> <h4 style="text-align: center;"><em><span>Ces extraits sont issus de « La Guerre du sport. 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Le compte Facebook du ministère suit la même approche, avec une bannière principale affichant à nouveau le hashtag #boycottrussiansport, cette fois-ci en lettres sanglantes.</p> <p>Pour avoir un impact encore plus fort, le Comité des sports d’Ukraine (SKU), chargé de promouvoir le développement des sports non olympiques, a lancé le projet Angels of Sport via un site web recensant les athlètes et entraîneurs ukrainiens professionnels décédés au combat depuis le 24 février 2022.<img src="https://counter.theconversation.com/content/229262/count.gif?distributor=republish-lightbox-basic" alt="The Conversation" width="1" height="1" /></p> <hr /> <p> </p> <h4><span><a href="https://theconversation.com/profiles/lukas-aubin-910318">Lukas Aubin</a>, Docteur en Études slaves contemporaines : spécialiste de la géopolitique de la Russie et du sport, <em><a href="https://theconversation.com/institutions/universite-paris-nanterre-universite-paris-lumieres-2294">Université Paris Nanterre – Université Paris Lumières</a></em> et <a href="https://theconversation.com/profiles/jean-baptiste-guegan-234426">Jean-Baptiste Guégan</a>, Enseignant en géopolitique du sport, journaliste et consultant, <em><a href="https://theconversation.com/institutions/sciences-po-2196">Sciences Po </a></em></span></h4> <h4>Cet article est republié à partir de <a href="https://theconversation.com">The Conversation</a> sous licence Creative Commons. Lire l’<a href="https://theconversation.com/geopolitique-du-sport-laffrontement-entre-la-russie-et-lukraine-229262">article original</a>.</h4> <h4><em>Lukas Aubin, directeur de recherche à l’IRIS, spécialiste de la géopolitique de la Russie et du sport et membre associé du Centre de Recherches Pluridisciplinaires Multilingues (CRPM) à l’université Paris-Nanterre, et Jean-Baptiste Guégan, expert en géopolitique du sport et enseignant à Sciences Po Paris, viennent de publier aux éditions Tallandier</em> <a href="https://www.tallandier.com/livre/la-guerre-du-sport/">La Guerre du Sport, une nouvelle géopolitique</a>, <em>un ouvrage complet qui met en lumière l’influence des grands enjeux internationaux sur un un monde du sport à l’apolitisme de plus en plus illusoire. 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Il y voyait un moyen efficace de lutter contre les maladies dues à une carence en vitamine A, très répandues en Asie du Sud-Est et qui peuvent entraîner la cécité, voire la mort. Potrykus était alors loin de se douter qu'un tribunal philippin retoquerait son invention un an et demi après son autorisation.</p> <h3>Syngenta acquiert des droits de brevet</h3> <p>La route a été longue jusqu'à la première récolte du riz doré: en 1999 déjà, Potrykus et son collègue Peter Beyer avaient présenté un prototype. Celui-ci contenait des gènes de jonquille qui produisaient de la provitamine A dans le grain de riz et le faisaient ainsi briller d'un jaune doré. En 2005, les chercheurs avaient développé une deuxième variante en collaboration avec le géant de l'agroalimentaire Syngenta. 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En effet, le corps humain n'utiliserait la provitamine A que s'il dispose de suffisamment de graisse, ce qui, selon Greenpeace, n'est souvent pas le cas chez ces personnes. De plus, il y aurait un risque que le riz génétiquement modifié, une fois introduit dans le champ, se reproduise de manière autonome, se propage et contamine ainsi d'autres variétés de riz. En raison de ces doutes, il a fallu attendre 16 ans de plus pour que les autorités philippines en charge de la biosécurité donnent finalement le feu vert à la culture du riz doré en 2021.</p> <h3>Le tribunal révoque l’autorisation</h3> <p>Mais aujourd'hui, une nouvelle décision de justice met déjà un frein à la propagation de la variété de riz transgénique. Ainsi, une Cour d'appel philippine a révoqué l'autorisation le 17 avril dernier en se référant au principe de précaution: «En l'absence de consensus scientifique sur la sécurité du riz doré, il ne devrait plus être cultivé à des fins commerciales». L'interdiction s'étend en outre à la culture d'une aubergine génétiquement modifiée. La culture commerciale de ces variétés n'est pas autorisée «jusqu'à ce que les autorités gouvernementales concernées apportent la preuve de la sécurité et du respect de toutes les exigences légales», précise le tribunal.</p> <p>Le tribunal a aussi relevé que le gouvernement n'avait pas mis en place de mécanismes de surveillance pour assurer la sécurité de la culture et de la consommation du riz doré. Le jugement met donc pour l'instant à l’arrêt de nouveaux essais menés en plein champ, dans des serres ou des champs ouverts.</p> <p>Ce jugement intervient après que l'association d'agriculteurs philippins MASIPAG a porté plainte, avec d'autres organisations, contre l'autorisation de cultiver du riz doré. La plainte, déposée en 2022, se base sur un instrument juridique philippin appelé Writ of Kalikasan. Celui-ci protège le droit constitutionnel à une «écologie équilibrée et saine» et stipule que ce droit prévaut sur les activités humaines susceptibles de nuire à l'environnement.</p> <h3>Un recours porterait-il ses fruits?</h3> <p>Comme l'explique Aldrich Fitz Dy, avocat et consultant philippin interrogé par la revue <em>Science</em>, le gouvernement a désormais deux possibilités. Il peut soit faire appel, soit porter le jugement devant la Cour suprême. Selon Dy, la première solution est peu probable, la seconde prendrait au moins deux ans.</p> <p>Adrian Dubock, membre du Golden Rice Humanitarian Board, voit les choses différemment. Il s'attend à ce que le gouvernement philippin fasse appel auprès de la Cour: «Je suppose que l'appel sera couronné de succès», estime Dubock auprès de la plateforme scientifique <em>New Scientist</em>.</p> <p>Il reste à voir si l'interdiction actuelle de cultiver le riz doré peut encore être remise en question. En attendant, ce jugement devrait inspirer les mouvements qui, dans d'autres pays, s'opposent à l'introduction du riz doré et d'autres variétés génétiquement modifiées. 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VOS RÉACTIONS SUR LE SUJET
1 Commentaire
@arizan 03.09.2021 | 22h02
«Cet article, qui me paraît très valable, devrait être largement diffusé et lu en France.
Encore les méfaits d'un narcissisme aigu, hélas ! Se comparer à Soljénitsine, quelle folie !»