Culture / Incardona peint en très noir un monde qu’il rêve meilleur
Joseph Incardona. © Finitude
Après Joël Dicker, Quentin Mouron et quelques autres, Joseph Incardona, dans son étonnant dernier roman, «La soustraction des possibles», prouve que l’on peut jouer avec les codes et stéréotypes du roman noir ou du thriller d’investigation sociale sans se détourner d’un certain héritage culturel ou littéraire romands, au point de nous faire croire qu’une mafieuse corse puisse s’enticher follement des romans de Ramuz, entre autres intuitions prometteuses…
De prime apparence déjà, avec sa «couve» somptueuse, comme dorée à la feuilles, l’image de celle-ci qui évoque les rouages d’une horloge symbolisant à la fois la Suisse ou quelque Mécanisme mondial, et son bandeau publicitaire rouge vif annonçant le Prix Relay 2020 non sans aligner une dizaine d'extraits de critiques, tous dithyrambiques, le dernier roman de l’auteur italo-genevois Joseph Incardona semble jouer gagnant d’avance, pour ainsi dire «incontournable» sinon win-win...
Cependant, peu enclin à saliver aux sollicitations pavloviennes des médias, j’aurai tout de même hésité, l’autre jour, avant de faire l’acquisition du présumé chef-d’œuvre de cet auteur romand plus ou moins atypique dont j’avais entendu parler moult fois sans lire une ligne de lui jusque-là, peut-être pour l’avoir «classé polar» à un moment où le genre en question me semblait de plus en plus convenu et d’écriture souvent moyenne voire médiocre, surtout en nos régions…
A l’inverse, il y a des années que je me défie, tout autant, de ce qu’on a appelé «l’âme romande» dans notre paroisse littéraire bien grave, avec sa foison de romans pétris d’intériorité conflictuelle et frottés de spiritualité vague; et c’est avec reconnaissance, en tant que chroniqueur littéraire, que j’aurai salué, dès les années 2000, l’apparition de nouveaux auteurs à dégaine d’«électrons libres», tels un Marius Daniel Popescu ou un Quentin Mouron, ou de formes narratives plus dynamiques, comme l’a illustré L’Amour nègre d’un Jean-Michel Olivier, avant l’apparition «phénoménale» d’un Joël Dicker que d’aucuns s’obstinent à regarder de haut, comme ils dédaignent le talent de conteur d’un Metin Arditi, etc.
«En présence de la réalité»…
A la fin des année 70, l’éditeur Vladimir Dimitrijevic publia, dans La Gazette de Lausanne, une tribune libre dans laquelle il déplorait que la littérature romande ne comptât pas l’ombre d’un Zola, reprochant en somme à nos écrivains de ne pas rendre suffisamment compte de la réalité sociale de ce pays, à tous les étages de la société, alors même que beaucoup d’entre eux se prétendaient «engagés» ou soucieux de «problèmes sociaux».
Or, en dépit de l’exagération du constat, faisant peu de cas de certaines œuvres (notamment féminines) qui parlaient bel et bien de la société, de ses conflits externes et de ses tensions internes, il y avait du vrai dans cette observation qu’on peut d’ailleurs rapporter à la littérature helvétique dans son ensemble, jusque dans ses zones les plus urbanisées – un Hugo Loetscher, à Zurich, me fit d’ailleurs une remarque analogue.
Cela pour dire quoi? Que c’est bel et bien, ici et là, par le roman policier, en Suisse allemande avec un Dürrenmatt ou un Glauser, et en Suisse romande, beaucoup plus récemment, avec un Marc Voltenauer et un Nicolas Feuz – tout au moins dans leurs premiers ouvrages –, qu’un début de réalisme social, modulé par des personnages et des situations significatives, a esquissé le portrait de telle ou telle partie de notre société.
C’est aussi l’un des mérites de La soustraction des possibles de Joseph Incardona, s’agissant du milieu genevois des affaires et des banques, non tant dans un reportage rigoureusement fouillé que dans une histoire d’amour à la fois conventionnelle en apparence (le feuilleton) et complexe (comme entre les lignes, l’essai pénétrant sur les motivations humaines gouvernées par l’argent), aux personnages très bien dessinés et à la dramaturgie puissamment orchestrée.
Première surprise: c’est à Charles-Ferdinand Ramuz que l’auteur emprunte l’un de ses exergues: «Comme tout est clair pourtant, quand on consent à se mettre en présence de la réalité». Et c’est dans la clarté d’une sorte d’immanence hyperréaliste que nous voyons surgir, raquette en main, le prof de tennis trentenaire Aldo Bianchi, secundo italo-suisse comme l’auteur, Rastignac de modeste extraction qui, d’abord gigolo de la femme, prénommée Odile et en début de retour d’âge, d’un homme d’affaires du nom de René Langlois, lancé dans la commercialisation des OGM (nous sommes en 1989 et le bloc de l’Est va bientôt «intéresser» les banques suisses), pour s’allier ensuite à la non moins ambitieuse Svetlana, transfuge tchèque occupant un haut rang à l’UBS de Genève, pour une passion amoureuse de «pirates» à la Bonnie & Clyde, ou Sailor et Lula, en plus touchants.
Bien campés physiquement et psychologiquement, les personnages du roman se déplacent sur des territoires et dans des décors qui font l’objet de véritables «tours du propriétaire», avec foison de détails, que ce soit pour décrire les origines du parc des Eaux-Vives devenu haut-lieu de tennis (avec une digression sur la fondation du tunnel du Gothard et le rôle particulier d’un Louis Favre en capitaliste cynique), les belles demeures de Cologny et les souterrains de l’UBS, tel club libertin ou telle prison lyonnaise aux mœurs infernales, tel alpage corse où un parrain de la mafia locale trait sa chèvre auprès d’une enfant handicapée, ou tel salon des Port-Francs de Genève où transitent les chefs-d’œuvre de la peinture, dont une représentation du Grammont par Ferdinand Hodler − le même que j’entrevois de ma fenêtre à l’instant de rédiger ces lignes, etc.
Entre réalité et fantasmes, kitsch et poésie
En invoquant la «réalité», Ramuz n’en appelait pas à une littérature de reportage ou de témoignage au premier degré, réservée au journalisme, à l’essai ou à ce qu’on appelé plus récemment les «récits de vie». Ramuz n’était pas le Zola désiré de Dimitrijevic, mais un poète du réel et du tragique entré en littérature avec un petit roman déchirant, intitulé Aline, qui n’a pas fait le «buzz» à l’époque mais reste un modèle de probité «poétique», comme le dit d’ailleurs Joseph Incardona à sa façon.
Celui-ci, issu de milieu modeste comme une Janine Massard ou une Mireille Kuttel (Piémontaise d’origine dont il faudrait redécouvrir les romans) est un «secundo» ritalo-suisse de la génération d’après 68 (il est né le lendemain, en 69) dont la culture personnelle, littéraire ou philosophique est très mélangée et peu académique. Je ne le connais à vrai dire que par son dernier livre, mais celui-ci en dit long, entre les lignes, et par la voix même de l’auteur qui se pointe au coin de pages comme le malicieux Hitchcok à l’écran…
Or que nous montre ce bon Joseph de la réalité suisse «au-dessus de tout soupçon» de notre ami Jean Ziegler? Rien que nous ne sachions déjà plus ou moins après une flopée de «reportages», précisément, mais sa façon de jouer d’effets de réel, pas loin des procédés d’un Michel Houellebecq, et de rallier le drapeau noir du «mauvais genre» littéraire, constitue sa base logistico-esthétique, avec la vigueur et le savoir d’un grand «pro» qui sait, par ailleurs, ce qui distingue un Ramuz d’un critique de gauche style Niklaus Meienberg, ou un Balzac d’un auteur de polars à la Marc Voltenauer ou à la Nicola Feuz.
S’il joue le jeu du genre, Incardona vise plus haut, comme son protagoniste croit «voir grand» en s’imaginant plein aux as et donc tout-puissant. Mais Joseph sait d’avance que son Aldo va se casser la gueule, et de même le feuilleton parfaitement agencé qu’il nous balance n’est-il qu’un moyen de nous dire autre chose, par quoi il rejoint en somme un Georges Halas pointant le «meurtre sous les géraniums», le Ramuz génial de Circonstances de la vie ou de La vie de Samuel Belet, voire le Dürrenmatt de La Promesse «relu » par Sean Penn… Tout cela qui semble très loin du Cercle littéraire lausannois ou de la Société de lecture genevoise, mais qui ressortit néanmoins, «quelque part», à la littérature…
L’Avenir étant dans la bonté humaine…
Dernier cadeau de la nuit, hier soir, cueilli dans le recueil récemment paru du poète italo-genevois Vince Fasciani: «Je fais partie d’une lignée de gens de peu / qui se sont frayé un passage à travers la bonté ». Tout à fait valable, au fond, pour le sieur Incardona, disciple de Carver et de Tchekhov sous ses airs de mec à la coule.
La story visible de La soustraction des possibles passe donc par les péripéties violentes, et répétitives à vomir, des séries actuelles les plus addictives, avec intervention de caïds atroces, exécutions sommaires et révérence finale des ordures manucurées de la BSG qui s’en tirent comme les fossoyeurs de Swissair & Co à parachutes dorés. Effet de réel, page 161, avec la liste (incomplète) des crimes imputables à une banque que nous ne nommerons pas (le sigle UBS n’est connu que de la rédaction), entre comptes en déshérence (1995) et condamnation de la banque en question pour blanchiment aggravé de fraude fiscale (2019), avec une quinzaine d’autres scandales, et ne vous demandez pas si la réalité dépasse la fiction : cette réalité-là n’est qu’un fiction, la vraie réalité du roman relevant des affects et de la bonté possible.
En bonus sous le feuilleton: une espèce de poème râpeux genre Tom Waits, avec l’accent d’un sale gamin des Pâquis. Vous avez dit chef-d’œuvre? Pas encore. Trop de trucs encore et de tics, comme Balzac ou Simenon avant leurs contributions respectives majeures à la «comédie humaine». Mais la pâte est toute bonne, et la papatte de l’écrivain est d’un vrai dur, surtout dur à la tâche et la passion d’un pur.
«La soustraction des possibles», Joseph Incardona, Editions Finitude, 400 pages.
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Et c’est dans la clarté d’une sorte d’immanence hyperréaliste que nous voyons surgir, raquette en main, le prof de tennis trentenaire Aldo Bianchi, secundo italo-suisse comme l’auteur, Rastignac de modeste extraction qui, d’abord gigolo de la femme, prénommée Odile et en début de retour d’âge, d’un homme d’affaires du nom de René Langlois, lancé dans la commercialisation des OGM (nous sommes en 1989 et le bloc de l’Est va bientôt «intéresser» les banques suisses), pour s’allier ensuite à la non moins ambitieuse Svetlana, transfuge tchèque occupant un haut rang à l’UBS de Genève, pour une passion amoureuse de «pirates» à la Bonnie & Clyde, ou Sailor et Lula, en plus touchants.</p> <p>Bien campés physiquement et psychologiquement, les personnages du roman se déplacent sur des territoires et dans des décors qui font l’objet de véritables «tours du propriétaire», avec foison de détails, que ce soit pour décrire les origines du parc des Eaux-Vives devenu haut-lieu de tennis (avec une digression sur la fondation du tunnel du Gothard et le rôle particulier d’un Louis Favre en capitaliste cynique), les belles demeures de Cologny et les souterrains de l’UBS, tel club libertin ou telle prison lyonnaise aux mœurs infernales, tel alpage corse où un parrain de la mafia locale trait sa chèvre auprès d’une enfant handicapée, ou tel salon des Port-Francs de Genève où transitent les chefs-d’œuvre de la peinture, dont une représentation du Grammont par Ferdinand Hodler − le même que j’entrevois de ma fenêtre à l’instant de rédiger ces lignes, etc.</p> <h3><strong>Entre réalité et fantasmes, kitsch et poésie</strong></h3> <p>En invoquant la «réalité», Ramuz n’en appelait pas à une littérature de reportage ou de témoignage au premier degré, réservée au journalisme, à l’essai ou à ce qu’on appelé plus récemment les «récits de vie». Ramuz n’était pas le Zola désiré de Dimitrijevic, mais un poète du réel et du tragique entré en littérature avec un petit roman déchirant, intitulé <em>Aline</em>, qui n’a pas fait le «buzz» à l’époque mais reste un modèle de probité «poétique», comme le dit d’ailleurs Joseph Incardona à sa façon.</p> <p>Celui-ci, issu de milieu modeste comme une Janine Massard ou une Mireille Kuttel (Piémontaise d’origine dont il faudrait redécouvrir les romans) est un «secundo» ritalo-suisse de la génération d’après 68 (il est né le lendemain, en 69) dont la culture personnelle, littéraire ou philosophique est très mélangée et peu académique. Je ne le connais à vrai dire que par son dernier livre, mais celui-ci en dit long, entre les lignes, et par la voix même de l’auteur qui se pointe au coin de pages comme le malicieux Hitchcok à l’écran…</p> <p>Or que nous montre ce bon Joseph de la réalité suisse «au-dessus de tout soupçon» de notre ami Jean Ziegler? Rien que nous ne sachions déjà plus ou moins après une flopée de «reportages», précisément, mais sa façon de jouer d’effets de réel, pas loin des procédés d’un Michel Houellebecq, et de rallier le drapeau noir du «mauvais genre» littéraire, constitue sa base logistico-esthétique, avec la vigueur et le savoir d’un grand «pro» qui sait, par ailleurs, ce qui distingue un Ramuz d’un critique de gauche style Niklaus Meienberg, ou un Balzac d’un auteur de polars à la Marc Voltenauer ou à la Nicola Feuz.</p> <p>S’il joue le jeu du genre, Incardona vise plus haut, comme son protagoniste croit «voir grand» en s’imaginant plein aux as et donc tout-puissant. Mais Joseph sait d’avance que son Aldo va se casser la gueule, et de même le feuilleton parfaitement agencé qu’il nous balance n’est-il qu’un moyen de nous dire autre chose, par quoi il rejoint en somme un Georges Halas pointant le «meurtre sous les géraniums», le Ramuz génial de <em>Circonstances de la vie</em> ou de <em>La vie de Samuel Belet</em>, voire le Dürrenmatt de <em>La Promesse</em> «relu » par Sean Penn… Tout cela qui semble très loin du Cercle littéraire lausannois ou de la Société de lecture genevoise, mais qui ressortit néanmoins, «quelque part», à la littérature…</p> <h3><strong>L’Avenir étant dans la bonté humaine…</strong></h3> <p>Dernier cadeau de la nuit, hier soir, cueilli dans le recueil récemment paru du poète italo-genevois Vince Fasciani: «Je fais partie d’une lignée de gens de peu / qui se sont frayé un passage à travers la bonté ». Tout à fait valable, au fond, pour le sieur Incardona, disciple de Carver et de Tchekhov sous ses airs de mec à la coule.</p> <p>La <em>story</em> visible de <em>La soustraction des possibles</em> passe donc par les péripéties violentes, et répétitives à vomir, des séries actuelles les plus addictives, avec intervention de caïds atroces, exécutions sommaires et révérence finale des ordures manucurées de la BSG qui s’en tirent comme les fossoyeurs de Swissair & Co à parachutes dorés. Effet de réel, page 161, avec la liste (incomplète) des crimes imputables à une banque que nous ne nommerons pas (le sigle UBS n’est connu que de la rédaction), entre comptes en déshérence (1995) et condamnation de la banque en question pour blanchiment aggravé de fraude fiscale (2019), avec une quinzaine d’autres scandales, et ne vous demandez pas si la réalité dépasse la fiction : cette réalité-là n’est qu’un fiction, la vraie réalité du roman relevant des affects et de la bonté possible.</p> <p>En bonus sous le feuilleton: une espèce de poème râpeux genre Tom Waits, avec l’accent d’un sale gamin des Pâquis. Vous avez dit chef-d’œuvre? Pas encore. Trop de trucs encore et de tics, comme Balzac ou Simenon avant leurs contributions respectives majeures à la «comédie humaine». Mais la pâte est toute bonne, et la papatte de l’écrivain est d’un vrai dur, surtout dur à la tâche et la passion d’un pur.</p> <h4><strong><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1627456137_38aab8bc3ecceea5898c1b0cefd5615efc62cbfb_364_front_239x364.jpeg" class="img-responsive img-fluid normal " width="221" height="336" /><br />«La soustraction des possibles», Joseph Incardona, Editions Finitude, 400 pages.</strong></h4>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'incardona-peint-en-tres-noir-un-monde-qu-il-reve-meilleur', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 510, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 6, 'person_id' => (int) 675, 'post_type_id' => (int) 1, 'poster_attachment' => null, 'editions' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Edition) {} ], 'tags' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 4 => object(App\Model\Entity\Tag) {} ], 'locations' => [], 'attachment_images' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'attachments' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'comments' => [], 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ '*' => true, 'id' => false ], '[dirty]' => [], '[original]' => [], '[virtual]' => [], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [], '[invalid]' => [], '[repository]' => 'Posts' } $relatives = [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 5282, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => false, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => null, 'readed' => null, 'subhead' => null, 'title' => 'Lire «Vivre», de Boualem Sansal, participe de sa libération', 'subtitle' => 'L’arrestation du grand écrivain algérien, le 16 novembre dernier à Alger, relève à la fois de l’infamie et de la logique d’Etat, s’agissant d’un opposant déclaré plus virulent même qu’un Salman Rushdie. 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Est-il vrai qu’il aurait apprécié le fait de ne pas être maltraité? Est-il vrai qu’il aurait affirmé ces derniers temps qu’il en avait assez de vivre? Et que voit-il par la fenêtre, si tant est que les murs qui l'enferment soient pourvus de la moindre ouverture? 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Mais pas du tout : maintes fois, en effet, l’auteur du redoutable 2084 l’a répété: ce n’est pas à l’islam qu’il en veut, mais à l’islamisme et à l’instrumentalisation sociale et politique du «message» musulman, comparable à l’instrumentalisation faite par tous les fanatiques césaro-papistes des confessions diverses, etc.</p> <p>Freeman Dyson rend hommage à l’auteure de science-fiction Madeleine L'Engle, très prisée des enfants et des ados anglo-saxons (elle a écrit une trentaine de romans les visant en priorité) et qui accorde, en chrétienne atypique, plus d’importance aux scientifiques qu’aux théologiens, coupables, selon elle, de limiter la notion de Dieu alors que «les scientifiques, avec leurs questions, avec leur émerveillement face à la gloire de l’Univers», l’ont aidée dans sa quête de méditation et de contemplation, tant il est vrai que les spécialistes de biologie cellulaire ou d'astrophysique traitent de la nature de l'existence même au fil de questions d’ordre théologique: «quelle est la nature du temps? 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Vous allez vous retrouver en vos jeunes années, quand vous vous interrogiez, graves filles et garçons, sur la place de l’homme dans l’Univers, le mystère de son origine et de ses fins dernières, l’éventualité de présences cousines dans les galaxies poches ou lointaines, enfin tout le branlebas de questions relevant de la religion, de la philosophie, de la métaphysique ou de la science-fiction.</p> <p>Si celle-ci a été «votre truc» entre 13 et 33 ans, soit par les livres de Bradbury et d’Asimov, soit par le cinéma avec Spielberg et autres odyssées de l’espace, vous vous retrouverez en pays de connaissance avec la partie explicitement conjecturale et truffée de trouvailles épatantes de <em>Vivre</em>, schématique à souhait et «limite» naïve quoique frisant le comique burlesque à la Monty Python dans son arborescence «scientifique», avant que le roman, apparemment tout différent des autres ouvrages de Boualem Sansal, ne vous ramène au cœur des préoccupations actuelles de l’écrivain: inquiétudes sociétales (fanatisme religieux et wokisme au menu) et chocs entre cultures et continents, monde en pleine bascule géopolitique et troisième guerre mondiale redoutée, fin des haricots et fuite sur Mars dans la fusée des Musk Brothers & Co, etc.</p> <p>Or je lis plus précisément, dans <em>Vivre</em>, que «les gouvernements n’ont jamais d’autre but que de satisfaire l’appétit insatiable des oligarchies et des camarillas qui les constituent»; et tout à l’heure je lisais ces lignes qui sont comme le «pitch» de ce formidable récit se jouant des codes «populaires» de la SF pour développer une réflexion voltairienne sur l’état actuel de nos sociétés et les hantises et autres fantasmes de survie de nos semblables divers: «Une entité de l’espace vous contacte télépathiquement pour vous annoncer que la Terre va disparaître, frappée par un phénomène naturel, est-il précisé, et qu’il vous incombe personnellement de désigner ceux qui seront sauvés. Elle met à votre disposition un vaisseau qui peut emporter trois milliards de passagers, sur les huit que compte la planète. En les tassant, en les affamant un peu, vous prendrez peut-être un milliard de plus. Messieurs les religieux, nous voulons apprendre de vous. La question est celle-ci: que ferez-vous?» Quelqu’un devait commencer par lancer la discussion, ce fut l’imam. Je m’y attendais, c’est un corps d’élite, les imams, toujours prêts à bondir et à rendre service, comme les scouts »...</p> <h3><strong>Un hymne insolent à la vie libre !</strong></h3> <p>Sacré Boualem, qui fait passer le salut des Terriens par le truchement de la connexion onirique – et quel régal panaché que la suite des réponses de l’imam, du rabbin, du curé et de l’hindouiste vegan, quelle fiesta d’ironie sagace et de lucidité débonnaire quoique sans illusion, aboutissant à une conclusion d’un surprenant optimisme, à savoir que «l’avenir appartient aux gens de bien», ce que Sansal commente tranquillement (je l’imagine plutôt tranquille, ce matin, dans sa réclusion), en ces termes: «Tiens, je crois que c’est ça la bonne définition de cet objet non identifié qu’est l’humanité, que je cherche depuis des années, L’humanité, ce sont ces gens de bien qui, vaille que vaille, assurent le service de la vie»…</p> <p>Aussi bien ne me fais-je pas trop de souci, malgré tout, pour ce cher homme dont la force morale, l’intelligence et l’immense savoir «humain», modulés dans ses livres si variés de forme – jusqu’à ce roman d’anticipation parodiant joyeusement la littérature conjecturale pour ados de tous les âges – me font penser qu’il vit son incarcération actuelle, par les morts-vivants du pouvoir, comme une péripétie parmi d’autres, mais combien révélatrice pour nous qui en découvrons les effets de solidarité massive autant que les retombées de haine et d’abjection.</p> <p>Vivre, oui, et d’abord lire ce livre tonique, hymne insolent et généreux à la vie libre (!) au lieu de radoter dans le vide des idéologies «divinement» meurtrières. Boualem Sansal sera-t-il libre à Noël? C’est évidemment à espérer, même si cette fête d’«infidèles» tourne au marché de pacotille. Et les Terriens méritent-ils d’ailleurs d’être sauvés! Salut le mystère!</p> <hr /> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1733404354_g08284.jpg" class="img-responsive img-fluid normal " width="161" height="235" /></p> <p><strong>Boualem Sansal. <em>Vivre. Le compte à rebours</em>. </strong><strong>Gallimard, 2024, 233p. </strong></p> <p><strong><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1733404445_laviedanslunivers.jpg" class="img-responsive img-fluid normal " width="156" height="248" /></strong></p> <p><strong>Freeman J. Dyson. </strong><strong><em>La vie dans l’univers. Réflexions d’un physicien. </em></strong><strong>Gallimard, Bibliothèques des sciences humaines, 2009. 255p.</strong></p> <hr /> <h2><strong>Entretien avec Boualem Sansal, en 2006 </strong></h2> <p><strong> </strong><strong>(paru dans le quotidien <em>24 heures </em>le 9 mai 2006)</strong></p> <p>Boualem Sansal est l’une des grandes voix de la littérature algérienne francophone, dont les romans ressaisissent la tragique et complexe réalité contemporaine avec une porosité et une faconde sans pareilles. Après <em>Le serment des barbares</em> (1999), <em>L’enfant fou de l’arbre creux</em> (2000) et <em>Dis-moi le paradis</em> (2003), son quatrième roman, Harraga, s’attache à deux destinées de femmes avec autant d’empathie que de lucidité révoltée. Au printemps 2006, cet auteur qui a «mal à l’Algérie» adressait une lettre ouverte à ses compatriotes intitulée <em>Poste restante: Alger,</em> d’un courage civique impressionnant. Nous avions rencontré l’auteur après cette parution...</p> <p><strong>Comment, Boualem Sansal, vivez-vous aujourd’hui en Algérie?</strong></p> <p>Plutôt mal, après une amnistie marquant la réhabilitation des criminels d’hier, qui se retrouvent à plastronner en ville avec une arrogance extraordinaire. La chape d’un ordre moral intolérant se fait de nouveau ressentir, parallèlement à la réintroduction de l’enseignement religieux et à l’occupation des mosquées. Or la population semble l’accepter, tant elle est respectueuse de l’islam.</p> <p><strong>Quelle a été votre éducation personnelle?</strong></p> <p>Je suis né dans une famille où l’on pensait que l’instruction était essentielle. Ayant perdu mon père très tôt, j’ai été soumis, avec mes trois frères, à la discipline rigoureuse d’un grand-père chef de gare qui avait fait la guerre de 14-18, laïc et profondément attaché à la France et à sa culture. Après un début d’études classiques en latin-grec, j’ai cependant bifurqué sur une formation d’ingénieur, l’Algérie de l’indépendance ayant besoin de bâtisseurs et de techniciens plus que de «beaux parleurs», comme on disait alors. C’est pourquoi je me suis retrouvé, en 1992, au poste de Directeur de l’industrie, où m’avait appelé un condisciple devenu ministre.</p> <p><strong>Qu’avez-vous appris dans les allées du pouvoir?</strong></p> <p>Ce qui m’a le plus frappé, c’est la morgue, la corruption, les luttes entre clans et, d’une manière générale, le mépris de la population, ainsi qu’une formidable incompétence des apparatchiks du parti unique.</p> <p><strong>En avez-vous un exemple?</strong></p> <p>Le plus éloquent est ce rapport qu’un ministre m’a chargé d’établir, sur les relations entre l’endettement des pays du Sud méditerranéen et leur niveau de développement. Me fiant aux chiffres de la Banque mondiale et du FMI, j’ai constaté que les pays les plus endettés à régimes autoritaires, à commencer par l’Égypte, étaient aussi les plus déficients en matière de développement, alors qu’Israël, super-endetté, affichait un développement constant. Ce constat a mis le ministre en fureur, qui m’a prié de supprimer la mention d’Israël, ce que l’honnêteté m’interdisait. Je lui ai donc proposé ma démission immédiate, qui a été refusée en même temps qu’on enterrait le rapport. Par la suite, mes positions et mes livres m’ont valu d’être limogé.</p> <p><strong>Comment en êtes-vous venu au roman?</strong></p> <p>Cela s’est fait comme ça, pendant la terreur islamiste qui nous cloîtrait. Or que fait-on dans ces conditions ? On tourne en rond, on remâche les dernières horreurs du jour, on prend des notes sur ce qu’on observe, et tout à coup le « roman » est là, dicté par la vie. C’est ainsi qu’est né Le serment des barbares.</p> <p><strong>Décrire la réalité si fidèlement, comme l’a fait aussi votre ami Rachid Mimouni, ne représentait-il pas un risque?</strong></p> <p>Bien entendu, mais sortir dans la rue était déjà risqué. A propos de mon ami Rachid, la nuit suivant son enterrement en Algérie, des fanatiques ont exhumé son cadavre pour le livrer aux chiens. Ce n’est pas du roman : c’est la réalité, comme <em>Harraga </em>relève d’une réalité vécue.</p> <p><strong>Dans votre lettre ouverte aux Algériens, vous vous en prenez violemment à l’amnistie…</strong></p> <p>Pour aboutir à une vraie réconciliation, il fallait enquêter et rendre la justice. Je ne suis pas contre le pardon, au contraire, mais cette amnistie était une insulte aux victimes et un déni de justice.</p> <p><strong>Pensez-vous être entendu? Et menacé?</strong></p> <p>On m’a appris récemment que le livre faisait l’objet d’une mesure de censure, mais de nombreux compatriotes partagent mon point de vue, même si mes adversaires me font passer pour un « agent de la France » Menacé ? L’Algérie est un grand pays, dans lequel je reste à peu près invisible. Par ailleurs, comme Mimouni, je suis protégé par ma notoriété. 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Celle-ci l’éloigne-t-elle du réel, ou lui permet-elle au contraire de se libérer du «nombrilisme» et de mieux accéder à l’«universel»?</p> <p>De telles questions auront peut-être «fait débat», cet hiver-là, tandis qu’il neigeait sur Vilnius, à tel festival de littérature auquel venait de participer Sarah Popp (quel nom, n’est-ce pas? pour une auteure, autrice, auteuse ou autorelle en langage d’inclusion), qui se réjouissait de revenir en Suisse pour y retrouver, à la veille de son cinquante-neuvième anniversaire, son compagnon Tobie, aussi à l’aise à son piano que devant les fourneaux, et leur fille Matild associée à une mini-troupe d’animateurs de robots-marionnettes au goût dernier cri de la nouvelle génération théâtrale.</p> <p>Alors quoi, un roman de plus sur les «problèmes du roman»? Mais quelle barbe! Et pourtant non: grâce à la neige et au gel, aux avions cloués au sol et donc à l’imprévu illico salué par Tobie («accepte ce qui arrivera» lui chante-t-il au téléphone quand elle lui expose son retard de deux ou trois jours), et Sarah de se réjouir de l’imprévisible occasion de vivre elle ne sait encore quoi alors que, de la fenêtre du bus qui la ramène de l’aéroport en ville, elle voit sans le voir un grand camion blanc dont la cabine figure une petite maisonnette, prélude à un conte à dormir debout. 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Ainsi se met-elle bel et bien à écrire des fragments de sa «vraie vie» sur la table de la maisonnette roulante, tandis que la romancière module sa propre vision des choses, où la poésie se joue allègrement des règles de la théorie, autant que des conventions morales.</p> <h3>Au dam du «poulailler paroissial»</h3> <p>Comment une romancière d’aujourd’hui doit-elle parler de la violence faite aux femmes, ou des humiliations subies au nom de la morale courante? Le kidnappeur de Sarah Popp, comme les gens «adultes et responsables», croit avoir la réponse, enjoignant la romancière de témoigner comme au commissariat ou au tribunal – aujourd’hui aux assises des médias friands d’accusations – «on veut des noms!» </p> <p>Or ce n’est pas minimiser les souffrances que de les confronter à la complexité de la vie, jamais réductibles aux seules sentences morales. Dans le roman de Rose-Marie Pagnard, en tout cas, la morale des bien-pensants, de telle tante bigote ou de tels voisins malveillants dans un village «gonflé de méchanceté», pèse lourdement sur les jugements portés sur telle jeune fille libre ou, d’une génération antérieure, sur telle «fille-mère» passible de la prison. Mais Sarah Popp n’est pas du genre, en tant que romancière, à se contenter d’une «dénonciation» univoque. Est-ce dire qu’elle fuit dans l’équivoque? Pas non plus. Il faudrait alors, par manière de réponse, détailler le roman et ses rebondissements, les multiples facettes de ses personnages, «raconter» le vieil Anders et le pourquoi de sa révolte remontant au calvaire social de sa mère, raconter celle-ci et sa propre façon de se libérer voire de se fiche de son passé, raconter l’amour fou de Sarah et de Tobie en butte au qu’en dira-t-on, raconter la sensualité persistante de Sarah la quasi sexa, raconter Sarah et sa fille, Sarah et l’angoisse, Sarah et les maux - Sarah et les mots, Sarah et la magie des objets, Sarah et la fantaisie de la fée-sorcière Rose-Marie.</p> <p>Rose-Marie Pagnard est poète autant sinon plus qu’elle est romancière, à savoir que chez elle les mots et les images passent avant les «scènes à faire», qui tissent une sorte de tapisserie «musicale» aux détails reproduisant à foison la joyeuse profusion de la réalité.</p> <h3>Féerie kaléidoscopique</h3> <p>Et c’est alors qu’il faudrait citer à qui mieux mieux, quitte à tirer «la ficelle folie». Citer le «sac de tristesse» de l’ancien voisin bûcheron, «vieux mais propre» et fleurant le savon, le bois et le citron. Citer le syndrome des jambes de Sarah dont les cauchemars l’empêchent de dormir car «chaque nuit est un piège», telle étant la part d’ombre de ce tourbillon lumineux de neige comme produite par une usine à farine. Citer les vitrines, les concerts, les biscuits de Noël qui peut être «poussent les pensées vers la mélancolie». Citer la «tête osseuse» à «noblesse de cheval» du faux ogre estimant qu’on est tous des «maltraités de la vie». Citer le «cœur explosif» du passé de Sarah entrevu par Tobie, lequel inspire celle-ci quand il rage. Citer le souvenir pénible du «poulailler paroissial» de la mesquine petite ville. Citer les deux enfants morts emportés par le père dans un carton à chaussures – «il faut beaucoup de calme et de propreté pour que ces faits révèlent leur beauté». Citer la beauté partout quand on a l’âme clame et propre à l’écart des «bandits en soutanes», ou citer par la fenêtre du bus les bonds de dauphins que suggèrent les ondulations d’un pipeline russe violet sur fond de neige, citer la forêt qui «se serre autour de l’histoire» avec «cette petite histoire humaine à l’intérieur», etc.</p> <p>Rose-Marie Pagnard a l’âge des seniors et la grâce des enfants, ou plutôt de l’enfance en tant qu’instance de l’imagination sans âge, et c’est à l’enfance grave des contes que la fugue dans la neige lituanienne de <i>L’enlèvement de Sarah Popp</i> fait penser, à l’enfance tissée d’émerveillements primesautiers et d’effrois secrets, à ce qui nous reste de bonne rage vivace après les déceptions et les larmes, à ce qui relance notre joie. </p> <p>Dans ce conte foisonnant qui ressemble si fort à la vie, peut-être même plus réel qu’elle, il y aurait, au conditionnel de l’enfance, un poney cinquantenaire aux yeux bleus, un drôle de type nommé Robert Louis Stevenson comme le conteur fameux mort aux îles Samoa d’un AVC après avoir fait rêver les jeunesses du monde à son île au trésor, un beau garçon surnommé Chasseur qui se fait draguer «grave» par Sarah, laquelle n’est plus à la fin qu’une poussière géante ou qu’une araignée en chocolat sous le balai de la mémoire passée et future, avec les mots de Rose-Marie Pagnard, fée et sorcière-sourcière emmêlée dans ses pinceaux et autres stylos dans sa féerie évoquant «une danse de Lapons endormis», lapins d’Alice et compagnie, sous les étoiles dont les noms (Chevelure de Bérénice ou Petit Lion) «valent le coup de vivre cent ans», enfin Sarah, agitant son kaléidoscope, se dit comme ça, «qu’il ne lui est pas nécessaire de tout comprendre, seulement de vivre et d’être amie de l’imagination».</p> <hr /> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1732184054_zoelenlevementdesarahpoppcopie.jpg" class="img-responsive img-fluid left " width="200" height="298" /></p> <h4>«L’enlèvement de 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Ainsi Douglas Kennedy, compose-t-il un patchwork où la tendresse généreuse le dispute à la critique du «râleur-né» de l’East Village new yorkais. 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Ca va? Pas trop de bavardages»), du <i>Bel été</i> (prix Strega en juin 1950, consécration à peine relevée par les médias sauf à Turin), <i>Entre femmes seules </i>aux si profondes intuitions psychologiques, <i>Le Métier de vivre</i> à de multiples reprises et la correspondance de l’écrivain d’où l’auteur tire la page saisissante, à valeur d’autoportrait, d’une lettre à Fernanda Pivano, le 25 octobre 1950, où figurent ces mots d’une si terrible lucidité: «Or P. qui sans doute est un solitaire parce qu’en grandissant il a compris qu’on ne peut rien faire qui vaille sinon loin du commerce du monde, est le martyr de ces contradictions. Il veut être seul – et il est seul –, mais il veut l’être au milieu d’un cercle qui le sache (…) P. appelle même tout cela besoin d’expression, de communication, de communion; sa privation, tragédie de la solitude, incommunicabilité des âmes, et ainsi de suite. Que pourra faire un tel homme devant l’amour?»</p> <p>Enfin Pierre Adrian a retrouvé à Rome, géant nonagénaire, le dernier compagnon vivant de Pavese au nom de Franco Ferrarotti, qui nous vaut les pages les plus émouvantes <i>d’Hôtel Roma</i>, avec l’évocation des funérailles de Pavese, dont le cercueil fut suivi par des centaines de personnes, le message bouleversant du jeune Italo Calvino, atterré par la mort de son ami, et une conclusion qui oriente l’ensemble de l’ouvrage dans le même sens que les derniers mots de Pavese, le 18 août 1950: «Un clou chasse l’autre. Mais quatre clous font une croix. Mon rôle public, je l’ai accompli – j’ai fait ce que je pouvais. J’ai travaillé, j’ai donné de la poésie aux hommes, j’ai partagé la peine de beaucoup».</p> <p>Et Pierre Adrian de conclure: «Ferrotti m’avait conforté dans la conviction qu’un écrivain peut être l’ami qui vous réconforte et vous aide à tenir. Pavese était devenu un compagnon de route. Je m’étais lié à lui. 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