Actuel / Mayotte, les noces d’étain
Un marché à Mayotte, devenue département français voilà dix ans. © Stephan Engler
Depuis le lagon, Petite Terre et Grande Terre. © Stephan Engler
Maquillage traditionnel pour un mariage. © Stephan Engler
Répétition de chant, le soir venu. © Stephan Engler
Le 3 avril 2011, Mayotte, un archipel situé dans l'océan Indien entre le continent africain et Madagascar, est officiellement devenu le cent-unième département français et le cinquième d'outre-mer. Retour sur l'histoire mouvementée de l'archipel et sur l'état d'esprit de ses habitants.
Située dans l’Océan Indien le 101e département français fait partie de l’archipel des Comores, situé au nord du Canal du Mozambique. Il possède deux îles principales, Petite Terre et Grande Terre, desservies par un service de barges. Son lagon est l’un des plus grands du monde, peuplé par de nombreuses tortues marines, des dauphins, et des baleines à bosse selon les saisons. Sa population est une société multiculturelle, avec des origines à la fois africaine, malgache, perse, orientale, européenne et arabe. Les insulaires parlent le français mais aussi le kibushi et le shimaoré. Sur le papier Mayotte a tout pour plaire aux voyageurs friands de nouvelles découvertes. Pourtant derrière cette façade se cache de nombreux problèmes.
Le mihrab datant de 1538 à Tsingoni. © Stephan Engler
Une histoire mouvementée
La plus ancienne trace du peuplement de l’île remonte au VIIIème siècle, par les Bantous d’Afrique de l’Est. Ils furent suivis par les marchands arabes et perses qui débarquèrent vers le IXème siècle et apportèrent l’Islam avec eux. Le premier nom de l’archipel leur est dû: «Djazaïr al Qamar» ce qui signifie «les îles de la lune». Au fil du temps le nom changea en Kamar et Comores.
Un des fameux debba à Bouéni. © Stephan Engler
Au XVIème siècle se produit un grand changement, les migrants Chiraziens prennent le pouvoir et s’octroient le titre de sultan. Pendant plusieurs siècles, les îles subissent des guerres sans fin, ce qui vaudra à leurs dirigeants le surnom de «Sultans batailleurs». Les premiers Européens arrivèrent également pendant cette période trouble avec, dans l’ordre d’arrivée, les Portugais, les Hollandais, les Anglais et les Français. Au XVIIIème siècle la guerre régnait toujours à Mayotte avec d’incessantes incursions venant de l’île voisine d’Anjouan. Le dernier sultan, Adriantsouli, cède Mayotte à la France le 25 avril 1841 contre une rente viagère de 1000 piastres.
La prise de possession par la France fut effectuée par le commandant Pierre Passot, 3000 personnes habitent alors l’île. C’est en tant que commandant supérieur de Mayotte qu’il promulgue l’abolition de l’esclavage par l’ordonnance du roi Louis-Philippe le 1er juillet 1847.
Les Grandes Comores deviennent alors protectorat français avant d’être déclarées colonie française en 1912 et TOM (territoire d’outre-mer) en 1946. Lors de l’autonomie de l’archipel 10 ans plus tard la population de Mayotte s’inquiètent de revivre des périodes sombres. Des Mahoraises tel que Zena M’Dere ou Mariama Combo «Mouchoula» se battent au péril de leur vie pendant 30 ans pour un ancrage définitif au sein de la République française. Enfin, en 1976 lors du référendum pour l’indépendance des Comores, Mayotte choisit seule de rester française. Un bon choix, si l'on en croit l'agitation régnant aux Comores, qui subiront 19 coups d'Etat en 24 années d'indépendance.
Pour l’île au lagon, les statuts se succèdent: Collectivité Territoriale de la République Française en 1976, puis en 2000, Collectivité Départementale. La départementalisation était prévue pour fin mars 2011 avec l’élection de la première Assemblée Départementale de Mayotte. Mais cela ne s’est pas passé comme prévu, les conseillers fraîchement élus n’ont pas pu s’entendre et la ministre de l’Outre-Mer n’est pas arrivée à temps… Finalement, c’est le 3 avril 2011 que s’est déroulée la première séance du premier Conseil Départemental de Mayotte, son nouveau statut a pu être acté officiellement ce jour-là.
Femmes portant le M’sindzano, le maquillage traditionnel, à la pêche. © Stephan Engler
Qu’en pensaient les insulaires en 2011?
Pour Moussa, propriétaire d’un magasin de produits de première nécessité dans le sud-ouest de l’île, «cette départementalisation est une bonne chose, car Mayotte, a été maltraitée par les îles voisines, et a toujours voulu rester française. Notre qualité de vie et notre liberté vont augmenter. Cela nous permettra d’aller de l’avant, même si administrativement les problèmes seront nombreux. Sur le plan politique, cela va être très difficile aussi. Un chantier de fou! Il y aura également des problèmes de cadastre. Et puis, qui payera à la place de ceux qui ne pourront pas le faire? Comment les gens vont-ils être informés de tous ces changements? Cela dit, Mayotte ne veut pas de la misère des Comores. La départementalisation, ce n’est pas pour l’argent, mais pour éviter la misère.»
Panneau d’une auto-école. © Stephan Engler
Yvonne, tenancière d’une épicerie doublée d’un tea-room dans le nord, se réjouit, bien qu’elle ne soit pas directement concernée: «Il n’y aura plus de polygamie! Au niveau scolaire, ce sera beaucoup mieux, tant sur le plan de la qualité d’enseignement que de l’uniformisation. L’apprentissage d’un métier sera plus facile. Globalement, ce sera mieux pour les jeunes.»
Un instituteur croisé sur la côte orientale souligne, dans l’ordre, «outre la suppression de la polygamie et l’amélioration de l’enseignement, cela nous permettra d’être des citoyens d’un grand pays. Mais que de complications en vue! Et puis, le fait d’être Français est le seul moyen de lutter contre les clandestins…»
D’autres parlent d’un assainissement de l’île, de l’accès aux fonds européens ou d’un développement pour un tourisme responsable.
La capitale Mamoudzou, une barge et le port. © Stephan Engler
Tour d’horizon 10 ans après
En septembre 2011 déjà, une partie de la population a manifesté dans la rue «contre la vie chère» à Mamoudzou la capitale, car des problèmes déjà récurrents avant la départementalisation n’ont jamais été réglés. Les Mahorais réclamaient le blocage des prix des produits de première nécessité. Il faut savoir que de 2007 à 2011, le coût de la vie a augmenté de 60% à Mayotte — contre «seulement» 15% à La Réunion. Le conflit s’est considérablement durci et a paralysé l’île pendant trois mois, avec à la clef une grève générale, des barrages et des actes de vandalisme. Le 20 décembre 2011, l'intersyndicale et le patronat signent un accord pour mettre fin au conflit. Le texte porte sur la baisse des prix de 11 produits de consommation courante.
Une vendeuse de chaussures sur le marché. © Stephan Engler
Mais ce n’était que le début et de nombreux conflits suivirent, avec leur lot de manifestation et de grèves principalement dans les secteurs de l’éducation nationale et du milieu hospitalier.
Pourtant tout avait bien commencé, la population était enthousiaste et pleine d’espoir. Mais il y a toujours trop d’inégalité sociales et économiques par rapport aux autres départements. A Mayotte le PIB par habitant est de 9.400 euros alors qu’en France métropolitaine il est de 33.400 euros, pourtant les prix augmentent comme partout ailleurs. De nombreux secteurs sont en difficulté, comme la santé, l’éducation nationale, la gestion de l’eau potable... Le chômage explose: en 2019 il était de 22% (contre 7,9% en métropole)! La population souffre et la crise sanitaire n’arrange rien.
Paris décide pour Mamoudzou
La forêt, une ressource importante. © Stephan Engler
C’est le choc des cultures. A Mayotte, depuis des siècles, les insulaires s’appuyaient sur l’autorité et la justice cadiale (un cadi est un juge musulman avec plusieurs casquettes et des fonctions civiles, judiciaires et religieuses). En devenant un département français, l’île savait qu’elle signait la fin de l’autorité des cadis, en tout cas comme juges de paix. Pourtant, étant donnés les nombreux problèmes de violence et d’incivilité, les autorités françaises comptent faire appel à ces derniers pour apaiser la situation. Les habitants, en particulier les jeunes désœuvrés, sont-ils toujours prêts à accorder du crédit à une autorité religieuse?
La prière le vendredi dans une mosquée. © Stephan Engler
L’identité particulière de Mayotte réside aussi dans son patrimoine comme à Tsingoni avec son mihrab datant de 1538, ce qui en fait la plus vielle mosquée de France. Les coutumes ancestrales telle que la pêche au djarifa (avec une toile), le debba, danse réservée aux femmes, le M’sindzano, maquillage traditionnel et écran naturel contre le soleil, la gastronomie mahoraise riches en saveurs que l’on peut déguster chez les fameuses mama brochettis (restaurant locaux) est bien loin du coq au vin. Et n’oublions pas les fastueux mariages qui sont indissociables de l’identité mahoraise.
Des femmes réunies lors d’un mariage à Passamainty. © Stephan Engler
Les mariés dans leur chambre. © Stephan Engler
A part la langue française les insulaires ont peu de points communs avec les Français de la Métropole. Voici quelques exemples parmi tant d’autres: depuis quelques années seulement les rues ont des noms et les maisons sont numérotées, quant au cadastre il n’existait pas... Aussi se pose cette question: comment administre-t-on, de la métropole, un territoire distant de 8000 kilomètres?
Les Mahorais interrogés en 2011 avaient raison, l’application des lois et de l’administration est un vrai casse-tête. Les 256'518 habitants (la population est estimée à plus de 300'000 avec les clandestins) soulèvent plus de points négatifs que positifs et se demandent si la France désire réellement développer leur île.
Le problème de l’insécurité, malgré les efforts fournis, n’est toujours pas résolu aujourd’hui. Celle-ci est liée en grande partie à l’immigration, et ce problème n’est pas nouveau. Des milliers de migrants clandestins chaque année arrivent de l’île comorienne d’Anjouan. Ils traversent les 70 kilomètres qui séparent les îles à leurs risques et périls dans leurs frêles esquifs nommé kwassa kwassa (canots de pêche rapides), dans l’espoir d’une vie meilleure. En février 2021, la Police aux Frontières a effectué 1'860 reconduites à la frontière. Même si Mayotte n’est pas riche, le revenu aux Comores est neuf fois inférieur! Pour les 9'600 (chiffre de 2018) naissances annuelles au CHM (Centre Hospitalier de Mamoudzou) environ 70% sont attribuables à des femmes en situation irrégulière, cela fait de la maternité de Mamoudzou la plus grande d’Europe.
Pourquoi, connaissant tous ces éléments, Paris a-t-il appuyé la départementalisation? Deux atouts de taille ont sûrement fait pencher la balance: la découverte d'un gisement gazier géant au large du Mozambique, à quelques heures de mer de Mayotte, et le fait que la départementalisation entraîne l’augmentation de la surface des ZEE (zones économiques exclusives ultramarines) françaises. Mayotte bénéficie d’un territoire maritime conséquent avec ses 74'000 kilomètres carrés de zone de pêche. Il faut savoir que la France avec son littoral, et grâce à ses départements et collectivités d’outre-mer, est la deuxième puissance maritime du monde derrière les Etats-Unis.
Perspectives et croissance
L’aquaculture, aujourd’hui en liquidation judiciaire faute de soutien. © Stephan Engler
Le développement de Mayotte passe naturellement par l’océan et son lagon de 1'100 kilomètres carrés. Pour cela, il faut structurer les filières de la pêche, développer l’aquaculture, soutenir un tourisme responsable et les formations liées aux métiers de la mer. C’est un atout susceptible d’améliorer considérablement la qualité de vie et de créer des emplois sur l’île. Bien sûr, une volonté politique ainsi que des investissements privés et publics sont nécessaires.
Des pêcheuses de djarifa dans le lagon. © Stephan Engler
En ce qui concerne les Comores, le tourisme peut également améliorer la situation actuelle. D’ailleurs un projet de développement a été lancé en octobre 2020. Selon Karalyn Monteil, spécialiste du programme culture du bureau régional de l’UNESCO pour l’Afrique de l’Est, «il y a une énorme possibilité de développer le tourisme durable aux Comores avec leurs riches patrimoines naturels et culturels. L’UNESCO est confiante qu’au travers de ce projet, les Comores seront mieux placées pour développer et gérer le tourisme dans le respect des orientations de la Convention du patrimoine mondial de l’UNESCO».
Le temps du dialogue est venu pour la France et l’Union des Comores, afin de construire une collaboration durable, car la plupart des problèmes de Mayotte sont régionaux et non pas locaux.
Selon les Anciens, les piliers de la culture mahoraises sont l’homme, les croyances et l’accueil de l’autre. A Mayotte les gens sont attachés à la terre, à Anjouan ils sont plutôt navigateurs et à la Grande Comore éleveurs. Ces populations sont complémentaires et doivent coexister, aucune d’entre elles ne peut subvenir seule à ses besoins. Si l’une d’elles domine, l’équilibre est rompu.
Depuis la plage de l’Anse des Cocotiers, la ville de Sada. © Stephan Engler
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Au fil du temps le nom changea en Kamar et Comores. </p> <p><img src="https://bonpourlatete.com/thumbnails/default/w1200/1616948200_8.jpg" class="img-responsive img-fluid normal " /></p> <h4><em>Un des fameux debba à Bouéni. © Stephan Engler</em></h4> <p>Au XVI<sup>ème</sup> siècle se produit un grand changement, les migrants Chiraziens prennent le pouvoir et s’octroient le titre de sultan. Pendant plusieurs siècles, les îles subissent des guerres sans fin, ce qui vaudra à leurs dirigeants le surnom de «Sultans batailleurs». Les premiers Européens arrivèrent également pendant cette période trouble avec, dans l’ordre d’arrivée, les Portugais, les Hollandais, les Anglais et les Français. Au XVIII<sup>ème</sup> siècle la guerre régnait toujours à Mayotte avec d’incessantes incursions venant de l’île voisine d’Anjouan. Le dernier sultan, Adriantsouli, cède Mayotte à la France le 25 avril 1841 contre une rente viagère de 1000 piastres. </p> <p>La prise de possession par la France fut effectuée par le commandant Pierre Passot, 3000 personnes habitent alors l’île. C’est en tant que commandant supérieur de Mayotte qu’il promulgue l’abolition de l’esclavage par l’ordonnance du roi Louis-Philippe le 1er juillet 1847. </p> <p>Les Grandes Comores deviennent alors protectorat français avant d’être déclarées colonie française en 1912 et TOM (territoire d’outre-mer) en 1946. Lors de l’autonomie de l’archipel 10 ans plus tard la population de Mayotte s’inquiètent de revivre des périodes sombres. Des Mahoraises tel que Zena M’Dere ou Mariama Combo «Mouchoula» se battent au péril de leur vie pendant 30 ans pour un ancrage définitif au sein de la République française. Enfin, en 1976 lors du référendum pour l’indépendance des Comores, Mayotte choisit seule de rester française. Un bon choix, si l'on en croit l'agitation régnant aux Comores, qui subiront 19 coups d'Etat en 24 années d'indépendance. </p> <p>Pour l’île au lagon, les statuts se succèdent: Collectivité Territoriale de la République Française en 1976, puis en 2000, Collectivité Départementale. La départementalisation était prévue pour fin mars 2011 avec l’élection de la première Assemblée Départementale de Mayotte. Mais cela ne s’est pas passé comme prévu, les conseillers fraîchement élus n’ont pas pu s’entendre et la ministre de l’Outre-Mer n’est pas arrivée à temps… Finalement, c’est le 3 avril 2011 que s’est déroulée la première<sup> </sup>séance du premier Conseil Départemental de Mayotte, son nouveau statut a pu être acté officiellement ce jour-là.</p> <p><img src="https://bonpourlatete.com/thumbnails/default/w1200/1616947929_16.jpg" class="img-responsive img-fluid normal " /></p> <h4><em>Femmes portant le M’sindzano, le maquillage traditionnel, à la pêche. © Stephan Engler</em></h4> <h3>Qu’en pensaient les insulaires en 2011? </h3> <p>Pour Moussa, propriétaire d’un magasin de produits de première nécessité dans le sud-ouest de l’île, «<em>cette départementalisation est une bonne chose, car Mayotte, a été maltraitée par les îles voisines, et a toujours voulu rester française. Notre qualité de vie et notre liberté vont augmenter. Cela nous permettra d’aller de l’avant, même si administrativement les problèmes seront nombreux. Sur le plan politique, cela va être très difficile aussi. Un chantier de fou! Il y aura également des problèmes de cadastre. Et puis, qui payera à la place de ceux qui ne pourront pas le faire? Comment les gens vont-ils être informés de tous ces changements? Cela dit, Mayotte ne veut pas de la misère des Comores. La départementalisation, ce n’est pas pour l’argent, mais pour éviter la misère.</em>»</p> <p><img src="https://bonpourlatete.com/thumbnails/default/w1200/1616947988_12.jpg" class="img-responsive img-fluid normal " /></p> <h4><em>Panneau d’une auto-école. © Stephan Engler</em></h4> <p>Yvonne, tenancière d’une épicerie doublée d’un tea-room dans le nord, se réjouit, bien qu’elle ne soit pas directement concernée: «<em>Il n’y aura plus de polygamie! Au niveau scolaire, ce sera beaucoup mieux, tant sur le plan de la qualité d’enseignement que de l’uniformisation. L’apprentissage d’un métier sera plus facile. Globalement, ce sera mieux pour les jeunes.</em>»</p> <p>Un instituteur croisé sur la côte orientale souligne, dans l’ordre, «<em>outre la suppression de la polygamie et l’amélioration de l’enseignement, cela nous permettra d’être des citoyens d’un grand pays. Mais que de complications en vue! 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Le conflit s’est considérablement durci et a paralysé l’île pendant trois mois, avec à la clef une grève générale, des barrages et des actes de vandalisme. Le 20 décembre 2011, l'intersyndicale et le patronat signent un accord pour mettre fin au conflit. Le texte porte sur la baisse des prix de 11 produits de consommation courante.</p> <p><img src="https://bonpourlatete.com/thumbnails/default/w1200/1616948081_7.jpg" class="img-responsive img-fluid normal " /></p> <h4><em>Une vendeuse de chaussures sur le marché. © Stephan Engler</em></h4> <p>Mais ce n’était que le début et de nombreux conflits suivirent, avec leur lot de manifestation et de grèves principalement dans les secteurs de l’éducation nationale et du milieu hospitalier. </p> <p>Pourtant tout avait bien commencé, la population était enthousiaste et pleine d’espoir. Mais il y a toujours trop d’inégalité sociales et économiques par rapport aux autres départements. A Mayotte le PIB par habitant est de 9.400 euros alors qu’en France métropolitaine il est de 33.400 euros, pourtant les prix augmentent comme partout ailleurs. De nombreux secteurs sont en difficulté, comme la santé, l’éducation nationale, la gestion de l’eau potable... Le chômage explose: en 2019 il était de 22% (contre 7,9% en métropole)! La population souffre et la crise sanitaire n’arrange rien. </p> <h3>Paris décide pour Mamoudzou</h3> <p><img src="https://bonpourlatete.com/thumbnails/default/w1200/1616947337_5.jpg" class="img-responsive img-fluid normal " /></p> <h4><em>La forêt, une ressource importante. © Stephan Engler</em></h4> <p>C’est le choc des cultures. A Mayotte, depuis des siècles, les insulaires s’appuyaient sur l’autorité et la justice <em>cadiale</em> (un cadi est un juge musulman avec plusieurs casquettes et des fonctions civiles, judiciaires et religieuses). En devenant un département français, l’île savait qu’elle signait la fin de l’autorité des cadis, en tout cas comme juges de paix. Pourtant, étant donnés les nombreux problèmes de violence et d’incivilité, les autorités françaises comptent faire appel à ces derniers pour apaiser la situation. Les habitants, en particulier les jeunes désœuvrés, sont-ils toujours prêts à accorder du crédit à une autorité religieuse? </p> <p><img src="https://bonpourlatete.com/thumbnails/default/w1200/1616947429_17.jpg" class="img-responsive img-fluid normal " /></p> <h4><em>La prière le vendredi dans une mosquée. © Stephan Engler</em></h4> <p>L’identité particulière de Mayotte réside aussi dans son patrimoine comme à Tsingoni avec son mihrab datant de 1538, ce qui en fait la plus vielle mosquée de France. Les coutumes ancestrales telle que la pêche au djarifa (avec une toile), le debba, danse réservée aux femmes, le M’sindzano, maquillage traditionnel et écran naturel contre le soleil, la gastronomie mahoraise riches en saveurs que l’on peut déguster chez les fameuses mama brochettis (restaurant locaux) est bien loin du coq au vin. Et n’oublions pas les fastueux mariages qui sont indissociables de l’identité mahoraise.</p> <p><img src="https://bonpourlatete.com/thumbnails/default/w1200/1616947468_13.jpg" class="img-responsive img-fluid normal " /></p> <h4><em>Des femmes réunies lors d’un mariage à Passamainty. © Stephan Engler</em></h4> <p><em><img src="https://bonpourlatete.com/thumbnails/default/w1200/1616947650_14.jpg" class="img-responsive img-fluid normal " /></em></p> <h4><em>Les mariés dans leur chambre. © Stephan Engler</em></h4> <p>A part la langue française les insulaires ont peu de points communs avec les Français de la Métropole. Voici quelques exemples parmi tant d’autres: depuis quelques années seulement les rues ont des noms et les maisons sont numérotées, quant au cadastre il n’existait pas... Aussi se pose cette question: comment administre-t-on, de la métropole, un territoire distant de 8000 kilomètres?</p> <p>Les Mahorais interrogés en 2011 avaient raison, l’application des lois et de l’administration est un vrai casse-tête. Les 256'518 habitants (la population est estimée à plus de 300'000 avec les clandestins) soulèvent plus de points négatifs que positifs et se demandent si la France désire réellement développer leur île. </p> <p>Le problème de l’insécurité, malgré les efforts fournis, n’est toujours pas résolu aujourd’hui. Celle-ci est liée en grande partie à l’immigration, et ce problème n’est pas nouveau. Des milliers de migrants clandestins chaque année arrivent de l’île comorienne d’Anjouan. Ils traversent les 70 kilomètres qui séparent les îles à leurs risques et périls dans leurs frêles esquifs nommé kwassa kwassa (canots de pêche rapides), dans l’espoir d’une vie meilleure. En février 2021, la Police aux Frontières a effectué 1'860 reconduites à la frontière. Même si Mayotte n’est pas riche, le revenu aux Comores est neuf fois inférieur! Pour les 9'600 (chiffre de 2018) naissances annuelles au CHM (Centre Hospitalier de Mamoudzou) environ 70% sont attribuables à des femmes en situation irrégulière, cela fait de la maternité de Mamoudzou la plus grande d’Europe.</p> <p>Pourquoi, connaissant tous ces éléments, Paris a-t-il appuyé la départementalisation? Deux atouts de taille ont sûrement fait pencher la balance: la découverte d'un gisement gazier géant au large du Mozambique, à quelques heures de mer de Mayotte, et le fait que la départementalisation entraîne l’augmentation de la surface des ZEE (zones économiques exclusives ultramarines) françaises. Mayotte bénéficie d’un territoire maritime conséquent avec ses 74'000 kilomètres carrés de zone de pêche. Il faut savoir que la France avec son littoral, et grâce à ses départements et collectivités d’outre-mer, est la deuxième puissance maritime du monde derrière les Etats-Unis. </p> <h3>Perspectives et croissance </h3> <p><img src="https://bonpourlatete.com/thumbnails/default/w1200/1616947696_10.jpg" class="img-responsive img-fluid normal " /></p> <h4><em>L’aquaculture, aujourd’hui en liquidation judiciaire faute de soutien. © Stephan Engler</em></h4> <p>Le développement de Mayotte passe naturellement par l’océan et son lagon de 1'100 kilomètres carrés. Pour cela, il faut structurer les filières de la pêche, développer l’aquaculture, soutenir un tourisme responsable et les formations liées aux métiers de la mer. C’est un atout susceptible d’améliorer considérablement la qualité de vie et de créer des emplois sur l’île. Bien sûr, une volonté politique ainsi que des investissements privés et publics sont nécessaires.</p> <p><img src="https://bonpourlatete.com/thumbnails/default/w1200/1616947793_6.jpg" class="img-responsive img-fluid normal " /></p> <h4><em>Des pêcheuses de djarifa dans le lagon. © Stephan Engler</em></h4> <p>En ce qui concerne les Comores, le tourisme peut également améliorer la situation actuelle. D’ailleurs un projet de développement a été lancé en octobre 2020. Selon Karalyn Monteil, spécialiste du programme culture du bureau régional de l’UNESCO pour l’Afrique de l’Est, «il y a une énorme possibilité de développer le tourisme durable aux Comores avec leurs riches patrimoines naturels et culturels. L’UNESCO est confiante qu’au travers de ce projet, les Comores seront mieux placées pour développer et gérer le tourisme dans le respect des orientations de la Convention du patrimoine mondial de l’UNESCO».</p> <p>Le temps du dialogue est venu pour la France et l’Union des Comores, afin de construire une collaboration durable, car la plupart des problèmes de Mayotte sont régionaux et non pas locaux. </p> <p>Selon les Anciens, les piliers de la culture mahoraises sont l’homme, les croyances et l’accueil de l’autre. A Mayotte les gens sont attachés à la terre, à Anjouan ils sont plutôt navigateurs et à la Grande Comore éleveurs. Ces populations sont complémentaires et doivent coexister, aucune d’entre elles ne peut subvenir seule à ses besoins. 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Le dernier sultan, Adriantsouli, cède Mayotte à la France le 25 avril 1841 contre une rente viagère de 1000 piastres. </p> <p>La prise de possession par la France fut effectuée par le commandant Pierre Passot, 3000 personnes habitent alors l’île. C’est en tant que commandant supérieur de Mayotte qu’il promulgue l’abolition de l’esclavage par l’ordonnance du roi Louis-Philippe le 1er juillet 1847. </p> <p>Les Grandes Comores deviennent alors protectorat français avant d’être déclarées colonie française en 1912 et TOM (territoire d’outre-mer) en 1946. Lors de l’autonomie de l’archipel 10 ans plus tard la population de Mayotte s’inquiètent de revivre des périodes sombres. Des Mahoraises tel que Zena M’Dere ou Mariama Combo «Mouchoula» se battent au péril de leur vie pendant 30 ans pour un ancrage définitif au sein de la République française. Enfin, en 1976 lors du référendum pour l’indépendance des Comores, Mayotte choisit seule de rester française. 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Mais cela ne s’est pas passé comme prévu, les conseillers fraîchement élus n’ont pas pu s’entendre et la ministre de l’Outre-Mer n’est pas arrivée à temps… Finalement, c’est le 3 avril 2011 que s’est déroulée la première<sup> </sup>séance du premier Conseil Départemental de Mayotte, son nouveau statut a pu être acté officiellement ce jour-là.</p> <p><img src="https://bonpourlatete.com/thumbnails/default/w1200/1616947929_16.jpg" class="img-responsive img-fluid normal " /></p> <h4><em>Femmes portant le M’sindzano, le maquillage traditionnel, à la pêche. © Stephan Engler</em></h4> <h3>Qu’en pensaient les insulaires en 2011? </h3> <p>Pour Moussa, propriétaire d’un magasin de produits de première nécessité dans le sud-ouest de l’île, «<em>cette départementalisation est une bonne chose, car Mayotte, a été maltraitée par les îles voisines, et a toujours voulu rester française. Notre qualité de vie et notre liberté vont augmenter. 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Et puis, le fait d’être Français est le seul moyen de lutter contre les clandestins…</em>» </p> <p>D’autres parlent d’un assainissement de l’île, de l’accès aux fonds européens ou d’un développement pour un tourisme responsable. </p> <p><img src="https://bonpourlatete.com/thumbnails/default/w1200/1616947216_2.jpg" class="img-responsive img-fluid normal " /></p> <h4><em>La capitale Mamoudzou, une barge et le port. © Stephan Engler</em></h4> <h3>Tour d’horizon 10 ans après</h3> <p>En septembre 2011 déjà, une partie de la population a manifesté dans la rue «contre la vie chère» à Mamoudzou la capitale, car des problèmes déjà récurrents avant la départementalisation n’ont jamais été réglés. Les Mahorais réclamaient le blocage des prix des produits de première nécessité. Il faut savoir que de 2007 à 2011, le coût de la vie a augmenté de 60% à Mayotte — contre «seulement» 15% à La Réunion. Le conflit s’est considérablement durci et a paralysé l’île pendant trois mois, avec à la clef une grève générale, des barrages et des actes de vandalisme. Le 20 décembre 2011, l'intersyndicale et le patronat signent un accord pour mettre fin au conflit. Le texte porte sur la baisse des prix de 11 produits de consommation courante.</p> <p><img src="https://bonpourlatete.com/thumbnails/default/w1200/1616948081_7.jpg" class="img-responsive img-fluid normal " /></p> <h4><em>Une vendeuse de chaussures sur le marché. © Stephan Engler</em></h4> <p>Mais ce n’était que le début et de nombreux conflits suivirent, avec leur lot de manifestation et de grèves principalement dans les secteurs de l’éducation nationale et du milieu hospitalier. </p> <p>Pourtant tout avait bien commencé, la population était enthousiaste et pleine d’espoir. Mais il y a toujours trop d’inégalité sociales et économiques par rapport aux autres départements. A Mayotte le PIB par habitant est de 9.400 euros alors qu’en France métropolitaine il est de 33.400 euros, pourtant les prix augmentent comme partout ailleurs. De nombreux secteurs sont en difficulté, comme la santé, l’éducation nationale, la gestion de l’eau potable... Le chômage explose: en 2019 il était de 22% (contre 7,9% en métropole)! La population souffre et la crise sanitaire n’arrange rien. </p> <h3>Paris décide pour Mamoudzou</h3> <p><img src="https://bonpourlatete.com/thumbnails/default/w1200/1616947337_5.jpg" class="img-responsive img-fluid normal " /></p> <h4><em>La forêt, une ressource importante. © Stephan Engler</em></h4> <p>C’est le choc des cultures. A Mayotte, depuis des siècles, les insulaires s’appuyaient sur l’autorité et la justice <em>cadiale</em> (un cadi est un juge musulman avec plusieurs casquettes et des fonctions civiles, judiciaires et religieuses). En devenant un département français, l’île savait qu’elle signait la fin de l’autorité des cadis, en tout cas comme juges de paix. Pourtant, étant donnés les nombreux problèmes de violence et d’incivilité, les autorités françaises comptent faire appel à ces derniers pour apaiser la situation. Les habitants, en particulier les jeunes désœuvrés, sont-ils toujours prêts à accorder du crédit à une autorité religieuse? </p> <p><img src="https://bonpourlatete.com/thumbnails/default/w1200/1616947429_17.jpg" class="img-responsive img-fluid normal " /></p> <h4><em>La prière le vendredi dans une mosquée. © Stephan Engler</em></h4> <p>L’identité particulière de Mayotte réside aussi dans son patrimoine comme à Tsingoni avec son mihrab datant de 1538, ce qui en fait la plus vielle mosquée de France. Les coutumes ancestrales telle que la pêche au djarifa (avec une toile), le debba, danse réservée aux femmes, le M’sindzano, maquillage traditionnel et écran naturel contre le soleil, la gastronomie mahoraise riches en saveurs que l’on peut déguster chez les fameuses mama brochettis (restaurant locaux) est bien loin du coq au vin. Et n’oublions pas les fastueux mariages qui sont indissociables de l’identité mahoraise.</p> <p><img src="https://bonpourlatete.com/thumbnails/default/w1200/1616947468_13.jpg" class="img-responsive img-fluid normal " /></p> <h4><em>Des femmes réunies lors d’un mariage à Passamainty. © Stephan Engler</em></h4> <p><em><img src="https://bonpourlatete.com/thumbnails/default/w1200/1616947650_14.jpg" class="img-responsive img-fluid normal " /></em></p> <h4><em>Les mariés dans leur chambre. © Stephan Engler</em></h4> <p>A part la langue française les insulaires ont peu de points communs avec les Français de la Métropole. Voici quelques exemples parmi tant d’autres: depuis quelques années seulement les rues ont des noms et les maisons sont numérotées, quant au cadastre il n’existait pas... Aussi se pose cette question: comment administre-t-on, de la métropole, un territoire distant de 8000 kilomètres?</p> <p>Les Mahorais interrogés en 2011 avaient raison, l’application des lois et de l’administration est un vrai casse-tête. Les 256'518 habitants (la population est estimée à plus de 300'000 avec les clandestins) soulèvent plus de points négatifs que positifs et se demandent si la France désire réellement développer leur île. </p> <p>Le problème de l’insécurité, malgré les efforts fournis, n’est toujours pas résolu aujourd’hui. Celle-ci est liée en grande partie à l’immigration, et ce problème n’est pas nouveau. Des milliers de migrants clandestins chaque année arrivent de l’île comorienne d’Anjouan. Ils traversent les 70 kilomètres qui séparent les îles à leurs risques et périls dans leurs frêles esquifs nommé kwassa kwassa (canots de pêche rapides), dans l’espoir d’une vie meilleure. En février 2021, la Police aux Frontières a effectué 1'860 reconduites à la frontière. Même si Mayotte n’est pas riche, le revenu aux Comores est neuf fois inférieur! Pour les 9'600 (chiffre de 2018) naissances annuelles au CHM (Centre Hospitalier de Mamoudzou) environ 70% sont attribuables à des femmes en situation irrégulière, cela fait de la maternité de Mamoudzou la plus grande d’Europe.</p> <p>Pourquoi, connaissant tous ces éléments, Paris a-t-il appuyé la départementalisation? Deux atouts de taille ont sûrement fait pencher la balance: la découverte d'un gisement gazier géant au large du Mozambique, à quelques heures de mer de Mayotte, et le fait que la départementalisation entraîne l’augmentation de la surface des ZEE (zones économiques exclusives ultramarines) françaises. Mayotte bénéficie d’un territoire maritime conséquent avec ses 74'000 kilomètres carrés de zone de pêche. Il faut savoir que la France avec son littoral, et grâce à ses départements et collectivités d’outre-mer, est la deuxième puissance maritime du monde derrière les Etats-Unis. </p> <h3>Perspectives et croissance </h3> <p><img src="https://bonpourlatete.com/thumbnails/default/w1200/1616947696_10.jpg" class="img-responsive img-fluid normal " /></p> <h4><em>L’aquaculture, aujourd’hui en liquidation judiciaire faute de soutien. © Stephan Engler</em></h4> <p>Le développement de Mayotte passe naturellement par l’océan et son lagon de 1'100 kilomètres carrés. Pour cela, il faut structurer les filières de la pêche, développer l’aquaculture, soutenir un tourisme responsable et les formations liées aux métiers de la mer. C’est un atout susceptible d’améliorer considérablement la qualité de vie et de créer des emplois sur l’île. Bien sûr, une volonté politique ainsi que des investissements privés et publics sont nécessaires.</p> <p><img src="https://bonpourlatete.com/thumbnails/default/w1200/1616947793_6.jpg" class="img-responsive img-fluid normal " /></p> <h4><em>Des pêcheuses de djarifa dans le lagon. © Stephan Engler</em></h4> <p>En ce qui concerne les Comores, le tourisme peut également améliorer la situation actuelle. D’ailleurs un projet de développement a été lancé en octobre 2020. Selon Karalyn Monteil, spécialiste du programme culture du bureau régional de l’UNESCO pour l’Afrique de l’Est, «il y a une énorme possibilité de développer le tourisme durable aux Comores avec leurs riches patrimoines naturels et culturels. 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Mais l’intérêt de Nicolas Crottaz était ailleurs. «Il y une trentaine d’années, quand j’avais 5 ou 6 ans, j’ai voulu une chèvre. La première qui s’appelait Fleurette était un peu comme un animal de compagnie. Vers 12 ans je faisais déjà des tests avec mes premiers fromages», raconte-t-il.</p> <h3>Parcours et reconversion de la ferme</h3> <p>Une fois sa formation d’agriculteur avec maîtrise fédérale terminée, Nicolas Crottaz travaille pendant plus de 6 ans dans un grand groupe pharmaceutique. «Cela m’a beaucoup aidé, cela ouvre l’esprit et permet de découvrir d’autres secteurs mais aussi de comprendre les processus. Mon expérience dans la recherche animale en parasitologie m’a permis d’agir avant l’apparition des parasites concernant les chèvres. 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Le changement a été opéré sans grandes difficultés. «Je connaissais déjà très bien les chèvres qui sont des animaux très délicats. C’est surtout au niveau de l’alimentation qu’elles sont très exigeantes, autant pour leur santé que pour la production de lait. Et avoir de l’ambition et le culot d’avancer dans des domaines parfois difficiles pour arriver à un but est stimulant» explique-t-il. </p> <h3>Un changement de culture</h3> <p>Aujourd’hui l’exploitation, qui a reçu la certification Bio Suisse en 2019, compte 200 chèvres, des Chamoisées pour la plupart, et quelques-unes de Saanen. Ce label est certes garant de grande qualité, mais les règles sont très strictes, peut-être trop. «Chez Bio Suisse depuis 2022 nous avons dû baisser la quantité d’aliments concentrés composés de céréales, de soja et de maïs autorisés. Le rapport est passé de 10 à 5% de l'alimentation totale des animaux. 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Sa persévérance et la qualité de ses produits lui ont apporté un succès mérité loin à la ronde, que ce soit sur les marchés, dans les magasins spécialisés ou auprès de restaurateurs de renom.</p> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1724943258_2.jpg" class="img-responsive img-fluid center " /></p> <h4 style="text-align: center;"><em>© S.E.</em></h4>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'reconversion-agricole-reussie', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 504, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 15, 'person_id' => (int) 5950, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [ [maximum depth reached] ], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 4907, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => false, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => null, 'readed' => null, 'subhead' => null, 'title' => 'Sri Lanka: une autre approche de l'agriculture', 'subtitle' => 'En Europe ainsi qu’en Suisse les agriculteurs font part de leurs difficultés et de leurs mécontentements. 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Traditionnellement et culturellement la consommation des légumes est très importante au Sri Lanka. La viande (principalement du poulet) et le poisson sont peu consommés en raison de leur coût élevé. Expérience faite, si vous commandez dans un restaurant local un plat classique tel que le chicken fried rice, vous allez recevoir une grande quantité de riz, avec des légumes et une toute petite quantité de poulet. Tout le contraire des habitudes culinaires occidentales. 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Cela permet à la population d’acheter des produits frais de saison aux meilleurs prix et à proximité de leur lieu de résidence.</p> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1714651667_2.jpg" class="img-responsive img-fluid center " /></p> <h4 style="text-align: center;"><em>Au centre de l’île, des maisons locales avec leurs plantations. © S.E.</em></h4> <p>Concernant les plantations, les grandes fermes se trouvent surtout dans le nord, dans le reste du pays la surface des exploitations est moins importantes. Mais, les Sri Lankais pour la plupart cultivent aussi dans leur jardin ou devant leur maison quelques légumes et piments. Quand l’espace est suffisant il n’est pas rare de découvrir derrière le mur d’une maison un manguier, des cocotiers ou un arbre à pain. Cette habitude a été considérablement accentuée durant la sombre période du Covid, via l’appel du gouvernement à l'autosuffisance en raison de la pénurie alimentaire et la crise économique actuelle. Cette possibilité s’offre aux insulaires car la plupart vivent dans de petites maisons plutôt qu’en appartements locatifs. A l'exception de la région de Colombo, la capitale économique du Sri Lanka, qui compte à elle seule 648'000 habitants et où la terre se paie au prix fort. A Colombo, une initiative agricole helvétique n’est pas passée inaperçue. Répondant à la l'appel du gouvernement pour l'autosuffisance alimentaire en 2022, l’ambassade de Suisse a transformé sa pelouse en jardin potager.</p> <h3>Sur le terrain</h3> <p>Afin d’avoir des renseignements précis sur la situation, entretien avec Wije co-directeur d’un hôtel, chef cuisinier et fin connaisseur de son pays.</p> <p><strong>Stephan Engler</strong>: <strong>Comment l’agriculteur vend-il sa marchandise?</strong></p> <p><strong>Wije</strong>: Il peut la vendre partout, aux marchés, aux magasins et en direct. Par exemple, le magasin Arpico (grande distribution) de Matara dans le sud du pays achète ses produits frais chez des petits fermiers. Pour cette société, il n’y a pas de fournisseurs exclusifs. Bien entendu, les supermarchés prennent des marges hautes, mais le consommateur peut acheter les mêmes légumes bien moins chers au marché local.</p> <p><strong>Existe-t-il de grandes exploitations?</strong></p> <p>Oui, principalement dans le nord du pays. 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Ces <a href="https://www.latribune.fr/economie/international/six-questions-pour-comprendre-le-chaos-economique-qui-frappe-le-sri-lanka-917240.html">produits augmentaient la dette du pays</a>, ils ont donc été définitivement interdits. Bien sûr, la transition n’a pas fonctionné car il n’y a eu aucune préparation, ni de délai raisonnable pour ce changement radical. D’une année à l’autre la production a chuté de 50% et de nombreux travailleurs agricoles ont perdu leur emploi. Actuellement, il est à nouveau possible d’utiliser des produits phytosanitaires, mais ceux-ci sont vendus à des prix prohibitifs, seules les grandes exploitations peuvent en acheter. </p> <p><strong>Les prix d’achats sont-ils corrects pour l’agriculteur?</strong></p> <p>Il peut survivre, mais sans plus. Comme partout, si l’agriculteur vend ses produits en direct, les marges sont plus importantes pour lui et il s’en sort mieux. Par contre s’il passe par des intermédiaires celles-ci diminuent. Les achats se font à des prix très bas, car en tant que businessmen les distributeurs veulent gagner le plus possible lors de la revente. C’est un problème. L’idéal est le contact direct entre les fermiers et le client. </p> <p><strong>A quelles difficultés les agriculteurs sont-ils confrontés?</strong></p> <p>Le prix de l’essence, le change avec le dollar, (la roupie srilankaise est faible), les engrais sont très chers, le prix de l’énergie etc. tout a augmenté d’une manière incroyable. Mais depuis le début de l’année, la situation a tendance à s’améliorer.</p> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1714651855_7.jpg" class="img-responsive img-fluid center " /></p> <h4 style="text-align: center;"><em>Une plantation de thé en culture naturelle, 100% bio! © S.E.</em></h4> <p><strong>Quels sont les changements marquants depuis 10 ans?</strong></p> <p>Il y a eu de grands changements principalement dans la recherche agricole. Le Sri Lanka possède plusieurs centres afin d’acclimater les plantes aux conditions spécifiques du pays, ainsi elles produisent plus et ont une résistance accrue. Par exemple les brocolis, le paprika, le chou-fleur et les courgettes étaient importées auparavant, maintenant nous pouvons les cultiver ici. </p> <p><strong>Dans l’agriculture y a-t-il beaucoup de concurrence?</strong></p> <p>Oui beaucoup.</p> <p><strong>Est-ce le fait des importations de produits agricoles depuis l’étranger? </strong></p> <p>Certains produits sont importés car ils ne peuvent pas être produits au Sri Lanka, ou alors la production locale ne suffit pas à la demande comme pour les oignons, les pommes de terre, les lentilles (indispensables pour le dhal, plat emblématique de la cuisine srilankaise) l’ail, les pommes et les oranges. Mais la grande majorité des fruits et légumes consommés sur place proviennent de la culture indigène. 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Mais il faut compter les frais de transport plus importants ainsi que des intermédiaires, cela augmente le prix de manière importante pour le client. </p> <p><strong>Est-il difficile de trouver des graines?</strong></p> <p>Non, les graines sont importées ou de provenance srilankaise.</p> <p><strong>Quels sont les prix de quelques fruits et légumes aujourd’hui et à d’autres moments de l’année?</strong></p> <p>Avant de mentionner les prix il faut savoir que le salaire moyen d’un employé dans l’hôtellerie est d’environ CHF 170.- mensuel, et que le cours actuel est de roupie srilankaise est de 330 LKR pour environ 1 CHF.</p> <p>Voici deux comparaisons de prix: l’aubergine actuellement est à 200 LKR pour 1 kg, il y a 5 mois elle était à 500 LKR car c’était la saison des pluies; l’ananas est aujourd’hui à 650 - 700 LKR pour 1 kg, mais le mois dernier il était à 1'200 LKR.</p> <h3>Une culture naturelle</h3> <p>Concernant les jardin de particuliers il est rarement ornemental, souvent, il fait office de garde-manger pour la famille. 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Anders Bringdal possède cinq titres de champion du monde de planche à voile, Ricardo Bencatel a travaillé sur des systèmes de contrôle automatique de foil sur des voiliers de compétition pour deux équipes de la prestigieuse America’s Cup, Luna Rossa et Oracle Team USA.</p> <p>Mais rien n’aurait pu se faire sans le financement d’investisseurs privés qui ont été séduits par ce projet et qui ont permis la création du prototype. Un autre soutien de choix est le Canton du Valais avec sa fondation The Ark qui soutient l’innovation et favorise le développement de nouvelles technologies.</p> <p>La coque est construite au Portugal, il est prévu, à l’avenir, d’y construire toutes les coques de ce projet. Tous les autres matériaux et pièces sont dans la mesure du possible <em>Swiss made</em> ainsi que, bien sûr, la recherche et le développement. 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Le lendemain matin préoccupée par cette situation, elle prend quelques barres de céréales pour le SDF, je l’accompagne. </p> <p>Arrivé à l’esplanade de St Martin, les couleurs du matin sont magnifiques et la vue panoramique sur les montagnes est splendide. Pourtant la personne que nous cherchons n’a pas sa place sur ce cliché de carte postale. Assis sur un banc, un peu à l’écart, nous allons à sa rencontre. Après quelques mots échangés, ma compagne lui donne son petit-déjeuner et part prendre son train. Cela le touche beaucoup, son premier problème du matin est résolu.</p> <p>Je m’assieds à côté de lui pour en savoir plus. Mohamed a 58 ans et cela fait 6 ans qu’il est sans domicile fixe. Il est très calme et parle parfaitement le français. Pendant la conversation je remarque sa main toujours posée par sécurité sur ses modestes affaires à côté de lui. </p> <p>Son regard ne trompe pas, bien sûr il est cabossé par la vie, mais il paraît honnête et sobre. Mis à part quelques indices comme ses mauvaises dents, personne ne pourrait croire qu’il vit dans la rue depuis tant d’années. Après une timide présentation et quelques propositions pour trouver des solutions afin d’améliorer son quotidien, il me raconte son histoire.</p> <h3>De la stabilité au chaos</h3> <p>Mohamed est marocain et a vécu une enfance sans histoire. A la fin de sa scolarité il obtient son bac français, puis il part à l’armée. Après avoir effectué son service militaire obligatoire de deux ans, il décide de partir pour l’Italie. Le Maroc offre trop peu d’opportunités pour construire son avenir.</p> <p>Grâce à son travail il y parvient. La journée, il travaille dans les caves d’une exploitation viticole et le soir, il assure le service en gants blancs à la table du propriétaire. Celui-ci est issu de la noblesse italienne et vit dans un château au milieu de son vaste domaine. Mohamed, lui, habite comme les autres employés dans une maison individuelle sur la propriété. Celle-ci est mise à disposition par son employeur. A cette époque il est marié, a un garçon et possède sa propre voiture. Du jour au lendemain tout s’écroule, lors de son divorce, il part seul avec seulement quelques affaires dans son sac à dos.</p> <h3>Sur les routes d'Europe</h3> <p>Depuis ce jour-là, ses amis lui ont tourné le dos comme c’est trop souvent le cas, et cela juste au moment où il avait le plus besoin d’eux. Avec d’autres connaissances, il a tout simplement perdu le contact, car il n’habite plus la même région.</p> <p>Durant les six années suivantes il parcourt l’Italie, la France, la Belgique, l’Allemagne et la Suisse. Pour lui c’est en Italie que les conditions de vie sont les plus dures, en raison de la situation économique, défavorable pour toute la population. </p> <p>Il m’apprend que partout pour un SDF, même dans les petites villes, existent des structures. Souvent ce sont des associations qui mettent à disposition des personnes dans le besoin des douches, une machine à laver ainsi que d’autres services. Le grand problème insoluble reste l’argent, car il faut se nourrir et se déplacer pour aller dans ces structures. Mais pour Mohamed, le plus dur est le stress de ne pas savoir s’il pourra manger à midi et le soir. Pendant ses déplacements, parfois, il trouve de petits boulots, mais tout au plus pour quelques semaines. Pas de quoi retrouver une stabilité.</p> <p>En Suisse, à plusieurs reprises, il a dormi à St Martin, le pasteur le connait bien et l’aide de différentes manières. Il apprécie beaucoup cette région car c’est un lieu calme et serein.</p> <h3>Enfin un toit</h3> <p>Aujourd’hui Mohamed est en attente d’une place chez Emmaüs, c’est prévu pour le 12 juin ou peut-être quelques jours avant car il est possible qu’un lit se libère. 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Le contact est très important pour lui.</p> <p>«Les gens ont les yeux ouverts mais trop souvent leur cœur est fermé», me dit Mohamed.</p> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1686338785_4.jpg" class="img-responsive img-fluid center " /></p> <h4 style="text-align: center;"><em>© S.E.</em></h4>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'sdf-les-chemins-de-la-solitude', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 508, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 5, 'person_id' => (int) 5950, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [ [maximum depth reached] ], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => 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