Devant le Palais fédéral, à Berne, on attend les éclaircies... © DR
Des mandats lucratifs, des campagnes orchestrées - mais au Palais fédéral, ils se prennent encore tous pour des parlementaires indépendants. Quels effets ont sur un politicien les jobs accessoires bien rémunérés? Et combien cela coûte-t-il d’empêcher une loi? Rapport sur les lobbies.
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Rapport sur les lobbies.', 'subtitle_edition' => null, 'content' => '<hr /> <p style="text-align: center;"><strong>Par Michael Furger, Peter Hossli, Samuel Tanner, Laurina Waltersperger</strong></p> <p style="text-align: center;"><strong> Publié initialement par la <em>NZZ am Sonntag</em></strong></p> <hr /> <p>La petite phrase semble fortuite. Comme la réponse à une question que personne n’a posée. «Je suis bien des choses, mais pas un lobbyiste», a dit le conseiller national PBD Lorenz Hess lors de l’émission de la SRF <em>Arena</em>. Intéressant que ce soit justement Hess qui le dise. Il détient un des mandats les plus lucratifs de la Berne fédérale. Il touche 142’300 francs pour la présidence de la caisse-maladie Visana. Il pourrait défendre les intérêts de son bailleur dans la puissante commission pour la santé du Conseil national, s’il était lobbyiste. Mais non. Il n’en est pas un.</p> <p>Mais qu'est-il donc? Lui et tous les autres conseillers nationaux et aux États à la solde d’entreprises et d’associations? Comment ont-ils décrochés leurs mandats lucratifs? Et surtout: quels sont les effets de ces mandats et de cet argent sur un politicien? Peut-on acheter les décisions politiques en Suisse et si oui, quel en est le prix?</p> <p>Personne ne sait exactement combien d’argent est en circulation. Une recherche publiée récemment, mandatée par le conseiller national PS argovien Cédric Wermuth, cite deux contributions, mais elles reposent de loin sur une estimation. Le montant des sommes n’est cependant pas décisif, la question est celle du pouvoir de cet argent.</p> <p>Une équipe du <em>NZZ am Sonntag</em> a enquêté sur les mandats et les votes et a parlé avec plus d’une douzaine de faiseurs d’opinion et de lobbyistes. Le résultat montre comment les lois sont faites, modifiées ou enterrées au Palais fédéral, sous les arcades bernoises et dans les compartiments de 1ère classe entre Genève et Saint-Gall. Les ficelles sont tirées tant par les politiciens de droite que de gauche. Un guide sur l’influence politique en huit leçons.</p> <h2><br />Leçon 1: La carrière des mandats. Comment faire de la représentation des intérêts un métier lucratif</h2> <p>Un conseiller national gagne en moyenne 123’589 francs frais compris, un conseiller aux États 138’269. Près de la moitié n'est pas imposable. C'est convenable, mais ça ne suffit pas à tous. Pour améliorer leurs revenus, les parlementaires de milice prennent des jobs accessoires, dont «il y a à Berne une multitude». C'est en tout cas ainsi que le dit l’ancien CEO d'une grande agence de lobbying.</p> <p>Lorenz Hess maitrise comme personne l’art d’accumuler les jobs accessoires à disposition et d’en faire une carrière. Il a pour ce faire un bagage professionnel parfait: maturité, conseiller en relations publiques, responsable de l’information auprès de la police municipale de Berne.</p> <p>De plus, il dirige le département de la communication du Département fédéral de la santé et s'engage dans une des branches les plus lucratives de Suisse: les soins de santé.</p> <p>Hess apprend auprès de la Confédération comment l’État traite les caisses, les hôpitaux, les médicaments et les médecins. Il apporte son savoir à l'ancienne agence de relations publiques Burson-Marsteller. Il dirige ensuite sa propre agence de lobbying. Il réussit à entrer au Conseil national en 2011, où il siège à l’influente Commission de la sécurité sociale et de la santé publique (CSSS). Quatre ans plus tard, Hess vend son agence à Furrerhugi, une des entreprises de lobbying leader à Berne et réunit dès lors ses intérêts sous le toit de Hess Advisum GmbH. «Le but de l’entreprise est de fournir des prestations de conseil», peut-on lire au registre du commerce. Hess conseille dans son réseau et là où il s’y connait. Il est le président de la Fondation Pankréas, siège au comité de Spitex, conseille la Faculté de médecine de l’Université de Berne et la Fondation suisse pour paraplégiques à Nottwil. Depuis 2017, il préside le Conseil administratif et de la fondation de Visana. «Il a de bons amis, et il rend la pareille», disent ceux qui lui sont favorables.</p> <p>D'autres médisent qu’il fait du trafic d’influence.</p> <p>Au Conseil national et à la Commission, il vote conséquemment pour la réduction des coûts pour les caisses-maladie. Par exemple lorsqu’il s’engage en faveur du dossier électronique des patients. Dans les médias, il s’engage fermement pour les vaccins obligatoires et propose que les malades non vaccinés participent aux coûts des soins. Ce qui est encore à l’avantage des caisses.</p> <p>Il n'est pas à vendre, répond Hess. «Je suis membre du Parlement. En même temps, je travaille comme président du Conseil d'administration d'une grande assurance maladie et je suis payé pour mon travail», dit-il. «Il est dès lors clair que je vote dans l’intérêt de notre branche.» Le lobbying ne figure pas dans son cahier des charges. Il n’a jamais envoyé un e-mail de recommandation de la caisse-maladie, il n’essayerait jamais d’influencer un membre de la Commission.</p> <p>Peu ont - en toute légalité - bâti dans la Berne fédérale une carrière de mandats aussi brillante que Hess. De nombreux parlementaires détiennent quelques petits mandats. D'autres ont une démarche ciblée. «Il y a des politiciens qui nous demandent si nous pouvons leur procurer un mandat», dit Victor Schmid. Il est partenaire de la puissante agence de communication <em>Konsulenten </em>et en activité depuis des décennies. Il est à noter qu’il ne s'agit manifestement pas que d’argent. «Les parlementaires», dit Schmid, «cherchent un domaine d’activité qui leur soit profitable. Mais nombre d'entre eux n’ont pas le savoir-faire. Nous pouvons leur fournir cela.»</p> <h2><br />Leçon 2: Le bon siège. Comment le choix de la bonne commission détermine à quel point un mandat sera lucratif</h2> <p>Comment un ancien enseignant, officier de carrière et directeur des finances devient-il un des politiciens de la santé les mieux payés du pays? Avec un peu de chance lors de la distribution des sièges au sein du parti. Car s’il y a un levier pour décrocher rapidement un job accessoire lucratif, c'est bien le choix de la bonne commission d'experts au Parlement.</p> <p>Les lois et les modifications des lois sont préparées par cette commission; c’est là que les décisions importantes sont prises. Mais toutes les commissions permanentes, 12 du Conseil national, 11 du Conseil aux États, n’ont pas la même importance. Tout en haut de la hiérarchie des chasseurs de mandats se trouvent la Commission de la santé et la Commission de l’économie et des redevances. «Qui siège dans ces comités reçoit des offres», dit l’ancien lobbyiste de la Migros Martin Schläpfer. «La plupart des parlementaires veulent y aller, même ceux qui n’ont pas de compétences spécifiques.» Et si on y entre, en général on y reste, aussi longtemps que le Conseil siège, huit ans, peut-être douze. «Cela est intéressant pour les entreprises», dit M. Schläpfer.</p> <p>Les conseillers aux États sont particulièrement intéressants. À la chambre basse, les commissions sont plus petites: 13 membres au lieu de 25. Chaque voix a plus de poids, comme avec l’ancien enseignant et officier de carrière.</p> <p>Il s’appelle Josef Dittli et a été élu conseiller aux États pour le canton d’Uri il y a quatre ans. Sa dernière activité avant cela: directeur financier du canton. À Berne, il arrive à entrer à la Commission de la santé et prend plusieurs mandats, dont en 2018 le plus lucratif de tous: la présidence de l'association des caisses-maladie Curafutura, un job à 40 pour cent rémunéré à hauteur de 140’000 francs par an.</p> <p>Depuis, on peut observer chez Dittli un net assouplissement sur les questions réglementaires. En 2016, avant d’être président de Curafutura, il avait fermement contribué à réduire à néant un projet de loi sur les produits tabagiques. La loi aurait rempli les conditions de la convention sur le tabac de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et l’interdiction de la publicité pour les cigarettes et autres produits tabagiques aurait donc été renforcée. Le lobby du tabac souhaitait un rejet de cette loi. Dittli déposa la requête adéquate. Cela bien qu’il ait déclaré au Conseil que la protection des mineurs lui tenait à cœur. L’interdiction globale de la publicité aurait été une atteinte trop forte pour l’économie de marché. La majorité l’approuva et la loi fut réduite à néant.</p> <p>Deux ans plus tard, Dittli étant entretemps devenu président de Curafutura, il encouragea la Confédération à proposer que la loi sur le tabac soit élaborée conformément aux demandes de l’OMS. «Nombre des présents n’en croyaient pas leurs oreilles», écrivait à l’époque l’<em>Aargauer Zeitung</em>.</p> <p>Dittli suivait à la lettre la ligne de Curafutura. L’association des caisses-maladie prône une interdiction contraignante de la publicité. Alors il vota au Conseil pour un renforcement de la loi sur la protection des mineurs, même si d'un point de vue libéral, elle allait un peu trop loin, comme il disait.</p> <p>«Mes choix de vote répondent cependant à mes propres prises de position», affirme Dittli.</p> <p>«Balivernes», réagit à cette déclaration l'ex-lobbyiste Schläpfer. «Il est tout à fait normal de s’engager en faveur de son entreprise». Le précédent président de Curafutura, Ignazio Cassis, y gagnait 180’000 francs». «Personne ne me dira qu’il était indépendant».</p> <h2><br />Leçon 3: Le tapis à 100’000 francs. Comment les agences de lobbying créent les besoins pour ensuite les assouvir</h2> <p>Les agences de relations publiques en arrière-plan sont le carburant du système. Dans la Berne fédérale, les lobbyistes externes s’occupent constamment de générer le chiffre d’affaire pour leurs entreprises. Et comme toujours, lorsqu’il faut vendre, il faut créer un besoin. «Les bonnes entreprises trouvent leurs clients elles-mêmes», dit Daniel Heller de l’agence Farner.</p> <p>Ce qu’il entend par là: les agences gardent l’œil sur les évènements, comme une modification de loi, qui pourraient avoir un effet néfaste sur un groupe donné. S’il apparait, l’agence offre au groupe un paquet de mesures: arguments, stratégies, documentation, discours. Elle dispose «un tapis», comme on dit dans le jargon de la branche. Et ce aussi vite que possible. L’attaque contre le projet doit se faire au plus tard au début de la procédure de consultation.</p> <p>En disposant le tapis, l'agence apparait en arrière-plan. Le principe: «All politics are local». Au lieu de s’adresser directement aux parlementaires, l’agence organise des rencontres entre les représentants du peuple et les entreprises locales. «Rien n'est aussi efficace que ces entretiens individuels», dit Daniel Heller.</p> <p>Empêcher une loi ou aider à la faire passer n'est pas gratuit. «Accompagner intensément un projet de loi du début jusqu’au vote final au Parlement ou même jusqu’à la votation populaire avec toutes les mesures de communication requises peut coûter jusqu’à 100’000 franc par année et durer trois à cinq ans». C'est ce que dit Victor Schmid de l’agence de communication Konsulenten. Le représentant d'une autre grande agence de conseil avance le même chiffre. Selon le conseiller, cela comprend un peu de potins dans les médias et tout un catalogue d’arguments. Les médias sont manifestement des idiots utiles dans ce jeu.</p> <p>Si l’attaque précoce échoue et que la loi arrive aux Conseils, les lobbyistes externes tentent de compliquer les navettes entre le Conseil national et le Conseil aux États. Ce qui provoque des retards et des dilutions, dans le meilleur des cas l’empêchement. «Pour cela, une agence efficace peut disposer en permanence de l'action d'une douzaine de conseillers nationaux et aux États», dit le membre d’une grande agence de relations publiques.</p> <h2><br />Leçon 4: L’opportuniste. Comment bien s'en sortir avec un bel éventaire</h2> <p>Il y a bien une chose que l’on ne peut pas reprocher au conseiller national bâlois UDC Sebastien Frehner: qu’il soit partialement intéressé. Il peut s’enthousiasmer tant pour des substances dangereuses pour la santé comme le tabac et l’alcool que pour les entreprises qui ont des intérêts pour la santé de la population. Il a des mandats auprès de la caisse-maladie Groupe Mutuel, du Forum santé pour tous, du GI Recherche biomédicale. Il fait partie du GI Boissons fraîches qui s’occupe des boissons sucrées, du GI Plaisir et du groupe parlementaires Spiritueux et prévention. Dans ce cadre, il se met entièrement au service de ses donneurs d’ordres. On lui a demandé une fois dans l’émission «Rundschau» de la SRF s’il préservait ses propres intérêts. Sa réponse: «Exactement».</p> <p>Pour remplir ses mandats, Frehner se détourne aussi parfois de la ligne du parti. En mars, il a voté pour une augmentation des franchises, même si l’UDC était contre. Il représente les intérêts aussi en dehors des séances des Conseils. Lundi matin, il invite à la présentation «Quelle est la valeur de la vie humaine?». Le discours est tenu par le lobbyiste des pharmas René Buholzer.</p> <p>Deux jours plus tard, le 25 septembre, Frehner tient cour en tant que président du GI Plaisir. Avec «Plaisir sans risque» en compagnie de Nastasja Sommer, lobbyiste de Japan Tobacco. Elle parle de la loi sur les produits tabagiques. Le dîner de gala promet une sélection d’eaux-de-vie, whisky et cigares - un des nombreux événements culinaires au cours desquels politiciens et lobbyistes aiment trinquer entre eux. «Je ne me vois pas comme le représentant de ces diverses branches», se défend Frehner. En libéral, il dit:</p> <p>«Dans le doute, toujours en faveur de l’économie».</p> <p>En tant que conseiller du Groupe Mutuel, il veut comprendre les préoccupations des hôpitaux, des caisses-maladies, des entreprises pharmaceutiques et des cantons. Pour cette compréhension, il reçoit 10’000 par année. En tant que conseiller de Spiritsuisse, il s’engage pour «une branche importante de l’économie de notre pays». Le portefeuille de Frehner fait penser à ces vendeurs en bord de la Méditerranée qui tentent d’aguicher les baigneurs, l’éventaire suspendu autour du cou.</p> <h2><br />Leçon 5: Lobbyiste de gauche. Comment un syndicaliste peut empocher 250’000 francs au Conseil national</h2> <p>Bien sûr, tous les parlementaires ne se laissent pas payer royalement par des entreprises ou des associations. Certains n’ont aucun mandat, d’autres seulement des mandats qui ne leur rapportent qu’un ou deux milliers de francs. Pour les jobs accessoires lucratifs, les politiciens bourgeois ont l'avantage. Pas parce qu’ils se laissent plus facilement influencer. Leur position politique reflète simplement la position des entreprises et associations économiques qui leur offrent de tels mandats.</p> <p>Mais les politiciens de gauche se font aussi bien rémunérer leurs services, par exemple comme syndicalistes au Parlement. Le conseiller national bernois PS Corrado Pardini dirige le secteur Industrie du syndicat Unia, avec un taux d’occupation à 70 pour cent. «Oui, je représente les intérêts des syndicats», dit-il. Il se bat au Parlement pour la protection des travailleurs et des salaires équitables. En ce moment, il mène des discussions en dehors des partis pour sortir l’AVS et le 2<sup>e</sup>pilier des taux négatifs. «Mais je ne suis pas un lobbyiste, je suis juste employé par le syndicat depuis 32 ans». Selon ses propres dires, il touche de la part d’Unia un salaire brut de 110’292 francs par an. Avec à ses prestations de conseiller national, Pardini gagne presque un quart de million de francs.</p> <p>Pardini est un lobbyiste institutionnel. Il a déjà été choisi comme représentant d’intérêts, comme le libéral Hans-Ulrich Bigler, le directeur de l’Union suisse des arts et métiers. Mais travailler à 70 pour cent à côté du mandat au national, c’est bien ambitieux. Si l’on prend en compte tous les jours de siège au Parlement et aux Commissions, c’est à la limite de l’impossible. Selon les études, un mandat au Conseil national équivaut de nos jours à un travail à 80 pour cent.</p> <h2><br />Leçon 6: Ne pas se faire remarquer. Pourquoi les parlementaires discrets et sages récoltent plus</h2> <p>Soixante-et-un hommes et femmes ont été nouvellement élus au Parlement il y a quatre ans. 48 d’entre eux ont depuis acquis un ou plusieurs mandats privés. Le mandat dépend, à part de la Commission, de la position politique. «Les parlementaires obtiennent des mandats conformes à leurs convictions», dit Daniel Heller de Farner. Il serait difficile de convaincre un vert d’entrer au lobby des autos. Mais le caractère est aussi décisif. Les parlementaires bruyants qui aiment se mettre en scène ne sont pas appréciés. «Les sages font les meilleurs lobbyistes», explique l'ex-lobbyiste Schläpfer. Un conseiller national qui agresse volontiers les autres n’est pas fait pour ce travail. Et ceux qui sont encore très politisés au début deviendront vite plus calmes à un bon poste. «Celui qui s’est assuré un bon mandat ne sera plus très actif au sein du parti», dit Schläpfer.</p> <h2><br />Leçon 7: Créer des alliances: Pourquoi y a-t-il au et autour du Palais fédéral des petits lobbys pour tout</h2> <p>Quel est le point commun entre les abeilles, les fans de sport, la langue de signes, l’aéronautique, le cheval, la musique populaire et deux douzaines de différents pays? Tous ont leur propre groupe d’intérêts parlementaire. On enregistre près de 160 de ces groupes. Tous ont une présidence et un secrétariat, la plupart dirigés par une association y relative, parfois aussi par une agence de lobbying. Rien que l'agence Furrerhugi se charge d’administrer cinq groupes. Viennent s’y ajouter les groupes d’intérêts extraparlementaires. Le GI Maladies rares, promu par les pharmas, les hôpitaux et les organisations de patients - secrétariat: Furrerhugi. Ou le Cercle de travail sécurité et techniques de défense, une organisation de lobbying pour la controversée industrie suisse de l’armement qui réunit plus de 40 conseillers nationaux et aux États. Secrétariat: Farner Consulting. Les agences de lobbying créent les besoins - ça vaut aussi ici. «Les agences repèrent un problème et fondent un GI ou une association pour le combattre», dit l’ancien lobbyiste de la Migros, Martin Schläpfer.</p> <p>Lorenz Hess préside lui aussi un GI. Il s'appelle le GI Boissons fraîches et est le lobby des fabricants de boissons sucrées. Hess en reçoit 8’000 à 9’000 francs. Et encore: l’apôtre de la santé et du plaisir, Sebastian Frehner.</p> <h2><br />Leçon 8: La communauté des héritiers. Comment les mandats passent d’un membre du parti à un autre</h2> <p>Le Dr Beat Vonlanthen est un conseiller aux États comme on se l’imagine: 62 ans, cheveux mi-sel, mi-poivre, ancien conseiller d’État PDC, au slogan politique: «Renforcer le modèle à succès de la Suisse». Depuis son élection en 2015, il a acquis quelques mandats, de l'Association des casinos à l'Association professionnelle des pompes à chaleur. Mais il est avant tout président de Chocosuisse, l'association des fabricants de chocolat, et de Cemsuisse, l'association de l’industrie du ciment.</p> <p>Le prédécesseur de Vonlanthen était son collègue de parti Urs Schwaller et c'est de lui que Vonlanthen a repris la présidence de Cemsuisse. Il a reçu d’un autre collègue de parti, Peter Bieri, l'Association professionnelle des pompes à chaleur et il a obtenu du PDC Christophe Darbelley l’Association des casinos. C'est un principe courant dans la politique suisse: la succession dans des conditions démocratiques.</p> <p>Une succession fiable est payante, aussi dans ce cas. En effet, Vonlanthen siège à la Commission des affaires juridiques, qui est en charge de l’initiative pour des multinationales responsables, une initiative de gauche qui veut rendre les multinationales suisses responsables pour les dommages causés par leurs filiales à l’étranger. Les multinationales se défendent discrètement, à travers leur réseau au Palais fédéral.</p> <p>Lorsqu’à l’automne 2017, Vonlanthen a pour la première fois à faire avec l'initiative, il déclare à la radio vouloir un contreprojet. Mais les grandes associations économiques ne veulent pas d'un contreprojet. Leur crainte: en cas de doute, le peuple</p> <p>se déciderait pour l’original, à savoir l’initiative. Elles commencent à intensifier le lobbying au Palais fédéral. Le 12 mars 2019, le Conseil aux États recommande le contreprojet. Le lobbying s’affaire jusqu’au soir. Pour finir, le Conseil décide à 22 voix contre 20 pour l’économie et rejette tant l’initiative que le contreprojet.</p> <p>La voix décisive de cette majorité est celle de Vonlanthen. Il a changé d’avis, pour lui, un contreprojet n’entre plus en compte. Il suit désormais la ligne de multinationales comme Lafarge Holcim, qu’il représente dans l'association du ciment. On discute à mots couverts du changement d'avis de Vonlanthen.</p> <p>«C'est le jeu des ramifications des associations économiques», disent certains au sein du parti. Vonlanthen dit: «J’ai été et suis toujours pour des solutions compatibles avec l’économie. Je n’ai pas revu ma position à la suite de pressions externes».</p> <h2><br />Limiter les mandats</h2> <p>Les mandats payés ne sont pas illégaux. Tout membre du Parlement fédéral a le droit d’accepter tous ces jobs accessoires. Mais depuis l’année passée, tous les intérêts particuliers doivent être divulgués.</p> <p>Avec son initiative parlementaire, le conseiller aux États valaisan PDC</p> <p>veut endiguer ces intrications. Il demande à ce qu’un membre du Conseil ne puisse accepter de mandats que d’entreprises et organisations qui n’ont aucun rapport avec la Commission dans laquelle il siège. Ainsi, qui fait de la politique à la Commission de l’énergie doit refuser les mandats des exploitants d’énergie.</p> <p>Le Conseiller national UDC Claudio Zanetti propose d’abolir les commissions permanentes et de revenir au système précédent. Jusqu’en 1991, beaucoup de commissions spéciales étaient formées pour diverses affaires. Cela pourrait empêcher que des parlementaires siègent dans les mêmes commissions pendant plusieurs législatures.</p> <hr /> <h2>Le lobbyisme à Berne:</h2> <p><strong>1959</strong></p> <p>mandats sont actuellement déclarés par 246 conseillers nationaux et aux États. En moyenne, il s’agit de huit mandats par conseiller national, dix par conseiller aux États, selon le calcul de l’ONG Transparency International Suisse. Le nombre de mandats a plus que doublé entre 2000 et 2011.</p> <p><strong>150</strong></p> <p>à 200 mandats en moyenne ont été détenus par des membres de la Commission de l’économie et des redevances du Conseil national au cours des 15 dernières années.</p> <p><strong>1700</strong></p> <p>organisations ont, grâce à un mandat ou une carte d'entrée au Palais fédéral, un accès direct à au moins un membre du Conseil.</p> <p><strong>11</strong></p> <p>C'est la place de la Suisse sur la liste des pays de l’UE en ce qui concerne la transparence et le lobbyisme en politique. Elle s'en tire particulièrement mal au niveau des sanctions.</p> <p>Tabac et eau-de-vie: le conseiller national bâlois UDC Sebastian Frehner, 46.</p> <p>Syndicats: le conseiller national bernois PS Corrado Pardini, 54. Ciment: le conseiller aux États fribourgeois PDC Beat Vonlanthen, 62.</p> <p>Caisses-maladie: le conseiller national bernois PBD Lorenz Hess, 58.</p> <hr /> <h2>A lire aussi:</h2> <p><a href="/actuel/l-argent-et-la-politique-quelle-hypocrisie" target="_blank" rel="noopener"><em>L'argent et la politique: quelle hypocrisie!</em></a></p> <p><a href="/actuel/conseil-federal-et-parlement-dans-les-filets-du-lobby-des-pesticides" target="_blank" rel="noopener"><em>Conseil fédéral et Parlement dans les filets du lobby des pesticides</em></a></p>', 'content_edition' => null, 'slug' => 'prendre-et-donner', 'headline' => false, 'homepage' => 'col-md-12', 'like' => (int) 684, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1924, 'homepage_order' => (int) 2184, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 5, 'person_id' => (int) 85, 'post_type_id' => (int) 1, 'poster_attachment' => null, 'editions' => [[maximum depth reached]], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'attachments' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'comments' => [ [maximum depth reached] ], 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, 'relatives' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Post) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Post) {}, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Post) {}, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Post) {} ], 'embeds' => [], 'images' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'audios' => [], 'comments' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Comment) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Comment) {}, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Comment) {} ], 'author' => 'Bon pour la tête', 'description' => 'Des mandats lucratifs, des campagnes orchestrées - mais au Palais fédéral, ils se prennent encore tous pour des parlementaires indépendants. 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Quels effets ont sur un politicien les jobs accessoires bien rémunérés? Et combien cela coûte-t-il d’empêcher une loi? Rapport sur les lobbies.', 'subtitle_edition' => null, 'content' => '<hr /> <p style="text-align: center;"><strong>Par Michael Furger, Peter Hossli, Samuel Tanner, Laurina Waltersperger</strong></p> <p style="text-align: center;"><strong> Publié initialement par la <em>NZZ am Sonntag</em></strong></p> <hr /> <p>La petite phrase semble fortuite. Comme la réponse à une question que personne n’a posée. «Je suis bien des choses, mais pas un lobbyiste», a dit le conseiller national PBD Lorenz Hess lors de l’émission de la SRF <em>Arena</em>. Intéressant que ce soit justement Hess qui le dise. Il détient un des mandats les plus lucratifs de la Berne fédérale. Il touche 142’300 francs pour la présidence de la caisse-maladie Visana. Il pourrait défendre les intérêts de son bailleur dans la puissante commission pour la santé du Conseil national, s’il était lobbyiste. Mais non. Il n’en est pas un.</p> <p>Mais qu'est-il donc? Lui et tous les autres conseillers nationaux et aux États à la solde d’entreprises et d’associations? Comment ont-ils décrochés leurs mandats lucratifs? Et surtout: quels sont les effets de ces mandats et de cet argent sur un politicien? Peut-on acheter les décisions politiques en Suisse et si oui, quel en est le prix?</p> <p>Personne ne sait exactement combien d’argent est en circulation. Une recherche publiée récemment, mandatée par le conseiller national PS argovien Cédric Wermuth, cite deux contributions, mais elles reposent de loin sur une estimation. Le montant des sommes n’est cependant pas décisif, la question est celle du pouvoir de cet argent.</p> <p>Une équipe du <em>NZZ am Sonntag</em> a enquêté sur les mandats et les votes et a parlé avec plus d’une douzaine de faiseurs d’opinion et de lobbyistes. Le résultat montre comment les lois sont faites, modifiées ou enterrées au Palais fédéral, sous les arcades bernoises et dans les compartiments de 1ère classe entre Genève et Saint-Gall. Les ficelles sont tirées tant par les politiciens de droite que de gauche. Un guide sur l’influence politique en huit leçons.</p> <h2><br />Leçon 1: La carrière des mandats. Comment faire de la représentation des intérêts un métier lucratif</h2> <p>Un conseiller national gagne en moyenne 123’589 francs frais compris, un conseiller aux États 138’269. Près de la moitié n'est pas imposable. C'est convenable, mais ça ne suffit pas à tous. Pour améliorer leurs revenus, les parlementaires de milice prennent des jobs accessoires, dont «il y a à Berne une multitude». C'est en tout cas ainsi que le dit l’ancien CEO d'une grande agence de lobbying.</p> <p>Lorenz Hess maitrise comme personne l’art d’accumuler les jobs accessoires à disposition et d’en faire une carrière. Il a pour ce faire un bagage professionnel parfait: maturité, conseiller en relations publiques, responsable de l’information auprès de la police municipale de Berne.</p> <p>De plus, il dirige le département de la communication du Département fédéral de la santé et s'engage dans une des branches les plus lucratives de Suisse: les soins de santé.</p> <p>Hess apprend auprès de la Confédération comment l’État traite les caisses, les hôpitaux, les médicaments et les médecins. Il apporte son savoir à l'ancienne agence de relations publiques Burson-Marsteller. Il dirige ensuite sa propre agence de lobbying. Il réussit à entrer au Conseil national en 2011, où il siège à l’influente Commission de la sécurité sociale et de la santé publique (CSSS). Quatre ans plus tard, Hess vend son agence à Furrerhugi, une des entreprises de lobbying leader à Berne et réunit dès lors ses intérêts sous le toit de Hess Advisum GmbH. «Le but de l’entreprise est de fournir des prestations de conseil», peut-on lire au registre du commerce. Hess conseille dans son réseau et là où il s’y connait. Il est le président de la Fondation Pankréas, siège au comité de Spitex, conseille la Faculté de médecine de l’Université de Berne et la Fondation suisse pour paraplégiques à Nottwil. Depuis 2017, il préside le Conseil administratif et de la fondation de Visana. «Il a de bons amis, et il rend la pareille», disent ceux qui lui sont favorables.</p> <p>D'autres médisent qu’il fait du trafic d’influence.</p> <p>Au Conseil national et à la Commission, il vote conséquemment pour la réduction des coûts pour les caisses-maladie. Par exemple lorsqu’il s’engage en faveur du dossier électronique des patients. Dans les médias, il s’engage fermement pour les vaccins obligatoires et propose que les malades non vaccinés participent aux coûts des soins. Ce qui est encore à l’avantage des caisses.</p> <p>Il n'est pas à vendre, répond Hess. «Je suis membre du Parlement. En même temps, je travaille comme président du Conseil d'administration d'une grande assurance maladie et je suis payé pour mon travail», dit-il. «Il est dès lors clair que je vote dans l’intérêt de notre branche.» Le lobbying ne figure pas dans son cahier des charges. Il n’a jamais envoyé un e-mail de recommandation de la caisse-maladie, il n’essayerait jamais d’influencer un membre de la Commission.</p> <p>Peu ont - en toute légalité - bâti dans la Berne fédérale une carrière de mandats aussi brillante que Hess. De nombreux parlementaires détiennent quelques petits mandats. D'autres ont une démarche ciblée. «Il y a des politiciens qui nous demandent si nous pouvons leur procurer un mandat», dit Victor Schmid. Il est partenaire de la puissante agence de communication <em>Konsulenten </em>et en activité depuis des décennies. Il est à noter qu’il ne s'agit manifestement pas que d’argent. «Les parlementaires», dit Schmid, «cherchent un domaine d’activité qui leur soit profitable. Mais nombre d'entre eux n’ont pas le savoir-faire. Nous pouvons leur fournir cela.»</p> <h2><br />Leçon 2: Le bon siège. Comment le choix de la bonne commission détermine à quel point un mandat sera lucratif</h2> <p>Comment un ancien enseignant, officier de carrière et directeur des finances devient-il un des politiciens de la santé les mieux payés du pays? Avec un peu de chance lors de la distribution des sièges au sein du parti. Car s’il y a un levier pour décrocher rapidement un job accessoire lucratif, c'est bien le choix de la bonne commission d'experts au Parlement.</p> <p>Les lois et les modifications des lois sont préparées par cette commission; c’est là que les décisions importantes sont prises. Mais toutes les commissions permanentes, 12 du Conseil national, 11 du Conseil aux États, n’ont pas la même importance. Tout en haut de la hiérarchie des chasseurs de mandats se trouvent la Commission de la santé et la Commission de l’économie et des redevances. «Qui siège dans ces comités reçoit des offres», dit l’ancien lobbyiste de la Migros Martin Schläpfer. «La plupart des parlementaires veulent y aller, même ceux qui n’ont pas de compétences spécifiques.» Et si on y entre, en général on y reste, aussi longtemps que le Conseil siège, huit ans, peut-être douze. «Cela est intéressant pour les entreprises», dit M. Schläpfer.</p> <p>Les conseillers aux États sont particulièrement intéressants. À la chambre basse, les commissions sont plus petites: 13 membres au lieu de 25. Chaque voix a plus de poids, comme avec l’ancien enseignant et officier de carrière.</p> <p>Il s’appelle Josef Dittli et a été élu conseiller aux États pour le canton d’Uri il y a quatre ans. Sa dernière activité avant cela: directeur financier du canton. À Berne, il arrive à entrer à la Commission de la santé et prend plusieurs mandats, dont en 2018 le plus lucratif de tous: la présidence de l'association des caisses-maladie Curafutura, un job à 40 pour cent rémunéré à hauteur de 140’000 francs par an.</p> <p>Depuis, on peut observer chez Dittli un net assouplissement sur les questions réglementaires. En 2016, avant d’être président de Curafutura, il avait fermement contribué à réduire à néant un projet de loi sur les produits tabagiques. La loi aurait rempli les conditions de la convention sur le tabac de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et l’interdiction de la publicité pour les cigarettes et autres produits tabagiques aurait donc été renforcée. Le lobby du tabac souhaitait un rejet de cette loi. Dittli déposa la requête adéquate. Cela bien qu’il ait déclaré au Conseil que la protection des mineurs lui tenait à cœur. L’interdiction globale de la publicité aurait été une atteinte trop forte pour l’économie de marché. La majorité l’approuva et la loi fut réduite à néant.</p> <p>Deux ans plus tard, Dittli étant entretemps devenu président de Curafutura, il encouragea la Confédération à proposer que la loi sur le tabac soit élaborée conformément aux demandes de l’OMS. «Nombre des présents n’en croyaient pas leurs oreilles», écrivait à l’époque l’<em>Aargauer Zeitung</em>.</p> <p>Dittli suivait à la lettre la ligne de Curafutura. L’association des caisses-maladie prône une interdiction contraignante de la publicité. Alors il vota au Conseil pour un renforcement de la loi sur la protection des mineurs, même si d'un point de vue libéral, elle allait un peu trop loin, comme il disait.</p> <p>«Mes choix de vote répondent cependant à mes propres prises de position», affirme Dittli.</p> <p>«Balivernes», réagit à cette déclaration l'ex-lobbyiste Schläpfer. «Il est tout à fait normal de s’engager en faveur de son entreprise». Le précédent président de Curafutura, Ignazio Cassis, y gagnait 180’000 francs». «Personne ne me dira qu’il était indépendant».</p> <h2><br />Leçon 3: Le tapis à 100’000 francs. Comment les agences de lobbying créent les besoins pour ensuite les assouvir</h2> <p>Les agences de relations publiques en arrière-plan sont le carburant du système. Dans la Berne fédérale, les lobbyistes externes s’occupent constamment de générer le chiffre d’affaire pour leurs entreprises. Et comme toujours, lorsqu’il faut vendre, il faut créer un besoin. «Les bonnes entreprises trouvent leurs clients elles-mêmes», dit Daniel Heller de l’agence Farner.</p> <p>Ce qu’il entend par là: les agences gardent l’œil sur les évènements, comme une modification de loi, qui pourraient avoir un effet néfaste sur un groupe donné. S’il apparait, l’agence offre au groupe un paquet de mesures: arguments, stratégies, documentation, discours. Elle dispose «un tapis», comme on dit dans le jargon de la branche. Et ce aussi vite que possible. L’attaque contre le projet doit se faire au plus tard au début de la procédure de consultation.</p> <p>En disposant le tapis, l'agence apparait en arrière-plan. Le principe: «All politics are local». Au lieu de s’adresser directement aux parlementaires, l’agence organise des rencontres entre les représentants du peuple et les entreprises locales. «Rien n'est aussi efficace que ces entretiens individuels», dit Daniel Heller.</p> <p>Empêcher une loi ou aider à la faire passer n'est pas gratuit. «Accompagner intensément un projet de loi du début jusqu’au vote final au Parlement ou même jusqu’à la votation populaire avec toutes les mesures de communication requises peut coûter jusqu’à 100’000 franc par année et durer trois à cinq ans». C'est ce que dit Victor Schmid de l’agence de communication Konsulenten. Le représentant d'une autre grande agence de conseil avance le même chiffre. Selon le conseiller, cela comprend un peu de potins dans les médias et tout un catalogue d’arguments. Les médias sont manifestement des idiots utiles dans ce jeu.</p> <p>Si l’attaque précoce échoue et que la loi arrive aux Conseils, les lobbyistes externes tentent de compliquer les navettes entre le Conseil national et le Conseil aux États. Ce qui provoque des retards et des dilutions, dans le meilleur des cas l’empêchement. «Pour cela, une agence efficace peut disposer en permanence de l'action d'une douzaine de conseillers nationaux et aux États», dit le membre d’une grande agence de relations publiques.</p> <h2><br />Leçon 4: L’opportuniste. Comment bien s'en sortir avec un bel éventaire</h2> <p>Il y a bien une chose que l’on ne peut pas reprocher au conseiller national bâlois UDC Sebastien Frehner: qu’il soit partialement intéressé. Il peut s’enthousiasmer tant pour des substances dangereuses pour la santé comme le tabac et l’alcool que pour les entreprises qui ont des intérêts pour la santé de la population. Il a des mandats auprès de la caisse-maladie Groupe Mutuel, du Forum santé pour tous, du GI Recherche biomédicale. Il fait partie du GI Boissons fraîches qui s’occupe des boissons sucrées, du GI Plaisir et du groupe parlementaires Spiritueux et prévention. Dans ce cadre, il se met entièrement au service de ses donneurs d’ordres. On lui a demandé une fois dans l’émission «Rundschau» de la SRF s’il préservait ses propres intérêts. Sa réponse: «Exactement».</p> <p>Pour remplir ses mandats, Frehner se détourne aussi parfois de la ligne du parti. En mars, il a voté pour une augmentation des franchises, même si l’UDC était contre. Il représente les intérêts aussi en dehors des séances des Conseils. Lundi matin, il invite à la présentation «Quelle est la valeur de la vie humaine?». Le discours est tenu par le lobbyiste des pharmas René Buholzer.</p> <p>Deux jours plus tard, le 25 septembre, Frehner tient cour en tant que président du GI Plaisir. Avec «Plaisir sans risque» en compagnie de Nastasja Sommer, lobbyiste de Japan Tobacco. Elle parle de la loi sur les produits tabagiques. Le dîner de gala promet une sélection d’eaux-de-vie, whisky et cigares - un des nombreux événements culinaires au cours desquels politiciens et lobbyistes aiment trinquer entre eux. «Je ne me vois pas comme le représentant de ces diverses branches», se défend Frehner. En libéral, il dit:</p> <p>«Dans le doute, toujours en faveur de l’économie».</p> <p>En tant que conseiller du Groupe Mutuel, il veut comprendre les préoccupations des hôpitaux, des caisses-maladies, des entreprises pharmaceutiques et des cantons. Pour cette compréhension, il reçoit 10’000 par année. En tant que conseiller de Spiritsuisse, il s’engage pour «une branche importante de l’économie de notre pays». Le portefeuille de Frehner fait penser à ces vendeurs en bord de la Méditerranée qui tentent d’aguicher les baigneurs, l’éventaire suspendu autour du cou.</p> <h2><br />Leçon 5: Lobbyiste de gauche. Comment un syndicaliste peut empocher 250’000 francs au Conseil national</h2> <p>Bien sûr, tous les parlementaires ne se laissent pas payer royalement par des entreprises ou des associations. Certains n’ont aucun mandat, d’autres seulement des mandats qui ne leur rapportent qu’un ou deux milliers de francs. Pour les jobs accessoires lucratifs, les politiciens bourgeois ont l'avantage. Pas parce qu’ils se laissent plus facilement influencer. Leur position politique reflète simplement la position des entreprises et associations économiques qui leur offrent de tels mandats.</p> <p>Mais les politiciens de gauche se font aussi bien rémunérer leurs services, par exemple comme syndicalistes au Parlement. Le conseiller national bernois PS Corrado Pardini dirige le secteur Industrie du syndicat Unia, avec un taux d’occupation à 70 pour cent. «Oui, je représente les intérêts des syndicats», dit-il. Il se bat au Parlement pour la protection des travailleurs et des salaires équitables. En ce moment, il mène des discussions en dehors des partis pour sortir l’AVS et le 2<sup>e</sup>pilier des taux négatifs. «Mais je ne suis pas un lobbyiste, je suis juste employé par le syndicat depuis 32 ans». Selon ses propres dires, il touche de la part d’Unia un salaire brut de 110’292 francs par an. Avec à ses prestations de conseiller national, Pardini gagne presque un quart de million de francs.</p> <p>Pardini est un lobbyiste institutionnel. Il a déjà été choisi comme représentant d’intérêts, comme le libéral Hans-Ulrich Bigler, le directeur de l’Union suisse des arts et métiers. Mais travailler à 70 pour cent à côté du mandat au national, c’est bien ambitieux. Si l’on prend en compte tous les jours de siège au Parlement et aux Commissions, c’est à la limite de l’impossible. Selon les études, un mandat au Conseil national équivaut de nos jours à un travail à 80 pour cent.</p> <h2><br />Leçon 6: Ne pas se faire remarquer. Pourquoi les parlementaires discrets et sages récoltent plus</h2> <p>Soixante-et-un hommes et femmes ont été nouvellement élus au Parlement il y a quatre ans. 48 d’entre eux ont depuis acquis un ou plusieurs mandats privés. Le mandat dépend, à part de la Commission, de la position politique. «Les parlementaires obtiennent des mandats conformes à leurs convictions», dit Daniel Heller de Farner. Il serait difficile de convaincre un vert d’entrer au lobby des autos. Mais le caractère est aussi décisif. Les parlementaires bruyants qui aiment se mettre en scène ne sont pas appréciés. «Les sages font les meilleurs lobbyistes», explique l'ex-lobbyiste Schläpfer. Un conseiller national qui agresse volontiers les autres n’est pas fait pour ce travail. Et ceux qui sont encore très politisés au début deviendront vite plus calmes à un bon poste. «Celui qui s’est assuré un bon mandat ne sera plus très actif au sein du parti», dit Schläpfer.</p> <h2><br />Leçon 7: Créer des alliances: Pourquoi y a-t-il au et autour du Palais fédéral des petits lobbys pour tout</h2> <p>Quel est le point commun entre les abeilles, les fans de sport, la langue de signes, l’aéronautique, le cheval, la musique populaire et deux douzaines de différents pays? Tous ont leur propre groupe d’intérêts parlementaire. On enregistre près de 160 de ces groupes. Tous ont une présidence et un secrétariat, la plupart dirigés par une association y relative, parfois aussi par une agence de lobbying. Rien que l'agence Furrerhugi se charge d’administrer cinq groupes. Viennent s’y ajouter les groupes d’intérêts extraparlementaires. Le GI Maladies rares, promu par les pharmas, les hôpitaux et les organisations de patients - secrétariat: Furrerhugi. Ou le Cercle de travail sécurité et techniques de défense, une organisation de lobbying pour la controversée industrie suisse de l’armement qui réunit plus de 40 conseillers nationaux et aux États. Secrétariat: Farner Consulting. Les agences de lobbying créent les besoins - ça vaut aussi ici. «Les agences repèrent un problème et fondent un GI ou une association pour le combattre», dit l’ancien lobbyiste de la Migros, Martin Schläpfer.</p> <p>Lorenz Hess préside lui aussi un GI. Il s'appelle le GI Boissons fraîches et est le lobby des fabricants de boissons sucrées. Hess en reçoit 8’000 à 9’000 francs. Et encore: l’apôtre de la santé et du plaisir, Sebastian Frehner.</p> <h2><br />Leçon 8: La communauté des héritiers. Comment les mandats passent d’un membre du parti à un autre</h2> <p>Le Dr Beat Vonlanthen est un conseiller aux États comme on se l’imagine: 62 ans, cheveux mi-sel, mi-poivre, ancien conseiller d’État PDC, au slogan politique: «Renforcer le modèle à succès de la Suisse». Depuis son élection en 2015, il a acquis quelques mandats, de l'Association des casinos à l'Association professionnelle des pompes à chaleur. Mais il est avant tout président de Chocosuisse, l'association des fabricants de chocolat, et de Cemsuisse, l'association de l’industrie du ciment.</p> <p>Le prédécesseur de Vonlanthen était son collègue de parti Urs Schwaller et c'est de lui que Vonlanthen a repris la présidence de Cemsuisse. Il a reçu d’un autre collègue de parti, Peter Bieri, l'Association professionnelle des pompes à chaleur et il a obtenu du PDC Christophe Darbelley l’Association des casinos. C'est un principe courant dans la politique suisse: la succession dans des conditions démocratiques.</p> <p>Une succession fiable est payante, aussi dans ce cas. En effet, Vonlanthen siège à la Commission des affaires juridiques, qui est en charge de l’initiative pour des multinationales responsables, une initiative de gauche qui veut rendre les multinationales suisses responsables pour les dommages causés par leurs filiales à l’étranger. Les multinationales se défendent discrètement, à travers leur réseau au Palais fédéral.</p> <p>Lorsqu’à l’automne 2017, Vonlanthen a pour la première fois à faire avec l'initiative, il déclare à la radio vouloir un contreprojet. Mais les grandes associations économiques ne veulent pas d'un contreprojet. Leur crainte: en cas de doute, le peuple</p> <p>se déciderait pour l’original, à savoir l’initiative. Elles commencent à intensifier le lobbying au Palais fédéral. Le 12 mars 2019, le Conseil aux États recommande le contreprojet. Le lobbying s’affaire jusqu’au soir. Pour finir, le Conseil décide à 22 voix contre 20 pour l’économie et rejette tant l’initiative que le contreprojet.</p> <p>La voix décisive de cette majorité est celle de Vonlanthen. Il a changé d’avis, pour lui, un contreprojet n’entre plus en compte. Il suit désormais la ligne de multinationales comme Lafarge Holcim, qu’il représente dans l'association du ciment. On discute à mots couverts du changement d'avis de Vonlanthen.</p> <p>«C'est le jeu des ramifications des associations économiques», disent certains au sein du parti. Vonlanthen dit: «J’ai été et suis toujours pour des solutions compatibles avec l’économie. Je n’ai pas revu ma position à la suite de pressions externes».</p> <h2><br />Limiter les mandats</h2> <p>Les mandats payés ne sont pas illégaux. Tout membre du Parlement fédéral a le droit d’accepter tous ces jobs accessoires. Mais depuis l’année passée, tous les intérêts particuliers doivent être divulgués.</p> <p>Avec son initiative parlementaire, le conseiller aux États valaisan PDC</p> <p>veut endiguer ces intrications. Il demande à ce qu’un membre du Conseil ne puisse accepter de mandats que d’entreprises et organisations qui n’ont aucun rapport avec la Commission dans laquelle il siège. Ainsi, qui fait de la politique à la Commission de l’énergie doit refuser les mandats des exploitants d’énergie.</p> <p>Le Conseiller national UDC Claudio Zanetti propose d’abolir les commissions permanentes et de revenir au système précédent. Jusqu’en 1991, beaucoup de commissions spéciales étaient formées pour diverses affaires. Cela pourrait empêcher que des parlementaires siègent dans les mêmes commissions pendant plusieurs législatures.</p> <hr /> <h2>Le lobbyisme à Berne:</h2> <p><strong>1959</strong></p> <p>mandats sont actuellement déclarés par 246 conseillers nationaux et aux États. En moyenne, il s’agit de huit mandats par conseiller national, dix par conseiller aux États, selon le calcul de l’ONG Transparency International Suisse. Le nombre de mandats a plus que doublé entre 2000 et 2011.</p> <p><strong>150</strong></p> <p>à 200 mandats en moyenne ont été détenus par des membres de la Commission de l’économie et des redevances du Conseil national au cours des 15 dernières années.</p> <p><strong>1700</strong></p> <p>organisations ont, grâce à un mandat ou une carte d'entrée au Palais fédéral, un accès direct à au moins un membre du Conseil.</p> <p><strong>11</strong></p> <p>C'est la place de la Suisse sur la liste des pays de l’UE en ce qui concerne la transparence et le lobbyisme en politique. Elle s'en tire particulièrement mal au niveau des sanctions.</p> <p>Tabac et eau-de-vie: le conseiller national bâlois UDC Sebastian Frehner, 46.</p> <p>Syndicats: le conseiller national bernois PS Corrado Pardini, 54. Ciment: le conseiller aux États fribourgeois PDC Beat Vonlanthen, 62.</p> <p>Caisses-maladie: le conseiller national bernois PBD Lorenz Hess, 58.</p> <hr /> <h2>A lire aussi:</h2> <p><a href="/actuel/l-argent-et-la-politique-quelle-hypocrisie" target="_blank" rel="noopener"><em>L'argent et la politique: quelle hypocrisie!</em></a></p> <p><a href="/actuel/conseil-federal-et-parlement-dans-les-filets-du-lobby-des-pesticides" target="_blank" rel="noopener"><em>Conseil fédéral et Parlement dans les filets du lobby des pesticides</em></a></p>', 'content_edition' => null, 'slug' => 'prendre-et-donner', 'headline' => false, 'homepage' => 'col-md-12', 'like' => (int) 684, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1924, 'homepage_order' => (int) 2184, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 5, 'person_id' => (int) 85, 'post_type_id' => (int) 1, 'poster_attachment' => null, 'editions' => [], 'tags' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Tag) {} ], 'locations' => [], 'attachment_images' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'attachments' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'comments' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Comment) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Comment) {}, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Comment) {} ], 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ '*' => true, 'id' => false ], '[dirty]' => [], '[original]' => [], '[virtual]' => [], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [], '[invalid]' => [], '[repository]' => 'Posts' } $relatives = [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 4881, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => false, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => null, 'readed' => null, 'subhead' => null, 'title' => 'La Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) aurait-elle engagé une guerre contre le monde des réalités?', 'subtitle' => 'Avec le jugement favorable à la plainte de l’association KlimaSeniorinnen Schweiz, la CEDH ouvre la voie à la sanction des Etats en se fondant sur des arguments façonnés dans un monde imaginaire. 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Par ce jugement, la CEDH semble vouloir enterrer toute démarche rationnelle appuyée sur des faits pour favoriser des croyances.</p> <p>Accrochées à un mouvement généralisé autour du climat, qui favorise la foi d’une construction sociale de la réalité, à l’instar de la «justice climatique», ces plaignantes semblent avoir banni de leur plaidoyer tout ce qui pourrait résister au contrôle humain de la météo du jour, sans égards aux résultats scientifiques et leurs immenses incertitudes concernant les climats futurs. Les plaignantes ont accusé en substance les autorités suisses de mener une politique climatique aux objectifs et aux mesures insuffisantes, «en violation de leur droit à la vie», arguant de la vulnérabilité des personnes âgées face aux effets des changements en cours, et en particulier aux vagues de chaleur. Ce qui est visé, selon le jugement, serait l’incapacité de la Suisse à fournir une estimation des émissions de gaz à effet de serre futures afin de limiter «le réchauffement climatique» au fameux 1,5°C de l’Accord de Paris, valeur pourtant parfaitement arbitraire et dont les conséquences néfastes restent difficiles à identifier.</p> <p>Mais qu’en est-il vraiment? Que disent les données des études démographiques sur la «violation du droit à la vie» que ce soit sous les climats helvétiques ou mondiaux? Le «réchauffement climatique» met-il réellement en péril le «droit à la vie» des femmes âgées de Suisse?</p> <p>Premier constat, d’après les données de l’Office Fédéral de la Statistique (OFS), l’espérance de vie à la naissance des femmes suisses est passée de 79,3 ans en 1982 à 85,4 ans en 2022, et ce malgré «l’urgence climatique», soit un gain de 56 jours par an depuis 1982. Sur la même période, l’espérance de vie à 65 ans, âge minimal de ces militantes, est passée de 18,4 à 22,5 années. Il ne semble pas que «le climat» ait eu des conséquences fâcheuses sur leur droit à la vie.</p> <p>En recoupant les données de l’OFS et de Météosuisse, on peut observer la nature cyclique du nombre de décès par semaine des personnes de plus de 65 ans en Suisse, de 2010 à 2024 (Figure).</p> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1713434705_capturedcran2024041812.04.17.png" class="img-responsive img-fluid center " width="784" height="554" /></p> <p>La courbe noire pleine montre que les périodes hivernales restent les plus fatales, toutes causes confondues, pouvant parfois accroître la mortalité de 72% par rapport aux périodes estivales. Bien que les variabilités démographiques soient complexes à appréhender avec précision (comme les «effets moisson» ou les crises sanitaires telles la Covid-19), cette nature cyclique confirme simplement que «le froid tue».</p> <p>Pour s’en convaincre, s’affichent en gris sur la figure et à titre d’exemple, les températures <i>maximales </i>quotidiennes de la station de Neuchâtel montrant de larges amplitudes au cours de l’année. A partir du printemps 2020, la courbe des décès-toutes-causes subit les perturbations du Coronavirus et ses conséquences, rendant hasardeuse toute interprétation de détail. Mais la forte anti-corrélation entre décès et saisonnalité demeure. Nous supportons bien plus aisément les températures non-optimales chaudes que froides. Une étude récente<strong><sup>1</sup></strong> publiée dans <i>The Lancet</i> sur les excès de mortalité dans les villes européennes entre 2000 et 2019, dus cette fois uniquement aux températures non-optimales chaudes ou froides, confirme la tendance générale: entre 65 et 74 ans, le froid tue en Suisse 3 fois plus que le chaud, entre 75 et 84 ans, 6 fois plus, et au-dessus de 85 ans, 7,6 fois davantage. Dans une autre étude du <i>Lancet</i><strong><sup>2</sup></strong> sur les températures non-optimales entre 2000 et 2019 au niveau mondial, le constat est identique: le taux mondial de surmortalité liée au froid a baissé de 0,5% alors que celui lié à la chaleur aurait augmenté de 0,2%, conduisant à une réduction nette du ratio mondial des décès liés aux températures extrêmes. Mais ces pourcentages ne touchent pas le même nombre de personnes, bien plus nombreuses à décéder durant les hivers, ce qui amplifie davantage le bénéfice d’un réchauffement climatique. Ces militantes du climat semblent donc avoir convaincu la CEDH de porter la justice dans un monde fantasmé, où seules les températures excessivement chaudes président à la destinée des femmes, en invitant la Suisse à rejeter la réalité des faits.</p> <p>Pourtant, dans le monde réel, faut-il le rappeler, l’espérance de vie des Suissesses n’a cessé d’augmenter, et ce malgré le «dérèglement climatique», et grâce, pour l’essentiel, aux énergies fossiles. De plus, les décès directement liés aux températures non-optimales s’amenuisent grâce en grande partie à des hivers plus cléments.</p> <p>Dans le monde réel, un pays riche comme la Suisse permet à sa population de s’adapter aisément aux inconforts météorologiques (chauffage ou climatisation, isolations, facilité d’accès aux soins, énergie toujours disponible, etc.). A cela peut s’ajouter une topographie bienveillante durant les étés avec de nombreux lacs et rivières, et une fraicheur montagnarde accessible.</p> <p>Dans le monde réel, la Suisse a diminué de près de 40% ses émissions de CO<sub>2</sub> par habitant depuis 1980 et 91% de sa production électrique est bas-carbone. 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Par Michael Furger, Peter Hossli, Samuel Tanner, Laurina Waltersperger
Publié initialement par la NZZ am Sonntag
La petite phrase semble fortuite. Comme la réponse à une question que personne n’a posée. «Je suis bien des choses, mais pas un lobbyiste», a dit le conseiller national PBD Lorenz Hess lors de l’émission de la SRF Arena. Intéressant que ce soit justement Hess qui le dise. Il détient un des mandats les plus lucratifs de la Berne fédérale. Il touche 142’300 francs pour la présidence de la caisse-maladie Visana. Il pourrait défendre les intérêts de son bailleur dans la puissante commission pour la santé du Conseil national, s’il était lobbyiste. Mais non. Il n’en est pas un.
Mais qu'est-il donc? Lui et tous les autres conseillers nationaux et aux États à la solde d’entreprises et d’associations? Comment ont-ils décrochés leurs mandats lucratifs? Et surtout: quels sont les effets de ces mandats et de cet argent sur un politicien? Peut-on acheter les décisions politiques en Suisse et si oui, quel en est le prix?
Personne ne sait exactement combien d’argent est en circulation. Une recherche publiée récemment, mandatée par le conseiller national PS argovien Cédric Wermuth, cite deux contributions, mais elles reposent de loin sur une estimation. Le montant des sommes n’est cependant pas décisif, la question est celle du pouvoir de cet argent.
Une équipe du NZZ am Sonntag a enquêté sur les mandats et les votes et a parlé avec plus d’une douzaine de faiseurs d’opinion et de lobbyistes. Le résultat montre comment les lois sont faites, modifiées ou enterrées au Palais fédéral, sous les arcades bernoises et dans les compartiments de 1ère classe entre Genève et Saint-Gall. Les ficelles sont tirées tant par les politiciens de droite que de gauche. Un guide sur l’influence politique en huit leçons.
Leçon 1: La carrière des mandats. Comment faire de la représentation des intérêts un métier lucratif
Un conseiller national gagne en moyenne 123’589 francs frais compris, un conseiller aux États 138’269. Près de la moitié n'est pas imposable. C'est convenable, mais ça ne suffit pas à tous. Pour améliorer leurs revenus, les parlementaires de milice prennent des jobs accessoires, dont «il y a à Berne une multitude». C'est en tout cas ainsi que le dit l’ancien CEO d'une grande agence de lobbying.
Lorenz Hess maitrise comme personne l’art d’accumuler les jobs accessoires à disposition et d’en faire une carrière. Il a pour ce faire un bagage professionnel parfait: maturité, conseiller en relations publiques, responsable de l’information auprès de la police municipale de Berne.
De plus, il dirige le département de la communication du Département fédéral de la santé et s'engage dans une des branches les plus lucratives de Suisse: les soins de santé.
Hess apprend auprès de la Confédération comment l’État traite les caisses, les hôpitaux, les médicaments et les médecins. Il apporte son savoir à l'ancienne agence de relations publiques Burson-Marsteller. Il dirige ensuite sa propre agence de lobbying. Il réussit à entrer au Conseil national en 2011, où il siège à l’influente Commission de la sécurité sociale et de la santé publique (CSSS). Quatre ans plus tard, Hess vend son agence à Furrerhugi, une des entreprises de lobbying leader à Berne et réunit dès lors ses intérêts sous le toit de Hess Advisum GmbH. «Le but de l’entreprise est de fournir des prestations de conseil», peut-on lire au registre du commerce. Hess conseille dans son réseau et là où il s’y connait. Il est le président de la Fondation Pankréas, siège au comité de Spitex, conseille la Faculté de médecine de l’Université de Berne et la Fondation suisse pour paraplégiques à Nottwil. Depuis 2017, il préside le Conseil administratif et de la fondation de Visana. «Il a de bons amis, et il rend la pareille», disent ceux qui lui sont favorables.
D'autres médisent qu’il fait du trafic d’influence.
Au Conseil national et à la Commission, il vote conséquemment pour la réduction des coûts pour les caisses-maladie. Par exemple lorsqu’il s’engage en faveur du dossier électronique des patients. Dans les médias, il s’engage fermement pour les vaccins obligatoires et propose que les malades non vaccinés participent aux coûts des soins. Ce qui est encore à l’avantage des caisses.
Il n'est pas à vendre, répond Hess. «Je suis membre du Parlement. En même temps, je travaille comme président du Conseil d'administration d'une grande assurance maladie et je suis payé pour mon travail», dit-il. «Il est dès lors clair que je vote dans l’intérêt de notre branche.» Le lobbying ne figure pas dans son cahier des charges. Il n’a jamais envoyé un e-mail de recommandation de la caisse-maladie, il n’essayerait jamais d’influencer un membre de la Commission.
Peu ont - en toute légalité - bâti dans la Berne fédérale une carrière de mandats aussi brillante que Hess. De nombreux parlementaires détiennent quelques petits mandats. D'autres ont une démarche ciblée. «Il y a des politiciens qui nous demandent si nous pouvons leur procurer un mandat», dit Victor Schmid. Il est partenaire de la puissante agence de communication Konsulenten et en activité depuis des décennies. Il est à noter qu’il ne s'agit manifestement pas que d’argent. «Les parlementaires», dit Schmid, «cherchent un domaine d’activité qui leur soit profitable. Mais nombre d'entre eux n’ont pas le savoir-faire. Nous pouvons leur fournir cela.»
Leçon 2: Le bon siège. Comment le choix de la bonne commission détermine à quel point un mandat sera lucratif
Comment un ancien enseignant, officier de carrière et directeur des finances devient-il un des politiciens de la santé les mieux payés du pays? Avec un peu de chance lors de la distribution des sièges au sein du parti. Car s’il y a un levier pour décrocher rapidement un job accessoire lucratif, c'est bien le choix de la bonne commission d'experts au Parlement.
Les lois et les modifications des lois sont préparées par cette commission; c’est là que les décisions importantes sont prises. Mais toutes les commissions permanentes, 12 du Conseil national, 11 du Conseil aux États, n’ont pas la même importance. Tout en haut de la hiérarchie des chasseurs de mandats se trouvent la Commission de la santé et la Commission de l’économie et des redevances. «Qui siège dans ces comités reçoit des offres», dit l’ancien lobbyiste de la Migros Martin Schläpfer. «La plupart des parlementaires veulent y aller, même ceux qui n’ont pas de compétences spécifiques.» Et si on y entre, en général on y reste, aussi longtemps que le Conseil siège, huit ans, peut-être douze. «Cela est intéressant pour les entreprises», dit M. Schläpfer.
Les conseillers aux États sont particulièrement intéressants. À la chambre basse, les commissions sont plus petites: 13 membres au lieu de 25. Chaque voix a plus de poids, comme avec l’ancien enseignant et officier de carrière.
Il s’appelle Josef Dittli et a été élu conseiller aux États pour le canton d’Uri il y a quatre ans. Sa dernière activité avant cela: directeur financier du canton. À Berne, il arrive à entrer à la Commission de la santé et prend plusieurs mandats, dont en 2018 le plus lucratif de tous: la présidence de l'association des caisses-maladie Curafutura, un job à 40 pour cent rémunéré à hauteur de 140’000 francs par an.
Depuis, on peut observer chez Dittli un net assouplissement sur les questions réglementaires. En 2016, avant d’être président de Curafutura, il avait fermement contribué à réduire à néant un projet de loi sur les produits tabagiques. La loi aurait rempli les conditions de la convention sur le tabac de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et l’interdiction de la publicité pour les cigarettes et autres produits tabagiques aurait donc été renforcée. Le lobby du tabac souhaitait un rejet de cette loi. Dittli déposa la requête adéquate. Cela bien qu’il ait déclaré au Conseil que la protection des mineurs lui tenait à cœur. L’interdiction globale de la publicité aurait été une atteinte trop forte pour l’économie de marché. La majorité l’approuva et la loi fut réduite à néant.
Deux ans plus tard, Dittli étant entretemps devenu président de Curafutura, il encouragea la Confédération à proposer que la loi sur le tabac soit élaborée conformément aux demandes de l’OMS. «Nombre des présents n’en croyaient pas leurs oreilles», écrivait à l’époque l’Aargauer Zeitung.
Dittli suivait à la lettre la ligne de Curafutura. L’association des caisses-maladie prône une interdiction contraignante de la publicité. Alors il vota au Conseil pour un renforcement de la loi sur la protection des mineurs, même si d'un point de vue libéral, elle allait un peu trop loin, comme il disait.
«Mes choix de vote répondent cependant à mes propres prises de position», affirme Dittli.
«Balivernes», réagit à cette déclaration l'ex-lobbyiste Schläpfer. «Il est tout à fait normal de s’engager en faveur de son entreprise». Le précédent président de Curafutura, Ignazio Cassis, y gagnait 180’000 francs». «Personne ne me dira qu’il était indépendant».
Leçon 3: Le tapis à 100’000 francs. Comment les agences de lobbying créent les besoins pour ensuite les assouvir
Les agences de relations publiques en arrière-plan sont le carburant du système. Dans la Berne fédérale, les lobbyistes externes s’occupent constamment de générer le chiffre d’affaire pour leurs entreprises. Et comme toujours, lorsqu’il faut vendre, il faut créer un besoin. «Les bonnes entreprises trouvent leurs clients elles-mêmes», dit Daniel Heller de l’agence Farner.
Ce qu’il entend par là: les agences gardent l’œil sur les évènements, comme une modification de loi, qui pourraient avoir un effet néfaste sur un groupe donné. S’il apparait, l’agence offre au groupe un paquet de mesures: arguments, stratégies, documentation, discours. Elle dispose «un tapis», comme on dit dans le jargon de la branche. Et ce aussi vite que possible. L’attaque contre le projet doit se faire au plus tard au début de la procédure de consultation.
En disposant le tapis, l'agence apparait en arrière-plan. Le principe: «All politics are local». Au lieu de s’adresser directement aux parlementaires, l’agence organise des rencontres entre les représentants du peuple et les entreprises locales. «Rien n'est aussi efficace que ces entretiens individuels», dit Daniel Heller.
Empêcher une loi ou aider à la faire passer n'est pas gratuit. «Accompagner intensément un projet de loi du début jusqu’au vote final au Parlement ou même jusqu’à la votation populaire avec toutes les mesures de communication requises peut coûter jusqu’à 100’000 franc par année et durer trois à cinq ans». C'est ce que dit Victor Schmid de l’agence de communication Konsulenten. Le représentant d'une autre grande agence de conseil avance le même chiffre. Selon le conseiller, cela comprend un peu de potins dans les médias et tout un catalogue d’arguments. Les médias sont manifestement des idiots utiles dans ce jeu.
Si l’attaque précoce échoue et que la loi arrive aux Conseils, les lobbyistes externes tentent de compliquer les navettes entre le Conseil national et le Conseil aux États. Ce qui provoque des retards et des dilutions, dans le meilleur des cas l’empêchement. «Pour cela, une agence efficace peut disposer en permanence de l'action d'une douzaine de conseillers nationaux et aux États», dit le membre d’une grande agence de relations publiques.
Leçon 4: L’opportuniste. Comment bien s'en sortir avec un bel éventaire
Il y a bien une chose que l’on ne peut pas reprocher au conseiller national bâlois UDC Sebastien Frehner: qu’il soit partialement intéressé. Il peut s’enthousiasmer tant pour des substances dangereuses pour la santé comme le tabac et l’alcool que pour les entreprises qui ont des intérêts pour la santé de la population. Il a des mandats auprès de la caisse-maladie Groupe Mutuel, du Forum santé pour tous, du GI Recherche biomédicale. Il fait partie du GI Boissons fraîches qui s’occupe des boissons sucrées, du GI Plaisir et du groupe parlementaires Spiritueux et prévention. Dans ce cadre, il se met entièrement au service de ses donneurs d’ordres. On lui a demandé une fois dans l’émission «Rundschau» de la SRF s’il préservait ses propres intérêts. Sa réponse: «Exactement».
Pour remplir ses mandats, Frehner se détourne aussi parfois de la ligne du parti. En mars, il a voté pour une augmentation des franchises, même si l’UDC était contre. Il représente les intérêts aussi en dehors des séances des Conseils. Lundi matin, il invite à la présentation «Quelle est la valeur de la vie humaine?». Le discours est tenu par le lobbyiste des pharmas René Buholzer.
Deux jours plus tard, le 25 septembre, Frehner tient cour en tant que président du GI Plaisir. Avec «Plaisir sans risque» en compagnie de Nastasja Sommer, lobbyiste de Japan Tobacco. Elle parle de la loi sur les produits tabagiques. Le dîner de gala promet une sélection d’eaux-de-vie, whisky et cigares - un des nombreux événements culinaires au cours desquels politiciens et lobbyistes aiment trinquer entre eux. «Je ne me vois pas comme le représentant de ces diverses branches», se défend Frehner. En libéral, il dit:
«Dans le doute, toujours en faveur de l’économie».
En tant que conseiller du Groupe Mutuel, il veut comprendre les préoccupations des hôpitaux, des caisses-maladies, des entreprises pharmaceutiques et des cantons. Pour cette compréhension, il reçoit 10’000 par année. En tant que conseiller de Spiritsuisse, il s’engage pour «une branche importante de l’économie de notre pays». Le portefeuille de Frehner fait penser à ces vendeurs en bord de la Méditerranée qui tentent d’aguicher les baigneurs, l’éventaire suspendu autour du cou.
Leçon 5: Lobbyiste de gauche. Comment un syndicaliste peut empocher 250’000 francs au Conseil national
Bien sûr, tous les parlementaires ne se laissent pas payer royalement par des entreprises ou des associations. Certains n’ont aucun mandat, d’autres seulement des mandats qui ne leur rapportent qu’un ou deux milliers de francs. Pour les jobs accessoires lucratifs, les politiciens bourgeois ont l'avantage. Pas parce qu’ils se laissent plus facilement influencer. Leur position politique reflète simplement la position des entreprises et associations économiques qui leur offrent de tels mandats.
Mais les politiciens de gauche se font aussi bien rémunérer leurs services, par exemple comme syndicalistes au Parlement. Le conseiller national bernois PS Corrado Pardini dirige le secteur Industrie du syndicat Unia, avec un taux d’occupation à 70 pour cent. «Oui, je représente les intérêts des syndicats», dit-il. Il se bat au Parlement pour la protection des travailleurs et des salaires équitables. En ce moment, il mène des discussions en dehors des partis pour sortir l’AVS et le 2epilier des taux négatifs. «Mais je ne suis pas un lobbyiste, je suis juste employé par le syndicat depuis 32 ans». Selon ses propres dires, il touche de la part d’Unia un salaire brut de 110’292 francs par an. Avec à ses prestations de conseiller national, Pardini gagne presque un quart de million de francs.
Pardini est un lobbyiste institutionnel. Il a déjà été choisi comme représentant d’intérêts, comme le libéral Hans-Ulrich Bigler, le directeur de l’Union suisse des arts et métiers. Mais travailler à 70 pour cent à côté du mandat au national, c’est bien ambitieux. Si l’on prend en compte tous les jours de siège au Parlement et aux Commissions, c’est à la limite de l’impossible. Selon les études, un mandat au Conseil national équivaut de nos jours à un travail à 80 pour cent.
Leçon 6: Ne pas se faire remarquer. Pourquoi les parlementaires discrets et sages récoltent plus
Soixante-et-un hommes et femmes ont été nouvellement élus au Parlement il y a quatre ans. 48 d’entre eux ont depuis acquis un ou plusieurs mandats privés. Le mandat dépend, à part de la Commission, de la position politique. «Les parlementaires obtiennent des mandats conformes à leurs convictions», dit Daniel Heller de Farner. Il serait difficile de convaincre un vert d’entrer au lobby des autos. Mais le caractère est aussi décisif. Les parlementaires bruyants qui aiment se mettre en scène ne sont pas appréciés. «Les sages font les meilleurs lobbyistes», explique l'ex-lobbyiste Schläpfer. Un conseiller national qui agresse volontiers les autres n’est pas fait pour ce travail. Et ceux qui sont encore très politisés au début deviendront vite plus calmes à un bon poste. «Celui qui s’est assuré un bon mandat ne sera plus très actif au sein du parti», dit Schläpfer.
Leçon 7: Créer des alliances: Pourquoi y a-t-il au et autour du Palais fédéral des petits lobbys pour tout
Quel est le point commun entre les abeilles, les fans de sport, la langue de signes, l’aéronautique, le cheval, la musique populaire et deux douzaines de différents pays? Tous ont leur propre groupe d’intérêts parlementaire. On enregistre près de 160 de ces groupes. Tous ont une présidence et un secrétariat, la plupart dirigés par une association y relative, parfois aussi par une agence de lobbying. Rien que l'agence Furrerhugi se charge d’administrer cinq groupes. Viennent s’y ajouter les groupes d’intérêts extraparlementaires. Le GI Maladies rares, promu par les pharmas, les hôpitaux et les organisations de patients - secrétariat: Furrerhugi. Ou le Cercle de travail sécurité et techniques de défense, une organisation de lobbying pour la controversée industrie suisse de l’armement qui réunit plus de 40 conseillers nationaux et aux États. Secrétariat: Farner Consulting. Les agences de lobbying créent les besoins - ça vaut aussi ici. «Les agences repèrent un problème et fondent un GI ou une association pour le combattre», dit l’ancien lobbyiste de la Migros, Martin Schläpfer.
Lorenz Hess préside lui aussi un GI. Il s'appelle le GI Boissons fraîches et est le lobby des fabricants de boissons sucrées. Hess en reçoit 8’000 à 9’000 francs. Et encore: l’apôtre de la santé et du plaisir, Sebastian Frehner.
Leçon 8: La communauté des héritiers. Comment les mandats passent d’un membre du parti à un autre
Le Dr Beat Vonlanthen est un conseiller aux États comme on se l’imagine: 62 ans, cheveux mi-sel, mi-poivre, ancien conseiller d’État PDC, au slogan politique: «Renforcer le modèle à succès de la Suisse». Depuis son élection en 2015, il a acquis quelques mandats, de l'Association des casinos à l'Association professionnelle des pompes à chaleur. Mais il est avant tout président de Chocosuisse, l'association des fabricants de chocolat, et de Cemsuisse, l'association de l’industrie du ciment.
Le prédécesseur de Vonlanthen était son collègue de parti Urs Schwaller et c'est de lui que Vonlanthen a repris la présidence de Cemsuisse. Il a reçu d’un autre collègue de parti, Peter Bieri, l'Association professionnelle des pompes à chaleur et il a obtenu du PDC Christophe Darbelley l’Association des casinos. C'est un principe courant dans la politique suisse: la succession dans des conditions démocratiques.
Une succession fiable est payante, aussi dans ce cas. En effet, Vonlanthen siège à la Commission des affaires juridiques, qui est en charge de l’initiative pour des multinationales responsables, une initiative de gauche qui veut rendre les multinationales suisses responsables pour les dommages causés par leurs filiales à l’étranger. Les multinationales se défendent discrètement, à travers leur réseau au Palais fédéral.
Lorsqu’à l’automne 2017, Vonlanthen a pour la première fois à faire avec l'initiative, il déclare à la radio vouloir un contreprojet. Mais les grandes associations économiques ne veulent pas d'un contreprojet. Leur crainte: en cas de doute, le peuple
se déciderait pour l’original, à savoir l’initiative. Elles commencent à intensifier le lobbying au Palais fédéral. Le 12 mars 2019, le Conseil aux États recommande le contreprojet. Le lobbying s’affaire jusqu’au soir. Pour finir, le Conseil décide à 22 voix contre 20 pour l’économie et rejette tant l’initiative que le contreprojet.
La voix décisive de cette majorité est celle de Vonlanthen. Il a changé d’avis, pour lui, un contreprojet n’entre plus en compte. Il suit désormais la ligne de multinationales comme Lafarge Holcim, qu’il représente dans l'association du ciment. On discute à mots couverts du changement d'avis de Vonlanthen.
«C'est le jeu des ramifications des associations économiques», disent certains au sein du parti. Vonlanthen dit: «J’ai été et suis toujours pour des solutions compatibles avec l’économie. Je n’ai pas revu ma position à la suite de pressions externes».
Limiter les mandats
Les mandats payés ne sont pas illégaux. Tout membre du Parlement fédéral a le droit d’accepter tous ces jobs accessoires. Mais depuis l’année passée, tous les intérêts particuliers doivent être divulgués.
Avec son initiative parlementaire, le conseiller aux États valaisan PDC
veut endiguer ces intrications. Il demande à ce qu’un membre du Conseil ne puisse accepter de mandats que d’entreprises et organisations qui n’ont aucun rapport avec la Commission dans laquelle il siège. Ainsi, qui fait de la politique à la Commission de l’énergie doit refuser les mandats des exploitants d’énergie.
Le Conseiller national UDC Claudio Zanetti propose d’abolir les commissions permanentes et de revenir au système précédent. Jusqu’en 1991, beaucoup de commissions spéciales étaient formées pour diverses affaires. Cela pourrait empêcher que des parlementaires siègent dans les mêmes commissions pendant plusieurs législatures.
Le lobbyisme à Berne:
1959
mandats sont actuellement déclarés par 246 conseillers nationaux et aux États. En moyenne, il s’agit de huit mandats par conseiller national, dix par conseiller aux États, selon le calcul de l’ONG Transparency International Suisse. Le nombre de mandats a plus que doublé entre 2000 et 2011.
150
à 200 mandats en moyenne ont été détenus par des membres de la Commission de l’économie et des redevances du Conseil national au cours des 15 dernières années.
1700
organisations ont, grâce à un mandat ou une carte d'entrée au Palais fédéral, un accès direct à au moins un membre du Conseil.
11
C'est la place de la Suisse sur la liste des pays de l’UE en ce qui concerne la transparence et le lobbyisme en politique. Elle s'en tire particulièrement mal au niveau des sanctions.
Tabac et eau-de-vie: le conseiller national bâlois UDC Sebastian Frehner, 46.
Syndicats: le conseiller national bernois PS Corrado Pardini, 54. Ciment: le conseiller aux États fribourgeois PDC Beat Vonlanthen, 62.
Caisses-maladie: le conseiller national bernois PBD Lorenz Hess, 58.
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Lui et tous les autres conseillers nationaux et aux États à la solde d’entreprises et d’associations? Comment ont-ils décrochés leurs mandats lucratifs? Et surtout: quels sont les effets de ces mandats et de cet argent sur un politicien? Peut-on acheter les décisions politiques en Suisse et si oui, quel en est le prix?</p> <p>Personne ne sait exactement combien d’argent est en circulation. Une recherche publiée récemment, mandatée par le conseiller national PS argovien Cédric Wermuth, cite deux contributions, mais elles reposent de loin sur une estimation. Le montant des sommes n’est cependant pas décisif, la question est celle du pouvoir de cet argent.</p> <p>Une équipe du <em>NZZ am Sonntag</em> a enquêté sur les mandats et les votes et a parlé avec plus d’une douzaine de faiseurs d’opinion et de lobbyistes. Le résultat montre comment les lois sont faites, modifiées ou enterrées au Palais fédéral, sous les arcades bernoises et dans les compartiments de 1ère classe entre Genève et Saint-Gall. Les ficelles sont tirées tant par les politiciens de droite que de gauche. Un guide sur l’influence politique en huit leçons.</p> <h2><br />Leçon 1: La carrière des mandats. Comment faire de la représentation des intérêts un métier lucratif</h2> <p>Un conseiller national gagne en moyenne 123’589 francs frais compris, un conseiller aux États 138’269. Près de la moitié n'est pas imposable. C'est convenable, mais ça ne suffit pas à tous. Pour améliorer leurs revenus, les parlementaires de milice prennent des jobs accessoires, dont «il y a à Berne une multitude». C'est en tout cas ainsi que le dit l’ancien CEO d'une grande agence de lobbying.</p> <p>Lorenz Hess maitrise comme personne l’art d’accumuler les jobs accessoires à disposition et d’en faire une carrière. Il a pour ce faire un bagage professionnel parfait: maturité, conseiller en relations publiques, responsable de l’information auprès de la police municipale de Berne.</p> <p>De plus, il dirige le département de la communication du Département fédéral de la santé et s'engage dans une des branches les plus lucratives de Suisse: les soins de santé.</p> <p>Hess apprend auprès de la Confédération comment l’État traite les caisses, les hôpitaux, les médicaments et les médecins. Il apporte son savoir à l'ancienne agence de relations publiques Burson-Marsteller. Il dirige ensuite sa propre agence de lobbying. Il réussit à entrer au Conseil national en 2011, où il siège à l’influente Commission de la sécurité sociale et de la santé publique (CSSS). Quatre ans plus tard, Hess vend son agence à Furrerhugi, une des entreprises de lobbying leader à Berne et réunit dès lors ses intérêts sous le toit de Hess Advisum GmbH. «Le but de l’entreprise est de fournir des prestations de conseil», peut-on lire au registre du commerce. Hess conseille dans son réseau et là où il s’y connait. Il est le président de la Fondation Pankréas, siège au comité de Spitex, conseille la Faculté de médecine de l’Université de Berne et la Fondation suisse pour paraplégiques à Nottwil. Depuis 2017, il préside le Conseil administratif et de la fondation de Visana. «Il a de bons amis, et il rend la pareille», disent ceux qui lui sont favorables.</p> <p>D'autres médisent qu’il fait du trafic d’influence.</p> <p>Au Conseil national et à la Commission, il vote conséquemment pour la réduction des coûts pour les caisses-maladie. Par exemple lorsqu’il s’engage en faveur du dossier électronique des patients. Dans les médias, il s’engage fermement pour les vaccins obligatoires et propose que les malades non vaccinés participent aux coûts des soins. Ce qui est encore à l’avantage des caisses.</p> <p>Il n'est pas à vendre, répond Hess. «Je suis membre du Parlement. En même temps, je travaille comme président du Conseil d'administration d'une grande assurance maladie et je suis payé pour mon travail», dit-il. «Il est dès lors clair que je vote dans l’intérêt de notre branche.» Le lobbying ne figure pas dans son cahier des charges. Il n’a jamais envoyé un e-mail de recommandation de la caisse-maladie, il n’essayerait jamais d’influencer un membre de la Commission.</p> <p>Peu ont - en toute légalité - bâti dans la Berne fédérale une carrière de mandats aussi brillante que Hess. De nombreux parlementaires détiennent quelques petits mandats. D'autres ont une démarche ciblée. «Il y a des politiciens qui nous demandent si nous pouvons leur procurer un mandat», dit Victor Schmid. Il est partenaire de la puissante agence de communication <em>Konsulenten </em>et en activité depuis des décennies. Il est à noter qu’il ne s'agit manifestement pas que d’argent. «Les parlementaires», dit Schmid, «cherchent un domaine d’activité qui leur soit profitable. Mais nombre d'entre eux n’ont pas le savoir-faire. Nous pouvons leur fournir cela.»</p> <h2><br />Leçon 2: Le bon siège. Comment le choix de la bonne commission détermine à quel point un mandat sera lucratif</h2> <p>Comment un ancien enseignant, officier de carrière et directeur des finances devient-il un des politiciens de la santé les mieux payés du pays? Avec un peu de chance lors de la distribution des sièges au sein du parti. Car s’il y a un levier pour décrocher rapidement un job accessoire lucratif, c'est bien le choix de la bonne commission d'experts au Parlement.</p> <p>Les lois et les modifications des lois sont préparées par cette commission; c’est là que les décisions importantes sont prises. Mais toutes les commissions permanentes, 12 du Conseil national, 11 du Conseil aux États, n’ont pas la même importance. Tout en haut de la hiérarchie des chasseurs de mandats se trouvent la Commission de la santé et la Commission de l’économie et des redevances. «Qui siège dans ces comités reçoit des offres», dit l’ancien lobbyiste de la Migros Martin Schläpfer. «La plupart des parlementaires veulent y aller, même ceux qui n’ont pas de compétences spécifiques.» Et si on y entre, en général on y reste, aussi longtemps que le Conseil siège, huit ans, peut-être douze. «Cela est intéressant pour les entreprises», dit M. Schläpfer.</p> <p>Les conseillers aux États sont particulièrement intéressants. À la chambre basse, les commissions sont plus petites: 13 membres au lieu de 25. Chaque voix a plus de poids, comme avec l’ancien enseignant et officier de carrière.</p> <p>Il s’appelle Josef Dittli et a été élu conseiller aux États pour le canton d’Uri il y a quatre ans. Sa dernière activité avant cela: directeur financier du canton. À Berne, il arrive à entrer à la Commission de la santé et prend plusieurs mandats, dont en 2018 le plus lucratif de tous: la présidence de l'association des caisses-maladie Curafutura, un job à 40 pour cent rémunéré à hauteur de 140’000 francs par an.</p> <p>Depuis, on peut observer chez Dittli un net assouplissement sur les questions réglementaires. En 2016, avant d’être président de Curafutura, il avait fermement contribué à réduire à néant un projet de loi sur les produits tabagiques. La loi aurait rempli les conditions de la convention sur le tabac de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et l’interdiction de la publicité pour les cigarettes et autres produits tabagiques aurait donc été renforcée. Le lobby du tabac souhaitait un rejet de cette loi. Dittli déposa la requête adéquate. Cela bien qu’il ait déclaré au Conseil que la protection des mineurs lui tenait à cœur. L’interdiction globale de la publicité aurait été une atteinte trop forte pour l’économie de marché. La majorité l’approuva et la loi fut réduite à néant.</p> <p>Deux ans plus tard, Dittli étant entretemps devenu président de Curafutura, il encouragea la Confédération à proposer que la loi sur le tabac soit élaborée conformément aux demandes de l’OMS. «Nombre des présents n’en croyaient pas leurs oreilles», écrivait à l’époque l’<em>Aargauer Zeitung</em>.</p> <p>Dittli suivait à la lettre la ligne de Curafutura. L’association des caisses-maladie prône une interdiction contraignante de la publicité. Alors il vota au Conseil pour un renforcement de la loi sur la protection des mineurs, même si d'un point de vue libéral, elle allait un peu trop loin, comme il disait.</p> <p>«Mes choix de vote répondent cependant à mes propres prises de position», affirme Dittli.</p> <p>«Balivernes», réagit à cette déclaration l'ex-lobbyiste Schläpfer. «Il est tout à fait normal de s’engager en faveur de son entreprise». Le précédent président de Curafutura, Ignazio Cassis, y gagnait 180’000 francs». «Personne ne me dira qu’il était indépendant».</p> <h2><br />Leçon 3: Le tapis à 100’000 francs. Comment les agences de lobbying créent les besoins pour ensuite les assouvir</h2> <p>Les agences de relations publiques en arrière-plan sont le carburant du système. Dans la Berne fédérale, les lobbyistes externes s’occupent constamment de générer le chiffre d’affaire pour leurs entreprises. Et comme toujours, lorsqu’il faut vendre, il faut créer un besoin. «Les bonnes entreprises trouvent leurs clients elles-mêmes», dit Daniel Heller de l’agence Farner.</p> <p>Ce qu’il entend par là: les agences gardent l’œil sur les évènements, comme une modification de loi, qui pourraient avoir un effet néfaste sur un groupe donné. S’il apparait, l’agence offre au groupe un paquet de mesures: arguments, stratégies, documentation, discours. Elle dispose «un tapis», comme on dit dans le jargon de la branche. Et ce aussi vite que possible. L’attaque contre le projet doit se faire au plus tard au début de la procédure de consultation.</p> <p>En disposant le tapis, l'agence apparait en arrière-plan. Le principe: «All politics are local». Au lieu de s’adresser directement aux parlementaires, l’agence organise des rencontres entre les représentants du peuple et les entreprises locales. «Rien n'est aussi efficace que ces entretiens individuels», dit Daniel Heller.</p> <p>Empêcher une loi ou aider à la faire passer n'est pas gratuit. «Accompagner intensément un projet de loi du début jusqu’au vote final au Parlement ou même jusqu’à la votation populaire avec toutes les mesures de communication requises peut coûter jusqu’à 100’000 franc par année et durer trois à cinq ans». C'est ce que dit Victor Schmid de l’agence de communication Konsulenten. Le représentant d'une autre grande agence de conseil avance le même chiffre. Selon le conseiller, cela comprend un peu de potins dans les médias et tout un catalogue d’arguments. Les médias sont manifestement des idiots utiles dans ce jeu.</p> <p>Si l’attaque précoce échoue et que la loi arrive aux Conseils, les lobbyistes externes tentent de compliquer les navettes entre le Conseil national et le Conseil aux États. Ce qui provoque des retards et des dilutions, dans le meilleur des cas l’empêchement. «Pour cela, une agence efficace peut disposer en permanence de l'action d'une douzaine de conseillers nationaux et aux États», dit le membre d’une grande agence de relations publiques.</p> <h2><br />Leçon 4: L’opportuniste. Comment bien s'en sortir avec un bel éventaire</h2> <p>Il y a bien une chose que l’on ne peut pas reprocher au conseiller national bâlois UDC Sebastien Frehner: qu’il soit partialement intéressé. Il peut s’enthousiasmer tant pour des substances dangereuses pour la santé comme le tabac et l’alcool que pour les entreprises qui ont des intérêts pour la santé de la population. Il a des mandats auprès de la caisse-maladie Groupe Mutuel, du Forum santé pour tous, du GI Recherche biomédicale. Il fait partie du GI Boissons fraîches qui s’occupe des boissons sucrées, du GI Plaisir et du groupe parlementaires Spiritueux et prévention. Dans ce cadre, il se met entièrement au service de ses donneurs d’ordres. On lui a demandé une fois dans l’émission «Rundschau» de la SRF s’il préservait ses propres intérêts. Sa réponse: «Exactement».</p> <p>Pour remplir ses mandats, Frehner se détourne aussi parfois de la ligne du parti. En mars, il a voté pour une augmentation des franchises, même si l’UDC était contre. Il représente les intérêts aussi en dehors des séances des Conseils. Lundi matin, il invite à la présentation «Quelle est la valeur de la vie humaine?». Le discours est tenu par le lobbyiste des pharmas René Buholzer.</p> <p>Deux jours plus tard, le 25 septembre, Frehner tient cour en tant que président du GI Plaisir. Avec «Plaisir sans risque» en compagnie de Nastasja Sommer, lobbyiste de Japan Tobacco. Elle parle de la loi sur les produits tabagiques. Le dîner de gala promet une sélection d’eaux-de-vie, whisky et cigares - un des nombreux événements culinaires au cours desquels politiciens et lobbyistes aiment trinquer entre eux. «Je ne me vois pas comme le représentant de ces diverses branches», se défend Frehner. En libéral, il dit:</p> <p>«Dans le doute, toujours en faveur de l’économie».</p> <p>En tant que conseiller du Groupe Mutuel, il veut comprendre les préoccupations des hôpitaux, des caisses-maladies, des entreprises pharmaceutiques et des cantons. Pour cette compréhension, il reçoit 10’000 par année. En tant que conseiller de Spiritsuisse, il s’engage pour «une branche importante de l’économie de notre pays». Le portefeuille de Frehner fait penser à ces vendeurs en bord de la Méditerranée qui tentent d’aguicher les baigneurs, l’éventaire suspendu autour du cou.</p> <h2><br />Leçon 5: Lobbyiste de gauche. Comment un syndicaliste peut empocher 250’000 francs au Conseil national</h2> <p>Bien sûr, tous les parlementaires ne se laissent pas payer royalement par des entreprises ou des associations. Certains n’ont aucun mandat, d’autres seulement des mandats qui ne leur rapportent qu’un ou deux milliers de francs. Pour les jobs accessoires lucratifs, les politiciens bourgeois ont l'avantage. Pas parce qu’ils se laissent plus facilement influencer. Leur position politique reflète simplement la position des entreprises et associations économiques qui leur offrent de tels mandats.</p> <p>Mais les politiciens de gauche se font aussi bien rémunérer leurs services, par exemple comme syndicalistes au Parlement. Le conseiller national bernois PS Corrado Pardini dirige le secteur Industrie du syndicat Unia, avec un taux d’occupation à 70 pour cent. «Oui, je représente les intérêts des syndicats», dit-il. Il se bat au Parlement pour la protection des travailleurs et des salaires équitables. En ce moment, il mène des discussions en dehors des partis pour sortir l’AVS et le 2<sup>e</sup>pilier des taux négatifs. «Mais je ne suis pas un lobbyiste, je suis juste employé par le syndicat depuis 32 ans». Selon ses propres dires, il touche de la part d’Unia un salaire brut de 110’292 francs par an. Avec à ses prestations de conseiller national, Pardini gagne presque un quart de million de francs.</p> <p>Pardini est un lobbyiste institutionnel. Il a déjà été choisi comme représentant d’intérêts, comme le libéral Hans-Ulrich Bigler, le directeur de l’Union suisse des arts et métiers. Mais travailler à 70 pour cent à côté du mandat au national, c’est bien ambitieux. Si l’on prend en compte tous les jours de siège au Parlement et aux Commissions, c’est à la limite de l’impossible. Selon les études, un mandat au Conseil national équivaut de nos jours à un travail à 80 pour cent.</p> <h2><br />Leçon 6: Ne pas se faire remarquer. Pourquoi les parlementaires discrets et sages récoltent plus</h2> <p>Soixante-et-un hommes et femmes ont été nouvellement élus au Parlement il y a quatre ans. 48 d’entre eux ont depuis acquis un ou plusieurs mandats privés. Le mandat dépend, à part de la Commission, de la position politique. «Les parlementaires obtiennent des mandats conformes à leurs convictions», dit Daniel Heller de Farner. Il serait difficile de convaincre un vert d’entrer au lobby des autos. Mais le caractère est aussi décisif. Les parlementaires bruyants qui aiment se mettre en scène ne sont pas appréciés. «Les sages font les meilleurs lobbyistes», explique l'ex-lobbyiste Schläpfer. Un conseiller national qui agresse volontiers les autres n’est pas fait pour ce travail. Et ceux qui sont encore très politisés au début deviendront vite plus calmes à un bon poste. «Celui qui s’est assuré un bon mandat ne sera plus très actif au sein du parti», dit Schläpfer.</p> <h2><br />Leçon 7: Créer des alliances: Pourquoi y a-t-il au et autour du Palais fédéral des petits lobbys pour tout</h2> <p>Quel est le point commun entre les abeilles, les fans de sport, la langue de signes, l’aéronautique, le cheval, la musique populaire et deux douzaines de différents pays? Tous ont leur propre groupe d’intérêts parlementaire. On enregistre près de 160 de ces groupes. Tous ont une présidence et un secrétariat, la plupart dirigés par une association y relative, parfois aussi par une agence de lobbying. Rien que l'agence Furrerhugi se charge d’administrer cinq groupes. Viennent s’y ajouter les groupes d’intérêts extraparlementaires. Le GI Maladies rares, promu par les pharmas, les hôpitaux et les organisations de patients - secrétariat: Furrerhugi. Ou le Cercle de travail sécurité et techniques de défense, une organisation de lobbying pour la controversée industrie suisse de l’armement qui réunit plus de 40 conseillers nationaux et aux États. Secrétariat: Farner Consulting. Les agences de lobbying créent les besoins - ça vaut aussi ici. «Les agences repèrent un problème et fondent un GI ou une association pour le combattre», dit l’ancien lobbyiste de la Migros, Martin Schläpfer.</p> <p>Lorenz Hess préside lui aussi un GI. Il s'appelle le GI Boissons fraîches et est le lobby des fabricants de boissons sucrées. Hess en reçoit 8’000 à 9’000 francs. Et encore: l’apôtre de la santé et du plaisir, Sebastian Frehner.</p> <h2><br />Leçon 8: La communauté des héritiers. Comment les mandats passent d’un membre du parti à un autre</h2> <p>Le Dr Beat Vonlanthen est un conseiller aux États comme on se l’imagine: 62 ans, cheveux mi-sel, mi-poivre, ancien conseiller d’État PDC, au slogan politique: «Renforcer le modèle à succès de la Suisse». Depuis son élection en 2015, il a acquis quelques mandats, de l'Association des casinos à l'Association professionnelle des pompes à chaleur. Mais il est avant tout président de Chocosuisse, l'association des fabricants de chocolat, et de Cemsuisse, l'association de l’industrie du ciment.</p> <p>Le prédécesseur de Vonlanthen était son collègue de parti Urs Schwaller et c'est de lui que Vonlanthen a repris la présidence de Cemsuisse. Il a reçu d’un autre collègue de parti, Peter Bieri, l'Association professionnelle des pompes à chaleur et il a obtenu du PDC Christophe Darbelley l’Association des casinos. C'est un principe courant dans la politique suisse: la succession dans des conditions démocratiques.</p> <p>Une succession fiable est payante, aussi dans ce cas. En effet, Vonlanthen siège à la Commission des affaires juridiques, qui est en charge de l’initiative pour des multinationales responsables, une initiative de gauche qui veut rendre les multinationales suisses responsables pour les dommages causés par leurs filiales à l’étranger. Les multinationales se défendent discrètement, à travers leur réseau au Palais fédéral.</p> <p>Lorsqu’à l’automne 2017, Vonlanthen a pour la première fois à faire avec l'initiative, il déclare à la radio vouloir un contreprojet. Mais les grandes associations économiques ne veulent pas d'un contreprojet. Leur crainte: en cas de doute, le peuple</p> <p>se déciderait pour l’original, à savoir l’initiative. Elles commencent à intensifier le lobbying au Palais fédéral. Le 12 mars 2019, le Conseil aux États recommande le contreprojet. Le lobbying s’affaire jusqu’au soir. Pour finir, le Conseil décide à 22 voix contre 20 pour l’économie et rejette tant l’initiative que le contreprojet.</p> <p>La voix décisive de cette majorité est celle de Vonlanthen. Il a changé d’avis, pour lui, un contreprojet n’entre plus en compte. Il suit désormais la ligne de multinationales comme Lafarge Holcim, qu’il représente dans l'association du ciment. On discute à mots couverts du changement d'avis de Vonlanthen.</p> <p>«C'est le jeu des ramifications des associations économiques», disent certains au sein du parti. Vonlanthen dit: «J’ai été et suis toujours pour des solutions compatibles avec l’économie. Je n’ai pas revu ma position à la suite de pressions externes».</p> <h2><br />Limiter les mandats</h2> <p>Les mandats payés ne sont pas illégaux. Tout membre du Parlement fédéral a le droit d’accepter tous ces jobs accessoires. Mais depuis l’année passée, tous les intérêts particuliers doivent être divulgués.</p> <p>Avec son initiative parlementaire, le conseiller aux États valaisan PDC</p> <p>veut endiguer ces intrications. Il demande à ce qu’un membre du Conseil ne puisse accepter de mandats que d’entreprises et organisations qui n’ont aucun rapport avec la Commission dans laquelle il siège. Ainsi, qui fait de la politique à la Commission de l’énergie doit refuser les mandats des exploitants d’énergie.</p> <p>Le Conseiller national UDC Claudio Zanetti propose d’abolir les commissions permanentes et de revenir au système précédent. Jusqu’en 1991, beaucoup de commissions spéciales étaient formées pour diverses affaires. Cela pourrait empêcher que des parlementaires siègent dans les mêmes commissions pendant plusieurs législatures.</p> <hr /> <h2>Le lobbyisme à Berne:</h2> <p><strong>1959</strong></p> <p>mandats sont actuellement déclarés par 246 conseillers nationaux et aux États. 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Le résultat montre comment les lois sont faites, modifiées ou enterrées au Palais fédéral, sous les arcades bernoises et dans les compartiments de 1ère classe entre Genève et Saint-Gall. Les ficelles sont tirées tant par les politiciens de droite que de gauche. Un guide sur l’influence politique en huit leçons.</p> <h2><br />Leçon 1: La carrière des mandats. Comment faire de la représentation des intérêts un métier lucratif</h2> <p>Un conseiller national gagne en moyenne 123’589 francs frais compris, un conseiller aux États 138’269. Près de la moitié n'est pas imposable. C'est convenable, mais ça ne suffit pas à tous. Pour améliorer leurs revenus, les parlementaires de milice prennent des jobs accessoires, dont «il y a à Berne une multitude». C'est en tout cas ainsi que le dit l’ancien CEO d'une grande agence de lobbying.</p> <p>Lorenz Hess maitrise comme personne l’art d’accumuler les jobs accessoires à disposition et d’en faire une carrière. Il a pour ce faire un bagage professionnel parfait: maturité, conseiller en relations publiques, responsable de l’information auprès de la police municipale de Berne.</p> <p>De plus, il dirige le département de la communication du Département fédéral de la santé et s'engage dans une des branches les plus lucratives de Suisse: les soins de santé.</p> <p>Hess apprend auprès de la Confédération comment l’État traite les caisses, les hôpitaux, les médicaments et les médecins. Il apporte son savoir à l'ancienne agence de relations publiques Burson-Marsteller. Il dirige ensuite sa propre agence de lobbying. Il réussit à entrer au Conseil national en 2011, où il siège à l’influente Commission de la sécurité sociale et de la santé publique (CSSS). Quatre ans plus tard, Hess vend son agence à Furrerhugi, une des entreprises de lobbying leader à Berne et réunit dès lors ses intérêts sous le toit de Hess Advisum GmbH. «Le but de l’entreprise est de fournir des prestations de conseil», peut-on lire au registre du commerce. Hess conseille dans son réseau et là où il s’y connait. Il est le président de la Fondation Pankréas, siège au comité de Spitex, conseille la Faculté de médecine de l’Université de Berne et la Fondation suisse pour paraplégiques à Nottwil. Depuis 2017, il préside le Conseil administratif et de la fondation de Visana. «Il a de bons amis, et il rend la pareille», disent ceux qui lui sont favorables.</p> <p>D'autres médisent qu’il fait du trafic d’influence.</p> <p>Au Conseil national et à la Commission, il vote conséquemment pour la réduction des coûts pour les caisses-maladie. Par exemple lorsqu’il s’engage en faveur du dossier électronique des patients. Dans les médias, il s’engage fermement pour les vaccins obligatoires et propose que les malades non vaccinés participent aux coûts des soins. Ce qui est encore à l’avantage des caisses.</p> <p>Il n'est pas à vendre, répond Hess. «Je suis membre du Parlement. En même temps, je travaille comme président du Conseil d'administration d'une grande assurance maladie et je suis payé pour mon travail», dit-il. «Il est dès lors clair que je vote dans l’intérêt de notre branche.» Le lobbying ne figure pas dans son cahier des charges. Il n’a jamais envoyé un e-mail de recommandation de la caisse-maladie, il n’essayerait jamais d’influencer un membre de la Commission.</p> <p>Peu ont - en toute légalité - bâti dans la Berne fédérale une carrière de mandats aussi brillante que Hess. De nombreux parlementaires détiennent quelques petits mandats. D'autres ont une démarche ciblée. «Il y a des politiciens qui nous demandent si nous pouvons leur procurer un mandat», dit Victor Schmid. Il est partenaire de la puissante agence de communication <em>Konsulenten </em>et en activité depuis des décennies. Il est à noter qu’il ne s'agit manifestement pas que d’argent. «Les parlementaires», dit Schmid, «cherchent un domaine d’activité qui leur soit profitable. Mais nombre d'entre eux n’ont pas le savoir-faire. Nous pouvons leur fournir cela.»</p> <h2><br />Leçon 2: Le bon siège. Comment le choix de la bonne commission détermine à quel point un mandat sera lucratif</h2> <p>Comment un ancien enseignant, officier de carrière et directeur des finances devient-il un des politiciens de la santé les mieux payés du pays? Avec un peu de chance lors de la distribution des sièges au sein du parti. Car s’il y a un levier pour décrocher rapidement un job accessoire lucratif, c'est bien le choix de la bonne commission d'experts au Parlement.</p> <p>Les lois et les modifications des lois sont préparées par cette commission; c’est là que les décisions importantes sont prises. Mais toutes les commissions permanentes, 12 du Conseil national, 11 du Conseil aux États, n’ont pas la même importance. Tout en haut de la hiérarchie des chasseurs de mandats se trouvent la Commission de la santé et la Commission de l’économie et des redevances. «Qui siège dans ces comités reçoit des offres», dit l’ancien lobbyiste de la Migros Martin Schläpfer. «La plupart des parlementaires veulent y aller, même ceux qui n’ont pas de compétences spécifiques.» Et si on y entre, en général on y reste, aussi longtemps que le Conseil siège, huit ans, peut-être douze. «Cela est intéressant pour les entreprises», dit M. Schläpfer.</p> <p>Les conseillers aux États sont particulièrement intéressants. À la chambre basse, les commissions sont plus petites: 13 membres au lieu de 25. Chaque voix a plus de poids, comme avec l’ancien enseignant et officier de carrière.</p> <p>Il s’appelle Josef Dittli et a été élu conseiller aux États pour le canton d’Uri il y a quatre ans. Sa dernière activité avant cela: directeur financier du canton. À Berne, il arrive à entrer à la Commission de la santé et prend plusieurs mandats, dont en 2018 le plus lucratif de tous: la présidence de l'association des caisses-maladie Curafutura, un job à 40 pour cent rémunéré à hauteur de 140’000 francs par an.</p> <p>Depuis, on peut observer chez Dittli un net assouplissement sur les questions réglementaires. En 2016, avant d’être président de Curafutura, il avait fermement contribué à réduire à néant un projet de loi sur les produits tabagiques. La loi aurait rempli les conditions de la convention sur le tabac de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et l’interdiction de la publicité pour les cigarettes et autres produits tabagiques aurait donc été renforcée. Le lobby du tabac souhaitait un rejet de cette loi. Dittli déposa la requête adéquate. Cela bien qu’il ait déclaré au Conseil que la protection des mineurs lui tenait à cœur. L’interdiction globale de la publicité aurait été une atteinte trop forte pour l’économie de marché. La majorité l’approuva et la loi fut réduite à néant.</p> <p>Deux ans plus tard, Dittli étant entretemps devenu président de Curafutura, il encouragea la Confédération à proposer que la loi sur le tabac soit élaborée conformément aux demandes de l’OMS. «Nombre des présents n’en croyaient pas leurs oreilles», écrivait à l’époque l’<em>Aargauer Zeitung</em>.</p> <p>Dittli suivait à la lettre la ligne de Curafutura. L’association des caisses-maladie prône une interdiction contraignante de la publicité. Alors il vota au Conseil pour un renforcement de la loi sur la protection des mineurs, même si d'un point de vue libéral, elle allait un peu trop loin, comme il disait.</p> <p>«Mes choix de vote répondent cependant à mes propres prises de position», affirme Dittli.</p> <p>«Balivernes», réagit à cette déclaration l'ex-lobbyiste Schläpfer. «Il est tout à fait normal de s’engager en faveur de son entreprise». Le précédent président de Curafutura, Ignazio Cassis, y gagnait 180’000 francs». «Personne ne me dira qu’il était indépendant».</p> <h2><br />Leçon 3: Le tapis à 100’000 francs. Comment les agences de lobbying créent les besoins pour ensuite les assouvir</h2> <p>Les agences de relations publiques en arrière-plan sont le carburant du système. Dans la Berne fédérale, les lobbyistes externes s’occupent constamment de générer le chiffre d’affaire pour leurs entreprises. Et comme toujours, lorsqu’il faut vendre, il faut créer un besoin. «Les bonnes entreprises trouvent leurs clients elles-mêmes», dit Daniel Heller de l’agence Farner.</p> <p>Ce qu’il entend par là: les agences gardent l’œil sur les évènements, comme une modification de loi, qui pourraient avoir un effet néfaste sur un groupe donné. S’il apparait, l’agence offre au groupe un paquet de mesures: arguments, stratégies, documentation, discours. Elle dispose «un tapis», comme on dit dans le jargon de la branche. Et ce aussi vite que possible. L’attaque contre le projet doit se faire au plus tard au début de la procédure de consultation.</p> <p>En disposant le tapis, l'agence apparait en arrière-plan. Le principe: «All politics are local». Au lieu de s’adresser directement aux parlementaires, l’agence organise des rencontres entre les représentants du peuple et les entreprises locales. «Rien n'est aussi efficace que ces entretiens individuels», dit Daniel Heller.</p> <p>Empêcher une loi ou aider à la faire passer n'est pas gratuit. «Accompagner intensément un projet de loi du début jusqu’au vote final au Parlement ou même jusqu’à la votation populaire avec toutes les mesures de communication requises peut coûter jusqu’à 100’000 franc par année et durer trois à cinq ans». C'est ce que dit Victor Schmid de l’agence de communication Konsulenten. Le représentant d'une autre grande agence de conseil avance le même chiffre. Selon le conseiller, cela comprend un peu de potins dans les médias et tout un catalogue d’arguments. Les médias sont manifestement des idiots utiles dans ce jeu.</p> <p>Si l’attaque précoce échoue et que la loi arrive aux Conseils, les lobbyistes externes tentent de compliquer les navettes entre le Conseil national et le Conseil aux États. Ce qui provoque des retards et des dilutions, dans le meilleur des cas l’empêchement. «Pour cela, une agence efficace peut disposer en permanence de l'action d'une douzaine de conseillers nationaux et aux États», dit le membre d’une grande agence de relations publiques.</p> <h2><br />Leçon 4: L’opportuniste. Comment bien s'en sortir avec un bel éventaire</h2> <p>Il y a bien une chose que l’on ne peut pas reprocher au conseiller national bâlois UDC Sebastien Frehner: qu’il soit partialement intéressé. Il peut s’enthousiasmer tant pour des substances dangereuses pour la santé comme le tabac et l’alcool que pour les entreprises qui ont des intérêts pour la santé de la population. Il a des mandats auprès de la caisse-maladie Groupe Mutuel, du Forum santé pour tous, du GI Recherche biomédicale. Il fait partie du GI Boissons fraîches qui s’occupe des boissons sucrées, du GI Plaisir et du groupe parlementaires Spiritueux et prévention. Dans ce cadre, il se met entièrement au service de ses donneurs d’ordres. On lui a demandé une fois dans l’émission «Rundschau» de la SRF s’il préservait ses propres intérêts. Sa réponse: «Exactement».</p> <p>Pour remplir ses mandats, Frehner se détourne aussi parfois de la ligne du parti. En mars, il a voté pour une augmentation des franchises, même si l’UDC était contre. Il représente les intérêts aussi en dehors des séances des Conseils. Lundi matin, il invite à la présentation «Quelle est la valeur de la vie humaine?». Le discours est tenu par le lobbyiste des pharmas René Buholzer.</p> <p>Deux jours plus tard, le 25 septembre, Frehner tient cour en tant que président du GI Plaisir. Avec «Plaisir sans risque» en compagnie de Nastasja Sommer, lobbyiste de Japan Tobacco. Elle parle de la loi sur les produits tabagiques. Le dîner de gala promet une sélection d’eaux-de-vie, whisky et cigares - un des nombreux événements culinaires au cours desquels politiciens et lobbyistes aiment trinquer entre eux. «Je ne me vois pas comme le représentant de ces diverses branches», se défend Frehner. En libéral, il dit:</p> <p>«Dans le doute, toujours en faveur de l’économie».</p> <p>En tant que conseiller du Groupe Mutuel, il veut comprendre les préoccupations des hôpitaux, des caisses-maladies, des entreprises pharmaceutiques et des cantons. Pour cette compréhension, il reçoit 10’000 par année. En tant que conseiller de Spiritsuisse, il s’engage pour «une branche importante de l’économie de notre pays». 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Le conseiller national bernois PS Corrado Pardini dirige le secteur Industrie du syndicat Unia, avec un taux d’occupation à 70 pour cent. «Oui, je représente les intérêts des syndicats», dit-il. Il se bat au Parlement pour la protection des travailleurs et des salaires équitables. En ce moment, il mène des discussions en dehors des partis pour sortir l’AVS et le 2<sup>e</sup>pilier des taux négatifs. «Mais je ne suis pas un lobbyiste, je suis juste employé par le syndicat depuis 32 ans». Selon ses propres dires, il touche de la part d’Unia un salaire brut de 110’292 francs par an. Avec à ses prestations de conseiller national, Pardini gagne presque un quart de million de francs.</p> <p>Pardini est un lobbyiste institutionnel. Il a déjà été choisi comme représentant d’intérêts, comme le libéral Hans-Ulrich Bigler, le directeur de l’Union suisse des arts et métiers. Mais travailler à 70 pour cent à côté du mandat au national, c’est bien ambitieux. Si l’on prend en compte tous les jours de siège au Parlement et aux Commissions, c’est à la limite de l’impossible. Selon les études, un mandat au Conseil national équivaut de nos jours à un travail à 80 pour cent.</p> <h2><br />Leçon 6: Ne pas se faire remarquer. Pourquoi les parlementaires discrets et sages récoltent plus</h2> <p>Soixante-et-un hommes et femmes ont été nouvellement élus au Parlement il y a quatre ans. 48 d’entre eux ont depuis acquis un ou plusieurs mandats privés. Le mandat dépend, à part de la Commission, de la position politique. «Les parlementaires obtiennent des mandats conformes à leurs convictions», dit Daniel Heller de Farner. Il serait difficile de convaincre un vert d’entrer au lobby des autos. Mais le caractère est aussi décisif. Les parlementaires bruyants qui aiment se mettre en scène ne sont pas appréciés. «Les sages font les meilleurs lobbyistes», explique l'ex-lobbyiste Schläpfer. Un conseiller national qui agresse volontiers les autres n’est pas fait pour ce travail. Et ceux qui sont encore très politisés au début deviendront vite plus calmes à un bon poste. «Celui qui s’est assuré un bon mandat ne sera plus très actif au sein du parti», dit Schläpfer.</p> <h2><br />Leçon 7: Créer des alliances: Pourquoi y a-t-il au et autour du Palais fédéral des petits lobbys pour tout</h2> <p>Quel est le point commun entre les abeilles, les fans de sport, la langue de signes, l’aéronautique, le cheval, la musique populaire et deux douzaines de différents pays? Tous ont leur propre groupe d’intérêts parlementaire. On enregistre près de 160 de ces groupes. Tous ont une présidence et un secrétariat, la plupart dirigés par une association y relative, parfois aussi par une agence de lobbying. Rien que l'agence Furrerhugi se charge d’administrer cinq groupes. Viennent s’y ajouter les groupes d’intérêts extraparlementaires. Le GI Maladies rares, promu par les pharmas, les hôpitaux et les organisations de patients - secrétariat: Furrerhugi. Ou le Cercle de travail sécurité et techniques de défense, une organisation de lobbying pour la controversée industrie suisse de l’armement qui réunit plus de 40 conseillers nationaux et aux États. Secrétariat: Farner Consulting. Les agences de lobbying créent les besoins - ça vaut aussi ici. «Les agences repèrent un problème et fondent un GI ou une association pour le combattre», dit l’ancien lobbyiste de la Migros, Martin Schläpfer.</p> <p>Lorenz Hess préside lui aussi un GI. Il s'appelle le GI Boissons fraîches et est le lobby des fabricants de boissons sucrées. Hess en reçoit 8’000 à 9’000 francs. Et encore: l’apôtre de la santé et du plaisir, Sebastian Frehner.</p> <h2><br />Leçon 8: La communauté des héritiers. Comment les mandats passent d’un membre du parti à un autre</h2> <p>Le Dr Beat Vonlanthen est un conseiller aux États comme on se l’imagine: 62 ans, cheveux mi-sel, mi-poivre, ancien conseiller d’État PDC, au slogan politique: «Renforcer le modèle à succès de la Suisse». Depuis son élection en 2015, il a acquis quelques mandats, de l'Association des casinos à l'Association professionnelle des pompes à chaleur. Mais il est avant tout président de Chocosuisse, l'association des fabricants de chocolat, et de Cemsuisse, l'association de l’industrie du ciment.</p> <p>Le prédécesseur de Vonlanthen était son collègue de parti Urs Schwaller et c'est de lui que Vonlanthen a repris la présidence de Cemsuisse. Il a reçu d’un autre collègue de parti, Peter Bieri, l'Association professionnelle des pompes à chaleur et il a obtenu du PDC Christophe Darbelley l’Association des casinos. C'est un principe courant dans la politique suisse: la succession dans des conditions démocratiques.</p> <p>Une succession fiable est payante, aussi dans ce cas. En effet, Vonlanthen siège à la Commission des affaires juridiques, qui est en charge de l’initiative pour des multinationales responsables, une initiative de gauche qui veut rendre les multinationales suisses responsables pour les dommages causés par leurs filiales à l’étranger. Les multinationales se défendent discrètement, à travers leur réseau au Palais fédéral.</p> <p>Lorsqu’à l’automne 2017, Vonlanthen a pour la première fois à faire avec l'initiative, il déclare à la radio vouloir un contreprojet. Mais les grandes associations économiques ne veulent pas d'un contreprojet. Leur crainte: en cas de doute, le peuple</p> <p>se déciderait pour l’original, à savoir l’initiative. Elles commencent à intensifier le lobbying au Palais fédéral. Le 12 mars 2019, le Conseil aux États recommande le contreprojet. Le lobbying s’affaire jusqu’au soir. Pour finir, le Conseil décide à 22 voix contre 20 pour l’économie et rejette tant l’initiative que le contreprojet.</p> <p>La voix décisive de cette majorité est celle de Vonlanthen. Il a changé d’avis, pour lui, un contreprojet n’entre plus en compte. Il suit désormais la ligne de multinationales comme Lafarge Holcim, qu’il représente dans l'association du ciment. On discute à mots couverts du changement d'avis de Vonlanthen.</p> <p>«C'est le jeu des ramifications des associations économiques», disent certains au sein du parti. Vonlanthen dit: «J’ai été et suis toujours pour des solutions compatibles avec l’économie. Je n’ai pas revu ma position à la suite de pressions externes».</p> <h2><br />Limiter les mandats</h2> <p>Les mandats payés ne sont pas illégaux. Tout membre du Parlement fédéral a le droit d’accepter tous ces jobs accessoires. Mais depuis l’année passée, tous les intérêts particuliers doivent être divulgués.</p> <p>Avec son initiative parlementaire, le conseiller aux États valaisan PDC</p> <p>veut endiguer ces intrications. Il demande à ce qu’un membre du Conseil ne puisse accepter de mandats que d’entreprises et organisations qui n’ont aucun rapport avec la Commission dans laquelle il siège. Ainsi, qui fait de la politique à la Commission de l’énergie doit refuser les mandats des exploitants d’énergie.</p> <p>Le Conseiller national UDC Claudio Zanetti propose d’abolir les commissions permanentes et de revenir au système précédent. Jusqu’en 1991, beaucoup de commissions spéciales étaient formées pour diverses affaires. Cela pourrait empêcher que des parlementaires siègent dans les mêmes commissions pendant plusieurs législatures.</p> <hr /> <h2>Le lobbyisme à Berne:</h2> <p><strong>1959</strong></p> <p>mandats sont actuellement déclarés par 246 conseillers nationaux et aux États. 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Par ce jugement, la CEDH semble vouloir enterrer toute démarche rationnelle appuyée sur des faits pour favoriser des croyances.</p> <p>Accrochées à un mouvement généralisé autour du climat, qui favorise la foi d’une construction sociale de la réalité, à l’instar de la «justice climatique», ces plaignantes semblent avoir banni de leur plaidoyer tout ce qui pourrait résister au contrôle humain de la météo du jour, sans égards aux résultats scientifiques et leurs immenses incertitudes concernant les climats futurs. Les plaignantes ont accusé en substance les autorités suisses de mener une politique climatique aux objectifs et aux mesures insuffisantes, «en violation de leur droit à la vie», arguant de la vulnérabilité des personnes âgées face aux effets des changements en cours, et en particulier aux vagues de chaleur. 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Bien que les variabilités démographiques soient complexes à appréhender avec précision (comme les «effets moisson» ou les crises sanitaires telles la Covid-19), cette nature cyclique confirme simplement que «le froid tue».</p> <p>Pour s’en convaincre, s’affichent en gris sur la figure et à titre d’exemple, les températures <i>maximales </i>quotidiennes de la station de Neuchâtel montrant de larges amplitudes au cours de l’année. A partir du printemps 2020, la courbe des décès-toutes-causes subit les perturbations du Coronavirus et ses conséquences, rendant hasardeuse toute interprétation de détail. Mais la forte anti-corrélation entre décès et saisonnalité demeure. Nous supportons bien plus aisément les températures non-optimales chaudes que froides. Une étude récente<strong><sup>1</sup></strong> publiée dans <i>The Lancet</i> sur les excès de mortalité dans les villes européennes entre 2000 et 2019, dus cette fois uniquement aux températures non-optimales chaudes ou froides, confirme la tendance générale: entre 65 et 74 ans, le froid tue en Suisse 3 fois plus que le chaud, entre 75 et 84 ans, 6 fois plus, et au-dessus de 85 ans, 7,6 fois davantage. Dans une autre étude du <i>Lancet</i><strong><sup>2</sup></strong> sur les températures non-optimales entre 2000 et 2019 au niveau mondial, le constat est identique: le taux mondial de surmortalité liée au froid a baissé de 0,5% alors que celui lié à la chaleur aurait augmenté de 0,2%, conduisant à une réduction nette du ratio mondial des décès liés aux températures extrêmes. Mais ces pourcentages ne touchent pas le même nombre de personnes, bien plus nombreuses à décéder durant les hivers, ce qui amplifie davantage le bénéfice d’un réchauffement climatique. Ces militantes du climat semblent donc avoir convaincu la CEDH de porter la justice dans un monde fantasmé, où seules les températures excessivement chaudes président à la destinée des femmes, en invitant la Suisse à rejeter la réalité des faits.</p> <p>Pourtant, dans le monde réel, faut-il le rappeler, l’espérance de vie des Suissesses n’a cessé d’augmenter, et ce malgré le «dérèglement climatique», et grâce, pour l’essentiel, aux énergies fossiles. De plus, les décès directement liés aux températures non-optimales s’amenuisent grâce en grande partie à des hivers plus cléments.</p> <p>Dans le monde réel, un pays riche comme la Suisse permet à sa population de s’adapter aisément aux inconforts météorologiques (chauffage ou climatisation, isolations, facilité d’accès aux soins, énergie toujours disponible, etc.). A cela peut s’ajouter une topographie bienveillante durant les étés avec de nombreux lacs et rivières, et une fraicheur montagnarde accessible.</p> <p>Dans le monde réel, la Suisse a diminué de près de 40% ses émissions de CO<sub>2</sub> par habitant depuis 1980 et 91% de sa production électrique est bas-carbone. 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On assiste ici à une dangereuse érosion de l'esprit démocratique.</span></p> <p style="text-align: justify;"><o:p></o:p><span>La démocratie ne vit pas seulement d'une constitution fondée sur le principe de la majorité, les droits fondamentaux et les droits de l'homme et des règles de procédure équitables ; la démocratie vit aussi du fait que l'esprit de la constitution est déterminant et guide les acteurs politiques. Les principes démocratiques doivent primer sur l'idéologie et le programme des partis. Si cette attitude fondamentale fait défaut, la démocratie risque de devenir lettre morte.</span></p> <h3 style="text-align: justify;"><strong><span>Mauvais perdants</span></strong></h3> <p style="text-align: justify;"><o:p></o:p><span>Le fait que cette attitude fondamentale ne soit pas au mieux en Suisse se manifeste de plus en plus souvent, par exemple récemment après le "oui" à la 13e rente AVS. 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Sombres perspectives.</span><o:p></o:p></p> <hr /> <p style="text-align: justify;"><a href="https://www.infosperber.ch/politik/demokratie-ja-aber-nur-wenns-passt/" target="_blank" rel="noopener">L'article original publié sur Infosperber</a></p>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'la-democratie-oui-si-elle-convient', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 46, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 4, 'person_id' => (int) 85, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [ [maximum depth reached] ], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 4856, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => true, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => null, 'readed' => null, 'subhead' => null, 'title' => 'L'OTAN a 75 ans et des défis devant elle', 'subtitle' => 'Le 4 avril 1949 naissait à Washington l’Organisation du traité de l’Atlantique nord, alors composée de 12 membres. 20 autres pays sont venus l’élargir depuis. 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Si l’Allemagne et les autres membres de l’alliance nouent bien des partenariats avec des Etats du Pacifique, et conduisent des exercices militaires dans la zone, ce n’est pas à la hauteur de la «menace chinoise».</p> <p>La nature de cette menace? Elle n’est pas directement militaire mais plutôt économique. «Si Pékin était en mesure de bloquer les voies commerciales dans la mer de Chine méridionale, la circulation des marchandises en Europe serait en péril».</p> <p>Autre question qui n’était pas d’actualité il y a 75 ans: la contribution des Etats-Unis. Le <a href="https://www.telegraph.co.uk/opinion/2024/04/03/europe-must-step-up-to-keep-the-us-in-nato/" target="_blank" rel="noopener"><em>Daily Telegraph</em></a> regrette que l’Europe ne fasse aucun effort pour s’assurer que le plus grand contributeur de l’OTAN ne s’en détache pas. L’heure est grave, puisqu’on parle de «passer à la caisse». La menace qui plane sur l’avenir de l’organisation n’est pas seulement la perspective d’une réélection de Donald Trump et de la ligne isolationniste, c’est celle du mécontentement général des Etats-Unis qui «contribuent bien plus à la défense de l’Europe que le continent ne le fait lui-même... On aurait tort de penser que l’aide américaine coule de source.»</p> <p>Les dissensions internes sont toujours un péril sous-estimé, comme le confirme <a href="https://iq.lt/komentarai/issukiai-lietuvos-ateiciai-nato-ir-es/325771" target="_blank" rel="noopener">le mensuel lituanien </a><em><a href="https://iq.lt/komentarai/issukiai-lietuvos-ateiciai-nato-ir-es/325771" target="_blank" rel="noopener">IQ</a>. </em>Au cœur de la discorde, le droit de veto. Ce dernier a rendu «complètement inefficace» l’ONU, constate <em>IQ</em>, car le risque est constant de s’en servir pour exercer pressions ou intrigues diplomatiques. «Démocratie, droit international et Etat de droit forment le socle de l'alliance la plus puissante au monde. Mais un certain nombre d'Etats oublieux de ces valeurs tentent depuis longtemps de placer leur intérêts mercantilistes au-dessus des décisions cruciales de l’OTAN.»</p> <p>Cela revient à poser une question essentielle, dans toute organisation: qu’est-ce qui lie entre eux les Etats membres? Au-delà de la coopération militaire, ce sont des «valeurs», celles mêmes que les pays occidentaux s’emploient à défendre en ce moment en Ukraine. La députée Renaissance Anne Genetet plaide même pour la création d’un centre de l’OTAN chargé de défendre de concert les valeurs occidentales et la «résilience démocratique». Dans <a href="https://www.latribune.fr/opinions/tribunes/l-otan-a-75-ans-l-age-de-la-resilience-democratique-994366.html" target="_blank" rel="noopener">les colonnes de <em>La Tribune</em></a>, l’élue souligne que l’organisation «doit plus que jamais être notre bouclier face aux ennemis de la liberté».</p> <p>Un avenir mitigé donc, porté par de beaux discours et une volonté de cohésion, entaché par des divergences internes, car tous les Etats membres ne voient pas toujours leurs intérêts converger. De manière plus pragmatique, le quotidien croate <em>Večernji list</em> remet l’église au centre du village: comment faire face à l’avenir lorsque manque la ressource principale, les soldats? </p> <p>Le nombre de militaires actifs dans les différentes armées des pays membres est en effet en recul, jusqu’à atteindre un seuil inquiétant. 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VOS RÉACTIONS SUR LE SUJET
3 Commentaires
@Lagom 03.10.2019 | 13h27
«Selon un classement international la Suisse est le 3ème pays le moins corrompu au monde. Or avec cet article je me demande si notre bonne place ne serait pas 3ème des plus corrompus, car chez nous la corruption est institutionnelle. Je trouve plus noble que les corrompus touchent l'argent au noir sous la table comme au tiers monde car c'est un peu moins honteux.»
@willoft 03.10.2019 | 19h27
«Oui, on appelle ça politicien de ... milice, dans une des meilleures démocraties du monde.
Mais vous pouvez aussi enquêter sur le troisième pouvoir, la justice.
S'ils n'ont pas les médias sur le dos, ils font aussi ce qui leur chante en toute opacité, abus de pouvoir inclus!»
@Lagom 04.10.2019 | 17h24
«@willoft, suis entièrement d'accord avec vous. D'ailleurs une telle politique engendre une telle justice. Et ça fonctionne aussi à l'envers; une telle justice engendre de tels hommes et femmes politiques. Pauvre peuple souverain. »