Actuel / Ethnologue et membre de gang: une expérience nicaraguéenne
Un membre «repenti» du gang MS-13 suit un cours universitaire à San Salvador, en mars 2019. Si certains criminels deviennent ensuite chercheurs, des chercheurs côtoient parfois les criminels le temps d'une recherche… © Marvin Recinos / AFP
Dennis Rodgers, Graduate Institute – Institut de hautes études internationales et du développement (IHEID)
J’étudie les gangs d’Amérique centrale, et plus particulièrement du Nicaragua, depuis plus de 20 ans. En 1996, à 23 ans, je suis devenu membre d’un gang nicaraguéen. Pendant un an j’ai participé à ses activités, souvent illicites.
Les recherches que j’entreprends depuis maintenant plus de 20 ans ont montré que les gangs – qu’il s’agisse des «bandes» de jeunes au Nicaragua, celles qui rôdent dans le 93 en France, ou les maras honduriens – sont un phénomène miroir de nos sociétés, avec leur hiérarchie sociale, leur organisation, et leur violence qui souvent reflète la nôtre.
Mais comment les étudier en pratique? Comment les approcher, nouer des liens avec leurs membres, développer une recherche approfondie sur le phénomène? Comment s’immerger dans l’univers des gangs?
L’approche participative
Les études les plus révélatrices sur les gangs ont, en général, toujours été celles basées sur une approche ethnographique. Ceci découle en partie du fait que l’ethnographie est une méthodologie qui appelle au développement d’une intimité profonde avec le phénomène que l’on souhaite étudier.
Cela permet au chercheur ou à la chercheuse d’interagir directement avec l’autre et son environnement social pour pouvoir comprendre les logiques et dynamiques de l’intérieur. Mais la nature particulière de l’ethnographie fait qu’elle n’est clairement pas une méthode évidente à mettre en œuvre afin d’étudier un phénomène tel les gangs. L’ethnographie demande une certaine proximité avec le phénomène sous étude, ce qui peut soulever des dilemmes moraux, déontologiques, et pratiques.
Aller au-delà des stéréotypes
Si cela peut sembler de prime abord très difficile, trois superbes études ethnographiques sur les gangs en France attestent cependant de la faisabilité d’un tel projet.
Il s’agit de Cœur de banlieue de David Lepoutre, Le capital guerrier, de Thomas Sauvadet, et La formation des bandes, de Marwan Mohammed.
L’étude de Lepoutre explore les codes, les rites et les langages des bandes de jeunes dans la cité des Quatre-Mille à La Courneuve (93), celle de Sauvadet compare la concurrence et la solidarité entre membres de gangs dans deux cités à Paris et une à Marseille, alors que l’étude de Mohammed se focalise sur l’émergence des bandes dans la cité des Hautes-Noues, à Villiers-sur-Marne (94). Ces trois études nous offrent des analyses très fines qui vont bien au-delà des représentations médiatiques stéréotypées qui abondent à propos des gangs.
Comment ont-ils fait?
Tisser des liens
Les trois chercheurs expliquent dans leurs ouvrages leur démarche méthodologique, qui souvent ont pu se confondre avec un moment de leur vie personnelle. Lepoutre enseigna pendant sept ans dans un collège de La Courneuve, où il vécut également pendant deux ans. Ceci lui permit de tisser des liens forts avec certains individus et familles qui lui servirent d’intermédiaires afin de s’approcher de membres de gangs. Pour sa part, Sauvadet passa une partie de sa jeunesse dans une des deux cités parisiennes étudiées. Il y était donc connu et avait un réseau préexistant. Dans l’autre cité parisienne, il emménagea dans un petit pavillon ouvrier situé juste en face, où l’un de ses voisins le mit en contact avec ce qu’il appelle des «informateurs-médiateurs» qui lui permirent de s’intégrer socialement, alors qu’à Marseille, un ami d’enfance animait une association de boxe dans la cité et cautionna sa présence. Mohammed, enfin, grandit dans la cité des Hautes-Noues où il a effectué sa recherche et il y retourna plus tard afin d’y fonder une association locale avant de devenir vacataire dans la maison de quartier.
Ces trois exemples soulignent l’importance de la proximité tant sociale que spatiale afin de pouvoir véritablement étudier le gang, en tout cas d’un point de vue ethnographique. En même temps, l’extension logique de cette observation voudrait que l’étude parfaite se fasse sur la base d’une immersion dans le gang.
C’est d’ailleurs probablement pour cela que l’une des meilleures descriptions des dynamiques des gangs en France publiée ces 20 dernières années est le livre de Lamence Madzou, J’étais un chef de gang. Cet ouvrage est le récit autobiographique – édité et commenté par la sociologue Marie-Hélène Bacqué – de Madzou, qui fut chef des «Fight Boys», une bande de jeunes dans la cité Montconseil à Corbeil-Essonnes (91). Le fait que Madzou était membre de gang lui donne bien évidemment un regard privilégié sur le phénomène, et lui permet d’expliquer la logique et les dynamiques de «son» gang.
Ethnologues-gangsters
Ceci étant dit, peu d’anciens membres de gangs écrivent à propos de leurs expériences, et encore moins de manière académique, même si certains deviennent universitaires.
Robert Durán, professeur à l’université du Texas A&M aux États-Unis, est auteur de Gang life in two cities, une étude comparative des gangs à Denver dans le Colorado, et à Ogden en Utah, où il fut membre d’un gang dans sa jeunesse, et Randol Contreras, professeur à l’université de Toronto au Canada, est auteur de l’étude The stick-up kids, à propos d’un gang de braqueurs de trafiquants de drogue dans le Bronx à New York, avec lequel il a eu des liens intimes.
Ceci étant dit, il y a aussi quelques ethnologues qui deviennent membres d’un gang pendant leurs recherches – c’est ce qui m’est arrivé dans le cadre de mes études sur les gangs au Nicaragua.
«Attaqué et tabassé»
Il faut préciser que je ne suis pas allé au Nicaragua afin d’y étudier les gangs. Mon projet d’origine se focalisait sur l’endurance postrévolutionnaire des idéaux révolutionnaires qui caractérisèrent ce pays pendant les années 80.
Ce fut un choc de réaliser, suite à mon arrivée au Nicaragua en 1996 – donc six ans après que la révolution sandiniste se soit terminée – qu’il restait très peu des idéaux de la révolution au quotidien. Tout comme de constater que la violence constituait une caractéristique importante de la réalité quotidienne du Nicaragua, plus particulièrement sous la forme des gangs, dénommés localement pandillas.
Trois jours après mon arrivée au Nicaragua, des membres d’un gang m’ont attaqué et tabassé. Puis je subis d’autres épisodes de ce genre au cours des deux premiers mois de mon séjour.
Cette violence inattendue a été plutôt traumatisante – je n’en avais jamais fait l’expérience auparavant – mais en même temps, elle a aussi profondément affecté ma recherche, dans la mesure où elle me força à prêter attention à un phénomène dont je ne me souciais absolument pas mais qui était clairement un élément très important de la réalité sociale nicaraguayenne contemporaine.
Initiation
C’est pour cela que, lorsque j’emménageai dans le barrio (quartier) Luis Fanor Hernández – ce nom est bien évidemment fictif, afin de protéger l’identité du quartier et la vie privée ainsi que la sécurité de ses habitants – deux mois après mon arrivée au Nicaragua, les gangs et leur violence étaient devenus le sujet principal de ma recherche.
Cela tombait bien, car le quartier jouissait alors d’une réputation particulièrement sulfureuse à cause de son gang, à l’époque l’un des plus notoires du district. Ce qui fut plus inattendu est que suite à une séquence d’évènements un peu rocambolesques et improbables, quelques semaines après m’être établi dans le quartier, je fus initié au sein du gang local.
Plus spécifiquement, j’ai dû participer (indirectement) à un vol à l’étalage puis me charger de la vente du butin de celui-ci, me défendre lorsqu’un membre du gang m’attaqua afin de prouver ma valeur, et j’ai aussi dû montrer que j’étais prêt à défendre le quartier lorsque celui-ci fut attaqué par le gang d’un autre quartier.
Le débarquement d'un étranger au cœur d’un gang, chercheur de surcroît, peut paraître invraisemblable, mais dans une certaine mesure cette initiation était presque naturelle: j’étais jeune – 23 ans à l’époque – homme, et suivant les principes de l’enquête ethnographique je traînais dans les rues du quartier, donc dans un espace privilégié du gang…
La réputation
Mais le facteur déterminant était la réputation du gang, qui découlait à l’époque en grande partie des caractéristiques de ses membres individuels. Le gang décida de m’intégrer car cela lui permettait de devenir le seul gang de la ville à avoir un chele pandillero, ou membre étranger, et elle vit sa notoriété s’accroître de manière significative.
Il est important de préciser que je n’ai jamais caché mon rôle de chercheur aux membres du gang, qui semblent l’avoir accepté comme condition de mon intégration. En même temps, j’ai accepté de devenir membre du gang non pas pour pouvoir les étudier, mais plutôt comme stratégie de survie, selon l’idée que «si vous ne pouvez pas les vaincre, joignez-vous à eux».
Trainer, fumer, boire, vanner
Devenir membre du gang m’a bien évidement fourni une opportunité de recherche ethnographique incroyable, et m’a permis de développer ce que le sociologue Loïc Wacquant a dénommé dans sa célèbre étude sur la boxe, Corps et âme, une recherche «charnelle», c’est-à-dire impliquant une conversion sensuelle et incarnée au phénomène sous étude.
J’ai pu passer énormément de temps à traîner avec le gang dans les rues du quartier. J’ai fumé, bu, vanné avec les autres membres. J’ai participé à beaucoup de leurs activités collectives, tant violentes comme non-violentes, et j’ai pu me familiariser ainsi avec les codes, rites et pratiques du gang.
J’ai aussi partagé beaucoup de temps individuellement avec des membres de gangs, tant dans la rue que chez eux, à leur demander ce qui les avait poussés à se joindre au gang, savoir comment ils se voyaient, ce qu’ils pensaient des autres.
J’ai pu comparer leurs discours avec leurs pratiques, et les observer agir et interagir dans diverses circonstances, dont beaucoup qui auraient été impossibles pour quelqu’un qui n’était pas membre du gang.
Dilemmes moraux et éthiques
J’ai bien évidemment dû faire face à divers dilemmes moraux et à des situations compliquées à gérer, par exemple quand des membres du gang me parlaient d’actes criminels qu’ils disaient planifier – les membres de gang mentent peut-être plus que le commun des mortels… – mais j’ai aussi appris que les décisions morales ne peuvent se prendre que de manière très situationnelle, et qu’à certains niveaux l’ethnologue ne peut qu’inévitablement devenir complice.
Que faire lorsque l’on découvre que des individus faisant partie de notre champ de recherche ont commis des crimes, ce qui est presque inévitable lorsque l’on étudie les gangs? Faut-il les dénoncer, les confronter ou bien les ignorer?
Les trois options impliquent différentes complicités – avec les autorités, avec le gang, avec l’individu… Elles doivent clairement être considérées par rapport à un cadre éthique plus large, mais en fin de compte elles engagent toujours des choix avec lesquels inévitablement quelqu’un ne sera pas d’accord.
Vivre avec soi-même
Au final, comme l’a très bien dit le sociologue américain William Foote Whyte, le critère déterminant est que
«l’ethnologue doit continuer à vivre avec lui-même. S’il se trouve en train de participer à des activités qu’il perçoit comme immorales, il est probable qu’il commencera à se demander quel genre de personne il est.»
De ce point de vue, je peux tout à fait vivre avec tout ce que j’ai fait lorsque j’étais membre du gang.
J’ai imposé des limites à ma participation, en demandant un statut de «membre observateur», par exemple. Les membres du gang l’ont accepté en partie à cause de mon statut d’étranger, ce qui m’a permis de ne pas avoir à respecter toutes les règles régissant le gang. Je n’ai pas accepté de m’impliquer dans certaines activités, et j’ai aussi déclaré que j’en dénoncerais d’autres si je les observais. En même temps, ceci n’a rien d’exceptionnel, la recherche ethnographique, quelle qu’elle soit, étant en fin de compte toujours une négociation…
Un moyen de recherche parmi d’autres
Le fait d’avoir rejoint le gang du barrio Luis Fanor Hernández pendant un an m’a aussi permis d’engager les recherches ethnographiques longitudinales sur le phénomène que je poursuis encore.
Bien qu’ayant pris ma «retraite» du gang à mon départ du Nicaragua, en juillet 1997, suite à mon premier séjour, les relations que j’y ai nouées ont perduré.
Encore aujourd’hui je reste un «vieux de la vieille» respecté par les anciens et nouveaux membres du gang. Ces derniers ont donc toujours été prêts à me parler, à répondre à mes questions, à partager des informations concernant leurs activités, tant légales qu’illégales, lors de mes retours réguliers au barrio Luis Fanor Hernández.
Devenir membre d’un gang n’est bien sûr pas l’unique manière de faire de la recherche ethnographique sur le phénomène, et n’est pas quelque chose à la portée de tous, pour de multiples raisons souvent contextuellement variables, mais aussi des questions de genre, d’ethnicité, ou bien d’âge (qui peuvent varier de gang en gang).
Dennis Rodgers, Research Professor, Anthropology and Sociology, Graduate Institute – Institut de hautes études internationales et du développement (IHEID)
Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.
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En 1996, à 23 ans, je suis devenu membre d’un gang nicaraguéen. Pendant un an j’ai participé à ses activités, souvent illicites.</p> <p>Les recherches que j’entreprends depuis maintenant plus de 20 ans ont montré que les gangs – qu’il s’agisse des «bandes» de jeunes au Nicaragua, celles qui rôdent dans le 93 en France, ou les <em>maras</em> honduriens – sont un phénomène <a href="https://theconversation.com/les-gangs-etonnants-miroirs-de-notre-societe-114774">miroir</a> de nos sociétés, avec leur hiérarchie sociale, leur organisation, et leur violence qui souvent reflète la nôtre.</p> <p>Mais comment les étudier en pratique? Comment les approcher, nouer des liens avec leurs membres, développer une recherche approfondie sur le phénomène? Comment s’immerger dans l’univers des gangs?<br /><br /></p> <h2>L’approche participative</h2> <p>Les études les plus révélatrices sur les gangs ont, en général, toujours été celles basées sur une <a href="http://www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=catalogue&obj=livre&no=62248">approche ethnographique</a>. Ceci découle en partie du fait que l’ethnographie est une méthodologie qui appelle au développement d’une <a href="http://anthropomada.com/bibliotheque/manuel_ethnographie.pdf">intimité profonde</a> avec le phénomène que l’on souhaite étudier.</p> <p>Cela permet au chercheur ou à la chercheuse d’interagir directement avec l’autre et son environnement social pour pouvoir comprendre les logiques et dynamiques de l’intérieur. Mais la nature particulière de l’ethnographie fait qu’elle n’est clairement <a href="https://rowman.com/ISBN/9781498598439/Ethnography-as-Risky-Business-Field-Research-in-Violent-and-Sensitive-Contexts">pas une méthode évidente</a> à mettre en œuvre afin d’étudier un phénomène tel les gangs. L’ethnographie demande une certaine proximité avec le phénomène sous étude, ce qui peut soulever des dilemmes moraux, déontologiques, et pratiques.</p> <figure style="text-align: center;"><a href="https://images.theconversation.com/files/272453/original/file-20190503-103075-4ht8ij.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img src="https://images.theconversation.com/files/272453/original/file-20190503-103075-4ht8ij.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" alt="" /></a> <figcaption><span>Bronislaw Malinowski, l’un des «pères» de l’anthropologie classique, avec des habitants des Îles Trobriand en 1918.</span> <span><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bronis%C5%82aw_Malinowski#/media/File:Wmalinowski_trobriand_isles_1918.jpg"><small>©</small> Billy Hancock/Wikimedia</a><br /></span></figcaption> </figure> <h2>Aller au-delà des stéréotypes</h2> <p>Si cela peut sembler de prime abord très difficile, trois superbes études ethnographiques sur les gangs en France attestent cependant de la faisabilité d’un tel projet.</p> <figure><a href="https://images.theconversation.com/files/272454/original/file-20190503-103063-7laef3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img src="https://images.theconversation.com/files/272454/original/file-20190503-103063-7laef3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" alt="" /></a> <figcaption><span><em>Coeur de Banlieue</em> est paru en 1997 aux éditions Odile Jacob.</span> <span><a href="https://s0.odilejacob.fr/couvertures/9782738104557.jpg"><small>©</small> Odile Jacob</a></span></figcaption> </figure> <p>Il s’agit de <a href="https://www.odilejacob.fr/catalogue/sciences-humaines/linguistique-psycholinguistique/coeur-de-banlieue_9782738104557.php"><em>Cœur de banlieue</em></a> de David Lepoutre, <a href="https://www.armand-colin.com/le-capital-guerrier-9782200347024"><em>Le capital guerrier</em></a>, de Thomas Sauvadet, et <a href="https://www.amazon.fr/formation-bandes-Mohammed-Marwan/dp/2130578721"><em>La formation des bandes</em></a>, de Marwan Mohammed.</p> <p>L’étude de Lepoutre explore les codes, les rites et les langages des bandes de jeunes dans la cité des Quatre-Mille à La Courneuve (93), celle de Sauvadet compare la concurrence et la solidarité entre membres de gangs dans deux cités à Paris et une à Marseille, alors que l’étude de Mohammed se focalise sur l’émergence des bandes dans la cité des Hautes-Noues, à Villiers-sur-Marne (94). Ces trois études nous offrent des analyses très fines qui vont bien au-delà des <a href="https://www.liberation.fr/societe/2009/04/15/avec-les-bandes-sarkozy-police-son-image_552721">représentations médiatiques stéréotypées</a> qui abondent à propos des gangs.</p> <p>Comment ont-ils fait?<br /><br /></p> <h2>Tisser des liens</h2> <p>Les trois chercheurs expliquent dans leurs ouvrages leur démarche méthodologique, qui souvent ont pu se confondre avec un moment de leur vie personnelle. Lepoutre enseigna pendant sept ans dans un collège de La Courneuve, où il vécut également pendant deux ans. Ceci lui permit de tisser des liens forts avec certains individus et familles qui lui servirent d’intermédiaires afin de s’approcher de membres de gangs. Pour sa part, Sauvadet passa une partie de sa jeunesse dans une des deux cités parisiennes étudiées. Il y était donc connu et avait un réseau préexistant. Dans l’autre cité parisienne, il emménagea dans un petit pavillon ouvrier situé juste en face, où l’un de ses voisins le mit en contact avec ce qu’il appelle des «informateurs-médiateurs» qui lui permirent de s’intégrer socialement, alors qu’à Marseille, un ami d’enfance animait une association de boxe dans la cité et cautionna sa présence. Mohammed, enfin, grandit dans la cité des Hautes-Noues où il a effectué sa recherche et il y retourna plus tard afin d’y fonder une association locale avant de devenir vacataire dans la maison de quartier.</p> <p>Ces trois exemples soulignent l’importance de la proximité tant sociale que spatiale afin de pouvoir véritablement étudier le gang, en tout cas d’un point de vue ethnographique. En même temps, l’extension logique de cette observation voudrait que l’étude parfaite se fasse sur la base d’une immersion dans le gang.</p> <p>C’est d’ailleurs probablement pour cela que l’une des meilleures descriptions des dynamiques des gangs en France publiée ces 20 dernières années est le livre de Lamence Madzou, <a href="https://editionsladecouverte.fr/catalogue/index-J___tais_un_chef_de_gang-9782707157874.html"><em>J’étais un chef de gang</em></a>. Cet ouvrage est le récit autobiographique – édité et commenté par la sociologue <a href="https://www.metropolitiques.eu/_Bacque-Marie-Helene_.html">Marie-Hélène Bacqué</a> – de Madzou, qui fut chef des «Fight Boys», une bande de jeunes dans la cité Montconseil à Corbeil-Essonnes (91). Le fait que Madzou était membre de gang lui donne bien évidemment un regard privilégié sur le phénomène, et lui permet d’expliquer la logique et les dynamiques de «son» gang.</p> <figure><iframe frameborder="0" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/2h8a1RkIz8A?wmode=transparent&start=0" width="440"></iframe> <figcaption><span>Débat citoyen «Gang story», Champigny, 2013 avec Lamence Madzou, auteur de <em>J’étais un chef de gang</em>. <small>© DR</small><br /></span></figcaption> </figure> <h2>Ethnologues-gangsters</h2> <p>Ceci étant dit, peu d’anciens membres de gangs écrivent à propos de leurs expériences, et encore moins de manière académique, même si certains deviennent universitaires.</p> <figure><a href="https://images.theconversation.com/files/272456/original/file-20190503-103060-gcgvnn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img src="https://images.theconversation.com/files/272456/original/file-20190503-103060-gcgvnn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" alt="" /></a> <figcaption><span>Ouvrage paru en 2013.</span> <span><a href="http://cup.columbia.edu/book/gang-life-in-two-cities/9780231158664"><small>©</small> Columbia University Press</a></span></figcaption> </figure> <p><a href="https://liberalarts.tamu.edu/sociology/profile/robert-duran">Robert Durán</a>, professeur à l’université du Texas A&M aux États-Unis, est auteur de <a href="http://cup.columbia.edu/book/gang-life-in-two-cities/9780231158664"><em>Gang life in two cities</em></a>, une étude comparative des gangs à Denver dans le Colorado, et à Ogden en Utah, où il fut membre d’un gang dans sa jeunesse, et <a href="https://sociology.ucr.edu/faculty/randol-contreras">Randol Contreras</a>, professeur à l’université de Toronto au Canada, est auteur de l’étude <a href="https://www.ucpress.edu/book/9780520273382/the-stickup-kids"><em>The stick-up kids</em></a>, à propos d’un gang de braqueurs de trafiquants de drogue dans le Bronx à New York, avec lequel il a eu des liens intimes.</p> <p>Ceci étant dit, il y a aussi quelques ethnologues qui deviennent membres d’un gang pendant leurs recherches – c’est ce qui m’est arrivé dans le cadre de mes études sur les gangs au Nicaragua.<br /><br /></p> <h2>«Attaqué et tabassé»</h2> <p>Il faut préciser que je ne suis pas allé au Nicaragua afin d’y étudier les gangs. Mon projet d’origine se focalisait sur l’endurance postrévolutionnaire des idéaux révolutionnaires qui caractérisèrent ce pays pendant les années 80.</p> <p>Ce fut un choc de réaliser, suite à mon arrivée au Nicaragua en 1996 – donc six ans après que la <a href="https://journals.openedition.org/cal/8475">révolution sandiniste</a> se soit terminée – qu’il restait très peu des idéaux de la révolution au quotidien. Tout comme de constater que la violence constituait une caractéristique importante de la réalité quotidienne du Nicaragua, plus particulièrement sous la forme des gangs, dénommés localement <em>pandillas</em>.</p> <p>Trois jours après mon arrivée au Nicaragua, des membres d’un gang m’ont attaqué et tabassé. Puis je subis d’autres épisodes de ce genre au cours des deux premiers mois de mon séjour.</p> <p>Cette violence inattendue a été plutôt traumatisante – je n’en avais jamais fait l’expérience auparavant – mais en même temps, elle a aussi profondément affecté ma recherche, dans la mesure où elle me força à prêter attention à un phénomène dont je ne me souciais absolument pas mais qui était clairement un élément très important de la réalité sociale nicaraguayenne contemporaine.<br /><br /></p> <h2>Initiation</h2> <p>C’est pour cela que, lorsque j’emménageai dans le <em>barrio</em> (quartier) Luis Fanor Hernández – ce nom est bien évidemment fictif, afin de protéger l’identité du quartier et la vie privée ainsi que la sécurité de ses habitants – deux mois après mon arrivée au Nicaragua, les gangs et leur violence étaient devenus le sujet principal de ma recherche.</p> <p>Cela tombait bien, car le quartier jouissait alors d’une réputation particulièrement sulfureuse à cause de son gang, à l’époque l’un des plus notoires du district. Ce qui fut plus inattendu est que suite à une séquence d’évènements un peu rocambolesques et improbables, quelques semaines après m’être établi dans le quartier, <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/j.1470-9856.2007.00234.x">je fus initié au sein du gang local</a>.</p> <p>Plus spécifiquement, j’ai dû participer (indirectement) à un vol à l’étalage puis me charger de la vente du butin de celui-ci, me défendre lorsqu’un membre du gang m’attaqua afin de prouver ma valeur, et j’ai aussi dû montrer que j’étais prêt à défendre le quartier lorsque celui-ci fut attaqué par le gang d’un autre quartier.</p> <p>Le débarquement d'un étranger au cœur d’un gang, chercheur de surcroît, peut paraître invraisemblable, mais dans une certaine mesure cette initiation était presque naturelle: j’étais jeune – 23 ans à l’époque – homme, et suivant les principes de l’enquête ethnographique je traînais dans les rues du quartier, donc dans un espace privilégié du gang…</p> <p> </p> <h2>La réputation</h2> <p>Mais le facteur déterminant était la réputation du gang, qui découlait à l’époque en grande partie des caractéristiques de ses membres individuels. Le gang décida de m’intégrer car cela lui permettait de devenir le seul gang de la ville à avoir un <em>chele pandillero</em>, ou membre étranger, et elle vit sa notoriété s’accroître de manière significative.</p> <p>Il est important de préciser que je n’ai jamais caché mon rôle de chercheur aux membres du gang, qui semblent l’avoir accepté comme condition de mon intégration. En même temps, j’ai accepté de devenir membre du gang non pas pour pouvoir les étudier, mais plutôt comme stratégie de survie, selon l’idée que «si vous ne pouvez pas les vaincre, joignez-vous à eux».</p> <figure><img src="https://images.theconversation.com/files/272457/original/file-20190503-103049-7upxmz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" alt="" /> <figcaption><span>Un membre de gang du barrio Luis Fanor Hernández montrant un tatouage et une cicatrice impressionnante.</span> <small>©</small> <span><span>Dennis Rodgers</span>, <span>Author provided<br /><br /></span></span></figcaption> </figure> <h2>Trainer, fumer, boire, vanner</h2> <p>Devenir membre du gang m’a bien évidement fourni une opportunité de recherche ethnographique incroyable, et m’a permis de développer ce que le sociologue <a href="https://loicwacquant.org/">Loïc Wacquant</a> a dénommé dans sa célèbre étude sur la boxe, <a href="https://agone.org/lordredeschoses/corpsame/"><em>Corps et âme</em></a>, une recherche «charnelle», c’est-à-dire impliquant une conversion sensuelle et incarnée au phénomène sous étude.</p> <p>J’ai pu passer énormément de temps à traîner avec le gang dans les rues du quartier. J’ai fumé, bu, vanné avec les autres membres. J’ai participé à beaucoup de leurs activités collectives, tant violentes comme non-violentes, et j’ai pu me familiariser ainsi avec les codes, rites et pratiques du gang.</p> <p>J’ai aussi partagé beaucoup de temps individuellement avec des membres de gangs, tant dans la rue que chez eux, à leur demander ce qui les avait poussés à se joindre au gang, savoir comment ils se voyaient, ce qu’ils pensaient des autres.</p> <p>J’ai pu comparer leurs discours avec leurs pratiques, et les observer agir et interagir dans diverses circonstances, dont beaucoup qui auraient été impossibles pour quelqu’un qui n’était pas membre du gang.<br /><br /></p> <h2>Dilemmes moraux et éthiques</h2> <p>J’ai bien évidemment dû faire face à divers dilemmes moraux et à des situations compliquées à gérer, par exemple quand des membres du gang me parlaient d’actes criminels qu’ils disaient planifier – les membres de gang mentent peut-être plus que le commun des mortels… – mais j’ai aussi appris que les décisions morales ne peuvent se prendre que de manière très situationnelle, et qu’à certains niveaux l’ethnologue ne peut qu’inévitablement devenir complice.</p> <p>Que faire lorsque l’on découvre que des individus faisant partie de notre champ de recherche ont commis des crimes, ce qui est presque inévitable lorsque l’on étudie les gangs? Faut-il les dénoncer, les confronter ou bien les ignorer?</p> <p>Les trois options impliquent différentes complicités – avec les autorités, avec le gang, avec l’individu… Elles doivent clairement être considérées par rapport à un cadre éthique plus large, mais en fin de compte elles engagent toujours des choix avec lesquels inévitablement quelqu’un ne sera pas d’accord.</p> <figure><img src="https://images.theconversation.com/files/272459/original/file-20190503-103049-q4fvo8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" alt="" /> <figcaption><span>«L’ethnologue-gangster» et un ami, 1996.</span> <small>©</small> <span><span>Dennis Rodgers</span>, <span>Author provided</span></span></figcaption> </figure> <h2>Vivre avec soi-même</h2> <p>Au final, comme l’a très bien dit le sociologue américain <a href="https://www.press.uchicago.edu/ucp/books/book/chicago/S/bo3684722.html">William Foote Whyte</a>, le critère déterminant est que</p> <blockquote> <p>«l’ethnologue doit continuer à vivre avec lui-même. S’il se trouve en train de participer à des activités qu’il perçoit comme immorales, il est probable qu’il commencera à se demander quel genre de personne il est.»</p> </blockquote> <p>De ce point de vue, je peux tout à fait vivre avec tout ce que j’ai fait lorsque j’étais membre du gang.</p> <p>J’ai imposé des limites à ma participation, en demandant un statut de «membre observateur», par exemple. Les membres du gang l’ont accepté en partie à cause de mon statut d’étranger, ce qui m’a permis de ne pas avoir à respecter toutes les règles régissant le gang. Je n’ai pas accepté de m’impliquer dans certaines activités, et j’ai aussi déclaré que j’en dénoncerais d’autres si je les observais. En même temps, ceci n’a rien d’exceptionnel, la recherche ethnographique, quelle qu’elle soit, étant en fin de compte toujours une négociation…<br /><br /></p> <h2>Un moyen de recherche parmi d’autres</h2> <p>Le fait d’avoir rejoint le gang du barrio Luis Fanor Hernández pendant un an m’a aussi permis d’engager les recherches ethnographiques longitudinales sur le phénomène que je poursuis encore.</p> <p>Bien qu’ayant pris ma «retraite» du gang à mon départ du Nicaragua, en juillet 1997, suite à mon premier séjour, les relations que j’y ai nouées ont perduré.</p> <p>Encore aujourd’hui je reste un «vieux de la vieille» respecté par les anciens et nouveaux membres du gang. Ces derniers ont donc toujours été prêts à me parler, à répondre à mes questions, à partager des informations concernant leurs activités, tant légales qu’illégales, lors de mes retours réguliers au barrio Luis Fanor Hernández.</p> <figure><img src="https://images.theconversation.com/files/272832/original/file-20190506-103049-1l88ye8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" alt="" /> <figcaption><span>‘L’ethnologue-gangster’ retraité et deux amis, 2007.</span> <small>©</small> <span><span>Dennis Rodgers</span>, <span>Author provided</span></span></figcaption> </figure> <p>Devenir membre d’un gang n’est bien sûr pas l’unique manière de faire de la recherche ethnographique sur le phénomène, et n’est pas quelque chose à la portée de tous, pour de multiples raisons souvent contextuellement variables, mais aussi des questions de genre, d’ethnicité, ou bien d’âge (qui peuvent varier de gang en gang).</p> <hr /> <p><img src="https://counter.theconversation.com/content/116446/count.gif?distributor=republish-lightbox-basic" alt="The Conversation" width="1" height="1" /></p> <h4><span><a href="https://theconversation.com/profiles/dennis-rodgers-709195">Dennis Rodgers</a>, Research Professor, Anthropology and Sociology, <em><a href="http://theconversation.com/institutions/graduate-institute-institut-de-hautes-etudes-internationales-et-du-developpement-iheid-2905">Graduate Institute – Institut de hautes études internationales et du développement (IHEID)</a></em></span></h4> <h4>Cet article est republié à partir de <a href="http://theconversation.com">The Conversation</a> sous licence Creative Commons. Lire l’<a href="https://theconversation.com/ethnologue-et-membre-de-gang-une-experience-nicaragueenne-116446">article original</a>.</h4>', 'content_edition' => null, 'slug' => 'ethnologue-et-membre-de-gang-une-experience-nicaragueenne', 'headline' => false, 'homepage' => 'col-md-6', 'like' => (int) 772, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1846, 'homepage_order' => (int) 2108, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 5, 'person_id' => (int) 85, 'post_type_id' => (int) 1, 'poster_attachment' => null, 'editions' => [[maximum depth reached]], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'attachments' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'comments' => [[maximum depth reached]], 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, 'relatives' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Post) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Post) {}, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Post) {}, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Post) {} ], 'embeds' => [], 'images' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'audios' => [], 'comments' => [], 'author' => 'Bon pour la tête', 'description' => ' Dennis Rodgers, Graduate Institute – Institut de hautes études internationales et du développement...', 'title' => 'Ethnologue et membre de gang: une expérience nicaraguéenne', 'crawler' => true, 'connected' => null, 'menu_blocks' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Block) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Block) {} ], 'menu' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 4 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 5 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 6 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 7 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 8 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 9 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 10 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 11 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 12 => object(App\Model\Entity\Category) {} ] ] $bufferLevel = (int) 1 $referer = 'https://dev.bonpourlatete.com/like/1827' $OneSignal = '8a2ea76e-2c65-48ce-92e5-098c4cb86093' $_serialize = [ (int) 0 => 'post' ] $post = object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 1827, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => true, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => 'NORMAL', 'readed' => null, 'subhead' => 'ACTUEL / Monde', 'title' => 'Ethnologue et membre de gang: une expérience nicaraguéenne', 'subtitle' => '', 'subtitle_edition' => null, 'content' => '<hr /> <p style="text-align: center;"><span><strong><a href="https://theconversation.com/profiles/dennis-rodgers-709195">Dennis Rodgers</a>, </strong><em><a href="http://theconversation.com/institutions/graduate-institute-institut-de-hautes-etudes-internationales-et-du-developpement-iheid-2905"><strong>Graduate Institute – Institut de hautes études internationales et du développement (IHEID)</strong></a></em></span></p> <hr /> <p>J’étudie les gangs d’Amérique centrale, et plus particulièrement du Nicaragua, depuis plus de 20 ans. En 1996, à 23 ans, je suis devenu membre d’un gang nicaraguéen. Pendant un an j’ai participé à ses activités, souvent illicites.</p> <p>Les recherches que j’entreprends depuis maintenant plus de 20 ans ont montré que les gangs – qu’il s’agisse des «bandes» de jeunes au Nicaragua, celles qui rôdent dans le 93 en France, ou les <em>maras</em> honduriens – sont un phénomène <a href="https://theconversation.com/les-gangs-etonnants-miroirs-de-notre-societe-114774">miroir</a> de nos sociétés, avec leur hiérarchie sociale, leur organisation, et leur violence qui souvent reflète la nôtre.</p> <p>Mais comment les étudier en pratique? Comment les approcher, nouer des liens avec leurs membres, développer une recherche approfondie sur le phénomène? Comment s’immerger dans l’univers des gangs?<br /><br /></p> <h2>L’approche participative</h2> <p>Les études les plus révélatrices sur les gangs ont, en général, toujours été celles basées sur une <a href="http://www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=catalogue&obj=livre&no=62248">approche ethnographique</a>. Ceci découle en partie du fait que l’ethnographie est une méthodologie qui appelle au développement d’une <a href="http://anthropomada.com/bibliotheque/manuel_ethnographie.pdf">intimité profonde</a> avec le phénomène que l’on souhaite étudier.</p> <p>Cela permet au chercheur ou à la chercheuse d’interagir directement avec l’autre et son environnement social pour pouvoir comprendre les logiques et dynamiques de l’intérieur. Mais la nature particulière de l’ethnographie fait qu’elle n’est clairement <a href="https://rowman.com/ISBN/9781498598439/Ethnography-as-Risky-Business-Field-Research-in-Violent-and-Sensitive-Contexts">pas une méthode évidente</a> à mettre en œuvre afin d’étudier un phénomène tel les gangs. L’ethnographie demande une certaine proximité avec le phénomène sous étude, ce qui peut soulever des dilemmes moraux, déontologiques, et pratiques.</p> <figure style="text-align: center;"><a href="https://images.theconversation.com/files/272453/original/file-20190503-103075-4ht8ij.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img src="https://images.theconversation.com/files/272453/original/file-20190503-103075-4ht8ij.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" alt="" /></a> <figcaption><span>Bronislaw Malinowski, l’un des «pères» de l’anthropologie classique, avec des habitants des Îles Trobriand en 1918.</span> <span><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bronis%C5%82aw_Malinowski#/media/File:Wmalinowski_trobriand_isles_1918.jpg"><small>©</small> Billy Hancock/Wikimedia</a><br /></span></figcaption> </figure> <h2>Aller au-delà des stéréotypes</h2> <p>Si cela peut sembler de prime abord très difficile, trois superbes études ethnographiques sur les gangs en France attestent cependant de la faisabilité d’un tel projet.</p> <figure><a href="https://images.theconversation.com/files/272454/original/file-20190503-103063-7laef3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img src="https://images.theconversation.com/files/272454/original/file-20190503-103063-7laef3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" alt="" /></a> <figcaption><span><em>Coeur de Banlieue</em> est paru en 1997 aux éditions Odile Jacob.</span> <span><a href="https://s0.odilejacob.fr/couvertures/9782738104557.jpg"><small>©</small> Odile Jacob</a></span></figcaption> </figure> <p>Il s’agit de <a href="https://www.odilejacob.fr/catalogue/sciences-humaines/linguistique-psycholinguistique/coeur-de-banlieue_9782738104557.php"><em>Cœur de banlieue</em></a> de David Lepoutre, <a href="https://www.armand-colin.com/le-capital-guerrier-9782200347024"><em>Le capital guerrier</em></a>, de Thomas Sauvadet, et <a href="https://www.amazon.fr/formation-bandes-Mohammed-Marwan/dp/2130578721"><em>La formation des bandes</em></a>, de Marwan Mohammed.</p> <p>L’étude de Lepoutre explore les codes, les rites et les langages des bandes de jeunes dans la cité des Quatre-Mille à La Courneuve (93), celle de Sauvadet compare la concurrence et la solidarité entre membres de gangs dans deux cités à Paris et une à Marseille, alors que l’étude de Mohammed se focalise sur l’émergence des bandes dans la cité des Hautes-Noues, à Villiers-sur-Marne (94). Ces trois études nous offrent des analyses très fines qui vont bien au-delà des <a href="https://www.liberation.fr/societe/2009/04/15/avec-les-bandes-sarkozy-police-son-image_552721">représentations médiatiques stéréotypées</a> qui abondent à propos des gangs.</p> <p>Comment ont-ils fait?<br /><br /></p> <h2>Tisser des liens</h2> <p>Les trois chercheurs expliquent dans leurs ouvrages leur démarche méthodologique, qui souvent ont pu se confondre avec un moment de leur vie personnelle. Lepoutre enseigna pendant sept ans dans un collège de La Courneuve, où il vécut également pendant deux ans. Ceci lui permit de tisser des liens forts avec certains individus et familles qui lui servirent d’intermédiaires afin de s’approcher de membres de gangs. Pour sa part, Sauvadet passa une partie de sa jeunesse dans une des deux cités parisiennes étudiées. Il y était donc connu et avait un réseau préexistant. Dans l’autre cité parisienne, il emménagea dans un petit pavillon ouvrier situé juste en face, où l’un de ses voisins le mit en contact avec ce qu’il appelle des «informateurs-médiateurs» qui lui permirent de s’intégrer socialement, alors qu’à Marseille, un ami d’enfance animait une association de boxe dans la cité et cautionna sa présence. Mohammed, enfin, grandit dans la cité des Hautes-Noues où il a effectué sa recherche et il y retourna plus tard afin d’y fonder une association locale avant de devenir vacataire dans la maison de quartier.</p> <p>Ces trois exemples soulignent l’importance de la proximité tant sociale que spatiale afin de pouvoir véritablement étudier le gang, en tout cas d’un point de vue ethnographique. En même temps, l’extension logique de cette observation voudrait que l’étude parfaite se fasse sur la base d’une immersion dans le gang.</p> <p>C’est d’ailleurs probablement pour cela que l’une des meilleures descriptions des dynamiques des gangs en France publiée ces 20 dernières années est le livre de Lamence Madzou, <a href="https://editionsladecouverte.fr/catalogue/index-J___tais_un_chef_de_gang-9782707157874.html"><em>J’étais un chef de gang</em></a>. Cet ouvrage est le récit autobiographique – édité et commenté par la sociologue <a href="https://www.metropolitiques.eu/_Bacque-Marie-Helene_.html">Marie-Hélène Bacqué</a> – de Madzou, qui fut chef des «Fight Boys», une bande de jeunes dans la cité Montconseil à Corbeil-Essonnes (91). Le fait que Madzou était membre de gang lui donne bien évidemment un regard privilégié sur le phénomène, et lui permet d’expliquer la logique et les dynamiques de «son» gang.</p> <figure><iframe frameborder="0" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/2h8a1RkIz8A?wmode=transparent&start=0" width="440"></iframe> <figcaption><span>Débat citoyen «Gang story», Champigny, 2013 avec Lamence Madzou, auteur de <em>J’étais un chef de gang</em>. <small>© DR</small><br /></span></figcaption> </figure> <h2>Ethnologues-gangsters</h2> <p>Ceci étant dit, peu d’anciens membres de gangs écrivent à propos de leurs expériences, et encore moins de manière académique, même si certains deviennent universitaires.</p> <figure><a href="https://images.theconversation.com/files/272456/original/file-20190503-103060-gcgvnn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img src="https://images.theconversation.com/files/272456/original/file-20190503-103060-gcgvnn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" alt="" /></a> <figcaption><span>Ouvrage paru en 2013.</span> <span><a href="http://cup.columbia.edu/book/gang-life-in-two-cities/9780231158664"><small>©</small> Columbia University Press</a></span></figcaption> </figure> <p><a href="https://liberalarts.tamu.edu/sociology/profile/robert-duran">Robert Durán</a>, professeur à l’université du Texas A&M aux États-Unis, est auteur de <a href="http://cup.columbia.edu/book/gang-life-in-two-cities/9780231158664"><em>Gang life in two cities</em></a>, une étude comparative des gangs à Denver dans le Colorado, et à Ogden en Utah, où il fut membre d’un gang dans sa jeunesse, et <a href="https://sociology.ucr.edu/faculty/randol-contreras">Randol Contreras</a>, professeur à l’université de Toronto au Canada, est auteur de l’étude <a href="https://www.ucpress.edu/book/9780520273382/the-stickup-kids"><em>The stick-up kids</em></a>, à propos d’un gang de braqueurs de trafiquants de drogue dans le Bronx à New York, avec lequel il a eu des liens intimes.</p> <p>Ceci étant dit, il y a aussi quelques ethnologues qui deviennent membres d’un gang pendant leurs recherches – c’est ce qui m’est arrivé dans le cadre de mes études sur les gangs au Nicaragua.<br /><br /></p> <h2>«Attaqué et tabassé»</h2> <p>Il faut préciser que je ne suis pas allé au Nicaragua afin d’y étudier les gangs. Mon projet d’origine se focalisait sur l’endurance postrévolutionnaire des idéaux révolutionnaires qui caractérisèrent ce pays pendant les années 80.</p> <p>Ce fut un choc de réaliser, suite à mon arrivée au Nicaragua en 1996 – donc six ans après que la <a href="https://journals.openedition.org/cal/8475">révolution sandiniste</a> se soit terminée – qu’il restait très peu des idéaux de la révolution au quotidien. Tout comme de constater que la violence constituait une caractéristique importante de la réalité quotidienne du Nicaragua, plus particulièrement sous la forme des gangs, dénommés localement <em>pandillas</em>.</p> <p>Trois jours après mon arrivée au Nicaragua, des membres d’un gang m’ont attaqué et tabassé. Puis je subis d’autres épisodes de ce genre au cours des deux premiers mois de mon séjour.</p> <p>Cette violence inattendue a été plutôt traumatisante – je n’en avais jamais fait l’expérience auparavant – mais en même temps, elle a aussi profondément affecté ma recherche, dans la mesure où elle me força à prêter attention à un phénomène dont je ne me souciais absolument pas mais qui était clairement un élément très important de la réalité sociale nicaraguayenne contemporaine.<br /><br /></p> <h2>Initiation</h2> <p>C’est pour cela que, lorsque j’emménageai dans le <em>barrio</em> (quartier) Luis Fanor Hernández – ce nom est bien évidemment fictif, afin de protéger l’identité du quartier et la vie privée ainsi que la sécurité de ses habitants – deux mois après mon arrivée au Nicaragua, les gangs et leur violence étaient devenus le sujet principal de ma recherche.</p> <p>Cela tombait bien, car le quartier jouissait alors d’une réputation particulièrement sulfureuse à cause de son gang, à l’époque l’un des plus notoires du district. Ce qui fut plus inattendu est que suite à une séquence d’évènements un peu rocambolesques et improbables, quelques semaines après m’être établi dans le quartier, <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/j.1470-9856.2007.00234.x">je fus initié au sein du gang local</a>.</p> <p>Plus spécifiquement, j’ai dû participer (indirectement) à un vol à l’étalage puis me charger de la vente du butin de celui-ci, me défendre lorsqu’un membre du gang m’attaqua afin de prouver ma valeur, et j’ai aussi dû montrer que j’étais prêt à défendre le quartier lorsque celui-ci fut attaqué par le gang d’un autre quartier.</p> <p>Le débarquement d'un étranger au cœur d’un gang, chercheur de surcroît, peut paraître invraisemblable, mais dans une certaine mesure cette initiation était presque naturelle: j’étais jeune – 23 ans à l’époque – homme, et suivant les principes de l’enquête ethnographique je traînais dans les rues du quartier, donc dans un espace privilégié du gang…</p> <p> </p> <h2>La réputation</h2> <p>Mais le facteur déterminant était la réputation du gang, qui découlait à l’époque en grande partie des caractéristiques de ses membres individuels. Le gang décida de m’intégrer car cela lui permettait de devenir le seul gang de la ville à avoir un <em>chele pandillero</em>, ou membre étranger, et elle vit sa notoriété s’accroître de manière significative.</p> <p>Il est important de préciser que je n’ai jamais caché mon rôle de chercheur aux membres du gang, qui semblent l’avoir accepté comme condition de mon intégration. En même temps, j’ai accepté de devenir membre du gang non pas pour pouvoir les étudier, mais plutôt comme stratégie de survie, selon l’idée que «si vous ne pouvez pas les vaincre, joignez-vous à eux».</p> <figure><img src="https://images.theconversation.com/files/272457/original/file-20190503-103049-7upxmz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" alt="" /> <figcaption><span>Un membre de gang du barrio Luis Fanor Hernández montrant un tatouage et une cicatrice impressionnante.</span> <small>©</small> <span><span>Dennis Rodgers</span>, <span>Author provided<br /><br /></span></span></figcaption> </figure> <h2>Trainer, fumer, boire, vanner</h2> <p>Devenir membre du gang m’a bien évidement fourni une opportunité de recherche ethnographique incroyable, et m’a permis de développer ce que le sociologue <a href="https://loicwacquant.org/">Loïc Wacquant</a> a dénommé dans sa célèbre étude sur la boxe, <a href="https://agone.org/lordredeschoses/corpsame/"><em>Corps et âme</em></a>, une recherche «charnelle», c’est-à-dire impliquant une conversion sensuelle et incarnée au phénomène sous étude.</p> <p>J’ai pu passer énormément de temps à traîner avec le gang dans les rues du quartier. J’ai fumé, bu, vanné avec les autres membres. J’ai participé à beaucoup de leurs activités collectives, tant violentes comme non-violentes, et j’ai pu me familiariser ainsi avec les codes, rites et pratiques du gang.</p> <p>J’ai aussi partagé beaucoup de temps individuellement avec des membres de gangs, tant dans la rue que chez eux, à leur demander ce qui les avait poussés à se joindre au gang, savoir comment ils se voyaient, ce qu’ils pensaient des autres.</p> <p>J’ai pu comparer leurs discours avec leurs pratiques, et les observer agir et interagir dans diverses circonstances, dont beaucoup qui auraient été impossibles pour quelqu’un qui n’était pas membre du gang.<br /><br /></p> <h2>Dilemmes moraux et éthiques</h2> <p>J’ai bien évidemment dû faire face à divers dilemmes moraux et à des situations compliquées à gérer, par exemple quand des membres du gang me parlaient d’actes criminels qu’ils disaient planifier – les membres de gang mentent peut-être plus que le commun des mortels… – mais j’ai aussi appris que les décisions morales ne peuvent se prendre que de manière très situationnelle, et qu’à certains niveaux l’ethnologue ne peut qu’inévitablement devenir complice.</p> <p>Que faire lorsque l’on découvre que des individus faisant partie de notre champ de recherche ont commis des crimes, ce qui est presque inévitable lorsque l’on étudie les gangs? Faut-il les dénoncer, les confronter ou bien les ignorer?</p> <p>Les trois options impliquent différentes complicités – avec les autorités, avec le gang, avec l’individu… Elles doivent clairement être considérées par rapport à un cadre éthique plus large, mais en fin de compte elles engagent toujours des choix avec lesquels inévitablement quelqu’un ne sera pas d’accord.</p> <figure><img src="https://images.theconversation.com/files/272459/original/file-20190503-103049-q4fvo8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" alt="" /> <figcaption><span>«L’ethnologue-gangster» et un ami, 1996.</span> <small>©</small> <span><span>Dennis Rodgers</span>, <span>Author provided</span></span></figcaption> </figure> <h2>Vivre avec soi-même</h2> <p>Au final, comme l’a très bien dit le sociologue américain <a href="https://www.press.uchicago.edu/ucp/books/book/chicago/S/bo3684722.html">William Foote Whyte</a>, le critère déterminant est que</p> <blockquote> <p>«l’ethnologue doit continuer à vivre avec lui-même. 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En même temps, ceci n’a rien d’exceptionnel, la recherche ethnographique, quelle qu’elle soit, étant en fin de compte toujours une négociation…<br /><br /></p> <h2>Un moyen de recherche parmi d’autres</h2> <p>Le fait d’avoir rejoint le gang du barrio Luis Fanor Hernández pendant un an m’a aussi permis d’engager les recherches ethnographiques longitudinales sur le phénomène que je poursuis encore.</p> <p>Bien qu’ayant pris ma «retraite» du gang à mon départ du Nicaragua, en juillet 1997, suite à mon premier séjour, les relations que j’y ai nouées ont perduré.</p> <p>Encore aujourd’hui je reste un «vieux de la vieille» respecté par les anciens et nouveaux membres du gang. Ces derniers ont donc toujours été prêts à me parler, à répondre à mes questions, à partager des informations concernant leurs activités, tant légales qu’illégales, lors de mes retours réguliers au barrio Luis Fanor Hernández.</p> <figure><img src="https://images.theconversation.com/files/272832/original/file-20190506-103049-1l88ye8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" alt="" /> <figcaption><span>‘L’ethnologue-gangster’ retraité et deux amis, 2007.</span> <small>©</small> <span><span>Dennis Rodgers</span>, <span>Author provided</span></span></figcaption> </figure> <p>Devenir membre d’un gang n’est bien sûr pas l’unique manière de faire de la recherche ethnographique sur le phénomène, et n’est pas quelque chose à la portée de tous, pour de multiples raisons souvent contextuellement variables, mais aussi des questions de genre, d’ethnicité, ou bien d’âge (qui peuvent varier de gang en gang).</p> <hr /> <p><img src="https://counter.theconversation.com/content/116446/count.gif?distributor=republish-lightbox-basic" alt="The Conversation" width="1" height="1" /></p> <h4><span><a href="https://theconversation.com/profiles/dennis-rodgers-709195">Dennis Rodgers</a>, Research Professor, Anthropology and Sociology, <em><a href="http://theconversation.com/institutions/graduate-institute-institut-de-hautes-etudes-internationales-et-du-developpement-iheid-2905">Graduate Institute – Institut de hautes études internationales et du développement (IHEID)</a></em></span></h4> <h4>Cet article est republié à partir de <a href="http://theconversation.com">The Conversation</a> sous licence Creative Commons. Lire l’<a href="https://theconversation.com/ethnologue-et-membre-de-gang-une-experience-nicaragueenne-116446">article original</a>.</h4>', 'content_edition' => null, 'slug' => 'ethnologue-et-membre-de-gang-une-experience-nicaragueenne', 'headline' => false, 'homepage' => 'col-md-6', 'like' => (int) 772, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1846, 'homepage_order' => (int) 2108, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 5, 'person_id' => (int) 85, 'post_type_id' => (int) 1, 'poster_attachment' => null, 'editions' => [], 'tags' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Tag) {} ], 'locations' => [], 'attachment_images' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'attachments' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'comments' => [], 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ '*' => true, 'id' => false ], '[dirty]' => [], '[original]' => [], '[virtual]' => [], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [], '[invalid]' => [], '[repository]' => 'Posts' } $relatives = [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 5295, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => false, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => null, 'readed' => null, 'subhead' => null, 'title' => 'Un bien cruel conte de Noël (1)', 'subtitle' => 'Catherine et Pierre forment un couple épanoui. 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La fidélité absolue est un concept éculé et hypocrite qui a pour but principal que les hommes soient certains que les enfants qui sortent des ventres de leur épouse soient bien le produit de leurs spermatozoïdes à eux. Transmettre ses gènes est un réflexe très animal, si Sapiens est vraiment un être supérieur, il devrait se détendre sur cette question. En plus, Pierre et moi n’avons pas fait d’enfants, trop concentrés sur nous-mêmes et nos vies à réussir. Marie, ma sœur, prétend que pour les femmes, l’importance de la fidélité n’a pas pour but la perpétuation de l’espèce mais plutôt la conservation à leur côté du mâle qui assure leur protection. Elle se trompe. Si Pierre et moi sommes toujours ensemble après trente-cinq ans de mariage, c’est justement parce que nous nous laissons la liberté d’aller de temps en temps voir ailleurs. Marie, elle, ne souhaitait plus de rapports sexuels tout en menaçant son mari de le quitter s’il la trompait. C’est lui qui est parti avec la première maîtresse qu’il s’est autorisée.</p> <p>Mais Pierre a changé.</p> <p>Nous nous sommes connus dans une manifestation contre le racisme alors que nous avions vingt-sept ans. Il était graphiste tandis que moi j’enseignais le français à des réfugiés dans un centre géré par l’Eglise protestante. Je l’avais déjà remarqué à d’autres occasions au fil des ans – Lausanne est une petite ville – notamment lors d’une soirée chez Jean-Luc, lequel a été mon amant lorsque j’avais vingt ans et que j’hésitais entre le trotskisme et l’écologie politique. Lorsque Jean-Luc, figure de proue des trotskistes locaux, m’avait quittée pour une camarade d’origine kurde plus valorisante pour lui, j’avais renoncé aux principes de la Quatrième Internationale et milité pour la sauvegarde de la planète, jusqu’à ma rencontre avec un zapatiste belge avec qui je suis partie au Mexique où j’ai attrapé une infection sexuellement transmissible. De retour en Suisse, j’ai soigné ma salpingite et terminé mes études de lettres. Entre deux amants de passage, je traversais de longues périodes d’abstinence sexuelle sans que cela me coûte. A la manif, j’ai trouvé Pierre très beau avec sa moustache et sa barbe de cinq jours. Et je l’ai trouvé irrésistible lorsqu’il a jeté une bouteille vide en direction des forces de l’ordre qui voulaient nous empêcher d’accéder à la salle où se déroulait une assemblée de l’UDC, ce parti d’extrême droite honni par nous. Pierre s’est fait réprimander par les camarades communistes qui assuraient le service d’ordre et il a fini par en venir aux mains avec eux. J’ai spontanément pris sa défense, nous nous sommes faits bousculer et avons quitté la manifestation, lui avec une arcade sourcilière fendue, moi avec un fort désir pour lui. Je l’ai emmené chez moi pour soigner sa blessure et nous avons fait l’amour toute la nuit. Deux semaines plus tard nous emménagions ensemble; nous ne nous sommes plus quittés.</p> <p>L’autre soir, alors que nous avions des invités à la maison, il m’a semblé reconnaître chez Pierre les signes d’une tension extrême. Depuis le temps, je le connais bien. Serge et Mireille, nos invités, l’ont eux aussi sentie, cette tension. Ce sont tout à la fois des amis et des clients. Des amis parce que comme nous ils sont de centre gauche, des clients car ils font appel à notre agence de communication pour promouvoir leur commerce. Après avoir été de grands voyageurs, Serge et Mireille vendent aujourd’hui des produits venus d’Asie, principalement d’Inde mais aussi de Birmanie et du Cambodge. Ils sélectionnent avec soins les artisans, privilégiant les structures coopératives respectueuses de l’environnement et du bien-être des populations locales. Nous gérons leur site internet et leur publicité, et tournons même pour eux des clips promotionnels. Pierre est devenu agressif avec Mireille lorsque celle-ci a déclaré que les néo-féministes exagéraient et que #MeToo décourageait toute tentative de séduction de la part des hommes. «Je n’ai pas peur de le dire, j’aime bien que l’on me tienne la porte et que les hommes me fassent sentir qu’ils me désirent…» Pierre lui a rétorqué que le patriarcat était une forme de fascisme et qu’en tant que progressiste nous devions tout faire pour l’abattre. J’ai essayé de dévier la conversation sur la nourriture bio mais très vite c’est l’écriture inclusive qui a fait s’échauffer les esprits. Serge, qui se pique d’aimer la littérature, a déclaré que le français était en danger, qu’il fallait le sauver des points médians et des réformes de l’orthographe. Pierre a rétorqué que pour rester vivantes les langues devaient changer, que les normes les étouffaient, que les règles orthographiques avaient été inventées pour empêcher les pauvres d’accéder aux études. «Etes-vous allés récemment au cinéma?» ai-je incidemment demandé à Mireille?</p> <p>Le lendemain, elle m’a appelée. «Avec Serge, on se demande si Pierre n’est pas en train devenir woke…» Mon sang s’est figé dans mes veines, une sourde angoisse est montée de mon estomac jusque dans ma gorge. «Non, non… Vous vous trompez… Vous avez bien vu, il continue de manger de la viande», ai-je rassuré Mireille. Mais le doute s’était instillé en moi, je me suis mise à mieux observer Pierre et, pour la première fois, j’ai fouillé dans ses poches et ses agendas, même dans son ordinateur. 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En jeu, rien de moins que les causes de la crise de la pollution plastique et les solutions appropriées pour y remédier.</p> <ul> <li> <p>D’un côté, la <a href="https://hactoendplasticpollution.org/fr/">Coalition de haute ambition</a> (HAC), les activistes du «zéro déchet» et de <a href="https://theconversation.com/traite-mondial-contre-la-pollution-plastique-en-coulisses-le-regard-des-scientifiques-francais-presents-234046">nombreux scientifiques</a> insistent sur la nécessité d’une <a href="https://hactoendplasticpollution.org/hac-member-states-ministerial-joint-statement-for-inc-5/">approche globale portant sur l’ensemble du cycle de vie des plastiques</a>, y compris leur production.</p> </li> <li> <p>De l’autre côté, une <a href="https://medium.com/points-of-order/spoiler-alert-f737a24292e6">petite minorité d’Etats</a> ainsi que l’industrie pétrochimique ont à de nombreuses reprises détourné l’attention de cette question de la production des plastiques. Au lieu de cela, ils accusent des <a href="https://psmag.com/environment/the-epa-blames-six-asian-nations-that-the-u-s-exports-plastic-waste-to-for-ocean-pollution/">systèmes de recyclage inadéquats et une mauvaise gestion des déchets</a>.</p> </li> </ul> <p>L’attention portée au recyclage des plastiques et à la gestion des déchets touche en réalité des millions de personnes en Asie, en Amérique du Sud et en Afrique. Il s’agit des travailleurs qui récupèrent, réutilisent ou revendent les plastiques, les textiles, l’aluminium et d’autres matériaux précieux issus des déchets.</p> <p>Dans le cadre du traité sur les plastiques, pour que ces travailleurs informels soient reconnus, que leurs conditions de travail puissent être améliorées et qu’ils puissent bénéficient d’une transition écologique plus équitable, les solutions politiques doivent aller au-delà des mécanismes économiques basés sur le seul marché et des stratégies axées sur le profit.</p> <p>Si ce n’est pas le cas, les efforts en faveur d’un recyclage plus inclusif et du développement de l’économie circulaire risquent de renforcer les injustices mêmes qu’ils prétendent combattre.</p> <h3>Qui sont les ramasseurs informels de déchets?</h3> <p>Les collecteurs de déchets – et les autres personnes travaillant avec eux dans un cadre informel et coopératif – effectuent une <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0921344924001824#sec0021">grande partie du travail de recyclage à l’échelle mondiale</a>. Ils réduisent de manière significative la quantité de plastique qui se retrouve dans les océans.</p> <p>Malgré cela, et parce qu’ils font un travail salissant et vivent dans des endroits sales, ils sont souvent tenus pour responsables du problème de la pollution plastique. Dans les discours politiques des villes et des Etats, leur travail a longtemps été <a href="https://journals.sagepub.com/doi/full/10.1177/0956247816657302">tourné en dérision, considéré comme non qualifié et inefficace</a>. <a href="https://www.undp.org/blog/unsung-heroes-four-things-policymakers-can-do-empower-informal-waste-workers">L’absence de reconnaissance officielle</a> de leur travail rend leurs revenus particulièrement instables et précaires. Les réglementations environnementales peuvent <a href="https://iopscience.iop.org/article/10.1088/1748-9326/ac6b49">aggraver ces menaces</a> en accélérant la privatisation du traitement des déchets.</p> <p>Alors que les efforts de lutte contre la pollution plastique gagnent du terrain, les ramasseurs informels sont soumis à une double pression:</p> <ul> <li> <p>Ils doivent protéger leur accès aux déchets, car c’est l’un des rares moyens de subsistance dont ils disposent.</p> </li> <li> <p>En même temps, ils cherchent à améliorer leurs conditions de vie et de travail.</p> </li> </ul> <p>Un groupe de ramasseurs de déchets a donc profité de l’ouverture des négociations pour <a href="https://globalrec.org/document/just-transition-waste-pickers-un-plastics-treaty/">plaider en faveur de la reconnaissance de leur travail</a>. Il a été demandé que leurs contributions historiques à la réduction de la pollution plastique soient explicitement reconnues, et qu’un objectif explicite de transition juste soit intégré au traité sur les plastiques.</p> <h3>Avec l’économie circulaire, tout le monde est gagnant?</h3> <p>La <a href="https://theconversation.com/quatre-idees-recues-sur-la-transition-juste-227569">transition juste</a> est un principe défendu par les groupes de travailleurs et les défenseurs de la justice sociale afin de garantir que les politiques de transition écologique protègent, améliorent et compensent équitablement les moyens de subsistance des travailleurs et des communautés affectés par l’environnement.</p> <p>Les ramasseurs de déchets ont utilisé ce terme pour réclamer que le traité comprenne des dispositions pour améliorer leurs conditions de travail et de sécurité. Mais également pour que le traité intègre davantage les travailleurs informels aux systèmes de gestion des déchets, et pour exiger que les systèmes de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/responsabilite-elargie-du-producteur-67766">responsabilité élargie des producteurs</a> (REP) soutiennent aussi les travailleurs du secteur des déchets, en particulier les <a href="https://www.wiego.org/gender-waste-project">femmes et d’autres groupes vulnérables</a>.</p> <p>Etonnamment, ces demandes ont obtenu le soutien d’un large éventail de parties prenantes puissantes. Par exemple la <a href="https://www.businessforplasticstreaty.org/vision-statement#Key-elements">Business Coalition for a Plastics Treaty</a>, les <a href="https://news.un.org/en/story/2024/10/1156301">dirigeants des Nations unies</a> et même <a href="https://resolutions.unep.org/resolutions/uploads/american_chemistry_council.pdf">l’industrie pétrochimique</a>.</p> <p>Certaines de ces demandes ont été intégrées aux projets de traité sur les plastiques discutés au cours des négociations, ce qui représente une victoire majeure pour les travailleurs du secteur informel des déchets.</p> <p>Un consensus se dégage sur le fait qu’une économie circulaire inclusive peut être bénéfique à la fois pour l’environnement, l’économie et les travailleurs en améliorant la gestion de la pollution, les moyens de subsistance et les opportunités de croissance économique pour les entreprises.</p> <p>Ces promesses demandent toutefois à être vérifiées sur le terrain. Et c’est là que les choses se compliquent.</p> <h3>« Gagnant-gagnant », mais la victoire de qui ?</h3> <p>Dans mon livre <a href="https://mitpress.mit.edu/9780262546973/recycling-class/"><em>Recycling Class</em></a>, j’examine comment les efforts de recyclage inclusif ont été mis en œuvre à Bengaluru, l’une des plus grandes villes de l’Inde.</p> <figure><a href="https://images.theconversation.com/files/635250/original/file-20241129-15-cdpt12.jpg?ixlib=rb-4.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img src="https://images.theconversation.com/files/635250/original/file-20241129-15-cdpt12.jpg?ixlib=rb-4.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" alt="" /></a> <figcaption><span></span></figcaption> </figure> <p>Dans cet ouvrage, je défends que l’intégration dans des programmes d’économie circulaire basés sur le marché n’est pas une solution miracle aux injustices ancrées dans les systèmes de production, de consommation et de production des déchets.</p> <p>La plupart des politiques d’économie circulaire et de recyclage inclusif reposent sur des mécanismes de marché, partant du principe que la création de marchés pour les déchets incitera les acteurs du marché à récupérer efficacement les déchets et à les convertir en ressources.</p> <p>Pour remplir leurs obligations en matière de <a href="https://theconversation.com/faire-payer-plus-les-entreprises-pour-quelles-reduisent-les-emballages-130073">responsabilité élargie des producteurs</a> (REP), les marques peuvent alors s’engager à acheter des plastiques recyclés et à financer la collecte des déchets en achetant des <a href="https://www.worldbank.org/en/programs/problue/publication/unlocking-financing-to-combat-the-plastics-crisis">crédits plastique</a>.</p> <p>Cette approche vise à améliorer le prix des déchets, à augmenter les salaires et à encourager les efforts de collecte, tout en attirant des investissements pour financer l’amélioration des infrastructures et des technologies.</p> <p>Cependant, les mécanismes fondés sur le marché aggravent les inégalités existantes en matière d’accès au marché. Les efforts visant à donner la priorité à la traçabilité et à la transparence – dans le but d’améliorer l’efficacité du marché et le respect de la réglementation – désavantagent souvent les travailleurs informels.</p> <p>Ces derniers ne disposent pas des ressources et des capacités techniques nécessaires pour adopter des systèmes de suivi complexes basés sur les SIG ou la blockchain, et se retrouvent exclus des processus formalisés. Les start-up financées par le capital-risque et les grandes entreprises s’emparent alors du secteur du recyclage.</p> <p>Les multinationales préfèrent d’ailleurs les partenariats avec des start-up technologiques qui offrent des services à «valeur ajoutée» tels que des indicateurs et des tableaux de bord environnementaux, permettant aux entreprises de mettre en scène leur propre récit sur le développement durable. Souvent issus de milieux éduqués et privilégiés, les employés de ces firmes <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S001671852300057X">concurrencent les travailleurs informels existants, les subordonnant au passage</a>.</p> <p>A l’inverse, les femmes et les membres des minorités ethno-raciales et religieuses, qui constituent la majorité des travailleurs des économies informelles des déchets, sont confrontés à des obstacles supplémentaires. Notamment des <a href="https://mouvements.info/recuperateurs-de-dechets/">stigmates sociaux bien ancrés</a> qui limitent leur capacité à participer sur un pied d’égalité à ces marchés émergents. Ils restent toujours relégués aux mêmes tâches manuelles et difficiles, même si leurs conditions de travail en ressortent légèrement améliorées.</p> <h3>L’industrie du plastique maintient le <em>statu quo</em></h3> <p>Malgré les bonnes intentions de départ, des termes tels que «économie circulaire inclusive» sont donc trop souvent utilisés à des fins de <em>green washing</em> et même de <em>justice washing</em>, tandis que les travailleurs continuent à endurer des conditions difficiles. Une étude de <a href="https://www.circle-economy.com/resources/decent-work-in-the-circular-economy">Circle Economy</a> souligne que la plupart des emplois du secteur de l’économie circulaire restent ad-hoc et informels et ne bénéficient pas des garanties d’un emploi décent.</p> <p>En fin de compte, les travailleurs informels sont confrontés à un choix difficile: soit ils acceptent d’être exploités au sein des circuits de traitements des déchets en tant que simples ressources, soit ils risquent de perdre complètement leurs moyens de subsistance.</p> <p>Les systèmes actuels de production et de consommation du plastique déplacent donc la charge des déchets sur des communautés autochtones ou ethniques marginalisées, créant ainsi des <a href="https://www.dukeupress.edu/pollution-is-colonialism">zones sacrifiées</a>. Ce déplacement permet de maintenir la rentabilité, tout en perpétuant les atteintes à l’environnement et les inégalités sociales.</p> <p>En promouvant des technologies de <a href="https://www.bbc.com/afrique/monde-57087908">recyclage chimique</a> non éprouvées et en étendant les marchés du plastique, les entreprises <a href="https://theconversation.com/comment-lindustrie-fossile-influence-les-negociations-mondiales-sur-le-plastique-222112">pétrochimiques</a> et de matières plastiques <a href="https://direct.mit.edu/glep/article/21/2/121/97367/Future-Proofing-Capitalism-The-Paradox-of-the">s’approprient le langage de l’économie circulaire</a>. Cela leur permet de donner un vernis écologique à leurs propositions, tout en maintenant le <em>statu quo</em> sur les inégalités.</p> <p>Pendant ce temps, la HAC, plusieurs ONG et même certains ramasseurs de déchets invoquent également l’économie circulaire comme solution à la crise du plastique, en mettant l’accent sur le réemploi et le recyclage inclusif.</p> <h3>Demander des comptes aux pollueurs plutôt que compter sur l’efficacité du marché</h3> <p>Pour que l’économie circulaire aille au-delà de la simple protection du capitalisme fossile, elle doit prendre en compte les collecteurs de déchets et recycleurs informels dans le Sud et reconnaître les limites des mécanismes basés sur le marché. C’est vrai aussi bien pour le traité international sur la pollution plastique que pour d’autres démarches régionales comme le <a href="https://www.europarl.europa.eu/RegData/etudes/ATAG/2021/679066/EPRS_ATA(2021)679066_FR.pdf">plan d’action de l’UE pour l’économie circulaire</a>.</p> <p>En effet, toute stratégie de lutte contre la pollution plastique basée sur le marché et axée sur le profit est susceptible de reproduire ces schémas d’inégalité. Et par la même occasion, de pérenniser les injustices systémiques qui soutiennent le statu quo. Pour une transition vraiment juste, la lutte contre la pollution plastique ne doit donc pas devenir une opportunité de croissance économique ou de profit.</p> <p>Au contraire, nous avons besoin d’une approche centrée sur la réparation. Il faut d’abord, pour cela, reconnaître les contributions historiques des collecteurs informels du plastique ainsi que les préjudices qu’ils subissent. Puis redistribuer les ressources aux personnes les plus touchées et créer des systèmes qui donnent la priorité à la restauration de l’environnement et à la justice sociale plutôt qu’au profit des entreprises.</p> <p>Une économie circulaire bien financée devrait d’abord renforcer le pouvoir des travailleurs, puis améliorer les capacités des infrastructures et réduire la concentration de ces déchets en produits chimiques toxiques, plutôt que de s’appuyer sur des solutions basées sur le marché qui aggravent les inégalités.</p> <p>Les vraies solutions consistent à demander des comptes aux pollueurs et à adopter des approches circulaires fondées sur la sobriété et la réparation, et non sur l’efficacité du marché.<img src="https://counter.theconversation.com/content/244065/count.gif?distributor=republish-lightbox-basic" alt="The Conversation" width="1" height="1" /></p> <hr /> <h4><span><a href="https://theconversation.com/profiles/manisha-anantharaman-1526162">Manisha Anantharaman</a>, Assistant Professor, Center for the Sociology of Organisations, CNRS/Sciences Po, <em><a href="https://theconversation.com/institutions/sciences-po-2196">Sciences Po </a></em></span></h4> <h4>Cet article est republié à partir de <a href="https://theconversation.com">The Conversation</a> sous licence Creative Commons. Lire l’<a href="https://theconversation.com/les-ramasseurs-de-dechets-grands-perdants-du-recit-dominant-sur-la-pollution-plastique-244065">article original</a>.</h4> </div>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'les-ramasseurs-de-dechets-grands-perdants-du-recit-dominant-sur-la-pollution-plastique', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 42, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 5, 'person_id' => (int) 85, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [[maximum depth reached]], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 5283, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => true, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => null, 'readed' => null, 'subhead' => null, 'title' => 'Les Etats-Unis financent un collectif international de journalistes', 'subtitle' => 'Si le réseau Organized Crime and Corruption Reporting Project (OCCRP) a révélé des avoirs russes cachés ou la corruption au Venezuela, le Delaware, paradis de l'évasion fiscale, reste pour lui un tabou. «Notre politique veut que nous ne fassions pas de rapports sur un pays avec son propre argent», a déclaré Drew Sullivan, son cofondateur.', 'subtitle_edition' => 'Si le réseau Organized Crime and Corruption Reporting Project (OCCRP) a révélé des avoirs russes cachés ou la corruption au Venezuela, le Delaware, paradis de l'évasion fiscale, reste pour lui un tabou. «Notre politique veut que nous ne fassions pas de rapports sur un pays avec son propre argent», a déclaré Drew Sullivan, son cofondateur.', 'content' => '<p style="text-align: center;"><strong>Urs P. Gasche</strong>, article publié sur <a href="https://www.infosperber.ch/medien/medienkritik/die-usa-finanzieren-internationales-journalisten-kollektiv/" target="_blank" rel="noopener"><em>Infosperber</em></a> le 5 décembre 2024, traduit par <em>Bon Pour La Tête</em></p> <hr /> <p>Parmi de nombreux autres médias, la <em>NZZ</em> et le <em>Tages-Anzeiger</em> ont diffusé à plusieurs reprises des révélations du réseau international de journalistes Organized Crime and Corruption Reporting Project (OCCRP). Ce faisant, ils n'ont pas rendu transparent le fait que les services gouvernementaux américains paient la moitié du budget de l'OCCRP. 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De plus, l'agence gouvernementale américaine interdit d'utiliser son argent pour mettre au jour la corruption aux Etats-Unis.</p> <p>Certaines subventions étaient même affectées à un but précis: le Department of State, par exemple, a versé 173 000 dollars à l'OCCRP pour «détecter et combattre la corruption au Venezuela». Ou l'<a href="https://www.usaid.gov/">Agence pour le développement international (USAID)</a> a versé plus de deux millions de dollars dans le but de «mettre au jour la criminalité et la corruption à Malte et à Chypre».</p> <p>Le journal en ligne français indépendant <a href="https://www.mediapart.fr/en/journal/international/021224/hidden-links-between-giant-investigative-journalism-and-us-government">« Mediapart »</a> en a parlé le 2 décembre 2024 <a href="https://www.mediapart.fr/en/journal/international/021224/hidden-links-between-giant-investigative-journalism-and-us-government">.</a></p> <p>Le fondateur de l'OCCRP est un ancien employé <a href="https://www.rockwellautomation.com/de-ch.html">de Rockwell</a> devenu journaliste: <a href="https://www.occrp.org/en/staff/drew-sullivan">Drew Sullivan</a>. L'OCCRP a été créé à l'instigation de fonctionnaires du gouvernement américain. Selon Mediapart, Sullivan a reçu pour cela, en 2008, un financement de départ de 1,7 million de dollars du <a href="https://www.state.gov/bureaus-offices/under-secretary-for-civilian-security-democracy-and-human-rights/bureau-of-international-narcotics-and-law-enforcement-affairs/">Bureau of International Narcotics and Law Enforcement Affairs</a>(INL). Il s'agit d'une agence d'application de la loi du Département d'Etat américain.</p> <p>L'OCCRP s'appuie souvent sur des documents divulgués provenant de sources non identifiées. La qualité des recherches et des révélations de l'OCCRP n'est pas mise en doute. L'orientation unilatérale des recherches et le manque de transparence des informations sur le financement donnent lieu à des critiques.</p> <p>L'ampleur des liens personnels et financiers de l'OCCRP avec le gouvernement américain va à l'encontre de «tous les principes de l'éthique journalistique». C'est ce qu'a déclaré Leonard Novy, directeur de l'Institut allemand des médias et de la politique de communication, à la chaîne NDR. Cela laisse supposer que les journalistes peuvent être utilisés ou instrumentalisés à des fins politiques.</p> <p>Sullivan et l'OCCRP ont également laissé les médias partenaires et leurs lecteurs dans l'ignorance de leur proximité avec le gouvernement américain. Selon Leonard Novy, l'organisation a ainsi dépassé les limites.</p> <h3><strong>Sullivan n'a pas voulu parler clairement aujourd'hui encore</strong></h3> <p>Sullivan a d'abord affirmé à la chaîne NDR que l'OCCRP avait «un groupe de donateurs largement répandu», parmi lesquels «aucun donateur individuel ne domine». Il a ajouté que «le gouvernement américain [...] est l'un des plus grands donateurs, mais ce n'est pas un pourcentage énorme». 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[...] Je suis très reconnaissant au gouvernement américain.»</p> <p>Par écrit, Sullivan a renchéri: «Nous avons dû décider si nous voulions accepter de l'argent du gouvernement ou ne pas exister.» Sur le site web de l'OCCRP, les montants des sponsors ne sont pas indiqués.</p> <h3><strong>Conditions posées</strong></h3> <p>Sullivan a confirmé à la NDR le pouvoir d'influence des autorités américaines: «Dans le cadre d'accords de coopération que nous n'aimons pas conclure, ils ont un droit de regard sur le choix des personnes [...] Ils peuvent mettre leur veto sur quelqu'un [...] Ils n'ont jamais mis leur veto sur quelqu'un.»</p> <p>L'OCCRP ne peut pas enquêter sur des affaires américaines avec l'argent fourni par Washington. «Notre politique veut que nous ne fassions pas de rapports sur un pays avec son propre argent», a déclaré Sullivan à la NDR. «Je pense que le gouvernement américain ne le permet pas. Mais même dans d'autres pays où ces dispositions n'existent pas, nous ne le faisons pas parce que cela vous place dans une situation de conflit d'intérêts et que vous préférez rester à l'écart de telles situations.»</p> <p>Ainsi, le paradis fiscal américain du Delaware n'a jamais fait l'objet de toutes les recherches sur l'évasion fiscale et l'argent de la corruption.</p> <p>L'OCCRP a tout de même effectué des recherches isolées aux Etats-Unis: par exemple sur les <a href="https://www.occrp.org/en/investigation/meet-the-florida-duo-helping-giuliani-investigate-for-trump-in-ukraine">hommes d'affaires</a> qui avaient soutenu l'avocat de Donald Trump pour nuire à Joe Biden, ou sur la manière dont le Pentagone a dépensé des sommes énormes pour <a href="https://www.occrp.org/en/project/making-a-killing/revealed-the-pentagon-is-spending-up-to-22-billion-on-soviet-style-arms-for-syrian-rebels">fournir des armes</a> à des groupes rebelles en Syrie, ou encore sur un <a href="https://www.occrp.org/en/investigation/flight-of-the-monarch-us-govt-contracted-airline-once-owned-by-criminals-with-ties-to-russian-mob">contrat</a> entre le gouvernement américain et une compagnie aérienne dont les propriétaires sont liés au crime organisé en Russie.</p> <p>Ces recherches ont manifestement respecté une autre condition imposée par les autorités américaines à l'OCCRP: l'activité doit être «en accord avec la politique étrangère et les intérêts économiques des Etats-Unis et les promouvoir.» (<a href="https://www.govinfo.gov/content/pkg/COMPS-1071/pdf/COMPS-1071.pdf">US Foreign Assistance Act</a>).</p> <h3><strong>Voici comment la «NZZ» et Tamedia ont présenté la source OCCRP</strong></h3> <p><strong>«NZZ» du 19 juillet 2023</strong></p> <p>«L'Organized Crime and Corruption Reporting Project (OCCRP) est un réseau d'organisations journalistiques fondé en 2006, basé dans de nombreux pays différents et fonctionnant sous cette forme en tant que filiale du Journalism Development Network à but non lucratif, dont le siège est dans le Maryland.»</p> <p><strong>«Tages-Anzeiger» du 21 juin 2023</strong></p> <p>«Grâce à l'organisation OCCRP, des journalistes femmes de plusieurs pays ont pu étudier ces données, dont <em>Der Standard</em> en Autriche et <em>Der Spiegel</em> en Allemagne. Pour la Suisse, le bureau de recherche de Tamedia et Paper Trail Media était de la partie.»</p> <h3><strong>Informations complémentaires</strong></h3> <p><strong>22 décembre 2022</strong> <a href="https://www.infosperber.ch/politik/welt/twitter-diente-jahrelang-als-gehilfe-des-pentagons/">Twitter a servi pendant des années d'auxiliaire au Pentagone</a>. Elon Musk a partiellement révélé les outils internes de Twitter. Ils prouvent des services d'hommes de main pour la propagande de l'armée américaine à l'étranger.</p> <p><strong>12 février 2009</strong> <a href="https://www.tagesanzeiger.ch/27-000-pr-berater-polieren-image-der-usa-631302390683">27 000 conseillers en relations publiques polissent l'image des Etats-Unis</a>. 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