Actuel / Les fautes d’orthographe sur les sites de vente en ligne: quels effets sur les consommateurs?
Recommandé? Pas vraiment. © Leenient/VisualHunt, CC BY-NC
Si les études commencent à se multiplier concernant l’impact des fautes d’orthographe en milieu professionnel, aucune d’entre elles n’avait pour l’instant questionné leur impact sur les attitudes des consommateurs en ligne. Une récente étude portant sur 2000 internautes vient d’être menée. Ses résultats sont surprenants.
Christelle Martin Lacroux, Université Grenoble Alpes et Brigitte Müller, Université de Toulon
L’effet des fautes sur les sites d’e-commerce
En 2017, les internautes ont réalisé en moyenne en France 33 transactions en ligne pour un montant global de 81,7 milliards d’euros sur l’un des quelques 200'000 sites marchands français. De très nombreuses recherches en marketing ont déjà étudié l’influence de l’atmosphère d’un site, de la musique ou encore de ses couleurs sur l’image perçue de la marque par les consommateurs.
Quelques rares études ont été publiées sur l’effet des fautes sur les sites de vente en ligne. Depuis les années 90, elles ont montré que les fautes d’orthographe constituent un réel obstacle à la confiance des visiteurs de sites Internet. Les fautes diminuent le score de crédibilité accordé aux sites, la qualité perçue de ces derniers mais également l’image perçue de l’auteur des fautes. Même lorsque les fautes incombent à d’autres internautes (par exemple via les avis déposés par les clients), les effets pour l’entreprise sont lourds de conséquences: les commentaires comportant des fautes de grammaire et d’orthographe réduisent les intentions de réserver des visiteurs sur les sites d’hôtels et déprécient l’image de l’établissement. Plusieurs expériences ont également confirmé que la présence de fautes entraînait une diminution des montants que les internautes étaient disposés à dépenser sur des sites contenant des fautes.
De quelles fautes les études parlent-elles ?
Dans ces différentes recherches, il apparaît clairement que la définition même du terme «faute d’orthographe» ne fait pas l’unanimité. Dans certaines d’entre elles, les fautes typographiques (ou fautes de clavier ou encore fautes de frappe) sont considérées comme des fautes d’orthographe à part entière.
Pourtant, il ne s’agit que de fautes mécaniques (omission ou inversion de lettres) très différentes des fautes d’orthographe à proprement parler, c’est-à-dire des fautes lexicales ou d’usage (vert, vers, verre) ou grammaticales (accords, conjugaisons, homophones grammaticaux). Dans d’autres, seules les fautes grammaticales sont envisagées. Cette question de la définition du terme a pourtant toute son importance.
En effet, certaines études ont démontré un effet différencié des types de fautes sur les lecteurs. Par exemple, sur un CV, les fautes d’orthographe ont un effet négatif significativement supérieur aux fautes typographiques ou fautes de clavier sur le rejet d’une candidature.
Curieusement, alors que la question des effets délétères des fautes pendant le processus de recrutement a fait l’objet d’un nombre de recherches croissant, aucune ne s’est intéressée en France aux effets des fautes d’orthographe sur la perception de la marque et/ou de l’entreprise. Une récente étude vient de le faire.
Une expérimentation française à grande échelle…
Elle a été menée en France auprès de près de 2000 internautes représentatifs de la population. Deux types de fautes (d’orthographe et typographiques) ont été distillés sur des sites d’e-commerce pour évaluer leur effet en termes d’image et d’intentions d’achat notamment. Pour ce faire, deux sites Internet de vente en ligne ont été créés (l’un commercialisant des sacs et l’autre des ustensiles de cuisine) en 3 versions: une version sans fautes, une version avec des fautes typographiques, une autre avec des fautes d’orthographe (lexicales et grammaticales). Chacun des participants a été exposé aléatoirement à l’une des 3 versions d’un des deux sites. Il lui a été demandé de visiter les différentes pages avant de répondre à des questions d’évaluation concernant notamment son attitude vis-à-vis de la marque, sa confiance envers le site Internet, ses intentions d’achat ou encore le montant qu’il serait prêt à dépenser. Il devait ensuite laisser un commentaire global sur le site visité.
… Aux résultats très surprenants
Le résultat le plus surprenant de cette étude concerne le repérage des fautes par les internautes. En effet, les participants à l’étude ont uniquement repéré les fautes typographiques sur les sites. L’analyse des commentaires et des scores attribués démontre qu’ils n’ont pas détecté les fautes de grammaire ou d’usage, et ce même lorsqu’ils se déclarent par ailleurs bons en orthographe.
Si les internautes se déclarant bons en orthographe ont davantage utilisé le mot «fautes» dans leurs commentaires, c’est uniquement lorsqu’ils ont visité un site contenant des fautes de clavier. Ils n’ont pas utilisé ce mot en présence de fautes de grammaire ou d’usage pourtant basiques (ex: pluriel, accord, et/est).
Seules les fautes typographiques ont eu un effet significativement négatif sur l’attitude des répondants vis-à-vis de la marque et la confiance envers le site Internet. Les intentions d’achat des participants n’ont été quant à elles impactées négativement uniquement en cas de fautes typographiques… Les sites contenant des fautes d’orthographe ont obtenu des intentions d’achat semblables aux sites exempts de fautes.
En d’autres termes, les internautes n’ont pas repéré donc pas pénalisé les fautes d’orthographe (dépendant de leur niveau en compétence orthographique). En revanche ils ont repéré et pénalisé les fautes de frappe (qui sont quant à elles repérables quel que soit le niveau en orthographe des participants).
Quelques pistes d’explications
Ces résultats contredisent ceux d’études antérieures qui avaient démontré les effets négatifs des fautes d’orthographe sur le comportement des recruteurs étudiant des CV. Ils sont également en contradiction avec celles concluant aux conséquences négatives supérieures des fautes d’orthographe à celles des fautes de clavier.
Comment expliquer ces résultats ? D’abord, il se peut que les internautes ne se soient pas concentrés sur les erreurs d’orthographe en particulier, mais davantage sur l’évaluation globale du site marchand et qu’ils aient donc négligé cet aspect. Une étude très connue a mis en évidence la cécité d’inattention des individus. Durant une expérience portant sur une séquence vidéo, ces chercheurs ont démontré que lorsque l’attention d’un individu était entièrement mobilisée par l’exécution d’une tâche difficile (ex: compter des passes de ballon entre plusieurs personnes), ils pouvaient ne pas remarquer un événement sortant de l’ordinaire durant cette même séquence (l’apparition d’un gorille). Un participant sur deux n’a en effet pas remarqué ce gorille. Les chercheurs ont attribué ce résultat à la mobilisation entière de l’attention des sujets à exécuter une tâche difficile. Évaluer un site Internet pourrait dans ce cas être assimilé à une tâche difficile et du coup occulter la présence de fautes.
On peut aussi tout simplement invoquer le manque de compétences suffisantes des participants pour identifier les fautes d’orthographe.
Ainsi, cette étude pourrait apporter une preuve supplémentaire de la baisse du niveau des Français en orthographe et elle questionne en même temps la relation épidermique avec ce qu’ils pensent être de l’orthographe. En effet, les internautes exposés aux fautes de frappe ont eu des commentaires extrêmement durs à l’égard de ce qu’ils pensent être des fautes d’orthographe (ex: «Le site est plein de fautes d’orthographe c’est complètement rédhibitoire pour moi. Ça ne fait pas professionnel et ça ne met pas en confiance» ; «Beaucoup trop de fautes d’orthographe qui décrédibilisent totalement le site» ; «C’est inadmissible, cela donne vraiment une mauvaise image et cela ne me donne vraiment pas envie de consulter plus le site»). Cette étude propose une nouvelle illustration de la complexité du rapport des Français à l’orthographe: dans une récente enquête, les Français se déclarent choqués par les fautes (en particulier dans la presse écrite, où elles dérangent 57 % d’entre eux)… et pourtant, ils sont conscients de leurs lacunes puisque près d’un Français sur deux avoue commettre des fautes récurrentes (en particulier en conjugaison et en grammaire).
Christelle Martin Lacroux, Maître de conférences en sciences de gestion- Laboratoire CERAG- IUT2, Université Grenoble Alpes and Brigitte Müller, Maître de conférences en Sciences de gestion, Laboratoire Cergam, Université de Toulon
Cet article a été publié à l'origine sur le site The Conversation. Cliquez ici pour lire l'article original: «Les fautes d’orthographe sur les sites de vente en ligne : quels effets sur les consommateurs»
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Dans d’autres, seules les fautes grammaticales sont envisagées. Cette question de la définition du terme a pourtant toute son importance.</p> <p>En effet, certaines études ont démontré un effet différencié des types de fautes sur les lecteurs. Par exemple, sur un CV, les fautes d’orthographe ont un effet négatif significativement supérieur aux fautes typographiques ou fautes de clavier sur le rejet d’une candidature.</p> <p>Curieusement, alors que la question des effets délétères des fautes pendant le processus de recrutement a fait l’objet d’un nombre de recherches croissant, aucune ne s’est intéressée en France aux effets des fautes d’orthographe sur la perception de la marque et/ou de l’entreprise. Une récente étude vient de le faire.</p> <h2><br>Une expérimentation française à grande échelle…</h2> <p>Elle a été menée en France auprès de près de 2000 internautes représentatifs de la population. 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Cliquez ici pour lire l'article original: «<a href="https://theconversation.com/les-fautes-dorthographe-sur-les-sites-de-vente-en-ligne-quels-effets-sur-les-consommateurs-96521">Les fautes d’orthographe sur les sites de vente en ligne : quels effets sur les consommateurs</a>»</h4> ', 'content_edition' => null, 'slug' => 'les-fautes-d-orthographe-sur-les-sites-de-vente-en-ligne-quels-effets-sur-les-consommateurs', 'headline' => false, 'homepage' => 'col-md-12', 'like' => (int) 772, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1122, 'homepage_order' => (int) 1345, 'original_url' => null, 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 5, 'person_id' => (int) 85, 'post_type_id' => (int) 1, 'poster_attachment' => null, 'editions' => [[maximum depth reached]], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'attachments' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'comments' => [ [maximum depth reached] ], 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, 'relatives' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Post) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Post) {}, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Post) {}, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Post) {} ], 'embeds' => [], 'images' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'audios' => [], 'comments' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Comment) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Comment) {} ], 'author' => 'Bon pour la tête', 'description' => 'Si les études commencent à se multiplier concernant l’impact des fautes d’orthographe en milieu professionnel, aucune d’entre elles n’avait pour l’instant questionné leur impact sur les attitudes des consommateurs en ligne. 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Une étude très connue a mis en évidence la <a href="http://www.dansimons.com/">cécité d’inattention des individus</a>. Durant une expérience portant sur une séquence vidéo, ces chercheurs ont démontré que lorsque l’attention d’un individu était entièrement mobilisée par l’exécution d’une tâche difficile (ex: compter des passes de ballon entre plusieurs personnes), ils pouvaient ne pas remarquer un événement sortant de l’ordinaire durant cette même séquence (l’apparition d’un gorille). Un participant sur deux n’a en effet pas remarqué ce gorille. Les chercheurs ont attribué ce résultat à la mobilisation entière de l’attention des sujets à exécuter une tâche difficile. 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Cette étude propose une nouvelle illustration de la complexité du rapport des Français à l’orthographe: dans une récente enquête, les <a href="https://bit.ly/2yIDUwE">Français se déclarent choqués par les fautes</a> (en particulier dans la presse écrite, où elles dérangent 57 % d’entre eux)… et pourtant, ils sont conscients de leurs lacunes puisque près d’un Français sur deux avoue commettre des fautes récurrentes (en particulier en conjugaison et en grammaire).</p> <p><span><a href="https://theconversation.com/profiles/christelle-martin-lacroux-422312">Christelle Martin Lacroux</a>, Maître de conférences en sciences de gestion- Laboratoire CERAG- IUT2, <em><a href="http://theconversation.com/institutions/universite-grenoble-alpes-2279">Université Grenoble Alpes</a></em> and <a href="https://theconversation.com/profiles/brigitte-muller-497418">Brigitte Müller</a>, Maître de conférences en Sciences de gestion, Laboratoire Cergam, <em><a href="http://theconversation.com/institutions/universite-de-toulon-2423">Université de Toulon</a></em></span></p><p></p><hr><p></p><h4>Cet article a été publié à l'origine sur le site <a href="http://theconversation.com">The Conversation</a>. Cliquez ici pour lire l'article original: «<a href="https://theconversation.com/les-fautes-dorthographe-sur-les-sites-de-vente-en-ligne-quels-effets-sur-les-consommateurs-96521">Les fautes d’orthographe sur les sites de vente en ligne : quels effets sur les consommateurs</a>»</h4> ', 'content_edition' => null, 'slug' => 'les-fautes-d-orthographe-sur-les-sites-de-vente-en-ligne-quels-effets-sur-les-consommateurs', 'headline' => false, 'homepage' => 'col-md-12', 'like' => (int) 772, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1122, 'homepage_order' => (int) 1345, 'original_url' => null, 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 5, 'person_id' => (int) 85, 'post_type_id' => (int) 1, 'poster_attachment' => null, 'editions' => [], 'tags' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Tag) {} ], 'locations' => [], 'attachment_images' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'attachments' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'comments' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Comment) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Comment) {} ], 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ '*' => true, 'id' => false ], '[dirty]' => [], '[original]' => [], '[virtual]' => [], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [], '[invalid]' => [], '[repository]' => 'Posts' } $relatives = [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 4861, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => true, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => null, 'readed' => null, 'subhead' => null, 'title' => 'La démocratie, oui… si elle convient', 'subtitle' => 'Le site Infosperber a publié une provocante réflexion de Walter Langenegger, ex-chef de la rubrique suisse au « St.Galler Tagblatt » et chef de la communication de la ville de Berne. 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Si l’Allemagne et les autres membres de l’alliance nouent bien des partenariats avec des Etats du Pacifique, et conduisent des exercices militaires dans la zone, ce n’est pas à la hauteur de la «menace chinoise».</p> <p>La nature de cette menace? Elle n’est pas directement militaire mais plutôt économique. «Si Pékin était en mesure de bloquer les voies commerciales dans la mer de Chine méridionale, la circulation des marchandises en Europe serait en péril».</p> <p>Autre question qui n’était pas d’actualité il y a 75 ans: la contribution des Etats-Unis. Le <a href="https://www.telegraph.co.uk/opinion/2024/04/03/europe-must-step-up-to-keep-the-us-in-nato/" target="_blank" rel="noopener"><em>Daily Telegraph</em></a> regrette que l’Europe ne fasse aucun effort pour s’assurer que le plus grand contributeur de l’OTAN ne s’en détache pas. L’heure est grave, puisqu’on parle de «passer à la caisse». 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Si le cadre institutionnel, les techniques de soin et les méthodes de recherche scientifique ont une longue (et passionnante) histoire, il n’en demeure pas moins que leur évolution est définie par des principes sociaux stables, qui trouvent leur première formulation à l’aube de notre civilisation.</p> <p>De même que <a href="https://theconversation.com/aux-origines-de-lirresponsabilite-penale-des-fous-160654">l’irresponsabilité pénale</a> des individus dont le jugement est aboli est une règle de droit observée dès le sortir de la Préhistoire, de même, il existe bien une psychiatrie antique, pensée et nommée comme telle. Les auteurs de langue latine la désignent comme « soin des aliénés » (<em>curatio furiosi</em>). Elle est le reflet, dans la sphère médicale, du traitement civique des malades désigné par les auteurs juridiques comme « protection des déments » (<em>cura furiosi</em>).</p> <h3>Naissance de la psychiatrie</h3> <p>Les modalités du traitement médical des personnes atteintes de trouble mental sévère (les <em>furiosi</em>) sont élaborées par des auteurs de langue et souvent d’origine grecque, puisque la médecine est une discipline enracinée dans la culture de la civilisation grecque. Mais cette invention a lieu dans un contexte romain, c’est-à-dire à l’époque romaine et dans la ville de Rome, dans le milieu sénatorial et bourgeois de la fin de la République (du temps de César et Cicéron, ou peu avant).</p> <p>[<em>Plus de 85 000 lecteurs font confiance aux newsletters de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde</em>. <a href="https://memberservices.theconversation.com/newsletters/?nl=france&region=fr">Abonnez-vous aujourd’hui</a>]</p> <p>La naissance de cette psychiatrie est inséparable du nom d’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ascl%C3%A9piade_de_Bithynie">Asclépiade de Bithynie</a> (dans l’actuelle Turquie), un personnage singulier, orateur peut-être dans les premières années de sa vie professionnelle, venu ensuite exercer la médecine dans la Ville éternelle où il évolue dans l’entourage de Crassus le Riche. Mais dans l’ombre d’Asclépiade, les soins médicamenteux, incluant notamment le recours aux psychotropes et aux sédatifs, s’étaient sans doute déjà diffusés, dans une mesure qu’il est impossible d’évaluer.</p> <p>Par la suite, la méthode du soin psychiatrique se développe et se consolide dans le contexte impérial, notamment à l’apogée de l’Empire incarné par la dynastie antonine (Trajan, Hadrien, Marc Aurèle…). Dans ce sens, la psychiatrie antique est moins une invention romaine qu’une invention du philhellénisme romain : une invention proprement « impériale », dans le sens où elle naît de la rencontre entre l’art d’une civilisation conquise (l’art médical grec, mais aussi sa culture gymnique ou son art oratoire) et les usages d’une société conquérante, dont les élites acquièrent des niveaux de fortune inédits, au point de pouvoir financer pour leurs malades des soins quotidiens sur la longue durée. La naissance de la psychiatrie bénéficie aussi de la première « mondialisation » d’époque hellénistique et romaine, qui donne accès à de nouvelles épices et à de nouveaux médicaments.</p> <p>Dans ses modalités, la psychiatrie ancienne est avant tout un art de la discipline. En plus des purges au cœur de tout traitement médical, le soin des déments articule discipline alimentaire, discipline comportementale et exercices physiques, sensoriels et intellectuels. La parole y tient une part non négligeable et l’état émotionnel du patient est l’objet d’une attention permanente. 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La situation exceptionnelle de ces personnes était déjà prise en considération par le <a href="https://theconversation.com/aux-origines-de-lirresponsabilite-penale-des-fous-160654">droit pré-historique</a> : ce n’est donc que dans un second temps que les médecins de l’Antiquité développent une prise en charge thérapeutique pour les individus en état de « démence », dont la maladie correspond dans ses grandes largeurs à la notion de psychose en médecine moderne.</p> <p>Mais la méthode de soins que les médecins gréco-romains mettent en place pour les guérir, ou pour les soulager, s’applique aussi, sous certains aspects, à des états voisins, désignés comme « phrénite » et comme « mélancolie ». La première, la « phrénite », est une catégorie médicale très ancienne qui désigne une affection fulgurante, et souvent mortelle, associée à des symptômes de confusion mentale sévère. Des auteurs modernes ont pensé y reconnaître l’encéphalite, la méningite, la malaria ou le syndrome délirant organique.</p> <p>Au contraire, la « mélancolie » est une catégorie d’invention tardive et incertaine, dont le sens varie considérablement d’un auteur à l’autre. Chez les auteurs d’époque romaine, elle entretient le plus souvent un lien étroit avec la « démence », avec laquelle elle a en commun d’être un trouble psychique grave et de longue durée. Mais par différence avec la « démence », elle en vient à désigner les désordres d’ordre affectif (phobiques, paranoïaques, dépressifs…) plutôt que d’ordre cognitif ou intellectuel (délire, illusions, déraison…).</p> <p>Les soins prodigués par la psychiatrie varient d’une maladie à l’autre, et en un sens, c’est la méthode de soin qui définit les maladies. Mais le corps malade est toujours le premier objet de l’action thérapeutique des médecins. Par exemple contre la phrénite, qui est nettement une affection du corps, la psychiatrie antique mobilise d’abord les remèdes ordinaires de la médecine ancienne, tels que la saignée ou les purges. 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Pour autant, les soins psychiques appliqués aux « déments » sont aussi (et davantage encore) prodigués aux mélancoliques, pour la même raison que nos services psychiatriques prennent en charge la dépression : c’est-à-dire en raison de la gravité de leur mal-être et de la menace qu’il fait peser sur la vie de ceux qui en souffrent.</p> <p>Pour les « déments » à proprement parler, l’aliénisme antique qui se structure à Rome associe donc un <a href="https://journals.openedition.org/crdf/1910">régime de protection juridique</a> (<em>cura furiosi</em>) à un régime médical (<em>curatio furiosi</em>), selon une distinction qui tient compte du double aspect individuel et civique de la psychose, et qui en confie la charge à des professions différentes. Constater l’origine antique, voire préhistorique, de ce double rapport à la maladie mentale, c’est y reconnaître un principe fondamental de notre vie sociale.</p> <hr /> <h4>Cet article puise en bonne partie dans les sources rassemblées dans l’ouvrage <a href="https://www.lesbelleslettres.com/livre/9782251455419/la-psychiatrie-a-rome"><em>La psychiatrie à Rome, Comprendre et soigner la folie d’après Celse et Caelius Aurelianus</em></a>.<img src="https://counter.theconversation.com/content/224658/count.gif?distributor=republish-lightbox-basic" alt="The Conversation" width="1" height="1" /></h4> <h4><span><a href="https://theconversation.com/profiles/pierre-henri-ortiz-1228625">Pierre-Henri Ortiz</a>, Maître de conférences en histoire romaine, <em><a href="https://theconversation.com/institutions/universite-dangers-2619">Université d'Angers</a></em></span></h4> <h4>Cet article est republié à partir de <a href="https://theconversation.com">The Conversation</a> sous licence Creative Commons. 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VOS RÉACTIONS SUR LE SUJET
2 Commentaires
@JeanPaul80 08.07.2018 | 13h46
«Je vous propose de lire le journal 20 Minutes... Non seulement les articles sont souvent très mal écrits, utilisant des expressions empreintes de jeunisme et de vulgarité, mais ils ne respectent pas du tout la langue française, ce qui est tout de même assez grave pour une publication destinée au grand public. Quand reverrons-nous fleurir à nouveau en Romandie de vrais journalistes intéressants, sachant manier la langue et ses artifices et non-dépourvus d'humour ? »
@mariejohane 18.07.2018 | 16h51
«Bonjour, et les fautes d'orthographe dans certains articles de bon pour la tête, pas mal non plus. Particulièrement pour les accords des participes.
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