Culture / La Palestine des poètes irradie sans être nommée
Gaza, la vieille ville. Henry Baker Tristram d'après une photographie de Francis Frith, 1857.
Obscène de parler poésie à l’heure des massacres? Au contraire: cette musique de l’humain, à redéfinir sans cesse, reste une terre commune et le moment d’une parole à partager. Une nouvelle preuve en est donnée, avec une richesse et une force d’expression d’autant plus impressionnantes qu’elle ignore et dépasse tout discours idéologique ou politique, par l'«Anthologie de la poésie palestinienne d’aujourd’hui» publiée avant le nouveau rebond de la tragédie.
D’abord on se dira peut-être que le seul titre de ce recueil, Anthologie de la poésie palestinienne d’aujourd’hui, jure avec ce qui se passe précisément ces jours: de la poésie alors que les massacres continuent! Des mots parmi les ruines, et pour dire quoi? Des mots contre les bombes, mais lesquels? De la propagande? De la haine ajoutée à la haine? Ou pire: de belles paroles d’une élite lettrée? Du baume sur les corps éventrés? Autant de soupçons avant même le premier regard…
Sur quoi, pour peu que vous preniez la peine de l’ouvrir, ce petit livre, et d’en écouter les voix, peut-être en serez-vous, sans parti pris, ne vous réclamant d’aucun camp, saisi par le fait que lui non plus, ce petit livre, n’est soumis à aucun parti pris idéologique ou politique, et que, sans être vous-même lectrice ou lecteur de poésie, simplement à l’écoute des vingt-six femmes et hommes réunis dans ce recueil, choisis et traduits par l’écrivain marocain Abdellatif Laâbi, lequel souligne «l’incroyable polyphonie vocale et orchestrale» de sa propre découverte – peut-être aurez-vous le sentiment profond de participer à un partage bienfaisant. Ah mais c’est ça la poésie? Eh mais ces Palestiniens nous ressemblent…
Frère et sœurs au même «délire»
Dans son très éclairant préambule, indispensable pour nous autres qui ne connaissons à peu près rien de la poésie palestinienne, sauf peut-être celle de Mahmoud Darwich (citons au passage le mémorable ensemble de poèmes de La terre nous est étroite, paru dans la collection référentielle Poésie/Gallimard), Abdellatif Laâbi rappelle l’origine et l’évolution de la poésie palestinienne, dont le moins qu’on puisse dire est qu’elle ne sort pas de nulle part, au point que le seul nom de ce pays est «devenu en soi une poétique», et cela grâce aux générations successives de ses poètes, dès le début du XXème siècle où les précurseurs ont commencé à inscrire sa mémoire particulière dans celles des pays du Proche-Orient, puis avec la génération des années 1960-1970 qui a cristallisé les éléments d’une identité culturelle et nationale en réunissant «une multitude de voix puissantes et originales» autour de Darwich, et par le foisonnement plus récent des voix contemporaines hélas méconnues à proportion de l’occultation qu’a subie la cause palestinienne, alors que les signatures féminines s’imposent désormais «en brisant les tabous les plus ancrés dans la mentalité arabo-musulmane conservatrice, en parlant crûment de leur corps, du désir et des frustrations, en présentant du sexe, du sentiment amoureux, leur version forcément inédite».
Et Laâbi de préciser à ce propos: «Etonnamment, les hommes semblent avoir accepté ces audaces, voire en redemander! C’est qu’eux-mêmes se cherchent, ayant déserté cette guerre intestine pour mieux affronter les formes de barbarie que l’occupation leur fait subir au quotidien. Et tout le monde de se rejoindre sur ce front. Mais différemment que leurs prédécesseurs qui ont été, un temps, leurs idoles. C’est que la "cause palestinienne", largement soutenue à l’époque de par le monde, a été savamment occultée par le Goliath local, bradée par les régimes des faux frères arabes et en bonne partie abandonnée par ce qu’on appelait dans le temps la "rue arabe". En outre, les données sociopolitiques sur le terrain ont radicalement changé. La possibilité de l’établissement d’un Etat palestinien ne relève plus de la belle utopie mais tout simplement de l’impossible. Les Palestiniens sont en train de devenir, selon la formule consacrée, un "peuple sans terre", à l’instar des Kurdes, des Ouïghours, des Rohingyas et autres peuples condamnés à l’errance, au combat incessant pour sauvegarder leur identité et assurer leur survie.»
Fait le plus surprenant de la présente anthologie: que ses auteurs, éparpillés dans le monde entier, loin de produire une poésie éclatée ou déracinée, donnent dans leurs écrits la sensation commune de «vivre au sein d’une entité qu’ils n’ont même plus le besoin de nommer: paradis perdu, pays fantasmé, terre martyrisée, terrain d’une guerre larvée, mouroir, gigantesque nécropole, saint des saints, parfums, couleurs, beauté des pierres, des arbres, des œuvres humaines…sans pareils. A nous de traduire: Palestine»…
Enfin et c’est peut-être le plus frappant et le plus émouvant, sur tous les tons de la détresse ou de la colère, de l’effusion ou de l’humour noir: que sans nommer même la Palestine et moins encore ses «autorités», les poètes ici représentés modulent une sorte d’humour palestinien, comme il en va souvent des peuples opprimés, dans leurs écrits où il est essentiellement question, et le plus souvent en termes simples et concrets, de ce qu’elles et ils vivent: «Nous n’entendrons que des individus qui narrent leur vécu propre, ce qu’ils voient et palpent dans la réalité de tous les jours, dans leurs rêves éveillés et leurs cauchemars (bien nombreux ces derniers!)»
Comme autant de destinées personnelles
Défilent alors les prénoms, les âges, les lieux d’où ils parlent, leurs occupations variées et ce qu’ils disent, de Rajaa l’ainée (née en 1974 à Damas, et vivant aujourd’hui à Jérusalem, active dans la presse et dirigeant des ateliers d’écriture) à Yahya le plus jeune (né à Gaza en 1998, écrivant des livres pour la jeunesse à côté de ses poèmes), et vingt-quatre autres voix souvent poignantes, cinglantes ou malicieuses, qui évoquent chacune un destin et marquent leurs traces par leurs mots.
Et c’est Marwan Makhoul dans ses Vers sans domicile: «Assez! dit la mort aux tyrans / Je suis rassasiée», ou plus loin: «Dans l’embarcation / au milieu de la tempête / nous frappons les vagues avec les rames / pour qu’elle se calme», ou encore: «Pour écrire une poésie / qui ne soit pas politique / Je dois écouter les oiseaux et pour écouter les oiseaux / il faut que le bruit du bombardier cesse». C’est Rajaa Ghanim en sa Lumière ténue: «J’étais une femme habitée par l’amour / ayant marché pieds nus sur des cartes / ne reconnaissant nul miracle / ayant peur de retourner dans la tribu / là-bas où la vengeance / luit dans les yeux des hommes / et où l’attendent / quarante coups de fouet».
Faut-il des coups de fouet pour que la poésie affleure? Est-ce faire preuve d’un esthétisme doloriste douteux que de reconnaître la «vertu» créative du malheur, ou ici de la détresse partagée, parfois jusqu’au désespoir, lequel fait mieux apparaître la beauté et le prix des simples «choses de la vie».
Ce qui est sûr est que, bien plus que le «discours» idéologique ou d’utilité politique au premier degré, la parole poétique, à fleur d’émotion ou de nerfs, issue des tripes ou du cœur, ressortit à un langage commun dont on trouvera ici les éclats et les échos – mais à chacune et à chacun, alors, de faire à son tour écho à ces éclats.
Des éclats et leurs échos
Voici donc les éclats de Joumana Mustafa, née en 1977 et vivant actuellement en Jordanie: «En pleine rue / Je vends aux passantes des griffes / Je les étale, les lime / les astique / et donne de la voix», et plus loin: «Alors que celle qui ressentirait / la moitié de ma douleur / se présente et dise: me voici!». Ou voilà les éclats de Najwan Darwish, né en 1978 et se partageant aujourd’hui entre Jérusalem et Haïfa: «Comment allons-nous gaspiller nos vies dans la colonie? / Autour de moi ce ne sont que blocs de ciment et corbeaux assoiffés», ou encore: «J’ai essayé une fois de m’asseoir / sur un des sièges vides de l’espoir / Mais le mot Reserved / y était installé comme une hyène».
Voici les éclats de Colette Abu Hussein, née en 1980 et établie en Jordanie: «La voisine bienveillante a dit: elle est trop jeune pour mourir!», et plus loin: «Mon cœur est une fosse commune, ô mes aimés», ou encore: «Nous sommes les descendants du meurtrier / et les cousins de la victime / les héritiers du péché / les ouailles des corbeaux / dans la terre dévastée». Et les éclats d’Ashraf Fayad, né en 1980, condamné à mort en Arabie saoudite pour des textes jugés blasphématoires – peine commuée en huit ans d’emprisonnement après une campagne internationale de solidarité: «Etre sans pays / veut nécessairement dire être palestinien / Etre palestinien / ne signifie qu’une chose / que le monde entier est ton pays / Mais le monde n’arrive pas à assimiler ce fait», etc.
Autant d’éclats qui font écho aux mots du grand Mahmoud Darwich dans La terre nous est étroite: «Sur cette terre, il y a ce qui mérite vie: l’hésitation d’avril, l’odeur du pain à l’aube, les opinions d’une femme sur un homme, les écrits d'Eschyle, le commencement de l’amour, l’herbe sur une pierre, des mères debout sur un filet de flûte et la peur qu’inspire le souvenir aux conquérants», et enfin avec ce nom prononcé: «Sur cette terre, il y a ce qui mérite vie: sur cette terre, se tient la maîtresse de la terre, mère des préludes et des épilogues. On l’appelait Palestine. On l’appelle désormais Palestine. Ma Dame, je mérite la vie, car tu es ma Dame»…
«Anthologie de la poésie palestinienne d’aujourd’hui», textes choisis et traduits par Abdellatif Laâbi, réunis par Yasin Adnan, Editions du Seuil, collection Points/ Poésie, 224 pages.
«La terre nous est étroite et autres poèmes», Mahmoud Darwich, traduit de l'arabe par Elias Sanbar, Editions Gallimard, 400 pages.
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Ou voilà les éclats de Najwan Darwish, né en 1978 et se partageant aujourd’hui entre Jérusalem et Haïfa: «Comment allons-nous gaspiller nos vies dans la colonie? / Autour de moi ce ne sont que blocs de ciment et corbeaux assoiffés», ou encore: «J’ai essayé une fois de m’asseoir / sur un des sièges vides de l’espoir / Mais le mot <i>Reserved /</i> y était installé comme une hyène». </p> <p>Voici les éclats de Colette Abu Hussein, née en 1980 et établie en Jordanie: «La voisine bienveillante a dit: elle est trop jeune pour mourir!», et plus loin: «Mon cœur est une fosse commune, ô mes aimés», ou encore: «Nous sommes les descendants du meurtrier / et les cousins de la victime / les héritiers du péché / les ouailles des corbeaux / dans la terre dévastée». 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A nous de traduire: Palestine»…</p> <p>Enfin et c’est peut-être le plus frappant et le plus émouvant, sur tous les tons de la détresse ou de la colère, de l’effusion ou de l’humour noir: que sans nommer même la Palestine et moins encore ses «autorités», les poètes ici représentés modulent une sorte d’humour palestinien, comme il en va souvent des peuples opprimés, dans leurs écrits où il est essentiellement question, et le plus souvent en termes simples et concrets, de ce qu’elles et ils vivent: «Nous n’entendrons que des individus qui narrent leur vécu propre, ce qu’ils voient et palpent dans la réalité de tous les jours, dans leurs rêves éveillés et leurs cauchemars (bien nombreux ces derniers!)» </p> <h3>Comme autant de destinées personnelles</h3> <p>Défilent alors les prénoms, les âges, les lieux d’où ils parlent, leurs occupations variées et ce qu’ils disent, de Rajaa l’ainée (née en 1974 à Damas, et vivant aujourd’hui à Jérusalem, active dans la presse et dirigeant des ateliers d’écriture) à Yahya le plus jeune (né à Gaza en 1998, écrivant des livres pour la jeunesse à côté de ses poèmes), et vingt-quatre autres voix souvent poignantes, cinglantes ou malicieuses, qui évoquent chacune un destin et marquent leurs traces par leurs mots.</p> <p>Et c’est Marwan Makhoul dans ses <i>Vers sans domicile</i>: «Assez! dit la mort aux tyrans / Je suis rassasiée», ou plus loin: «Dans l’embarcation / au milieu de la tempête / nous frappons les vagues avec les rames / pour qu’elle se calme», ou encore: «Pour écrire une poésie / qui ne soit pas politique / Je dois écouter les oiseaux et pour écouter les oiseaux / il faut que le bruit du bombardier cesse». C’est Rajaa Ghanim en sa <i>Lumière ténue: </i>«J’étais une femme habitée par l’amour / ayant marché pieds nus sur des cartes / ne reconnaissant nul miracle / ayant peur de retourner dans la tribu / là-bas où la vengeance / luit dans les yeux des hommes / et où l’attendent / quarante coups de fouet». </p> <p>Faut-il des coups de fouet pour que la poésie affleure? Est-ce faire preuve d’un esthétisme doloriste douteux que de reconnaître la «vertu» créative du malheur, ou ici de la détresse partagée, parfois jusqu’au désespoir, lequel fait mieux apparaître la beauté et le prix des simples «choses de la vie». </p> <p>Ce qui est sûr est que, bien plus que le «discours» idéologique ou d’utilité politique au premier degré, la parole poétique, à fleur d’émotion ou de nerfs, issue des tripes ou du cœur, ressortit à un langage commun dont on trouvera ici les éclats et les échos – mais à chacune et à chacun, alors, de faire à son tour écho à ces éclats.</p> <h3>Des éclats et leurs échos</h3> <p>Voici donc les éclats de Joumana Mustafa, née en 1977 et vivant actuellement en Jordanie: «En pleine rue / Je vends aux passantes des griffes / Je les étale, les lime / les astique / et donne de la voix», et plus loin: «Alors que celle qui ressentirait / la moitié de ma douleur / se présente et dise: me voici!». Ou voilà les éclats de Najwan Darwish, né en 1978 et se partageant aujourd’hui entre Jérusalem et Haïfa: «Comment allons-nous gaspiller nos vies dans la colonie? / Autour de moi ce ne sont que blocs de ciment et corbeaux assoiffés», ou encore: «J’ai essayé une fois de m’asseoir / sur un des sièges vides de l’espoir / Mais le mot <i>Reserved /</i> y était installé comme une hyène». </p> <p>Voici les éclats de Colette Abu Hussein, née en 1980 et établie en Jordanie: «La voisine bienveillante a dit: elle est trop jeune pour mourir!», et plus loin: «Mon cœur est une fosse commune, ô mes aimés», ou encore: «Nous sommes les descendants du meurtrier / et les cousins de la victime / les héritiers du péché / les ouailles des corbeaux / dans la terre dévastée». Et les éclats d’Ashraf Fayad, né en 1980, condamné à mort en Arabie saoudite pour des textes jugés blasphématoires – peine commuée en huit ans d’emprisonnement après une campagne internationale de solidarité: «Etre sans pays / veut nécessairement dire être palestinien / Etre palestinien / ne signifie qu’une chose / que le monde entier est ton pays / Mais le monde n’arrive pas à assimiler ce fait», etc. </p> <p>Autant d’éclats qui font écho aux mots du grand Mahmoud Darwich dans <i>La terre nous est étroite</i>: «Sur cette terre, il y a ce qui mérite vie: l’hésitation d’avril, l’odeur du pain à l’aube, les opinions d’une femme sur un homme, les écrits d'Eschyle, le commencement de l’amour, l’herbe sur une pierre, des mères debout sur un filet de flûte et la peur qu’inspire le souvenir aux conquérants», et enfin avec ce nom prononcé: «Sur cette terre, il y a ce qui mérite vie: sur cette terre, se tient la maîtresse de la terre, mère des préludes et des épilogues. On l’appelait Palestine. On l’appelle désormais Palestine. Ma Dame, je mérite la vie, car tu es ma Dame»…</p> <hr /> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1721292527_150528_couverture_hres_0.jpg" class="img-responsive img-fluid left " width="200" height="329" /></p> <h4>«Anthologie de la poésie palestinienne d’aujourd’hui», textes choisis et traduits par Abdellatif Laâbi, réunis par Yasin Adnan, Editions du Seuil, collection Points/ Poésie, 224 pages.</h4> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1721292652_product_9782070411245_195x320.jpg" class="img-responsive img-fluid left " width="200" height="326" /></p> <h4>«La terre nous est étroite et autres poèmes», Mahmoud Darwich, traduit de l'arabe par Elias Sanbar, Editions Gallimard, 400 pages.</h4> <p> </p>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'la-palestine-des-poetes-irradie-sans-etre-nommee', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 73, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 6, 'person_id' => (int) 675, 'post_type_id' => (int) 1, 'poster_attachment' => null, 'editions' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Edition) {} ], 'tags' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Tag) {} ], 'locations' => [], 'attachment_images' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'attachments' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'comments' => [], 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ '*' => true, 'id' => false ], '[dirty]' => [], '[original]' => [], '[virtual]' => [], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [], '[invalid]' => [], '[repository]' => 'Posts' } $relatives = [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 5145, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => false, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => null, 'readed' => null, 'subhead' => null, 'title' => 'Le combat de Salman Rushdie, un Quichotte voltairien', 'subtitle' => 'Dans un premier récit détaillé, à glacer le sang, de la tentative d’assassinat qu’il a subie le 12 août 2022, puis au fil d’une remémoration de son retour à la vie, secondé par les siens (dont l’admirable Eliza Griffiths, son épouse), et plus largement ensuite dans la réflexion que lui inspire un acte apparemment dément quoique soumis à la logique implacable des fous de Dieu islamistes, Salman Rushdie, avec «Le couteau», laisse entrevoir, avec la possibilité d’une seconde chance, une espérance vitale.', 'subtitle_edition' => 'Dans un premier récit détaillé, à glacer le sang, de la tentative d’assassinat qu’il a subie le 12 août 2022, puis au fil d’une remémoration de son retour à la vie, secondé par les siens (dont l’admirable Eliza Griffiths, son épouse), et plus largement ensuite dans la réflexion que lui inspire un acte apparemment dément quoique soumis à la logique implacable des fous de Dieu islamistes, Salman Rushdie, avec «Le couteau», laisse entrevoir, avec la possibilité d’une seconde chance, une espérance vitale.', 'content' => '<p>27 secondes. C’est à peu près le temps qu’il vous faut, précise Salman Rushdie, pour dire le Notre Père ou réciter un sonnet de Shakespeare. Et l’écrivain en sait quelque chose et y a même perdu un œil, vu que c’est exactement 27 secondes qu’a duré l’attaque sauvage qu’il a subie le 12 novembre 2022 à 10h45 du matin sur la scène de l’amphithéâtre de Chautauqua, 27 secondes qui auraient dû lui être fatales après la quinzaine de coups de couteau qui lui lacérèrent le visage, le torse et les membres, jusqu’au moment où son agresseur fut maîtrisé et menotté par un policier passant par là en l’absence, par ailleurs, de tout dispositif de sécurité. </p> <p>27 secondes chronométrées: la scène a donc été filmée par tel ou telle des plus de mille spectateurs présents pour entendre la conférence de l’auteur des <i>Versets sataniques</i> – entre vingt autres livres –, censé parler des villes-refuges pouvant accueillir, aux States, des écrivains menacés dans leur propre pays, initiative à laquelle Rushdie avait participé entre autres nombreuses activités solidaires, et voilà que le refuge présumé était devenu le piège tendu par un forcené de 24 ans qui avouerait plus tard qu’il n’avait jamais lu que deux ou trois pages des écrits de ce mécréant et vu deux ou trois vidéos sur Youtube consacrées au même «hypocrite», comme il qualifierait Salman Rushdie, décidément pas «une bonne personne», donc à supprimer au nom du Dieu superbon…</p> <h3>L'extravagante fiction du réel</h3> <p>Entre les 27 secondes qu’a duré l’exécution ratée et les trente-trois ans de tribulations vécues par Salman Rushdie depuis sa condamnation à mort, en février 1989, par le Grand Inquisiteur chiite Rouhollah Moussavi Khomeini, un abîme fantastique s’est creusé à la barbe posthume de l’ayatollah défunt (il est mort en juin 1989), dans lequel un écrivain aux fictions extravagantes s’est vu rattrapé par «la réalité». </p> <p>Aux dernières nouvelles, une récompense de deux millions de dollars reste offerte à celui qui, enfin, fera la peau à l’infâme mécréant – mais cet âne d’A. (pseudo vengeur du Libanais Hadi Matar dans <i>Le couteau</i>) n’en verra pas la couleur, alors même qu’il passe pour un héros aux yeux des islamistes radicaux. Au demeurant, son procès a été ajourné au motif que sa défense exigeait d’accéder au livre paru, alors même que l’homme au couteau continue de plaider non coupable et n’a pas émis le moindre signe de repentir envers sa victime «hélas» survivante…</p> <p>D’ailleurs le terme de «victime» se discute aux yeux de certains, et <i>Le couteau</i> illustre, dans un mélange de juste colère et de jubilation sarcastique, quel révélateur de la bassesse humaine aura été «l’affaire Rushdie», où nombre de politiciens – de Jimmy Carter à Boris Johnson, et de chers confrères en littérature, ou de journalistes mal intentionnés, n’ont cessé de pointer la caractère «illisible» de ses livres et son opportunisme, son besoin d’être remarqué, sa frivolité de viveur après son installation aux Etats-Unis, bref l’exagération monstrueusement coûteuse qu’aura représenté sa protection alors qu’il était supposé ne plus rien risquer – à cela près que les services secrets britanniques ont quand même déjoué six complots visant à le liquider!</p> <p>Ce que ses détracteurs «éclairés» n’avaient pas vu, guère plus en somme que ses ennemis aveuglés par le fanatisme religieux, c’est la prodigieuse capacité d’amour que recèle l’œuvre littéraire de Salman Rushdie, déployant, en sa foison baroque, les multiples aspects de la vie, et les ressources de bonté et de beauté de celle-ci qui s’opposent aux penchants mortifères de l’humaine engeance.</p> <p>Comme nous tous, et comme le Candide de Voltaire, le cher Salman, Indien de naissance, métèque de sa Majesté après avoir fui les colères alcooliques de son paternel, et désormais citoyen américain, n’aspire à rien d’autre qu’à la paix et à la liberté, au bonheur consistant à «cultiver son jardin» au milieu des siens, à parler avec ses amis (nous tous) des livres qu’il lit et à en ajouter puisque tel est son plus vif plaisir. </p> <p>Cela étant, dans une version moderne du <em>Quichotte</em> de Cervantès, l’auteur des <i>Versets sataniques</i> n’en a pas moins continué de se battre contre «l’infâme» (encore ce Voltaire!) qui prétend détenir la seule vérité, et prône la mise à mort de tout mécréant. 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Qu’avais-je donc fabriqué pendant cinquante ans? Je voulais dire: je pense que l’art est un rêve éveillé. (…) Je ne crois pas aux miracles mais ma survie est miraculeuse. Bon, d’accord, qu’il en soit ainsi. La réalité décrite dans mes livres, oh appelez-la réalisme magique si vous voulez, est devenue la véritable réalité dans laquelle je vis</em>». Et comme c’est vrai pour <i>Le couteau</i>!</p> <h3>Bienvenue au club des poignardés</h3> <p>Ce qu’on apprend en lisant ce «livre de la vie» tenant à la fois d’exorcisme et de réponse (fermement) pacifique aux violents, c’est qu’avant Salman Rushdie, deux grands écrivains au moins ont subi le couteau et y ont survécu: à savoir le Nobel de littérature égyptien Naguib Mahfouz, coupable d’avoir défendu… un certain Rushdie (!) dans un ouvrage où une centaine d’écrivains et d’intellectuels musulmans avaient pris son parti contre le terrorisme religieux, et poignardé en pleine rue du Caire à l’âge de 82 ans, en octobre 1994; et Samuel Beckett, le 7 janvier 1938, qui subit le même sort après avoir refusé de donner de l’argent à un voyou le menaçant dans une rue de Paris – ledit agresseur se prénommant Prudent. Or Beckett tint, au procès de celui-ci, à faire face à son agresseur et à lui demander la raison de son agression, Prudent lui répondant, le nez baissé, qu’il ne savait pas, et qu’il s’en excusait...</p> <p>Or cette confrontation, que Rushdie appelle «le moment Beckett», et qu’Eliza son épouse lui déconseille vivement, le romancier l’imagine de toutes pièces dans un chapitre majeur du <i>Couteau</i> où il dialogue avec «le A» dont l’essentiel de l’argumentation tient en un mot qui plairait à Michel Houellebecq: soumission. Soumission à Dieu, soumission à l’unique vérité proclamée et ressassée par l’imam Youtubi. Soumission et mort à l’insoumis!</p> <h3>L'amour plus fort (si, si) que la mort</h3> <p>Si son meurtrier raté lui lance qu’il est haï par deux milliards de personnes, Salman Rushdie lui répond qu’il a toujours cru, pour sa part, en la force de l’amour, et c’est la force principale du <i>Couteau,</i> sœurs et frères: c’est l’amour.</p> <p>L’amour d’une femme, d’abord, merveilleuse de présence angoissée. Laquelle Eliza est accueillie par la famille de Salman, en 2017, avec ce mot plein de tendresse: «enfin!». L’amour de ses fils chéris, de sa sœur et des enfants de celle-ci. L’amour de ses amis, à commencer par son agent, dit le Chacal, Andrew Wylie qui l’a défendu mieux que personne à l’époque de sa condamnation à mort. L’amour-amitié de ses amis écrivains, dans un biotope où règnent souvent jalousie et défiance. Et c’est Martin Amis en train de mourir du cancer, et qui lui adresse un message si fraternel. C’est Philip Roth et son propre crabe. C’est Ian Mc Ewan. 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Cela proclamé après le cancer, après le goulag, après l’abjecte humiliation de l’exil, après le retour en Russie avec sa lumineuse épouse et ses magnifiques garçons. Et comment, malgré la disproportion de la comparaison, ne pas penser à cette parole de reconnaissance «malgré tout» au moment d’entamer la lecture de <i>L’Archipel du goût</i> de Jacques Perrin, avec sa célébration du vin et de ceux qui le font, opposant à sa façon le chant du monde au poids du monde au moment même où une guerre fratricide se déchaîne aux confins de la terre natale du Dante russe – c’est le maître slaviste Georges Nivat qui a osé le rapprochement?</p> <p>Or, tant qu’à invoquer deux grandes figures de la littérature du XXème siècle, c’est le Ramuz des vignes que j’aimerais aussi associer à la lecture de <i>L’Archipel du goût</i>, et plus précisément à un passage de <i>Raison d’être</i>, datant de 1914, où notre poète évoque le rivage béni, au pied du vignoble de Lavaux travaillé dès le Moyen Age par les moines.</p> <p>J’y pense en me rappelant ce soir d’il y a quelques années où je descendais le chemin de la Dame qui serpente le long d’une falaise surplombant le vignoble de Lavaux cher à Ramuz; le contre-jour du couchant donnait aux vignes un vert accru presque dramatique, et d’autant plus que tout le coteau avait été saccagé par la grêle et que la récolte en serait altérée cette année-là; les montagnes de Savoie viraient au mauve puis à l’indigo tandis que le Léman, parsemé de fines voiles, semblait figé dans sa laque bleutée, et je repensais à cette phrase de Ramuz, qui trouvait là sa résonance immédiate puisque je distinguais, au Levant, le clocher de Rivaz et, de l’autre côté, la pointe de Cully déjà plongée dans l’ombre.</p> <p>Et voici la phrase fameuse: «Mais qu’il existe une fois, grâce à nous, un livre, un chapitre, une simple phrase, qui n’aient pu être écrits qu’ici, parce que copiés dans une inflexion sur telle courbe de colline ou scandés dans leur rythme par le retour du lac sur les galets d’un beau rivage, quelque part entre Cully et Saint Saphorin – que ce peu de chose voie le jour, et nous nous sentirons absous.» </p> <p>Ceci pour rappeler immédiatement le lien profond que Jacques Perrin établit entre sa quête du goût, amorcée dès sa jeunesse – comme Nicolas Bouvier partant à vingt ans sur la route de l’Orient, lui-même s’en alla en Bourgogne et en Côte d’or grappiller ses premières impressions de navigateur raffiné, consignant illico ce qu’il observait dans ses cahiers de Moleskine.</p> <p>Or c’est sur ceux-ci que l’on trouvera aujourd’hui, dans l’éparpillement apparent des notes de <i>L’Archipel du goût,</i> la preuve que le «rivage» inspirateur de Ramuz n’a rien d’exclusif propre à flatter les chauvins vaudois, mais se module de multiples façons dans les paysages de Bourgogne, les Langhe du Piémont, les hauteurs de l’Aude cathare ou des régions du Mont Athos, jusque sur l’Ararat mythique – au gré de l’exploration spatio-temporelle d’un Ulysse nourri de philosophie incarnée (Aristote déjà pensait que toute connaissance passe par le corps, et Pline l’Ancien aurait fondé la notion de «cru») naviguant d’«îles» plantées de vignes en caves où il retrouve les artisans et autres fins dégustateurs dont il partage la passion et les «extases». A ce propos, Jacques Perrin ne s’embarrasse pas de guillemets pour qualifier les moments de «lévitation» ponctuant sa quête du sublime gustatif, non sans pointer les ombres éventuelles du tableau, de spéculations douteuses en malversations avérées.</p> <h3>Racines valaisannes, avant l'envol</h3> <p>Des rives lémaniques au Valais de Jacques Perrin, il n’y a que le Rhône à remonter, et son «Valais de bois», pour reprendre une expression de Maurice Chappaz, est immédiatement et solidement présent en écho à son enfance, ancrée dans «un pays rude et enflammé» aux «passions silencieuses», où il ressent «l’acre, pulvérulent parfum des cascades», un «pays de sourciers» dont le souffle qui l’anime lui fait ressentir l’ivresse avant le vin.</p> <p>A l’opposé de ceux qui ont le «vin petit» et n’aspirent qu’aux «tuées» du samedi soir, le jeune Jacques, à l’école (notamment) d’un oncle impérial et de son nonno piémontais, va découvrir la vérité vécue de la cuisine familiale et le respect de ce nectar qui «nomadise dans l’espace et le temps», dit <i>solera alpine </i>ou vin des glaciers, et ce n’est qu’un premier début. </p> <p>Dès lors, l’apprentissage n’en finira plus. D’abord à Genève, ville d’écrivains et de penseurs, à l’Université où il choisit la philosophie («aucun avenir, hormis celui de futur chômeur!»), et bientôt «sur le terrain» de Bourgogne, amorce à la vingtaine d’un voyage le conduisant du vin au verbe via les vignes et les caves, les gens et la «sainte» dégustation aux déclinaisons verbales parfois saturées à faire sourire mais qui a, aussi, sa poésie.</p> <p>Ainsi d’une incomparable Romanée Saint-Vivant 1928 décrite par l’octogénaire Jules Chauvet au nez forcément exceptionnel: «Ce cru… arôme strict de rose épicée, celle de Damas… puis violette, réglisse et truffe dans la continuité… le tout associé au cuir. La courbe en bouche, d’un dessin très pur, marque un relief vigoureux. Il est à son apogée et sa présence semble éternelle. Tout grand vin est comme une embarcation qui vous ferait voyager». Et plus loin au souvenir de Chauvet revenant à Perrin: «On ressent alors que tout grand vin est le sillage d’un infini»…</p> <p>De quoi vous fiche des complexes, ce midi, devant votre Humagne de la Coop à 13 francs 50…</p> <h3>De la chute à la résilience</h3> <p>Avant le chant du monde, Jacques Perrin a connu et vécu le poids du monde, fracassé en mille morceaux (plus précisément 26 fractures) après une chute dans les aiguilles de Chamonix dont il a décrit les séquelles dans ses <i>Dits du gisant</i> où il mêlait, déjà, réalités physiques et propos philosophiques, évocations gustatives variées (du vin déjà bien présent aux musiques de ses jeunes années rock). Surtout, son penchant à filtrer le réel dans les arcanes poétiques traduisait son aspiration à «changer la vie», selon la formule du chenapan à semelles de vent outrageusement adonné à toutes les saveurs et à tous les savoirs que figurait Arthur Rimbaud.</p> <p>Or c’est bel et bien la passion poético-philosophique du tastevin Perrin (que le premier ouvrier de France ès sommellerie et arts de la table, maître Antoine Pétrus, situe au top des dégustateurs actuels dans sa préface à l’ouvrage, célébrant sa sagesse et sa mesure «doublée de l’intelligence du verbe») qui fait de <i>L’Archipel du goût</i> le poème épique d’une traversée riche en découvertes et en rencontres surprenantes, dont le dernier chapitre est en lui-même un poème et, symboliquement, le sommet d’une résilience, en pleine face nord de l’Eiger où l’énergumène sort de son sac un Château Margaux 1900 qu’il partage avec son compagnon de cordée.</p> <p>Jacques Perrin, en matière de vin et de poésie, notamment, n’est pas un jobard snob frotté de lettres – un chapitre de son livre est consacré à la «puissance du faux» et à ses séquelles sordides – et chacune et chacun le vérifieront au fil de pages à savourer lentement comme un grand cru, avec cette «leçon» finale: «Le partage de ce vin dans l’Eigerwand constitue un moment unique de mon existence. 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Il a pourtant un cœur, découvre-t-on à propos de la vieille Oksana et au fil des pages de son journal intime constitué de fragments sans suite chronologique (le temps n’existe pas pour Lui), où il s’indigne par exemple de ce qu’en Son Nom un pape ait commémoré la découverte de l’Amérique sous l’égide de l’Eglise catholique et apostolique et se soit félicité «de cette mainmise cinglante & sanglante», citant les mots de Jean Paul II «qui monta sur un podium surélevé entouré d’une croix et de gigantesques haut-parleurs pour déclarer à propos de moi: "L’évangélisation a permis à Dieu de faire alliance avec l’Amérique latine: il connaissait ces peuples de toute éternité mais grâce aux missionnaires, Il les a incorporés à son projet de rédemption…" De quoi je me mêle? Je ne savais rien de rien de ces peuples, je n’avais jamais regardé vers là, occupé ailleurs, et je n’ai jamais eu de projet à leur propos, ni de rédemption, et encore moins de liquidation»… </p> <p>Dieu serait-il tiers-mondiste? Pas vraiment: il est «occupé ailleurs», et si l’on parle de «théodicée» à propos de ses attributs de bonté et de toute-puissance face au mal, comme s’y emploie Augustin «sincèrement bouleversé par la dramatique question de la souffrance des enfants», Lui-même baisse le nez en évoquant le massacre de son peuple par les Aryens nordiques en convenant: «Je n’ai pas bougé le petit doigt; je n’ai pas trouvé ça drôle, ni même divertissant, mais ça ne m’a pas fait sortir de ma léthargie. Je ne sais pas pourquoi»… Et dans la foulée cette conclusion peu triomphante: «La théodicée, après Auschwitz, a eu ici ou là des velléités de redémarrage, mais sans résultats vraiment probants. Même les Jésuites n’ont pas été foutus de raisonner de manière minimalement persuasive. 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Avec le terrifiant incendie qui a ravagé sa bibliothèque une nuit de 2015, en lequel il pourrait incriminer «le feu de Dieu», et d’autres avanies sans doute ponctuant sa déjà longue vie (il est né, enfant de la guerre, en décembre 1941), Lambert aurait des raisons de maudire le présumé Créateur, voire de s’aigrir, mais non: le côté soleilleux de la vie le remplit de reconnaissance, avec deux solides filles qui le suivent-surveillent à portée de portables au cours de ses incessantes virées, et un grand lascar à dégaine de Latino colombien que lui et sa femme ont adopté, tout petit, cinq ans avant la mort de celle-ci – cadeaux!</p> <p>Débarquant l’autre jour en Lavaux du sommet du Righi, où il venait de séjourner dans une pension perchée à cinquante francs la nuit (on note), après une escale dans les non moins divines (décidément!) collines de Toscane, l’ami Lambert m’a révélé sous le gingko, à l’amorce de quatre jours de conversations, qu’après les grandes bottes de Dieu il allait enfiler les savates de Jésus et voir où ça le conduirait…</p> <p>Lambert Schlechter est-il, pour autant, un obsédé de la religion, comme un certain Augustin (c’est Dieu sous sa plume qui le rappelle) était un obsédé du sexe mâle érigé en flamberge de culpabilité? Pas vraiment. Parfois érotomane dans ses écrits (le sexe d’Eve le fascine), il ne pousse pas la passion jusqu’au mysticisme délirant d’une Catherine de Sienne, pas plus qu’il ne donne dans l’athéisme froid. Moins athée militant qu’un Pierre Gripari, dont je lui rappelle la grinçante et non moins sagace <i>Histoire du méchant Dieu</i>, Lambert, fils de cathos qui lui fichaient la paix en la matière, Lambert le super-érudit poète (prof de philo en lycée pendant des décennies), Lambert dont Montaigne est le copilote, me fait plutôt penser à ce mécréant chrétien que figurait un Théodore Monod, grand marcheur du désert et aussi grand lecteur que le Dieu de Schlechter, qui récitait tous les matins les Béatitudes sans souscrire pour autant à la divinité du rabbi Iéshouah dit le Nazaréen.</p> <p>En son journal intime, Dieu convient qu’il n’a pas toujours été un très bon écrivain – le reproche fondé qu’on lui a fait sur la rédaction négligente de la Genèse –, mais on voit que l’écriture le branche, comme les Ecritures ont scotché professionnellement mille doctes commentateurs d’avant et après les conciles où l’on a peaufiné les concepts du Père et du Fils et de la sainte colombe, et plus récemment les chenapans de la contre-exégèse du genre Voltaire et Nietzsche, Gripari et Lambert lui-même, entre tant d’autres mécréants bel et bien issus, voire attachés, au christianisme historique ou familial.</p> <p>A retenir enfin, après le lamento initial de Dieu fulminant contre son sort éternel, sa conclusion portant sur l’incroyable prétention du genre humain, femelles et mâles cisgenres à l’avenant – mais les queer et les trans ne font guère mieux – à croire que Dieu s’occupe d’eux personnellement alors qu’Il a tant à faire «ailleurs». </p> <h3>Et pourtant l'Univers tourne</h3> <p>Le Dieu de Lambert l’agnostique, à cet égard, comme celui de Spinoza ou du physicien rebelle Freeman Dyson, à la fin de <i>La Vie dans l’univers,</i> en appelle à une révélation plus universelle que celle dont se réclament les tribus anciennes et les paroisses plus récentes: «Dans l’ensemble ça tourne, note-t-il ainsi dans son journal célestement intime, les orbites fonctionnent, il y a une réelle harmonie que même les anciens stoïciens ont reconnue et célébrée, c’est grandiose, et d’après ce que j’observe depuis un certain temps, ils sont en train d’explorer tout cela, depuis quelques décennies ils hubblisent mes constellations, voyant de plus en plus les choses comme je les vois, c’est vraiment grandiose, je dirais presque divinement grandiose, les images qu’ils captent dans un espace incommensurable et dans un abîme temporel indescriptible, sont estomaquantes, et pourtant beaucoup d’entre eux continuent à s’obstiner, paranoïaquement, et chacun pour soi dans sa propre folie de sa propre grandeur (mais qui est d’une petitesse si petite qu’elle n’est pas perceptible), bref, ils s’obstinent à croire (croire!) que j’ai le temps et le loisir d’être attentif à chacun d’eux, écouter & exaucer leurs prières, acquiescer à leurs fantasmes de résurrection et d’immortalité, alors que j’ai, excusez du peu, tout l’Univers sur les bras»…</p> <hr /> <h4><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1723724884_fragmentsdujournalintimededieu2.jpg" class="img-responsive img-fluid left " width="200" height="300" /></h4> <h4>«Fragments du journal intime de Dieu», Lambert Schlechter, Editions L’Herbe qui tremble, 82 pages.</h4> <h4><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1723724995_unknown4.jpeg" class="img-responsive img-fluid left " width="200" height="302" /></h4> <h4>«Le Murmure du monde (40 ans d’écriture)», Lambert Schlechter, Editions Phi, 650 pages.</h4> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1723725065_41z3ymaar3l._ac_uf10001000_ql80_.jpg" class="img-responsive img-fluid left " width="200" height="289" /></p> <h4>«L'Histoire du méchant Dieu», Pierre Gripari, Editions de L’Age d’Homme, 1988, 138 pages.</h4> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1723725146_71hs8gn0w0l._ac_uf10001000_ql80_.jpg" class="img-responsive img-fluid left " width="200" height="289" /></p> <h4>«La Vie dans l’univers. 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L’on y découvre en effet – et le phénomène est entré dans les mœurs anglaises bien avant les modes actuelles –, le goût de la marche et des longs détours par sentiers et routes «historiques», non seulement sur terre mais de par les mers et même à travers les airs même si l’oiseau ne laisse guère de traces aussi visibles que sur la neige ou le sable… </p> <p>La Nature, dans la plus vaste acception du terme incluant l’espace et le temps, est retrouvée ici et parcourue comme un texte immense et merveilleux, mais aussi un palimpseste. En exergue du premier chapitre de <i>Par les chemins</i> (titre faisant référence au Rimbaud à «semelles de vent», soit dit en passant), un fragment de texte de Ralph Waldo Emerson, maître à penser de Thoreau le «philosophe dans les bois», mais aussi d’Annie Dillard, fixe immédiatement les contours et les occurrences d’une démarche amorcée par la marche: «Toutes les choses sont occupées à écrire leur histoire (…) Pas un pied ne foule la neige, ou ne parcourt le sol, qu’il n’imprime, en caractères plus ou moins durables, une carte de sa marche. (…) La terre n’est que memoranda et signatures; et chaque objet est tout couvert d’allusions qui parlent aux intelligents. 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