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Chronique / Lötschental et Tchäggätä: Nature et légendes du Vieux Pays

Stephan Engler

15 août 2020

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Le Lötschental se situe dans le Haut–Valais. Avec sa longueur d’environ 30 kilomètres, c’est la plus grande des vallées au nord du Rhône. La première datation d’une habitation familiale est de 1412. Elle a été faite au village de Ferden, mais il existait également à cet endroit une grange encore plus ancienne aux environs de 1300. Cette vallée entourée par un cirque de montagnes aux pentes vertigineuses a été habité très tôt, malgré des conditions de vie difficile. Depuis cette période et jusqu’à l’ouverture du tunnel du Lötschberg en 1913, cette région était coupée du monde et ses habitants vivaient en quasi autarcie.



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A l’aube du tourisme, ce sont les alpinistes anglais venus conquérir les majestueux sommets tels que le Bietschhorn, haut de 3934 mètres, qui furent les premiers étrangers à s’arrêter en ces lieux. Après l’ouverture du tunnel de ferroutage les choses commencèrent à changer lentement, mais c’est seulement en 1954 que Blatten, le dernier village isolé de la vallée, a été relié par une route moderne. Ces circonstances particulières expliquent l’authenticité de la culture locale, le dialecte unique et la préservation de la nature.

Panorama de la vallée. © Stephan Engler

Après avoir dépassé l’entrée du tunnel du Lötschberg la route se rétrécit d’une manière significative. Quelques kilomètres plus loin nous arrivons à distinguer l’entrée de la vallée qui comme tous les matins joue entre ombre et lumière encadrée par ses montagnes. Ferden, le premier village apparait au loin avec son église blanche. En traversant celui-ci qui n’est guère le plus authentique, nous remarquons pourtant quelques maisons anciennes typiques. Les villages se suivent et la route devient de plus en plus sinueuse, cela présage quelques croisements hasardeux avec un des nombreux cars postaux ou plus difficile encore avec des touristes venus de la plaine. La route suit la Lonza, cette rivière sauvage qui nous accompagne tout au long de notre parcours. Tantôt visible ou invisible, mais toujours présente par le bruit de ses eaux indomptées. La vallée se rétrécit encore, avec des deux côtés quelques chalets ou granges d’époque parsemées dans le paysage. Il y a également d’imposantes maisons de pierre tel que l’hôtel Nest- und Bietschhorn à Ried qui attire nos regards. Arrivé à Blatten, situé à 1540 mètres et qui est le village le plus authentique, nous partons à la découverte de ses étroites ruelles ombragées. Le bois sombre est omniprésent et les façades sont égayées par des géraniums très soignés. Des outils anciens pour l’agriculture sont fixés sur certaines d’entre elles, comme s’ils venaient de servir quelques heures auparavant.

Hameau avec vieilles granges et Epilobe en épi. © Stephan Engler

Après cette halte nous poursuivons notre route qui serpente au milieu d’une nature sauvage jusqu’au terminus de Fapleralp. Depuis là, il n’y a plus que des sentiers pédestres entourés d’une végétation alpine à perte de vue. Pour les plus aguerris il est possible de marcher jusqu’au Langgletcher, voire au-delà pour rejoindre le région Jungfrau-Aletsch classée au Patrimoine Mondial de l’UNESCO. Pour ceux qui sont venus se détendre et pas accomplir des exploits, le Grundsee à 15 minutes à peine fera l’affaire, il est très apprécié des familles.

L'indispensable car postal. © Stephan Engler


Lire aussi: L'aventure humaine des grandes lignes ferroviaires, le premier épisode des explorations estivales suisses de Stephan Engler


Dans un tout autre registre, il y a les Tschäggätä surgis de la nuit des temps. Chaque hiver, ils sont de sortie, la nuit, à partir du 2 février, le jour de la Chandeleur, et jusqu’au mercredi des Cendres. Ce sont les hommes du Lötschental vêtus de peaux de bêtes, affublés de masques effrayants et accompagnés de cloches au bruit assourdissant. Leur existence est un mystère, aucune preuve écrite n’existe quant à l’origine de cette tradition unique. Une histoire locale parle d’hommes qui ont vécu il y a très longtemps dans un village nommé Giätrich, vis-à-vis de Wiler, qui auraient pris l’habitude de se vêtir de manière démoniaque pour attaquer leurs voisins. D’autres encore pensent que les masques effrayants ont pour but de chasser les hivers les plus rigoureux. Une autre hypothèse plausible est que les Tschäggätä ont un rapport direct avec le chamanisme. 

Une pièce thématique de la maison «Die Blaue Stube»: costumes et masques traditionnels. © Stephan Engler

Une chose est sûre, l’Eglise appréciait peu cette coutume païenne et a vainement tenté de la faire disparaître. D’ailleurs quelques précautions perdurent de cette époque comme l’échange des masques et accessoires de jour en jour entre participants afin que nul ne puisse reconnaître les villageois qui les portent. 

Le costume est composé traditionnellement d'un «Tschopen», le vieux veston, afin de surélever les épaules, un «Boimtragärchischi» est ajouté, c’est un sac rempli de foin autrefois utilisé pour le transport de lourdes charges de bois. Ensuite, on enfile un vieux pantalon, ou le typique «Sackhosä», un simple sac de pommes de terre. Le tout recouvert par une peau de mouton ou de chèvre ainsi qu’une sangle à laquelle est attachée une cloche. Ensuite la «Larve», le masque de bois sculpté est posé avec le «Felle», la chevelure. Et avant de sortir, la touche finale: les «Triämhändschen» gants traditionnels du Lötschental.

Bien sûr la pièce maitresse de cette tenue folklorique est le masque. Celui-ci est sculpté dans du bois d’arolle brut. C’est un long travail qui laisse beaucoup de liberté de création car il n’y a pas de règle, comme se plait à le rappeler Heinrich Rieder, sculpteur. Curieusement ce n’est pas une tradition familiale qui se transmet entre les générations comme beaucoup d’us et coutumes. Pour Heinrich pourtant c’est sa mère, une sculptrice très connue, qui lui a donné envie de réaliser des masques. Originaire de Wiler, il a fait du travail sur bois son métier en tant que charpentier. Dans la vallée personne ne vit uniquement de la sculpture. Selon lui, on trouve des masques destinés à la vente dans les quelques boutiques, et d’autres uniquement créés pour le défilé des Tchäggätä. 

Heinrich Rieder dans son atelier. © Stephan Engler

La tradition est très importante pour lui, il en parle avec respect et ses yeux pétillent quand il aborde le sujet de la sculpture. Les masques du défilé requièrent une grande créativité et un solide savoir-faire. 

Son attachement intime à sa vallée est dignement représenté par sa maison en pierre à Wiler, «Die Blaue Stube». Surprenante et très bien conçue, cette demeure ancienne propose dans chaque pièce un thème souvent d’une manière ludique en rapport avec les Tchäggätä du Lötschental. Ce lieu privé géré avec sa femme et ses deux enfants permet d’approcher les matières, les formes et les sons des traditions locales. On peut y faire une visite guidée

Dans cette vallée les riches traditions séculaires sont toujours vivantes et les jeunes générations reprennent avec enthousiasme le flambeau des anciens, tout en étant connectés au monde moderne.


Pour en savoir plus et découvrir le Lötschental de vos propres yeux, suivez le lien!

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VOS RÉACTIONS SUR LE SUJET

1 Commentaire

@Reeves 16.08.2020 | 11h27

«Excellent, j'ai beaucoup apprécié cet article! Il faudra garder ces coutumes à tout prix ~ précieux!»


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