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Lu ailleurs

Lu ailleurs / Autorisation de conduire:
c'est l'argent le moteur, pas le droit des femmes

Jade Albasini

29 septembre 2017

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L’annonce du royaume de lever l’interdiction de conduire aux Saoudiennes n’est pas liée aux balbutiements d’un éventuel progrès social. La décision est d’ordre économique selon «Haaretz», un journal israélien qui couvre tout le Moyen-Orient.



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Petite révolution à l’échelle saoudienne, King Salman permet aux femmes de son royaume de prendre le volant dès juin 2018. Le monarque met fin à une interdiction religieuse très critiquée sur la scène internationale. Un choix stratégique qui concerne environ 10 millions de conductrices potentielles sur le territoire.

La nouvelle fait le tour des médias sur le globe. La plupart y voit les prémices d’une discussion progressiste sur le droit des femmes dans un pays ultra-conservateur. Le journal Haaretz donne aujourd’hui une autre interprétation de cette autorisation soudaine: des épargnes qui se comptent en millions. Mais aussi une volonté forte de la famille royale d’envoyer un message clair aux investisseurs locaux et étrangers sur la diversité économique du plus grand producteur de pétrole.

Economie sur chaque foyer

Pour transporter ces femmes sans permis, 1,4 million de chauffeurs domestiques roulent encore entre le Golf Persique et la Mer Rouge. On estime le salaire d’un conducteur à 500 dollars par mois. Collectivement, ils gagnent 8,8 millions de dollars par année. «Ne plus être contraint d’avoir un chauffeur privé aiderait les familles à booster leur revenu réel», affirme Monica Malik, cheffe économique à Abu Dhabi Commercial Bank. Et donc augmenterait leur pouvoir d’achat. 

L’exode de ces chauffeurs professionnels – originaires souvent des pays de l’Asie du Sud, des Philippines en particulier, qui envoient leur paie à domicile – réduit également les sorties monétaires, laissant plus de réserves pour soutenir la monnaie saoudienne qui subit d’énormes pressions avec la chute des prix du pétrole.

Essor de l’industrie automobile

La responsable économique d’Abu Dhabi Commercial Bank mentionne également le coup de pouce pour les ventes de véhicules dans les prochains mois. Cotées en bourses, Saudi Automotive a bondi de 1.6% suite à cette déclaration et United International Transportation, une société de location et de leasing américaine présente en Arabie Saoudite, de 4%. Mais là encore, il est trop tôt pour sortir des chiffres concrets, sachant que de nombreux foyers ont déjà une auto supplémentaire à disposition (celle du chauffeur).

Femmes mobiles = meilleure productivité

Quoiqu’il en soit, autoriser les Saoudiennes à conduire leur ouvrent les portes du marché du travail. Khalid Alkhudair, directeur de Glowork, un réseau dédié aux femmes entrepreneures dans le royaume, explique qu’il y a environ entre 400 000 et 450 000 opportunités professionnelles que la gent féminine décline car peu mobile. Cette nouvelle force de production serait synonyme de productivité accrue. Le prince héritier Mohammed bin Salman s’active d’ailleurs depuis un an pour augmenter la participation des femmes en entreprises. Il espère que 30% d’entre elles auront un poste d’ici 2030.

Le décret promet donc de changer la vie de millions d’habitantes. Il faut cependant rappeler que la réalité est plus complexe. Le conservatisme pèse en Arabie Saoudite. Pour étudier ou voyager, les femmes doivent encore demander la permission à leur père ou à leur mari. Leur laisser le volant, même si le changement paraît assez minime, risque de prendre des années avant d'être généralisé. On ne va pas croiser de hordes de femmes sur les routes saoudiennes avant longtemps. D'autant qu’elles sont nombreuses à être réticentes à se déplacer seules. Y compris en voiture.


L'article original du journal Haaretz: The Real Reason Saudi Arabia Will Let Women Drive and It's Not About Women's Rights


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