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3 octobre 2019

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Des mandats lucratifs, des campagnes orchestrées - mais au Palais fédéral, ils se prennent encore tous pour des parlementaires indépendants. Quels effets ont sur un politicien les jobs accessoires bien rémunérés? Et combien cela coûte-t-il d’empêcher une loi? Rapport sur les lobbies.



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Par Michael Furger, Peter Hossli, Samuel Tanner, Laurina Waltersperger

 Publié initialement par la NZZ am Sonntag


La petite phrase semble fortuite. Comme la réponse à une question que personne n’a posée. «Je suis bien des choses, mais pas un lobbyiste», a dit le conseiller national PBD Lorenz Hess lors de l’émission de la SRF Arena. Intéressant que ce soit justement Hess qui le dise. Il détient un des mandats les plus lucratifs de la Berne fédérale. Il touche 142’300 francs pour la présidence de la caisse-maladie Visana. Il pourrait défendre les intérêts de son bailleur dans la puissante commission pour la santé du Conseil national, s’il était lobbyiste. Mais non. Il n’en est pas un.

Mais qu'est-il donc? Lui et tous les autres conseillers nationaux et aux États à la solde d’entreprises et d’associations? Comment ont-ils décrochés leurs mandats lucratifs? Et surtout: quels sont les effets de ces mandats et de cet argent sur un politicien? Peut-on acheter les décisions politiques en Suisse et si oui, quel en est le prix?

Personne ne sait exactement combien d’argent est en circulation. Une recherche publiée récemment, mandatée par le conseiller national PS argovien Cédric Wermuth, cite deux contributions, mais elles reposent de loin sur une estimation. Le montant des sommes n’est cependant pas décisif, la question est celle du pouvoir de cet argent.

Une équipe du NZZ am Sonntag a enquêté sur les mandats et les votes et a parlé avec plus d’une douzaine de faiseurs d’opinion et de lobbyistes. Le résultat montre comment les lois sont faites, modifiées ou enterrées au Palais fédéral, sous les arcades bernoises et dans les compartiments de 1ère classe entre Genève et Saint-Gall. Les ficelles sont tirées tant par les politiciens de droite que de gauche. Un guide sur l’influence politique en huit leçons.


Leçon 1: La carrière des mandats. Comment faire de la représentation des intérêts un métier lucratif

Un conseiller national gagne en moyenne 123’589 francs frais compris, un conseiller aux États 138’269. Près de la moitié n'est pas imposable. C'est convenable, mais ça ne suffit pas à tous. Pour améliorer leurs revenus, les parlementaires de milice prennent des jobs accessoires, dont «il y a à Berne une multitude». C'est en tout cas ainsi que le dit l’ancien CEO d'une grande agence de lobbying.

Lorenz Hess maitrise comme personne l’art d’accumuler les jobs accessoires à disposition et d’en faire une carrière. Il a pour ce faire un bagage professionnel parfait: maturité, conseiller en relations publiques, responsable de l’information auprès de la police municipale de Berne.

De plus, il dirige le département de la communication du Département fédéral de la santé et s'engage dans une des branches les plus lucratives de Suisse: les soins de santé.

Hess apprend auprès de la Confédération comment l’État traite les caisses, les hôpitaux, les médicaments et les médecins. Il apporte son savoir à l'ancienne agence de relations publiques Burson-Marsteller. Il dirige ensuite sa propre agence de lobbying. Il réussit à entrer au Conseil national en 2011, où il siège à l’influente Commission de la sécurité sociale et de la santé publique (CSSS). Quatre ans plus tard, Hess vend son agence à Furrerhugi, une des entreprises de lobbying leader à Berne et réunit dès lors ses intérêts sous le toit de Hess Advisum GmbH. «Le but de l’entreprise est de fournir des prestations de conseil», peut-on lire au registre du commerce. Hess conseille dans son réseau et là où il s’y connait. Il est le président de la Fondation Pankréas, siège au comité de Spitex, conseille la Faculté de médecine de l’Université de Berne et la Fondation suisse pour paraplégiques à Nottwil. Depuis 2017, il préside le Conseil administratif et de la fondation de Visana. «Il a de bons amis, et il rend la pareille», disent ceux qui lui sont favorables.

D'autres médisent qu’il fait du trafic d’influence.

Au Conseil national et à la Commission, il vote conséquemment pour la réduction des coûts pour les caisses-maladie. Par exemple lorsqu’il s’engage en faveur du dossier électronique des patients. Dans les médias, il s’engage fermement pour les vaccins obligatoires et propose que les malades non vaccinés participent aux coûts des soins. Ce qui est encore à l’avantage des caisses.

Il n'est pas à vendre, répond Hess. «Je suis membre du Parlement. En même temps, je travaille comme président du Conseil d'administration d'une grande assurance maladie et je suis payé pour mon travail», dit-il. «Il est dès lors clair que je vote dans l’intérêt de notre branche.» Le lobbying ne figure pas dans son cahier des charges. Il n’a jamais envoyé un e-mail de recommandation de la caisse-maladie, il n’essayerait jamais d’influencer un membre de la Commission.

Peu ont - en toute légalité - bâti dans la Berne fédérale une carrière de mandats aussi brillante que Hess. De nombreux parlementaires détiennent quelques petits mandats. D'autres ont une démarche ciblée. «Il y a des politiciens qui nous demandent si nous pouvons leur procurer un mandat», dit Victor Schmid.  Il est partenaire de la puissante agence de communication Konsulenten et en activité depuis des décennies. Il est à noter qu’il ne s'agit manifestement pas que d’argent. «Les parlementaires», dit Schmid, «cherchent un domaine d’activité qui leur soit profitable. Mais nombre d'entre eux n’ont pas le savoir-faire. Nous pouvons leur fournir cela.»


Leçon 2: Le bon siège. Comment le choix de la bonne commission détermine à quel point un mandat sera lucratif

Comment un ancien enseignant, officier de carrière et directeur des finances devient-il un des politiciens de la santé les mieux payés du pays? Avec un peu de chance lors de la distribution des sièges au sein du parti. Car s’il y a un levier pour décrocher rapidement un job accessoire lucratif, c'est bien le choix de la bonne commission d'experts au Parlement.

Les lois et les modifications des lois sont préparées par cette commission; c’est là que les décisions importantes sont prises. Mais toutes les commissions permanentes, 12 du Conseil national, 11 du Conseil aux États, n’ont pas la même importance. Tout en haut de la hiérarchie des chasseurs de mandats se trouvent la Commission de la santé et la Commission de l’économie et des redevances. «Qui siège dans ces comités reçoit des offres», dit l’ancien lobbyiste de la Migros Martin Schläpfer. «La plupart des parlementaires veulent y aller, même ceux qui n’ont pas de compétences spécifiques.» Et si on y entre, en général on y reste, aussi longtemps que le Conseil siège, huit ans, peut-être douze. «Cela est intéressant pour les entreprises», dit M. Schläpfer.

Les conseillers aux États sont particulièrement intéressants. À la chambre basse, les commissions sont plus petites: 13 membres au lieu de 25. Chaque voix a plus de poids, comme avec l’ancien enseignant et officier de carrière.

Il s’appelle Josef Dittli et a été élu conseiller aux États pour le canton d’Uri il y a quatre ans. Sa dernière activité avant cela: directeur financier du canton. À Berne, il arrive à entrer à la Commission de la santé et prend plusieurs mandats, dont en 2018 le plus lucratif de tous: la présidence de l'association des caisses-maladie Curafutura, un job à 40 pour cent rémunéré à hauteur de 140’000 francs par an.

Depuis, on peut observer chez Dittli  un net assouplissement sur les questions réglementaires. En 2016, avant d’être président de Curafutura, il avait fermement contribué à réduire à néant un projet de loi sur les produits tabagiques. La loi aurait rempli les conditions de la convention sur le tabac de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et l’interdiction de la publicité pour les cigarettes et autres produits tabagiques aurait donc été renforcée. Le lobby du tabac souhaitait un rejet de cette loi. Dittli déposa la requête adéquate. Cela bien qu’il ait déclaré au Conseil que la protection des mineurs lui tenait à cœur. L’interdiction globale de la publicité aurait été une atteinte trop forte pour l’économie de marché. La majorité l’approuva et la loi fut réduite à néant.

Deux ans plus tard, Dittli étant entretemps devenu président de Curafutura, il encouragea la Confédération à proposer que la loi sur le tabac soit élaborée conformément aux demandes de l’OMS. «Nombre des présents n’en croyaient pas leurs oreilles», écrivait à l’époque l’Aargauer Zeitung.

Dittli suivait à la lettre la ligne de Curafutura. L’association des caisses-maladie prône une interdiction contraignante de la publicité. Alors il vota au Conseil pour un renforcement de la loi sur la protection des mineurs, même si d'un point de vue libéral, elle allait un peu trop loin, comme il disait.

«Mes choix de vote répondent cependant à mes propres prises de position», affirme Dittli.

«Balivernes», réagit à cette déclaration l'ex-lobbyiste Schläpfer. «Il est tout à fait normal de s’engager en faveur de son entreprise». Le précédent président de Curafutura, Ignazio Cassis, y gagnait 180’000 francs». «Personne ne me dira qu’il était indépendant».


Leçon 3: Le tapis à 100’000 francs. Comment les agences de lobbying créent les besoins pour ensuite les assouvir

Les agences de relations publiques en arrière-plan sont le carburant du système. Dans la Berne fédérale, les lobbyistes externes s’occupent constamment de générer le chiffre d’affaire pour leurs entreprises. Et comme toujours, lorsqu’il faut vendre, il faut créer un besoin. «Les bonnes entreprises trouvent leurs clients elles-mêmes», dit Daniel Heller de l’agence Farner.

Ce qu’il entend par là: les agences gardent l’œil sur les évènements, comme une modification de loi, qui pourraient avoir un effet néfaste sur un groupe donné. S’il apparait, l’agence offre au groupe un paquet de mesures: arguments, stratégies, documentation, discours. Elle dispose «un tapis», comme on dit dans le jargon de la branche. Et ce aussi vite que possible. L’attaque contre le projet doit se faire au plus tard au début de la procédure de consultation.

En disposant le tapis, l'agence apparait en arrière-plan. Le principe: «All politics are local». Au lieu de s’adresser directement aux parlementaires, l’agence organise des rencontres entre les représentants du peuple et les entreprises locales. «Rien n'est aussi efficace que ces entretiens individuels», dit Daniel Heller.

Empêcher une loi ou aider à la faire passer n'est pas gratuit. «Accompagner intensément un projet de loi du début jusqu’au vote final au Parlement ou même jusqu’à la votation populaire avec toutes les mesures de communication requises peut coûter jusqu’à 100’000 franc par année et durer trois à cinq ans». C'est ce que dit Victor Schmid de l’agence de communication Konsulenten. Le représentant d'une autre grande agence de conseil avance le même chiffre. Selon le conseiller, cela comprend un peu de potins dans les médias et tout un catalogue d’arguments. Les médias sont manifestement des idiots utiles dans ce jeu.

Si l’attaque précoce échoue et que la loi arrive aux Conseils, les lobbyistes externes tentent de compliquer les navettes entre le Conseil national et le Conseil aux États. Ce qui provoque des retards et des dilutions, dans le meilleur des cas l’empêchement. «Pour cela, une agence efficace peut disposer en permanence de l'action d'une douzaine de conseillers nationaux et aux États», dit le membre d’une grande agence de relations publiques.


Leçon 4: L’opportuniste. Comment bien s'en sortir avec un bel éventaire

Il y a bien une chose que l’on ne peut pas reprocher au conseiller national bâlois UDC Sebastien Frehner: qu’il soit partialement intéressé. Il peut s’enthousiasmer tant pour des substances dangereuses pour la santé comme le tabac et l’alcool que pour les entreprises qui ont des intérêts pour la santé de la population. Il a des mandats auprès de la caisse-maladie Groupe Mutuel, du Forum santé pour tous, du GI Recherche biomédicale. Il fait partie du GI Boissons fraîches qui s’occupe des boissons sucrées, du GI Plaisir et du groupe parlementaires Spiritueux et prévention. Dans ce cadre, il se met entièrement au service de ses donneurs d’ordres.  On lui a demandé une fois dans l’émission «Rundschau» de la SRF s’il préservait ses propres intérêts. Sa réponse: «Exactement».

Pour remplir ses mandats, Frehner se détourne aussi parfois de la ligne du parti. En mars, il a voté pour une augmentation des franchises, même si l’UDC était contre. Il représente les intérêts aussi en dehors des séances des Conseils. Lundi matin, il invite à la présentation «Quelle est la valeur de la vie humaine?». Le discours est tenu par le lobbyiste des pharmas René Buholzer.

Deux jours plus tard, le 25 septembre, Frehner tient cour en tant que président du GI Plaisir. Avec «Plaisir sans risque» en compagnie de Nastasja Sommer, lobbyiste de Japan Tobacco. Elle parle de la loi sur les produits tabagiques. Le dîner de gala promet une sélection d’eaux-de-vie, whisky et cigares - un des nombreux événements culinaires au cours desquels politiciens et lobbyistes aiment trinquer entre eux. «Je ne me vois pas comme le représentant de ces diverses branches», se défend Frehner. En libéral, il dit:

«Dans le doute, toujours en faveur de l’économie».

En tant que conseiller du Groupe Mutuel, il veut comprendre les préoccupations des hôpitaux, des caisses-maladies, des entreprises pharmaceutiques et des cantons. Pour cette compréhension, il reçoit 10’000 par année. En tant que conseiller de Spiritsuisse, il s’engage pour «une branche importante de l’économie de notre pays». Le portefeuille de Frehner fait penser à ces vendeurs en bord de la Méditerranée qui tentent d’aguicher les baigneurs, l’éventaire suspendu autour du cou.


Leçon 5: Lobbyiste de gauche. Comment un syndicaliste peut empocher 250’000 francs au Conseil national

Bien sûr, tous les parlementaires ne se laissent pas payer royalement par des entreprises ou des associations. Certains n’ont aucun mandat, d’autres seulement des mandats qui ne leur rapportent qu’un ou deux milliers de francs. Pour les jobs accessoires lucratifs, les politiciens bourgeois ont l'avantage. Pas parce qu’ils se laissent plus facilement influencer. Leur position politique reflète simplement la position des entreprises et associations économiques qui leur offrent de tels mandats.

Mais les politiciens de gauche se font aussi bien rémunérer leurs services, par exemple comme syndicalistes au Parlement. Le conseiller national bernois PS Corrado Pardini dirige le secteur Industrie du syndicat Unia, avec un taux d’occupation à 70 pour cent. «Oui, je représente les intérêts des syndicats», dit-il. Il se bat au Parlement pour la protection des travailleurs et des salaires équitables. En ce moment, il mène des discussions en dehors des partis pour sortir l’AVS et le 2epilier des taux négatifs. «Mais je ne suis pas un lobbyiste, je suis juste employé par le syndicat depuis 32 ans». Selon ses propres dires, il touche de la part d’Unia un salaire brut de 110’292 francs par an. Avec à ses prestations de conseiller national, Pardini gagne presque un quart de million de francs.

Pardini est un lobbyiste institutionnel. Il a déjà été choisi comme représentant d’intérêts, comme le libéral Hans-Ulrich Bigler, le directeur de l’Union suisse des arts et métiers. Mais travailler à 70 pour cent à côté du mandat au national, c’est bien ambitieux. Si l’on prend en compte tous les jours de siège au Parlement et aux Commissions, c’est à la limite de l’impossible. Selon les études, un mandat au Conseil national équivaut de nos jours à un travail à 80 pour cent.


Leçon 6: Ne pas se faire remarquer. Pourquoi les parlementaires discrets et sages récoltent plus

Soixante-et-un hommes et femmes ont été nouvellement élus au Parlement il y a quatre ans. 48 d’entre eux ont depuis acquis un ou plusieurs mandats privés. Le mandat dépend, à part de la Commission, de la position politique. «Les parlementaires obtiennent des mandats conformes à leurs convictions», dit Daniel Heller de Farner. Il serait difficile de convaincre un vert d’entrer au lobby des autos. Mais le caractère est aussi décisif. Les parlementaires bruyants qui aiment se mettre en scène ne sont pas appréciés. «Les sages font les meilleurs lobbyistes», explique l'ex-lobbyiste Schläpfer. Un conseiller national qui agresse volontiers les autres n’est pas fait pour ce travail. Et ceux qui sont encore très politisés au début deviendront vite plus calmes à un bon poste. «Celui qui s’est assuré un bon mandat ne sera plus très actif au sein du parti», dit Schläpfer.


Leçon 7: Créer des alliances: Pourquoi y a-t-il au et autour du Palais fédéral des petits lobbys pour tout

Quel est le point commun entre les abeilles, les fans de sport, la langue de signes, l’aéronautique, le cheval, la musique populaire et deux douzaines de différents pays? Tous ont leur propre groupe d’intérêts parlementaire. On enregistre près de 160 de ces groupes. Tous ont une présidence et un secrétariat, la plupart dirigés par une association y relative, parfois aussi par une agence de lobbying. Rien que l'agence Furrerhugi se charge d’administrer cinq groupes. Viennent s’y ajouter les groupes d’intérêts extraparlementaires. Le GI Maladies rares, promu par les pharmas, les hôpitaux et les organisations de patients - secrétariat: Furrerhugi. Ou le Cercle de travail sécurité et techniques de défense, une organisation de lobbying pour la controversée industrie suisse de l’armement qui réunit plus de 40 conseillers nationaux et aux États. Secrétariat:  Farner Consulting. Les agences de lobbying créent les besoins - ça vaut aussi ici. «Les agences repèrent un problème et fondent un GI ou une association pour le combattre», dit l’ancien lobbyiste de la Migros, Martin Schläpfer.

Lorenz Hess préside lui aussi un GI. Il s'appelle le GI Boissons fraîches et est le lobby des fabricants de boissons sucrées. Hess en reçoit 8’000 à 9’000 francs. Et encore: l’apôtre de la santé et du plaisir, Sebastian Frehner.


Leçon 8: La communauté des héritiers. Comment les mandats passent d’un membre du parti à un autre

Le Dr Beat Vonlanthen est un conseiller aux États comme on se l’imagine: 62 ans, cheveux mi-sel, mi-poivre, ancien conseiller d’État PDC, au slogan politique: «Renforcer le modèle à succès de la Suisse». Depuis son élection en 2015, il a acquis quelques mandats, de l'Association des casinos à l'Association professionnelle des pompes à chaleur. Mais il est avant tout président de Chocosuisse, l'association des fabricants de chocolat, et de Cemsuisse, l'association de l’industrie du ciment.

Le prédécesseur de Vonlanthen était son collègue de parti Urs Schwaller et c'est de lui que Vonlanthen a repris la présidence de Cemsuisse. Il a reçu d’un autre collègue de parti, Peter Bieri, l'Association professionnelle des pompes à chaleur et il a obtenu du PDC Christophe Darbelley l’Association des casinos. C'est un principe courant dans la politique suisse: la succession dans des conditions démocratiques.

Une succession fiable est payante, aussi dans ce cas. En effet, Vonlanthen siège à la Commission des affaires juridiques, qui est en charge de l’initiative pour des multinationales responsables, une initiative de gauche qui veut rendre les multinationales suisses responsables pour les dommages causés par leurs filiales à l’étranger. Les multinationales se défendent discrètement, à travers leur réseau au Palais fédéral.

Lorsqu’à l’automne 2017, Vonlanthen a pour la première fois à faire avec l'initiative, il déclare à la radio vouloir un contreprojet. Mais les grandes associations économiques ne veulent pas d'un contreprojet. Leur crainte: en cas de doute, le peuple

se déciderait pour l’original, à savoir l’initiative. Elles commencent à intensifier le lobbying au Palais fédéral. Le 12 mars 2019, le Conseil aux États recommande le contreprojet. Le lobbying s’affaire jusqu’au soir. Pour finir, le Conseil décide à 22 voix contre 20 pour l’économie et rejette tant l’initiative que le contreprojet.

La voix décisive de cette majorité est celle de Vonlanthen. Il a changé d’avis, pour lui, un contreprojet n’entre plus en compte. Il suit désormais la ligne de multinationales comme Lafarge Holcim, qu’il représente dans l'association du ciment. On discute à mots couverts du changement d'avis de Vonlanthen.

«C'est le jeu des ramifications des associations économiques», disent certains au sein du parti. Vonlanthen dit: «J’ai été et suis toujours pour des solutions compatibles avec l’économie. Je n’ai pas revu ma position à la suite de pressions externes».


Limiter les mandats

Les mandats payés ne sont pas illégaux. Tout membre du Parlement fédéral a le droit d’accepter tous ces jobs accessoires. Mais depuis l’année passée, tous les intérêts particuliers doivent être divulgués.

Avec son initiative parlementaire, le conseiller aux États valaisan PDC

veut endiguer ces intrications. Il demande à ce qu’un membre du Conseil ne puisse accepter de mandats que d’entreprises et organisations qui n’ont aucun rapport avec la Commission dans laquelle il siège. Ainsi, qui fait de la politique à la Commission de l’énergie doit refuser les mandats des exploitants d’énergie.

Le Conseiller national UDC Claudio Zanetti propose d’abolir les commissions permanentes et de revenir au système précédent. Jusqu’en 1991, beaucoup de commissions spéciales étaient formées pour diverses affaires. Cela pourrait empêcher que des parlementaires siègent dans les mêmes commissions pendant plusieurs législatures.


Le lobbyisme à Berne:

1959

mandats sont actuellement déclarés par 246 conseillers nationaux et aux États. En moyenne, il s’agit de huit mandats par conseiller national, dix par conseiller aux États, selon le calcul de l’ONG Transparency International Suisse. Le nombre de mandats a plus que doublé entre 2000 et 2011.

150

à 200 mandats en moyenne ont été détenus par des membres de la Commission de l’économie et des redevances du Conseil national au cours des 15 dernières années.

1700

organisations ont, grâce à un mandat ou une carte d'entrée au Palais fédéral, un accès direct à au moins un membre du Conseil.

11

C'est la place de la Suisse sur la liste des pays de l’UE en ce qui concerne la transparence et le lobbyisme en politique. Elle s'en tire particulièrement mal au niveau des sanctions.

Tabac et eau-de-vie: le conseiller national bâlois UDC Sebastian Frehner, 46.

Syndicats: le conseiller national bernois PS Corrado Pardini, 54. Ciment: le conseiller aux États fribourgeois PDC Beat Vonlanthen, 62.

Caisses-maladie: le conseiller national bernois PBD Lorenz Hess, 58.


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VOS RÉACTIONS SUR LE SUJET

3 Commentaires

@Lagom 03.10.2019 | 13h27

«Selon un classement international la Suisse est le 3ème pays le moins corrompu au monde. Or avec cet article je me demande si notre bonne place ne serait pas 3ème des plus corrompus, car chez nous la corruption est institutionnelle. Je trouve plus noble que les corrompus touchent l'argent au noir sous la table comme au tiers monde car c'est un peu moins honteux.»


@willoft 03.10.2019 | 19h27

«Oui, on appelle ça politicien de ... milice, dans une des meilleures démocraties du monde.
Mais vous pouvez aussi enquêter sur le troisième pouvoir, la justice.
S'ils n'ont pas les médias sur le dos, ils font aussi ce qui leur chante en toute opacité, abus de pouvoir inclus!»


@Lagom 04.10.2019 | 17h24

«@willoft, suis entièrement d'accord avec vous. D'ailleurs une telle politique engendre une telle justice. Et ça fonctionne aussi à l'envers; une telle justice engendre de tels hommes et femmes politiques. Pauvre peuple souverain. »


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