Actuel / «Le Grand Continent»: un médium au service d’une élite?
"Le Grand Continent", rubrique "Europe", extrait capturé le 14 juillet 2022. © DR
Trois ans après la création de la plateforme de débat politique «Le Grand Continent», et à l’occasion de la publication de tous ses contenus en espagnol, nous présentons son fonctionnement, et nous vérifions la leçon de McLuhan sur la détermination par le médium du message. Ici il s’agit de celui élaboré par des universitaires et des intellectuels, qui bien qu’ils soient d’horizons idéologiques différents appartiennent au même réseau, et étaient restés quelque peu en deçà du débat public.
En 2018, ferme la revue Les Temps modernes. En 2020, c’est le tour de la revue Le Débat, dont les fondateurs déplorent «un désintérêt des élites pour les humanités» et «que la polémique médiatique [a] pris le pas sur la discussion démocratique1». Ces deux revues n’ont pas survécu au tournant numérique. D’autres, comme la revue Esprit poursuivent leur chemin, et proposent maintenant la classique édition papier mensuelle en complément de l’édition numérique.
Une plateforme au centre d'un réseau
En 2018, un petit groupe de jeunes élèves de la très française Ecole normale supérieure (ENS) a initié un travail qui a mené à la création de la plateforme Le Grand Continent (GC), qui stimule maintenant le débat politique et intellectuel à l’échelle continentale. La plateforme diffuse la voix d’un nombre important de chercheurs en sciences humaines et sociales, qui avaient du mal à intéresser un public large. En effet, elle se place au centre d’un réseau où elle valorise des résultats scientifiques dispersés. A ce jour, ce sont plus de 1'300 signatures et 3'000 contributeurs de haut niveau qui ont participé au GC, parmi lesquels l’historien italien Carlo Ginzburg, Henry Kissinger, le prix Nobel d’économie Jean Tirole, les prix Nobel de littérature Olga Tokarczuk et Mario Vargas Llosa. Nous verrons pourtant que le GC n’est pas seulement un canal pour la diffusion de savoirs académiques.
Processus de création d’un médium hybride
Gilles Gressani, 31 ans, originaire de la Vallée d'Aoste en Italie, directeur éditorial du GC, nous a raconté comment, après un séjour d’études aux Etats Unis, il a d’abord publié avec quelques autres une simple newsletter en ligne. Après cette Lettre du dimanche, suit l’organisation de soirées de débats à l’ENS, tous les mardis. Puis, sont organisées des leçons magistrales, avec des orateurs de grand renom, qui atteignent le grand public grâce à un format mixte. Comptent parmi les orateurs Patrick Boucheron, Toni Negri, Thomas Piketty et Elisabeth Roudinesco. Les conférences sont retransmises dans quinze villes européennes et à New York, avec un accompagnement local assuré en grande partie par le réseau des Instituts français et de doctorants ou de jeunes professeurs liés à l’ENS. Dans une étape ultérieure, la Lettre du dimanche se scinde en deux, donnant naissance à la Lettre du lundi, qui se focalise sur les aspects plus techniques de la première. Au printemps de cette année est paru chez Gallimard le premier volume papier du GC, sous le titre Politiques de l’interrègne. Ainsi se présente la plateforme du GC, dans son format actuel.
Une ambition européenne
Depuis le début, toutes les publications du GC sont en français, mais il est prévu de les traduire dans quatre autres langues: espagnol, italien, allemand, et polonais. «Pas en anglais pour le moment, parce que le lectorat anglophone a déjà des revues de référence, comme Foreign Affairs, The Atlantic, ou The Economist». La version intégrale en espagnol a été lancée début juin. On lit à travers ce choix linguistique une ambition continentale. En effet, dès le départ, la question de «l’échelle pertinente» s’est posée. L’Europe se présente d’abord ici, non pas comme objet d’étude, ou objectif politique, mais plutôt comme le cadre ayant l’échelle correcte pour aborder un certain nombre de questions, telles que la gestion de la crise du Covid.
Proche du pouvoir
Un pic d’audience du GC a été atteint avec la diffusion du texte d’une interview accordée par le Président de la République française, Emmanuel Macron, en novembre 2020, et qui a porté sur sa vision du monde post-Covid. L’interview, lue par plus d'un million de personnes dans les cinq langues, a suscité des réponses, des critiques, et des analyses à l’échelle européenne. Ainsi, le GC a obtenu une sorte d’onction de l’Elysée. Cependant, politiquement, le GC ne revendique aucun positionnement particulier. Gilles Kepel, professeur à l’ENS, qui a accueilli dans la collection qu’il dirige la version papier du GC, le voit même comme un «antidote au poison de l’idéologie, qui intoxique l’université en sciences humaines».
Influencer le débat
De fait, le GC va jusqu’à influencer le débat, en créant l’actualité. «Tout récemment, nous dit Gressani, la question de la planification écologique a été discutée dans un texte paru dans le volume papier, ainsi que dans plusieurs publications dans la revue en ligne, et les newsletters etc. Ce thème a été repris par une partie importante de l'espace politique et institutionnel, dont l'Elysée, et a fini par faire l'objet de la couverture et d’une double page du Monde». Il est intéressant de comparer cette façon de fonctionner avec celui de la revue Foreign Affairs (FA), qui est une des références pour l’équipe du GC. Créée dans les années 1920, produite par un think tank composé de diplomates, financiers, universitaires et avocats, elle est proche des sphères du pouvoir américain, sur lesquelles elle a une influence considérable. Contrairement au GC, le rayonnement de FA a une source centrale, tandis que le GC rayonne grâce au réseau diffus construit à partir de celui des institutions qui le portent réuni autour du Groupe d’études géopolitiques.
Elargir l'audience
Gressani est conscient que pour l’instant le GC est un produit d’élite, même si chaque mois plus de 350'000 personnes reviennent sur la plateforme après une première visite, et plus de 40'000 lecteurs sont abonnés à sa newsletter. Le GC prévoit de créer des formats vidéo et des podcasts, pour atteindre de nouveaux publics. Là aussi il est intéressant de comparer avec le développement suivi par FA, qui après être passé au format numérique en 2009, depuis 2013 a souhaité étendre son influence et présenter ses produits à un public plus large, en allant au-delà de son «appel trimestriel bancal», comme l’a dit son éditeur Gideon Rose dans un entretien avec POLITICO.
Pas de médium, pas de message
A première vue, en créant le GC, Gressani et co. auraient simplement fourni à la communauté universitaire un moyen de diffusion des savoirs qu’elle a élaborés. Il apparaît au contraire que la plateforme a rendu plus visibles, opérationnels et efficaces des réseaux liés à l'une des institutions d’où sortent les élites intellectuelles de l’Hexagone. Ce faisant, ce sont précisément les membres de ces réseaux qui s’expriment à travers le GC, avec le discours qui leur est propre. C’est d’ailleurs ce que peut signifier une affirmation souvent répétée par Gressani, à savoir que «le GC se veut structurant du débat, plutôt que structuré». Quoi qu’on en pense, avant la création du GC, le message qu’il porte était difficilement audible, et … il manquait au débat.
1Le Monde, 20 septembre 2020.
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Puis il y a eu CoGen, un masque permettant l’inhalation de monoxyde de carbone. Depuis que les voitures possèdent des pots catalytiques et que le gaz de houille a été remplacé par du gaz naturel, il est devenu moins efficace de se suicider en s’enfermant dans son garage avec le moteur de la voiture allumé, ou en mettant sa tête dans un four. Le dispositif appelé Délivrance, quant à lui, permettait de se donner la mort par injection d’une substance létale en appuyant sur le bouton d’un ordinateur. Ce dispositif «de bureau» a été répertorié par le British Science Museum. Dans une autre direction, en partant du constat qu’il est possible de se procurer en ligne des substances comme le Nembutal qui, ingéré à doses élevées, permet de s’endormir pour toujours, Nitschke a mis au point un kit de «petit chimiste» afin de vérifier la pureté de la substance achetée. Il a aussi publié des instructions sur la conservation du Nembutal en poudre. Plus systématiquement, il a rédigé des manuels disponibles en ligne expliquant comment s’y prendre pour se tuer, et qui sont régulièrement mis à jour. Il a aussi imaginé des «navires de la mort» pour échapper aux restrictions des législations nationales...</p> <p>En 2021, notre Dr Death ouvre une brasserie de manière à pouvoir se procurer des bidons d’azote. Ceux-ci étaient probablement destinés à alimenter son invention la plus discutée, et qui synthétise quelques-unes de ses trouvailles précédentes: la capsule Sarco, en forme de cercueil imprimée en 3D conçue en 2017, et présentée à la Foire du design de Venise en 2019. La «Tesla de l’assistance à la mort» permet à une personne de se donner la mort en appuyant sur un bouton: la capsule où la personne est allongée se remplit alors d’azote, et le départ se fait en regardant le ciel à travers le couvercle vitré. Une commande vocale, ou un clignement des yeux, pourraient aussi activer la capsule. Vu que l’azote n’est pas un médicament, aucune intervention médicale n’est requise. Nitschke aurait ainsi atteint l’objectif de proposer à tous les adultes le choix d'une mort paisible, même si bien-portants, sans interférence indésirée.</p> <p>Dans les faits, les choses ne sont pas si simples. Passons sur le fait que quelqu’un, forcément, doit se charger de mettre à disposition la capsule, puis s’occuper du corps. La première utilisation de Sarco devait avoir lieu en juillet dernier en Suisse. Notre pays est une sorte de Paradis pour les activistes du suicide assisté, vu que, le premier depuis 1942, il autorise l’assistance au suicide en l’absence de «mobile égoïste». Les avis pourtant divergent sur la légalité de l’emploi de cette (nouvelle) technologie: même si celle-ci ne fait pas usage de médicaments, elle s’apparente à un dispositif médical, et pourrait donc nécessiter une autorisation de la part de Swissmedic. En tout cas, les procureurs de plusieurs cantons se sont depuis exprimés contre son utilisation, et parmi les professionnels de l'assistance au suicide, des voix critiques se sont élevées. La crainte est que Sarco, et surtout son créateur, donnent des arguments à ceux qui s’opposent aux pratiques éprouvées d’assistance, et précipitent la mise en place d’une nouvelle législation plus restrictive pour le suicide assisté.</p> <p>Nitschke est coutumier des conflits avec les autorités et raffole du tapage médiatique, mais il semblerait que cette fois, il ait vraiment dépassé les bornes de la décence: la femme de 55 ans gravement malade qui a fait le voyage depuis les Etats-Unis pour mourir avec Sarco a finalement décidé de passer par une des associations opérant en Suisse, et a laissé un écrit après sa mort dénonçant les méthodes de Nitschke et de ses associés. Ceux-ci l’auraient exploitée financièrement et soumise à une forte pression médiatique.</p> <p>Plus objectivement, la méthode Sarco ne permet pas le contact physique et pousse ainsi à un hyper-individualisme que des partisans du suicide assisté considèrent comme extrême. Nitschke a répondu à ces accusations en qualifiant son ancienne cliente de «psychotique» et en mettant en cause l’objectivité des autres associations, qui ne seraient pas prêtes à accepter sa concurrence. On peut discuter des motivations personnelles du médecin australien. Peut-être aime-t-il simplement se mettre en scène et a-t-il choisi un sujet controversé pour ce faire; peut-être essaie-t-il de pallier une hypocondrie dont il aurait souffert et qui l’aurait déjà motivé à entreprendre ses études de médecine.</p> <p>Au fond, le docteur Nitschke ne fait que pousser un peu plus loin des pratiques déjà établies, et fournit une réponse commerciale à une demande très particulière. Le Nembutal et plus récemment l’azote ont été utilisés pour des exécutions de condamnés à mort aux Etats-Unis. Nitschke a notamment assisté à celle, controversée, d'Eugene Smith en Alabama, qui a eu lieu en janvier passé.</p> <p>La technologie évolue de telle sorte qu'on la croie capable de fournir une réponse à tout, et même aux problèmes qu'elle a elle-même créés, comme le dérèglement climatique. On nous propose ainsi des avatars électroniques pour avoir une vie après la mort; des entreprises essaient d’attirer des talents en leur proposant de planifier leur parentalité comme il le souhaitent, en particulier en leur facilitant la congélation de leurs gamètes. Nietschke est en phase avec cette tendance, pourtant rien de ce qu’il propose n’a le potentiel de changer notre lien à la mort. Sa série d’inventions peut faire réfléchir, mais ni plus ni moins que les inventions du lapin des <i>Bunny suicides</i>.</p> <h3>Sociologie du suicide</h3> <p>Les déterminants sociaux du suicide ont été identifiés de manière définitive en 1897 par Emile Durkheim dans son ouvrage <em>Le suicide</em>, qui inaugure la sociologie quantitative. En procédant à la première étude statistique systématique d’un phénomène social, Durkheim a mis en évidence que «chaque société a pour le suicide une aptitude plus ou moins prononcée». En particulier, il y a plus de suicides là où «l’esprit de libre examen» est davantage répandu, notamment – à son époque – dans les pays protestants. Mais surtout «l’homme se tue parce que la société religieuse dont il fait partie a perdu de sa cohésion».</p> <p>A un autre niveau d’organisation sociale, «la famille est un puissant préservatif du suicide, elle en préserve d’autant mieux qu’elle est plus fortement constituée». De manière générale «le suicide varie en raison inverse du degré d’intégration des groupes sociaux dont fait partie l’individu». Ainsi, le plus faible nombre de suicides dans les pays catholiques n’est pas dû au fait que le Vatican condamne fermement le suicide, mais plutôt parce que l’Eglise y est plus présente, et ainsi en structure les interactions. De surcroît, si les groupes sociaux auxquels on appartient se désintègrent, on se sent d'autant plus détaché de la société, et ainsi, dit Durkheim, on se détache de la vie dont la société «est à la fois la source et le but».</p> <p>Nous sommes ici bien loin de considérations centrées sur les seuls libertés et droits individuels: l’homme est aussi animal social. Durkheim s’inquiétait des conséquences du développement du «monde du commerce et de l’industrie», qui a mené à un dérèglement social (anomie) chronique, et son lot de suicides. A l’époque dans l’industrie agricole «les anciens pouvoirs régulateurs» se font encore sentir, et les suicides y sont moins nombreux. Ce n’est plus le cas aujourd’hui en Suisse, exactement pour les raisons mises en évidence par Durkheim: les paysans se suicident davantage que d’autres groupes sociaux, parce qu'ils souffrent d’un isolement plus important.</p> <p>Durkheim considérait également «nécessaire que le suicide soit classé au nombre des actes immoraux»: le suicide lèse la société «parce que le sentiment sur lequel reposent aujourd’hui ses maximes morales les plus respectées, et qui sert presque d’unique lien entre ses membres, est offensé, et qu’il s’énerverait si cette offense pouvait se produire en toute liberté».</p> <p>Le sociologue pose donc en principe que la personne humaine est et doit être considérée comme une chose sacrée, dont ni l’individu ni le groupe n’ont la libre disposition. En toute cohérence, Durkheim préconise en conclusion de «rendre aux groupes sociaux assez de consistance pour qu’ils tiennent plus fermement l’individu et que lui-même tienne à eux». Il constate en effet que l’Etat est la seule force collective ayant «survécu à la tourmente», mais qu’il est devenu «aussi envahissant qu’impuissant». Il rejoint donc ceux qui critiquent l’action de l’Etat en la matière, mais suggère qu’il faut agir à des niveaux d’organisation inférieurs.</p> <p><em>In fine</em>, Durkheim aussi valorise l’accompagnement. Les méthodes pour se suicider, plus ou moins technologiques, relèvent d’une «culture locale», elles n’ont pas d’incidence sur le phénomène: au Japon on se tranche l’abdomen, dans les villes on se jette du haut des immeubles. 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De fait, depuis la fin des années 1960 les cartes géographiques officielles israéliennes montrent le Jourdain comme la frontière orientale du pays. Netanyahou a confirmé sa position dans une interview publiée par <em>24Heures</em> le 20 juin dernier, dans laquelle il affirme que «Israël gardera le contrôle de la sécurité du Jourdain à la mer». Si cela ne suffisait pas à indiquer les intentions de l’actuel gouvernement israélien, son approbation d’il y a quelques jours de la saisie de 1'270 hectares dans les Territoires palestiniens occupés en Cisjordanie ne devrait plus laisser aucun doute; cela faisait une trentaine d’années qu’une saisie d’une telle ampleur n’avait eu lieu. On ne peut donc pas blâmer seulement celles et ceux qui affichent la volonté de voir une Palestine libérée – sous-entendu de l’occupant israélien – s'étendant de la mer au Jourdain. 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Cela est sans doute dû au soutien qu’elle a reçue par l’administration Biden, après le 7 octobre. Bien sûr beaucoup des partisans de cette solution sont conscients des difficultés qu’elle comporte, mais s’y tiennent parce qu’à les en croire, il n’y en aurait pas d’autre: elle est peut-être peu crédible, mais elle constituerait la seule perspective d’avenir. Notons en passant que beaucoup de pays se sont prononcés pour la solution à deux Etats mais ne reconnaissent pas l'Etat de Palestine. C’est le cas de la Suisse. La solution à deux Etats n’est donc pas soutenue avec cohérence. En attendant, Israël poursuit son avancée conquérante.</p> <h3>Plusieurs solutions alternatives</h3> <p>Bien sûr une solution alternative radicale à la solution à deux Etats consiste à transférer les Palestiniens hors des Territoires occupés. Celles et ceux qui pensent qu’il est exagéré d’imaginer qu’Israël cherche ou ait cherché à atteindre cet objectif devraient lire <em>Le nettoyage ethnique de la Palestine</em> de l’historien Ilan Pappe, qui vient d’être réédité par les éditions La Fabrique.</p> <p>Une autre solution radicale consisterait à perpétuer l’actuelle situation de quasi-apartheid. Tout en étant radicales, ces deux options seraient très instables: la première ne ferait qu’empirer la situation créée avec la Nakba, soit l’exode forcé de plus des trois-quarts des Palestiniens qui vivaient dans les territoires sous contrôle israélien. A la fin du mandat britannique, les Arabes représentaient encore deux tiers de la population; avec la création d’Israël, en 1948 ne vivaient dans l’Etat juif plus que quelque 500'000 Arabes à côté d’environ 600'000 Juifs. 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Ces dernières, à partir de la situation actuelle, envisagent des transformations vers un Etat laïc et démocratique, ou alors vers un Etat fédéral binational. La première transformation imiterait celle qui a constitué l’Afrique du Sud post apartheid; c’est la solution qui avait été promue en 1969 par la Plateforme de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP). Soulignons, d'ailleurs, que le Premier ministre israélien de droite Menachem Begin partageait cette vision, bien qu'il ait souhaité aussi éliminer l’OLP.</p> <p>En 1977, Begin s’est explicitement prononcé contre l’apartheid, et pour que tous les habitants des Territoires palestiniens occupés aient la possibilité de choisir la citoyenneté israélienne; celles ou ceux ayant fait ce choix pourraient ensuite jouir des mêmes droits que les autres Israéliens. 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Dans ces conditions, on peut comprendre qu’une solution binationale prônant la coexistence judéo-arabe ait été à l’ordre du jour, même si pour certains ce n’était certainement qu’une solution de circonstance. Il y a pourtant eu des sionistes convaincus pour croire sérieusement à cette possibilité: Ahad Haam, Martin Buber, Hans Kohn, Leon Magnes, Hannah Arendt, et plus près de nous Avraham B. Yehoshua, etc. Certains pensaient que les Juifs arrivés en Palestine étaient proches des Arabes par la race et par le sang, et qu’il fallait donc se réunir avec eux, ils étaient en quelque sorte pacifistes et … racistes! En 1929, Albert Einstein écrit à Chaïm Weizman, qui deviendra le premier Président israélien: «si nous ne trouvons pas la voie d’une coopération avec les Arabes, nous n’aurons rien appris de notre chemin de calvaire bimillénaire, et nous aurons mérité le sort qui nous est promis». En 1947, lors du vote à l’ONU sur le plan de partage de la Palestine, l’Inde de Gandhi, la Yougoslavie de Tito, et l’Iran du Shah défendent la création d’une (con)fédération, et pendant les travaux de la commission, l’URSS préconise un Etat binational.</p> <p>La Nakba aura permis de retarder la situation de quasi-apartheid qui s’est instaurée après la Guerre des Six jours de 1967. Ainsi, la solution binationale n’a pas eu besoin d’être défendue entre 1948 et 1967, et la situation après 1967 ne semble guère avoir été favorable à une vraie solution binationale, bien qu’elle ait toujours eu des soutiens. Dans un article de 2014, cité par Shlomo Sand dans son livre de 2022 <em>Deux peuples pour un Etat? Relire l’histoire du sionisme</em>, paru au Seuil, le journaliste Gideon Levy pose: «La solution de l’Etat unique est en place depuis longtemps. C’est une solution pour les citoyens juifs, et un malheur pour les résidents palestiniens. 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En effet, en 2013 la Cour suprême israélienne a statué que les résidents du pays ne peuvent pas être identifiés dans le registre national simplement comme Israéliens, c’est-à-dire avec une identité administrative séculaire, différente – par exemple – de juif, arabe, druze, etc. La Cour, qui est pourtant connue pour être assez libérale, a précisé que permettre aux citoyens d'adopter une identité séculaire seule pourrait miner le principe fondateur d’Israël d’être un état juif, pour les Juifs. </p> <h3>Conclusion</h3> <p>Toutes les solutions potentielles devront se confronter aux réalités démographiques, qui ne peuvent être modifiées (par des moyens démocratiques), mais l'identité juive d’Israël semble pouvoir être dépassée. On estime à environ 40% les Israéliens qui s’identifient déjà prioritairement comme Israéliens, plutôt que comme Juifs. Bien sûr l’attaque du 7 octobre aura consolidé la position des Juifs qui ne veulent pas partager le pouvoir avec les Palestiniens. Certains l’utilisent même pour décréter la mort de la solution à deux Etats, qui aurait été soutenue par Israël avec le retrait des colons de Gaza, et qui aurait été mise en question par les Palestiniens avec l’attaque terroriste. Ces raisonnements oublient que du côté de la Cisjordanie la colonisation ne s’est jamais arrêtée. Quoiqu'il en soit, il faut surtout stopper le massacre en cours.</p> <p>Nous ne savons pas si la solution binationale sera finalement choisie. Notre propos visait à donner de la crédibilité à des solutions autres que celle à deux Etats. En mettant en lumière les difficultés propres aux différents scénarios et les transformations nécessaires pour les faire advenir, on entrevoit des actions concrètes possibles à mener.</p> <p>On devrait commencer par symétriser la situation en remettant en question l’indulgence de la part des pays occidentaux pour Israël, leur précieux «allié démocratique». Les démocraties occidentales seraient bien avisées d’arrêter d’appliquer un régime de faveur à Israël, et de promouvoir le respect du droit international par toutes les parties prenantes. En particulier, il faudrait que les Etats-Unis respectent leur propre droit: le quotidien britannique <em>The Guardian</em> a mis en évidence que le Département d’Etat américain utilise des «mécanismes spéciaux» pour continuer à fournir des armes à Israël malgré les lois prohibant le soutien à des armées étrangères violant de manière évidente les droits humains. Seulement une fois que le droit et le droit international seront respectés pourront avoir lieu des discussions afin de dégager des solutions possibles. De fait, cerner la légalité de la situation actuelle en Israël et dans les Territoires palestiniens occupés permettrait déjà de mieux voir ce qu’il sera possible d’envisager pour une coexistence pacifique et durable des populations en Palestine, sans leur imposer des solutions qui ne respectent pas leur droit à l’auto-détermination.</p>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'de-la-mer-au-jourdain-de-drapeau-il-n-y-aura-qu-un', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 390, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 8, 'person_id' => (int) 12725, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [ [maximum depth reached] ], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 5066, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => false, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => null, 'readed' => null, 'subhead' => null, 'title' => '«L’argent n’est pas le nerf de la guerre»', 'subtitle' => 'Ces derniers mois la conseillère fédérale Amherd a tenté à trois reprises d'étoffer les finances de l’armée à hauteur de 15, 18, puis 10 milliards de francs. 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Une réforme politique passe donc d'abord par une réforme militaire. Ce n’est pas parce que la Suisse possède une armée de milice que les critiques de Machiavel ne nous concernent pas.</p> <p>Ce que ces critiques mettent en évidence est l’importance de l’articulation entre le système militaire et le financement de l’Etat, et en particulier comment celui-ci pense et gère sa dette. Revenons alors sur la phrase «les bons soldats sont le nerf de la guerre». Dans sa simplicité elle dit que l’argent seul ne suffit pas pour faire la guerre. Les inépuisables sommes dont disposerait la Russie doivent être utilisées pour payer des soldes et des gratifications à des hommes et des femmes pour renforcer encore son armée. Pour subjuguer Gaza, Israël doit transformer des centaines de millions (de francs) par jour en drones, chars, avions, munitions, etc. La Suisse n’est pas en guerre. Ce qu’elle investit dans l’armée pourrait donc s’avérer complètement inutile, mais – dit-on – il faut se préparer au pire en investissant peut-être à perte dans notre sécurité. Encore faudrait-il le faire de manière sérieuse. Machiavel nous apprend que plus d’argent dépensé ne signifie pas une meilleure défense. Au contraire, les dépenses pourraient servir des intérêts tout autres que ceux de la défense du peuple, car la gestion de la dette implique un rapport de force entre intérêts (économiques) divergents. Si on ne peut pas avoir le beurre et l’argent du beurre, on ne peut pas non plus avoir le beurre et les canons, mais surtout il faut être au clair sur la proportion entre les deux. </p> <h3>Les propositions de nos politiques à «l’âge du beurre»</h3> <p>Ce dernier point est plus ou moins pris en compte par deux des trois propositions faites ces derniers mois en vue d’augmenter le financement de l’armée. 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Le comité n’a pas explicité comment la SSR devrait être redimensionnée, laissant entendre que la discussion en vue de la votation sur l’initiative allait permettre de débattre du fond de l’affaire, à savoir quel est le futur souhaité pour le service public média.</p> <p>Avant de voir comment le comité entend affronter cette question, arrêtons-nous sur d’autres aspects de l’initiative, et quelques chiffres. L’initiative prévoit que le montant de 200 francs pour la redevance soit inscrit dans la Constitution, et que ce soit au législateur de définir ce qu’est un «service [de la SSR] indispensable à la collectivité». Ces points pourraient sembler anodins, mais il subvertissent l’actuelle répartition des compétences entre le Conseil fédéral (CF) et l’Assemblée nationale. Actuellement, le pilotage matériel de la SSR est assuré par le CF à l’aide de deux instruments reliés entre eux, qui sont justement la fixation du montant de la redevance et la définition de la concession. 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Or, comme le note le CF «l’utilisation des médias se déplace de plus en plus des programmes de radio et de télévision linéaires vers les médias en ligne et les médias sociaux», et on peut même dire avec la Commission fédérale des médias (COFEM) que «pour le service public média, la transformation en fournisseur multimédia de services journalistiques est inéluctable». Ainsi, limiter le financement par la redevance aux seules offres linéaires revient à empêcher la SSR de suivre un développement nécessaire, et donc la condamner à ne pas pouvoir faire face aux défis de notre temps.</p> <p>Rappelons maintenant quelques chiffres. On pourrait penser que la SSR est un géant bénéficiant d’un financement démesuré. Elle est effectivement la plus grande entreprise média suisse avec 7'200 collaborateurs, pour 5'700 postes à temps plein, ce qui correspond à peu près à la somme des employés de Ringier (2'300), TX-Group (anc. Tamedia, 3'700), et NZZ-Mediengruppe (850) réunis. 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Il propose en effet de diminuer la redevance pour les ménages à 300 francs de manière progressive d’ici à 2029, et de préciser le mandat de prestations de la SSR dans la nouvelle concession (l’actuelle étant prorogée jusqu’en 2028). Les entreprises ne seront pas exonérées, et 80% d’entre elles devront payer une redevance. La SSR verrait ainsi sa part de la redevance réduite de 120 millions, ce qui est une diminution considérable, mais non létale.</p> <p>Arrêtons-nous un instant sur la redevance pour les entreprises, vu que leurs représentants politiques clament haut et fort qu'il est injuste qu’elles paient cet impôt progressif calculé en fonction du chiffre d’affaires, et qui peut se monter à plusieurs milliers de francs. Il y a d’ailleurs régulièrement des entreprises qui contestent ce paiement, dû depuis 2019. 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