Actuel / «Juges étrangers », l'argument des droits de l'homme ne suffira pas
Jusqu’ici, ce sont surtout les défenseurs des droits de l’homme que l’on a entendus. Ce sont pourtant les milieux de droite qui feront la différence. © DR (Photo: la Cour européenne des droits de l'homme de Strasbourg)
Les défenseurs des droits de l’homme ont fait un impressionnant travail en amont pour préparer la campagne contre l’initiative de l’UDC «Le droit suisse au lieu de juges étrangers.» Mais attention quand même: c’est à droite que se jouera le sort de cette initiative. Les partisans du non seraient bien inspirés de mettre en avant désormais d’autres «narratifs» que les droits de l’homme, plus susceptibles de rallier un électorat qui reste sensible aux représentations traditionnelles de la souveraineté populaire. Et ces arguments existent...
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Le jour où les citoyens voteront une initiative qui exige nommément la dénonciation de la Convention européenne des droits de l’homme, de l’accord sur la libre circulation des personnes avec l’UE ou de tout autre accord de grande importance, il n’y a aucun doute: ces accords devront être dénoncés, dans les formes et aux conditions prévues, aussi désastreuses que puissent en être les conséquences.</p><p>A ce jour, les Suisses n’ont cependant jamais voté en ce sens. Quand les citoyens ont accepté l’interdiction des minarets, ils n’ont pas approuvé en même temps la dénonciation de la Convention européenne des droits de l’homme. Pas davantage quand ils ont accepté, en 2010, le renvoi automatique des délinquants étrangers. La Convention européenne est restée en vigueur. Elle lie toujours la Suisse. 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Ils ont refusé de se faire tordre le bras par un parti qui n’a de cesse de se présenter comme le seul défenseur de la démocratie directe et de la volonté populaire contre les élites, les juges, les professeurs de droit et autres architectes de l’Etat de droit – cet ennemi du citoyen souverain dans la mythologie trompeuse entretenue par les nationalistes.</p><h3>Etonnante capacité de résistance<br></h3><p>Les citoyens ont dit non et l’un des enseignements les plus précieux de ce dimanche est sans doute l’étonnante capacité de résistance dont les citoyens ont fait preuve en rejetant des propositions qui reflétaient les aspirations populistes jusqu’à la caricature. La primauté sans nuance de la volonté populaire que cherchait à imposer l’initiative – au détriment des subtils <em>checks and balances</em> qui caractérisent le système helvétique – aurait plombé toute politique d’ouverture de la Suisse.</p><p>Le populisme n’est donc pas une fatalité et la démocratie directe n’en est pas le vecteur par essence. Voilà qui devrait rassurer pour l’avenir. La netteté du rejet était d’ailleurs inattendue et ne transparaissait pas dans les sondages. Les analyses à venir devraient permettre de mieux cerner les raisons de ce four complet pour l’UDC. Mais il paraît peu probable qu’à lui seul l’argument des droits de l’homme ait pu convaincre une majorité des votants d’Uri, de Schwyz, d’Obwald et de Nidwald, de Glaris, d’Argovie ou de Thurgovie. Les citoyens ont plus vraisemblablement refusé de cautionner un texte qui leur paraissait abstrait, leur parlait peu et dont ils avaient grand peine à mesurer les conséquences précises sinon pour comprendre qu’elles risquaient d’être défavorables à l’économie.</p><p>Bref, ils n’ont pas voulu acheter un chat en poche. Mais aussi rassurante que soit la défaite de l’UDC, ce serait illusoire de penser que désormais, la suite de l’histoire est écrite et que la partition en sera résolument ouverte à la supranationalité et à l’Europe.</p><h3>Survie aléatoire<br></h3><p>Le rejet de dimanche ne dit rigoureusement rien par exemple du destin politique de l’accord-cadre négocié avec l’UE. Une acceptation de l’initiative l’aurait assurément compromis, mais le non sorti des urnes ne préjuge pas de sa survie, à ce jour des plus aléatoires.</p><p>Le Conseil fédéral devrait prendre une décision importante à ce sujet ce vendredi, mais les résistances à l’égard des «juges étrangers» de l’UE seront beaucoup plus difficiles à combattre que l’initiative de l’UDC. Elles existent en effet aussi bien dans le camp conservateur qu’à gauche. Il y a quelques jours, la condamnation par la Cour de l’UE de l’équivalent des mesures d’accompagnement à la libre circulation des personnes dans la législation autrichienne a confirmé encore davantage les syndicats suisses de la justesse de leur refus de tout compromis sur ce point. </p><p>La négociation de cet accord-cadre avec Bruxelles bute sur des questions en bonne partie analogues à celles qui avaient entraîné le rejet de l’EEE en 1992. Il n’est d’ailleurs pas totalement farfelu de se demander si, à tout prendre, les solutions offertes par l’EEE ne sont pas en définitive plus satisfaisantes que les figures quelque peu baroques dans lesquelles les négociateurs suisses se sont engagés et que seuls les diplômés en droit européen semblent en mesure de comprendre réellement. Quoi qu’il en soit, la défense de cet accord devant le peuple ne sera pas une mince affaire. Elle conditionne pourtant la poursuite de nos relations avec l’UE.</p><p>A terme, les Suisses auront également à se prononcer sur le maintien de la libre circulation des personnes, l’UDC ayant fait aboutir une initiative qui en exige l’abrogation. Là encore, le scrutin s’annonce existentiel, car la voie bilatérale n’est pas concevable sans la libre circulation.</p><p>On le voit: la victoire du non dimanche était importante, mais elle ne constituait de loin pas l’étape la plus difficile. Elle aura au moins évité à la Suisse d’ajouter son nom à la liste des pays qui semblent avoir choisi le populisme comme avenir. Et elle aura démontré qu'il est possible, qu'il est même nécessaire, pour les partisans de l'ouverture de <em>r</em><em>emettre le peuple dans le coup</em>. 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A plus long terme, l’initiative «pour l’autodétermination» engendrera une incertitude permanente sur le sort des traités en question. L’UDC pourra revendiquer une adaptation de ces textes et, en cas de refus de nos partenaires – hypothèse la plus probable – une dénonciation. Mais par qui? Le Conseil fédéral? Le Parlement, voire le peuple? L’initiative laisse sans la moindre réponse ces questions pourtant essentielles. Il s’ensuivra immanquablement une confusion totale, sur le plan juridique aussi bien que politique. L’UDC aura alors le champ libre pour mener ce qui pourrait ressembler à une sorte de guerre de harcèlement dans laquelle la volonté populaire sera constamment opposée au refus de la «classe politique» de s’y plier.</p><p>C’est en cela qu’on peut dire qu’avec cette initiative, la souveraineté populaire risque d’être prise en otage par l’UDC. Le journaliste Yves Petignat a très justement observé dans l’une de ses récentes <a href="https://www.letemps.ch/opinions/initiative-juges-etrangers-peuple-contre-democratie">chroniques</a> du <em>Temps </em>que la question à laquelle les Suisses répondront le 25 novembre va bien au-delà de ses aspects constitutionnels et juridiques, par ailleurs difficiles à saisir et à expliquer: «C’est la nature même de notre démocratie qui est en question.» Et de conclure en soulignant la parenté entre l’initiative de l’UDC et cette démocratie «illibérale» qui monte dans plusieurs pays européens et aux Etats-Unis, brillamment analysée par l’universitaire américain Yascha Mounk dans son ouvrage «Le peuple contre la démocratie» (Editions de l'Observatoire, 2018) récemment publié en français et dont <a href="https://bonpourlatete.com/actuel/le-peuple-contre-la-democratie-comprendre-le-populisme"><em xmlns="http://www.w3.org/1999/xhtml">Bon pour la tête</em></a><em></em> a rendu compte.</p><h3>Le peuple n'est pas un gros mot<br></h3><p>La question centrale à laquelle cherche à répondre Yascha Mounk n’est pas seulement de savoir de quoi se nourrit le populisme mais aussi comment le combattre. Et le brio de son analyse tient en particulier à la capacité du jeune intellectuel à penser contre son propre camp, celui des élites progressistes et cosmopolites. La lutte sera difficile, prévient-il, et il faudra la mener, en partie au moins, sur le terrain même que se sont choisi les populistes. Par exemple en cessant de leur abandonner l’idée de la nation et en réparant une économie déréglée par la mondialisation.</p><p>Si l’on cherchait à tirer les enseignements du livre de Mounk pour le combat contre l’initiative de l’UDC, on pourrait commencer par dire que le peuple n’est pas un gros mot, la souveraineté non plus, mais que le peuple est infiniment trop précieux pour être laissé aux populistes. Or c’est exactement ce qui risque d’arriver si d’aventure le oui devait l’emporter dimanche prochain.</p><p>Les milieux économiques et les partis de la droite classique ont eu raison de ne pas s’en tenir exclusivement à la défense des droits de l’homme et de chercher à contrer l’UDC sur le terrain même et au nom de la démocratie directe. A<em> Arena</em>, la grande émission de débat de la télévision alémanique, le PLR Philipp Müller a par exemple rappelé que le peuple a déjà et depuis longtemps le dernier mot sur toutes les questions importantes et que la seule et bonne manière d’arbitrer une contradiction entre un texte constitutionnel et un traité approuvé antérieurement est de poser loyalement et directement la question au peuple.</p><h3>La part de responsabilité du Conseil fédéral<br></h3><p>A partir de là, tous les problèmes évoqués souvent dans la confusion lors de cette campagne s’éclairent. Certes, le peuple a décidé qu’aucun minaret ne serait plus construit en Suisse. 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Au contraire, c’est bien parce que le populisme a une légitimité démocratique que les lendemains qu’il annonce risquent d’être sinistres.</p><p>Tout l’intérêt de la pensée de Mounk est de récuser les analyses qui se contenteraient d’opposer à la démocratie anti-libérale ce qu’il appelle un libéralisme anti-démocratique, c’est-à-dire une forme d’organisation politique qui protégerait efficacement les droits des individus et des minorités et prendrait des décisions parfaitement raisonnables mais qui, par défiance, cesserait de croire au suffrage universel comme à la seule légitimité possible de tout gouvernement.</p><p>La position de Mounk le place à contre-courant d’un autre politologue, l’Allemand Jan-Werner Müller, pour qui les mouvements populistes sont d’inspiration antidémocratique par essence. <em><strong><br></strong></em></p><blockquote><p><em><strong>«Je crains, </strong></em>écrit Mounk<em><strong>, que le refus de reconnaître qu’il y a quelque chose de démocratique dans l’énergie qui les a propulsés au pouvoir ne nous empêche de comprendre la nature de leur force d’attraction et rende plus difficile de réfléchir de manière prudente et créative à la façon de les arrêter.»</strong></em></p></blockquote><p>Au chapitre des remèdes justement, Yascha Mounk accorde une grande place à ce qu’il appelle «réparer l’économie». Car à lui seul, le fait que le citoyen de 2018 ait moins de pouvoir que celui de 1958 ne suffit pas à expliquer le populisme. Les «Trente Glorieuses» avaient fait reculer les inégalités. La mondialisation les a accentuées à nouveau. Les générations d’après-guerre ont vécu avec la conviction que la vie serait plus facile pour celles qui suivraient. Cet optimisme a disparu, note Mounk. Les études qu’il cite montrent que neuf Américains sur dix nés en 1940 gagnaient à trente ans plus que leurs parents au même âge. Cette proportion n’est plus que d’un sur deux pour les Américains nés en 1980. Les données disponibles suggèrent une évolution analogue en Europe. </p><p>Les développements consacrés aux effets de l’accroissement des inégalités sur la montée du populisme comptent parmi les pages les plus intéressantes de l’ouvrage. Il est de bon ton en effet de mettre en doute toute relation de cause à effet en ce domaine. Les succès tout récents de l’extrême droite dans la Suède prospère tordraient le cou à la thèse selon laquelle le populisme se nourrirait de la colère des «perdants de la mondialisation». Déjà, on avait pu montrer que les classes les plus favorisées avaient bel et bien voté Trump, et les plus fragilisées, Clinton. On pensait détenir la preuve que le récit médiatique associant pauvreté et succès du populisme tenait de la légende urbaine.</p><p>Pas si simple, avertit Mounk. Car entre les plus riches et les plus pauvres, il y a la classe moyenne. Et là, une étude attentive donne un autre éclairage. Les électeurs de Trump sont en moyenne moins diplômés que ceux de Clinton. Ils ont donc des raisons particulières de se sentir plus menacés que d’autres par la mondialisation et l’intelligence artificielle. Ils habitent aussi des régions aux indices de santé moins favorables, au taux de chômage plus élevé, à la mobilité sociale plus faible et où vivent davantage d’individus sans revenu. En 2016, les quinze Etats les moins menacés par l’automatisation ont voté Clinton. Vingt et un des vingt-deux Etats les plus menacés ont choisi son adversaire.</p><p>Le contrat implicite sur lequel les démocraties occidentales ont longtemps fonctionné, et qui consistait à promettre un accroissement constant de la prospérité et des retombées pour le plus grand nombre, est rompu. Il n’y a pas d’analyse du populisme qui tienne, nous dit Mounk, sans prendre en compte cette donnée et sans s’interroger sur ce qui pourrait aujourd’hui remplacer les promesses d’antan pour ressouder la société.</p><p>Cosmopolite revendiqué, Yascha Mounk ne croit toutefois pas que notre avenir soit supranational. Le fait national ne lui paraît pour l’heure guère dépassable. Son appréciation de l’intégration européenne est d’ailleurs souvent sévère. L’immense majorité des citoyens des démocraties occidentales, note-t-il, se sentent encore, et probablement pour longtemps encore, appartenir à un pays déterminé, dont l’histoire et les institutions ont façonné une identité particulière, non interchangeable. Penser qu’à l’heure de la mondialisation, les nations n’existent plus, ou qu’elles sont obsolètes, procède d’une fausse perception de la réalité, quoi qu’aient pu espérer les générations de l’après-guerre et en particulier les pères-fondateurs de l’intégration européenne.</p><p>Pour le meilleur ou pour le pire, la nation va donc perdurer. La grande question n’est donc pas celle de sa disparition, mais bien de savoir ce qu’on peut en faire. Mounk se démarque là avec une grande netteté d’un courant intellectuel sensible aussi bien en Europe qu’aux Etats-Unis, qui refuse la nation précisément en raison de son héritage historique – colonialiste, impérialiste, raciste ou guerrier. Ce n’est pas parce que les idéaux des Lumières sur lesquels ont été bâties les démocratiques modernes n’ont pas été atteints ou ont été trahis qu’il faut les abandonner, dit l’auteur en substance. Le «patriotisme inclusif» légué par les révolutions américaine et française et sa promesse d’une émancipation de tous sans distinction d’origine, reste, pour Mounk, un idéal totalement actuel.</p><p>Les civilisations sont mortelles, les démocraties libérales le sont aussi. Le livre de Mounk nous invite à en prendre conscience. L’auteur se refuse cependant au défaitisme. Les moyens de combattre le populisme existent: les droits civiques, la mobilisation citoyenne doivent être utilisés avec une détermination sans faille pour barrer la route à des évolutions qui pourraient, sinon, sonner le glas de nos libertés. 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Jusqu’ici, ce sont surtout les défenseurs des droits de l’homme que l’on a entendus. Une «Alliance de la société civile» fédérée par l’ONG «Facteur de protection D» a occupé très efficacement le terrain. En particulier sur les réseaux sociaux. Bien préparés, en avance sur les autres forces politiques – y compris sur l’UDC elle-même –, ces milieux ont réussi à imposer leur message. Pour eux, l’initiative de l’UDC est avant tout une initiative «anti-droits humains». La première cible des nationalistes, c’est la Convention européenne des droits de l’homme.
Ce sont les électeurs de droite qui feront pencher la balance
L’engagement de ces organisations est évidemment aussi nécessaire que légitime. Il n’est pas question ici de le remettre en cause. Ce serait cependant une erreur tactique de ne pas faire entendre désormais et en priorité d’autres arguments dans la campagne qui s’annonce, plus susceptibles de convaincre à droite.
Car pour une bonne part, c’est à droite que se jouera la bataille. Ce sont les électeurs de droite qui feront pencher la balance, c'est donc à eux qu’il faut s’adresser avant tout. Soyons francs: même si leur combat est admirable, les milieux de défense des droits de l’homme ne sont pas les mieux placés pour jouer ce rôle. Si les partisans du non veulent l’emporter le 25 novembre, il faut impérativement qu’ils fassent entendre d’autres voix, et qu'elles soient fortes.
La difficulté est que l’UDC, elle, peut moduler son argumentation à volonté. Le parti a plusieurs cartes à sa disposition. Il pourra les jouer en fonction des circonstances, de l’actualité et de la tonalité de la campagne.
Contre l’accord-cadre avec l’UE et la libre circulation des personnes
Le parti ne manquera pas l’occasion qui lui est fournie de livrer une guerre préventive contre l’accord-cadre avec l’UE et contre la libre circulation des personnes. Bien sûr, le parti s’en prendra aussi aux juges de Strasbourg et à la Convention européenne des droits de l’homme, en montant en épingle certaines décisions concernant notamment l’expulsion de délinquants étrangers. Ce n’est pourtant pas tant les droits de l’homme en tant que tels que l’UDC devrait attaquer mais bien le pouvoir du droit international et des juridictions internationales.
Rompant avec tous les usages voulant que les représentants du pouvoir judiciaire n’interviennent pas dans une campagne de votation, le juge UDC au Tribunal administratif fédéral, Simon Thurnheer, a publié il y a quelques semaines une tribune particulièrement révélatrice dans la NZZ. Son texte, si l’on se donne la peine de le lire sans œillères idéologiques, n’est pas une attaque contre les droits de l’homme en eux-mêmes, mais contre les juges de Strasbourg dont l’interventionnisme aurait, prétend l’auteur, trahi l’héritage originel de la Convention et porterait de plus en plus atteinte à la souveraineté des Etats.
Pour l’UDC, le problème, c’est la supranationalité
De la part de l’UDC, une telle ligne d’argumentation est assez bien vue. Elle évite au parti d’apparaître comme le fossoyeur des droits de l’homme. Les libertés fondamentales? Mais elles sont inscrites dans la Constitution suisse et nous voulons justement rendre à cette Constitution la valeur première qu’elle n’aurait à notre avis jamais dû perdre, peut facilement répondre le parti. On le voit: pour l’UDC, le problème c’est la supranationalité. Le leitmotiv du parti jusqu’au 25 novembre risque donc de se résumer à «en Suisse, le peuple a le dernier mot, pas les juges de Strasbourg».
C’est sur ce terrain-là que les adversaires devraient porter l’offensive, plutôt que de répéter en boucle l’importance des droits de l’homme, si légitime soit-elle. Oui, le système constitutionnel suisse donne le dernier mot au peuple. Encore faut-il que ce mot soit clair. Le jour où les citoyens voteront une initiative qui exige nommément la dénonciation de la Convention européenne des droits de l’homme, de l’accord sur la libre circulation des personnes avec l’UE ou de tout autre accord de grande importance, il n’y a aucun doute: ces accords devront être dénoncés, dans les formes et aux conditions prévues, aussi désastreuses que puissent en être les conséquences.
A ce jour, les Suisses n’ont cependant jamais voté en ce sens. Quand les citoyens ont accepté l’interdiction des minarets, ils n’ont pas approuvé en même temps la dénonciation de la Convention européenne des droits de l’homme. Pas davantage quand ils ont accepté, en 2010, le renvoi automatique des délinquants étrangers. La Convention européenne est restée en vigueur. Elle lie toujours la Suisse. Notre pays continue – doit continuer – à jouer le jeu.
L’initiative de l’UDC affaiblit la valeur de la signature de la Suisse
Tant qu’un traité n’a pas été dénoncé, il doit en effet être appliqué. Pourquoi? Parce que c’est le propre d’un Etat libre et souverain de s’engager par sa signature et d’attendre des autres qu’ils respectent la leur. Même la Corée du Nord, quand elle a développé ses essais atomiques, a eu le réflexe de dénoncer le Traité de non-prolifération nucléaire qu’elle avait signé dans un premier temps.
En affaiblissant la valeur de la signature de la Suisse vis-à-vis des autres Etats, l’initiative de l’UDC nuit à la souveraineté du pays. Pour un petit pays comme la Suisse, le respect du droit international a une valeur cardinale. Rien n’est plus suisse en réalité que le respect du droit international. Rien n’est plus suisse que de miser sur le droit et l’arbitrage pour régler les différends entre Etats et non sur les rapports de force, militaires ou commerciaux: sur ce terrain-là, la Suisse sait qu’elle n’est pas gagnante.
La force de l’économie suisse ne peut pas se passer non plus du droit international: accords de libre-échange et de protection des investissements, OMC et –très important – propriété intellectuelle. Quant à la Convention européenne des droits de l’homme, elle est dans la ligne exacte des valeurs helvétiques. Elle met en œuvre les fondements démocratiques et libéraux sur lesquels s’est bâtie la Suisse d’aujourd’hui. Que l’ensemble du continent s’engage à rester fidèle à ces valeurs est pleinement dans l’intérêt de la Suisse. Il n’y a à ce jour qu’un seul pays à avoir dénoncé la Convention – pour y réadhérer après: la Grèce des colonels… A lui seul, ce précédent suffit à prendre la mesure du désastre que constituerait un retrait de la Suisse.
Bref, les adversaires de l’initiative devront soigneusement réfléchir à leur «narratif», qui ne peut être seulement celui des droits de l’homme, insuffisant pour rassembler à droite, trop défensif et de surcroît trop sectoriel, laissant le champ libre à l’UDC pour défendre seule la souveraineté du peuple. La campagne des milieux économiques qui vient de commencer et celle d'Operation Libero vont dans ce sens et il faut s'en féliciter.
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La primauté sans nuance de la volonté populaire que cherchait à imposer l’initiative – au détriment des subtils <em>checks and balances</em> qui caractérisent le système helvétique – aurait plombé toute politique d’ouverture de la Suisse.</p><p>Le populisme n’est donc pas une fatalité et la démocratie directe n’en est pas le vecteur par essence. Voilà qui devrait rassurer pour l’avenir. La netteté du rejet était d’ailleurs inattendue et ne transparaissait pas dans les sondages. Les analyses à venir devraient permettre de mieux cerner les raisons de ce four complet pour l’UDC. Mais il paraît peu probable qu’à lui seul l’argument des droits de l’homme ait pu convaincre une majorité des votants d’Uri, de Schwyz, d’Obwald et de Nidwald, de Glaris, d’Argovie ou de Thurgovie. Les citoyens ont plus vraisemblablement refusé de cautionner un texte qui leur paraissait abstrait, leur parlait peu et dont ils avaient grand peine à mesurer les conséquences précises sinon pour comprendre qu’elles risquaient d’être défavorables à l’économie.</p><p>Bref, ils n’ont pas voulu acheter un chat en poche. Mais aussi rassurante que soit la défaite de l’UDC, ce serait illusoire de penser que désormais, la suite de l’histoire est écrite et que la partition en sera résolument ouverte à la supranationalité et à l’Europe.</p><h3>Survie aléatoire<br></h3><p>Le rejet de dimanche ne dit rigoureusement rien par exemple du destin politique de l’accord-cadre négocié avec l’UE. Une acceptation de l’initiative l’aurait assurément compromis, mais le non sorti des urnes ne préjuge pas de sa survie, à ce jour des plus aléatoires.</p><p>Le Conseil fédéral devrait prendre une décision importante à ce sujet ce vendredi, mais les résistances à l’égard des «juges étrangers» de l’UE seront beaucoup plus difficiles à combattre que l’initiative de l’UDC. Elles existent en effet aussi bien dans le camp conservateur qu’à gauche. Il y a quelques jours, la condamnation par la Cour de l’UE de l’équivalent des mesures d’accompagnement à la libre circulation des personnes dans la législation autrichienne a confirmé encore davantage les syndicats suisses de la justesse de leur refus de tout compromis sur ce point. </p><p>La négociation de cet accord-cadre avec Bruxelles bute sur des questions en bonne partie analogues à celles qui avaient entraîné le rejet de l’EEE en 1992. Il n’est d’ailleurs pas totalement farfelu de se demander si, à tout prendre, les solutions offertes par l’EEE ne sont pas en définitive plus satisfaisantes que les figures quelque peu baroques dans lesquelles les négociateurs suisses se sont engagés et que seuls les diplômés en droit européen semblent en mesure de comprendre réellement. Quoi qu’il en soit, la défense de cet accord devant le peuple ne sera pas une mince affaire. Elle conditionne pourtant la poursuite de nos relations avec l’UE.</p><p>A terme, les Suisses auront également à se prononcer sur le maintien de la libre circulation des personnes, l’UDC ayant fait aboutir une initiative qui en exige l’abrogation. Là encore, le scrutin s’annonce existentiel, car la voie bilatérale n’est pas concevable sans la libre circulation.</p><p>On le voit: la victoire du non dimanche était importante, mais elle ne constituait de loin pas l’étape la plus difficile. 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A plus long terme, l’initiative «pour l’autodétermination» engendrera une incertitude permanente sur le sort des traités en question. L’UDC pourra revendiquer une adaptation de ces textes et, en cas de refus de nos partenaires – hypothèse la plus probable – une dénonciation. Mais par qui? Le Conseil fédéral? Le Parlement, voire le peuple? L’initiative laisse sans la moindre réponse ces questions pourtant essentielles. Il s’ensuivra immanquablement une confusion totale, sur le plan juridique aussi bien que politique. L’UDC aura alors le champ libre pour mener ce qui pourrait ressembler à une sorte de guerre de harcèlement dans laquelle la volonté populaire sera constamment opposée au refus de la «classe politique» de s’y plier.</p><p>C’est en cela qu’on peut dire qu’avec cette initiative, la souveraineté populaire risque d’être prise en otage par l’UDC. Le journaliste Yves Petignat a très justement observé dans l’une de ses récentes <a href="https://www.letemps.ch/opinions/initiative-juges-etrangers-peuple-contre-democratie">chroniques</a> du <em>Temps </em>que la question à laquelle les Suisses répondront le 25 novembre va bien au-delà de ses aspects constitutionnels et juridiques, par ailleurs difficiles à saisir et à expliquer: «C’est la nature même de notre démocratie qui est en question.» Et de conclure en soulignant la parenté entre l’initiative de l’UDC et cette démocratie «illibérale» qui monte dans plusieurs pays européens et aux Etats-Unis, brillamment analysée par l’universitaire américain Yascha Mounk dans son ouvrage «Le peuple contre la démocratie» (Editions de l'Observatoire, 2018) récemment publié en français et dont <a href="https://bonpourlatete.com/actuel/le-peuple-contre-la-democratie-comprendre-le-populisme"><em xmlns="http://www.w3.org/1999/xhtml">Bon pour la tête</em></a><em></em> a rendu compte.</p><h3>Le peuple n'est pas un gros mot<br></h3><p>La question centrale à laquelle cherche à répondre Yascha Mounk n’est pas seulement de savoir de quoi se nourrit le populisme mais aussi comment le combattre. Et le brio de son analyse tient en particulier à la capacité du jeune intellectuel à penser contre son propre camp, celui des élites progressistes et cosmopolites. La lutte sera difficile, prévient-il, et il faudra la mener, en partie au moins, sur le terrain même que se sont choisi les populistes. Par exemple en cessant de leur abandonner l’idée de la nation et en réparant une économie déréglée par la mondialisation.</p><p>Si l’on cherchait à tirer les enseignements du livre de Mounk pour le combat contre l’initiative de l’UDC, on pourrait commencer par dire que le peuple n’est pas un gros mot, la souveraineté non plus, mais que le peuple est infiniment trop précieux pour être laissé aux populistes. Or c’est exactement ce qui risque d’arriver si d’aventure le oui devait l’emporter dimanche prochain.</p><p>Les milieux économiques et les partis de la droite classique ont eu raison de ne pas s’en tenir exclusivement à la défense des droits de l’homme et de chercher à contrer l’UDC sur le terrain même et au nom de la démocratie directe. A<em> Arena</em>, la grande émission de débat de la télévision alémanique, le PLR Philipp Müller a par exemple rappelé que le peuple a déjà et depuis longtemps le dernier mot sur toutes les questions importantes et que la seule et bonne manière d’arbitrer une contradiction entre un texte constitutionnel et un traité approuvé antérieurement est de poser loyalement et directement la question au peuple.</p><h3>La part de responsabilité du Conseil fédéral<br></h3><p>A partir de là, tous les problèmes évoqués souvent dans la confusion lors de cette campagne s’éclairent. Certes, le peuple a décidé qu’aucun minaret ne serait plus construit en Suisse. 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Un tel revirement est délétère et contribue lourdement à entretenir le soupçon que le gouvernement et le Parlement ont cessé d’obéir au peuple.</p><p>Si l’initiative est rejetée dimanche, il ne faudrait surtout pas renoncer à instiller une forte dose de pédagogie démocratique afin que les citoyens soient désormais au clair sur les raisons pour lesquelles les autorités privilégient, exceptionnellement, un accord international sur le résultat d’une votation. 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L’Italie? «Ce que dit Salvini donne la chair de poule». </p><p>Dick Marty sait que tous les historiens et tous les politologues sont loin d’être d’accord avec cette thèse, mais il maintient que la situation actuelle rappelle les années 30. Parmi les explications, il voit tout à la fois la révolte des couches qui se sentent menacées par des catégories sociales encore plus défavorisées, l’évolution des technologies, et le fait que «les élites politiques n’ont pas été exemplaires.»</p><p>L’idéologie néolibérale, «qui n’a rien à voir avec le libéralisme», porte une lourde responsabilité dans les dérèglements actuels. C’est un «poison» et un jour ce modèle va se casser, est convaincu Dick Marty. Face à ces défis, l’Europe doit s’unir encore plus. Comment? En n’hésitant pas à créer une Europe à plusieurs vitesses. L’Europe s’est agrandie trop vite, son fonctionnement à 28 ou 27 ne permet plus d’avancer. «Il faut des locomotives», sinon il y a un risque de nivellement par le bas. 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Les banques centrales, les agences indépendantes, les organisations internationales, les cours constitutionnelles, toutes ces institutions indispensables au fonctionnement des Etats modernes et de l’économie libérale, et dont le travail est le plus souvent d’une remarquable qualité, n’en ont pas moins éloigné le pouvoir des citoyens en déplaçant son centre de gravité.</p><p>Des décisions de plus en plus importantes se prennent aujourd’hui sans être soumises à une quelconque sanction du suffrage universel. La Commission européenne, selon Mounk, est l’exemple le plus frappant de l’évolution qu’il décrit. Le fonctionnement des institutions européennes est tel que c’est à cette administration que revient dans les faits, selon l’auteur, «de conduire la plupart des activités de l’Union». La Commission, écrit-il, est sans doute «l’agence indépendante la plus puissante du monde.»</p><p>Dans ce contexte, Mounk analyse la montée du populisme comme une réaction des citoyens a une perte de pouvoir qu’il considère tout à la fois comme réelle et problématique. L’Etat de droit, toujours plus respectueux des libertés et des procédures, prend donc des décisions toujours plus «éclairées», mais toujours moins démocratiques, suscitant en retour chez un nombre croissant de citoyens le besoin de récupérer un pouvoir qui doit logiquement être soustrait aux exigences de l’Etat de droit pour redevenir pleinement démocratique.</p><p>Le populisme n’est donc pas, pour Mounk, antidémocratique par essence. Il est certes «illibéral», en ce sens qu’il veut réduire voire supprimer les libertés individuelles et les droits qui protègent les minorités, mais il exprime une indiscutable aspiration des citoyens à se gouverner eux-mêmes. Cela n’empêche nullement Mounk d’être inquiet. Au contraire, c’est bien parce que le populisme a une légitimité démocratique que les lendemains qu’il annonce risquent d’être sinistres.</p><p>Tout l’intérêt de la pensée de Mounk est de récuser les analyses qui se contenteraient d’opposer à la démocratie anti-libérale ce qu’il appelle un libéralisme anti-démocratique, c’est-à-dire une forme d’organisation politique qui protégerait efficacement les droits des individus et des minorités et prendrait des décisions parfaitement raisonnables mais qui, par défiance, cesserait de croire au suffrage universel comme à la seule légitimité possible de tout gouvernement.</p><p>La position de Mounk le place à contre-courant d’un autre politologue, l’Allemand Jan-Werner Müller, pour qui les mouvements populistes sont d’inspiration antidémocratique par essence. <em><strong><br></strong></em></p><blockquote><p><em><strong>«Je crains, </strong></em>écrit Mounk<em><strong>, que le refus de reconnaître qu’il y a quelque chose de démocratique dans l’énergie qui les a propulsés au pouvoir ne nous empêche de comprendre la nature de leur force d’attraction et rende plus difficile de réfléchir de manière prudente et créative à la façon de les arrêter.»</strong></em></p></blockquote><p>Au chapitre des remèdes justement, Yascha Mounk accorde une grande place à ce qu’il appelle «réparer l’économie». Car à lui seul, le fait que le citoyen de 2018 ait moins de pouvoir que celui de 1958 ne suffit pas à expliquer le populisme. Les «Trente Glorieuses» avaient fait reculer les inégalités. La mondialisation les a accentuées à nouveau. Les générations d’après-guerre ont vécu avec la conviction que la vie serait plus facile pour celles qui suivraient. Cet optimisme a disparu, note Mounk. Les études qu’il cite montrent que neuf Américains sur dix nés en 1940 gagnaient à trente ans plus que leurs parents au même âge. Cette proportion n’est plus que d’un sur deux pour les Américains nés en 1980. Les données disponibles suggèrent une évolution analogue en Europe. </p><p>Les développements consacrés aux effets de l’accroissement des inégalités sur la montée du populisme comptent parmi les pages les plus intéressantes de l’ouvrage. Il est de bon ton en effet de mettre en doute toute relation de cause à effet en ce domaine. Les succès tout récents de l’extrême droite dans la Suède prospère tordraient le cou à la thèse selon laquelle le populisme se nourrirait de la colère des «perdants de la mondialisation». Déjà, on avait pu montrer que les classes les plus favorisées avaient bel et bien voté Trump, et les plus fragilisées, Clinton. On pensait détenir la preuve que le récit médiatique associant pauvreté et succès du populisme tenait de la légende urbaine.</p><p>Pas si simple, avertit Mounk. Car entre les plus riches et les plus pauvres, il y a la classe moyenne. Et là, une étude attentive donne un autre éclairage. Les électeurs de Trump sont en moyenne moins diplômés que ceux de Clinton. Ils ont donc des raisons particulières de se sentir plus menacés que d’autres par la mondialisation et l’intelligence artificielle. Ils habitent aussi des régions aux indices de santé moins favorables, au taux de chômage plus élevé, à la mobilité sociale plus faible et où vivent davantage d’individus sans revenu. En 2016, les quinze Etats les moins menacés par l’automatisation ont voté Clinton. Vingt et un des vingt-deux Etats les plus menacés ont choisi son adversaire.</p><p>Le contrat implicite sur lequel les démocraties occidentales ont longtemps fonctionné, et qui consistait à promettre un accroissement constant de la prospérité et des retombées pour le plus grand nombre, est rompu. Il n’y a pas d’analyse du populisme qui tienne, nous dit Mounk, sans prendre en compte cette donnée et sans s’interroger sur ce qui pourrait aujourd’hui remplacer les promesses d’antan pour ressouder la société.</p><p>Cosmopolite revendiqué, Yascha Mounk ne croit toutefois pas que notre avenir soit supranational. Le fait national ne lui paraît pour l’heure guère dépassable. Son appréciation de l’intégration européenne est d’ailleurs souvent sévère. L’immense majorité des citoyens des démocraties occidentales, note-t-il, se sentent encore, et probablement pour longtemps encore, appartenir à un pays déterminé, dont l’histoire et les institutions ont façonné une identité particulière, non interchangeable. Penser qu’à l’heure de la mondialisation, les nations n’existent plus, ou qu’elles sont obsolètes, procède d’une fausse perception de la réalité, quoi qu’aient pu espérer les générations de l’après-guerre et en particulier les pères-fondateurs de l’intégration européenne.</p><p>Pour le meilleur ou pour le pire, la nation va donc perdurer. La grande question n’est donc pas celle de sa disparition, mais bien de savoir ce qu’on peut en faire. Mounk se démarque là avec une grande netteté d’un courant intellectuel sensible aussi bien en Europe qu’aux Etats-Unis, qui refuse la nation précisément en raison de son héritage historique – colonialiste, impérialiste, raciste ou guerrier. Ce n’est pas parce que les idéaux des Lumières sur lesquels ont été bâties les démocratiques modernes n’ont pas été atteints ou ont été trahis qu’il faut les abandonner, dit l’auteur en substance. Le «patriotisme inclusif» légué par les révolutions américaine et française et sa promesse d’une émancipation de tous sans distinction d’origine, reste, pour Mounk, un idéal totalement actuel.</p><p>Les civilisations sont mortelles, les démocraties libérales le sont aussi. Le livre de Mounk nous invite à en prendre conscience. L’auteur se refuse cependant au défaitisme. Les moyens de combattre le populisme existent: les droits civiques, la mobilisation citoyenne doivent être utilisés avec une détermination sans faille pour barrer la route à des évolutions qui pourraient, sinon, sonner le glas de nos libertés. Mais en tous les cas, ce n’est pas en éloignant encore davantage le pouvoir des citoyens que l’on y parviendra.</p><p><hr></p><h4><img class="img-responsive " src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1539095253_9791032904534_lepeuplecontrelademocratie_2018.jpg" width="444" height="683">Yascha Mounk, <em>Le peuple contre la démocratie</em>, Traduction de l’anglais, Editions de L’Observatoire, Paris, 2018, 517 p.</h4><br>', 'content_edition' => null, 'slug' => 'le-peuple-contre-la-democratie-comprendre-le-populisme', 'headline' => false, 'homepage' => 'col-md-12', 'like' => (int) 853, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1276, 'homepage_order' => (int) 1503, 'original_url' => null, 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 5, 'person_id' => (int) 1269, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [ [maximum depth reached] ], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' } ] $embeds = [] $images = [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) { 'id' => (int) 4103, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Strasbourg-_European_Court_of_Human_Rights.jpg', 'type' => 'image', 'subtype' => 'jpeg', 'size' => (int) 3306647, 'md5' => 'b25c457e7070c5a1229e7ab3b5228be3', 'width' => (int) 2560, 'height' => (int) 1600, 'date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'title' => '', 'description' => 'Jusqu’ici, ce sont surtout les défenseurs des droits de l’homme que l’on a entendus. 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VOS RÉACTIONS SUR LE SUJET
3 Commentaires
@jpbzt 08.08.2018 | 12h29
«Le problème ne serait-il pas à la fois celui de la supranationalité et celui d'un sur-sytème européen orienté par une gouvernance largement économique (Dieselgate, Glyphosate, ...) ? Comment croire que l'idéologie prônant la recherche du profit permettrait de résoudre les défis environnementaux et sociaux posés à l’humanité ?»
@stef 19.08.2018 | 15h56
«@jpbzt: vous avez raison, mais allons-y step-by-step !
Ne rien faire et perdre cette initiative serait un recul de plusieurs décennies...»
@Lagom 10.11.2018 | 23h26
«Article pertinent et d'une grande valeur. Depuis sa rédaction à aujourd'hui les choses sont un peu plus clairs. En effet, 500 à 600 traités internationaux seraient en danger de devoir être négociés. Je pense que les suisses ne sont pas fous. L'UDC aurait dû s’attaquer nommément à la Convention Européenne des Droits de l'Homme, mais il a commis la gaffe de risquer de perturber sérieusement la stabilité du pays en cas d'un OUI. A mon avis les UDC modérés; Bernois, Vaudois, etc. voteront massivement contre cette initiative, le reste de la population serait majoritairement contre aussi. »