Actuel / Colombie: la difficile réconciliation
Monument à la naïveté touchante en hommages aux victimes civiles du conflit. © Yves Magat
San Juan Nepomuceno, Colombie. Dans les Montes de Maria, il est difficile de partager un moment autour d’un café sans que chacun ne relate un tragique événement qui lui est arrivé entre 1994 et 2005. Cette période marque le sommet de la violence dans une des régions les plus touchées par ce qu’on appelle pudiquement en Colombie le «conflit armé»: 4000 morts, 56 massacres, 200'000 personnes déplacées seulement dans cette sous-région caraïbe. Plus de 100'000 habitants sur 500'000 dans cette région sont aujourd’hui considérés par le gouvernement comme victimes de la violence et donc sujettes à une indemnisation.
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(Source: <a href="http://www.indepaz.org.co/">Indepaz, Institut d’études pour le développement et la paix</a>)</h4><h3 style="text-align: center;">Statistiques du conflit (1964-2018)</h3><h4 style="text-align: center;"><img class="img-responsive img-center " src="https://bonpourlatete.comhttps://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1543830023_statistique.png" width="852" height="644"> Source: <a href="https://www.unidadvictimas.gov.co/es/registro-unico-de-victimas-ruv/37394">Unité du gouvernement colombien pour l’aide aux victimes</a></h4><br>', 'content_edition' => null, 'slug' => 'colombie-la-difficile-reconciliation', 'headline' => false, 'homepage' => 'col-md-6', 'like' => (int) 848, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1398, 'homepage_order' => (int) 1626, 'original_url' => null, 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 5, 'person_id' => (int) 1326, 'post_type_id' => (int) 1, 'poster_attachment' => null, 'editions' => [[maximum depth reached]], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'attachments' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'comments' => [[maximum depth reached]], 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, 'relatives' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Post) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Post) {}, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Post) {}, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Post) {} ], 'embeds' => [], 'images' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'audios' => [], 'comments' => [], 'author' => 'Yves Magat', 'description' => 'San Juan Nepomuceno, Colombie. 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Certains se transforment en guérillas comme les FARC, l’ELN et d’autres.</h4><h4><strong>1970</strong>: naissance de la guérilla urbaine du M-19 après des élections présidentielles entachées de fraudes.</h4><h4><strong>1976</strong>: montée en puissance du cartel de Medellín dirigé par Pablo Escobar.</h4><h4><strong>1980</strong>: le M-19 prend en otages des diplomates pendant 61 jours à l’ambassade de République dominicaine, dont l’ambassadeur de Suisse.</h4><h4><strong>1982</strong>: début des actions des milices paramilitaires liées aux grands propriétaires fonciers.</h4><h4><strong>1985</strong>: extermination des membres de l’Union patriotique, un parti politique qui regroupait d’anciens guérilleros ayant accepté de rendre les armes.</h4><h4><strong>1997</strong>: naissance officielle des milices paramilitaires AUC</h4><h4><strong>1999</strong>: le président Pastrana accorde aux FARC une zone sanctuaire de la surface de la Suisse en échange d’un projet d’accord de paix (jusqu’en 2002).</h4><h4><strong>2002</strong>: enlèvement de la candidate présidentielle Ingrid Betancourt, libérée par l’armée en 2008.</h4><h4><strong>2003</strong>: début des négociations avec les paramilitaires. 30'000 acceptent de rendre les armes.</h4><h4><strong>2012</strong>: début des négociations du gouvernement Santos avec les FARC à Oslo et La Havane.</h4><h4><strong>2016</strong> <em>26 septembre</em>: signature des accords de paix à Carthagène par le président Santos et le chef des FARC «Timochenko».</h4><h4><strong>2016</strong> <em>2 octobre</em> : Les accords de paix sont refusés en référendum national par 50,21% des voix.</h4><h4><strong>2016 </strong><em>30 novembre</em>: le parlement colombien accepte une nouvelle version des accords de paix après quelques retouches cosmétiques. 12'500 guérilleros commencent à rendre leurs armes et sont regroupés dans des zones de protection avec l’aide du CICR et de l’ONU.</h4><h4><strong>2018</strong> <em>17 juin</em>: Iván Duque, dauphin de Uribe et très critique à l’égard des accords de paix, est élu président de la République.</h4><h4><strong>1er janvier 2016 au 17 novembre 2018</strong>: 486 responsables d’organisations indigènes, paysannes ou de défense des droits humains ont été assassinés en Colombie. (Source: <a href="http://www.indepaz.org.co/">Indepaz, Institut d’études pour le développement et la paix</a>)</h4><h3 style="text-align: center;">Statistiques du conflit (1964-2018)</h3><h4 style="text-align: center;"><img class="img-responsive img-center " src="https://bonpourlatete.comhttps://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1543830023_statistique.png" width="852" height="644"> Source: <a href="https://www.unidadvictimas.gov.co/es/registro-unico-de-victimas-ruv/37394">Unité du gouvernement colombien pour l’aide aux victimes</a></h4><br>', 'content_edition' => null, 'slug' => 'colombie-la-difficile-reconciliation', 'headline' => false, 'homepage' => 'col-md-6', 'like' => (int) 848, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1398, 'homepage_order' => (int) 1626, 'original_url' => null, 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 5, 'person_id' => (int) 1326, 'post_type_id' => (int) 1, 'poster_attachment' => null, 'editions' => [], 'tags' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Tag) {} ], 'locations' => [], 'attachment_images' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'attachments' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'comments' => [], 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ '*' => true, 'id' => false ], '[dirty]' => [], '[original]' => [], '[virtual]' => [], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [], '[invalid]' => [], '[repository]' => 'Posts' } $relatives = [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 3493, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => true, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => null, 'readed' => null, 'subhead' => null, 'title' => 'Ukraine: nous n'avons rien vu venir', 'subtitle' => 'La guerre totale déclenchée en Ukraine par Vladimir Poutine et son entourage belliqueux a déjà fait des milliers de morts ukrainiens et russes. 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Je m’inclus modestement parmi ces derniers pour avoir couvert pour la RTS plusieurs événements antérieurs à cette crise. </p> <p>Flashback et premier acte: j’étais en Ossétie du Sud en 2008 lorsque le président géorgien Saakachvili a voulu récupérer militairement ce territoire. Ses habitants avaient été instrumentalisés, en même temps que ceux d’Abkhazie, par une indépendance orchestrée de Moscou à la chute de l’URSS. Le président géorgien espérait naïvement un soutien militaire occidental. Et comme les Ossètes détestent les Géorgiens pour des raisons que l’histoire et les grandes puissances leur ont imposées, ils ont cru brièvement à leur salut par la Russie. Tous les habitants de ce territoire que j’ai rencontrés se réjouissaient alors de leur nouveau passeport russe distribué largement. Pour eux, l’agresseur qui les bombardait était l’armée géorgienne. 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Quant à la majorité russe du reste de la Crimée, elle a accueilli avec satisfaction la réincorporation de la péninsule dans la Russie dont elle faisait partie jusqu’à son transfert en 1954 par Nikita Krouchtchev dans la république socialiste soviétique d’Ukraine.</p> <p>A l’époque, ce changement, commémorant un anniversaire historique, était sans importance puisque tout se passait au sein de l’URSS. Et les Russes de Crimée n’étaient pas mécontents de se débarrasser des vexations administratives que leur infligeait le gouvernement de Kiev. Quant aux Ukrainiens de Crimée, ils étaient eux-mêmes essentiellement russophones et n’ont guère réagi. Seuls les Tatars ont exprimé leurs craintes. Du coup leurs chaînes de télévision et radio de Bakhtchissaraï ont été aussitôt fermées par le nouveau pouvoir russe. A priori je continue de penser que la Crimée n’est pas plus ukrainienne que russe ou tatar. Néanmoins ce n’est pas aux chars de Poutine, ni à la parodie de référendum organisé en deux semaines, de décider de l’avenir de cette péninsule qui a vu le passage de plus de vingt-cinq peuples dans son histoire. Finalement l’Occident a condamné mollement.</p> <p>Troisième acte: le Donbass. Les difficultés économiques provoquées par le déclin des mines de charbon et l’indifférence du pouvoir central de Kiev ont pu être instrumentalisées facilement par Moscou. Même si le gouvernement ukrainien a commis de graves bévues, notamment en déclassant le statut de la langue russe, le problème n’est pas ethnique ou linguistique. Ici comme dans le reste du pays, un nombre infini de familles ont une double origine, russe et ukrainienne. Les affrontements sanglants qui s’y déroulent depuis 2014 ne sont qu’un moyen de plus du système Poutine pour faire pression sur un pays soupçonné de vouloir quitter la sphère d’influence russe. Les heurts violents avec l’armée ukrainienne ont pu donner l’impression qu’il y avait des torts des deux côtés. Et le gouvernement de Kiev a trainé les pieds pour accorder plus d’autonomie à cette région, comme le stipulaient les accords de Minsk de 2014 et 2015 que personne n’a respectés. Malaise et donc absence de réaction de l’Occident.</p> <p>On peut ajouter à tout cela la situation de la Transnistrie, cette bande de territoire, également autoproclamé indépendant au sein de la Moldavie, le long de la frontière ukrainienne (ce n’est pas un hasard). On y trouve évidemment des bases militaires russes. L’Occident s’en est désintéressé totalement, regardant cette affaire avec commisération, comme s’il s’agissait de la Syldavie de Tintin. La boucle est bouclée. L’Ukraine pouvait être attaquée, avec l’aide du vassal biélorusse dont le territoire complète une bonne partie du verrou.</p> <h3>Rêve de puissance eurasiatique</h3> <p>Les hommes vieux et paranoïaques qui encadrent Poutine croient maintenant rejouer une version de la «Grande guerre patriotique». Ces purs produits des services de sécurité soviétiques peuvent au passage museler enfin la Russie. Peu importe que leur pays soit devenu un «Etat-paria». Poutine a coupé définitivement les ponts avec l’Occident en prenant ses rêves de grande puissance eurasiatique pour la réalité. Il menace le monde d’une guerre atomique, ce que même les dirigeants soviétiques n’ont jamais osé faire en quarante-cinq ans de guerre froide. 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Ici chacun est dûment identifié par son origine prolétarienne: mécanicien, ouvrier automobile, etc. Et bien sûr l’effort ne doit pas être gratuit: on en profite pour amener au sommet une station météo, des appareils de transmissions radio et… un buste de Joseph Staline. L’équipe est encadrée toutefois par un jeune homme au regard franc et à la profession moins prolétaire, le peintre-sculpteur sibérien Evgueni Abalakov, un homme qui deviendra avec son frère Vitali l’un des plus grands alpinistes soviétiques au travers de la <em>Société du tourisme prolétarien</em>.</p> <h3><strong>L’alpinisme: une mission d’Etat</strong></h3> <p>Evgueni est une force de la nature. Alors que ses compagnons sont épuisés par le froid (- 45° C) et l’altitude (plus de 7000 m.), il fait des allers et retours pour poser des cordes ou croquer sur un cahier des vues des sommets: le pic Guépéou (ancêtre du KGB…) ou le <em>Mur de l’Armée rouge des paysans et des ouvriers</em>. Chacune des expéditions de cette époque est une victoire humaine et politique dont on cache soigneusement les tragédies: engelures, avalanches, crevasses et infections ont leur compte de victimes mortelles. Le matériel est sommaire, même pour les standards de l’époque, mais les alpinistes font la une des journaux soviétiques. Leurs photos apparaissent en première page avec des visages blancs de crème lanoline, corde de chanvre à l’épaule, lunettes noires et lèvres gercées. Ils accomplissent un devoir, une mission d’Etat: «L’enjeu de l’ascension du pic Staline, c’était de remplacer Dieu par le marxisme, sur l’autel de la Terre»<em>,</em> écrit Cédric Gras. C’est ainsi que les sommets se succèdent: pic Staline, pic Lénine, pic du Communisme, pic Karl Marx…</p> <h3><strong>Un Suisse au pays des Soviets</strong></h3> <p>L’auteur a épluché les archives soviétiques et exploré sur place les terrains de conquête des alpinistes soviétiques de l’époque. Ces sommets étaient négligés par leurs confrères occidentaux, intéressés surtout par les Alpes et l’Himalaya. Avec de rares exceptions toutefois, celles de quelques Suisses. L’écrivaine Ella Maillart aurait aimé participer à l’une de ces ascensions, comme elle le mentionne dans <em>Des monts célestes aux sables rouges,</em> que cite Cédric Gras. Sans succès toutefois. Sa lucidité face au stalinisme la rendait probablement suspecte. Par contre le militant communiste soleurois Lorenz Saladin parvient à s’infiltrer dans le cercle très fermé des alpinistes soviétiques. Il devient un ami inséparable des deux frères Abalakov et de leurs compagnons de cordée. A ses talents de montagnard expérimenté, le Suisse en ajoute un autre précieux, il est un photographe hors-pair. Ses expéditions au pays des Soviets se succèdent: Caucase, Pamir, Altaï, Tien-Shan. Ses clichés, disparus pendant de nombreuses années, sont époustouflants et ne se limitent pas aux montagnes. Ils documentent abondamment les populations de ces régions asiatiques et sont visibles au <em>Musée alpin suisse</em> de Berne. Pour raconter au passage les aventures de l’alpiniste suisse, Cédric Gras s’inspire du livre de l’émouvante Annemarie Schwarzenbach : <em>Lorenz Saladin, ein Leben für die Berge</em>. Cette autre grande écrivaine voyageuse suisse avait été impressionnée par le Soleurois et avait cherché, autant que possible à son époque, à en retrouver le parcours, en se rendant même jusqu’à Moscou pour cela.</p> <p>Lorenz Saladin finit pourtant tragiquement. En 1936, il participe à une expédition délicate dans le Tien-Shan. C’est un massif très septentrional et en raison des difficultés administratives d’obtention de son visa, le départ de la colonne est retardé jusqu’à fin août. Trop tard car les conditions météorologiques sont alors cauchemardesques. Les accidents se succèdent lors de la descente du sommet du Khan Tengri. Vitali Abalakov et d’autres compagnons de cordée perdent plusieurs doigts des mains et des pieds. Il faut encore zigzaguer vingt kilomètres entre les crevasses et les moraines du glacier Inyltchek. Lorenz Saladin, malgré son équipement de qualité «suisse», subit lui aussi de graves engelures. Ses doigts sont noirs et puent la charogne. Vitali tente de le soigner en ouvrant au couteau les chairs mortes qu’il désinfecte avec le pétrole des lampes. Le 17 septembre 1936, l’alpiniste communiste suisse meurt dans d’atroces souffrances, probablement de septicémie.</p> <h3><strong>Victimes de la Grande Terreur</strong></h3> <p>Une année plus tard, inévitablement, le couperet de la <em>Grande Terreur</em> finit par tomber aussi sur les alpinistes soviétiques comme sur le reste de la société. Une purge du NKVD vise la prétendue <em>Organisation contre-révolutionnaire facho-terroriste des alpinistes et randonneurs</em>… Le 4 février 1938, Vitali Abalakov est arrêté chez lui à Moscou. Il est torturé puis accusé d’avoir participé à une tentative d’assassinat du camarade Staline lors du défilé du Premier Mai. Comme tout le monde il avoue n’importe quoi et dénonce n’importe qui. Le défunt Lorenz Saladin devient un espion suisse pour lequel il aurait travaillé. On ne saura jamais pourquoi l’autre frère Abalakov, Evgueni, n’a jamais été inquiété, ni pourquoi Vitali est finalement libéré deux ans plus tard.</p> <p>Puis la <em>Grande guerre patriotique</em> utilise les compétences des rares alpinistes ayant échappé au goulag, comme Evgueni Abalakov. Grâce à eux, en 1943, les troupes allemandes sont chassées du Mont Elbrouz, le sommet de l’Europe. Mais ce prodigieux alpiniste, qui rêvait d’être le premier à escalader un jour l’Everest, meurt piteusement en 1948 dans sa salle de bain, intoxiqué par le chauffe-eau à gaz, une version que sa veuve et son fils réfuteront toute leur vie, sans preuve.</p> <p>Pendant ce temps, Vitali, partiellement handicapé, développe du matériel d’escalade. Mais malgré ses amputations, il cède à nouveau au virus de la montagne. Avec une force de volonté hors du commun, il reprend du service en serrant les dents lorsque ses moignons sont trop douloureux. Il est nommé à la tête de la section d’alpinisme du club sportif <em>Spartak</em> et mène avec une discipline de fer une succession d’expéditions. Son dernier sommet, le 30 août 1956, est le pic de la Victoire, le seul 7000 d’URSS encore vierge. La montagne est face au Khan Tengri qui lui a couté ses doigts et la moitié d’un pied trente ans plus tôt. 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C’est la journée de nettoyage des bisses, ces canaux d’irrigation centenaires qu’on appelle ici des Suonen. Il faut les dégager des branches et des pierres qui s’y sont accumulées pendant l’hiver. Le système de gestion des bisses au travers de «consortages» est le thème de la nouvelle exposition du <a href="https://www.musee-des-bisses.ch/" target="_blank" rel="noopener">Musée valaisan des Bisses</a>, dès le 24 avril à Ayent.</p> <p>Ici à Ausserberg, c’est maintenant la pause de midi. Chacun s’assied sur la pente face au soleil. Les installations industrielles de Lonza, loin en contrebas, sont bien visibles et permettent d’imaginer la production frénétique des vaccins contre le covid-19. Mais en altitude, on vit à un rythme hors du temps.</p> <p>«S’il n’y avait pas de bisses, Ausserberg n’existerait pas», me dit un des membres du groupe, en me tendant une tranche de viande séchée.</p> <h3><strong>On va «chercher l’eau»</strong></h3> <p>Les hommes sortent leur pain et un morceau de lard. On boit du thé chaud: ce n’est pas le Bas-Valais! Vient ensuite le moment symbolique. On dit alors qu’on va «chercher l’eau». En fait, deux hommes longent d’abord le canal en tunnel creusé en 1970 pour éviter un des passages très aériens du vieux bisse Niwärch. Ils atteignent en amont la prise d’eau encore enneigée puis ouvrent les vannes. En aval du tunnel, un autre groupe s’affaire de même sur un deuxième système de vannes. Ce n’est pas simple car les volants de manœuvre sont grippés par l’hiver. Un des préposés compte attentivement sur le pas de vis le nombre de filets à ne pas dépasser lorsque la vanne remonte et ouvre le passage de l’eau. 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Le troisième collier définit précisément la quantité d’eau à laquelle chaque membre du consortage a droit en fonction de ses prairies. Depuis les premiers documents du XVè siècle qui prouvent l’existence des bisses en Valais, le système a quand même passablement évolué, même s’il garde sa philosophie communautaire originelle. Aujourd’hui, l’intervention financière ou logistique des communes, voire du canton, est fréquente. Et le branchement des bisses sur des systèmes modernes d’arrosage est maintenant courant.</p> <p>A Ausserberg, il n’y a plus que vingt-cinq agriculteurs à temps partiel et une agricultrice à plein temps. Mais dans ce village, comme ailleurs dans le canton, tout le monde est attaché à ses bisses. On en dénombre actuellement 188 en Valais, totalisant 742 km. Tous ne sont toutefois pas fonctionnels pour l’agriculture. De nombreux bisses ont acquis une vocation touristique et sont longés par des sentiers de randonnée très fréquentés en été. Les bisses du Torrent-Neuf à Savièse ou du Roh à Crans-Montana attirent en été de nombreux touristes qui s’avancent sur des ponts suspendus impressionnants.</p> <h3><strong>Le «consortage»: source d’inspiration</strong></h3> <p>Le système du consortage est maintenant observé sous un angle nouveau, comme le présente l’exposition du Musée valaisan des Bisses. «C’est une façon de s’associer, comme un club qui va gérer la ressource, explique Gaëtan Morard, directeur scientifique du musée. L’eau est un bien commun mais il faut déterminer qui gère cette ressource et comment on fait respecter le règlement autour de son utilisation. Finalement est-ce que les usagers ne sont pas les mieux placés pour la gérer, l’entretenir et résoudre les conflits?»</p> <p>En tant qu’ethno-biologiste et spécialiste en permaculture, Gaëtan Morard rappelle que dans l’histoire de l’humanité, l’accès à l’eau a souvent été source de conflits: «Ce problème va sûrement se reproduire. 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Ils libèrent ensuite de l’eau de fonte pendant l’été, justement lorsque les coteaux ont besoin d’être irrigués en raison de leur sécheresse extrême. «A l’avenir, explique Gaëtan Morard, il y aura toujours autant d’eau mais sous une autre forme. On aura en hiver plus de pluie et moins de neige. La répartition saisonnière de l’eau va se modifier, avec des sécheresses plus intenses en été et des événements extrêmes plus fréquents.»</p> <p>Si le système des bisses parvient à s’adapter aux changements, comme il l’a fait jusqu’à présent, il représenterait alors non seulement un modèle intéressant d’organisation économique communautaire locale mais aussi un moyen de limiter les dégâts climatiques en régions de montagne. 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Les jeunes rescapés racontent leur histoire avec l’aide d’un interprète bénévole. Comme tant d’autres en ce moment, ils ont fui l’Afghanistan, où la guerre est sans fin entre l’armée gouvernementale, les islamistes talibans et de nombreuses factions rivales politico-maffieuses. Malheureusement, dans la violence de la traversée d’une autre frontière, entre la Bosnie-Herzégovine et la Croatie, ils ont perdu de vue leurs parents et ont décidé de continuer sans eux. Parmi les migrants qui arrivent ces derniers mois ici à Briançon, les nombreuses histoires de violences perpétrées par les gardes-frontières croates font froid dans le dos.</p> <p>Le réseau solidaire organise rapidement une prise en charge des trois adolescents afin de les amener à Paris où des amis de leur famille devraient les recevoir. Tout le monde espère que leurs parents les y retrouveront dans un bref délai mais pour l’instant les enfants n’ont pu reprendre aucun contact téléphonique avec eux.</p> <h3><strong>Afghans et Iraniens</strong></h3> <p>Depuis son ouverture il y a trois ans, le Refuge solidaire de Briançon a déjà vu passer plus de dix mille personnes pour des séjours en général très courts, rarement plus de trois à quatre jours. Il n’y a maintenant plus beaucoup d’Africains de l’ouest, comme c’était le cas jusqu’à l’an dernier. Actuellement ce sont surtout des familles afghanes (souvent de la minorité hazara) et kurdes iraniennes qui ont parfois derrière elles plusieurs années de voyage hasardeux et des séjours horribles dans les camps des îles grecques. Et même ici, rien n’est joué. La gendarmerie effectue régulièrement des rafles dans la gare de Briançon, comme celle à laquelle j’ai pu assister. Les migrants qui s’apprêtaient à prendre le train sont reconduits à la frontière. 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Quand on ne veut pas accueillir les gens, ça se passe mal, continue Philippe Wyon de son habituel ton posé, plus proche du guide montagnard que du militant. Mais ici à Briançon, il n’y a jamais eu de problème. Ce n’est pas Calais, on est sur du flux, les exilés n’ont aucun désir de rester, alors que Calais, c’est une impasse.»</p> <p>Le maire de Briançon est aussi président de la Communauté de communes et donc doté d’un pouvoir important. Membre du parti Les Républicains, il a battu au second tour des élections législatives en juin dernier son prédécesseur à la suite d’une division des listes de gauche. Elles ont refusé de fusionner et n’ont pas fait le poids face à la liste unique de droite.</p> <h3><strong>Image touristique menacée</strong></h3> <p>L’attitude du maire est incompréhensible pour beaucoup de monde et on se demande si ce n’est pas juste un coup d’esbroufe pour rallier les sympathies d’extrême-droite et propulser sa carrière. La fermeture du refuge ne faisait même pas partie de son programme électoral. La ville de Briançon est reliée par télécabine à Serre Chevalier. C’est une station de ski en hiver et une base de randonnée en été. Une bonne partie de son électorat travaille dans le commerce et le tourisme, des Briançonnais qui n’ont pas du tout envie de voir ternir l’image de leur ville par des familles de migrants dormant dans la rue ou la gare de départ de la télécabine.</p> <p>La menace du maire a déclenché de vives réactions à travers toute la France, emmenées par les plus importantes associations humanitaires du pays: Abbé Pierre, Emmaüs, Médecins du Monde. Une pétition de protestation a recueilli en quelques semaines plus de 37 000 signatures à la tête desquelles se trouvent celles de Mgr Xavier Malle, évêque de Gap, ainsi que du sociologue Edgar Morin.</p> <p>La trêve hivernale qui commence le 1<sup>er</sup> novembre devrait, selon la règle, empêcher de mettre à la rue les personnes hébergées, mais ce n’est qu’un répit. Les membres du collectif qui gère le refuge espèrent en profiter pour faire passer à la mairie une proposition de commission qui étudierait des solutions pour remplacer l’actuel bâtiment vétuste car c’est une ancienne caserne des CRS totalement inappropriée à ses fonctions actuelles. En attendant il reste à savoir qui va payer la facture du fuel pour le chauffage qui était jusqu’à présent prise en charge par la mairie. 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Avec force mimique, Luis Enrique explique qu’un soir un groupe de guérilleros vient frapper à la porte de sa ferme pour lui demander de recharger quatre téléphones: «Je ne pouvais pas dire non… ». Mais quelques heures plus tard, il entend des pas: «C’était les paracos!» (milices paramilitaires de droite). Immédiatement, il arrache les téléphones de leurs prises, les met dans un sac en plastique et les enterre dans sa cuisine. Les miliciens entrent et ne découvrent rien de suspect. Quelques heures passent et les guérilleros reviennent. Il extrait alors de sa cachette le sac de téléphones pour les remettre à charger en tremblant. Quinze ans plus tard, il raconte cette anecdote avec humour mais sur le moment il savait qu’il avait risqué deux fois sa vie.
Localisation de la sous-région des Montes de Maria
Population prise en otage
Les Montes de Maria ne sont pas une région productrice de coca ou de marijuana. C’est toutefois un couloir stratégique vers la côte caraïbe: exportation de drogue et importation d’armes. Et depuis des décennies, les petits paysans de ces collines offrent une résistance aux projets de monoculture (huile de palme, teck) et aux velléités d’annexion des terres par les grands éleveurs de bétail. Dans les années 90 ces derniers font appel à de gros bras pour écraser les voix paysannes. De leur côté, plusieurs mouvements de guérillas (FARC, ELN, EPL, PRT, CRS, ...) croient trouver ici le terreau dont ils sont friands sans pour autant demander l’avis des paysans qui ne les voient pas arriver d’un bon œil. Et c’est le cercle infernal qui commence: une guerre de positions acharnée qui prend la population civile en otage. Toute personne obligée d’aider l’un ou l’autre des groupes armés est immédiatement considérée comme complice de l’adversaire et en général exécutée. Puis les soldats entrent dans la danse avec une option marquée en faveur des paramilitaires qui sont pourtant responsables de la majorité des massacres.
Dans les montes de Maria, quelques maisons conservent leur toit de palme traditionnel. © Yves Magat
A partir de 2005, la guérilla est ici décimée par l’armée puis un accord est signé par le gouvernement de Alvaro Uribe avec les paramilitaires qui acceptent de rendre les armes. Des programmes sociaux sont mis en place et la violence disparaît peu à peu. Mais les plaies sont longues à cicatriser.
Hector Gazabon a vécu de près ces événements. Journaliste dans une radio locale de San Juan au plus fort de la violence, il voit un jour des paramilitaires entrer dans le studio et abattre sous ses yeux en direct l’invité qu’il interviewait. Aujourd’hui, il agit surtout comme médiateur dans le processus de réconciliation en cours:
«De nombreux villages sont encore catalogués de gauche ou de droite même si tout le monde sait qu’il s’agissait juste d’obéir à un ordre reçu, le fusil dans le dos. Il fallait donner des aliments ou de l‘eau à n’importe quel groupe armé qui se présentait. Les relations familiales ont été brisées, les enfants ont grandi avec des traumatismes, beaucoup de monde est encore affecté psychologiquement par le conflit. Comme les gens n’ont toujours pas eu l’occasion de passer par un processus de pardon et de réconciliation, ils portent en eux leurs peines et leur haine chargée de doutes.»
Hector Gazabon agit comme médiateur dans le processus de réconciliation. © Yves Magat
Mais Hector Gazabon est malgré tout optimiste: «Peu à peu, la société civile, avec l’aide d’organisations paysannes ou de défense des droits humains, nous a déjà permis d’atténuer les tensions et d’avancer dans un processus de réconciliation sans attendre l’appui des autorités. Des rencontres entre ex-guérilleros et ex-paramilitaires ont déjà eu lieu; et même avec des membres des forces armées qui ont aussi participé à ce cycle de violence.»
Commission de la vérité
C’est dans ce contexte difficile que doit agir la Commission de la vérité dont le mandat d’enquête a officiellement commencé le 28 novembre dernier. Sur le modèle sud-africain, elle a trois ans pour tenter de faire la lumière sur les exactions commises en Colombie pendant des décennies. C’est évidemment mission impossible mais c’est une démarche symboliquement forte et importante pour le pays, deux ans après la signature des accords de paix avec la guérilla des FARC. D’ailleurs, Hector Gazabon se montre moins critique que d’autres sur ces accords: «Ils ne sont pas appréciés à leur juste valeur. Ils ont quand même permis de mettre fin à 60 ans de guerre et de saisir dix mille fusils qui n’ont plus tiré une seule balle. Les commandants des FARC, en tout cas ici dans les Montes de Maria, font preuve de bonne volonté mais c’est difficile car ils ont toujours dans le cerveau le chip de la guerre. Quant aux simples guérilleros, ils se demandent encore comment va les recevoir la société civile et comment ils vont trouver un emploi. Et surtout ils avaient en tête la volonté de réaliser des transformations sociales par les armes alors que maintenant ils se trouvent confrontés au quotidien de toute famille colombienne», ajoute Hector Gazabon.
De petites villes dans un milieu rural caractérisent les Montes de Maria. © Yves Magat
Les réticences de l’actuel président Iván Duque à l’égard d’accords qu’il estime trop généreux pour la guérilla ne favorisent pas ce processus. Et le gouvernement colombien est toujours confronté à deux carences fondamentales qui rendent difficile la pacification du pays: l’absence de l’état dans de nombreux territoires abandonnés par les FARC et reconquis par des groupes armés criminels ainsi que la croissance de la production de cocaïne génératrice de milliards de dollars capables de corrompre tout et n’importe qui.
Des femmes parlent pour revivre
L’association Narrar para vivir (Raconter pour vivre) propose de la formation professionnelle en couture et un soutien psychologique à 840 femmes des Montes de Maria. Elles ont toutes perdu un mari, un père, un fils ou un autre membre de leur famille entre 1994 et 2005. Plusieurs ont subi des violences sexuelles ou ont dû fuir leur village, comme huit millions d’autres personnes déplacées en Colombie à la suite d’exactions ou de menaces des milices paramilitaires et des différentes guérillas. Marise Carbona fait partie des quatre premières femmes qui ont intégré l’association à sa création en l’an 2000:
«J’étais brisée car on venait de tuer deux de mes oncles le même jour. Mon gendre a dû s’enfuir. Ce fut un traumatisme. On avait tellement peur qu’on ne dormait plus, on ne mangeait plus. Si on sortait de chez soi, on craignait d’être assassinés. On est tous tombés en dépression.»
Marise Carbona rencontre alors d’autres femmes dans la même situation. «Nous sommes une organisation de femmes qui s’entraident en racontant ce qui leur est arrivé et qui se forment sur le plan professionnel», explique-t-elle. Grâce à l’intervention personnelle de l’ancien président Santos et à l’action de la fondatrice de l’association Mayerlis Angerita Robles, un atelier de couture est installé dans chacune des quinze communes des Montes de Maria. La vente des travaux de couture permet à ces femmes de subsister tant bien que mal.
Marise Carbona a pu recommencer à vivre grâce à une association locale de femmes. © Yves Magat
Violences sexuelles
La responsable de la section locale de San Juan Nepomucena, Eudalia Escalante Pinto, est aussi revenue de loin: «On n’allait pas jouer aux pauvres victimes. Nous nous considérons comme des survivantes du conflit armé.» Plusieurs femmes se sont formées en psychologie et en droit pour aider les autres qui n’osent pas encore parler de ce qui leur est arrivé. «Mais nous savons qu’elles finiront par s’exprimer et s’en sortir car une femme qui parle peut guérir de ses traumatismes de la guerre», ajoute-t-elle. Ce n’est toutefois pas toujours facile de parler de viol dans une société rurale plutôt conservatrice et machiste. «Moi j’ai été victime de violences sexuelles, explique Eudalia Escalante Pinto, mais comme j’ai raconté mon histoire des milliers de fois, je peux maintenant en parler sans douleur et sans plus verser une seule larme!»
Chronologie d’une guerre
1964: naissance des principaux mouvements de contestation en réaction aux attaques contre les leaders paysans. Certains se transforment en guérillas comme les FARC, l’ELN et d’autres.
1970: naissance de la guérilla urbaine du M-19 après des élections présidentielles entachées de fraudes.
1976: montée en puissance du cartel de Medellín dirigé par Pablo Escobar.
1980: le M-19 prend en otages des diplomates pendant 61 jours à l’ambassade de République dominicaine, dont l’ambassadeur de Suisse.
1982: début des actions des milices paramilitaires liées aux grands propriétaires fonciers.
1985: extermination des membres de l’Union patriotique, un parti politique qui regroupait d’anciens guérilleros ayant accepté de rendre les armes.
1997: naissance officielle des milices paramilitaires AUC
1999: le président Pastrana accorde aux FARC une zone sanctuaire de la surface de la Suisse en échange d’un projet d’accord de paix (jusqu’en 2002).
2002: enlèvement de la candidate présidentielle Ingrid Betancourt, libérée par l’armée en 2008.
2003: début des négociations avec les paramilitaires. 30'000 acceptent de rendre les armes.
2012: début des négociations du gouvernement Santos avec les FARC à Oslo et La Havane.
2016 26 septembre: signature des accords de paix à Carthagène par le président Santos et le chef des FARC «Timochenko».
2016 2 octobre : Les accords de paix sont refusés en référendum national par 50,21% des voix.
2016 30 novembre: le parlement colombien accepte une nouvelle version des accords de paix après quelques retouches cosmétiques. 12'500 guérilleros commencent à rendre leurs armes et sont regroupés dans des zones de protection avec l’aide du CICR et de l’ONU.
2018 17 juin: Iván Duque, dauphin de Uribe et très critique à l’égard des accords de paix, est élu président de la République.
1er janvier 2016 au 17 novembre 2018: 486 responsables d’organisations indigènes, paysannes ou de défense des droits humains ont été assassinés en Colombie. (Source: Indepaz, Institut d’études pour le développement et la paix)
Statistiques du conflit (1964-2018)
Source: Unité du gouvernement colombien pour l’aide aux victimes
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Quelques heures passent et les guérilleros reviennent. Il extrait alors de sa cachette le sac de téléphones pour les remettre à charger en tremblant. Quinze ans plus tard, il raconte cette anecdote avec humour mais sur le moment il savait qu’il avait risqué deux fois sa vie.</p><p style="text-align: center;"><img class="img-responsive img-center " src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1543830145_120126_mdmmap.jpg" width="318" height="490"></p><h4 style="text-align: center;"><a href="https://ccai-colombia.org/2012/06/09/consolidacion-y-restitucion-de-tierras-tensiones-crecientes-en-montes-de-maria/">Localisation de la sous-région des Montes de Maria</a><br><br></h4><h3 style="text-align: center;">Population prise en otage</h3><p>Les Montes de Maria ne sont pas une région productrice de coca ou de marijuana. C’est toutefois un couloir stratégique vers la côte caraïbe: exportation de drogue et importation d’armes. Et depuis des décennies, les petits paysans de ces collines offrent une résistance aux projets de monoculture (huile de palme, teck) et aux velléités d’annexion des terres par les grands éleveurs de bétail. Dans les années 90 ces derniers font appel à de gros bras pour écraser les voix paysannes. De leur côté, plusieurs mouvements de guérillas (FARC, ELN, EPL, PRT, CRS, ...) croient trouver ici le terreau dont ils sont friands sans pour autant demander l’avis des paysans qui ne les voient pas arriver d’un bon œil. Et c’est le cercle infernal qui commence: une guerre de positions acharnée qui prend la population civile en otage. Toute personne obligée d’aider l’un ou l’autre des groupes armés est immédiatement considérée comme complice de l’adversaire et en général exécutée. Puis les soldats entrent dans la danse avec une option marquée en faveur des paramilitaires qui sont pourtant responsables de la majorité des massacres. <br></p><h4 style="text-align: center;"><img class="img-responsive img-center " src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1543829877_maison.jpg">Dans les montes de Maria, quelques maisons conservent leur toit de palme traditionnel. © Yves Magat<br></h4><br><p>A partir de 2005, la guérilla est ici décimée par l’armée puis un accord est signé par le gouvernement de Alvaro Uribe avec les paramilitaires qui acceptent de rendre les armes. Des programmes sociaux sont mis en place et la violence disparaît peu à peu. Mais les plaies sont longues à cicatriser.</p><p>Hector Gazabon a vécu de près ces événements. Journaliste dans une radio locale de San Juan au plus fort de la violence, il voit un jour des paramilitaires entrer dans le studio et abattre sous ses yeux en direct l’invité qu’il interviewait. Aujourd’hui, il agit surtout comme médiateur dans le processus de réconciliation en cours: <br></p><blockquote><p><em>«De nombreux villages sont encore catalogués de gauche ou de droite même si tout le monde sait qu’il s’agissait juste d’obéir à un ordre reçu, le fusil dans le dos. Il fallait donner des aliments ou de l‘eau à n’importe quel groupe armé qui se présentait. Les relations familiales ont été brisées, les enfants ont grandi avec des traumatismes, beaucoup de monde est encore affecté psychologiquement par le conflit. Comme les gens n’ont toujours pas eu l’occasion de passer par un processus de pardon et de réconciliation, ils portent en eux leurs peines et leur haine chargée de doutes.»</em></p></blockquote><h4 style="text-align: center;"><img class="img-responsive img-center " src="https://bonpourlatete.comhttps://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1543829909_hector.jpg">Hector Gazabon agit comme médiateur dans le processus de réconciliation. © Yves Magat<br></h4><p>Mais Hector Gazabon est malgré tout optimiste: «Peu à peu, la société civile, avec l’aide d’organisations paysannes ou de défense des droits humains, nous a déjà permis d’atténuer les tensions et d’avancer dans un processus de réconciliation sans attendre l’appui des autorités. 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Les commandants des FARC, en tout cas ici dans les Montes de Maria, font preuve de bonne volonté mais c’est difficile car ils ont toujours dans le cerveau le chip de la guerre. Quant aux simples guérilleros, ils se demandent encore comment va les recevoir la société civile et comment ils vont trouver un emploi. Et surtout ils avaient en tête la volonté de réaliser des transformations sociales par les armes alors que maintenant ils se trouvent confrontés au quotidien de toute famille colombienne», ajoute Hector Gazabon.</p><h4 style="text-align: center;"><img class="img-responsive img-center " src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1543829951_charrette.jpg">De petites villes dans un milieu rural caractérisent les Montes de Maria. © Yves Magat<br></h4><p>Les réticences de l’actuel président Iván Duque à l’égard d’accords qu’il estime trop généreux pour la guérilla ne favorisent pas ce processus. Et le gouvernement colombien est toujours confronté à deux carences fondamentales qui rendent difficile la pacification du pays: l’absence de l’état dans de nombreux territoires abandonnés par les FARC et reconquis par des groupes armés criminels ainsi que la croissance de la production de cocaïne génératrice de milliards de dollars capables de corrompre tout et n’importe qui.</p><p></p><hr><p></p><h3>Des femmes parlent pour revivre</h3><p>L’association <a href="http://narrarparavivir.org/">Narrar para vivir</a> (Raconter pour vivre) propose de la formation professionnelle en couture et un soutien psychologique à 840 femmes des Montes de Maria. Elles ont toutes perdu un mari, un père, un fils ou un autre membre de leur famille entre 1994 et 2005. Plusieurs ont subi des violences sexuelles ou ont dû fuir leur village, comme huit millions d’autres personnes déplacées en Colombie à la suite d’exactions ou de menaces des milices paramilitaires et des différentes guérillas. Marise Carbona fait partie des quatre premières femmes qui ont intégré l’association à sa création en l’an 2000: <strong><br></strong></p><blockquote><p><strong><em>«J’étais brisée car on venait de tuer deux de mes oncles le même jour. Mon gendre a dû s’enfuir. Ce fut un traumatisme. On avait tellement peur qu’on ne dormait plus, on ne mangeait plus. Si on sortait de chez soi, on craignait d’être assassinés. On est tous tombés en dépression.» </em></strong><br></p></blockquote><p>Marise Carbona rencontre alors d’autres femmes dans la même situation. «Nous sommes une organisation de femmes qui s’entraident en racontant ce qui leur est arrivé et qui se forment sur le plan professionnel», explique-t-elle. Grâce à l’intervention personnelle de l’ancien président Santos et à l’action de la fondatrice de l’association Mayerlis Angerita Robles, un atelier de couture est installé dans chacune des quinze communes des Montes de Maria. La vente des travaux de couture permet à ces femmes de subsister tant bien que mal.</p><h4 style="text-align: center;"><img class="img-responsive img-center " src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1543830000_couture.jpg">Marise Carbona a pu recommencer à vivre grâce à une association locale de femmes. © Yves Magat<br></h4><h3>Violences sexuelles</h3><p>La responsable de la section locale de San Juan Nepomucena, Eudalia Escalante Pinto, est aussi revenue de loin: «On n’allait pas jouer aux pauvres victimes. Nous nous considérons comme des survivantes du conflit armé.» Plusieurs femmes se sont formées en psychologie et en droit pour aider les autres qui n’osent pas encore parler de ce qui leur est arrivé. «Mais nous savons qu’elles finiront par s’exprimer et s’en sortir car une femme qui parle peut guérir de ses traumatismes de la guerre», ajoute-t-elle. Ce n’est toutefois pas toujours facile de parler de viol dans une société rurale plutôt conservatrice et machiste. «Moi j’ai été victime de violences sexuelles, explique Eudalia Escalante Pinto, mais comme j’ai raconté mon histoire des milliers de fois, je peux maintenant en parler sans douleur et sans plus verser une seule larme!»</p><p></p><hr><p></p><h2>Chronologie d’une guerre</h2><h4><strong>1964</strong>: naissance des principaux mouvements de contestation en réaction aux attaques contre les leaders paysans. Certains se transforment en guérillas comme les FARC, l’ELN et d’autres.</h4><h4><strong>1970</strong>: naissance de la guérilla urbaine du M-19 après des élections présidentielles entachées de fraudes.</h4><h4><strong>1976</strong>: montée en puissance du cartel de Medellín dirigé par Pablo Escobar.</h4><h4><strong>1980</strong>: le M-19 prend en otages des diplomates pendant 61 jours à l’ambassade de République dominicaine, dont l’ambassadeur de Suisse.</h4><h4><strong>1982</strong>: début des actions des milices paramilitaires liées aux grands propriétaires fonciers.</h4><h4><strong>1985</strong>: extermination des membres de l’Union patriotique, un parti politique qui regroupait d’anciens guérilleros ayant accepté de rendre les armes.</h4><h4><strong>1997</strong>: naissance officielle des milices paramilitaires AUC</h4><h4><strong>1999</strong>: le président Pastrana accorde aux FARC une zone sanctuaire de la surface de la Suisse en échange d’un projet d’accord de paix (jusqu’en 2002).</h4><h4><strong>2002</strong>: enlèvement de la candidate présidentielle Ingrid Betancourt, libérée par l’armée en 2008.</h4><h4><strong>2003</strong>: début des négociations avec les paramilitaires. 30'000 acceptent de rendre les armes.</h4><h4><strong>2012</strong>: début des négociations du gouvernement Santos avec les FARC à Oslo et La Havane.</h4><h4><strong>2016</strong> <em>26 septembre</em>: signature des accords de paix à Carthagène par le président Santos et le chef des FARC «Timochenko».</h4><h4><strong>2016</strong> <em>2 octobre</em> : Les accords de paix sont refusés en référendum national par 50,21% des voix.</h4><h4><strong>2016 </strong><em>30 novembre</em>: le parlement colombien accepte une nouvelle version des accords de paix après quelques retouches cosmétiques. 12'500 guérilleros commencent à rendre leurs armes et sont regroupés dans des zones de protection avec l’aide du CICR et de l’ONU.</h4><h4><strong>2018</strong> <em>17 juin</em>: Iván Duque, dauphin de Uribe et très critique à l’égard des accords de paix, est élu président de la République.</h4><h4><strong>1er janvier 2016 au 17 novembre 2018</strong>: 486 responsables d’organisations indigènes, paysannes ou de défense des droits humains ont été assassinés en Colombie. 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Et le gouvernement colombien est toujours confronté à deux carences fondamentales qui rendent difficile la pacification du pays: l’absence de l’état dans de nombreux territoires abandonnés par les FARC et reconquis par des groupes armés criminels ainsi que la croissance de la production de cocaïne génératrice de milliards de dollars capables de corrompre tout et n’importe qui.</p><p></p><hr><p></p><h3>Des femmes parlent pour revivre</h3><p>L’association <a href="http://narrarparavivir.org/">Narrar para vivir</a> (Raconter pour vivre) propose de la formation professionnelle en couture et un soutien psychologique à 840 femmes des Montes de Maria. Elles ont toutes perdu un mari, un père, un fils ou un autre membre de leur famille entre 1994 et 2005. Plusieurs ont subi des violences sexuelles ou ont dû fuir leur village, comme huit millions d’autres personnes déplacées en Colombie à la suite d’exactions ou de menaces des milices paramilitaires et des différentes guérillas. 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Certains se transforment en guérillas comme les FARC, l’ELN et d’autres.</h4><h4><strong>1970</strong>: naissance de la guérilla urbaine du M-19 après des élections présidentielles entachées de fraudes.</h4><h4><strong>1976</strong>: montée en puissance du cartel de Medellín dirigé par Pablo Escobar.</h4><h4><strong>1980</strong>: le M-19 prend en otages des diplomates pendant 61 jours à l’ambassade de République dominicaine, dont l’ambassadeur de Suisse.</h4><h4><strong>1982</strong>: début des actions des milices paramilitaires liées aux grands propriétaires fonciers.</h4><h4><strong>1985</strong>: extermination des membres de l’Union patriotique, un parti politique qui regroupait d’anciens guérilleros ayant accepté de rendre les armes.</h4><h4><strong>1997</strong>: naissance officielle des milices paramilitaires AUC</h4><h4><strong>1999</strong>: le président Pastrana accorde aux FARC une zone sanctuaire de la surface de la Suisse en échange d’un projet d’accord de paix (jusqu’en 2002).</h4><h4><strong>2002</strong>: enlèvement de la candidate présidentielle Ingrid Betancourt, libérée par l’armée en 2008.</h4><h4><strong>2003</strong>: début des négociations avec les paramilitaires. 30'000 acceptent de rendre les armes.</h4><h4><strong>2012</strong>: début des négociations du gouvernement Santos avec les FARC à Oslo et La Havane.</h4><h4><strong>2016</strong> <em>26 septembre</em>: signature des accords de paix à Carthagène par le président Santos et le chef des FARC «Timochenko».</h4><h4><strong>2016</strong> <em>2 octobre</em> : Les accords de paix sont refusés en référendum national par 50,21% des voix.</h4><h4><strong>2016 </strong><em>30 novembre</em>: le parlement colombien accepte une nouvelle version des accords de paix après quelques retouches cosmétiques. 12'500 guérilleros commencent à rendre leurs armes et sont regroupés dans des zones de protection avec l’aide du CICR et de l’ONU.</h4><h4><strong>2018</strong> <em>17 juin</em>: Iván Duque, dauphin de Uribe et très critique à l’égard des accords de paix, est élu président de la République.</h4><h4><strong>1er janvier 2016 au 17 novembre 2018</strong>: 486 responsables d’organisations indigènes, paysannes ou de défense des droits humains ont été assassinés en Colombie. (Source: <a href="http://www.indepaz.org.co/">Indepaz, Institut d’études pour le développement et la paix</a>)</h4><h3 style="text-align: center;">Statistiques du conflit (1964-2018)</h3><h4 style="text-align: center;"><img class="img-responsive img-center " src="https://bonpourlatete.comhttps://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1543830023_statistique.png" width="852" height="644"> Source: <a href="https://www.unidadvictimas.gov.co/es/registro-unico-de-victimas-ruv/37394">Unité du gouvernement colombien pour l’aide aux victimes</a></h4><br>', 'content_edition' => null, 'slug' => 'colombie-la-difficile-reconciliation', 'headline' => false, 'homepage' => 'col-md-6', 'like' => (int) 848, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1398, 'homepage_order' => (int) 1626, 'original_url' => null, 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 5, 'person_id' => (int) 1326, 'post_type_id' => (int) 1, 'poster_attachment' => null, 'editions' => [], 'tags' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Tag) {} ], 'locations' => [], 'attachment_images' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'attachments' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'comments' => [], 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ '*' => true, 'id' => false ], '[dirty]' => [], '[original]' => [], '[virtual]' => [], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [], '[invalid]' => [], '[repository]' => 'Posts' } $relatives = [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 3493, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => true, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => null, 'readed' => null, 'subhead' => null, 'title' => 'Ukraine: nous n'avons rien vu venir', 'subtitle' => 'La guerre totale déclenchée en Ukraine par Vladimir Poutine et son entourage belliqueux a déjà fait des milliers de morts ukrainiens et russes. 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Je m’inclus modestement parmi ces derniers pour avoir couvert pour la RTS plusieurs événements antérieurs à cette crise. </p> <p>Flashback et premier acte: j’étais en Ossétie du Sud en 2008 lorsque le président géorgien Saakachvili a voulu récupérer militairement ce territoire. Ses habitants avaient été instrumentalisés, en même temps que ceux d’Abkhazie, par une indépendance orchestrée de Moscou à la chute de l’URSS. Le président géorgien espérait naïvement un soutien militaire occidental. Et comme les Ossètes détestent les Géorgiens pour des raisons que l’histoire et les grandes puissances leur ont imposées, ils ont cru brièvement à leur salut par la Russie. Tous les habitants de ce territoire que j’ai rencontrés se réjouissaient alors de leur nouveau passeport russe distribué largement. Pour eux, l’agresseur qui les bombardait était l’armée géorgienne. 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Ici chacun est dûment identifié par son origine prolétarienne: mécanicien, ouvrier automobile, etc. Et bien sûr l’effort ne doit pas être gratuit: on en profite pour amener au sommet une station météo, des appareils de transmissions radio et… un buste de Joseph Staline. L’équipe est encadrée toutefois par un jeune homme au regard franc et à la profession moins prolétaire, le peintre-sculpteur sibérien Evgueni Abalakov, un homme qui deviendra avec son frère Vitali l’un des plus grands alpinistes soviétiques au travers de la <em>Société du tourisme prolétarien</em>.</p> <h3><strong>L’alpinisme: une mission d’Etat</strong></h3> <p>Evgueni est une force de la nature. Alors que ses compagnons sont épuisés par le froid (- 45° C) et l’altitude (plus de 7000 m.), il fait des allers et retours pour poser des cordes ou croquer sur un cahier des vues des sommets: le pic Guépéou (ancêtre du KGB…) ou le <em>Mur de l’Armée rouge des paysans et des ouvriers</em>. Chacune des expéditions de cette époque est une victoire humaine et politique dont on cache soigneusement les tragédies: engelures, avalanches, crevasses et infections ont leur compte de victimes mortelles. Le matériel est sommaire, même pour les standards de l’époque, mais les alpinistes font la une des journaux soviétiques. Leurs photos apparaissent en première page avec des visages blancs de crème lanoline, corde de chanvre à l’épaule, lunettes noires et lèvres gercées. Ils accomplissent un devoir, une mission d’Etat: «L’enjeu de l’ascension du pic Staline, c’était de remplacer Dieu par le marxisme, sur l’autel de la Terre»<em>,</em> écrit Cédric Gras. C’est ainsi que les sommets se succèdent: pic Staline, pic Lénine, pic du Communisme, pic Karl Marx…</p> <h3><strong>Un Suisse au pays des Soviets</strong></h3> <p>L’auteur a épluché les archives soviétiques et exploré sur place les terrains de conquête des alpinistes soviétiques de l’époque. Ces sommets étaient négligés par leurs confrères occidentaux, intéressés surtout par les Alpes et l’Himalaya. Avec de rares exceptions toutefois, celles de quelques Suisses. L’écrivaine Ella Maillart aurait aimé participer à l’une de ces ascensions, comme elle le mentionne dans <em>Des monts célestes aux sables rouges,</em> que cite Cédric Gras. Sans succès toutefois. Sa lucidité face au stalinisme la rendait probablement suspecte. Par contre le militant communiste soleurois Lorenz Saladin parvient à s’infiltrer dans le cercle très fermé des alpinistes soviétiques. Il devient un ami inséparable des deux frères Abalakov et de leurs compagnons de cordée. A ses talents de montagnard expérimenté, le Suisse en ajoute un autre précieux, il est un photographe hors-pair. Ses expéditions au pays des Soviets se succèdent: Caucase, Pamir, Altaï, Tien-Shan. Ses clichés, disparus pendant de nombreuses années, sont époustouflants et ne se limitent pas aux montagnes. Ils documentent abondamment les populations de ces régions asiatiques et sont visibles au <em>Musée alpin suisse</em> de Berne. Pour raconter au passage les aventures de l’alpiniste suisse, Cédric Gras s’inspire du livre de l’émouvante Annemarie Schwarzenbach : <em>Lorenz Saladin, ein Leben für die Berge</em>. Cette autre grande écrivaine voyageuse suisse avait été impressionnée par le Soleurois et avait cherché, autant que possible à son époque, à en retrouver le parcours, en se rendant même jusqu’à Moscou pour cela.</p> <p>Lorenz Saladin finit pourtant tragiquement. En 1936, il participe à une expédition délicate dans le Tien-Shan. C’est un massif très septentrional et en raison des difficultés administratives d’obtention de son visa, le départ de la colonne est retardé jusqu’à fin août. Trop tard car les conditions météorologiques sont alors cauchemardesques. Les accidents se succèdent lors de la descente du sommet du Khan Tengri. 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Il est torturé puis accusé d’avoir participé à une tentative d’assassinat du camarade Staline lors du défilé du Premier Mai. Comme tout le monde il avoue n’importe quoi et dénonce n’importe qui. Le défunt Lorenz Saladin devient un espion suisse pour lequel il aurait travaillé. On ne saura jamais pourquoi l’autre frère Abalakov, Evgueni, n’a jamais été inquiété, ni pourquoi Vitali est finalement libéré deux ans plus tard.</p> <p>Puis la <em>Grande guerre patriotique</em> utilise les compétences des rares alpinistes ayant échappé au goulag, comme Evgueni Abalakov. Grâce à eux, en 1943, les troupes allemandes sont chassées du Mont Elbrouz, le sommet de l’Europe. 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Le troisième collier définit précisément la quantité d’eau à laquelle chaque membre du consortage a droit en fonction de ses prairies. Depuis les premiers documents du XVè siècle qui prouvent l’existence des bisses en Valais, le système a quand même passablement évolué, même s’il garde sa philosophie communautaire originelle. Aujourd’hui, l’intervention financière ou logistique des communes, voire du canton, est fréquente. Et le branchement des bisses sur des systèmes modernes d’arrosage est maintenant courant.</p> <p>A Ausserberg, il n’y a plus que vingt-cinq agriculteurs à temps partiel et une agricultrice à plein temps. Mais dans ce village, comme ailleurs dans le canton, tout le monde est attaché à ses bisses. On en dénombre actuellement 188 en Valais, totalisant 742 km. Tous ne sont toutefois pas fonctionnels pour l’agriculture. De nombreux bisses ont acquis une vocation touristique et sont longés par des sentiers de randonnée très fréquentés en été. 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La maman m’explique qu’ils sont de religion protestante. «L’Iran est un pays musulman, on nous considère comme des apostats. C’était de plus en plus difficile pour nous.»</p> <p>La famille décide alors il y a quatre ans de quitter Téhéran avec une des grand-mères et de s’installer en Turquie. Mais elle ne s’y sent guère mieux dans un environnement musulman exacerbé par la politique de renouveau religieux du président Erdoğan. Ces protestants iraniens reprennent alors la route et arrivent dans les Balkans. «En Serbie, nous n’avions pas de problème car c’est un pays chrétien, m’explique tant bien que mal la maman. Mais les conditions de vie étaient très difficiles. J’ai fait une fausse couche et ma mère qui nous accompagnait est décédée.»</p> <p>Les parents et leur fille se décident alors pour un nouveau départ. Cette fois, leur objectif est la France où ils n’ont toutefois pas de point de chute. 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Quand on ne veut pas accueillir les gens, ça se passe mal, continue Philippe Wyon de son habituel ton posé, plus proche du guide montagnard que du militant. Mais ici à Briançon, il n’y a jamais eu de problème. Ce n’est pas Calais, on est sur du flux, les exilés n’ont aucun désir de rester, alors que Calais, c’est une impasse.»</p> <p>Le maire de Briançon est aussi président de la Communauté de communes et donc doté d’un pouvoir important. Membre du parti Les Républicains, il a battu au second tour des élections législatives en juin dernier son prédécesseur à la suite d’une division des listes de gauche. Elles ont refusé de fusionner et n’ont pas fait le poids face à la liste unique de droite.</p> <h3><strong>Image touristique menacée</strong></h3> <p>L’attitude du maire est incompréhensible pour beaucoup de monde et on se demande si ce n’est pas juste un coup d’esbroufe pour rallier les sympathies d’extrême-droite et propulser sa carrière. La fermeture du refuge ne faisait même pas partie de son programme électoral. La ville de Briançon est reliée par télécabine à Serre Chevalier. C’est une station de ski en hiver et une base de randonnée en été. Une bonne partie de son électorat travaille dans le commerce et le tourisme, des Briançonnais qui n’ont pas du tout envie de voir ternir l’image de leur ville par des familles de migrants dormant dans la rue ou la gare de départ de la télécabine.</p> <p>La menace du maire a déclenché de vives réactions à travers toute la France, emmenées par les plus importantes associations humanitaires du pays: Abbé Pierre, Emmaüs, Médecins du Monde. Une pétition de protestation a recueilli en quelques semaines plus de 37 000 signatures à la tête desquelles se trouvent celles de Mgr Xavier Malle, évêque de Gap, ainsi que du sociologue Edgar Morin.</p> <p>La trêve hivernale qui commence le 1<sup>er</sup> novembre devrait, selon la règle, empêcher de mettre à la rue les personnes hébergées, mais ce n’est qu’un répit. Les membres du collectif qui gère le refuge espèrent en profiter pour faire passer à la mairie une proposition de commission qui étudierait des solutions pour remplacer l’actuel bâtiment vétuste car c’est une ancienne caserne des CRS totalement inappropriée à ses fonctions actuelles. En attendant il reste à savoir qui va payer la facture du fuel pour le chauffage qui était jusqu’à présent prise en charge par la mairie. Une préoccupation très matérielle mais fondamentale pour passer l’hiver briançonnais.</p> <p> </p> <hr /> <h2><strong>Films et livres présentés à Briançon</strong></h2> <p>Le premier <a href="http://festival-exils.org/" target="_blank" rel="noopener">Festival Exils</a> s’est tenu à Briançon du 7 au 11 octobre dernier. Malgré les restrictions sanitaires, il a vu arriver un large public pour assister à la projection de quatorze documentaires, dont le film <em>Vol spécial</em> de Fernand Melgar. Des tables rondes ont été organisées sur la thématique des migrations et une librairie temporaire proposait des dizaines de livres récents traitant de ces questions. Parmi ceux-ci, <em>La route à bout de bras</em> (<a href="http://www.migrilude.com" target="_blank" rel="noopener">Editions Migrilude</a>) a été lancé en présence de son auteur, Mamadou Sow, jeune migrant guinéen handicapé, qui a lui-même transité par le refuge de Briançon il y a deux ans. 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