Analyse / Le complotisme, une superstition pour un temps athée
«Crédulité, superstition et fanatisme», une gravure de William Hogarth, 1762. © DR
Depuis l'apparition de la pandémie de COVID 19, et notamment à propos des vaccins, les opinions s'affrontent, parfois de manière tout à fait irrationnelle. Et il arrive que, comme avec la religion, la croyance l'emporte sur la raison. Comment concilier cette tendance très humaine avec la réalité des choses?
A la faveur des polémiques sur le vaccin anti-Covid, on entend tout. Et surtout n’importe quoi: que ce vaccin tue plus sûrement que le coronavirus, qu’il rend stérile, qu’il modifie notre code génétique. Les virologues et vaccinologues ont beau s’échiner à démentir, il se trouve toujours un complotiste pour sortir de sa manche l’avis d’un allumé en blouse plus ou moins blanche.
Et les tenants du «cercle de la raison» de se lamenter sur ces irruptions de l’irrationalité la plus explosive qui bombarde de ses insanités les espaces dévolus jusqu’alors aux débats. Sans acceptation d’une raison commune, si l’on n’est même pas d’accord sur les faits, impossible d’échanger des points de vue opposés. Ce n’est que parole de l’un contre celle de l’autre. Et le plus gueulard gagne.
Sortir de l’impasse
Pour tenter de sortir de cette impasse où nos sociétés sont en train de s’engouffrer, il faut tout d’abord prendre vraiment conscience que l’irrationnel fait partie de l’humain, qu’il en constitue même une force qui peut, comme la foi biblique, «renverser des montagnes». Pour le meilleur quand elle permet à l’humain de se dépasser pour faire œuvre de création. Pour le pire, quand elle l’engage sur la voie de la destruction et de la guerre.
Imaginer une femme ou un homme qui n’obéirait qu’aux préceptes de la raison, qui suivrait sagement les voies bien balisées de la logique, c’est un songe pour fabricant de robot. L’humain est tissé d’émotions, de passions, de rêves, de folie, soit tout ce que l’on classe habituellement à la rubrique «irrationalité».
Il veut des réponses à toutes ses questions. Mais des réponses simples et séduisantes. Or, la vie est complexe et ne cherche pas à plaire. Et c’est là où ça commence à coincer entre l’humain et le réel.
Certes, pour s’insérer dans la vie collective et appréhender au mieux ce réel compliqué, il a l’instruction à sa disposition qui lui apprend à maîtriser ses passions et à distinguer l’erreur de la vérité. Mais l’irrationnel n’est pas pour autant effacé et peut surgir à tout instant. Heureusement, car c’est ce qui fait de lui un humain et non un logiciel.
«Ce-qui-nous-dépasse»
Comment se prémunir contre les effets néfastes de cette part déraisonnable tapie en nous et de la transformer en énergie créatrice et bénéfique? La mission semble relever de l’impossible. Le rationnel et l’irrationnel sont, par définition, étrangers l’un à l’autre.
Depuis la nuit des temps, l’humanité a trouvé un pont entre les deux, à savoir la religion, c’est-à-dire ce qui relie les humains à ce qui les dépasse: l’infini de l’univers opposé à la finitude de notre existence terrestre.
«Ce-qui-nous-dépasse» peut être nommé Dieu unique, Dieux pluriels, Grand Architecte de l’Univers, Tao. De toute façon ce nom n’est qu’une convention pour tenter de simplifier le complexe radical. Ce n’est donc pas lui qui importe mais ce mystère de la vie qu’il tente d’appréhender.
Afin de ne pas laisser l’humain seul avec l’angoisse de ce qui le dépasse, la religion a tissé des mythes, des rites, des liturgies qui ont pour effet de donner une expression collective et maîtrisée à cet irrationnel individuel et fou.
La superstition sécularisée
Comme toute action développée par l’humain (ou que l’humain accomplit sous l’inspiration de «Ce-qui-nous-dépasse»), la religion produit ses déchets, à savoir les superstitions.
Le Littré en donne cette définition: «Sentiment de vénération religieuse, fondé sur la crainte ou l’ignorance, par lequel on est souvent porté à se former de faux devoirs, à redouter des chimères et à mettre sa confiance dans des choses impuissantes.»
Elle paraît tout à fait satisfaisante, cette définition. Mais sur un aspect essentiel, elle se révèle aujourd’hui dépassée: on peut désormais s’adonner à la superstition hors de tout «sentiment de vénération religieuse».
La France «cartésienne»
La France nous en apporte la démonstration. L’athéisme y est fort répandu comme le démontre cette étude de Gallup diffusée par le Washington Post et l’Obs-Rue89 en France (lire l’article). En Europe, elle détient la médaille d’argent de l’athéisme et n’est battue que d’une courte tête par la République Tchèque. L’indifférence religieuse y est monnaie courante, encore plus que chez ses voisins.
Or, c’est en France que les réactions anti-vaccinales sont les plus vives en Europe avec un cortège disparate de croyances plus ou moins absurdes. Certes, tous les pays du continent en sont affectés. Mais c’est dans celui qui se dit «cartésien»[1] et libre de tout dogme que les délires anti-vaccinaux paraissent les plus virulents.
La France ne fait qu’illustrer de façon plus voyante un phénomène général: ce n’est pas parce qu’une société est sécularisée qu’elle en devient indemne de superstition.
Au contraire même. L’irrationalité s’abreuve désormais librement, sans la contrainte morale des religions, à mille sources très diverses et toutes plus polluées les unes que les autres par les réseaux sociaux et la diffusion des complotismes en tous genres.
Conséquence de l’affaissement des religions
Malgré tout, malgré leurs failles béantes, les religions – dans leurs expressions non-intégristes – constituaient naguère encore un filtre à superstitions en distinguant entre l’observation des préceptes et «l’amas superflu(s) de choses vaines» comme l’écrivait Calvin dans ses Institutions de la religion chrétienne. Paradoxe qui n’est qu’apparent: l’affaissement des religions a contribué au développement des superstitions et des comportements irrationnels.
Les sociétés sécularisées doivent apprendre ou réapprendre à ne pas confondre croyance et connaissance, développement d’une pensée rationnelle et aspiration à une vie spirituelle. Le principe de la laïcité – «L’Eglise chez elle et l’Etat chez lui» [2] – peut être envisagé de façon plus large. A savoir, ne pas laisser l’irrationnel parasiter les domaines où la raison doit s’exercer pour le bien commun mais aussi, ne pas assécher l’aspiration spirituelle de chacune et chacun par une raison sortie de son domaine d’utilité.
Par aspiration spirituelle, on entend cet appel qui pousse l’humain à vivre les mystères de la vie et de la mort sans forcément chercher à les comprendre.
Devant ces mystères, l’humain se sent seul face à ses angoisses. C’est en vivant sa part d’irrationalité qu’il pourrait les apaiser par une ascèse, par des rites. Emergence d’un nouveau sentiment mystique? De nouvelles pratiques religieuses? D’un type nouveau de spiritualité collective? C’est l’humanité qui en décidera.
Pour que la raison triomphe là où il faut qu’elle s’impose, l’irrationnel doit aussi recevoir sa part.
[1] Descartes n’était ni athée ni indifférent religieux mais passons…
[2] Selon la formule bien connue tirée du discours prononcé le 14 janvier 1850 à l’Assemblée nationale par un député de la Seine nommé Victor Hugo!
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C’est l’humanité qui en décidera.</p> <p>Pour que la raison triomphe là où il faut qu’elle s’impose, l’irrationnel doit aussi recevoir sa part.</p> <p><em><a href="#_ftnref1">[1]</a> Descartes n’était ni athée ni indifférent religieux mais passons…</em></p> <p><em><a href="#_ftnref2">[2]</a> Selon la formule bien connue tirée du discours prononcé le 14 janvier 1850 à l’Assemblée nationale par un député de la Seine nommé Victor Hugo!</em></p>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'complotisme-superstition-pour-un-temps-athee', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 567, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 8, 'person_id' => (int) 2893, 'post_type_id' => (int) 1, 'poster_attachment' => null, 'editions' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Edition) {} ], 'tags' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Tag) {} ], 'locations' => [], 'attachment_images' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'attachments' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'comments' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Comment) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Comment) {}, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Comment) {}, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Comment) {} ], 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ '*' => true, 'id' => false ], '[dirty]' => [], '[original]' => [], '[virtual]' => [], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [], '[invalid]' => [], '[repository]' => 'Posts' } $relatives = [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 4364, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => false, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => null, 'readed' => null, 'subhead' => null, 'title' => 'Izïa: la violence politique en chanson, une vieille histoire', 'subtitle' => 'C’est le beuze de ce mois de juillet. 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Entre deux morceaux – histoire de tenir son public sous courant continu et de laisser ses musiciens souffler un brin –, elle entame des monologues plus ou moins délirants.</p> <p>Celui qu’elle a lancé ce soir-là fera son petit effet. Se glissant dans la peau du président Macron, <a href="https://youtu.be/WYWOnk4oyqQ">elle vaticine</a>: «<i>Je pense que ce que le peuple veut, ce dont le peuple a envie, c'est qu'on m'accroche à vingt mètres du sol telle une piñata<strong><sup>1</sup></strong> humaine géante, et qu'on soit tous ici présents munis d'énormes battes avec des clous au bout comme dans </i>Clockwork Orange (<i>titre original du film </i>Orange mécanique)<i>. 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Aussitôt hérissées sur les réseaux sociaux, les protestations indignées semblaient voir dans ce récitatif lyncheur la marque de notre époque vouée aux incivilités et à la violence.</p> <h3>Les rois de France malmenés en chanson</h3> <p>Pourtant, rien de nouveau sous le soleil de Satan. La chanson fut toujours le véhicule préféré de la provoc’ politique. Sans remonter au Déluge, citons <a href="https://www.periegete.com/sur-lair-du-une-monarchie-absolue-temperee-par-des-chansons-part-2-le-roi-de-france/">les chants pimentés</a> qui enflammèrent les rues de Paris lors de la Fronde. A preuve, cet extrait d’une chanson qui remonte à l’an 1648. Elle exprime une certaine animosité envers Anne d’Autriche, Reine de France et Régente du Royaume: «<i>Mais je voudrais bien étrangler/ Notre putain de Reine.»</i></p> <p>En comparaison, Izïa Higelin ferait presque petite chanteuse du Couvent des Oiseaux.</p> <p>D’aucuns ont d’ailleurs qualifié la France d’Ancien régime de «monarchie absolue tempérée par les chansons», compte tenu de la fréquence des airs irrespectueux envers le Trône et l’Autel.</p> <p>Louis XV, dit «le Bien-Aimé», fut la cible préférée des chansonniers de la rue parisienne. En voici un édifiant extrait: «<i>Louis, du nom de Bien-Aimé,/ Ton peuple te déclare indigne./ Sans doute on t</i>’<i>avait mal nommé,/ Louis, du nom de Bien-Aimé;/ par ton sceptre on est opprimé,/ Si l</i>’<i>on est traître, fourbe insigne,/ Louis, du nom de Bien-Aimé,/ Ton peuple te déclare indigne […] Putains, maquereaux ou prélats/ Sont les seuls que ta main caresse.»</i></p> <p>«Tout finit par des chansons» disait Beaumarchais. En France, on serait tenté de paraphraser: tout commence et<i> </i>tout finit par des chansons, même les Rois de droit divin, à l’exemple de cette chanson révolutionnaire qui s’est répandue sur les boulevards à la suite de l’exécution de Louis XVI le 21 janvier 1793: «<i>Le vingt et un janvier/ Sept cent quatre vingt treize,/ Capet, tyran dernier,/ Qu</i>’<i>on nommait Louis Seize,/ A reçu ses étrennes/ Pour avoir conspiré./ Ce fuyard de Varennes est donc guillotiné.»</i></p> <p>Et là pas question de le guillotiner façon Izïa «avec toute la grâce et la gentillesse des gens du Sud»!</p> <h3>Brassens et les pandores</h3> <p>Plus récemment, sous la IVème République française, Georges Brassens n’y est pas allé de main morte avec cette incarnation bleu-marine (n’y voyez aucune allusion malsonnante) de l’Etat qu’est la Gendarmerie Nationale. Rafraichissons les mémoires par quelques extraits de <a href="https://youtu.be/KzmnDy7zzDw">cette chanson intitulée <i>Hécatombe</i></a> qui narre la déconvenue de la maréchaussée aux prises avec les harpies du marché de Brive-la-Gaillarde.</p> <p><i>(…)</i></p> <p><i>En voyant ces braves pandores</i></p> <p><i>Etre à deux doigts de succomber,</i></p> <p><i>Moi, j'bichais, car je les adore</i></p> <p><i>Sous la forme de macchabés.</i></p> <p><i>(…)</i></p> <p><i>Jugeant enfin que leurs victimes</i></p> <p><i>Avaient eu leur content de gnons,</i></p> <p><i>Ces furies, comme outrage ultime,</i></p> <p><i>En retournant à leurs oignons,</i></p> <p><i>Ces furies, à peine si j'ose</i></p> <p><i>Le dire, tellement c'est bas,</i></p> <p><i>Leur auraient même coupé les choses:</i></p> <p><i>Par bonheur ils n'en avaient pas!</i></p> <p><i>Leur auraient même coupé les choses:</i></p> <p><i>Par bonheur ils n'en avaient pas!</i></p> <p>Les rappeurs d’aujourd’hui ont-ils été aussi loin dans leurs diatribes antiflics que le père Brassens en 1952, date de la sortie du disque?</p> <h3>L’«Hécatombe» fait scandale 60 ans plus tard!<b></b></h3> <p>A l’époque, cette chanson était, l’on s’en doute, interdite d’antenne. Mais c’est tout. Il est symptomatique de constater qu’elle n’a intéressé la justice qu’à la nôtre, d’époque!</p> <p>Le 27 mai 2011, il s’est trouvé un juge à Toulouse pour <a href="https://www.lepoint.fr/societe/chanter-peut-etre-un-delit-11-06-2011-1341035_23.php">condamner</a> un garçon de 27 ans pour outrage, à 40 heures de travaux d’intérêt général et 100 euros d’amende. Son crime? Avoir chanté <i>Hécatombe</i> au passage de trois policiers. Et ce n’est pas tout. Peu après, 29 choristes de la «Canaille du Midi» ont été interpelés pour avoir chanté la même chanson devant le commissariat central de Toulouse en guise de protestation contre la condamnation du jeune homme.</p> <h3>Le rock et sa «Graine de violence» </h3> <p>Le «récitatif halluciné» d’Izïa Higelin s’inscrit aussi dans la culture rock, imprégnée de violence. Cela dit, ce n’est pas le rock qui est à la source de la violence. Elle sourd de la société étatsunienne où il est né. S’il existait auparavant, c’est à partir du film <i>Graine de violence </i>(titre original<i>: Blackboard Jungle</i>), réalisé par Richard Brooks, que le rock n’roll a commencé à se diffuser grâce au célèbre <i>Rock around the Clock </i>chanté par Bill Haley.</p> <p>Dans les pays de langue française, la violence rock a surgi sur la scène médiatique dès le début des années 1960. L’exemple le plus hirsute nous est offert par le concert de Vince Taylor, dans le contexte d’un festival international du rock, qui s’est tenu – enfin qui a tenté de se tenir! – au Palais des Sports de Paris, le 18 novembre 1961. <a href="https://journals.openedition.org/criminocorpus/4301?lang=de#ftn2%20" target="_blank" rel="noopener">Rappel des faits</a>:</p> <p><i>La salle est dévastée avant que Vince Taylor, en vedette, ne monte sur scène. Dans le public, des jeunes femmes et des jeunes hommes, blousons noirs ou sans blousons apparents, déboulonnent les sièges ou en arrachent quelques morceaux, s</i>’<i>en servent de projectiles, visent la scène et les forces de police. On veut se débarrasser de ces rangées de sièges encombrants, on veut créer de l</i>’<i>espace pour danser, on se bouscule, on se chamaille, on se bagarre, on veut aussi s</i>’<i>approcher des artistes en débordant le service de sécurité, et pourquoi pas braver au passage les forces de police qui commencent à frapper pour éviter que tout dégénère dans un lieu de concert qui devient arène. </i>Bis repetita placent<i>, car la première édition du 24 février avait elle aussi très mal tournée à l</i>’<i>issue de la prestation de Johnny Hallyday. Deux mots sont repris dans les médias: fanatisme et hystérie. 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La seule femme du groupe, Olga Bancic, roumaine juive et communiste, sera guillotinée à Stuttgart le 10 mai de la même année, les nazis estimant sans doute qu’une femme n’avait pas droit à «l’honneur» d’être fusillée comme un combattant.</p> <h3>La propagande qui va à fin contraire</h3> <p>Juste avant d’être passés par les armes, Manouchian et dix autres condamnés sont photographiés. Les officiers de la Gestapo militaire les ont choisis en fonction de leurs patronymes aux consonances de toute évidence étrangères ou juives.</p> <p>Les Allemands les utiliseront pour créer une affiche de propagande destinée à séparer les «vrais Français» de ces «métèques» présentés comme des criminels. Elle deviendra la célèbre «Affiche rouge» qui aboutira à l’effet inverse du but recherché par la Geheime Feldpolizei. 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Ces héros faisaient trop d’ombre au patron du PCF, Maurice Thorez, qui avait passé la Seconde guerre mondiale à l’abri du Kremlin.</p> <p>Après la mort de Staline en 1953, le vent tourne. Par l’action des rescapés de la FTP-MOI, notamment les frères Raymond et Claude Lévy, la mémoire des fusillés au Mont-Valérien commence à être reconnue. Une rue du Groupe-Manouchian est inaugurée le 6 mars 1955 dans le XXème arrondissement de Paris. Claude Lévy invite Louis Aragon à cette occasion mais le poète séjourne alors en URSS. 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Le journaliste et écrivain Jean-Paul Liégeois, spécialiste de la chanson française, rappelle cette anecdote dans un article paru en juin 1985 dans l’hebdomadaire socialiste <em>L’Unité</em>:</p> <p><i>«En 1953, les frères Claude et Raymond Lévy (…) obtiennent le prix Fénéon pour un manuscrit de dix nouvelles consacré à des histoires vraies de la Résistance. (…) Plusieurs éditeurs se proposent [de le] publier. Communistes, les frères Lévy choisissent les Editeurs français réunis. Patron de la maison, Aragon les reçoit et leur dit: "On ne peut pas laisser croire que la Résistance française a été faite comme ça, par autant d’étrangers. Il faut franciser un peu." Disciplinés, ils ont accepté.»</i></p> <p>Entre 1953 et 1955, l’ombre de Staline avait commencé à se faire un peu moins épaisse…</p> <h3>Quelle est la responsabilité du PCF dans l’arrestation des 23?</h3> <p>Une accusation plus grave a été portée contre la direction du PCF notamment par un témoignage de Mélinée Manouchian. Il figure dans le film de Serge Mosco Boucault, <em>Des terroristes à la retraite</em>, sorti en 1985 par la chaîne télévisée Antenne2. </p> <p>Il s’en est suivi une vive polémique sur l’éventuelle responsabilité du Parti communiste français dans l’arrestation de Missak Manouchian. L’un des passages de la dernière lettre du condamné à sa femme interpelle: </p> <p><i>«Je pardonne à tous ceux qui m’ont fait du mal ou qui ont voulu me faire du mal sauf à celui qui nous a trahis pour racheter sa peau et ceux qui nous ont vendus.»</i></p> <p>Adam Rayski, responsable de la section juive du PCF de 1941 à 1949, donne cet éclairage lors d’<a href="https://www.lhistoire.fr/qui-trahi-manouchian" target="_blank" rel="noopener">une interview</a> qu’il a accordée au mensuel <i>L’Histoire</i> en décembre 1985:</p> <p><i>«En mai 1943, devant le bilan des pertes des organisations juives, j'ai demandé le repli, le transfert de notre direction dans la zone Sud. Le Parti a refusé, qualifiant cette attitude de "capitularde". Le PC voulait continuer à frapper dans la capitale, avec ce qui restait son unique bras séculier: les FTP-MOI. Stratégiquement, la direction, pour affirmer sa suprématie vis-à-vis de Londres et du Conseil national de la Résistance, désirait capitaliser les actions d'éclat de la MOI. La direction nationale juive est partie </i>in extremis <i>pour Lyon, mais les FTP ont continué à lutter sur place avec acharnement. Le Parti a sous-estimé l'impératif de la guérilla urbaine – savoir décrocher – et a tiré un rendement politique maximum des coups d'éclat de la MOI. </i></p> <p><i>A terme, c'était donc bien une grave erreur politique. La part de responsabilité du PC dans les arrestations de résistants – dont les 23 de l'Affiche rouge – est indiscutable. Mais ne parlons pas à propos du Parti de trahison; ne parlons pas non plus d'abandon et encore moins de sacrifice prémédité.»</i></p> <p>Le 21 février 2024, Missak Manouchian ne sera pas seul à entrer eu Panthéon. Mélinée son épouse, résistante comme lui, l’accompagnera<sup><strong>1</strong></sup>. Ainsi que tous ceux qui ont donné «leur cœur avant le temps».</p> <hr /> <h4><sup>1</sup>Elle décède à Paris en 1989 à l’âge de 76 ans. 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VOS RÉACTIONS SUR LE SUJET
4 Commentaires
@Gamuret 06.08.2021 | 17h26
«Bonjour !
Je suis sensible à l'article de M. Cuénod ; il faut avouer d'abord que le débat n'est pas facile. En effet, de quoi parle t-on ? De vaccins ? Or il se trouve que ce ne sont pas des vaccins mais des injections géniques à ARN messager (à l'essai jusqu'en 2023). Je pense que l'on peut rester rationnel puisque c'est de la science, et la science est basée sur des faits. Si et seulement si tous les faits sont mis sur la table, il devrait être possible de rester rationnel. Par exemple avec la fameuse balance bénéfice/risque ; ou encore de dire les morts suite à une injection (déjà plus de 10 000 selon la pharmacovigilance). Oui il devrait être possible d'échanger sur ce sujet de manière raisonnable, mais hélas de nombreux médias ont décidé d'employer "La stratégie de l'émotion" (Anne Cécile Robert), ce qui empêche tout véritable débat (dont l'étymologie veut dire : ôter le combat).
Mes bonnes salutations !
Gamuret »
@Pipo 06.08.2021 | 21h11
«La problématique des vaccins ne peut se résumer à être pro ou antivaccins , les choses sont beaucoup plus nuancées. Il est faux, malhonnête et dénigrant de ramener ceux qui émettent des réserves à la vaccination de masse, en particulier celle des jeunes, à des complotistes ou des allumés en blouse plusm ou moins blanche.
La vaccination des personnes à risques est clairement indiquée et utile, mais plusieurs spécialistes sérieux, certes minoritaires, mettent en doute le bien fondé de la vaccination de masse et estiment, à juste titre à mes yeux, que la vaccination des jeunes n’est pas raisonnable.
Il est évident que si des variants occasionnant des formes graves et fréquentes chez les jeunes apparaissent elle deviendrait indiquée. Mais ce n’ est pas le cas depuis une année et demi que dure cette pandémie.
Dr P. Flouck »
@Domine 07.08.2021 | 11h56
«Des « allumés » comme vous dites de façon très méprisante, en blouse très blanche pourtant (Virologue et scientifique reconnus) corroborent avec source et études à l’appui, ce que vous énoncez comme du tout et n’importe quoi! Je suis abonnée à votre journal pour sortir de la pensée unique mais sur ce coup je me vous trouve bien unilatéral!!»
@Smilex 11.08.2021 | 22h27
«Le débat sur la vaccination serait inutile si toute vaccination concernerait uniquement le patient et son médecin comme prévu par la loi. Mais la politique a décidé de bouleverser les principes du secret professionnel (concept en vigueur depuis les anciens grecs) et du code de Nuremberg (accord international sur expérimentation sur l'être humain). Je comprend pas ce que votre article essaye de dire? Que les religieux se posent moins de questions sur les motivations bienfaiteurs des politiciens?»