Actuel / Inceste: au-delà du bruit médiatique, entendre la tragique banalité du phénomène
Oeuvre de l'artiste Niki de Saint-Phalle, qui a révélé en 1994 à sa propre fille l'inceste dont elle a été victime (Niki de Saint Phalle, Mon Secret, La Différence, 1994.). Pixabay, CC BY-SA
Comme trop souvent l’actualité fonctionne sans mémoire du passé et sans histoire.
Anne-Claude Ambroise-Rendu, Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (UVSQ) – Université Paris-Saclay
Les toutes récentes révélations de Camille Kouchner, qui accuse dans un livre son beau-père Olivier Duhamel d’avoir abusé de son frère jumeau, suscitent un torrent médiatique et des réactions étonnées, comme si la chose – l’inceste – et son émergence dans l’espace public constituait une nouveauté. Pourtant, les chiffres sont là : selon une enquête Ipsos publiée en novembre 2020 un Français sur 10 serait victime d’inceste même si, rappelons-le, les chiffres, en particulier en matière de criminalité sexuelle, ne sont pas toujours probants.
Certes, il a fallu attendre, la fin du XXe siècle pour que l’inceste devienne un sujet de discussion publique. Le Monde ne commence à consacrer des articles à la judiciarisation de l’inceste, c’est-à-dire à des procès pour attentats à la pudeur sur moins de 15 ans commis par un ascendant, qu’en mars 1974, ouvrant le feu de manière très significative avec une affaire d’inceste rural.
L’inceste rural, vu comme produit de l’arriération et de la rudesse des mœurs campagnardes, est en effet un topos de la littérature médicale depuis le XIXe siècle.
Dépasser la prohibition de l’inceste ?
En avril 1971, Michel Polac consacre à l’inceste un épisode de son émission « Post scriptum », avec le film de Louis Malle, Le Souffle au cœur, récit d’un inceste maternel. Les invités, sans condamner ni louer l’inceste, l’analysent comme une donnée avec laquelle une société doit composer et s’interrogent sur la possibilité de dépasser la prohibition de l’inceste.
En réaction, Michel Polac reçoit une avalanche de lettres de protestation, qui dénoncent « un sujet infect » en souhaitant que les invités, ces « vicieux salopards », se fassent dérouiller et/ou castrer. Polac est finalement sanctionné par le conseil d’administration de l’ORTF et l’émission disparaît dans le courant du mois de mai.
Cet épisode, dont la rumeur s’éteint avec l’été commençant, montre d’une manière éloquente la force du silence qui pèse sur l’inceste : ce « sujet infect » n’a pas encore droit de cité à la télévision. Par ailleurs il montre aussi que pour de nombreux téléspectateurs, le traitement a été jugé trop léger et inadapté.
Créer les conditions pour évoquer les affaires d’abus
Après cela, la décennie 1970 va être pour les médias celle d’une ouverture au « discours sur la sexualité » qui créé les conditions d’évoquer peu à peu ce qu’on appelle alors la pédophilie.
La télévision en particulier affronte l’inceste et les évocations fictionnelles ou documentaires du viol par inceste se multiplient. Ainsi, en 1978, le journal de 20 h d’Antenne 2 consacre un reportage de trois minutes au cas d’un enfant de huit ans violé par son père – sans dommages cette fois pour la rédaction.
À partir du milieu des années 1980, différentes « affaires » attirent l’attention des médias et des pouvoirs publics sur les lacunes du dispositif de protection de l’enfance. Ainsi, dans L’enfant derrière la porte en 1982, David Bisson raconte son calvaire d’enfant martyrisé.
Peu après, 1986 marque un tournant décisif en matière de parole publique sur l’inceste. Lors des débats des Dossiers de l’écran diffusés par Antenne 2, le journaliste Alain Jérôme donne en direct la parole à trois femmes adultes, victimes de pères ou de frères incestueux, parmi lesquelles Éva Thomas qui vient de publier Le viol du silence.
L’émission est annoncée par le magazine chrétien La Vie sous le titre : « les barreaux de la prison de l’inceste vont voler en éclats ».
L’impact du témoignage
La télévision prend le risque du témoignage vivant des victimes en même temps qu’elle sollicite l’avis des téléspectateurs. Après avoir écrit dans l’incipit de son livre – « À quinze ans j’ai été violée par mon père », pour la première fois, une victime d’inceste témoigne à visage découvert, après que deux autres femmes, de dos elles, ont raconté leur histoire (toujours dans cette même émission des Dossiers de l’écran).
Trente ans après les faits, ces victimes viennent parler de souffrance qui semblent toujours très vives, offrant l’occasion au public de comprendre que la particularité du dommage causé par le viol – incestueux ou non – est de se conjuguer au futur.
Le retentissement de l’émission est énorme et il n’est pas excessif de dire que toute la presse – nationale, régionale et étrangère (L’illustré Suisse, Il Mattino, La Republica) – en parle, d’une voix unanime.
L’insistance est mise sur le mutisme des victimes (Le Républicain lorrain, 29/08/1986, La Voix du Nord, 27/08), sur « l’hypocrisie et le silence complice » qui règne sur le sujet (Le Figaro, 02/09/1986) et sur la grande victoire que constitue cette prise de parole : « Les petites filles ne se sentent plus coupables » (Le Matin, 02/09/1986). « Toutes les couches de la société sont concernées », remarquent enfin les journaux Télé Journal (30/08 au 05/09/1986,) et Le Républicain lorrain (27/08 et 29/08/1986).
Une rupture dans le paysage littéraire
Deux ans plus tard, l’écrivaine Christiane Rochefort publie La Porte du fond, avec cet exergue :
Il était le pacha du harem avec ses deux femmes.
Bon, une et demi.
Moi ce n’était qu’un jeu.
J’étais encore une enfant.
Les enfants, c’est sacré.
Couronné par le prix Médicis, l’ouvrage donne la mesure du changement qui s’opère dans le paysage littéraire après un siècle de silence ou de représentation irénique (inceste amoureux excessif ou passionnel) chez Emile Zola (La Curée) Jean Cocteau (Les Enfants Terribles) ou Louis Malle (Le Souffle au cœur).
En décrivant un inceste père-fille comme un cercle vicieux condamnant l’enfant abusé au silence, le roman sarcastique et furieux de Christiane Rochefort inscrit désormais cette figure littéraire dans le cadre de l’abus de pouvoir et du crime.
Briser un « vieux tabou »
C’est à nouveau, pour « pour briser ce qui reste un vieux tabou » que François de Closet réunit le 27 mars 1989 sur le plateau de son émission Médiations, des spécialistes et des témoins des actions diverses menées contre l’inceste.
Ainsi est présentée l’émission, fidèle au topos désormais presque classique de la révélation. Le reportage réalisé auprès de très jeunes enfants n’est sans doute pas étranger à la réussite de cette soirée. L’émission aurait ce soir-là presque atteint le chiffre de 40 % de part d’audience : mieux que les Dossiers de l’écran trois ans plus tôt (Médias, 12/09/1986).
« Après, il m’a dit de ne pas le dire à ma maman parce que sinon il m’a dit qu’il me tuerait moi et ma maman », murmure Sandrine, 10 ans, abusée pendant deux ans par l’ami de sa mère.
De surcroit, ce magazine a un impact. Claudine, une des invitée, est poursuivie peu après par le tribunal de grande instance de Saint-Brieuc, pour diffamation à l’encontre de son père, comme du reste Patrick Le Lay, PDG de TF1, et François de Closets lui-même.
La jeune femme est condamnée en juillet 1989 à un 1 franc symbolique. « Le tribunal de St Brieuc a tranché : le viol en famille doit rester secret » commente Libération, en juillet 1989.
Rompre l’anonymat
En donnant la parole aux victimes, mais surtout en offrant à la curiosité et à la compassion du téléspectateur leur visage, singulier, unique, la télévision rompt l’anonymat que maintient l’écrit.
Elle permet la reconnaissance et l’identification, bref elle fracasse le silence plus que n’importe quel média, le voyeurisme auquel elle invite étant la garantie même de la transgression qu’elle s’autorise.
Cette fois encore la presse écrite se fait un large écho de l’émission. Rappelant que « pendant que l’opinion se focalise sur quelques meurtres d’enfants, d’autres sont violés ou agressés par un parent dans l’indifférence générale » (Télérama, 15/03/1989).
C’est donc au cours de cette deuxième moitié des années quatre-vingt que les victimes commencent à se faire entendre. Désormais, la cause semble entendue : il s’agit de dénoncer des agissements massifs qui enfreignent les valeurs essentielles de la société, et la communauté de jugement est unie dans l’accusation. Dès lors, la parole des victimes semble désormais « autorisée » et les livres de témoignages se multiplient au cours des années 1990.
Le paradoxe de la « parole sur l’inceste »
Pourtant, et c’est tout le paradoxe de la « parole sur l’inceste », l’intense bruit médiatique qui caractérise ces quelques années, est oublié aussitôt que passé et depuis les années 2000 chaque « affaire » de dénonciation publique des viols d’enfants ou d’inceste semble provoquer la stupeur comme s’il s’agissant d’une « découverte » ou pis d’un fait nouveau.
Cette « stupeur » témoigne d’une résistance profonde persistante à reconnaître la banalité de l’inceste. Le faire c’est mettre en cause ce pilier de l’ordre social qu’est la famille, c’est délicat. Il faut compter également avec le système médiatique pour lequel seul l’inédit a une véritable valeur.
La personnalisation des dénonciations, l’appartenance des dénonciatrices à des milieux sociaux privilégiés, dans lesquels on maîtrise la parole et plus encore l’écriture, concentre le scandale sur quelques figures de notables, comme l’a montré l’affaire Gabriel Matzneff.
Cette dernière n’était pourtant pas neuve et répondait, 30 ans après, aux confessions littéraires de Matzneff qui n’a jamais rien dissimulé de ses goûts et de ses pratiques.
Le mythe des années 68 « déviantes »
Après le mythe de « l’inceste rural », voici le XXIe siècle obsédé par un autre mythe : l’inceste ou l’agression sexuelle sur mineur fruit de la libération des mœurs des années 1970 et déviance du gauchisme ou du progressisme. Il est devenu presque banal de dénoncer l’effet délétère de Mai 68 sur les comportements sexuels, ce qui témoigne d’une erreur d’appréciation.
Si Mai 68 a libéré la parole sur la sexualité, autorisant le développement de revendications relatives aux sexualités alternatives, l’événement a aussi ouvert une fenêtre et attiré l’attention sur la criminalité sexuelle et ses victimes.
Du même coup, l’enjeu de ces révélations se trouve fréquemment déporté, puisqu’elles sont instrumentalisées à des fins politiques faisant largement oublier que l’inceste est un phénomène que l’on pourrait malheureusement qualifier d’« ordinaire ».
Une chose demeure : alors que l’inceste est un des crimes les plus réprouvés moralement, il est aussi l’un des crimes les moins révélés et dénoncés, preuve s’il en fallait de la persistance du déni.
Anne-Claude Ambroise-Rendu, Professeur d'histoire contemporaine, Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (UVSQ) – Université Paris-Saclay
Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.
Notice (8): Trying to access array offset on value of type null [APP/Template/Posts/view.ctp, line 147]Code Context<div class="col-lg-12 order-lg-4 order-md-4">
<? if(!$connected['active']): ?>
<div class="utils__spacer--default"></div>
$viewFile = '/data01/sites/bonpourlatete.com/dev/bonpourlatete.com/src/Template/Posts/view.ctp' $dataForView = [ 'referer' => 'https://dev.bonpourlatete.com/like/2758', 'OneSignal' => '8a2ea76e-2c65-48ce-92e5-098c4cb86093', '_serialize' => [ (int) 0 => 'post' ], 'post' => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 2758, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => true, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => 'NORMAL', 'readed' => null, 'subhead' => 'THE CONVERSATION /SOCIETE ', 'title' => 'Inceste: au-delà du bruit médiatique, entendre la tragique banalité du phénomène', 'subtitle' => 'Comme trop souvent l’actualité fonctionne sans mémoire du passé et sans histoire.', 'subtitle_edition' => null, 'content' => '<figure><hr /></figure> <p style="text-align: center;"><span><a href="https://theconversation.com/profiles/anne-claude-ambroise-rendu-1194266"><strong>Anne-Claude Ambroise-Rendu</strong></a>, <em><a href="https://theconversation.com/institutions/universite-de-versailles-saint-quentin-en-yvelines-uvsq-universite-paris-saclay-2271">Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (UVSQ) – Université Paris-Saclay</a></em></span></p> <hr /> <p>Les toutes récentes <a href="https://www.lemonde.fr/societe/article/2021/01/04/olivier-duhamel-l-inceste-et-les-enfants-du-silence_6065166_3224.html">révélations de Camille Kouchner</a>, qui accuse dans un livre son beau-père Olivier Duhamel d’avoir abusé de son frère jumeau, suscitent un torrent médiatique et des réactions étonnées, comme si la chose – l’inceste – et son émergence dans l’espace public constituait une nouveauté. Pourtant, les chiffres sont là : selon une enquête Ipsos publiée en novembre 2020 un <a href="https://www.lemonde.fr/societe/article/2021/01/05/l-inceste-un-phenomene-tabou-a-l-ampleur-meconnue_6065232_3224.html">Français sur 10</a> serait victime d’inceste même si, rappelons-le, les chiffres, en particulier en matière de criminalité sexuelle, ne sont pas toujours probants.</p> <p>Certes, il a fallu attendre, la fin du XX<sup>e</sup> siècle pour que l’inceste devienne un sujet de discussion publique. <em>Le Monde</em> ne commence à consacrer des articles à la judiciarisation de l’inceste, c’est-à-dire à des procès pour attentats à la pudeur sur moins de 15 ans commis par un ascendant, <a href="https://www.lemonde.fr/archives/article/1974/03/11/m-urs-l-inceste-a-la-campagne_3086659_1819218.html">qu’en mars 1974</a>, ouvrant le feu de manière très significative avec une affaire d’inceste rural.</p> <p><a href="http://www.vrin.fr/book.php?code=9782711603916">L’inceste rural</a>, vu comme produit de l’arriération et de la rudesse des <a href="https://journals.openedition.org/ruralia/77">mœurs campagnardes</a>, est en effet un topos de la littérature médicale depuis le XIX<sup>e</sup> siècle.</p> <h3>Dépasser la prohibition de l’inceste ?</h3> <p>En avril 1971, Michel Polac consacre à l’inceste un épisode de son émission « Post scriptum », avec le film de Louis Malle, <a href="https://www.ina.fr/video/I04334200"><em>Le Souffle au cœur</em>, récit d’un inceste maternel</a>. Les invités, sans condamner ni louer l’inceste, l’analysent comme une donnée avec laquelle une société doit composer et s’interrogent sur la possibilité de dépasser la prohibition de l’inceste.</p> <figure style="text-align: center;"><iframe frameborder="0" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/qVYY3qeV340?wmode=transparent&start=0" width="440"></iframe> <figcaption><span>Entretien avec Louis Malle, à propos de son film Le Souffle au Coeur, TFO.</span></figcaption> </figure> <p>En réaction, Michel Polac reçoit une avalanche de lettres de protestation, qui dénoncent « un sujet infect » en souhaitant que les invités, ces « vicieux salopards », se fassent dérouiller et/ou castrer. Polac est finalement <a href="https://www.lemonde.fr/archives/article/1971/05/11/bull-defense-aux-journaux-parles-et-televises-d-evoquer-aux-heures-de-grande-ecoute-les-films-interdits-aux-moins-de-18-ans-bull-l-emission-post-scriptum-ne-sera-plus-que-mensuell_3065536_1819218.html">sanctionné</a> par le conseil d’administration de l’ORTF et l’émission disparaît dans le courant du mois de mai.</p> <p>Cet épisode, dont la rumeur s’éteint avec l’été commençant, montre d’une manière éloquente la force du silence qui pèse sur l’inceste : ce « sujet infect » n’a pas encore droit de cité à la télévision. Par ailleurs il montre aussi que pour de nombreux téléspectateurs, le traitement a été jugé trop léger et inadapté.</p> <h3>Créer les conditions pour évoquer les affaires d’abus</h3> <p>Après cela, la décennie 1970 va être pour les médias celle d’une ouverture au « discours sur la sexualité » qui créé les conditions d’évoquer peu à peu ce qu’on appelle alors la pédophilie.</p> <p>La télévision en particulier affronte l’inceste et les évocations fictionnelles ou documentaires du viol par inceste se multiplient. Ainsi, en 1978, le journal de 20 h d’Antenne 2 consacre un reportage de trois minutes au cas d’un enfant de huit ans violé par son père – sans dommages cette fois pour la rédaction.</p> <p>À partir du milieu des années 1980, différentes « affaires » attirent l’attention des médias et des pouvoirs publics sur les lacunes du dispositif de protection de l’enfance. Ainsi, dans <a href="https://www.babelio.com/livres/Bisson-Lenfant-derriere-la-porte/116386"><em>L’enfant derrière la porte</em></a> en 1982, <a href="https://www.parismatch.com/Actu/Societe/David-l-enfant-du-placard-159873">David Bisson</a> raconte son calvaire d’enfant martyrisé.</p> <p>Peu après, 1986 marque un tournant décisif en matière de parole publique sur l’inceste. Lors des débats des <em>Dossiers de l’écran</em> diffusés par Antenne 2, le journaliste Alain Jérôme donne en direct la parole à trois femmes adultes, victimes de pères ou de frères incestueux, parmi lesquelles Éva Thomas qui vient de publier <a href="https://www.jailu.com/le-viol-du-silence/9782290305973"><em>Le viol du silence</em></a>.</p> <p><iframe frameborder="0" height="349" marginheight="0" marginwidth="0" scrolling="no" src="https://player.ina.fr/player/embed/I20048301/1/1b0bd203fbcd702f9bc9b10ac3d0fc21/620/349/1" width="100%"></iframe></p> <p>L’émission est annoncée par le magazine chrétien <em>La Vie</em> sous le titre : « les barreaux de la prison de l’inceste vont voler en éclats ».</p> <h3>L’impact du témoignage</h3> <p>La télévision prend le risque du témoignage vivant des victimes en même temps qu’elle sollicite l’avis des téléspectateurs. Après avoir écrit dans l’incipit de son livre – « À quinze ans j’ai été violée par mon père », pour la première fois, une victime d’inceste témoigne à visage découvert, après que deux autres femmes, de dos elles, ont raconté leur histoire (toujours dans cette même émission des <em>Dossiers de l’écran</em>).</p> <p>Trente ans après les faits, ces victimes viennent parler de souffrance qui semblent toujours très vives, offrant l’occasion au public de comprendre que la particularité du dommage causé par le viol – incestueux ou non – est de se conjuguer au futur.</p> <p>Le retentissement de l’émission est énorme et il n’est pas excessif de dire que toute la presse – nationale, régionale et étrangère (<em>L’illustré Suisse, Il Mattino, La Republica</em>) – en parle, d’une voix unanime.</p> <p>L’insistance est mise sur le mutisme des victimes (<em>Le Républicain lorrain</em>, 29/08/1986, <em>La Voix du Nord</em>, 27/08), sur « l’hypocrisie et le silence complice » qui règne sur le sujet (<em>Le Figaro</em>, 02/09/1986) et sur la grande victoire que constitue cette prise de parole : « Les petites filles ne se sentent plus coupables » (<em>Le Matin</em>, 02/09/1986). « Toutes les couches de la société sont concernées », remarquent enfin les journaux Télé Journal (30/08 au 05/09/1986,) et <em>Le Républicain lorrain</em> (27/08 et 29/08/1986).</p> <h3>Une rupture dans le paysage littéraire</h3> <p>Deux ans plus tard, l’écrivaine Christiane Rochefort publie <a href="https://www.grasset.fr/livres/la-porte-du-fond-9782246411611"><em>La Porte du fond</em></a>, avec cet exergue :</p> <blockquote> <p>Il était le pacha du harem avec ses deux femmes.<br />Bon, une et demi.<br />Moi ce n’était qu’un jeu.<br />J’étais encore une enfant.<br />Les enfants, c’est sacré.</p> </blockquote> <p>Couronné par le prix Médicis, l’ouvrage donne la mesure du changement qui s’opère dans le paysage littéraire après un siècle de silence ou de représentation irénique (inceste amoureux excessif ou passionnel) chez Emile Zola (<a href="https://www.bacdefrancais.net/curee-zola-chapitre-1-fin.php"><em>La Curée</em></a>) Jean Cocteau (<a href="https://www.franceinter.fr/emissions/affaires-sensibles/affaires-sensibles-07-octobre-2020"><em>Les Enfants Terribles</em></a>) ou Louis Malle (<a href="https://www.franceinter.fr/emissions/affaires-sensibles/affaires-sensibles-07-octobre-2020"><em>Le Souffle au cœur</em></a>).</p> <p>En décrivant un inceste père-fille comme un cercle vicieux condamnant l’enfant abusé au silence, le <a href="https://next.liberation.fr/livres/2004/11/11/les-ailes-de-rochefort_499099">roman sarcastique et furieux</a> de Christiane Rochefort inscrit désormais cette figure littéraire dans le cadre de l’abus de pouvoir et du crime.</p> <h3>Briser un « vieux tabou »</h3> <p>C’est à nouveau, pour « pour briser ce qui reste un vieux tabou » que François de Closet réunit le 27 mars 1989 sur le plateau de son émission Médiations, des spécialistes et des témoins des actions diverses menées contre l’inceste.</p> <p>Ainsi est présentée l’émission, fidèle au topos désormais presque classique de la <a href="https://larevuedesmedias.ina.fr/depuis-quand-les-medias-parlent-ils-de-pedophilie">révélation</a>. Le reportage réalisé auprès de très jeunes enfants n’est sans doute pas étranger à la réussite de cette soirée. L’émission aurait ce soir-là presque atteint le chiffre de 40 % de part d’audience : mieux que les <em>Dossiers de l’écran</em> trois ans plus tôt (Médias, 12/09/1986).</p> <blockquote> <p>« Après, il m’a dit de ne pas le dire à ma maman parce que sinon il m’a dit qu’il me tuerait moi et ma maman », murmure Sandrine, 10 ans, abusée pendant deux ans par l’ami de sa mère.</p> </blockquote> <p>De surcroit, ce magazine a un impact. Claudine, une des invitée, est <a href="https://www.lemonde.fr/archives/article/1989/06/24/un-pere-poursuit-sa-fille-apres-une-emission-televisee-inceste-et-diffamation_4138749_1819218.html">poursuivie</a> peu après par le tribunal de grande instance de Saint-Brieuc, pour diffamation à l’encontre de son père, comme du reste Patrick Le Lay, PDG de TF1, et François de Closets lui-même.</p> <p>La jeune femme est condamnée en juillet 1989 à un 1 franc symbolique. « Le tribunal de St Brieuc a tranché : le viol en famille doit rester secret » commente <em>Libération</em>, en juillet 1989.</p> <h3>Rompre l’anonymat</h3> <p>En donnant la parole aux victimes, mais surtout en offrant à la curiosité et à la compassion du téléspectateur leur visage, singulier, unique, la télévision <a href="https://www.cairn.info/revue-societes-et-representations-2016-2-page-59.htm">rompt l’anonymat</a> que maintient l’écrit.</p> <p>Elle permet la reconnaissance et l’identification, bref elle fracasse le silence plus que n’importe quel média, le voyeurisme auquel elle invite étant la garantie même de la transgression qu’elle s’autorise.</p> <p>Cette fois encore la presse écrite se fait un large écho de l’émission. Rappelant que « pendant que l’opinion se focalise sur quelques meurtres d’enfants, d’autres sont violés ou agressés par un parent dans l’indifférence générale » (Télérama, 15/03/1989).</p> <p>C’est donc au cours de cette deuxième moitié des années quatre-vingt que les victimes commencent à se faire entendre. Désormais, la cause semble entendue : il s’agit de dénoncer des agissements massifs qui enfreignent les valeurs essentielles de la société, et la communauté de jugement est unie dans l’accusation. Dès lors, la parole des victimes semble désormais « autorisée » et les livres de témoignages se multiplient au cours des années 1990.</p> <h3>Le paradoxe de la « parole sur l’inceste »</h3> <p>Pourtant, et c’est tout le paradoxe de la « parole sur l’inceste », l’intense bruit médiatique qui caractérise ces quelques années, est oublié aussitôt que passé et depuis les années 2000 chaque « affaire » de dénonciation publique des viols d’enfants ou d’inceste semble provoquer la stupeur comme s’il s’agissant d’une « découverte » ou pis d’un fait nouveau.</p> <p>Cette « stupeur » témoigne d’une résistance profonde persistante à reconnaître la banalité de l’inceste. Le faire c’est mettre en cause ce pilier de l’ordre social qu’est la famille, c’est délicat. Il faut compter également avec le système médiatique pour lequel seul l’inédit a une véritable valeur.</p> <p>La personnalisation des dénonciations, l’appartenance des dénonciatrices à des milieux sociaux privilégiés, dans lesquels on maîtrise la parole et plus encore l’écriture, concentre le scandale sur quelques figures de notables, comme l’a montré <a href="https://www.francetvinfo.fr/culture/livres/affaire-gabriel-matzneff/">l’affaire Gabriel Matzneff</a>.</p> <p>Cette dernière n’était pourtant pas neuve et répondait, 30 ans après, aux confessions littéraires de Matzneff qui n’a jamais rien dissimulé de ses goûts et de ses pratiques.</p> <h3>Le mythe des années 68 « déviantes »</h3> <p>Après le mythe de « l’inceste rural », voici le XXI<sup>e</sup> siècle obsédé par un autre mythe : l’inceste ou l’agression sexuelle sur mineur fruit de la libération des mœurs des années 1970 et déviance du gauchisme ou du progressisme. Il est devenu presque banal de <a href="https://www.lesechos.fr/2018/02/il-est-interdit-dinterdire-une-erreur-de-mai-68-984049">dénoncer</a> l’effet délétère de Mai 68 sur les comportements sexuels, ce qui témoigne d’une erreur d’appréciation.</p> <p>Si Mai 68 a libéré la parole sur la sexualité, autorisant le développement de revendications relatives aux sexualités alternatives, l’événement a aussi ouvert une fenêtre et attiré l’attention sur la criminalité sexuelle et ses victimes.</p> <p>Du même coup, l’enjeu de ces révélations se trouve fréquemment déporté, puisqu’elles sont instrumentalisées à des fins politiques faisant largement oublier que l’inceste est un phénomène que l’on pourrait malheureusement qualifier d’« ordinaire ».</p> <p>Une chose demeure : alors que l’inceste est un des crimes les plus réprouvés moralement, il est aussi l’un des crimes les moins révélés et dénoncés, preuve s’il en fallait de la persistance du déni.<img src="https://counter.theconversation.com/content/152841/count.gif?distributor=republish-lightbox-basic" alt="The Conversation" width="1" height="1" /></p> <hr /> <p><span><a href="https://theconversation.com/profiles/anne-claude-ambroise-rendu-1194266">Anne-Claude Ambroise-Rendu</a>, Professeur d'histoire contemporaine, <em><a href="https://theconversation.com/institutions/universite-de-versailles-saint-quentin-en-yvelines-uvsq-universite-paris-saclay-2271">Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (UVSQ) – Université Paris-Saclay</a></em></span></p> <hr /> <h4>Cet article est republié à partir de <a href="https://theconversation.com">The Conversation</a> sous licence Creative Commons. Lire l’<a href="https://theconversation.com/inceste-au-dela-du-bruit-mediatique-entendre-la-tragique-banalite-du-phenomene-152841">article original</a>.</h4>', 'content_edition' => null, 'slug' => 'inceste-au-dela-du-bruit-mediatique-entendre-la-tragique-banalite-du-phenomene', 'headline' => false, 'homepage' => 'col-md-6', 'like' => (int) 310, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 2997, 'homepage_order' => (int) 2997, 'original_url' => 'https://theconversation.com/inceste-au-dela-du-bruit-mediatique-entendre-la-tragique-banalite-du-phenomene-152841', 'podcast' => false, 'tagline' => '', 'poster' => null, 'category_id' => (int) 5, 'person_id' => (int) 85, 'post_type_id' => (int) 1, 'poster_attachment' => null, 'editions' => [[maximum depth reached]], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'attachments' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'comments' => [ [maximum depth reached] ], 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, 'relatives' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Post) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Post) {}, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Post) {}, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Post) {} ], 'embeds' => [], 'images' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'audios' => [], 'comments' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Comment) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Comment) {}, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Comment) {} ], 'author' => 'Bon pour la tête', 'description' => 'Comme trop souvent l’actualité fonctionne sans mémoire du passé et sans histoire.', 'title' => 'Inceste: au-delà du bruit médiatique, entendre la tragique banalité du phénomène', 'crawler' => true, 'connected' => null, 'menu_blocks' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Block) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Block) {} ], 'menu' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 4 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 5 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 6 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 7 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 8 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 9 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 10 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 11 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 12 => object(App\Model\Entity\Category) {} ] ] $bufferLevel = (int) 1 $referer = 'https://dev.bonpourlatete.com/like/2758' $OneSignal = '8a2ea76e-2c65-48ce-92e5-098c4cb86093' $_serialize = [ (int) 0 => 'post' ] $post = object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 2758, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => true, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => 'NORMAL', 'readed' => null, 'subhead' => 'THE CONVERSATION /SOCIETE ', 'title' => 'Inceste: au-delà du bruit médiatique, entendre la tragique banalité du phénomène', 'subtitle' => 'Comme trop souvent l’actualité fonctionne sans mémoire du passé et sans histoire.', 'subtitle_edition' => null, 'content' => '<figure><hr /></figure> <p style="text-align: center;"><span><a href="https://theconversation.com/profiles/anne-claude-ambroise-rendu-1194266"><strong>Anne-Claude Ambroise-Rendu</strong></a>, <em><a href="https://theconversation.com/institutions/universite-de-versailles-saint-quentin-en-yvelines-uvsq-universite-paris-saclay-2271">Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (UVSQ) – Université Paris-Saclay</a></em></span></p> <hr /> <p>Les toutes récentes <a href="https://www.lemonde.fr/societe/article/2021/01/04/olivier-duhamel-l-inceste-et-les-enfants-du-silence_6065166_3224.html">révélations de Camille Kouchner</a>, qui accuse dans un livre son beau-père Olivier Duhamel d’avoir abusé de son frère jumeau, suscitent un torrent médiatique et des réactions étonnées, comme si la chose – l’inceste – et son émergence dans l’espace public constituait une nouveauté. Pourtant, les chiffres sont là : selon une enquête Ipsos publiée en novembre 2020 un <a href="https://www.lemonde.fr/societe/article/2021/01/05/l-inceste-un-phenomene-tabou-a-l-ampleur-meconnue_6065232_3224.html">Français sur 10</a> serait victime d’inceste même si, rappelons-le, les chiffres, en particulier en matière de criminalité sexuelle, ne sont pas toujours probants.</p> <p>Certes, il a fallu attendre, la fin du XX<sup>e</sup> siècle pour que l’inceste devienne un sujet de discussion publique. <em>Le Monde</em> ne commence à consacrer des articles à la judiciarisation de l’inceste, c’est-à-dire à des procès pour attentats à la pudeur sur moins de 15 ans commis par un ascendant, <a href="https://www.lemonde.fr/archives/article/1974/03/11/m-urs-l-inceste-a-la-campagne_3086659_1819218.html">qu’en mars 1974</a>, ouvrant le feu de manière très significative avec une affaire d’inceste rural.</p> <p><a href="http://www.vrin.fr/book.php?code=9782711603916">L’inceste rural</a>, vu comme produit de l’arriération et de la rudesse des <a href="https://journals.openedition.org/ruralia/77">mœurs campagnardes</a>, est en effet un topos de la littérature médicale depuis le XIX<sup>e</sup> siècle.</p> <h3>Dépasser la prohibition de l’inceste ?</h3> <p>En avril 1971, Michel Polac consacre à l’inceste un épisode de son émission « Post scriptum », avec le film de Louis Malle, <a href="https://www.ina.fr/video/I04334200"><em>Le Souffle au cœur</em>, récit d’un inceste maternel</a>. Les invités, sans condamner ni louer l’inceste, l’analysent comme une donnée avec laquelle une société doit composer et s’interrogent sur la possibilité de dépasser la prohibition de l’inceste.</p> <figure style="text-align: center;"><iframe frameborder="0" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/qVYY3qeV340?wmode=transparent&start=0" width="440"></iframe> <figcaption><span>Entretien avec Louis Malle, à propos de son film Le Souffle au Coeur, TFO.</span></figcaption> </figure> <p>En réaction, Michel Polac reçoit une avalanche de lettres de protestation, qui dénoncent « un sujet infect » en souhaitant que les invités, ces « vicieux salopards », se fassent dérouiller et/ou castrer. Polac est finalement <a href="https://www.lemonde.fr/archives/article/1971/05/11/bull-defense-aux-journaux-parles-et-televises-d-evoquer-aux-heures-de-grande-ecoute-les-films-interdits-aux-moins-de-18-ans-bull-l-emission-post-scriptum-ne-sera-plus-que-mensuell_3065536_1819218.html">sanctionné</a> par le conseil d’administration de l’ORTF et l’émission disparaît dans le courant du mois de mai.</p> <p>Cet épisode, dont la rumeur s’éteint avec l’été commençant, montre d’une manière éloquente la force du silence qui pèse sur l’inceste : ce « sujet infect » n’a pas encore droit de cité à la télévision. Par ailleurs il montre aussi que pour de nombreux téléspectateurs, le traitement a été jugé trop léger et inadapté.</p> <h3>Créer les conditions pour évoquer les affaires d’abus</h3> <p>Après cela, la décennie 1970 va être pour les médias celle d’une ouverture au « discours sur la sexualité » qui créé les conditions d’évoquer peu à peu ce qu’on appelle alors la pédophilie.</p> <p>La télévision en particulier affronte l’inceste et les évocations fictionnelles ou documentaires du viol par inceste se multiplient. Ainsi, en 1978, le journal de 20 h d’Antenne 2 consacre un reportage de trois minutes au cas d’un enfant de huit ans violé par son père – sans dommages cette fois pour la rédaction.</p> <p>À partir du milieu des années 1980, différentes « affaires » attirent l’attention des médias et des pouvoirs publics sur les lacunes du dispositif de protection de l’enfance. Ainsi, dans <a href="https://www.babelio.com/livres/Bisson-Lenfant-derriere-la-porte/116386"><em>L’enfant derrière la porte</em></a> en 1982, <a href="https://www.parismatch.com/Actu/Societe/David-l-enfant-du-placard-159873">David Bisson</a> raconte son calvaire d’enfant martyrisé.</p> <p>Peu après, 1986 marque un tournant décisif en matière de parole publique sur l’inceste. Lors des débats des <em>Dossiers de l’écran</em> diffusés par Antenne 2, le journaliste Alain Jérôme donne en direct la parole à trois femmes adultes, victimes de pères ou de frères incestueux, parmi lesquelles Éva Thomas qui vient de publier <a href="https://www.jailu.com/le-viol-du-silence/9782290305973"><em>Le viol du silence</em></a>.</p> <p><iframe frameborder="0" height="349" marginheight="0" marginwidth="0" scrolling="no" src="https://player.ina.fr/player/embed/I20048301/1/1b0bd203fbcd702f9bc9b10ac3d0fc21/620/349/1" width="100%"></iframe></p> <p>L’émission est annoncée par le magazine chrétien <em>La Vie</em> sous le titre : « les barreaux de la prison de l’inceste vont voler en éclats ».</p> <h3>L’impact du témoignage</h3> <p>La télévision prend le risque du témoignage vivant des victimes en même temps qu’elle sollicite l’avis des téléspectateurs. Après avoir écrit dans l’incipit de son livre – « À quinze ans j’ai été violée par mon père », pour la première fois, une victime d’inceste témoigne à visage découvert, après que deux autres femmes, de dos elles, ont raconté leur histoire (toujours dans cette même émission des <em>Dossiers de l’écran</em>).</p> <p>Trente ans après les faits, ces victimes viennent parler de souffrance qui semblent toujours très vives, offrant l’occasion au public de comprendre que la particularité du dommage causé par le viol – incestueux ou non – est de se conjuguer au futur.</p> <p>Le retentissement de l’émission est énorme et il n’est pas excessif de dire que toute la presse – nationale, régionale et étrangère (<em>L’illustré Suisse, Il Mattino, La Republica</em>) – en parle, d’une voix unanime.</p> <p>L’insistance est mise sur le mutisme des victimes (<em>Le Républicain lorrain</em>, 29/08/1986, <em>La Voix du Nord</em>, 27/08), sur « l’hypocrisie et le silence complice » qui règne sur le sujet (<em>Le Figaro</em>, 02/09/1986) et sur la grande victoire que constitue cette prise de parole : « Les petites filles ne se sentent plus coupables » (<em>Le Matin</em>, 02/09/1986). « Toutes les couches de la société sont concernées », remarquent enfin les journaux Télé Journal (30/08 au 05/09/1986,) et <em>Le Républicain lorrain</em> (27/08 et 29/08/1986).</p> <h3>Une rupture dans le paysage littéraire</h3> <p>Deux ans plus tard, l’écrivaine Christiane Rochefort publie <a href="https://www.grasset.fr/livres/la-porte-du-fond-9782246411611"><em>La Porte du fond</em></a>, avec cet exergue :</p> <blockquote> <p>Il était le pacha du harem avec ses deux femmes.<br />Bon, une et demi.<br />Moi ce n’était qu’un jeu.<br />J’étais encore une enfant.<br />Les enfants, c’est sacré.</p> </blockquote> <p>Couronné par le prix Médicis, l’ouvrage donne la mesure du changement qui s’opère dans le paysage littéraire après un siècle de silence ou de représentation irénique (inceste amoureux excessif ou passionnel) chez Emile Zola (<a href="https://www.bacdefrancais.net/curee-zola-chapitre-1-fin.php"><em>La Curée</em></a>) Jean Cocteau (<a href="https://www.franceinter.fr/emissions/affaires-sensibles/affaires-sensibles-07-octobre-2020"><em>Les Enfants Terribles</em></a>) ou Louis Malle (<a href="https://www.franceinter.fr/emissions/affaires-sensibles/affaires-sensibles-07-octobre-2020"><em>Le Souffle au cœur</em></a>).</p> <p>En décrivant un inceste père-fille comme un cercle vicieux condamnant l’enfant abusé au silence, le <a href="https://next.liberation.fr/livres/2004/11/11/les-ailes-de-rochefort_499099">roman sarcastique et furieux</a> de Christiane Rochefort inscrit désormais cette figure littéraire dans le cadre de l’abus de pouvoir et du crime.</p> <h3>Briser un « vieux tabou »</h3> <p>C’est à nouveau, pour « pour briser ce qui reste un vieux tabou » que François de Closet réunit le 27 mars 1989 sur le plateau de son émission Médiations, des spécialistes et des témoins des actions diverses menées contre l’inceste.</p> <p>Ainsi est présentée l’émission, fidèle au topos désormais presque classique de la <a href="https://larevuedesmedias.ina.fr/depuis-quand-les-medias-parlent-ils-de-pedophilie">révélation</a>. Le reportage réalisé auprès de très jeunes enfants n’est sans doute pas étranger à la réussite de cette soirée. L’émission aurait ce soir-là presque atteint le chiffre de 40 % de part d’audience : mieux que les <em>Dossiers de l’écran</em> trois ans plus tôt (Médias, 12/09/1986).</p> <blockquote> <p>« Après, il m’a dit de ne pas le dire à ma maman parce que sinon il m’a dit qu’il me tuerait moi et ma maman », murmure Sandrine, 10 ans, abusée pendant deux ans par l’ami de sa mère.</p> </blockquote> <p>De surcroit, ce magazine a un impact. Claudine, une des invitée, est <a href="https://www.lemonde.fr/archives/article/1989/06/24/un-pere-poursuit-sa-fille-apres-une-emission-televisee-inceste-et-diffamation_4138749_1819218.html">poursuivie</a> peu après par le tribunal de grande instance de Saint-Brieuc, pour diffamation à l’encontre de son père, comme du reste Patrick Le Lay, PDG de TF1, et François de Closets lui-même.</p> <p>La jeune femme est condamnée en juillet 1989 à un 1 franc symbolique. « Le tribunal de St Brieuc a tranché : le viol en famille doit rester secret » commente <em>Libération</em>, en juillet 1989.</p> <h3>Rompre l’anonymat</h3> <p>En donnant la parole aux victimes, mais surtout en offrant à la curiosité et à la compassion du téléspectateur leur visage, singulier, unique, la télévision <a href="https://www.cairn.info/revue-societes-et-representations-2016-2-page-59.htm">rompt l’anonymat</a> que maintient l’écrit.</p> <p>Elle permet la reconnaissance et l’identification, bref elle fracasse le silence plus que n’importe quel média, le voyeurisme auquel elle invite étant la garantie même de la transgression qu’elle s’autorise.</p> <p>Cette fois encore la presse écrite se fait un large écho de l’émission. Rappelant que « pendant que l’opinion se focalise sur quelques meurtres d’enfants, d’autres sont violés ou agressés par un parent dans l’indifférence générale » (Télérama, 15/03/1989).</p> <p>C’est donc au cours de cette deuxième moitié des années quatre-vingt que les victimes commencent à se faire entendre. Désormais, la cause semble entendue : il s’agit de dénoncer des agissements massifs qui enfreignent les valeurs essentielles de la société, et la communauté de jugement est unie dans l’accusation. Dès lors, la parole des victimes semble désormais « autorisée » et les livres de témoignages se multiplient au cours des années 1990.</p> <h3>Le paradoxe de la « parole sur l’inceste »</h3> <p>Pourtant, et c’est tout le paradoxe de la « parole sur l’inceste », l’intense bruit médiatique qui caractérise ces quelques années, est oublié aussitôt que passé et depuis les années 2000 chaque « affaire » de dénonciation publique des viols d’enfants ou d’inceste semble provoquer la stupeur comme s’il s’agissant d’une « découverte » ou pis d’un fait nouveau.</p> <p>Cette « stupeur » témoigne d’une résistance profonde persistante à reconnaître la banalité de l’inceste. Le faire c’est mettre en cause ce pilier de l’ordre social qu’est la famille, c’est délicat. Il faut compter également avec le système médiatique pour lequel seul l’inédit a une véritable valeur.</p> <p>La personnalisation des dénonciations, l’appartenance des dénonciatrices à des milieux sociaux privilégiés, dans lesquels on maîtrise la parole et plus encore l’écriture, concentre le scandale sur quelques figures de notables, comme l’a montré <a href="https://www.francetvinfo.fr/culture/livres/affaire-gabriel-matzneff/">l’affaire Gabriel Matzneff</a>.</p> <p>Cette dernière n’était pourtant pas neuve et répondait, 30 ans après, aux confessions littéraires de Matzneff qui n’a jamais rien dissimulé de ses goûts et de ses pratiques.</p> <h3>Le mythe des années 68 « déviantes »</h3> <p>Après le mythe de « l’inceste rural », voici le XXI<sup>e</sup> siècle obsédé par un autre mythe : l’inceste ou l’agression sexuelle sur mineur fruit de la libération des mœurs des années 1970 et déviance du gauchisme ou du progressisme. Il est devenu presque banal de <a href="https://www.lesechos.fr/2018/02/il-est-interdit-dinterdire-une-erreur-de-mai-68-984049">dénoncer</a> l’effet délétère de Mai 68 sur les comportements sexuels, ce qui témoigne d’une erreur d’appréciation.</p> <p>Si Mai 68 a libéré la parole sur la sexualité, autorisant le développement de revendications relatives aux sexualités alternatives, l’événement a aussi ouvert une fenêtre et attiré l’attention sur la criminalité sexuelle et ses victimes.</p> <p>Du même coup, l’enjeu de ces révélations se trouve fréquemment déporté, puisqu’elles sont instrumentalisées à des fins politiques faisant largement oublier que l’inceste est un phénomène que l’on pourrait malheureusement qualifier d’« ordinaire ».</p> <p>Une chose demeure : alors que l’inceste est un des crimes les plus réprouvés moralement, il est aussi l’un des crimes les moins révélés et dénoncés, preuve s’il en fallait de la persistance du déni.<img src="https://counter.theconversation.com/content/152841/count.gif?distributor=republish-lightbox-basic" alt="The Conversation" width="1" height="1" /></p> <hr /> <p><span><a href="https://theconversation.com/profiles/anne-claude-ambroise-rendu-1194266">Anne-Claude Ambroise-Rendu</a>, Professeur d'histoire contemporaine, <em><a href="https://theconversation.com/institutions/universite-de-versailles-saint-quentin-en-yvelines-uvsq-universite-paris-saclay-2271">Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (UVSQ) – Université Paris-Saclay</a></em></span></p> <hr /> <h4>Cet article est republié à partir de <a href="https://theconversation.com">The Conversation</a> sous licence Creative Commons. Lire l’<a href="https://theconversation.com/inceste-au-dela-du-bruit-mediatique-entendre-la-tragique-banalite-du-phenomene-152841">article original</a>.</h4>', 'content_edition' => null, 'slug' => 'inceste-au-dela-du-bruit-mediatique-entendre-la-tragique-banalite-du-phenomene', 'headline' => false, 'homepage' => 'col-md-6', 'like' => (int) 310, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 2997, 'homepage_order' => (int) 2997, 'original_url' => 'https://theconversation.com/inceste-au-dela-du-bruit-mediatique-entendre-la-tragique-banalite-du-phenomene-152841', 'podcast' => false, 'tagline' => '', 'poster' => null, 'category_id' => (int) 5, 'person_id' => (int) 85, 'post_type_id' => (int) 1, 'poster_attachment' => null, 'editions' => [], 'tags' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Tag) {}, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Tag) {} ], 'locations' => [], 'attachment_images' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'attachments' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'comments' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Comment) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Comment) {}, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Comment) {} ], 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ '*' => true, 'id' => false ], '[dirty]' => [], '[original]' => [], '[virtual]' => [], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [], '[invalid]' => [], '[repository]' => 'Posts' } $relatives = [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 4914, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => true, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => null, 'readed' => null, 'subhead' => null, 'title' => 'Le milliardaire pro-russe à la manœuvre en Géorgie', 'subtitle' => 'On parle – trop peu – de ce petit pays (3,7 millions d’habitants), au carrefour des flux de pétrole et de gaz, sur la mer Noire, à la frontière de la Russie, de la Turquie, de l’Arménie et de l’Azerbaïdjan. Candidate à l’entrée dans l’Union européenne, la Géorgie connaît ces jours de vives tensions.', 'subtitle_edition' => 'On parle – trop peu – de ce petit pays (3,7 millions d’habitants), au carrefour des flux de pétrole et de gaz, sur la mer Noire, à la frontière de la Russie, de la Turquie, de l’Arménie et de l’Azerbaïdjan. Candidate à l’entrée dans l’Union européenne, la Géorgie connaît ces jours de vives tensions.', 'content' => '<p><span>Entre d’une part le gouvernement et le Parlement qui préparent une loi sur les «interventions étrangères dans l’information», au modèle russe, d’autre part la Présidente, Salomé Zourabichvili (72 ans), francophone, qui fut même diplomate au service de la France. Elle milite pour le rattachement au camp occidental et compte de nombreux partisans. Ceux-ci ont vivement manifesté ces dernières semaines à Tbilissi. </span></p> <p><span><em>Libération</em> brosse le portrait de l’homme qui tire les ficelles du parti majoritaire «Rêve géorgien», Bidzina Ivanichvil (68 ans). Il a bâti une fortune colossale dans les années 1999 et 2000 dans la métallurgie, l’immobilier, la pharma et l’agriculture. Selon Forbes, il pèse 4,9 milliards de dollars. Brièvement Premier ministre en 2012, il prônait le rapprochement avec l’UE et le «pragmatisme» avec Moscou. Officiellement retiré, il garde un réseau de sympathisants dans l’appareil d’Etat. Ses récentes déclarations contre le «militarisme occidental» le font clairement basculer dans le camp de la Russie. En dépit du traumatisme qu’a causé l’annexion par celle-ci de deux pans du pays, l’Ossétie du sud et l’Abkhazie en 2008.</span></p> <hr /> <h4><a href="https://www.liberation.fr/international/europe/bidzina-ivanichvili-le-milliardaire-prorusse-derriere-le-reve-georgien-20240503_OV7M3N4FNZCWNDJWA2A4APTNUI/#:~:text=Apr%C3%A8s%20son%20retour%20inattendu%20en,de%20ses%20d%C3%A9tracteurs%2C%20ses%20all%C3%A9geances.&text=L'homme%20qui%20tire%20les,pouvoir%20R%C3%AAve%20g%C3%A9orgien%2C%20Bidzina%20Ivanichvili." target="_blank" rel="noopener">Lire l'article original</a></h4>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'le-milliardaire-pro-russe-a-la-manoeuvre-en-georgie', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 22, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 4, 'person_id' => (int) 85, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [ [maximum depth reached] ], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 4913, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => false, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => null, 'readed' => null, 'subhead' => null, 'title' => 'La botte secrète chinoise dans les ports et aéroports', 'subtitle' => 'Beaucoup de débats sur la puissance commerciale de la Chine en Europe à l’occasion de la visite de Xi en France. «Le Figaro» nous fait découvrir un autre de ses atouts, peu connu. La société chinoise Nuctech est spécialisée dans les appareils qui scannent les bagages de soutes et les cargaisons maritimes. Elle détient 90% de ce marché en Europe. ', 'subtitle_edition' => 'Beaucoup de débats sur la puissance commerciale de la Chine en Europe à l’occasion de la visite de Xi en France. «Le Figaro» nous fait découvrir un autre de ses atouts, peu connu. La société chinoise Nuctech est spécialisée dans les appareils qui scannent les bagages de soutes et les cargaisons maritimes. Elle détient 90% de ce marché en Europe. ', 'content' => '<p><span>Ces appareils permettent de savoir à peu près tout ce qui entre et sort dans nos pays. L’inquiétude a gagné Bruxelles. Le 23 avril dernier, des fonctionnaires de la direction de la concurrence de la Commission européenne ont effectué des inspections surprises dans les bureaux de cette société, notamment aux Pays-Bas et en Pologne, dans le cadre d'une enquête au titre de la lutte contre les </span><span>subventions abusives. </span></p> <p><span>Aux Etats-Unis aussi les préoccupations quant à la sécurité des infrastructures portuaires sont vives. Mêmes causes, mêmes effets: comme avec les machines à rayons X de Nuctech, l’industrie chinoise a raflé 80% du marché des grues de déchargement sur les docks américains (70% dans le monde) avec le groupe ZPMC. Des monstres d’acier bourrés de technologie connectée qui accèdent à toutes les données sur les mouvements de marchandises. </span></p> <p><span>Le Congrès américain et le Parlement européen ont exigé, ces dernières semaines, une analyse de la situation et des mesures concrètes de «contre-surveillance». Les nouveaux outils de politique commerciale de l’UE, surtout dirigés contre la Chine, permettent des limitations dans l’importation d’équipements sensibles, dans d’autres domaines aussi, comme la santé. Comment réagit Pékin? Le président Macron croit le savoir. Il déclare dans une interview à <em>The Economist</em>: «L’argument de la réciprocité est compris. Les Chinois comprennent que l’on refuse ce qu’eux-mêmes n’accepteraient pas. Il y a de nombreux secteurs pour lesquels la Chine exige que les producteurs soient chinois parce qu’ils sont trop sensibles. Eh bien nous, Européens, nous devons pouvoir faire la même chose et dire qu’il y a des secteurs qui relèvent de la sécurité nationale européenne.»</span></p> <hr /> <h4><a href="https://www.lefigaro.fr/conjoncture/ports-aeroports-cables-sous-marins-comment-pekin-fait-main-basse-sur-la-colonne-vertebrale-de-la-logistique-mondiale-20240503" target="_blank" rel="noopener">Lire l'article original</a></h4>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'la-botte-secrete-chinoise-dans-les-ports-et-aeroports', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 30, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 4, 'person_id' => (int) 85, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [[maximum depth reached]], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 4912, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => true, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => null, 'readed' => null, 'subhead' => null, 'title' => 'Souffrances et espoirs de l’Argentine', 'subtitle' => 'La politique d'austérité radicale de Javier Milei plonge nombre d’Argentins dans la pauvreté. Malgré cela, Milei et ses réformes demeurent porteurs d'espoir, même pour les plus démunis.', 'subtitle_edition' => 'La politique d'austérité radicale de Javier Milei plonge nombre d’Argentins dans la pauvreté. Malgré cela, Milei et ses réformes demeurent porteurs d'espoir, même pour les plus démunis. Qu'ils craignent pour la démocratie ou qu'ils croient à la réussite de l'ultralibéralisme, les Argentins prennent leur mal en patience, en attendant les résultats.', 'content' => '<p style="text-align: center;"><strong>Josef Estermann<sup>1</sup></strong>, article publié sur <a href="https://www.infosperber.ch/politik/in-buenos-aires-grassiert-die-armut/" target="_blank" rel="noopener"><em>Infosperber</em></a> le 2 mai 2024, traduit par <em>BPLT</em></p> <hr /> <p>La métropole de Buenos Aires, qui compte près de 17 millions d'habitants, ne porte plus si bien son nom. Les «bons airs» qui soufflent sur la ville depuis le Río de la Plata continuent certes à faire disparaître les gaz d'échappement le plus rapidement possible, mais Buenos Aires s'enfonce de plus en plus dans le chaos du trafic. Et l'Argentine attend.</p> <h3>Un calme tendu</h3> <p>A l'instar du tango, que l'on peut qualifier de passion contrôlée, la population argentine semble pour l'instant s'arrêter et attendre le prochain pas de côté. Les uns avec appréhension, les autres dans l'attente fébrile de ce que le président Javier Milei fera ensuite. La «tronçonneuse», comme il se définit lui-même, ayant déjà annoncé avant son entrée en fonction le 10 décembre dernier qu'il entendait mettre l'Etat argentin en pièces.</p> <p>Milei est un partisan de l'école autrichienne d'un néolibéralisme extrême (Ludwig von Mises, Friedrich August von Hayek) et défend un anarcho-capitalisme couplé à une attitude populiste et conservatrice en matière de valeurs. Il s'inscrit parfaitement dans une galerie de chefs de gouvernement qui s'étend de Donald Trump à Jair Bolsonaro, Giorgia Meloni et Victor Orban, en passant par Nayib Bukele (Salvador) et Daniel Naboa (Equateur). Avec sa coalition ultra-droite et libertaire La Libertad Avanza (La Liberté avance), il promet de sortir l'Argentine de la crise économique qui la frappe depuis plus de vingt ans.</p> <p>Pour cela, tous les moyens sont bons. Son mouvement étant en minorité au Congrès avec 38 députés sur 257, il souhaite faire passer par décret un ensemble de lois, la «Ley Ómnibus». Sur les 664 lois initiales, il n'en reste plus que 279 en raison de la résistance de l'opposition. Milei est tributaire du soutien d'autres partis, notamment du PRO (Propuesta Republicana) de l'ancien président Mauricio Macri. Les principales lois visent à affaiblir le Parlement et à privatiser les entreprises publiques, mais surtout à réduire la protection sociale, c'est-à-dire la pension de retraite déjà maigre, l'assurance maladie ou les salaires des employés du secteur public.</p> <h3>Comment cacher un éléphant dans une pièce?</h3> <p>A la question de savoir comment il évalue la situation politique actuelle et l'attitude de la majorité de la population face aux projets de Milei, Pepe Tasat, enseignant à l'université Trece de Febrero, me répond par une contre-question: «Comment cache-t-on un éléphant dans une pièce?» Il donne lui-même la réponse par retour du courrier: «En mettant 300 éléphants dans cette pièce».</p> <p>Il fait ainsi allusion à la Ley Ómnibus, ce même paquet de lois par lequel le président Javier Milei veut transformer radicalement l'Etat argentin. La plupart de ces 300 lois semblent plutôt anodines et pourraient tout à fait trouver une majorité au Congrès et auprès de la population. Mais les plus importantes – l'éléphant dans la pièce – sont si radicales et d'une telle portée qu'elles n'ont une chance de passer que comme partie invisible d'un paquet.</p> <p>Comme les dirigeants de l'Equateur ou le Salvador avant lui, Milei souhaite introduire le dollar américain comme monnaie nationale, réduire de moitié l'appareil d'Etat, privatiser la plupart des entreprises publiques (comme la compagnie aérienne Líneas Argentinas) et réduire au minimum les subventions et les assurances sociales. Et ce dans une situation de pauvreté croissante, de chômage et d'absence de perspectives. Milei espère que ce «coup de pouce» lui permettra d'éviter la faillite imminente de l'Etat, de maîtriser l'inflation galopante et de redevenir ainsi attractif pour la Banque mondiale, le Fonds monétaire et les investisseurs privés.</p> <p>Milei a déjà taillé son gouvernement à la «tronçonneuse»: il a réduit de moitié le nombre de ministères, passant de 18 à 9, et ceux qui avaient une importance centrale pour l'opposition ont été supprimés ou transférés dans d'autres. Ainsi, les ministères de l'Environnement et du Développement durable, de la Culture, des Femmes, du Genre et de la Diversité ont notamment disparu. Fin mars, 70'000 fonctionnaires au total avaient été licenciés. La prestigieuse université de Buenos Aires (UBA) est menacée de coupes massives, les hôpitaux de coupes radicales dans leurs budgets.</p> <h3>Mendiants et sans-abri</h3> <p>L'Argentine a longtemps été considérée comme une lueur d'espoir en Amérique latine. De nombreux jeunes du Pérou, de Colombie, de Bolivie ou du Paraguay se sont installés au pays des <em>gaúchos</em> pour tenter leur chance, faire des études et se construire un avenir. Actuellement, le mouvement migratoire va dans l'autre sens: de nombreux étrangers quittent le pays, même les Vénézuéliens qui voulaient échapper au désespoir retournent dans leur pays d'origine, car ils ne voient pas d'avenir en Argentine.</p> <p>Je n'ai jamais vu autant de mendiants et de sans-abri dans les rues de Buenos Aires qu'en ce moment. On me demande régulièrement si je n'ai pas de <em>moneda</em>. Alors que le terme «monnaie» est un vestige des temps anciens, car en ce moment, même les billets de cent francs ne suffisent pas pour s'acheter un petit pain. Le taux d'inflation annuel en Argentine a dépassé les 270% en mars et est l'un des plus élevés au monde. Le renchérissement ne cesse de dévorer les ajustements des salaires.</p> <p>Cependant, de moins en moins de personnes perçoivent un salaire pour leur travail. On estime que plus de 70% travaillent dans l'économie souterraine, et la tendance est à la hausse. Le salaire minimum officiel est de 180 francs; un appartement moyen à Buenos Aires coûte 500 francs. Un vaccin contre la dengue coûte 130 francs, une situation bien sombre au vu de l'épidémie qui sévit actuellement avec 210'000 cas et 160 décès.</p> <p>Au cours des quatre mois qui ont suivi l'entrée en fonction de Javier Milei, le nombre de pauvres a augmenté d'environ 15% et celui des chômeurs d'environ 30%. Aujourd'hui, trois Argentins et Argentines sur cinq sont «pauvres», et 15% d'entre eux sont même «sans ressources», c'est-à-dire qu'ils doivent vivre avec moins de deux dollars américains par jour. Parmi les chômeurs, la situation des jeunes est particulièrement dramatique: en l'espace d'un an, leur nombre a triplé, faisant de l'Argentine le dernier pays d'Amérique du Sud en la matière.</p> <p>La monnaie nationale, le peso, a perdu deux tiers de sa valeur en un an. Une véritable jungle de taux de change s'est développée pour échanger des pesos; il existe au moins six taux différents, selon que l'on change dans la rue, dans un bureau de change, dans une banque ou via Western Union, selon que l'on a besoin de pesos en tant que touriste ou propriétaire d'un commerce.</p> <h3>Attendre et boire du maté</h3> <p>A la question de savoir pourquoi les gens ne sont pas descendus dans la rue face à cette situation, on entend toujours la réponse suivante: «Attendons de voir si Milei peut mettre son projet à exécution». Beaucoup de gens espèrent encore que les coupes budgétaires pourraient finalement mettre un terme, certes douloureux mais durable, à la crise sans fin des 20 dernières années. Beaucoup ont déjà oublié les ajustements structurels radicaux des années 1980 et voient en Milei le <em>mal menor</em>, le moindre mal. Ils en ont assez d'une élite – libérale de gauche ou conservatrice de droite, selon les cas – sans cesse éclaboussée par la corruption et qui n'a pas résolu les véritables problèmes du pays.</p> <p>A l'instar de Trump aux Etats-Unis, Milei est même considéré comme porteur d'espoir par les pauvres et les démunis, même s'ils doivent lutter pour leur survie. La «tronçonneuse» devrait pourtant accomplir sa mission le plus rapidement et le plus efficacement possible, même si cela s'annonce douloureux à court terme. L'opposition, en revanche, voit la démocratie menacée et craint un déclin inexorable de la fière nation.</p> <p>Mais il demeure des choses dont personne ne se prive en Argentine d'être fier: le football, le pape François et l'omniprésent maté, ce thé âpre que les Argentins sirotent avec délectation avec une paille métallique.</p> <hr /> <h4><sup>1</sup>Le rédacteur en chef Josef Estermann, collaborateur régulier d<em>'Infosperber</em>, a vécu et travaillé pendant 17 ans au Pérou et en Bolivie. Il effectue actuellement une tournée de conférences en Argentine, en Bolivie et au Chili.</h4>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'souffrances-et-espoirs-de-l-argentine', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 31, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => 'https://www.infosperber.ch/politik/in-buenos-aires-grassiert-die-armut/', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 5, 'person_id' => (int) 85, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [[maximum depth reached]], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 4909, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => true, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => null, 'readed' => null, 'subhead' => null, 'title' => 'Emergence du langage dans l’évolution humaine: des chercheurs font parler les structures osseuses fossilisées', 'subtitle' => 'Les positions d’Aristote et de Descartes, qui affirmaient que le langage est le «propre de l’homme», se trouvent aujourd’hui contestées par des observations éthologiques sur les singes ou les oiseaux.', 'subtitle_edition' => 'Les positions d’Aristote et de Descartes, qui affirmaient que le langage est le «propre de l’homme», se trouvent aujourd’hui contestées par des observations éthologiques sur les singes ou les oiseaux.', 'content' => '<div style="text-align: left;"><span><span><strong><a href="https://theconversation.com/profiles/pascal-perrier-1528361">Pascal Perrier</a></strong>, <em><a href="https://theconversation.com/institutions/institut-polytechnique-de-grenoble-grenoble-inp-2428">Institut polytechnique de Grenoble (Grenoble INP)</a></em>; <a href="https://theconversation.com/profiles/amelie-vialet-1528373"><strong>Amélie Vialet</strong></a>, <em><a href="https://theconversation.com/institutions/museum-national-dhistoire-naturelle-mnhn-2191">Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)</a></em> et <strong><a href="https://theconversation.com/profiles/yohan-payan-1528354">Yohan Payan</a></strong>, <em><a href="https://theconversation.com/institutions/universite-grenoble-alpes-uga-2279">Université Grenoble Alpes (UGA)</a></em></span></span><hr /><span><em><a href="https://theconversation.com/institutions/universite-grenoble-alpes-uga-2279"></a></em></span> <p>En effet, on retrouve dans les signaux de communication de ces espèces, des caractéristiques similaires à celle du langage parlé humain, telles que la notion de sémantique (un cri est porteur de sens), la variation d’un son qui change la signification du cri (ce qui se rapproche de la notion de phonème, unité minimale du langage parlé humain), ou la notion de morphologie (il existe dans les cris des éléments qui peuvent être combinés de manière variée au sein de différentes structures plus complexes). Mais rien ne permet d’abandonner l’idée que la parole reste « le propre de l’homme », c’est-à-dire la capacité à articuler avec sa bouche des sons distinctifs qui peuvent se combiner à l’infini pour donner une infinité de sens.</p> <p>C’est sans doute à cette spécificité que la question de l’émergence de la parole dans l’évolution humaine doit d’être restée à travers les âges au cœur de recherches dans le domaine de la philosophie, de la linguistique et, plus récemment, de l’éthologie, de la psychologie et des neurosciences. Cette question renvoie à la fois à l’existence des capacités cognitives adaptées à l’émergence du langage, qu’il soit parlé ou non, et à l’existence de capacités physiques de la bouche et des lèvres pour structurer et articuler les unités sonores qui seront les vecteurs acoustiques du langage, via la parole.</p> <p>Cognitivement, le <a href="https://royalsocietypublishing.org/doi/10.1098/rstb.2011.0295">langage renvoie fondamentalement à la capacité d’abstraction</a>. C’est la raison pour laquelle la fabrication d’outils, la maîtrise du feu, les peintures pariétales, la structuration de l’habitat sont autant d’étapes de l’évolution humaine qui ont fréquemment été utilisées comme des marqueurs potentiels de l’émergence de la capacité au langage. Il n’y a pas de consensus sur l’émergence de la parole. Nos travaux visent à contribuer à ces débats, en étudiant si les capacités des hominines fossiles (les Néandertaliens qui sont proches de nous comme leurs ancêtres, les H. heidelbergensis datant de 500 000 ans voire les Australopithèques qui sont beaucoup plus anciens et appartiennent à un autre genre) leur permettaient d’articuler suffisamment de sons distinctifs pour constituer la base du langage parlé.</p> <h3>Depuis quand peut-on articuler ?</h3> <p>Sur le plan physique, c’est l’usage de la bouche qui est au cœur de la capacité à parler. <a href="https://www.youtube.com/watch?v=XVE4B6TxlfM">Le célèbre ethnologue français André Leroi-Gourhan</a> (1911-1986) voyait dans le passage de la quadrupédie à la bipédie une étape essentielle dans l’émergence du langage parlé : permettant l’usage de la main pour des gestes de préhension jusqu’alors effectués par la bouche, la bipédie a « libéré » la mandibule, les lèvres et la langue pour leur permettre d’exécuter un répertoire gestuel riche et structuré, capable de transmettre le langage via le son.</p> <p>Quand est apparue la capacité physique à articuler des sons distinctifs ? C’est lorsque l’ensemble de cartilages marqué par la pomme d’Adam, qu’on appelle le larynx, est suffisamment descendu dans le cou, répondit le <a href="https://www.science.org/doi/10.1126/science.164.3884.1185">chercheur américain Philip Lieberman</a> (1934-2022) dans le journal Science en 1969. Cette descente du larynx aurait, selon lui, offert à la langue un espace vertical nouveau, suffisamment large pour qu’elle puisse se déformer, se bomber ou s’aplatir pour générer une variété de formes et de sons appropriée à la richesse combinatoire du langage.</p> <p>Cette hypothèse, qui a fonctionné pendant plusieurs décennies, en sclérosant quelque peu la recherche dans ce domaine, a depuis lors été fortement contestée. Le chercheur <a href="https://theconversation.com/la-parole-ne-serait-pas-apparue-avec-homo-sapiens-et-ce-sont-les-singes-qui-nous-le-disent-128708">Louis-Jean Boë et ses collègues</a> ont en effet montré que les cris de babouins, dont le larynx est élevé et la langue plate, contiennent des sons proches du « a », du « ou » et du « i », les trois voyelles qui constituent la base fondamentale des systèmes vocaliques des langues du monde.</p> <p>De même, Fitch, pourtant disciple de Lieberman, et ses collègues, <a href="https://www.science.org/doi/10.1126/sciadv.1600723">dans un article paru dans <em>Science Advances</em> en 2016</a>, ont montré, à partir de radiographies de la gueule de macaques au cours de la déglutition, que malgré leur larynx élevé, ces primates pouvaient générer des formes de langue compatibles avec la production de voyelles suffisamment variées et distinctes pour constituer les bases sonores d’un langage parlé. La descente du larynx ne semble donc pas constituer un marqueur fiable de l’émergence de la capacité physique à parler au cours de l’évolution humaine, et le mystère reste entier.</p> <p>Pour tenter de le percer, notre projet <a href="https://iscd.sorbonne-universite.fr/research/sponsored-junior-teams/origins-of-speech/">« Origins of Speech »</a>, s’est proposé d’élaborer des modèles biomécaniques de langue d’humains fossiles.</p> <p>Un modèle biomécanique est un modèle numérique, sur ordinateur, qui représente une partie du corps humain, avec son anatomie, ses structures osseuses, ses tissus mous, ses muscles, et est capable de rendre compte des mécanismes physiques qui régissent leurs mouvements et leurs déformations sous l’action d’activations musculaires. Pour la langue, de tels modèles permettent d’étudier comment les muscles linguaux influencent la forme et la position de la langue dans la bouche. Ainsi, pour les fossiles, ces modèles offriraient la possibilité d’étudier, quantitativement et systématiquement, leur capacité à produire des sons de parole.</p> <h3>Prédire la langue des humains fossiles à partir des os de la tête</h3> <p>Mais sur quoi s’appuyer pour élaborer de tels modèles ? Aucune donnée anatomique n’existe. En effet, les tissus mous de langue, des parois de la bouche, et du visage ne fossilisent pas. Seuls restent les os, plus ou moins abîmés par les sévices du temps.</p> <p>C’est l’idée originale de notre projet, présentée dans <a href="https://journals.plos.org/ploscompbiol/article?id=10.1371/journal.pcbi.1011808">notre article récent</a> publié dans le journal <em>PLoS Computational Biology</em> porté par les jeunes chercheurs de notre équipe, Pablo Alvarez, Marouane El Mouss et Maxime Calka.</p> <h4><a href="https://images.theconversation.com/files/590916/original/file-20240429-20-zn36pe.png?ixlib=rb-4.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img src="https://images.theconversation.com/files/590916/original/file-20240429-20-zn36pe.png?ixlib=rb-4.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" alt="" /></a><em><span>Processus permettant la génération d’un modèle biomécanique de langue de babouin par la transformation d’un modèle de référence élaboré sur un humain actuel. Cette transformation s’appuie sur la modélisation mathématique des différences morphologiques entre les structures osseuses crâniennes de l’humain actuel et du babouin.</span> <span><span>Fourni par l'auteur</span></span></em></h4> <p>Elle consiste à exploiter les structures osseuses fossilisées pour prédire la forme et l’anatomie de la langue de ces humains disparus. Pour cela, nous utilisons comme référence le modèle biomécanique de langue d’un humain vivant, que nous avons soigneusement conçu dans nos laboratoires grenoblois GIPSA-lab et TIMC au cours de près de 3 décennies de recherches coordonnées.</p> <p>Ce modèle rend compte fidèlement de la morphologie de la langue, de ses structures musculaires, des caractéristiques mécaniques de ses tissus mous, et de ses interactions mécaniques avec la mandibule, le palais et l’os hyoïde, un petit os mobile qui relie la langue… au larynx.</p> <h4 style="text-align: center;"><iframe frameborder="0" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/Pz0A5HTYFeM?wmode=transparent&start=0" width="440"></iframe><em><span>Modèle de langue TIMC et Gipsa lab Grenoble.</span></em></h4> <p>C’est en modifiant la géométrie du modèle de référence que nous générerons des modèles biomécaniques pour les langues fossiles. Pour cela, en nous appuyant sur des outils mathématiques combinant des transformations géométriques complexes, nous déterminons tout d’abord la transformation géométrique optimale qui permet de passer de la géométrie du crâne et de la mandibule de l’humain actuel à celle du crâne et de la mandibule de l’humain fossile.</p> <p>Puis nous appliquons cette transformation géométrique au modèle de langue du premier pour le déformer et en faire un modèle de langue pour le second, avec sa forme spécifique, ses structures musculaires, et ses interactions avec la mandibule, le palais et l’os hyoïde…</p> <p>Mais dans quelle mesure peut-on faire confiance à une transformation géométrique basée sur les structures osseuses pour prédire les tissus mous de la langue ? Pour répondre à cette question, cruciale pour valider la méthode, nous avons choisi d’évaluer leur méthode sur la génération d’un modèle biomécanique de langue de babouin, un primate non-humain dont la morphologie de la tête est très différente de celle d’un Homo Sapiens.</p> <p>Notre hypothèse en la matière consiste à dire que si cette méthode marche pour un tel primate, alors il est vraisemblable qu’elle sera fiable pour la prédiction de la langue de tous les humains fossiles dont les crânes sont moins différents de celui d’un Homo Sapiens, que ne l’est celui d’un babouin.Nous avons alors généré deux modèles de langue de babouin. Le premier a été conçu en utilisant une transformation géométrique optimale déterminée en prenant en compte les structures osseuses et les tissus mous de la tête. Comme on peut s’y attendre, la complétude des informations morphologiques prises en compte permet d’obtenir un modèle qui décrit avec une grande précision la morphologie de la langue du babouin.</p> <p>Puis nous avons généré un second modèle, en déterminant la transformation géométrique optimale sur la seule base des informations sur les structures osseuses, ignorant celles sur les tissus mous. Ce second modèle s’est avéré être très proche du premier et la fiabilité de cette prédiction a été validée par des outils statistiques de quantification des incertitudes développés par Anca Belme à l’Institut Jean Le Rond d’Alembert de Sorbonne Université. Nous avons alors pu conclure que notre méthode est fiable pour générer, à partir des seules structures osseuses, des modèles biomécaniques réalistes pour les langues de primates, qu’ils soient humains ou non humains, qu’ils soient vivants ou (bientôt car les analyses sont en cours) fossiles.</p> <p>C’est en exploitant cette méthode, que nous travaillons actuellement à la génération de modèles biomécaniques de la langue d’humains fossiles, tels que les <em>Homo Heidelbergensis</em> connus en Europe à partir de 600 000 ans ou les Néandertaliens de 70-50 000 ans, à partir respectivement des ossements d’Arago 21 (grotte à proximité de Perpignan) et de ceux de La Ferrassie 1 en Dordogne. Notre but est d’explorer systématiquement les conséquences des activations des muscles de la langue dans ces modèles, d’observer le spectre des formes de la bouche qui peuvent ainsi être générées et d’analyser les caractéristiques des sons qui seraient ainsi produits par les fossiles, en faisant l’hypothèse qu’ils possédaient des cordes vocales et des capacités pulmonaires similaires à celles des Homo Sapiens. Il sera aussi possible de tester quantitativement, en jouant sur la position de l’os hyoïde, connecté au larynx, dans quelle mesure la position, plus ou moins haute, du larynx est susceptible d’influencer la richesse des formes de bouches et des sons produits.</p> <p>C’est la méthodologie de recherche que nous avons choisie pour percer le mystère de l’émergence au cours de l’évolution humaine de la capacité à produire avec la bouche des sons suffisamment variés pour constituer la base d’un langage utilisant l’acoustique pour véhiculer des idées entre congénères…<img src="https://counter.theconversation.com/content/226977/count.gif?distributor=republish-lightbox-basic" alt="The Conversation" width="1" height="1" /></p> <hr /> <h4><span><a href="https://theconversation.com/profiles/pascal-perrier-1528361">Pascal Perrier</a>, Professeur en Mathématiques du Signal - Modèles biomécaniques orofociaux - Modèlisation du contrôle moteur de la production de la parole, <em><a href="https://theconversation.com/institutions/institut-polytechnique-de-grenoble-grenoble-inp-2428">Institut polytechnique de Grenoble (Grenoble INP)</a></em>; <a href="https://theconversation.com/profiles/amelie-vialet-1528373">Amélie Vialet</a>, Maître de conférences en paléoanthropologie, <em><a href="https://theconversation.com/institutions/museum-national-dhistoire-naturelle-mnhn-2191">Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)</a></em> et <a href="https://theconversation.com/profiles/yohan-payan-1528354">Yohan Payan</a>, Chercheur en biomécanique des tissus mous, laboratoire TIMC (CNRS, Univ. Grenoble Alpes), <em><a href="https://theconversation.com/institutions/universite-grenoble-alpes-uga-2279">Université Grenoble Alpes (UGA)</a></em></span></h4> <h4>Cet article est republié à partir de <a href="https://theconversation.com">The Conversation</a> sous licence Creative Commons. Lire l’<a href="https://theconversation.com/emergence-du-langage-dans-levolution-humaine-des-chercheurs-font-parler-les-structures-osseuses-fossilisees-226977">article original</a>.</h4> </div>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'emergence-du-langage-dans-l-evolution-humaine-des-chercheurs-font-parler-les-structures-osseuses-fossilisees', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 24, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => 'https://theconversation.com/emergence-du-langage-dans-levolution-humaine-des-chercheurs-font-parler-les-structures-osseuses-fossilisees-226977', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 10, 'person_id' => (int) 85, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [ [maximum depth reached] ], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' } ] $embeds = [] $images = [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) { 'id' => (int) 7753, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'file-20210111-13-1coho7n.jpg', 'type' => 'image', 'subtype' => 'jpeg', 'size' => (int) 111107, 'md5' => 'c1eb39d60b7815b1c3f1a4a9d9dd8dcd', 'width' => (int) 926, 'height' => (int) 604, 'date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'title' => '', 'description' => 'Oeuvre de l'artiste Niki de Saint-Phalle, qui a révélé en 1994 à sa propre fille l'inceste dont elle a été victime (Niki de Saint Phalle, Mon Secret, La Différence, 1994.). Pixabay, CC BY-SA', 'author' => '', 'copyright' => '', 'path' => '1610470845_file20210111131coho7n.jpg', 'embed' => null, 'profile' => 'default', '_joinData' => object(Cake\ORM\Entity) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Attachments' } ] $audios = [] $comments = [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Comment) { 'id' => (int) 3522, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'status' => 'ACCEPTED', 'comment' => 'Ces lignes permettent de relire Guy Mettan avec d'autres lunettes - et M. Mettan paraît tout soudain bien superficiel.', 'post_id' => (int) 2758, 'user_id' => (int) 3600, 'user' => object(App\Model\Entity\User) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Comments' }, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Comment) { 'id' => (int) 3530, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'status' => 'ACCEPTED', 'comment' => '@ Bertoine. C'est exact, je n'avais pas encore pris connaissance de cet article avant d'envoyer mon premier commentaire sur Mai 68.', 'post_id' => (int) 2758, 'user_id' => (int) 4772, 'user' => object(App\Model\Entity\User) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Comments' }, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Comment) { 'id' => (int) 3585, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'status' => 'ACCEPTED', 'comment' => 'bon article, bien complet. tout ça est immonde', 'post_id' => (int) 2758, 'user_id' => (int) 3036, 'user' => object(App\Model\Entity\User) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Comments' } ] $author = 'Bon pour la tête' $description = 'Comme trop souvent l’actualité fonctionne sans mémoire du passé et sans histoire.' $title = 'Inceste: au-delà du bruit médiatique, entendre la tragique banalité du phénomène' $crawler = true $connected = null $menu_blocks = [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Block) { 'id' => (int) 56, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'active' => true, 'name' => '#Trends', 'subtitle' => null, 'description' => null, 'color' => null, 'order' => null, 'position' => null, 'type' => 'menu', 'slug' => 'menu_tags', 'extern_url' => null, 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'posts' => [[maximum depth reached]], '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Blocks' }, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Block) { 'id' => (int) 55, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'active' => true, 'name' => 'Les plus lus cette semaine', 'subtitle' => null, 'description' => null, 'color' => null, 'order' => null, 'position' => null, 'type' => 'menu', 'slug' => 'menu_highlight', 'extern_url' => null, 'tags' => [[maximum depth reached]], 'posts' => [ [maximum depth reached] ], '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Blocks' } ] $menu = [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 2, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'A vif', 'menu' => true, 'menu_order' => (int) 4, 'description' => 'Lorsque nos auteurs ont envie de réagir sur le vif à un événement, des concerts aux disparitions célèbres, ils confient leurs écrits à la rubrique "A vif", afin que ceux-ci soient publiés dans l’instant.', 'slug' => 'a-vif', 'attachment_id' => '0', 'lft' => null, 'rght' => null, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 3, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Chronique', 'menu' => true, 'menu_order' => (int) 5, 'description' => '<p>La réputation des chroniqueurs de Bon pour la tête n’est plus à faire: Tout va bien, Le billet du Vaurien, la chronique de JLK, ou encore Migraine et In#actuel, il y en a pour tous les goûts!</p>', 'slug' => 'chroniques', 'attachment_id' => '0', 'lft' => null, 'rght' => null, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 4, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Lu ailleurs', 'menu' => true, 'menu_order' => (int) 5, 'description' => 'Pourquoi ne pas mettre en avant nos collègues lorsque l'on est sensibles à leur travail? Dans la rubrique « Lu ailleurs » vous trouverez des reprises choisies par la rédaction et remaniées façon BPLT.', 'slug' => 'ailleurs', 'attachment_id' => '0', 'lft' => null, 'rght' => null, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 5, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Actuel', 'menu' => true, 'menu_order' => (int) 1, 'description' => 'Bon pour la tête n’a pas vocation à être un site d’actualité à proprement parler, car son équipe prend le temps et le recul nécessaire pour réagir à l’information.', 'slug' => 'actuel', 'attachment_id' => '0', 'lft' => null, 'rght' => null, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 4 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 6, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Culture', 'menu' => true, 'menu_order' => (int) 3, 'description' => '', 'slug' => 'culture', 'attachment_id' => '0', 'lft' => null, 'rght' => null, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 5 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 7, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Vos lettres', 'menu' => true, 'menu_order' => (int) 6, 'description' => 'Bon pour la tête donne la parole à ses lecteurs, qu’ils aient envie de partager leur avis, pousser un coup de gueule ou contribuer à la palette diversifiée d’articles publiés. A vous de jouer!', 'slug' => 'vos-lettres-a-bon-pour-la-tete', 'attachment_id' => '0', 'lft' => null, 'rght' => null, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 6 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 8, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Analyse', 'menu' => true, 'menu_order' => (int) 3, 'description' => '', 'slug' => 'analyse', 'attachment_id' => '0', 'lft' => null, 'rght' => null, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 7 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 10, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Science', 'menu' => true, 'menu_order' => null, 'description' => '', 'slug' => 'sciences', 'attachment_id' => '0', 'lft' => (int) 1, 'rght' => (int) 2, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 8 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 11, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Histoire', 'menu' => true, 'menu_order' => null, 'description' => '', 'slug' => 'histoire', 'attachment_id' => '0', 'lft' => (int) 3, 'rght' => (int) 4, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 9 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 12, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Humour', 'menu' => true, 'menu_order' => null, 'description' => '', 'slug' => 'humour', 'attachment_id' => '0', 'lft' => (int) 5, 'rght' => (int) 6, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 10 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 13, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Débat', 'menu' => true, 'menu_order' => null, 'description' => '', 'slug' => 'debat', 'attachment_id' => '0', 'lft' => (int) 7, 'rght' => (int) 8, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 11 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 14, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Opinion', 'menu' => true, 'menu_order' => null, 'description' => '', 'slug' => 'opinion', 'attachment_id' => '0', 'lft' => (int) 9, 'rght' => (int) 10, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 12 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 15, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Reportage', 'menu' => true, 'menu_order' => null, 'description' => '', 'slug' => 'reportage', 'attachment_id' => '0', 'lft' => (int) 11, 'rght' => (int) 12, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' } ] $tag = object(App\Model\Entity\Tag) { 'id' => (int) 190, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'société', 'slug' => 'societe', '_joinData' => object(Cake\ORM\Entity) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ '*' => true, 'id' => false ], '[dirty]' => [], '[original]' => [], '[virtual]' => [], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [], '[invalid]' => [], '[repository]' => 'Tags' }include - APP/Template/Posts/view.ctp, line 147 Cake\View\View::_evaluate() - CORE/src/View/View.php, line 1435 Cake\View\View::_render() - CORE/src/View/View.php, line 1393 Cake\View\View::render() - CORE/src/View/View.php, line 892 Cake\Controller\Controller::render() - CORE/src/Controller/Controller.php, line 791 Cake\Http\ActionDispatcher::_invoke() - CORE/src/Http/ActionDispatcher.php, line 126 Cake\Http\ActionDispatcher::dispatch() - CORE/src/Http/ActionDispatcher.php, line 94 Cake\Http\BaseApplication::__invoke() - CORE/src/Http/BaseApplication.php, line 256 Cake\Http\Runner::__invoke() - CORE/src/Http/Runner.php, line 65 App\Middleware\IpMatchMiddleware::__invoke() - APP/Middleware/IpMatchMiddleware.php, line 28 Cake\Http\Runner::__invoke() - CORE/src/Http/Runner.php, line 65 Cake\Routing\Middleware\RoutingMiddleware::__invoke() - CORE/src/Routing/Middleware/RoutingMiddleware.php, line 164 Cake\Http\Runner::__invoke() - CORE/src/Http/Runner.php, line 65 Cors\Routing\Middleware\CorsMiddleware::__invoke() - ROOT/vendor/ozee31/cakephp-cors/src/Routing/Middleware/CorsMiddleware.php, line 32 Cake\Http\Runner::__invoke() - CORE/src/Http/Runner.php, line 65 Cake\Routing\Middleware\AssetMiddleware::__invoke() - CORE/src/Routing/Middleware/AssetMiddleware.php, line 88 Cake\Http\Runner::__invoke() - CORE/src/Http/Runner.php, line 65
Warning: file_put_contents(/data01/sites/bonpourlatete.com/dev/bonpourlatete.com/logs/debug.log) [function.file-put-contents]: failed to open stream: Permission denied in /data01/sites/bonpourlatete.com/dev/bonpourlatete.com/vendor/cakephp/cakephp/src/Log/Engine/FileLog.php on line 133
VOS RÉACTIONS SUR LE SUJET
3 Commentaires
@Bertoine 17.01.2021 | 12h10
«Ces lignes permettent de relire Guy Mettan avec d'autres lunettes - et M. Mettan paraît tout soudain bien superficiel.»
@Fontanelle 17.01.2021 | 16h52
«@ Bertoine. C'est exact, je n'avais pas encore pris connaissance de cet article avant d'envoyer mon premier commentaire sur Mai 68.»
@Fabilausanne 29.01.2021 | 18h26
«bon article, bien complet. tout ça est immonde»