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Actuel / Club W, le culte à la douteuse légalité

Amèle Debey

19 août 2019

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Après le démarchage téléphonique, une nouvelle forme de harcèlement commercial est en pleine expansion sur les réseaux sociaux. Sur Facebook et Instagram notamment, les «soldats» du Club W, maillons d’une chaîne de vente à la légalité douteuse, comptent sur la tyrannie du corps parfait et sur le besoin d’appartenance pour attirer leurs proies. Enquête sur un marketing de réseau d’un genre de plus en plus pernicieux.



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«Coucou. Bienvenue dans mes amis Comment vas tu? Je me présente. Je suis ambassadeur pour un programme de remise en forme. J’essaie d’ajouter un maximum de personnes en vu de trouver celle que je pourrais aider dans leur remise en forme, perte de poids, tonification, prise de masse... Et en parallèle, je recherche aussi des personnes qui souhaiteraient se lancer dans une activité en ligne à temps plein ou en complément de salaire afin agrandir mon équipe d’ambassadeur. Est ce que tu connaîtrais des personnes qui ont ce genre de recherche? Si jamais ma démarche te gêne, je comprendrai et je te laisse me supprimer. jettes un coup d’oeil sur mon profil tu es de quelle region?» (sic). Voici le genre de message intrusif que je reçois en continu, à raison de plusieurs par semaine, depuis environ huit mois via la messagerie de Facebook. Toujours le même ton «friendly», sympathique et misant sur une proximité inexistante. Les textes, souvent ponctués de smileys en tous genres, varient en fonction de l’inspiration de leurs auteurs, mais ils n’ont toujours que deux buts: convaincre le destinataire de se lancer dans un challenge de remise en forme, et le persuader de rejoindre une équipe de coaches virtuels. Ceux qui envoient ces messages travaillent tous pour un certain Club W, qui vend les compléments alimentaires de Juice Plus+, une entreprise américaine qui a mondialement développé son business dans les compléments alimentaires sous forme de gélules de légumes, de fruits et de baies. Mais si le bien fondé de tels produits est contestable, ce qui l’est encore plus c’est le fonctionnement de leur distribution. Juice Plus+ donne le droit au Club W de vendre ses produits, moyennant finances – comme sur le modèle de la franchise. Le Club W se charge ensuite de monter un autre business autour de ces compléments alimentaires. En développant le coaching, les recettes, le suivi des challengers et le système de vente… Sauf que les coaches autoproclamés sont formés par des vidéos sur internet et la formation n’a aucune valeur au-delà de l’expérience W.

«Juice Plus+ est une société de vente directe et membre de SELDIA, l'association européenne de vente directe, explique le porte-parole de la marque, dont le siège européen est basé à Bâle. Les partenaires de Juice Plus+ ne sont rémunérés que par la vente des produits Juice Plus+ aux consommateurs finaux. Les partenaires n'ont pas à acheter de biens ou de services pour être admissibles à une compensation. Le modèle d'affaires est axé sur la distribution des biens et non sur l'acquisition de membres. On paye dans chaque cas pour un service/produit, le service de retour est toujours fourni. Juice Plus+ a un contrôle de conformité très actif et approfondi.» C’est là où les choses se corsent: car pour devenir partenaire franchisé du fameux club, il faut payer 160 CHF dès le départ, puis annuellement. Ensuite, le partenaire gagne non seulement les recettes de ses ventes – avec des bonus qui peuvent aller jusqu’à plusieurs dizaines de milliers de francs en fonction de son implication et de la taille de son équipe – mais également un pourcentage des ventes des membres qu’il aura réussi à recruter. Les membres du Club W sont constamment encouragés à développer leur réseau. Ce descriptif ressemble plus à de la vente pyramidale qu’à du multi-level marketing (MLM), et cette pratique est illégale en Suisse, comme en Europe. Cependant, le diable est dans les détails, et seules quelques nuances séparent la pratique légale de la frauduleuse: «Ce qui permet de distinguer les systèmes légaux de marketing à paliers multiples des systèmes boules de neige, c’est le fait que ces derniers se focalisent sur l’enrôlement de nouveaux participants, selon la Fédération romande des consommateurs. De plus, les ventes ‘multi-niveaux’ sérieuses concernent des produits réellement commercialisables. Cette distinction est très souvent difficile à faire pour le consommateur, car il faut décortiquer tout le mécanisme du modèle commercial utilisé.»

«J'appris que je ne pouvais plus faire aucun partage sur ma page, s'il contenait un propos politique, ou quelque chose de triste ou de négatif»

Fondé par trois Allemands et implanté en Suisse, en Allemagne, en France et en Belgique, le Club W est pratiquement inexistant sur internet, il n’a pas de site, pas de responsable officiel, ni de porte-parole. S’ils ne viennent pas directement vous solliciter et si vous ne les avez pas dans votre liste d’amis, il est difficile de retrouver des partenaires du Club W, ou des informations concernant ce système, car les membres actifs ont l’interdiction formelle de parler aux médias. Seuls quelques blogs personnels d’anciens participants fournissent quelques éléments, pas franchement réjouissants: «J'ai appris que je ne pouvais plus poster de 'conneries' sur mon profil Facebook. Car il devait toujours être BEAU, peut-on lire sur l’un d’entre eux. J'appris que mon profil était une vitrine, la leur. Que je ne pouvais plus mettre que leurs bannières du Club W, toutes plus moches les unes que les autres! J'appris que je ne pouvais plus faire aucun partage sur ma page, s'il contenait un propos politique, ou quelque chose de triste ou de négatif (images violentes, gilets jaunes etc)... J'appris aussi que le produit, c'était moi-même. Que je me vendais moi-même, mon énergie, ma positivité, mon image. Je me devais aussi de poster sur mon profil chaque jour au moins trois ou quatre publications en rapport avec l'alimentation saine, la santé, la forme, le sport, avec des images personnelles et pas copiées sur le net.»

Dans une vidéo YouTube de près de 40 minutes destinée aux futurs coaches du Club W, deux des figures du club expliquent: «Nous sommes notre propre pub. On va mettre en avant sur notre profil nos séances de sport et on va montrer que c’est super bien de manger sainement et de faire du sport. Qu’on se sent bien, qu’on a une vie au top. Les gens vont commencer à vous suivre, ils auront envie de devenir comme vous, du coup ils vont vous contacter pour faire le challenge ou pour devenir partenaire.» Une journaliste, ancienne candidate de télé, au physique avantageux, est mise en avant. Elle explique que le marché de la santé est le plus rentable et que cette activité est gratifiante car elle «participe à une meilleure santé pour les autres»: «Facebook, plus ça va et plus il y a d’abonnés, explique-t-elle. Donc c’est un vivier de clients intarissable. On vous apprend à utiliser cette plateforme qui est une mine d’or pour nous.» Elle raconte ensuite qu’un groupe de partenaires aurait atteint 800 membres. «Donc, vous voyez, vous n’êtes pas tout seul.» Cette manière de faire appel à l’esprit communautaire des gens fait partie de la technique des membres du Club W.

Système illégal

Le Secrétariat d’Etat à l’économie (SECO) définit les choses ainsi: «Un autre élément typique des systèmes boule de neige illégaux est que le nombre des participants augmente de manière très rapide et incontrôlable. D’autres critères qui peuvent aider à qualifier un système de boule de neige sont les suivants: Les participants obtiennent des avantages financiers pour le recrutement de nouvelles personnes; les participants sont tenus d’effectuer un investissement initial d’adhésion; les participants n’ont pas le droit de restituer les produits non vendus en récupérant le prix d’achat; la structure du système ou le calcul des provisions ne sont pas transparents; les produits ne peuvent être vendus qu’entre participants au sein du système, ou ils ne sont guère commercialisables en dehors du système, soit en raison des propriétés du produit, soit en raison des règles du fournisseur.»

En décembre 2011, l’émission A bon entendeur de la RTS dénonçait déjà les pratiques de l’entreprise de compléments alimentaires Yor Health, qui fonctionnait sur le système de vente pyramidale. Ses membres se targuaient de défendre le même but que ceux du Club W, à savoir rendre service aux gens en améliorant leur santé.

Le marketing de réseau a été développé aux Etats-Unis dans les années 40, il ne date donc pas d’hier, mais ses manœuvres s’adaptent aux avancées technologies et sociétales. Désormais, les vendeurs viennent vous alpaguer dans l’intimité illusoire de votre profil sur internet, en se basant sur les éléments que vous affichez à la vue de tous pour mieux savoir vous prendre. Les images de corps parfaits à l’appel parlent à votre égo et le sentiment de rejoindre une «famille» achèvera de vous convaincre. Une famille, une secte ou un troupeau de moutons à tondre?

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VOS RÉACTIONS SUR LE SUJET

2 Commentaires

@SylT 20.08.2019 | 18h24

«Merci d'attirer l'attention sur l'un des multiples visages des ventes pyramidales, qui suivent de près les évolutions des techniques et réseaux sociaux, et savent si bien rester sur le fil du rasoir de la légalité. Des systèmes de Ponzi au jeu de l'avion, de Herbalife à tant d'autres, y compris ce Club W.

"Vente pyramidale ou commercialisation à paliers multiples? La différence, c’est que la vente pyramidale s’accompagne de pratiques illégales, comme l’obligation d’acheter des quantités minimales de produits à des prix déraisonnables... Dans ces modèles il est à peu près impossible de faire des profits sur la vente des produits. Seul le recrutement de nouveaux vendeurs peut rapporter une quelconque somme. Pour Herbalife par exemple, à peine 17 % des représentants réussissaient à gagner de l’argent, et tous les autres ne pouvaient que perdre, et perdre gros.»


@arizan 20.08.2019 | 19h50

«Toujours les mêmes règles dans ces systèmes de vente pyramidale, merci de les avoir énumérées en détail.
Il y eut Holiday Magic, jadis, qui fit beaucoup de dégâts en Suisse romande en particulier.»


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