Culture / Errances du côté de Lucifer
Jean-Michel Olivier convoque une belle dame sans merci, Lucie, installée aux Enfers (Jura)... Dante Gabriel Rossetti - La Belle Dame sans Merci, 1855, pen and pencil.
Mais d’où vient cette sensation de fraicheur à la lecture de ce «conte noir» (l’auteur le désigne ainsi) ? De l’écriture du grand écrivain qu’est Jean-Michel Olivier. Simple, dépouillée en apparence, mais riche de mots qui s’ouvrent aux fantasmes. Et aussi parce que cette histoire fait un pied de nez à la doxa ambiante. Vous pensez que la plupart des femmes sont manipulées par les hommes, souvent leurs victimes? Vous ne connaissez pas Lucie.
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Informer les enfants sur la sexualité, d’accord, mais pourquoi pas aussi sur nos comportements individuels et collectifs entre tensions et rapprochements? Autrement dit, apprendre à se parler pour de bon. Se dire, pour citer le chef soufi, que «la paix, c’est plus que l’absence de guerre» ou «passer du je au nous». Mais évidemment il y a plusieurs façons d’interpréter le mot. Comme le faisait remarquer la vice-maire de Genève, Christina Kitsos: «Quand on prétend chercher la paix en prolongeant la guerre, c’est paradoxal!»</span></p> <p><span>Au Palais des Nations le débat volait haut. Mené par le cinéaste romand Philippe Nicolet, avec des intervenants et intervenantes d’horizons très divers. Entre autres Jakob Kellenberger, ex-diplomate et ex-président du CICR, fort de son expérience de négociateur («une négociation n’a de chance que si elle a le droit d’échouer»), penché sur la façon de «déradicaliser» un conflit, insistant sur la crédibilité des efforts dans la durée. 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L’histoire des nations peut diviser mais aussi réunir quand elle s’écrit avec d’autres, quand elle met en lumière l’entrelacs des civilisations au fil du temps. La culture de la paix s’enracine dans la culture tout court. Sans les livres, sans les philosophes, sans les arts, on reste prisonnier des certitudes bornées et des passions du présent.</span></p> <p><span>A noter que cette fin de semaine, ces préoccupations font <a href="https://2024.16mai.org" target="_blank" rel="noopener">l’objet d’autres discussions</a>, en divers lieux du bout du lac. Beaucoup ricaneront. Ils traiteront Bentounes de «doux rêveur» comme le fait le <em>Nouvel Obs</em>. Ils renverront ses amis de tous poils aux réalités terre-à-terre, à la raison cynique ou aux discours standardisés. Tout ce baratin pacifiste, c’est du brassage d’air, diront-ils. 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Parce que cette coopération militaire nous rassure dans des temps incertains? Parce que nous serions protégés au cas où les Russes se pointeraient à Romanshorn? Pour l’heure, leur «victoire» en Ukraine se borne à conquérir quelques villages à proximité de la malheureuse Kharkiv accablée de bombes. A quelques dizaines de kilomètres de la frontière avec la Russie et de Belgorod, ville russe maintes fois atteinte par les drones et missiles ukrainiens que la défense antiaérienne ne parvient pas tous à intercepter. Mais voilà… tant de voix s’élèvent en Europe pour prédire que l’armada de Poutine va nous envahir! Alors que le Kremlin compte aussi ses morts, n’arrive plus à cacher ses difficultés à renouveler les effectifs, contraints d’aller chercher drones et munitions en Iran ou en Corée du Nord…</span></p> <p><span>Le constat politique, lui, n’est pas hypothétique mais bien réel. 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Syndicats et autorités politiques ont pourtant tout fait pour sauver l’entreprise historique, aux mains d’une multinationale qui compare avantages et inconvénients de chaque lieu de production. Ici, hauts salaires, franc fort et dans ce cas, retard technologique. Donc, départ. Chapeau aux travailleurs qui cherchaient des solutions, des innovations. Les voilà licenciés. Les messages de solidarité font du bien mais n’assurent pas leur avenir. Qu’ils puissent être aidés à rebondir.</span></p> <p><span>Est-ce à dire que notre pays est menacé de désindustrialisation comme il en est beaucoup question chez nos voisins? Gare aux réponses trop simples. Les faits. Face au secteur des services comptant les banques et les assurances, le tourisme, le commerce de gros et de détail, l'administration publique et les assurances sociales, qui pèse pour 75% du PIB, l’industrie résiste, avec environ 24% (contre moins de 14% en France!). 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Le groupe pharmaceutique Lonza, dont le siège est à Bâle mais le site de production à Viège, y a investi plus d’un milliard de francs. Un nouveau complexe de production high-tech fournit des solutions adaptées pour le développement et la fabrication de nouveaux médicaments. Ce site et ses possibilités inédites dans la pharma ancrent Viège et le Valais au cœur des chaînes mondiales de création de valeur. Les investissements dans la recherche et la formation ont joué un rôle majeur pour le développement économique du canton. A la génération précédente, c’est la HES, la Haute école spécialisée, qui a formé des ingénieurs précieux pour alimenter une industrie en plein essor. Petit à petit tout un écosystème propice à l’émergence d’idées innovantes s’est installé en Valais. La Fondation The Ark favorise l’établissement et l’éclosion de start-ups dans les domaines de l’informatique, de l’énergie, des sciences de la vie et de l’environnement. 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Ou leur politique dite verte conduira-t-elle à la décroissance? La concentration des efforts sur la course aux armements et l’aide à l’Ukraine, telle qu’elle est brandie aujourd’hui, peut aider certains secteurs industriels mais coûtera extrêmement cher. On articule à Bruxelles le chiffre de 100 milliards à cette fin d’ici 2029. Ce sera forcément au détriment d’autres attentes, dans les infrastructures, l’éducation, la recherche, la cohésion sociale. Sans compter que la transition écologique, nous assure-t-on, nécessitera en plus une pluie de milliards. Quelles priorités fixera le nouveau Parlement? Selon les choix, les retombées sur l’économie suisse seront différentes. Le surarmement de l’Europe ne nous rapporte quasiment rien, sa santé économique et sociale nous est bien plus bien profitable.</span></p> <p><span>Deuxième point. Le fonctionnement même de l’Union. Deux tendances s’affrontent. 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Le début est autobiographique. Le double de l’auteur, Simon, n’a d’yeux que pour elle au Collège Rousseau de Genève. La belle n’était pas farouche mais pas avec tous, «c’était elle qui décidait». Elle virevoltait entre les garçons. Elle emmenait son camarade de classe fort ému dans les champs, elle connaissait bien les plantes. «C’est la saison des ancolies, regarde!». L’auteur ne peut s’empêcher d’évoquer les vers d’Apollinaire: «L’anémone et l’ancolie/Ont poussé dans le jardin/Où dort la mélancolie/Entre l’amour et le dédain».
Puis Lucie disparaît. Des années durant. Et la voilà qui ressurgit au fil des moments de son destin et de ses hommes. Au Québec. Où elle laisse un mari riche, fracassé au détour d’une promenade dans un paysage tourmenté, mystérieusement. Ce qui lui amène de terribles tracas… et des retrouvailles avec l’ami d’enfance. Plus tard elle trouve refuge en Ecosse, pays fait pour elle, chargé de mythologies, de légendes sombres. Et Simon, une fois encore, la retrouve lorsqu’elle l’appelle. Une intimité sans nom s’installe, les corps se frôlent mais ne se mêlent jamais. Les formes rabâchées de l’amour sont balayées. En existe-t-il qui déconcertent à ce point? Mais est-ce de l’amour? Que veut dire ce mot au juste?
On ne s’étonne pas qu’à son retour en Suisse, Lucie s’installe dans les Franches Montagnes — elle aime les chevaux et les chiens — au lieu dit Les Enfers. Parce qu’on raconte qu’au Moyen-Âge, on avait l’habitude de défricher le pays en brûlant les forêts. Simon y accourt. Risquant ainsi l’irritation — la rupture? — avec sa compagne Sylvie, Genevoise émancipée et féministe. Il espère rentrer chez lui le soir même. Mais Lucie en a décidé autrement: «Tu vas rester dormir à la maison… Ils ont prévu de gros orages.» Elle sert à boire, fait à manger, fredonne des airs des sixties. Mais en effet, l’orage n’est pas loin. La tentative d’étreinte tourne mal. La nuit sur le canapé est cauchemardesque. Et le jour suivant sera sombre, disons très sombre.
On ne s’attarde pas un instant à démêler le vécu de l’imaginaire. L’écrivain se joue du lecteur comme Lucie des hommes, souriant de nos questions, repoussant les limites, s’évadant pour attiser les curiosités fantasmatiques.
Il n’est pas interdit cependant de penser que ce livre va contre l’air du temps et que cela fait du bien. L’ère caricaturale de #MeToo, aussi fondée puisse-t-elle être, se fissure. De l’amante idéalisée à l’emprise infernale de Lucie, il y a tant de variations, amoureuses ou sans adjectifs, entre les hommes et les femmes de ce temps. Comme à l’époque de Baudelaire, de Nerval, d’Apollinaire qui rôdent en filigrane de ces pages.
Lucie d’enfer, de Jean-Michel Olivier. Editions de Fallois, 160 pages, novembre 2020.
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Informer les enfants sur la sexualité, d’accord, mais pourquoi pas aussi sur nos comportements individuels et collectifs entre tensions et rapprochements? Autrement dit, apprendre à se parler pour de bon. Se dire, pour citer le chef soufi, que «la paix, c’est plus que l’absence de guerre» ou «passer du je au nous». Mais évidemment il y a plusieurs façons d’interpréter le mot. Comme le faisait remarquer la vice-maire de Genève, Christina Kitsos: «Quand on prétend chercher la paix en prolongeant la guerre, c’est paradoxal!»</span></p> <p><span>Au Palais des Nations le débat volait haut. Mené par le cinéaste romand Philippe Nicolet, avec des intervenants et intervenantes d’horizons très divers. Entre autres Jakob Kellenberger, ex-diplomate et ex-président du CICR, fort de son expérience de négociateur («une négociation n’a de chance que si elle a le droit d’échouer»), penché sur la façon de «déradicaliser» un conflit, insistant sur la crédibilité des efforts dans la durée. 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Syndicats et autorités politiques ont pourtant tout fait pour sauver l’entreprise historique, aux mains d’une multinationale qui compare avantages et inconvénients de chaque lieu de production. Ici, hauts salaires, franc fort et dans ce cas, retard technologique. Donc, départ. Chapeau aux travailleurs qui cherchaient des solutions, des innovations. Les voilà licenciés. Les messages de solidarité font du bien mais n’assurent pas leur avenir. Qu’ils puissent être aidés à rebondir.</span></p> <p><span>Est-ce à dire que notre pays est menacé de désindustrialisation comme il en est beaucoup question chez nos voisins? Gare aux réponses trop simples. Les faits. Face au secteur des services comptant les banques et les assurances, le tourisme, le commerce de gros et de détail, l'administration publique et les assurances sociales, qui pèse pour 75% du PIB, l’industrie résiste, avec environ 24% (contre moins de 14% en France!). 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Le groupe pharmaceutique Lonza, dont le siège est à Bâle mais le site de production à Viège, y a investi plus d’un milliard de francs. Un nouveau complexe de production high-tech fournit des solutions adaptées pour le développement et la fabrication de nouveaux médicaments. Ce site et ses possibilités inédites dans la pharma ancrent Viège et le Valais au cœur des chaînes mondiales de création de valeur. Les investissements dans la recherche et la formation ont joué un rôle majeur pour le développement économique du canton. A la génération précédente, c’est la HES, la Haute école spécialisée, qui a formé des ingénieurs précieux pour alimenter une industrie en plein essor. Petit à petit tout un écosystème propice à l’émergence d’idées innovantes s’est installé en Valais. La Fondation The Ark favorise l’établissement et l’éclosion de start-ups dans les domaines de l’informatique, de l’énergie, des sciences de la vie et de l’environnement. 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Ou leur politique dite verte conduira-t-elle à la décroissance? La concentration des efforts sur la course aux armements et l’aide à l’Ukraine, telle qu’elle est brandie aujourd’hui, peut aider certains secteurs industriels mais coûtera extrêmement cher. On articule à Bruxelles le chiffre de 100 milliards à cette fin d’ici 2029. Ce sera forcément au détriment d’autres attentes, dans les infrastructures, l’éducation, la recherche, la cohésion sociale. Sans compter que la transition écologique, nous assure-t-on, nécessitera en plus une pluie de milliards. Quelles priorités fixera le nouveau Parlement? Selon les choix, les retombées sur l’économie suisse seront différentes. Le surarmement de l’Europe ne nous rapporte quasiment rien, sa santé économique et sociale nous est bien plus bien profitable.</span></p> <p><span>Deuxième point. Le fonctionnement même de l’Union. Deux tendances s’affrontent. 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De l’écriture du grand écrivain qu’est Jean-Michel Olivier. Simple, dépouillée en apparence, mais riche de mots qui s’ouvrent aux fantasmes. Et aussi parce que cette histoire fait un pied de nez à la doxa ambiante. Vous pensez que la plupart des femmes sont manipulées par les hommes, souvent leurs victimes? 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