Culture / Chez Alain Cebius, séduction et rapiaterie font bon ménage
Alain Cebius, auteur du roman d'humour "aimemoi.ch" (Editions Monsalvens) © Sabine Dormond
Aimer, c’est paraît-il, transformer les défauts de l’autre en qualités. Mais si certains travers ou petites manies effectivement peuvent présenter un côté attendrissant, d’autres sont plus rédhibitoires. La radinerie par exemple. Alain Cebius aborde le thème avec humour dans un roman décalé et à travers un personnage qui brille par sa médiocrité.
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BPLT: En plus de sa redoutable pingrerie, votre personnage n’aime pas son prénom, n’assume pas sa tête et occupe un emploi sans lustre, ni perspective d’avancement. Vous n’y êtes pas allé un peu fort dans le genre anti-héros?
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Qu’est-ce qui fait qu’on s’attache malgré tout à votre personnage?
Je pense qu’on peut s’y identifier. On a peut-être tous un côté parcimonieux ou économe.
Vous avez connu des gens qui érigeaient la radinerie en art de vivre?
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Quelle est leur logique, leur système de valeurs?
Ce qui les intéresse, c’est de tirer un maximum de profit d’un investissement minimum. Ils sont mus par un souci de rentabilité poussé à l’extrême. Ce sont probablement des gens qui ne s’aiment pas, parce qu’ils ne se gâtent pas, se refusent beaucoup de plaisirs. Chez eux, la peur de perdre l’emporte sur le désir de gagner. Les pingres ne jouent donc jamais à la loterie. Ils ratent beaucoup de belles choses dans la vie, parce que leurs victoires ne se rapportent qu’à l’argent et qu’elles sont à la mesure de ce qu’ils économisent: des bouts de chandelles. Ces personnes ne connaîtront jamais l’abondance.
Avez-vous des exemples de stratégies qui permettent de se débiner quand c’est son tour de payer?
Les douleurs abdominales irrépressibles ou le portable qui sonne au moment de l’addition. Ou simplement s’abstenir de toute sortie impliquant un risque de dépense.
Il y a des défauts qui sont plus ou moins bien tolérés par la société. Qu’en est-il de la rapiaterie? Est-ce que les femmes aiment les pingres?
Sans doute pas. Mais le pingre peut faire preuve d’une forme de générosité calculée, qu’il considère comme un investissement, si la femme a des revenus qui peuvent ultérieurement lui assurer une vie confortable. Il dépense utile, selon ses critères à lui.
Est-ce qu’il existe une pingrerie assumée qui consiste par exemple à faire les soldes et une pingrerie plus honteuse comme de lésiner sur les pourboires?
Oui, exactement, les gens assurent totalement l’idée de profiter des soldes. Ils s’en vantent même. Alors que d’autres expressions de la radinerie sont beaucoup plus discrètes, parce qu’elles posent un problème d’honnêteté.
Est-ce que la société de consommation ne nous incite pas à une forme d’avarice en nous faisant miroiter partout de bonnes affaires, des promotions?
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Au final, est-ce qu’on est forcément radin au détriment de quelqu’un d’autre, cette attitude fait-elle nécessairement des lésés?
Oui absolument. À moins d’être un ascète, le radin a besoin de quelqu’un pour exercer sa rapiaterie. Mon personnage préfère par exemple faire des kilomètres à pied jusqu’au supermarché plutôt que de se ravitailler chez l’Arabe du coin. Amazone est l’exemple par excellence: on y économise trois francs sur un livre sans se préoccuper des conditions de travail désastreuses.
Au vingt-et-unième siècle, est-ce qu’on part encore dans l’idée que c’est à l’homme de payer la tournée lors d’une rencontre amoureuse?
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Quelle considération ou motivation supérieure peut inciter votre héros à transiger sur sa pingrerie viscérale?
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Est-ce que les sites facilitent la rencontre amoureuse?
C’est un autre moyen, à un âge où les gens ne vont plus en discothèque et ne veulent pas draguer sur leur lieu de travail. Mais il y a beaucoup de déchets : j’ai lu quelque part que seuls 20 % des abonnés trouvent l’amour. On trouve plus facilement des aventures, des liaisons. Ces sites offrent aussi un moyen de discuter, de parler de choses intimes, de se dévoiler.
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Vous les avez testés pour les besoins du livre?
Non, j’ai juste commencé à remplir le questionnaire et inventé les pseudos qui sont d’ailleurs cités dans les remerciements à la fin du livre. Comme je suis marié, ça aurait pu poser problème.
Votre one man show ‘Plutôt nul qu’en fou-rire’ et vos lectures ‘Poesia comica’ ont aussi vocation de faire rire. L’humour, c’est donc votre marque de fabrique?
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