Actuel / Souveraineté numérique: l’Internet russe peut-il se couper du reste du monde?
Quel contrôle des frontières numériques en Russie? © Wikimedia
Depuis quelques années, bon nombre de lois russes répondent à un besoin des autorités: l'autosuffisance numérique. De quoi s'agit-il? En quelques mots: pouvoir développer une façon d’isoler l’Internet russe sur commande et donner la possibilité de bloquer tout ou partie des communications. Des mesures symboliques. Et évidemment géopolitiques.
Un article original paru sur The Conversation, écrit par Francesca Musiani, Sorbonne Université; Benjamin Loveluck, Télécom ParisTech – Institut Mines-Télécom, Université Paris-Saclay; Françoise Daucé, École des hautes études en sciences sociales (EHESS), and Ksenia Ermoshina, Centre national de la recherche scientifique (CNRS)
L’infrastructure Internet obéit à un principe d’internationalisation des équipements et des flux de données et d’information. Les parties d’Internet qui se trouvent physiquement sur chaque territoire national ont besoin de ressources physiques et informationnelles hébergées sur d’autres territoires pour pouvoir fonctionner. Cependant, dans ce contexte mondialisé, la Russie œuvre depuis 2012 à l’augmentation progressive des contrôles nationaux sur les flux d’information et les infrastructures, dans une atmosphère de méfiance politique croissante à l’égard des mouvements protestataires à l’intérieur du pays et de ses partenaires internationaux à l’extérieur. De nombreuses lois ont déjà été votées en ce sens, comme celle en vigueur depuis 2016 obligeant les entreprises traitant des données de citoyens russes à les stocker sur le territoire national, ou encore celle encadrant l’utilisation des réseaux privés virtuels (VPN), proxys et outils d’anonymisation depuis 2017.
En février 2019, un projet de loi dit «sur l’isolement du segment russe de l’Internet» a été adopté en première lecture à la Douma (334 voix pour contre 47 contre) à l’initiative des sénateurs Klichas et Bokova et du député Lugovoï. Dans la note d’intention qui accompagne ce texte, il est précisé qu’il répond au «caractère agressif de la stratégie pour la cybersécurité nationale des États-Unis» adoptée en septembre 2018. Le projet porte principalement sur deux points: le contrôle du système de noms de domaine (DNS, le système d’adressage de l’Internet) et le routage du trafic, le mécanisme qui sélectionne des chemins dans le réseau Internet pour que les données soient envoyées d’un expéditeur à un ou plusieurs destinataires.
La Russie veut se libérer des contraintes étrangères
Parmi ses préconisations, figurent notamment deux mesures clés. La première est la création par la Russie de sa propre version du DNS, pour pouvoir fonctionner si les liens vers les serveurs situés à l’international sont coupés – aucune des douze entités actuellement responsables des serveurs racines du DNS n’étant située sur le territoire russe. La deuxième consiste, pour les fournisseurs d’accès Internet (FAI), à montrer qu’ils sont en mesure de diriger les flux d’information exclusivement vers des points de routage contrôlés par le gouvernement, qui devraient filtrer le trafic pour que seules les données échangées entre les Russes atteignent leur destination.
Cette législation est la pierre angulaire des efforts du gouvernement russe visant à promouvoir leur «souveraineté numérique»; selon les législateurs russes, il est souhaitable de développer une façon d’isoler l’Internet russe sur commande, qui permettrait de répondre par l’autosuffisance aux agissements de puissances étrangères et de garantir la continuité de son fonctionnement. Inversement, une telle configuration faciliterait aussi les possibilités de blocage de tout ou partie des communications.
L’état russe n’est évidemment pas le seul à viser une plus grande capacité de contrôle sur le réseau. L’Iran essaie de faire de même depuis des années, et la Chine bien sûr avec le «Great Firewall of China». De nombreux états cherchent à renforcer leur autorité sur «leur» Internet, au point dans certains cas de couper partiellement voire totalement le réseau (des mesures connues en anglais comme «shutdowns» ou «kill switch»). Ce fut le cas en Égypte lors de la révolution de 2011, au Congo récemment à l’occasion des élections, et c’est aussi régulièrement le cas dans certaines régions de l’Inde.
Dans le prolongement de ces projets législatifs, une initiative récente, rendue publique le 12 février dernier par l’agence de presse russe TASS, a suscité une attention particulière. Sous l’impulsion de l’état russe, un groupe qui réunit les principaux opérateurs télécoms publics et privés (piloté par Natalya Kasperskaya, la cofondatrice de la célèbre entreprise de sécurité Kaspersky), a décidé de conduire un test afin de couper temporairement l’Internet russe du reste du réseau mondialisé et notamment du World Wide Web. Cela arrivera en principe avant le 1er avril, date limite pour présenter des amendements au projet de loi, qui demanderait aux FAIs russes d’être en mesure de garantir leur capacité à fonctionner de façon autonome du reste du réseau.
Des implications techniques, économiques et politiques
Cependant, et au-delà de la charge symbolique que peut revêtir une autonomisation par la déconnexion d’un pays aussi important, de nombreuses raisons d’ordre technique, économique, mais aussi social et politique, plaident en défaveur de telles tentatives, à la fois pour l’Internet mondial et russe.
D’un point de vue technique, même si la Russie essaie d’anticiper un maximum cette déconnexion, des effets inattendus se produiront inévitablement si elle cherche à se séparer du reste du réseau mondial, en raison du degré d’interdépendance de ce dernier au-delà des frontières nationales et à tous les niveaux de protocoles. Il faut préciser ici que, contrairement à la Chine qui a pensé et conçu son réseau avec un projet bien précis de gouvernance centralisée en interne, la Russie compte plus de 3 000 FAIs, et une infrastructure ramifiée et complexe, avec de nombreuses connexions physiques et économiques avec l’étranger. Dans ce contexte, il est très difficile pour les FAI et les autres opérateurs Internet de savoir précisément à quel degré et comment ils dépendent d’autres composantes infrastructurelles (points d’échange de trafic, réseaux de distribution de contenu, data centers, etc.) au-delà de leurs frontières. Cela pourrait conduire à des problèmes très importants – non seulement pour la Russie elle-même, mais également pour le reste du monde.
Le test pourrait notamment poser des difficultés pour les autres pays qui acheminent le trafic à travers la Russie et ses infrastructures – quelque chose qu’il est difficile de connaître a priori. Les effets du test seront certes suffisamment étudiés et anticipés pour ne pas mener à une véritable catastrophe (par exemple, compromettre pendant longtemps le fonctionnement d’une importante infrastructure de transport ou autre). Mais les conséquences probables seraient plutôt le dysfonctionnement ou le ralentissement de sites Web fréquemment utilisés par l’utilisateur lambda. La plupart d’entre eux fonctionnent en effet à partir de multiples serveurs situés de façon distribuée sur la surface du globe. Le magazine Wired prend l’exemple d’un site d’information qui pourrait dépendre «d’un serveur cloud d’Amazon Web Services, un logiciel de traçage de Google, et un plug-in Facebook pour laisser des commentaires», tous les trois opérant en dehors de la Russie.
Sur le plan économique, en raison de l’infrastructure complexe de l’Internet russe et de ses liens très forts avec le reste de la toile, un tel essai serait difficile et coûteux à mettre en œuvre. La Cour des comptes russe s’est très récemment opposée à cette législation au motif que cela entraînerait une augmentation des dépenses publiques, nécessaires pour aider les opérateurs à mettre en œuvre la technologie et à engager du personnel supplémentaire au sein de Roskomnadzor, l’agence de surveillance des communications, qui ouvrira un centre pour la supervision et l’administration du réseau de communication. Le ministère des Finances s’inquiète aussi des coûts entraînés par ce projet. La mise en œuvre de la loi pourrait coûter cher aux entreprises et favoriser la corruption.
Enfin, du point de vue des libertés politiques, la nouvelle initiative suscite la mobilisation des mouvements citoyens. La «souverainisation» porte des risques de censure encore accrus. Le système devrait être supervisé et coordonné par l’agence de surveillance des communications de l’État, Roskomnadzor, qui centralise déjà le blocage de milliers de sites web – et notamment des sites d’information critiques. La mise en œuvre de ce projet élargirait les possibilités d’inspection et de censure du trafic en Russie, affirme l’association Roskomsvoboda. Comme évoqué plus haut, il pourrait faciliter la possibilité de couper l’Internet ou de contrôler certaines de ses applications, comme Telegram (que le gouvernement russe a cherché à bloquer sans succès au printemps 2018). Un essai d’une telle coupure ou «Internet black-out» a eu lieu en République d’Ingouchie, dans le cadre d’une mobilisation de masse en octobre 2018 où le gouvernement avait réussi à couper presque totalement le trafic. Une manifestation «contre l’isolation du runet» a rassemblé 15 000 personnes à Moscou le 10 mars 2019 à l’initiative de nombreux mouvements et partis de défense des libertés en ligne, témoignant des inquiétudes qui s’expriment dans la société.
Est-il possible de divorcer de l’Internet mondial aujourd’hui, et avec quelles conséquences? Il est difficile d’anticiper toutes les implications de changements aussi importants sur l’architecture globale d’Internet. Lors de la discussion du projet de loi à la Douma, le député Oleg Nilov, du parti Russie juste, a qualifié l’initiative de «Brexit numérique» dont souffriront d’abord les simples utilisateurs en Russie. Comme on a pu le voir (et étudier) à nombre d’occasions dans un passé récent, les infrastructures des réseaux d’information et de communication sont devenues des leviers décisifs dans l’exercice du pouvoir, sur lesquels les gouvernements comptent bien peser de tout leur poids. Mais comme ailleurs, l’espace numérique russe est de plus en plus complexe, et les résultats des expérimentations isolationnistes en cours y sont plus que jamais imprévisibles.
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Le projet porte principalement sur deux points: le contrôle du système de noms de domaine (DNS, le système d’adressage de l’Internet) et le routage du trafic, le mécanisme qui sélectionne des chemins dans le réseau Internet pour que les données soient envoyées d’un expéditeur à un ou plusieurs destinataires.</p> <h2>La Russie veut se libérer des contraintes étrangères</h2><p>Parmi ses préconisations, figurent notamment deux mesures clés. La première est la création par la Russie de sa propre version du DNS, pour pouvoir fonctionner si les liens vers les serveurs situés à l’international sont coupés – aucune des douze entités actuellement responsables des serveurs racines du DNS n’étant située sur le territoire russe. 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Une manifestation «contre l’isolation du runet» a rassemblé 15 000 personnes à Moscou le 10 mars 2019 à l’initiative de nombreux mouvements et partis de défense des libertés en ligne, témoignant des inquiétudes qui s’expriment dans la société.</p> <p>Est-il possible de divorcer de l’Internet mondial aujourd’hui, et avec quelles conséquences? Il est difficile d’anticiper toutes les implications de changements aussi importants sur l’architecture globale d’Internet. Lors de la discussion du projet de loi à la Douma, le député Oleg Nilov, du parti Russie juste, a qualifié l’initiative de «Brexit numérique» dont souffriront d’abord les simples utilisateurs en Russie. 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De nombreuses lois ont déjà été votées en ce sens, comme celle en vigueur <a href="https://pd.rkn.gov.ru/authority/p146/p191/">depuis 2016</a> obligeant les entreprises traitant des données de citoyens russes à les stocker sur le territoire national, ou encore celle encadrant l’utilisation des réseaux privés virtuels (VPN), proxys et outils d’anonymisation <a href="http://publication.pravo.gov.ru/Document/View/0001201707300002">depuis 2017</a>.</p> <p>En février 2019, un <a href="http://sozd.duma.gov.ru/bill/608767-7">projet de loi</a> dit «sur l’isolement du segment russe de l’Internet» a été adopté en première lecture à la Douma (334 voix pour contre 47 contre) à l’initiative des sénateurs Klichas et Bokova et du député Lugovoï. Dans la note d’intention qui accompagne ce texte, il est précisé qu’il répond au «caractère agressif de la stratégie pour la cybersécurité nationale des États-Unis» adoptée en septembre 2018. Le projet porte principalement sur deux points: le contrôle du système de noms de domaine (DNS, le système d’adressage de l’Internet) et le routage du trafic, le mécanisme qui sélectionne des chemins dans le réseau Internet pour que les données soient envoyées d’un expéditeur à un ou plusieurs destinataires.</p> <h2>La Russie veut se libérer des contraintes étrangères</h2><p>Parmi ses préconisations, figurent notamment deux mesures clés. La première est la création par la Russie de sa propre version du DNS, pour pouvoir fonctionner si les liens vers les serveurs situés à l’international sont coupés – aucune des douze entités actuellement responsables des serveurs racines du DNS n’étant située sur le territoire russe. La deuxième consiste, pour les fournisseurs d’accès Internet (FAI), à montrer qu’ils sont en mesure de diriger les flux d’information exclusivement vers des points de routage contrôlés par le gouvernement, qui devraient filtrer le trafic pour que seules les données échangées entre les Russes atteignent leur destination. </p><p>Cette législation est la pierre angulaire des efforts du gouvernement russe visant à promouvoir leur <a href="https://policyreview.info/articles/analysis/russias-dictatorship-law-approach-Internet-policy">«souveraineté numérique»</a>; selon les législateurs russes, il est souhaitable de développer une façon d’isoler l’Internet russe sur commande, qui permettrait de répondre par l’autosuffisance aux agissements de puissances étrangères et de garantir la continuité de son fonctionnement. Inversement, une telle configuration faciliterait aussi les possibilités de blocage de tout ou partie des communications.</p> <p>L’état russe n’est évidemment pas le seul à viser une plus grande capacité de contrôle sur le réseau. L’Iran essaie de faire de même depuis des années, et la Chine bien sûr avec le «Great Firewall of China». De nombreux états cherchent à renforcer leur autorité sur «leur» Internet, au point dans certains cas de <a href="https://www.accessnow.org/keepiton/">couper partiellement voire totalement le réseau</a> (des mesures connues en anglais comme «shutdowns» ou «kill switch»). Ce fut le cas en Égypte lors de la révolution de 2011, au Congo récemment à l’occasion des élections, et c’est aussi régulièrement le cas dans certaines régions de l’Inde.</p> <p>Dans le prolongement de ces projets législatifs, une <a href="https://www.uawire.org/kremlin-russia-technically-prepared-to-disconnect-from-world-wide-web">initiative récente</a>, rendue publique le 12 février dernier par l’agence de presse russe TASS, a suscité une attention particulière. Sous l’impulsion de l’état russe, un groupe qui réunit les principaux opérateurs télécoms publics et privés (piloté par Natalya Kasperskaya, la cofondatrice de la célèbre entreprise de sécurité Kaspersky), a décidé de conduire un test afin de couper temporairement l’Internet russe du reste du réseau mondialisé et notamment du World Wide Web. Cela arrivera en principe avant le 1<sup>er</sup> avril, date limite pour présenter des amendements au projet de loi, qui demanderait aux FAIs russes d’être en mesure de garantir leur capacité à fonctionner de façon autonome du reste du réseau.</p> <h2>Des implications techniques, économiques et politiques</h2> <p>Cependant, et au-delà de la charge symbolique que peut revêtir une autonomisation par la déconnexion d’un pays aussi important, de nombreuses raisons d’ordre technique, économique, mais aussi social et politique, plaident en défaveur de telles tentatives, à la fois pour l’Internet mondial et russe.</p> <p>D’un point de vue technique, même si la Russie essaie d’anticiper un maximum cette déconnexion, des effets inattendus se produiront inévitablement si elle cherche à se séparer du reste du réseau mondial, en raison du degré d’interdépendance de ce dernier au-delà des frontières nationales et à tous les niveaux de protocoles. Il faut préciser ici que, contrairement à la Chine qui a pensé et conçu son réseau avec un projet bien précis de gouvernance centralisée en interne, la Russie compte plus de 3 000 FAIs, et une infrastructure ramifiée et complexe, avec de nombreuses connexions physiques et économiques avec l’étranger. Dans ce contexte, il est très difficile pour les FAI et les autres opérateurs Internet de savoir précisément à quel degré et comment ils dépendent d’autres composantes infrastructurelles (points d’échange de trafic, réseaux de distribution de contenu, data centers, etc.) au-delà de leurs frontières. Cela pourrait conduire à des problèmes très importants – non seulement pour la Russie elle-même, mais également pour le reste du monde. </p> <p>Le test pourrait notamment poser des difficultés pour les autres pays qui acheminent le trafic à travers la Russie et ses infrastructures – quelque chose qu’il est difficile de connaître a priori. Les effets du test seront certes suffisamment étudiés et anticipés pour ne pas mener à une véritable catastrophe (par exemple, compromettre pendant longtemps le fonctionnement d’une importante infrastructure de transport ou autre). Mais les conséquences probables seraient plutôt le dysfonctionnement ou le ralentissement de sites Web fréquemment utilisés par l’utilisateur lambda. La plupart d’entre eux fonctionnent en effet à partir de multiples serveurs situés de façon distribuée sur la surface du globe. Le magazine <a href="https://www.wired.com/story/russia-Internet-disconnect-what-happens/"><em>Wired</em> prend l’exemple</a> d’un site d’information qui pourrait dépendre «d’un serveur cloud d’Amazon Web Services, un logiciel de traçage de Google, et un plug-in Facebook pour laisser des commentaires», tous les trois opérant en dehors de la Russie.</p> <p>Sur le plan économique, en raison de l’infrastructure complexe de l’Internet russe et de ses liens très forts avec le reste de la toile, un tel essai serait difficile et coûteux à mettre en œuvre. La Cour des comptes russe s’est <a href="https://www.telegraph.co.uk/news/2019/02/11/russia-planning-test-disconnect-Internet-world-wide-web/">très récemment opposée</a> à cette législation au motif que cela entraînerait une augmentation des dépenses publiques, nécessaires pour aider les opérateurs à mettre en œuvre la technologie et à engager du personnel supplémentaire au sein de Roskomnadzor, l’agence de surveillance des communications, qui ouvrira un centre pour la supervision et l’administration du réseau de communication. Le ministère des Finances s’inquiète aussi des coûts entraînés par ce projet. La mise en œuvre de la loi pourrait coûter cher aux entreprises et favoriser la corruption.</p> <p>Enfin, du point de vue des libertés politiques, la nouvelle initiative suscite la mobilisation des mouvements citoyens. La «souverainisation» porte des risques de censure encore accrus. Le système devrait être supervisé et coordonné par l’agence de surveillance des communications de l’État, Roskomnadzor, qui centralise déjà le blocage de milliers de sites web – et notamment des sites d’information critiques. La mise en œuvre de ce projet élargirait les possibilités d’inspection et de censure du trafic en Russie, affirme l’association Roskomsvoboda. Comme évoqué plus haut, il pourrait faciliter la possibilité de couper l’Internet ou de contrôler certaines de ses applications, comme Telegram (que le gouvernement russe a cherché à bloquer sans succès au printemps 2018). Un essai d’une telle coupure ou «Internet black-out» a eu lieu en République d’Ingouchie, dans le cadre d’une mobilisation de masse en octobre 2018 où le gouvernement avait réussi à couper presque totalement le trafic. Une manifestation «contre l’isolation du runet» a rassemblé 15 000 personnes à Moscou le 10 mars 2019 à l’initiative de nombreux mouvements et partis de défense des libertés en ligne, témoignant des inquiétudes qui s’expriment dans la société.</p> <p>Est-il possible de divorcer de l’Internet mondial aujourd’hui, et avec quelles conséquences? Il est difficile d’anticiper toutes les implications de changements aussi importants sur l’architecture globale d’Internet. Lors de la discussion du projet de loi à la Douma, le député Oleg Nilov, du parti Russie juste, a qualifié l’initiative de «Brexit numérique» dont souffriront d’abord les simples utilisateurs en Russie. Comme on a pu le voir (et <a href="https://www.palgrave.com/fr/book/9781137533265">étudier</a>) à nombre d’occasions dans un passé récent, les infrastructures des réseaux d’information et de communication sont devenues des leviers décisifs dans l’exercice du pouvoir, sur lesquels les gouvernements comptent bien peser de tout leur poids. Mais comme ailleurs, l’espace numérique russe est de plus en plus complexe, et les résultats des expérimentations isolationnistes en cours y sont plus que jamais imprévisibles.<!-- Below is The Conversation's page counter tag. 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La fidélité absolue est un concept éculé et hypocrite qui a pour but principal que les hommes soient certains que les enfants qui sortent des ventres de leur épouse soient bien le produit de leurs spermatozoïdes à eux. Transmettre ses gènes est un réflexe très animal, si Sapiens est vraiment un être supérieur, il devrait se détendre sur cette question. En plus, Pierre et moi n’avons pas fait d’enfants, trop concentrés sur nous-mêmes et nos vies à réussir. Marie, ma sœur, prétend que pour les femmes, l’importance de la fidélité n’a pas pour but la perpétuation de l’espèce mais plutôt la conservation à leur côté du mâle qui assure leur protection. Elle se trompe. Si Pierre et moi sommes toujours ensemble après trente-cinq ans de mariage, c’est justement parce que nous nous laissons la liberté d’aller de temps en temps voir ailleurs. Marie, elle, ne souhaitait plus de rapports sexuels tout en menaçant son mari de le quitter s’il la trompait. 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De retour en Suisse, j’ai soigné ma salpingite et terminé mes études de lettres. Entre deux amants de passage, je traversais de longues périodes d’abstinence sexuelle sans que cela me coûte. A la manif, j’ai trouvé Pierre très beau avec sa moustache et sa barbe de cinq jours. Et je l’ai trouvé irrésistible lorsqu’il a jeté une bouteille vide en direction des forces de l’ordre qui voulaient nous empêcher d’accéder à la salle où se déroulait une assemblée de l’UDC, ce parti d’extrême droite honni par nous. Pierre s’est fait réprimander par les camarades communistes qui assuraient le service d’ordre et il a fini par en venir aux mains avec eux. J’ai spontanément pris sa défense, nous nous sommes faits bousculer et avons quitté la manifestation, lui avec une arcade sourcilière fendue, moi avec un fort désir pour lui. Je l’ai emmené chez moi pour soigner sa blessure et nous avons fait l’amour toute la nuit. 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Pierre est devenu agressif avec Mireille lorsque celle-ci a déclaré que les néo-féministes exagéraient et que #MeToo décourageait toute tentative de séduction de la part des hommes. «Je n’ai pas peur de le dire, j’aime bien que l’on me tienne la porte et que les hommes me fassent sentir qu’ils me désirent…» Pierre lui a rétorqué que le patriarcat était une forme de fascisme et qu’en tant que progressiste nous devions tout faire pour l’abattre. J’ai essayé de dévier la conversation sur la nourriture bio mais très vite c’est l’écriture inclusive qui a fait s’échauffer les esprits. Serge, qui se pique d’aimer la littérature, a déclaré que le français était en danger, qu’il fallait le sauver des points médians et des réformes de l’orthographe. 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Les réglementations environnementales peuvent <a href="https://iopscience.iop.org/article/10.1088/1748-9326/ac6b49">aggraver ces menaces</a> en accélérant la privatisation du traitement des déchets.</p> <p>Alors que les efforts de lutte contre la pollution plastique gagnent du terrain, les ramasseurs informels sont soumis à une double pression:</p> <ul> <li> <p>Ils doivent protéger leur accès aux déchets, car c’est l’un des rares moyens de subsistance dont ils disposent.</p> </li> <li> <p>En même temps, ils cherchent à améliorer leurs conditions de vie et de travail.</p> </li> </ul> <p>Un groupe de ramasseurs de déchets a donc profité de l’ouverture des négociations pour <a href="https://globalrec.org/document/just-transition-waste-pickers-un-plastics-treaty/">plaider en faveur de la reconnaissance de leur travail</a>. 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Par exemple la <a href="https://www.businessforplasticstreaty.org/vision-statement#Key-elements">Business Coalition for a Plastics Treaty</a>, les <a href="https://news.un.org/en/story/2024/10/1156301">dirigeants des Nations unies</a> et même <a href="https://resolutions.unep.org/resolutions/uploads/american_chemistry_council.pdf">l’industrie pétrochimique</a>.</p> <p>Certaines de ces demandes ont été intégrées aux projets de traité sur les plastiques discutés au cours des négociations, ce qui représente une victoire majeure pour les travailleurs du secteur informel des déchets.</p> <p>Un consensus se dégage sur le fait qu’une économie circulaire inclusive peut être bénéfique à la fois pour l’environnement, l’économie et les travailleurs en améliorant la gestion de la pollution, les moyens de subsistance et les opportunités de croissance économique pour les entreprises.</p> <p>Ces promesses demandent toutefois à être vérifiées sur le terrain. Et c’est là que les choses se compliquent.</p> <h3>« Gagnant-gagnant », mais la victoire de qui ?</h3> <p>Dans mon livre <a href="https://mitpress.mit.edu/9780262546973/recycling-class/"><em>Recycling Class</em></a>, j’examine comment les efforts de recyclage inclusif ont été mis en œuvre à Bengaluru, l’une des plus grandes villes de l’Inde.</p> <figure><a href="https://images.theconversation.com/files/635250/original/file-20241129-15-cdpt12.jpg?ixlib=rb-4.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img src="https://images.theconversation.com/files/635250/original/file-20241129-15-cdpt12.jpg?ixlib=rb-4.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" alt="" /></a> <figcaption><span></span></figcaption> </figure> <p>Dans cet ouvrage, je défends que l’intégration dans des programmes d’économie circulaire basés sur le marché n’est pas une solution miracle aux injustices ancrées dans les systèmes de production, de consommation et de production des déchets.</p> <p>La plupart des politiques d’économie circulaire et de recyclage inclusif reposent sur des mécanismes de marché, partant du principe que la création de marchés pour les déchets incitera les acteurs du marché à récupérer efficacement les déchets et à les convertir en ressources.</p> <p>Pour remplir leurs obligations en matière de <a href="https://theconversation.com/faire-payer-plus-les-entreprises-pour-quelles-reduisent-les-emballages-130073">responsabilité élargie des producteurs</a> (REP), les marques peuvent alors s’engager à acheter des plastiques recyclés et à financer la collecte des déchets en achetant des <a href="https://www.worldbank.org/en/programs/problue/publication/unlocking-financing-to-combat-the-plastics-crisis">crédits plastique</a>.</p> <p>Cette approche vise à améliorer le prix des déchets, à augmenter les salaires et à encourager les efforts de collecte, tout en attirant des investissements pour financer l’amélioration des infrastructures et des technologies.</p> <p>Cependant, les mécanismes fondés sur le marché aggravent les inégalités existantes en matière d’accès au marché. Les efforts visant à donner la priorité à la traçabilité et à la transparence – dans le but d’améliorer l’efficacité du marché et le respect de la réglementation – désavantagent souvent les travailleurs informels.</p> <p>Ces derniers ne disposent pas des ressources et des capacités techniques nécessaires pour adopter des systèmes de suivi complexes basés sur les SIG ou la blockchain, et se retrouvent exclus des processus formalisés. Les start-up financées par le capital-risque et les grandes entreprises s’emparent alors du secteur du recyclage.</p> <p>Les multinationales préfèrent d’ailleurs les partenariats avec des start-up technologiques qui offrent des services à «valeur ajoutée» tels que des indicateurs et des tableaux de bord environnementaux, permettant aux entreprises de mettre en scène leur propre récit sur le développement durable. Souvent issus de milieux éduqués et privilégiés, les employés de ces firmes <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S001671852300057X">concurrencent les travailleurs informels existants, les subordonnant au passage</a>.</p> <p>A l’inverse, les femmes et les membres des minorités ethno-raciales et religieuses, qui constituent la majorité des travailleurs des économies informelles des déchets, sont confrontés à des obstacles supplémentaires. Notamment des <a href="https://mouvements.info/recuperateurs-de-dechets/">stigmates sociaux bien ancrés</a> qui limitent leur capacité à participer sur un pied d’égalité à ces marchés émergents. Ils restent toujours relégués aux mêmes tâches manuelles et difficiles, même si leurs conditions de travail en ressortent légèrement améliorées.</p> <h3>L’industrie du plastique maintient le <em>statu quo</em></h3> <p>Malgré les bonnes intentions de départ, des termes tels que «économie circulaire inclusive» sont donc trop souvent utilisés à des fins de <em>green washing</em> et même de <em>justice washing</em>, tandis que les travailleurs continuent à endurer des conditions difficiles. Une étude de <a href="https://www.circle-economy.com/resources/decent-work-in-the-circular-economy">Circle Economy</a> souligne que la plupart des emplois du secteur de l’économie circulaire restent ad-hoc et informels et ne bénéficient pas des garanties d’un emploi décent.</p> <p>En fin de compte, les travailleurs informels sont confrontés à un choix difficile: soit ils acceptent d’être exploités au sein des circuits de traitements des déchets en tant que simples ressources, soit ils risquent de perdre complètement leurs moyens de subsistance.</p> <p>Les systèmes actuels de production et de consommation du plastique déplacent donc la charge des déchets sur des communautés autochtones ou ethniques marginalisées, créant ainsi des <a href="https://www.dukeupress.edu/pollution-is-colonialism">zones sacrifiées</a>. Ce déplacement permet de maintenir la rentabilité, tout en perpétuant les atteintes à l’environnement et les inégalités sociales.</p> <p>En promouvant des technologies de <a href="https://www.bbc.com/afrique/monde-57087908">recyclage chimique</a> non éprouvées et en étendant les marchés du plastique, les entreprises <a href="https://theconversation.com/comment-lindustrie-fossile-influence-les-negociations-mondiales-sur-le-plastique-222112">pétrochimiques</a> et de matières plastiques <a href="https://direct.mit.edu/glep/article/21/2/121/97367/Future-Proofing-Capitalism-The-Paradox-of-the">s’approprient le langage de l’économie circulaire</a>. Cela leur permet de donner un vernis écologique à leurs propositions, tout en maintenant le <em>statu quo</em> sur les inégalités.</p> <p>Pendant ce temps, la HAC, plusieurs ONG et même certains ramasseurs de déchets invoquent également l’économie circulaire comme solution à la crise du plastique, en mettant l’accent sur le réemploi et le recyclage inclusif.</p> <h3>Demander des comptes aux pollueurs plutôt que compter sur l’efficacité du marché</h3> <p>Pour que l’économie circulaire aille au-delà de la simple protection du capitalisme fossile, elle doit prendre en compte les collecteurs de déchets et recycleurs informels dans le Sud et reconnaître les limites des mécanismes basés sur le marché. C’est vrai aussi bien pour le traité international sur la pollution plastique que pour d’autres démarches régionales comme le <a href="https://www.europarl.europa.eu/RegData/etudes/ATAG/2021/679066/EPRS_ATA(2021)679066_FR.pdf">plan d’action de l’UE pour l’économie circulaire</a>.</p> <p>En effet, toute stratégie de lutte contre la pollution plastique basée sur le marché et axée sur le profit est susceptible de reproduire ces schémas d’inégalité. Et par la même occasion, de pérenniser les injustices systémiques qui soutiennent le statu quo. Pour une transition vraiment juste, la lutte contre la pollution plastique ne doit donc pas devenir une opportunité de croissance économique ou de profit.</p> <p>Au contraire, nous avons besoin d’une approche centrée sur la réparation. Il faut d’abord, pour cela, reconnaître les contributions historiques des collecteurs informels du plastique ainsi que les préjudices qu’ils subissent. Puis redistribuer les ressources aux personnes les plus touchées et créer des systèmes qui donnent la priorité à la restauration de l’environnement et à la justice sociale plutôt qu’au profit des entreprises.</p> <p>Une économie circulaire bien financée devrait d’abord renforcer le pouvoir des travailleurs, puis améliorer les capacités des infrastructures et réduire la concentration de ces déchets en produits chimiques toxiques, plutôt que de s’appuyer sur des solutions basées sur le marché qui aggravent les inégalités.</p> <p>Les vraies solutions consistent à demander des comptes aux pollueurs et à adopter des approches circulaires fondées sur la sobriété et la réparation, et non sur l’efficacité du marché.<img src="https://counter.theconversation.com/content/244065/count.gif?distributor=republish-lightbox-basic" alt="The Conversation" width="1" height="1" /></p> <hr /> <h4><span><a href="https://theconversation.com/profiles/manisha-anantharaman-1526162">Manisha Anantharaman</a>, Assistant Professor, Center for the Sociology of Organisations, CNRS/Sciences Po, <em><a href="https://theconversation.com/institutions/sciences-po-2196">Sciences Po </a></em></span></h4> <h4>Cet article est republié à partir de <a href="https://theconversation.com">The Conversation</a> sous licence Creative Commons. Lire l’<a href="https://theconversation.com/les-ramasseurs-de-dechets-grands-perdants-du-recit-dominant-sur-la-pollution-plastique-244065">article original</a>.</h4> </div>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'les-ramasseurs-de-dechets-grands-perdants-du-recit-dominant-sur-la-pollution-plastique', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 42, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 5, 'person_id' => (int) 85, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [[maximum depth reached]], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 5283, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => true, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => null, 'readed' => null, 'subhead' => null, 'title' => 'Les Etats-Unis financent un collectif international de journalistes', 'subtitle' => 'Si le réseau Organized Crime and Corruption Reporting Project (OCCRP) a révélé des avoirs russes cachés ou la corruption au Venezuela, le Delaware, paradis de l'évasion fiscale, reste pour lui un tabou. «Notre politique veut que nous ne fassions pas de rapports sur un pays avec son propre argent», a déclaré Drew Sullivan, son cofondateur.', 'subtitle_edition' => 'Si le réseau Organized Crime and Corruption Reporting Project (OCCRP) a révélé des avoirs russes cachés ou la corruption au Venezuela, le Delaware, paradis de l'évasion fiscale, reste pour lui un tabou. «Notre politique veut que nous ne fassions pas de rapports sur un pays avec son propre argent», a déclaré Drew Sullivan, son cofondateur.', 'content' => '<p style="text-align: center;"><strong>Urs P. Gasche</strong>, article publié sur <a href="https://www.infosperber.ch/medien/medienkritik/die-usa-finanzieren-internationales-journalisten-kollektiv/" target="_blank" rel="noopener"><em>Infosperber</em></a> le 5 décembre 2024, traduit par <em>Bon Pour La Tête</em></p> <hr /> <p>Parmi de nombreux autres médias, la <em>NZZ</em> et le <em>Tages-Anzeiger</em> ont diffusé à plusieurs reprises des révélations du réseau international de journalistes Organized Crime and Corruption Reporting Project (OCCRP). Ce faisant, ils n'ont pas rendu transparent le fait que les services gouvernementaux américains paient la moitié du budget de l'OCCRP. 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De plus, l'agence gouvernementale américaine interdit d'utiliser son argent pour mettre au jour la corruption aux Etats-Unis.</p> <p>Certaines subventions étaient même affectées à un but précis: le Department of State, par exemple, a versé 173 000 dollars à l'OCCRP pour «détecter et combattre la corruption au Venezuela». Ou l'<a href="https://www.usaid.gov/">Agence pour le développement international (USAID)</a> a versé plus de deux millions de dollars dans le but de «mettre au jour la criminalité et la corruption à Malte et à Chypre».</p> <p>Le journal en ligne français indépendant <a href="https://www.mediapart.fr/en/journal/international/021224/hidden-links-between-giant-investigative-journalism-and-us-government">« Mediapart »</a> en a parlé le 2 décembre 2024 <a href="https://www.mediapart.fr/en/journal/international/021224/hidden-links-between-giant-investigative-journalism-and-us-government">.</a></p> <p>Le fondateur de l'OCCRP est un ancien employé <a href="https://www.rockwellautomation.com/de-ch.html">de Rockwell</a> devenu journaliste: <a href="https://www.occrp.org/en/staff/drew-sullivan">Drew Sullivan</a>. L'OCCRP a été créé à l'instigation de fonctionnaires du gouvernement américain. Selon Mediapart, Sullivan a reçu pour cela, en 2008, un financement de départ de 1,7 million de dollars du <a href="https://www.state.gov/bureaus-offices/under-secretary-for-civilian-security-democracy-and-human-rights/bureau-of-international-narcotics-and-law-enforcement-affairs/">Bureau of International Narcotics and Law Enforcement Affairs</a>(INL). Il s'agit d'une agence d'application de la loi du Département d'Etat américain.</p> <p>L'OCCRP s'appuie souvent sur des documents divulgués provenant de sources non identifiées. La qualité des recherches et des révélations de l'OCCRP n'est pas mise en doute. L'orientation unilatérale des recherches et le manque de transparence des informations sur le financement donnent lieu à des critiques.</p> <p>L'ampleur des liens personnels et financiers de l'OCCRP avec le gouvernement américain va à l'encontre de «tous les principes de l'éthique journalistique». C'est ce qu'a déclaré Leonard Novy, directeur de l'Institut allemand des médias et de la politique de communication, à la chaîne NDR. Cela laisse supposer que les journalistes peuvent être utilisés ou instrumentalisés à des fins politiques.</p> <p>Sullivan et l'OCCRP ont également laissé les médias partenaires et leurs lecteurs dans l'ignorance de leur proximité avec le gouvernement américain. Selon Leonard Novy, l'organisation a ainsi dépassé les limites.</p> <h3><strong>Sullivan n'a pas voulu parler clairement aujourd'hui encore</strong></h3> <p>Sullivan a d'abord affirmé à la chaîne NDR que l'OCCRP avait «un groupe de donateurs largement répandu», parmi lesquels «aucun donateur individuel ne domine». Il a ajouté que «le gouvernement américain [...] est l'un des plus grands donateurs, mais ce n'est pas un pourcentage énorme». Confronté aux dernières découvertes, il a finalement reconnu l'importance du financement de Washington: «C'est le plus grand bailleur de fonds de l'OCCRP, oui, et ce depuis presque le début de notre histoire. [...] Je suis très reconnaissant au gouvernement américain.»</p> <p>Par écrit, Sullivan a renchéri: «Nous avons dû décider si nous voulions accepter de l'argent du gouvernement ou ne pas exister.» Sur le site web de l'OCCRP, les montants des sponsors ne sont pas indiqués.</p> <h3><strong>Conditions posées</strong></h3> <p>Sullivan a confirmé à la NDR le pouvoir d'influence des autorités américaines: «Dans le cadre d'accords de coopération que nous n'aimons pas conclure, ils ont un droit de regard sur le choix des personnes [...] Ils peuvent mettre leur veto sur quelqu'un [...] Ils n'ont jamais mis leur veto sur quelqu'un.»</p> <p>L'OCCRP ne peut pas enquêter sur des affaires américaines avec l'argent fourni par Washington. «Notre politique veut que nous ne fassions pas de rapports sur un pays avec son propre argent», a déclaré Sullivan à la NDR. «Je pense que le gouvernement américain ne le permet pas. Mais même dans d'autres pays où ces dispositions n'existent pas, nous ne le faisons pas parce que cela vous place dans une situation de conflit d'intérêts et que vous préférez rester à l'écart de telles situations.»</p> <p>Ainsi, le paradis fiscal américain du Delaware n'a jamais fait l'objet de toutes les recherches sur l'évasion fiscale et l'argent de la corruption.</p> <p>L'OCCRP a tout de même effectué des recherches isolées aux Etats-Unis: par exemple sur les <a href="https://www.occrp.org/en/investigation/meet-the-florida-duo-helping-giuliani-investigate-for-trump-in-ukraine">hommes d'affaires</a> qui avaient soutenu l'avocat de Donald Trump pour nuire à Joe Biden, ou sur la manière dont le Pentagone a dépensé des sommes énormes pour <a href="https://www.occrp.org/en/project/making-a-killing/revealed-the-pentagon-is-spending-up-to-22-billion-on-soviet-style-arms-for-syrian-rebels">fournir des armes</a> à des groupes rebelles en Syrie, ou encore sur un <a href="https://www.occrp.org/en/investigation/flight-of-the-monarch-us-govt-contracted-airline-once-owned-by-criminals-with-ties-to-russian-mob">contrat</a> entre le gouvernement américain et une compagnie aérienne dont les propriétaires sont liés au crime organisé en Russie.</p> <p>Ces recherches ont manifestement respecté une autre condition imposée par les autorités américaines à l'OCCRP: l'activité doit être «en accord avec la politique étrangère et les intérêts économiques des Etats-Unis et les promouvoir.» (<a href="https://www.govinfo.gov/content/pkg/COMPS-1071/pdf/COMPS-1071.pdf">US Foreign Assistance Act</a>).</p> <h3><strong>Voici comment la «NZZ» et Tamedia ont présenté la source OCCRP</strong></h3> <p><strong>«NZZ» du 19 juillet 2023</strong></p> <p>«L'Organized Crime and Corruption Reporting Project (OCCRP) est un réseau d'organisations journalistiques fondé en 2006, basé dans de nombreux pays différents et fonctionnant sous cette forme en tant que filiale du Journalism Development Network à but non lucratif, dont le siège est dans le Maryland.»</p> <p><strong>«Tages-Anzeiger» du 21 juin 2023</strong></p> <p>«Grâce à l'organisation OCCRP, des journalistes femmes de plusieurs pays ont pu étudier ces données, dont <em>Der Standard</em> en Autriche et <em>Der Spiegel</em> en Allemagne. 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Des faits presque incroyables sur le travail de relations publiques du Pentagone.</p> <p><strong>20 avril 2008</strong> <a href="https://www.spiegel.de/kultur/gesellschaft/gekaufte-meinung-pentagon-beschaeftigt-pr-armee-fuer-us-tv-a-548519.html">Le Pentagone emploie une armée de RP pour la télévision américaine</a>. 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