Actuel / Souveraineté numérique: l’Internet russe peut-il se couper du reste du monde?
Quel contrôle des frontières numériques en Russie? © Wikimedia
Depuis quelques années, bon nombre de lois russes répondent à un besoin des autorités: l'autosuffisance numérique. De quoi s'agit-il? En quelques mots: pouvoir développer une façon d’isoler l’Internet russe sur commande et donner la possibilité de bloquer tout ou partie des communications. Des mesures symboliques. Et évidemment géopolitiques.
Un article original paru sur The Conversation, écrit par Francesca Musiani, Sorbonne Université; Benjamin Loveluck, Télécom ParisTech – Institut Mines-Télécom, Université Paris-Saclay; Françoise Daucé, École des hautes études en sciences sociales (EHESS), and Ksenia Ermoshina, Centre national de la recherche scientifique (CNRS)
L’infrastructure Internet obéit à un principe d’internationalisation des équipements et des flux de données et d’information. Les parties d’Internet qui se trouvent physiquement sur chaque territoire national ont besoin de ressources physiques et informationnelles hébergées sur d’autres territoires pour pouvoir fonctionner. Cependant, dans ce contexte mondialisé, la Russie œuvre depuis 2012 à l’augmentation progressive des contrôles nationaux sur les flux d’information et les infrastructures, dans une atmosphère de méfiance politique croissante à l’égard des mouvements protestataires à l’intérieur du pays et de ses partenaires internationaux à l’extérieur. De nombreuses lois ont déjà été votées en ce sens, comme celle en vigueur depuis 2016 obligeant les entreprises traitant des données de citoyens russes à les stocker sur le territoire national, ou encore celle encadrant l’utilisation des réseaux privés virtuels (VPN), proxys et outils d’anonymisation depuis 2017.
En février 2019, un projet de loi dit «sur l’isolement du segment russe de l’Internet» a été adopté en première lecture à la Douma (334 voix pour contre 47 contre) à l’initiative des sénateurs Klichas et Bokova et du député Lugovoï. Dans la note d’intention qui accompagne ce texte, il est précisé qu’il répond au «caractère agressif de la stratégie pour la cybersécurité nationale des États-Unis» adoptée en septembre 2018. Le projet porte principalement sur deux points: le contrôle du système de noms de domaine (DNS, le système d’adressage de l’Internet) et le routage du trafic, le mécanisme qui sélectionne des chemins dans le réseau Internet pour que les données soient envoyées d’un expéditeur à un ou plusieurs destinataires.
La Russie veut se libérer des contraintes étrangères
Parmi ses préconisations, figurent notamment deux mesures clés. La première est la création par la Russie de sa propre version du DNS, pour pouvoir fonctionner si les liens vers les serveurs situés à l’international sont coupés – aucune des douze entités actuellement responsables des serveurs racines du DNS n’étant située sur le territoire russe. La deuxième consiste, pour les fournisseurs d’accès Internet (FAI), à montrer qu’ils sont en mesure de diriger les flux d’information exclusivement vers des points de routage contrôlés par le gouvernement, qui devraient filtrer le trafic pour que seules les données échangées entre les Russes atteignent leur destination.
Cette législation est la pierre angulaire des efforts du gouvernement russe visant à promouvoir leur «souveraineté numérique»; selon les législateurs russes, il est souhaitable de développer une façon d’isoler l’Internet russe sur commande, qui permettrait de répondre par l’autosuffisance aux agissements de puissances étrangères et de garantir la continuité de son fonctionnement. Inversement, une telle configuration faciliterait aussi les possibilités de blocage de tout ou partie des communications.
L’état russe n’est évidemment pas le seul à viser une plus grande capacité de contrôle sur le réseau. L’Iran essaie de faire de même depuis des années, et la Chine bien sûr avec le «Great Firewall of China». De nombreux états cherchent à renforcer leur autorité sur «leur» Internet, au point dans certains cas de couper partiellement voire totalement le réseau (des mesures connues en anglais comme «shutdowns» ou «kill switch»). Ce fut le cas en Égypte lors de la révolution de 2011, au Congo récemment à l’occasion des élections, et c’est aussi régulièrement le cas dans certaines régions de l’Inde.
Dans le prolongement de ces projets législatifs, une initiative récente, rendue publique le 12 février dernier par l’agence de presse russe TASS, a suscité une attention particulière. Sous l’impulsion de l’état russe, un groupe qui réunit les principaux opérateurs télécoms publics et privés (piloté par Natalya Kasperskaya, la cofondatrice de la célèbre entreprise de sécurité Kaspersky), a décidé de conduire un test afin de couper temporairement l’Internet russe du reste du réseau mondialisé et notamment du World Wide Web. Cela arrivera en principe avant le 1er avril, date limite pour présenter des amendements au projet de loi, qui demanderait aux FAIs russes d’être en mesure de garantir leur capacité à fonctionner de façon autonome du reste du réseau.
Des implications techniques, économiques et politiques
Cependant, et au-delà de la charge symbolique que peut revêtir une autonomisation par la déconnexion d’un pays aussi important, de nombreuses raisons d’ordre technique, économique, mais aussi social et politique, plaident en défaveur de telles tentatives, à la fois pour l’Internet mondial et russe.
D’un point de vue technique, même si la Russie essaie d’anticiper un maximum cette déconnexion, des effets inattendus se produiront inévitablement si elle cherche à se séparer du reste du réseau mondial, en raison du degré d’interdépendance de ce dernier au-delà des frontières nationales et à tous les niveaux de protocoles. Il faut préciser ici que, contrairement à la Chine qui a pensé et conçu son réseau avec un projet bien précis de gouvernance centralisée en interne, la Russie compte plus de 3 000 FAIs, et une infrastructure ramifiée et complexe, avec de nombreuses connexions physiques et économiques avec l’étranger. Dans ce contexte, il est très difficile pour les FAI et les autres opérateurs Internet de savoir précisément à quel degré et comment ils dépendent d’autres composantes infrastructurelles (points d’échange de trafic, réseaux de distribution de contenu, data centers, etc.) au-delà de leurs frontières. Cela pourrait conduire à des problèmes très importants – non seulement pour la Russie elle-même, mais également pour le reste du monde.
Le test pourrait notamment poser des difficultés pour les autres pays qui acheminent le trafic à travers la Russie et ses infrastructures – quelque chose qu’il est difficile de connaître a priori. Les effets du test seront certes suffisamment étudiés et anticipés pour ne pas mener à une véritable catastrophe (par exemple, compromettre pendant longtemps le fonctionnement d’une importante infrastructure de transport ou autre). Mais les conséquences probables seraient plutôt le dysfonctionnement ou le ralentissement de sites Web fréquemment utilisés par l’utilisateur lambda. La plupart d’entre eux fonctionnent en effet à partir de multiples serveurs situés de façon distribuée sur la surface du globe. Le magazine Wired prend l’exemple d’un site d’information qui pourrait dépendre «d’un serveur cloud d’Amazon Web Services, un logiciel de traçage de Google, et un plug-in Facebook pour laisser des commentaires», tous les trois opérant en dehors de la Russie.
Sur le plan économique, en raison de l’infrastructure complexe de l’Internet russe et de ses liens très forts avec le reste de la toile, un tel essai serait difficile et coûteux à mettre en œuvre. La Cour des comptes russe s’est très récemment opposée à cette législation au motif que cela entraînerait une augmentation des dépenses publiques, nécessaires pour aider les opérateurs à mettre en œuvre la technologie et à engager du personnel supplémentaire au sein de Roskomnadzor, l’agence de surveillance des communications, qui ouvrira un centre pour la supervision et l’administration du réseau de communication. Le ministère des Finances s’inquiète aussi des coûts entraînés par ce projet. La mise en œuvre de la loi pourrait coûter cher aux entreprises et favoriser la corruption.
Enfin, du point de vue des libertés politiques, la nouvelle initiative suscite la mobilisation des mouvements citoyens. La «souverainisation» porte des risques de censure encore accrus. Le système devrait être supervisé et coordonné par l’agence de surveillance des communications de l’État, Roskomnadzor, qui centralise déjà le blocage de milliers de sites web – et notamment des sites d’information critiques. La mise en œuvre de ce projet élargirait les possibilités d’inspection et de censure du trafic en Russie, affirme l’association Roskomsvoboda. Comme évoqué plus haut, il pourrait faciliter la possibilité de couper l’Internet ou de contrôler certaines de ses applications, comme Telegram (que le gouvernement russe a cherché à bloquer sans succès au printemps 2018). Un essai d’une telle coupure ou «Internet black-out» a eu lieu en République d’Ingouchie, dans le cadre d’une mobilisation de masse en octobre 2018 où le gouvernement avait réussi à couper presque totalement le trafic. Une manifestation «contre l’isolation du runet» a rassemblé 15 000 personnes à Moscou le 10 mars 2019 à l’initiative de nombreux mouvements et partis de défense des libertés en ligne, témoignant des inquiétudes qui s’expriment dans la société.
Est-il possible de divorcer de l’Internet mondial aujourd’hui, et avec quelles conséquences? Il est difficile d’anticiper toutes les implications de changements aussi importants sur l’architecture globale d’Internet. Lors de la discussion du projet de loi à la Douma, le député Oleg Nilov, du parti Russie juste, a qualifié l’initiative de «Brexit numérique» dont souffriront d’abord les simples utilisateurs en Russie. Comme on a pu le voir (et étudier) à nombre d’occasions dans un passé récent, les infrastructures des réseaux d’information et de communication sont devenues des leviers décisifs dans l’exercice du pouvoir, sur lesquels les gouvernements comptent bien peser de tout leur poids. Mais comme ailleurs, l’espace numérique russe est de plus en plus complexe, et les résultats des expérimentations isolationnistes en cours y sont plus que jamais imprévisibles.
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Le projet porte principalement sur deux points: le contrôle du système de noms de domaine (DNS, le système d’adressage de l’Internet) et le routage du trafic, le mécanisme qui sélectionne des chemins dans le réseau Internet pour que les données soient envoyées d’un expéditeur à un ou plusieurs destinataires.</p> <h2>La Russie veut se libérer des contraintes étrangères</h2><p>Parmi ses préconisations, figurent notamment deux mesures clés. La première est la création par la Russie de sa propre version du DNS, pour pouvoir fonctionner si les liens vers les serveurs situés à l’international sont coupés – aucune des douze entités actuellement responsables des serveurs racines du DNS n’étant située sur le territoire russe. 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Une manifestation «contre l’isolation du runet» a rassemblé 15 000 personnes à Moscou le 10 mars 2019 à l’initiative de nombreux mouvements et partis de défense des libertés en ligne, témoignant des inquiétudes qui s’expriment dans la société.</p> <p>Est-il possible de divorcer de l’Internet mondial aujourd’hui, et avec quelles conséquences? Il est difficile d’anticiper toutes les implications de changements aussi importants sur l’architecture globale d’Internet. Lors de la discussion du projet de loi à la Douma, le député Oleg Nilov, du parti Russie juste, a qualifié l’initiative de «Brexit numérique» dont souffriront d’abord les simples utilisateurs en Russie. 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La deuxième consiste, pour les fournisseurs d’accès Internet (FAI), à montrer qu’ils sont en mesure de diriger les flux d’information exclusivement vers des points de routage contrôlés par le gouvernement, qui devraient filtrer le trafic pour que seules les données échangées entre les Russes atteignent leur destination. </p><p>Cette législation est la pierre angulaire des efforts du gouvernement russe visant à promouvoir leur <a href="https://policyreview.info/articles/analysis/russias-dictatorship-law-approach-Internet-policy">«souveraineté numérique»</a>; selon les législateurs russes, il est souhaitable de développer une façon d’isoler l’Internet russe sur commande, qui permettrait de répondre par l’autosuffisance aux agissements de puissances étrangères et de garantir la continuité de son fonctionnement. Inversement, une telle configuration faciliterait aussi les possibilités de blocage de tout ou partie des communications.</p> <p>L’état russe n’est évidemment pas le seul à viser une plus grande capacité de contrôle sur le réseau. L’Iran essaie de faire de même depuis des années, et la Chine bien sûr avec le «Great Firewall of China». De nombreux états cherchent à renforcer leur autorité sur «leur» Internet, au point dans certains cas de <a href="https://www.accessnow.org/keepiton/">couper partiellement voire totalement le réseau</a> (des mesures connues en anglais comme «shutdowns» ou «kill switch»). Ce fut le cas en Égypte lors de la révolution de 2011, au Congo récemment à l’occasion des élections, et c’est aussi régulièrement le cas dans certaines régions de l’Inde.</p> <p>Dans le prolongement de ces projets législatifs, une <a href="https://www.uawire.org/kremlin-russia-technically-prepared-to-disconnect-from-world-wide-web">initiative récente</a>, rendue publique le 12 février dernier par l’agence de presse russe TASS, a suscité une attention particulière. Sous l’impulsion de l’état russe, un groupe qui réunit les principaux opérateurs télécoms publics et privés (piloté par Natalya Kasperskaya, la cofondatrice de la célèbre entreprise de sécurité Kaspersky), a décidé de conduire un test afin de couper temporairement l’Internet russe du reste du réseau mondialisé et notamment du World Wide Web. Cela arrivera en principe avant le 1<sup>er</sup> avril, date limite pour présenter des amendements au projet de loi, qui demanderait aux FAIs russes d’être en mesure de garantir leur capacité à fonctionner de façon autonome du reste du réseau.</p> <h2>Des implications techniques, économiques et politiques</h2> <p>Cependant, et au-delà de la charge symbolique que peut revêtir une autonomisation par la déconnexion d’un pays aussi important, de nombreuses raisons d’ordre technique, économique, mais aussi social et politique, plaident en défaveur de telles tentatives, à la fois pour l’Internet mondial et russe.</p> <p>D’un point de vue technique, même si la Russie essaie d’anticiper un maximum cette déconnexion, des effets inattendus se produiront inévitablement si elle cherche à se séparer du reste du réseau mondial, en raison du degré d’interdépendance de ce dernier au-delà des frontières nationales et à tous les niveaux de protocoles. Il faut préciser ici que, contrairement à la Chine qui a pensé et conçu son réseau avec un projet bien précis de gouvernance centralisée en interne, la Russie compte plus de 3 000 FAIs, et une infrastructure ramifiée et complexe, avec de nombreuses connexions physiques et économiques avec l’étranger. Dans ce contexte, il est très difficile pour les FAI et les autres opérateurs Internet de savoir précisément à quel degré et comment ils dépendent d’autres composantes infrastructurelles (points d’échange de trafic, réseaux de distribution de contenu, data centers, etc.) au-delà de leurs frontières. Cela pourrait conduire à des problèmes très importants – non seulement pour la Russie elle-même, mais également pour le reste du monde. </p> <p>Le test pourrait notamment poser des difficultés pour les autres pays qui acheminent le trafic à travers la Russie et ses infrastructures – quelque chose qu’il est difficile de connaître a priori. Les effets du test seront certes suffisamment étudiés et anticipés pour ne pas mener à une véritable catastrophe (par exemple, compromettre pendant longtemps le fonctionnement d’une importante infrastructure de transport ou autre). Mais les conséquences probables seraient plutôt le dysfonctionnement ou le ralentissement de sites Web fréquemment utilisés par l’utilisateur lambda. La plupart d’entre eux fonctionnent en effet à partir de multiples serveurs situés de façon distribuée sur la surface du globe. Le magazine <a href="https://www.wired.com/story/russia-Internet-disconnect-what-happens/"><em>Wired</em> prend l’exemple</a> d’un site d’information qui pourrait dépendre «d’un serveur cloud d’Amazon Web Services, un logiciel de traçage de Google, et un plug-in Facebook pour laisser des commentaires», tous les trois opérant en dehors de la Russie.</p> <p>Sur le plan économique, en raison de l’infrastructure complexe de l’Internet russe et de ses liens très forts avec le reste de la toile, un tel essai serait difficile et coûteux à mettre en œuvre. La Cour des comptes russe s’est <a href="https://www.telegraph.co.uk/news/2019/02/11/russia-planning-test-disconnect-Internet-world-wide-web/">très récemment opposée</a> à cette législation au motif que cela entraînerait une augmentation des dépenses publiques, nécessaires pour aider les opérateurs à mettre en œuvre la technologie et à engager du personnel supplémentaire au sein de Roskomnadzor, l’agence de surveillance des communications, qui ouvrira un centre pour la supervision et l’administration du réseau de communication. Le ministère des Finances s’inquiète aussi des coûts entraînés par ce projet. La mise en œuvre de la loi pourrait coûter cher aux entreprises et favoriser la corruption.</p> <p>Enfin, du point de vue des libertés politiques, la nouvelle initiative suscite la mobilisation des mouvements citoyens. La «souverainisation» porte des risques de censure encore accrus. Le système devrait être supervisé et coordonné par l’agence de surveillance des communications de l’État, Roskomnadzor, qui centralise déjà le blocage de milliers de sites web – et notamment des sites d’information critiques. La mise en œuvre de ce projet élargirait les possibilités d’inspection et de censure du trafic en Russie, affirme l’association Roskomsvoboda. Comme évoqué plus haut, il pourrait faciliter la possibilité de couper l’Internet ou de contrôler certaines de ses applications, comme Telegram (que le gouvernement russe a cherché à bloquer sans succès au printemps 2018). Un essai d’une telle coupure ou «Internet black-out» a eu lieu en République d’Ingouchie, dans le cadre d’une mobilisation de masse en octobre 2018 où le gouvernement avait réussi à couper presque totalement le trafic. Une manifestation «contre l’isolation du runet» a rassemblé 15 000 personnes à Moscou le 10 mars 2019 à l’initiative de nombreux mouvements et partis de défense des libertés en ligne, témoignant des inquiétudes qui s’expriment dans la société.</p> <p>Est-il possible de divorcer de l’Internet mondial aujourd’hui, et avec quelles conséquences? Il est difficile d’anticiper toutes les implications de changements aussi importants sur l’architecture globale d’Internet. Lors de la discussion du projet de loi à la Douma, le député Oleg Nilov, du parti Russie juste, a qualifié l’initiative de «Brexit numérique» dont souffriront d’abord les simples utilisateurs en Russie. Comme on a pu le voir (et <a href="https://www.palgrave.com/fr/book/9781137533265">étudier</a>) à nombre d’occasions dans un passé récent, les infrastructures des réseaux d’information et de communication sont devenues des leviers décisifs dans l’exercice du pouvoir, sur lesquels les gouvernements comptent bien peser de tout leur poids. Mais comme ailleurs, l’espace numérique russe est de plus en plus complexe, et les résultats des expérimentations isolationnistes en cours y sont plus que jamais imprévisibles.<!-- Below is The Conversation's page counter tag. 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Par ce jugement, la CEDH semble vouloir enterrer toute démarche rationnelle appuyée sur des faits pour favoriser des croyances.</p> <p>Accrochées à un mouvement généralisé autour du climat, qui favorise la foi d’une construction sociale de la réalité, à l’instar de la «justice climatique», ces plaignantes semblent avoir banni de leur plaidoyer tout ce qui pourrait résister au contrôle humain de la météo du jour, sans égards aux résultats scientifiques et leurs immenses incertitudes concernant les climats futurs. Les plaignantes ont accusé en substance les autorités suisses de mener une politique climatique aux objectifs et aux mesures insuffisantes, «en violation de leur droit à la vie», arguant de la vulnérabilité des personnes âgées face aux effets des changements en cours, et en particulier aux vagues de chaleur. 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Bien que les variabilités démographiques soient complexes à appréhender avec précision (comme les «effets moisson» ou les crises sanitaires telles la Covid-19), cette nature cyclique confirme simplement que «le froid tue».</p> <p>Pour s’en convaincre, s’affichent en gris sur la figure et à titre d’exemple, les températures <i>maximales </i>quotidiennes de la station de Neuchâtel montrant de larges amplitudes au cours de l’année. A partir du printemps 2020, la courbe des décès-toutes-causes subit les perturbations du Coronavirus et ses conséquences, rendant hasardeuse toute interprétation de détail. Mais la forte anti-corrélation entre décès et saisonnalité demeure. Nous supportons bien plus aisément les températures non-optimales chaudes que froides. Une étude récente<strong><sup>1</sup></strong> publiée dans <i>The Lancet</i> sur les excès de mortalité dans les villes européennes entre 2000 et 2019, dus cette fois uniquement aux températures non-optimales chaudes ou froides, confirme la tendance générale: entre 65 et 74 ans, le froid tue en Suisse 3 fois plus que le chaud, entre 75 et 84 ans, 6 fois plus, et au-dessus de 85 ans, 7,6 fois davantage. Dans une autre étude du <i>Lancet</i><strong><sup>2</sup></strong> sur les températures non-optimales entre 2000 et 2019 au niveau mondial, le constat est identique: le taux mondial de surmortalité liée au froid a baissé de 0,5% alors que celui lié à la chaleur aurait augmenté de 0,2%, conduisant à une réduction nette du ratio mondial des décès liés aux températures extrêmes. Mais ces pourcentages ne touchent pas le même nombre de personnes, bien plus nombreuses à décéder durant les hivers, ce qui amplifie davantage le bénéfice d’un réchauffement climatique. 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A cela peut s’ajouter une topographie bienveillante durant les étés avec de nombreux lacs et rivières, et une fraicheur montagnarde accessible.</p> <p>Dans le monde réel, la Suisse a diminué de près de 40% ses émissions de CO<sub>2</sub> par habitant depuis 1980 et 91% de sa production électrique est bas-carbone. 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(2021) <i>Lancet Planet Health</i>, vol. 5, e415-425</h4>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'la-cour-europeenne-des-droits-de-l-homme-cedh-aurait-elle-engage-une-guerre-contre-le-monde-des-realites', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 38, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 8, 'person_id' => (int) 85, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [ [maximum depth reached] ], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 4878, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => false, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => null, 'readed' => null, 'subhead' => null, 'title' => 'Cuba entre famine et abondance', 'subtitle' => 'La situation économique à Cuba est catastrophique. 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Au lieu de cela, il place de plus en plus souvent ses propres objectifs et intérêts au-dessus des principes démocratiques et adapte les règles du jeu dans le processus de décision parlementaire à ce qui sert ses propres intérêts, grâce à de larges majorités.</span></p> <h3 style="text-align: justify;"><strong><span>Un opportunisme dangereux</span></strong></h3> <p style="text-align: justify;"><o:p></o:p><span>L'attitude de plus en plus opportuniste de la majorité bourgeoise vis-à-vis des principes de la politique étatique est dangereuse. Elle conduit à des décisions à la légitimité douteuse, déforme la législation, dévalorise nos fondements constitutionnels et endommage la confiance de la population dans le processus politique et dans le fonctionnement des institutions démocratiques.</span></p> <p style="text-align: justify;"><o:p></o:p><span>Cette situation est d'autant plus grave que la Suisse ne connaît pas de juridiction constitutionnelle. Le Tribunal fédéral n'est pas habilité à contrôler les lois fédérales. Le gardien suprême de la Constitution est le Parlement lui-même. Il est à la fois législateur et juge et peut, de fait, édicter des lois fédérales non conformes à la Constitution sans avoir à craindre de sanctions. Les membres du Conseil des États et du Conseil national portent donc une grande responsabilité et devraient d'autant plus être un exemple en matière de respect de la Constitution et d'esprit démocratique. Mais beaucoup ne le sont pas !</span></p> <p style="text-align: justify;"><o:p></o:p><span>Le fait que de nombreux représentants bourgeois du peuple se soient détournés de cette attitude fondamentale est probablement dû surtout à l'évolution politique des dernières décennies. Celle-ci est marquée par deux courants profonds : premièrement, une politique économique, fiscale, financière et sociale néolibérale prononcée et, deuxièmement, une radicalisation dans l'éventail des partis de droite avec un effet d'aspiration sur les partis bourgeois. Ces deux phénomènes ont affaibli la conscience de la nécessité du respect de la Constitution et de l'esprit démocratique.</span></p> <h3 style="text-align: justify;"><strong><span>Néolibéraux et droits de l'Homme</span></strong></h3> <p style="text-align: justify;"><o:p></o:p><span>Tout d'abord, le néolibéralisme : il a conduit à un déchaînement du pouvoir économique, avec pour conséquence que l'État démocratique est devenu le serviteur de groupes et de branches et que le lobbying s'est propagé jusque dans les ramifications les plus fines de la politique et de l'administration. 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Car ici aussi, seul compte le fait de s'imposer - avec ou contre la démocratie et la constitution.</span></p> <p style="text-align: justify;"><o:p></o:p><span>La démocratie au cas par cas, en fonction de l'idéologie, des intérêts particuliers et des calculs de pouvoir ? Et ce à une époque où il serait plus que jamais nécessaire de défendre les valeurs et les principes démocratiques ? Sombres perspectives.</span><o:p></o:p></p> <hr /> <p style="text-align: justify;"><a href="https://www.infosperber.ch/politik/demokratie-ja-aber-nur-wenns-passt/" target="_blank" rel="noopener">L'article original publié sur Infosperber</a></p>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'la-democratie-oui-si-elle-convient', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 45, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 4, 'person_id' => (int) 85, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [ [maximum depth reached] ], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 4856, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => true, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => null, 'readed' => null, 'subhead' => null, 'title' => 'L'OTAN a 75 ans et des défis devant elle', 'subtitle' => 'Le 4 avril 1949 naissait à Washington l’Organisation du traité de l’Atlantique nord, alors composée de 12 membres. 20 autres pays sont venus l’élargir depuis. 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Si l’Allemagne et les autres membres de l’alliance nouent bien des partenariats avec des Etats du Pacifique, et conduisent des exercices militaires dans la zone, ce n’est pas à la hauteur de la «menace chinoise».</p> <p>La nature de cette menace? Elle n’est pas directement militaire mais plutôt économique. «Si Pékin était en mesure de bloquer les voies commerciales dans la mer de Chine méridionale, la circulation des marchandises en Europe serait en péril».</p> <p>Autre question qui n’était pas d’actualité il y a 75 ans: la contribution des Etats-Unis. Le <a href="https://www.telegraph.co.uk/opinion/2024/04/03/europe-must-step-up-to-keep-the-us-in-nato/" target="_blank" rel="noopener"><em>Daily Telegraph</em></a> regrette que l’Europe ne fasse aucun effort pour s’assurer que le plus grand contributeur de l’OTAN ne s’en détache pas. L’heure est grave, puisqu’on parle de «passer à la caisse». 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