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Actuel / Que sortira-t-il de la pataugeoire?

Jacques Pilet

26 décembre 2018

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Comment ne pas s’inquiéter pour ce pays voisin si proche, mêlé à nous à tant d’égards? La trêve des fêtes passée, la révolte reprendra-t-elle? Et que reste-t-il de ces semaines agitées? Tentative d’explications.



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Le psychodrame collectif des gilets jaunes a eu le mérite de faire apparaître au grand jour une réalité pourtant ancienne et connue: des millions de personnes, en France, vivent dans une grande précarité et de surcroît avec le sentiment de ne pas être prises en compte par les élites politiques. Leur colère n’a cessé d’élargir le champ des revendications. 

Avec le recul, le processus est ahurissant. Les manifestants n’ont jamais été très nombreux (250'000 au début, quelques milliers à la fin). Moins que ne rassemblaient les syndicats à leurs grandes heures. Rien de comparable avec les millions de grévistes de 1968. Mais la répercussion médiatique a été gigantesque. Lorsque des violences ont éclaté, on a vu les mêmes images des jours et des jours sur les chaînes d’info. Les témoignages personnels recueillis sur les ronds-points ont eu aussi un écho considérable. C’est maintenant l’image de l’événement qui fait l’histoire, plus que l’événement lui-même.

Les analystes patentés – toujours les mêmes! - qui débattent sans cesse se sont trouvés embarrassés: le mouvement n’a pas vraiment de leaders, pas de discours clair ou alors un foisonnement de slogans en partie contradictoires. Il a fallu des semaines pour que l’on perçoive la toile de fond. Dans le sillage du mécontentement fondé et sincère, des militants d’extrême-gauche – peu audibles – et surtout d’extrême-droite se sont engouffrés dans les manifs et en ont profité pour exprimer une haine sans borne du président, mais en filigrane, de la République telle qu’elle est aujourd’hui. Avec des relents d’antisémitisme. Avec l’appel, plus ou moins clair, à un pouvoir fort qui émergerait du chaos. L’une des grandes gueules très présente sur les réseaux sociaux réclame l’intervention de l’armée pour chasser Macron et les siens! Et devant le tohu-bohu, Marine Le Pen, prudente, qui s’exprime le moins possible, se frotte les mains: les sondages attestent que son parti est le seul qui gagne des points dans l’aventure. 

Débandade généralisée

Le discrédit des autres familles politiques est total. Sous la direction de l’arrogant Wauquiez, les Républicains s’effondrent. La droite libérale est chassée du débat. La gauche offre le spectacle le plus pitoyable qui soit. Les petits chefs socialistes ou qui se prennent pour tels se querellent entre eux, se chamaillent avec les Verts. A peu près plus personne ne les écoute. 

Et le macronisme? Il a pris un sacré coup. Et ce ne sont pas les concessions accordées par le président ébranlé qui calment le jeu. Son fameux et bref discours pourrait bien, avec les jours qui passent, déboucher sur l’inverse du résultat recherché. Qu’en retirent les Français? Primo, les manifs et les violences permettent mieux de faire bouger le pouvoir que toutes les pétitions, toutes les démarches pacifiques. Secondo, on peut très bien manifester sans autorisation préalable, où que ce soit, quelles que soient les conséquences. Tertio, le sacro-saint refus de creuser la dette publique, martelé cent fois par macron, c’est du pipeau. Il a suffi de treize minutes pour y renoncer, lâcher entre dix et quinze milliards publics – empruntés! – et dans les jours suivants, les «cadeaux» se sont multipliés auprès de diverses catégories, notamment les forces de l’ordre. Dès lors, les Français attachés aux réformes promises se mettent à douter qu’elles soient poursuivies et ceux qui attendent tout de l’Etat se disent qu’il n’y a pas de raison de s’arrêter et de ne pas réclamer davantage. Toutes sortes de voix de gauche et de droite, même fort raisonnables, se joignent à ce dernier chœur qui veut plus d’aides publiques… et des protections de la frontière. Ce n’est pas par hasard que les derniers blocages des gilets jaunes ont eu lieu aux portes de l’Espagne, de l’Italie et de la Belgique. 

La brillante Natacha Polony, directrice de Marianne, enfonce sans cesse le clou: il faut plus de souveraineté. Fort bien, mais qu’elle explique enfin comment fonctionnerait l’économie française qui a le plus grand besoin d’accès libres aux marchés internationaux. Sortir de l’euro? Qui peut croire que le franc ressuscité ne déboucherait pas sur des flambées d’inflation comme dans le passé? Même les nationalistes et eurosceptiques italiens, hongrois et polonais se refusent à cette folie. 

Le «grand débat» sur la participation citoyenne aura-t-il lieu? Intéressera-t-il? Les malheureux maires déjà déprimés d’avoir vu leurs compétences et leurs crédits réduits réussiront-ils à lui donner vie? Il faut une belle dose d’optimisme pour y croire. Quant à l’introduction d’un éventuel droit de référendum et d’initiative, tout le monde en parle volontiers. Mais on peut faire confiance aux élus: ils ensableront cette idée peu conforme à la tradition française qui les menacerait dans leur pouvoir.

Et après?

On y verra plus clair sur l’état de la République au printemps, avec les élections européennes. Le RN de Marine Le Pen cartonnera, aidé en plus par un Dupont-Aignan qui grimpe aussi dans les sondages. Cela ne portera guère à conséquences au plan national. Mais après? Aux élections municipales de 2019? Aux présidentielles de 2022? Cela paraît loin, mais il faudra du temps aux partis démolis pour se reconstruire. A moins qu’ils ne continuent à dégringoler. 

Le pire n’est jamais sûr. Le courant populiste anti-européen inquiète beaucoup de Français. Et les effets économiques des sempiternelles turbulences plus encore. Il semblerait qu’au moment où Macron est vilipendé à peu près partout, souvent chez les siens, son parti la REM enregistrerait plus d’adhésions que jamais! Un signe?

La France est un grand pays, plus solide sur ses bases qu’il n'y paraît, même lorsqu’elle s’enfièvre. Elle change très vite d’humeur. Elle a plutôt bien accueilli l’inattendu Macron. Et un an plus tard, elle le voue aux gémonies. Demain, elle s’inventera une issue à la crise. Fâcheux ou non, jamais les lendemains n’ont été plus incertains. Attendons déjà janvier… A la fin de ce mois, les fiches de salaires seront amputées de l’impôt prélevé à la source. Le choc sera concret et dur pour beaucoup. Les excités extrémistes ont, dans l’ombre, encore de beaux jours devant eux. Car la colère n’est qu’enfouie. D’autant plus que du côté de la justice fiscale, rien ne bouge. Macron semble prêt à tout. Mais pas à faire payer davantage les plus riches. 


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VOS RÉACTIONS SUR LE SUJET

2 Commentaires

@Lagom 28.12.2018 | 16h52

«Pendant sa campagne présidentielle, le Président Macron a repris à son compte la célèbre parole du Président Kennedy ; Ne vous demandez pas ce que l’Amérique peut faire pour vous, mais plutôt ce que vous pourriez faire pour l’Amérique.
Une norme philosophique en apparence mais elle est assez comptable au fond.
Les anciens royaumes des cieux et de la terre étaient intuitivement construits sur ce modèle-là, selon lequel, le citoyen doit apporter plus qu’il ne coûte à la collectivité. Le solde, généralement positif, servait à enrichir son église et son Roi, qui vont construire avec des châteaux, des abbayes, acheter des terres, faire la guerre ou vivre tout simplement dans l’opulence voire l’indécence, grâce aux petites mains du petit peuple travailleur.
J’ai une mauvaise nouvelle pour le Président Macron ; Cet ancien modèle est périmé depuis longtemps et heureusement pour toujours. Les français de la fin du XVIII en savent quelque chose.
Le contraire n’a pas l’air de fonctionner n’en plus. Que le citoyen se donne un droit de réclamer à son « Roi » plus que qu’il ne produise, engendre l’appauvrissement de la collective et l’expansion des dettes financières qui ont le potentiel d’engloutir, comme un trou noir, tout le système.
Où se trouve le point d’équilibre entre un modèle despotique et un autre révolutionnaire, en tenant compte du fait que l’Etat ne peut plus frapper monnaie ? La réponse se trouve dans l’équilibre du budget de l’Etat tout simplement. Les Etats ne doivent pas s’arroger le droit de contracter des dettes, que pour des besoins de financements des appareils productifs et d’infrastructures, avec un plan de remboursement précis. S’endetter pour couvrir les dépenses courantes relève de la folie et ne peut que mal finir.
»


@Richard Golay 30.12.2018 | 09h42

«Cette crise est bien plus qu'une insurrection. Il s'agit de l'effondrement d'un système mis en place tout au long de la Cinquième République. Affaire Bennalla, révélations trouvées dans les Macronleaks par Juan Branco(*), il est devenu difficile de cacher la réalité devenue évidente, en particulier ici en Suisse romande : la France est devenue une pitoyable oligarchie.

Monsieur Pilet, par respect pour vos convictions démocratiques, allez-vous rendre votre Légion d'honneur ?

(*) lire https://static.mediapart.fr/files/2018/12/26/macron-et-son-crepuscule-3.pdf ou regarder la longue interview https://la-bas.org/la-bas-magazine/entretiens/Juan-Branco-desosse-Macron»