Actuel / Les industries jurassiennes serrent les dents
L'industrie horlogère du canton du Jura, du Jura bernois et de Neuchâtel, troisième pôle d'exportation suisse, souffre de la crise du coronavirus. © DR
Dans le canton du Jura, le Jura bernois et les districts neuchâtelois, la moitié des salariés, la plupart employés dans des industries d’exportation, notamment vers l’Asie et la Chine, est au chômage partiel à cause du Covid-19*. La crainte du chômage, le vrai, est grande. «Pour l’instant, ça tient», se rassure un délégué à la promotion économique. Combien de temps encore? L’esprit de résilience l’emportera-t-il dans cette région habituée aux crises?
A Delémont, le chantier du futur Théâtre du Jura est à l’arrêt. A Saignelégier, chef-lieu des Franches-Montagnes, 50% des salariés de la manufacture de montres Aéro Watch sont au chômage partiel. Dans l’ensemble du canton, la moitié des 40'000 emplois émarge à ce régime de moindre mal. Le joli vert de mai est bien gris, dans la campagne jurassienne. Il est tout aussi nauséeux dans le Jura bernois et les districts neuchâtelois. Les vallées industrieuses du Nord-Ouest de la Suisse ont le teint barbouillé.
Directeur des ventes d’Aéro Watch, une PME familiale de vingt salariés fondée en 1910, Jean-Sébastien Bolzli, 43 ans, fait face aux commandes reportées ou annulées pour cause de Covid-19. «Du jour au lendemain, une cinquantaine de pays d’exportation ont été placés en confinement, il n’y a pratiquement plus eu d’activité», explique-t-il au téléphone. Les cinq cents boutiques formant le réseau de vente national et international de la marque moyen-haut de gamme franc-montagnarde ont baissé leur rideau. Résultat: plus de clients, hormis un petit marché via l’Internet.
L’horlogerie, la machine-outil et la mécanique de précision se tiennent comme les doigts de la main, dans cette partie de l’Arc jurassien. Elles caracolent dans le trio de tête des exportateurs suisses, derrière la chimie et la pharma. «Elles sont interconnectées et interdépendantes», analyse Patrick Linder, directeur de la Chambre d’économie publique du Jura bernois. «Dans mon secteur géographique, l’horlogerie, pour ne citer qu’elle, représente entre 5000 et 10'000 emplois, poursuit le délégué à l’économie, résident du vallon de Saint-Imier. Chaque entreprise est le fournisseur et le client d’une autre», indépendamment de leurs marchés d’exportation respectifs. «Les grandes maisons», comme il les appelle, les seigneurs locaux, Longines à Saint-Imier, Swatch Group et les mouvements Rolex à Bienne, entre autres, jouent le rôle de «donneurs d’ordres».
Or, avec l’irruption du nouveau coronavirus, les ordres, autrement dit les commandes, n’ont plus été passés. «La baisse de la production horlogère en Suisse – 59'000 emplois à la clé, des exportations se chiffrant à 21,7 milliards de francs en 2019, en progression par rapport à 2018 – a été de 22% en valeur en mars et cela devrait s’accentuer en avril», redoute Jean-Daniel Pasche, président de la Fédération horlogère. Cette chute brutale lui rappelle la crise économico-financière de 2008-2009, mais là, qui sait où cela s’arrêtera? Certaines PME dont le chiffre d’affaires dépend grandement des maisons d’horlogerie sont aujourd’hui en danger. Quelques-unes seront peut-être contraintes de mettre la clé sous la porte lorsque cesseront les mesures de chômage partiel permettant de maintenir les effectifs à flot.
Depuis le début du confinement, le taux de chômage est à la hausse, d’environ un demi-point dans les trois régions voisines précitées, s’établissant nouvellement à 3,9% dans le Jura bernois à 4,4% et 4,5% dans les cantons du Jura et de Neuchâtel. Ces pourcentages pourraient croitre encore. Le Département neuchâtelois de l’économie et de l’action sociale, qui rappelle non sans fierté que ce dernier «génère à lui seul plus de 20% de l’excédent commercial de la Suisse», fournit les informations suivantes: «Si certains secteurs, à l’image de la pharma et de la medtech, sont relativement peu impactés (par la crise du Covid-19, ndlr), la situation est parfois très compliquée chez certains sous-traitants de l’automobile, dans l’industrie des machines ou le luxe».
Dans le canton du Jura, où l’industrie compte pour 45% de l’activité économique, une entreprise de machines-outils espérait pouvoir encaisser un contrat de 15 millions de francs, une vente vers la Chine, indique Lionel Socchi, délégué à la Promotion économique cantonale. «Le client devait venir dans le Jura pour réceptionner les machines avant envoi, mais la crise sanitaire l’en a empêché», relate-t-il. C’est comme si les chaînes de commandes habituelles avaient été contaminées à leur tour. L’Asie, qui absorbe habituellement un tiers des exportations suisses, la Chine étant le plus gros client, est depuis plus de deux mois un continent quasi inaccessible pour l’appareil de production basé en Suisse.
L’inverse est vrai aussi. Au point qu’une entreprise jurassienne qui avait passé commande à un sous-traitant établi en Chine, a dû se tourner vers une société du canton devant l’impossibilité pour le partenaire chinois d’honorer le contrat, rapporte Lionel Socchi, qui voit là une «relocalisation forcée». Un épiphénomène comme un signe amical pour les partisans – principalement à gauche – d’une économie plus protectionniste.
«Pour l’instant, ça tient», se rassure le délégué à la promotion économique jurassienne. Sans même évoquer le scénario catastrophe d’une «deuxième vague» virale, Lionel Socchi s’attend toutefois à une méchante diminution des rentrées fiscales. En cause, bien sûr, le fort ralentissement partout observé – à Berne, le Secrétariat à l’économie, le Seco, prévoyait une chute du PIB de 6,7% en avril.
Il ne faudra pas compter non plus, ou alors très peu, sur l’apport du tourisme et des rassemblements festifs. Fermé, le Séchoir à absinthe de Boveresse, dans le Val-de-Travers. Annulés, le festival du Chant du Gros au Noirmont, le Marché-Concours de Saignelégier, l’Imériale de Saint-Imier.
Dans le canton du Jura, un fonds d’urgence a été mis en place pour venir en aide à des particuliers et des entrepreneurs indépendants durement touchés par les effets indirects du virus et du confinement, signale Lionel Socchi. Un industriel a donné 500'000 francs, une fondation, 200'000, les caisses Raiffeisen, 400'000… Au sommet de l’échelle sociale, des patrons des PME dans la panade subissent d’importantes pertes de revenus. Ils ont droit à une indemnité forfaitaire fédérale de 3320 francs par mois, au lieu des 5800 demandés. Ils font avec. Patrick Linder, le directeur de la Chambre d’économie publique du Jura bernois, croit en l’esprit de «résilience» d’une région qui en a subi, des crises, et qui s’est toujours débrouillée pour les surmonter.
Les boutiques écoulant les montres ont rouvert lundi en Suisse. Un motif d’espoir, très timide encore pour Jean-Sébastien Bolzli, le directeur des ventes d’Aéro Watch, dont la marque est présente dans cent trente bijouteries helvétiques. «Nous aurons beaucoup de mal à vendre nos montres dans les grands centres touristiques, tels Lucerne ou Interlaken, qui seront probablement désertés par les visiteurs étrangers cet été», prévoit celui qui confie avoir par moment «le moral dans les chaussettes». Mais depuis lundi, il a eu la bonne surprise de recevoir des commandes de Schwytz et d’Argovie, et avant cela, la semaine dernière, du New Jersey et de Pennsylvanie, aux Etats-Unis. Des bourgades, comparées à Zurich ou Genève, New York ou Dallas, mais comment ne pas y voir une éclaircie?
Dans le Jura – et certainement ailleurs – des entreprises exportatrices en difficulté, ont reçu de Chine des masques de protection destinés à leurs employés et plus largement à une revente au public, assortie d’une plus-value symbolique. De quoi entretenir de bonnes relations. Pour la suite.
* En l’absence de données, tant du Secrétariat à l’économie (Seco) que du canton de Berne, le taux de 50% de chômage partiel dans le Jura bernois est une estimation fondée sur la comparaison avec le taux – officiel celui-ci – de 50% valant dans ce domaine pour les cantons de Neuchâtel et du Jura, les trois régions ayant une même forte proportion d’emplois industriels. Quant au canton de Berne dans son ensemble, dont l’activité ne repose pas majoritairement sur l’industrie comme dans le Jura bernois, le taux de chômage partiel en avril s’élève à 29%, le plus bas de tous les cantons suisses, informe le Seco.
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Un industriel a donné 500'000 francs, une fondation, 200'000, les caisses Raiffeisen, 400'000… Au sommet de l’échelle sociale, des patrons des PME dans la panade subissent d’importantes pertes de revenus. Ils ont droit à une indemnité forfaitaire fédérale de 3320 francs par mois, au lieu des 5800 demandés. Ils font avec. Patrick Linder, le directeur de la Chambre d’économie publique du Jura bernois, croit en l’esprit de «<strong>résilience</strong>» d’une région qui en a subi, des crises, et qui s’est toujours débrouillée pour les surmonter.</p> <p>Les boutiques écoulant les montres ont rouvert lundi en Suisse. 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Jeudi, comme souvent dans ce rendez-vous formaté pour le buzz, il s’est passé <a href="https://twitter.com/LeDevBreton/status/1590817814059044864?s=20&t=4TWr6vsi3CFKbFwoMHZdVw" target="_blank" rel="noopener">quelque chose de fort</a> sur le plateau de «Touche pas à mon poste!», l’émission animée par Cyril Hanouna sur la chaîne C8 du groupe Bolloré – le nom à l’origine du clash de jeudi soir. Pour La France insoumise (LFI), ce parti de la gauche radicale siégeant à l’Assemblée nationale, un dilemme à présent se pose: faut-il encore aller à TPMP, là où bat le cœur de la France antisystème, où les électorats lepénistes et mélenchonistes s’invectivent, mais surtout, se parlent comme nulle part ailleurs?</p> <p>Que s’est-il passé de si grave ou plutôt de si révélateur? Alors que le débat portait sur l’accueil par la France de 234 migrants se trouvant à bord du bateau Ocean Viking, le jeune député LFI Louis Boyard, qui fut autrefois chroniqueur rétribué à TPMP, a mis les pieds dans son ancienne gamelle en parlant d’un procès menaçant «Bolloré» pour déforestation au Cameroun. 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Bolloré t’a donné de l’argent, t’étais chroniqueur ici…»</p> <p>Boyard, qui avait visiblement préparé son coup, la joue grands principes: «Attends, Cyril, est-ce que tu es en train de me dire que je n’ai pas le droit de dire que Bolloré, il a un procès avec cent cinquante Camerounais parce qu’il a déforesté?» La suite: le député-LFI-ex-chroniqueur-TPMP, ne s’énervant pas, devant pressentir qu’il sortira gagnant de la <em>battle</em>, se prévaut de sa qualité de député. Hanouna piétine l’argument, estimant que Boyard, comme d’autres de son parti, doit son élection à TPMP. Après avoir donné du «mon chéri» à Boyard, il le traite d’«abruti» et de «merde», chacun accusant l’autre d’avoir fait monter l’extrême droite – le grand tabou de la politique française.</p> <p>Quelle suite LFI, plus largement la Nupes, la coalition de gauche à l’Assemblée nationale, donnera-t-elle à cet incident? Continuera-t-elle d’aller sur le plateau de TPMP? Qui, d’Hanouna ou de la gauche radicale, a-t-il le plus besoin de l’autre? Sans LFI, formation aux accents populistes, TPMP perdrait sa caution de gauche, risquant alors de ne plus réunir que des «anti-tout», souvent l’antichambre d’un parti de l’ordre. Mais en renonçant à ce forum, La France insoumise se priverait d’un lieu où elle peut porter des coups à «Macron», ce qui lui rapporte des voix. Ne plus se montrer dans «Touche pas à mon poste!» pourrait être interprété comme l’aveu qu’on appartient au «système», à cette «élite» qu’on prétend combattre.</p> <p>Dans le même temps, en participant à cette émission, LFI sait qu’elle contribue à saper la confiance dans les institutions démocratiques, dont on a vu jeudi soir le peu de cas qu’en faisait Cyril Hanouna en insultant le député Boyard. Il y a deux semaines, toujours à la barre de TPMP, Hanouna appelait à la tenue d’un procès expéditif, assortie d’une «perpétuité immédiate» pour la meurtrière présumée de la petite Lola. 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Né en 1950 à Constantine, issu de la communauté juive algérienne, partie avec les pieds-noirs à l’indépendance en 1962, Stora était investi d’une mission réconciliatrice par le président de la République. A la fin de son travail, l’historien émet une série de préconisations. Et l’on entre alors dans le vif du sujet: l’action.</p> <p>La première de ces préconisations, qui rappelle la Commission Vérité et Réconciliation en Afrique du Sud, l’Instance Vérité et Dignité en Tunisie, est la constitution d’une «Commission "Mémoires et vérité" chargée d’impulser des initiatives communes entre la France et l’Algérie sur les questions de mémoires». La <em>vérité</em>. Pas de réconciliation sans vérité sur les exactions passées, croit-on.</p> <p>Mais la vérité n’est pas seulement question de faits, elle intéresse aussi le sens. Or deux sens ne peuvent cohabiter. Pas d’en-même-temps possible: la douleur d’un camp ne peut valoir celle de l’autre. Celle de l’Allemand de la Seconde Guerre mondiale ne vaut pas celle de l’Allié. On touche probablement ici à la limite du rapport Stora: le colon ne peut pas faire valoir sa douleur au même titre que le colonisé. Sinon, toute la hiérarchie, établie selon une échelle de valeurs qui accorde au colonisé la légitimité de sa révolte, est rebattue. Et pourtant, se dit-on, il faut tendre vers la reconnaissance des souffrances de part et d’autre, pour pouvoir la faire, cette réconciliation. Comme c’est compliqué…</p> <h3>Les choses ont un sens que la paix peut ignorer</h3> <p>Seul le sens permet d’y voir clair. Mais le problème du sens, qui dit qui avait raison, qui avait tort, c’est qu’il ne permet pas toujours de refermer les plaies, puisque personne ne veut être en tort, ou avoir tous les torts. 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Mais elle a comme quelque chose d’inextricable. Ce n’est pas encourageant.</p> <h3>Quand le bourreau redevient l'égal de la victime</h3> <p>Alors, quelles similitudes entre l’après-attentats et ces précédents après-guerres? La première de toutes, la plus importante: la nécessité de l’amnistie, avons-nous vu, par quoi on cesse de juger ceux qu’on sait coupables, par quoi on passe à autre chose. Comme la victime, le bourreau doit pouvoir reprendre une vie normale. Sauf que toute amnistie suppose un vainqueur reconnu comme tel, autrement dit un juste faisant offrande de son pardon au vaincu. 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Pourquoi? On a tenté de répondre à cette question. Indice: l’image, pas terrible, du «voisin français». ', 'subtitle_edition' => null, 'content' => '<p>«C’est la petite Gilberte, Gilberte de Courgenay…» La Mob, c’était mieux avant. Il y avait alors de vraies frontières. Pas comme aujourd’hui avec Schengen qui les a toutes effacées, ce qui est bien pratique aussi, il faut le dire. Mais parfois une votation – ou une pandémie – suffit à les rétablir. C’est ce qui s’est passé dimanche avec la «burqa», l’initiative interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public, acceptée à 51,2% par le peuple. Un score relativement modeste qui cache de fortes disparités. Sans le vote des métropoles, favorables au non, le texte aurait été approuvé bien plus largement. En Suisse romande, les communes frontalières de la France ont plébiscité le oui. Qu’est-ce que cela révèle de ce vote, à cet endroit bien précis, celui des limites géographiques et politiques d’un pays, en sa partie francophone?</p> <p>A Courgenay, dans cette Ajoie s’enfonçant tel un saillant dans les départements français du Doubs et du Territoire de Belfort, 65,4% des habitants ont voté en faveur de l’initiative soutenue par l’UDC et une partie de la gauche (<a href="https://www.admin.ch/gov/fr/accueil/documentation/votations/20210307/initiative-populaire-oui-a-l-interdiction-de-se-dissimuler-le-visage.html" target="_blank" rel="noopener">cliquez ici</a> pour avoir accès à la carte interactive). Un score de cinq points supérieur à la moyenne cantonale jurassienne, 60,7% de oui, la plus élevée des dix-neuf cantons qui ont approuvé le texte.</p> <p>Des trois districts du canton du Jura, celui de Porrentruy, qui épouse la carte de l’Ajoie, dont la particularité est d’avoir avec la France le double de frontière qu’il n’en a avec la Suisse, affiche le plus haut taux d’acceptation, 64,7%. A la pointe du saillant, Bure, la commune qui héberge la place d’armes du même nom, se hisse à la première place du district avec 76% de oui. 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Ce terme, dont l’islam politique est féru, a plusieurs acceptions. C’est son problème comme sa force. Il englobe et confond la critique, la crainte et le rejet de l’islam. Mais on peut penser que le «vote des frontières» à l’initiative qui nous occupe renferme une part de crainte, voire de rejet de la religion musulmane, en tous les cas de ses formes apparaissant comme radicales ou intolérantes.</p> <p>Notre hypothèse, elle, est qu’il faut envisager ce vote frontalier romand comme le résultat d’une association d’idées: niqab=islam, islam=danger, danger=France. Cet enchaînement peut certainement valoir aussi, selon des modalités propres, avec d’autres pays limitrophes de la Suisse – la chose est frappante dans le canton de Saint-Gall, qui fait face à l’Autriche, visée le 12 novembre par un attentat djihadiste à Vienne.</p> <p>Ne nous cachons pas la réalité: nombreux sont les Suisses à avoir de la France une image cauchemardesque, ou du moins dégradée. 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Un <i>mansplaining</i> en mode solidaire, bien sûr. Je serais même tenté d’y voir un peu plus que cela: un <i>manembracing</i> virant au <i>manembarrassing</i>. Autrement dit: une défense à ce point appuyée qu’elle en devient gênante.</p> <p>Gabriel Bender a le zèle du converti. Du converti au féminisme. C’est l’impression qu’il donne. Comme s’il devait montrer, à lui-même et au monde, qu’il est du bon côté. Celui des dominés, en l’occurrence des dominées. Militantisme et sociologie – sa discipline – ne font plus qu’un dans un certain nombre de domaines de recherche. En première année de «socio», on apprenait pourtant à distinguer le discours de l’acteur de celui de l’observateur.</p> <p>Ce précieux conseil, qui permet d’entretenir la veille démocratique, ne semble plus partagé par tous les observateurs des phénomènes de société. La prose «féministe» de Gabriel Bender rend compte d’une confusion des statuts certainement volontaire. Chez lui, les termes du combat paraissent ne pas devoir être discutés, celui de patriarcat, par exemple. Or ce n’est pas parce que le patriarcat existe en tant que phénomène historique que le mot n’est pas utilisé dans la période actuelle comme une ressource discursive mise au service d’un intérêt.</p> <p>Contrairement à quelques-uns éprouvant le besoin d’exposer leur vertu, je n’ai pas pour habitude de dire dans un texte ce que je pense profondément. Parce que je me dis qu’un individu, au hasard, un lecteur, une lectrice, peut parfaitement faire crédit à un autre individu de son appartenance à la bonne part de l’humanité même si ce dernier dévie, autrement dit s’accorde le droit de questionner des tendances. Le fait de dévier, de pouvoir le faire, est gage de bonne santé démocratique. Cela ne veut pas dire qu’on est en droit d’imposer son point de vue aux autres. 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Que comprendre en creux de ses arguments à lui? 1) Qu’un combat mené par des femmes se doit d’être protégé, parce que tout combat féminin serait empreint de fragilité. 2) Que des femmes sont au fond incapables de tactique, qu’elles sont toujours «entières», comme si parler de manœuvre à leur sujet, c’était implicitement en référer aux vieux schémas de ruse, de rouerie, voire de sorcellerie associés aux femmes durant des siècles.</p> <p>Mais on est de son temps ou on ne l’est pas. Il s’agit bien pour des femmes de la RTS, et pour des hommes avec elles, de tirer parti, c’est-à-dire avantage d’une situation à l’origine défavorable. C’est ce qui s’appelle faire de la politique. Mais encore une fois, tout combat politique conduit par des femmes devrait-il être assimilé seulement à du «militantisme», notion contenant en elle un statut de dominé, et par-là échapper à la critique ordinaire? Ne serait-ce pas là jouer sur les «deux tableaux», celui de la victime à qui réparation est due et celui du citoyen à qui tout revient une fois la victoire acquise? Aussi je propose qu’on laisse la démocratie trancher sur les reformes sociétales voulues par le «collectif du 14 juin». Et que le droit remplisse son office pour les cas de harcèlement et mobbing présumés.</p> <p>Il y a de la mauvaise foi dans le texte de Gabriel Bender. A tout le moins des imprécisions. J’en veux pour preuve ce passage où il comprend de travers ce qui est pourtant clair: personne, parmi les salariés de la RTS, ne pousse, contrairement à ce qu’il affirme, la femme que je cite anonymement à produire un «faux témoignage», soit des accusations de harcèlement qu’elle n’aurait pas subi. 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VOS RÉACTIONS SUR LE SUJET
1 Commentaire
@Lagom 15.05.2020 | 14h23
«Beaucoup parmi nous savent que le coût de production d'une montre ne représente que peu par rapport à son prix de vente. L'industrie horlogère peut se relancer en proposant seulement en Suisse, pendant quelques mois, le remplacement des montres qui fonctionnent bien des résidents, mais ancienne sans grande valeur, par de nouvelles montres de la même marques, en limitant le nombre de pièces par personne. J'ai la conviction qu'en 3 mois avec une telle offre les carnets de commandes seront remplis, et il ne sera plus vitales pour les horlogers de vendre beaucoup à l'étranger. La pleurnicherie est la pire des stratégies dans le domaine du luxe ! »