Actuel / La contre-productivité d’une loi européenne inadaptée
Dans un des «ghettos» d'Agadez, les migrants en partance pour l'Europe attendent le départ. © Bon pour la tête 2019 / Amèle Debey
En direct du Niger, Claudia Abbt, une Suissesse émigrée au Sahara central il y a bientôt 30 ans, nous partage ses analyses de la situation actuelle à Agadez, et en particulier les conséquences de la loi européenne interdisant la migration. Linguiste, ethnologue et responsable en ressources humaines de formation, Claudia Abbt s’est professionnalisée dans le tourisme et l’artisanat depuis qu’elle a quitté la Suisse.
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Cette déclaration est catégorique : « La guerre non provoquée et injustifiable de la Russie contre l’Ukraine, soutenue par le gouvernement biélorusse, est répugnante et constitue une violation flagrante de ses obligations internationales. » Ainsi, du point de vue sportif et diplomatique, la Russie se retrouve isolée.</p> <h3>La création d’un nouvel ordre mondial du sport ?</h3> <p>Dans les paroles et les actions, le pouvoir russe privilégie depuis le début de l’invasion la création d’un pôle sportif alternatif à l’échelle mondiale pour contrer les institutions sportives internationales traditionnelles telles que le CIO ou la Fifa.</p> <p>En pratique, cela impliquerait de se passer du sport mondial, de le remplacer ou de rivaliser avec lui. En Russie, par exemple, l’idée de diviser le mouvement olympique gagne du terrain. Il s’agirait de séparer les Jeux en deux parties : à l’Ouest, les Jeux occidentaux, et à l’Est, les Jeux russes « traditionnels ». Ces Jeux à la russe se dérouleraient en été en Crimée et en hiver à Sotchi. Ils puiseraient leur légitimité dans les liens historiques plus ou moins confirmés de ces régions avec la Grèce antique. En 2007, pour obtenir les Jeux de Sotchi, Vladimir Poutine avait rappelé aux membres du CIO que « les Grecs anciens ont vécu près de Sotchi. J’ai vu le rocher près de Sotchi où, selon la légende, Prométhée était enchaîné. Prométhée qui a donné le feu aux hommes, le feu qui est finalement la flamme olympique ». Depuis, l’argument du mythe est souvent utilisé pour évoquer cette région russe, composée du Caucase et de la péninsule de Crimée. Selon Vladimir Poutine, ces terres sont sacrées et pourraient servir de cadre à un nouvel ordre mondial du sport.</p> <figure><iframe frameborder="0" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/o8WjPYcA0lY?wmode=transparent&start=0" width="440"></iframe></figure> <p>Dans le cadre de ce scénario et pour rivaliser politiquement et sportivement avec succès avec le mouvement olympique, le pouvoir russe cherche déjà des alliés […]. L’objectif est de solliciter les pays membres de la CEI, de l’Organisation de coopération de Shanghai et les BRICS pour qu’ils participent à cette ambition. Ces trois organisations regroupent plusieurs acteurs majeurs du sport mondial, parmi lesquels la Chine occupe une place de choix. Si ce projet russe réussissait, il pourrait donner naissance à un nouvel ordre mondial du sport destiné à rivaliser avec les institutions historiques du sport moderne telles que le CIO ou la Fifa. Concomitante à une dynamique plus générale de désoccidentalisation du monde, cette influence dépasse très largement le cadre sportif.</p> <h3>Le sport ukrainien, c’est la guerre avec les balles</h3> <p>Depuis le 24 février 2022, pour Volodymyr Zelensky et l’Ukraine, le sport, c’est la <a href="https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/culturesmonde/le-sport-c-est-la-guerre-les-fusils-en-moins-g-orwell-1945-2-4-la-guerre-un-sport-comme-les-autres-7282852">guerre avec les balles</a>. En effet, à l’heure du conflit russo-ukrainien, le domaine sportif en Ukraine a subi une transformation significative.</p> <p>Initialement, au lendemain de l’invasion et sur une période de moins de deux mois, les autorités nationales ont suspendu l’ensemble des activités sportives en Ukraine. L’accent était alors mis sur l’effort de guerre, et les installations sportives ont été utilisées par les militaires ukrainiens comme bases de repli ou de déploiement. Cela explique pourquoi les installations sportives, telles que les stades ou les gymnases, sont souvent la cible des forces russes, car elles pourraient potentiellement abriter des unités ukrainiennes entières.</p> <p>Par la suite, lorsque l’armée russe a commencé à faire du surplace voire à reculer sur le terrain, le secteur sportif ukrainien a pris une nouvelle orientation. Certains clubs de football ont obtenu la permission de jouer des matchs de charité à l’étranger, malgré la loi martiale interdisant aux hommes âgés de 18 à 60 ans de quitter le territoire. Ces matchs visaient à sensibiliser à la cause ukrainienne. De même, les athlètes en préparation pour d’importantes compétitions ont pu s’entraîner à l’étranger.</p> <p>Par exemple, l’équipe nationale de football a été autorisée à s’entraîner en Slovénie pendant un mois en mai 2022 en vue des qualifications pour la Coupe du monde de football 2022 au Qatar. Ainsi, le soft power sportif a contribué symboliquement à l’effort de guerre. Les autorités estimaient qu’un athlète ukrainien était plus utile sur le terrain sportif que sur le front militaire. Selon elles, il offrait un double avantage en donnant à l’Ukraine une visibilité internationale et en pouvant potentiellement rehausser le moral des troupes déployées sur le terrain. Cette dimension ne doit pas être sous-estimée : une victoire sportive pour un athlète ukrainien procurait aux soldats, qui suivaient régulièrement les matchs et les résultats, un certain espoir et un regain de moral.</p> <p>À partir de la mi-juin 2022, le sport à l’échelle nationale a progressivement retrouvé sa place, bien que dans des conditions exceptionnelles. Par exemple, la Première Ligue ukrainienne de football a obtenu l’autorisation de débuter la saison 2022-2023 fin août. Toutefois, les règles ont été adaptées à la situation du moment. Les spectateurs ne sont plus autorisés à assister aux matchs, et ceux-ci nécessitent une autorisation systématique de l’administration militaire pour avoir lieu. Si une alerte de raid aérien potentiel retentit dans un rayon de moins de 500 mètres, le match est interrompu et les joueurs se réfugient dans les vestiaires, ce qui se produit régulièrement. Après un an et demi de guerre, aucun footballeur ukrainien n’a été blessé. Cependant, certains matchs ont duré plus de cinq heures au total.</p> <p>Paradoxalement, l’Ukraine continue de participer activement aux événements sportifs européens et mondiaux. Chaque compétition internationale offre l’opportunité aux autorités de promouvoir les intérêts du pays dans un contexte de guerre. De plus, certains clubs ukrainiens sont accueillis par les alliés géopolitiques les plus proches de l’Ukraine. Par exemple, le Dynamo Kyiv s’entraîne et joue certains de ses matchs à Cracovie, en Pologne. Dnipro, quant à lui, joue et s’entraîne à Košice, en Slovaquie, de manière permanente. En général, de nombreux athlètes et entraîneurs ukrainiens, actifs ou non, ont choisi de rejoindre le front dans l’est de l’Ukraine, mettant leur carrière en suspens. Le cas emblématique est peut-être celui de Yuriy Vernydub, entraîneur ukrainien du Sheriff Tiraspol, qui est parti au front dès le lendemain de l’invasion. Il est important de noter que ces professionnels du sport proviennent souvent de divisions sportives moins importantes. En effet, les athlètes de renom préfèrent généralement contribuer à l’effort de guerre d’un point de vue sportif et symbolique.</p> <p>Le cas des supporters des clubs ukrainiens est également notable. Depuis 2014 et surtout depuis l’invasion russe en Ukraine, de nombreux ultras ont rejoint le front pour combattre ensemble, mettant de côté leur rivalité sportive. En temps de paix rivaux, les supporters du Shakhtar Donetsk et du Dynamo Kyiv combattent ensemble contre leur ennemi commun.</p> <h3>La stratégie politique et sportive de Volodymyr Zelensky après l’invasion russe</h3> <p>Depuis le 24 février 2022, la stratégie internationale de Volodymyr Zelensky s’est intensifiée dans le domaine sportif, trouvant écho dans l’espace médiatique mondial. Les ministères, les organisations privées et le comité olympique ukrainien, tous les organes politiques, économiques et sportifs du pays sont mobilisés pour transmettre un message : l’exclusion de la Russie doit durer tant que l’invasion se poursuit.</p> <figure><iframe frameborder="0" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/YQiSJ3AO5CI?wmode=transparent&start=0" width="440"></iframe></figure> <p>Le hashtag #boycottrussiansport en est devenu le symbole. De manière concrète, les arguments ukrainiens peuvent être résumés en cinq points. La Russie devrait être exclue des événements sportifs mondiaux et des Jeux olympiques de Paris 2024 car elle est un État envahisseur et terroriste ; les athlètes russes sont de quelque manière liés à l’État russe ou à l’armée russe ; le régime de Vladimir Poutine exploite le sport à des fins de propagande ; dans de telles conditions, l’équité des compétitions sportives (Jeux olympiques, Coupe du monde, etc.) ne peut être maintenue ; les athlètes ukrainiens perdent la vie au front ou ne peuvent pas s’entraîner convenablement pour les grandes compétitions internationales, par conséquent la Russie et la Biélorussie ne devraient pas être autorisés à y participer.</p> <p>Pour diffuser ces arguments, le gouvernement ukrainien utilise divers canaux. Tout comme Volodymyr Zelensky utilise son smartphone pour communiquer avec différentes générations, les principaux porte-parole du sport ukrainien exploitent les canaux et les codes contemporains pour diffuser leur message. Les réseaux sociaux tels que TikTok, Facebook ou Instagram sont fréquemment utilisés pour diffuser des propos politiques liés au sport. On peut souvent voir circuler des vidéos de quelques secondes transmettant un message percutant. Par exemple, l’une de ces vidéos virales montre un athlète russe lançant un javelot dans les airs. Le javelot se transforme ensuite en obus, suit la trajectoire de l’athlète et finit par s’écraser sur un bâtiment ukrainien. Un message s’affiche alors à l’écran : « Boycott Russian Sport. »</p> <h4 style="text-align: center;"><a href="https://images.theconversation.com/files/592021/original/file-20240503-16-h8q7b1.jpeg?ixlib=rb-4.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img src="https://images.theconversation.com/files/592021/original/file-20240503-16-h8q7b1.jpeg?ixlib=rb-4.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" alt="" /></a></h4> <h4 style="text-align: center;"><em><span>Ces extraits sont issus de « La Guerre du sport. Une nouvelle géopolitique » de Lukas Aubin et Jean-Baptiste Guégan, qui vient de paraître aux éditions Tallandier.</span></em></h4> <p>En général, tous les médias sont utilisés par l’Ukraine pour défendre ses intérêts. Par exemple, le site web du ministère ukrainien de la Jeunesse et des Sports est en ukrainien, mais une bannière en gras et en anglais apparaît en haut de la page, indiquant : <a href="https://mms.gov.ua/russian-and-belarusian-athletes-who-support-the-war-in-ukraine">« Russian and Belarusian athletes who support the war in Ukraine. »</a> la bannière, les internautes ont accès à une liste d’athlètes russes et biélorusses soutenant officiellement l’invasion russe en Ukraine. 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Lire l’<a href="https://theconversation.com/geopolitique-du-sport-laffrontement-entre-la-russie-et-lukraine-229262">article original</a>.</h4> <h4><em>Lukas Aubin, directeur de recherche à l’IRIS, spécialiste de la géopolitique de la Russie et du sport et membre associé du Centre de Recherches Pluridisciplinaires Multilingues (CRPM) à l’université Paris-Nanterre, et Jean-Baptiste Guégan, expert en géopolitique du sport et enseignant à Sciences Po Paris, viennent de publier aux éditions Tallandier</em> <a href="https://www.tallandier.com/livre/la-guerre-du-sport/">La Guerre du Sport, une nouvelle géopolitique</a>, <em>un ouvrage complet qui met en lumière l’influence des grands enjeux internationaux sur un un monde du sport à l’apolitisme de plus en plus illusoire. 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Il y voyait un moyen efficace de lutter contre les maladies dues à une carence en vitamine A, très répandues en Asie du Sud-Est et qui peuvent entraîner la cécité, voire la mort. Potrykus était alors loin de se douter qu'un tribunal philippin retoquerait son invention un an et demi après son autorisation.</p> <h3>Syngenta acquiert des droits de brevet</h3> <p>La route a été longue jusqu'à la première récolte du riz doré: en 1999 déjà, Potrykus et son collègue Peter Beyer avaient présenté un prototype. Celui-ci contenait des gènes de jonquille qui produisaient de la provitamine A dans le grain de riz et le faisaient ainsi briller d'un jaune doré. En 2005, les chercheurs avaient développé une deuxième variante en collaboration avec le géant de l'agroalimentaire Syngenta. 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En effet, le corps humain n'utiliserait la provitamine A que s'il dispose de suffisamment de graisse, ce qui, selon Greenpeace, n'est souvent pas le cas chez ces personnes. De plus, il y aurait un risque que le riz génétiquement modifié, une fois introduit dans le champ, se reproduise de manière autonome, se propage et contamine ainsi d'autres variétés de riz. En raison de ces doutes, il a fallu attendre 16 ans de plus pour que les autorités philippines en charge de la biosécurité donnent finalement le feu vert à la culture du riz doré en 2021.</p> <h3>Le tribunal révoque l’autorisation</h3> <p>Mais aujourd'hui, une nouvelle décision de justice met déjà un frein à la propagation de la variété de riz transgénique. Ainsi, une Cour d'appel philippine a révoqué l'autorisation le 17 avril dernier en se référant au principe de précaution: «En l'absence de consensus scientifique sur la sécurité du riz doré, il ne devrait plus être cultivé à des fins commerciales». L'interdiction s'étend en outre à la culture d'une aubergine génétiquement modifiée. La culture commerciale de ces variétés n'est pas autorisée «jusqu'à ce que les autorités gouvernementales concernées apportent la preuve de la sécurité et du respect de toutes les exigences légales», précise le tribunal.</p> <p>Le tribunal a aussi relevé que le gouvernement n'avait pas mis en place de mécanismes de surveillance pour assurer la sécurité de la culture et de la consommation du riz doré. Le jugement met donc pour l'instant à l’arrêt de nouveaux essais menés en plein champ, dans des serres ou des champs ouverts.</p> <p>Ce jugement intervient après que l'association d'agriculteurs philippins MASIPAG a porté plainte, avec d'autres organisations, contre l'autorisation de cultiver du riz doré. La plainte, déposée en 2022, se base sur un instrument juridique philippin appelé Writ of Kalikasan. 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Claudia Abbt
L’Afrique a toujours été un continent de mobilité. Depuis la nuit des temps, les populations fuient les guerres et les sècheresses. La révolution néolithique, le développement du commerce transcontinental et ses centres commerciaux, l’arrivée des colons, le développement de l’exploitation minière et l'introduction de l’administration territoriale forgent l’histoire du continent. Ces multiples facteurs ont amené des phases de sédentarisation partielle à travers l’Afrique, mais n’ont jamais su contenir la mobilité des gens. C’est elle qui fait vivre les économies africaines, et donc les Africains eux-mêmes, par le biais des caravaniers, des éleveurs, des transporteurs, des commerçants, des mineurs, des travailleurs dans les plantations, des saisonniers, des mercenaires, etc…
Le Niger est avant tout un pays agropastoral. Comme pour le reste du continent, sa construction économique, sociale et culturelle dépend de la mobilité de sa population. Les migrations saisonnières des Nigériens vers les grandes capitales du littoral atlantique au sud, ou bien les pays du Maghreb au nord sont historiques. Elles sont économiquement indispensables au développement des zones de départ des saisonniers, mais aussi aux espaces d’accueil. L’UEMOA (Union économique et monétaire ouest-africaine) et la CEDEAO (Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest) ont reconnu l’importance vitale de cette mobilité et ont conçu des règles communes applicables à la libre circulation des personnes et des biens au sein de tous les pays membres.
Changement de paradigme
Sous le régime Kadhafi, l’axe libyen était hermétiquement fermé pour ces migrants candidats au départ vers l’Europe. Ceux qui arrivaient quand même à passer entre les mailles des filets trouvaient rapidement un travail bien rémunéré en Libye et abandonnaient le rêve italien. D’autres, moins chanceux, se faisaient exploiter, ou pire encore, trainer dans des centres de détention où ils étaient vendus comme esclaves. Cette problématique n’est pas nouvelle, elle existait déjà il y a trente ans. Sauf qu’à l’époque, personne ne s’y intéressait. La Libye était dirigée d’une main de fer.
En effet, la chute du régime du Colonel Kadhafi a eu pour conséquence directe l’instabilité sociopolitique de la Libye, qui constituait un rempart important contre la migration irrégulière pour les pays européens. Avec la mort du Guide, ce rempart est tombé et a déclenché une véritable ruée vers les côtes méditerranéennes.
Les statistiques que l’on obtient de l’OIM ne sont pas fiables.
Très vite les jeunes d’Agadez sans emploi, issus des milieux Touaregs, Arabes et Toubou ont compris la situation et se sont organisés. Les différentes activités liées à la migration ont surgi: transports, hébergements, restauration et ainsi de suite. Lors des périodes particulièrement actives, on estimait une moyenne de 2000 départs depuis Agadez vers la Libye par semaine, soit 80 pick-up chargés de 25 personnes chacun. Donc un total de 8000 personnes par mois, essentiellement des étrangers. Mais on sait qu’il y a aussi beaucoup d’autres circuits qui ne passent pas par Agadez et c’est pour cela que les statistiques que l’on obtient de l’OIM (Organisation internationale pour les migrations) ne sont pas fiables. L’OIM recense uniquement les migrants qui passent par leur centre d’accueil à Agadez, ainsi que ceux qui passent par leur poste de contrôle sur la route vers la Libye. Des postes que les passeurs essaient d’éviter de peur que la gendarmerie ou bien l’armée les escroquent et leur demandent des droits de passage faramineux. La migration faisait vivre beaucoup de monde. On sentait une soudaine effervescence dans cette ville ralentie par l’arrêt du tourisme et des échanges commerciaux depuis la fermeture de la frontière algérienne. Un copain de classe au lycée de mon fils, à l’époque, se faisait faire un certificat médical de temps à autre pour vite faire un aller-retour en Libye avec quelques migrants.
Instauration d'une loi liberticide
En août 2016, le gouvernement nigérien met en vigueur une loi votée en 2015* interdisant le transport de migrants. Immédiatement, une traque sans répit est engagée contre les passeurs et les propriétaires des «ghettos», ces maisons qui servent de caches aux groupes de migrants en partance pour la Libye.
Beaucoup de jeunes qui s’adonnaient au transport de ces migrants ont été surpris par l’application subite de cette loi. Plusieurs dizaines de ces jeunes sont emprisonnés et une cinquantaine de leurs véhicules immobilisés. Les autorités locales se trouvent acculées du fait qu’une grande partie de la population vivait des retombées de ce transport officiel qui, d’un jour à l’autre, est devenu un trafic criminel.
Cette nouvelle loi est en contradiction flagrante avec les protocoles signés entre l’Etat du Niger et l’UEMOA/CEDEAO qui reconnaissent la mobilité des personnes comme base fondamentale pour le fonctionnement des économies de ses pays membres et garantit la libre circulation dans lesdits pays. Dans une région où l’économie est déjà quasi morte, une intervention politique majeure comme celle-ci aura certainement des répercussions auxquelles les décideurs politiques européens n’avaient jamais pensé. Un impact que le gouvernement nigérien, toujours avide de fonds financiers et aveuglé par le montant de l’aide promise, ont sciemment ignoré. Cette loi et un véritable coup de poignard dans le cœur du fonctionnement d’une économie de la moitié d’un continent.
Projets bidons
A Agadez, nous sommes arrosés d’une série de projets bidons soi-disant destinés à renforcer l’intégration économique et sociale des jeunes. Des projets qui touchent différents domaines culturels de la ville et de la région d’Agadez, ainsi qu’une série d’actions pour lutter contre l’insalubrité de la cité. Des projets qui sont montés en toute vitesse, basés sur aucune recherche préalable pour définir les réels besoins et calibrer une feuille de route qui garantira le succès et la durabilité de ces actions. Des projets voués à l’échec dès le départ, qui traînent leur lot de déceptions et de frustrations.
Pire encore: les projets de reconversion des acteurs de la migration clandestine et l’argent qui devait venir en aide à la région n’arrivent pas, dans l’agacement général. Au point que, lors d’une réunion de tous les maires et de l’ensemble des conseillers régionaux, le président du conseil régional d’Agadez s’est exprimé ainsi, en avril 2017: « …Ces jeunes qui n'avaient que le transport des migrants comme travail l'ont laissé un temps parce qu'ils croyaient en nous, ils s'attendaient à une reconversion promise par le biais de ces projets annoncés. Mais rien ne vient! Nous ne pouvons plus les calmer avec des refrains creux. Ils nous accusent désormais d'être responsables de leurs maux. À mon humble avis, si ces projets de l'Union européenne continuent à ignorer les autorités élues de la région, eh bien, on va droit vers un fiasco. Il est préférable que les instigateurs de ces projets, qui ne nous servent à rien, plient bagages et retournent chez eux.»
De mal en pis
Depuis l’interdiction du transport des migrants vers la Libye et les rafles dans les «ghettos», au centre-ville d’Agadez, les passeurs se sont organisés autrement. Ils ont acheté des concessions dans les quartiers extérieurs de la ville et y ont installé leurs «ghettos» là-bas. Ils logent moins de personnes à la fois qu’avant. 25 personnes, juste le chargement d’un pick-up. Le départ se fait beaucoup plus discrètement, comme ils sont déjà en bordure de la ville.
L’utilisation de voies détournées expose les migrants à plus de dangers et le nombre de morts dans le désert se multiplie. Afin d’éviter les contrôles et les arrestations, les migrants et les passeurs n’empruntent plus les principales routes de passage et se déplacent de nuit, ce qui rend la traversée déjà périlleuse du Sahara encore plus risquée.
Nous n’avons jamais compris pourquoi on nous impose ces projets. Notre région a toujours été une zone de passage, mais jamais une zone de départ. Ces projets pourraient même avoir un effet contraire: plutôt que de freiner la migration, ils pourraient pousser les jeunes à partir.
*En 2015, le Niger a adopté une loi criminalisant les activités liées à la migration, «à l’initiative de l’Union européenne et à son profit, ce qui en fait une loi européenne», selon Moussa Tchangari, président de l’ONG Alternative Espace Citoyens et observateur aguerri de la situation politique nigérienne.
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Ces Jeux à la russe se dérouleraient en été en Crimée et en hiver à Sotchi. Ils puiseraient leur légitimité dans les liens historiques plus ou moins confirmés de ces régions avec la Grèce antique. En 2007, pour obtenir les Jeux de Sotchi, Vladimir Poutine avait rappelé aux membres du CIO que « les Grecs anciens ont vécu près de Sotchi. J’ai vu le rocher près de Sotchi où, selon la légende, Prométhée était enchaîné. Prométhée qui a donné le feu aux hommes, le feu qui est finalement la flamme olympique ». Depuis, l’argument du mythe est souvent utilisé pour évoquer cette région russe, composée du Caucase et de la péninsule de Crimée. 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Concomitante à une dynamique plus générale de désoccidentalisation du monde, cette influence dépasse très largement le cadre sportif.</p> <h3>Le sport ukrainien, c’est la guerre avec les balles</h3> <p>Depuis le 24 février 2022, pour Volodymyr Zelensky et l’Ukraine, le sport, c’est la <a href="https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/culturesmonde/le-sport-c-est-la-guerre-les-fusils-en-moins-g-orwell-1945-2-4-la-guerre-un-sport-comme-les-autres-7282852">guerre avec les balles</a>. En effet, à l’heure du conflit russo-ukrainien, le domaine sportif en Ukraine a subi une transformation significative.</p> <p>Initialement, au lendemain de l’invasion et sur une période de moins de deux mois, les autorités nationales ont suspendu l’ensemble des activités sportives en Ukraine. L’accent était alors mis sur l’effort de guerre, et les installations sportives ont été utilisées par les militaires ukrainiens comme bases de repli ou de déploiement. Cela explique pourquoi les installations sportives, telles que les stades ou les gymnases, sont souvent la cible des forces russes, car elles pourraient potentiellement abriter des unités ukrainiennes entières.</p> <p>Par la suite, lorsque l’armée russe a commencé à faire du surplace voire à reculer sur le terrain, le secteur sportif ukrainien a pris une nouvelle orientation. Certains clubs de football ont obtenu la permission de jouer des matchs de charité à l’étranger, malgré la loi martiale interdisant aux hommes âgés de 18 à 60 ans de quitter le territoire. Ces matchs visaient à sensibiliser à la cause ukrainienne. De même, les athlètes en préparation pour d’importantes compétitions ont pu s’entraîner à l’étranger.</p> <p>Par exemple, l’équipe nationale de football a été autorisée à s’entraîner en Slovénie pendant un mois en mai 2022 en vue des qualifications pour la Coupe du monde de football 2022 au Qatar. Ainsi, le soft power sportif a contribué symboliquement à l’effort de guerre. Les autorités estimaient qu’un athlète ukrainien était plus utile sur le terrain sportif que sur le front militaire. Selon elles, il offrait un double avantage en donnant à l’Ukraine une visibilité internationale et en pouvant potentiellement rehausser le moral des troupes déployées sur le terrain. Cette dimension ne doit pas être sous-estimée : une victoire sportive pour un athlète ukrainien procurait aux soldats, qui suivaient régulièrement les matchs et les résultats, un certain espoir et un regain de moral.</p> <p>À partir de la mi-juin 2022, le sport à l’échelle nationale a progressivement retrouvé sa place, bien que dans des conditions exceptionnelles. Par exemple, la Première Ligue ukrainienne de football a obtenu l’autorisation de débuter la saison 2022-2023 fin août. Toutefois, les règles ont été adaptées à la situation du moment. Les spectateurs ne sont plus autorisés à assister aux matchs, et ceux-ci nécessitent une autorisation systématique de l’administration militaire pour avoir lieu. Si une alerte de raid aérien potentiel retentit dans un rayon de moins de 500 mètres, le match est interrompu et les joueurs se réfugient dans les vestiaires, ce qui se produit régulièrement. Après un an et demi de guerre, aucun footballeur ukrainien n’a été blessé. Cependant, certains matchs ont duré plus de cinq heures au total.</p> <p>Paradoxalement, l’Ukraine continue de participer activement aux événements sportifs européens et mondiaux. Chaque compétition internationale offre l’opportunité aux autorités de promouvoir les intérêts du pays dans un contexte de guerre. De plus, certains clubs ukrainiens sont accueillis par les alliés géopolitiques les plus proches de l’Ukraine. Par exemple, le Dynamo Kyiv s’entraîne et joue certains de ses matchs à Cracovie, en Pologne. Dnipro, quant à lui, joue et s’entraîne à Košice, en Slovaquie, de manière permanente. En général, de nombreux athlètes et entraîneurs ukrainiens, actifs ou non, ont choisi de rejoindre le front dans l’est de l’Ukraine, mettant leur carrière en suspens. Le cas emblématique est peut-être celui de Yuriy Vernydub, entraîneur ukrainien du Sheriff Tiraspol, qui est parti au front dès le lendemain de l’invasion. Il est important de noter que ces professionnels du sport proviennent souvent de divisions sportives moins importantes. En effet, les athlètes de renom préfèrent généralement contribuer à l’effort de guerre d’un point de vue sportif et symbolique.</p> <p>Le cas des supporters des clubs ukrainiens est également notable. Depuis 2014 et surtout depuis l’invasion russe en Ukraine, de nombreux ultras ont rejoint le front pour combattre ensemble, mettant de côté leur rivalité sportive. En temps de paix rivaux, les supporters du Shakhtar Donetsk et du Dynamo Kyiv combattent ensemble contre leur ennemi commun.</p> <h3>La stratégie politique et sportive de Volodymyr Zelensky après l’invasion russe</h3> <p>Depuis le 24 février 2022, la stratégie internationale de Volodymyr Zelensky s’est intensifiée dans le domaine sportif, trouvant écho dans l’espace médiatique mondial. Les ministères, les organisations privées et le comité olympique ukrainien, tous les organes politiques, économiques et sportifs du pays sont mobilisés pour transmettre un message : l’exclusion de la Russie doit durer tant que l’invasion se poursuit.</p> <figure><iframe frameborder="0" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/YQiSJ3AO5CI?wmode=transparent&start=0" width="440"></iframe></figure> <p>Le hashtag #boycottrussiansport en est devenu le symbole. De manière concrète, les arguments ukrainiens peuvent être résumés en cinq points. La Russie devrait être exclue des événements sportifs mondiaux et des Jeux olympiques de Paris 2024 car elle est un État envahisseur et terroriste ; les athlètes russes sont de quelque manière liés à l’État russe ou à l’armée russe ; le régime de Vladimir Poutine exploite le sport à des fins de propagande ; dans de telles conditions, l’équité des compétitions sportives (Jeux olympiques, Coupe du monde, etc.) ne peut être maintenue ; les athlètes ukrainiens perdent la vie au front ou ne peuvent pas s’entraîner convenablement pour les grandes compétitions internationales, par conséquent la Russie et la Biélorussie ne devraient pas être autorisés à y participer.</p> <p>Pour diffuser ces arguments, le gouvernement ukrainien utilise divers canaux. Tout comme Volodymyr Zelensky utilise son smartphone pour communiquer avec différentes générations, les principaux porte-parole du sport ukrainien exploitent les canaux et les codes contemporains pour diffuser leur message. Les réseaux sociaux tels que TikTok, Facebook ou Instagram sont fréquemment utilisés pour diffuser des propos politiques liés au sport. On peut souvent voir circuler des vidéos de quelques secondes transmettant un message percutant. Par exemple, l’une de ces vidéos virales montre un athlète russe lançant un javelot dans les airs. Le javelot se transforme ensuite en obus, suit la trajectoire de l’athlète et finit par s’écraser sur un bâtiment ukrainien. Un message s’affiche alors à l’écran : « Boycott Russian Sport. »</p> <h4 style="text-align: center;"><a href="https://images.theconversation.com/files/592021/original/file-20240503-16-h8q7b1.jpeg?ixlib=rb-4.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img src="https://images.theconversation.com/files/592021/original/file-20240503-16-h8q7b1.jpeg?ixlib=rb-4.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" alt="" /></a></h4> <h4 style="text-align: center;"><em><span>Ces extraits sont issus de « La Guerre du sport. 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Lire l’<a href="https://theconversation.com/geopolitique-du-sport-laffrontement-entre-la-russie-et-lukraine-229262">article original</a>.</h4> <h4><em>Lukas Aubin, directeur de recherche à l’IRIS, spécialiste de la géopolitique de la Russie et du sport et membre associé du Centre de Recherches Pluridisciplinaires Multilingues (CRPM) à l’université Paris-Nanterre, et Jean-Baptiste Guégan, expert en géopolitique du sport et enseignant à Sciences Po Paris, viennent de publier aux éditions Tallandier</em> <a href="https://www.tallandier.com/livre/la-guerre-du-sport/">La Guerre du Sport, une nouvelle géopolitique</a>, <em>un ouvrage complet qui met en lumière l’influence des grands enjeux internationaux sur un un monde du sport à l’apolitisme de plus en plus illusoire. 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Il y voyait un moyen efficace de lutter contre les maladies dues à une carence en vitamine A, très répandues en Asie du Sud-Est et qui peuvent entraîner la cécité, voire la mort. Potrykus était alors loin de se douter qu'un tribunal philippin retoquerait son invention un an et demi après son autorisation.</p> <h3>Syngenta acquiert des droits de brevet</h3> <p>La route a été longue jusqu'à la première récolte du riz doré: en 1999 déjà, Potrykus et son collègue Peter Beyer avaient présenté un prototype. Celui-ci contenait des gènes de jonquille qui produisaient de la provitamine A dans le grain de riz et le faisaient ainsi briller d'un jaune doré. En 2005, les chercheurs avaient développé une deuxième variante en collaboration avec le géant de l'agroalimentaire Syngenta. 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En effet, le corps humain n'utiliserait la provitamine A que s'il dispose de suffisamment de graisse, ce qui, selon Greenpeace, n'est souvent pas le cas chez ces personnes. De plus, il y aurait un risque que le riz génétiquement modifié, une fois introduit dans le champ, se reproduise de manière autonome, se propage et contamine ainsi d'autres variétés de riz. En raison de ces doutes, il a fallu attendre 16 ans de plus pour que les autorités philippines en charge de la biosécurité donnent finalement le feu vert à la culture du riz doré en 2021.</p> <h3>Le tribunal révoque l’autorisation</h3> <p>Mais aujourd'hui, une nouvelle décision de justice met déjà un frein à la propagation de la variété de riz transgénique. Ainsi, une Cour d'appel philippine a révoqué l'autorisation le 17 avril dernier en se référant au principe de précaution: «En l'absence de consensus scientifique sur la sécurité du riz doré, il ne devrait plus être cultivé à des fins commerciales». 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