Actuel / «Je n’ai pas grandi dans un ghetto, j’en suis reconnaissant au Jura et à la Suisse»
Antonio Rodriguez, adolescent, dans une rue de Porrentruy. © Privé
Il a d’abord été correspondant de l’Agence télégraphique suisse à Neuchâtel. Puis de l’Agence France Presse à Montevideo, en Uruguay, suivi d’un poste à Washington au sein de la même maison. Il est aujourd’hui basé au siège, à Paris. Le Jurassien Antonio Rodriguez, né en 1966 à Delémont de parents venus de Galice en Espagne, a une pensée pour eux en découvrant, du «Figaro» à «Paris Match», le bon accueil réservé aux «Larmes de ma vigne», témoignage à vif d’un vigneron chablisien adepte de la production biologique, auquel il prête une plume toute ramuzienne.
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Marié, père de deux filles, celui qui d’habitude se retranche dans l’anonymat du journaliste agencier, raconte ici son beau parcours, de son enfance delémontaine au temps des initiatives Schwarzenbach et du combat jurassien, à sa vie d’adulte, livrant des souvenirs émus ou drôles, donnant sa vision, «à titre personnel», de la politique et de l’économie. Interview d’un ami d’école. </p> <p><strong>Tes trois livres nous parlent d’une France de l’intérieur, travailleuse, volontaire, modeste. Pourquoi t’es-tu intéressé à cette France-là?</strong></p> <p>Les notions de travail, de courage et d’engagement sont importantes à mes yeux. Dans la chronologie de ces trois livres, il y a une évolution et un changement de perspective entre le premier d’entre eux, «L’alternative Montebourg», paru en 2016, et les deux suivants, dédiés à des individus placés à l’écart des projecteurs, le chef pompier Romain Comte et le viticulteur Denis Pommier, auquel il faut associer sa femme Isabelle. Le livre sur Montebourg, avec les cas épineux des hauts-fourneaux en Moselle et du groupe Alstom à Belfort, a été pour moi une façon de me jeter à l’eau comme journaliste. Une fois terminé, je me suis rendu compte que j’avais écrit un livre épousant un schéma classique en France, quelque chose partant de Paris pour aller en province. Une façon de parler des gens de haut en bas.</p> <p><strong>Tu as tenu à rompre avec ce schéma.</strong></p> <p>Oui. Mon intention, après Montebourg, était de faire l’inverse: aller trouver des gens, pas forcément connus, mais qui avaient une fonction, un rôle. Ce faisant, de restituer leur quotidien, de faire remonter les enjeux. En côtoyant le chef pompier Romain Comte, j’ai découvert, je le dis ici avec une certaine naïveté, que partout en France, des individus équipés d’un bip sont prêts à venir vous secourir à tout moment du jour et de la nuit. Avec Denis Pommier le vigneron, mon propos était le même : sa bouteille de vin bio, on s’en régale dans les milieux urbains, à Paris, Delémont ou Neuchâtel, mais on est loin de se rendre compte de la somme de tracas, de doutes, de nuits d’angoisse qu’elle contient. Je me suis attelé à décrire cette nature que l’on vénère, mais qui peut être tellement ingrate avec ceux qui la respectent le plus.</p> <h3><strong>«La route de la mort»</strong></h3> <p><strong>Dans «L’appel des sirènes», tu évoques cette route de sinistre réputation passant par la Saône-et-Loire du chef pompier Romain Comte, la RCEA, la route Centre-Europe-Atlantique.</strong></p> <p>La route de la mort, c’est ainsi qu’on l’appelle. En 2017, l’accident d’un car transportant des Portugais qui rentraient en Suisse avait fait quatre morts. Romain Comte avait été l’un des premiers sur les lieux du drame. Ce tragique fait divers m’a replongé dans mon enfance. La RCEA était la route que je prenais avec mes parents pour aller en vacances en Galice. Un an plus tôt, sur le même axe, un précédent accident avait fait seize morts. C’étaient aussi des Portugais, partis de Suisse pour passer le week-end de Pâques au Portugal. Ils étaient entassés dans une camionnette sans vitres, comme des migrants voyageant clandestinement au sein de l’Union européenne. Eh bien là, ces conditions de transport inhumaines étaient le lot de ressortissants européens.</p> <p><strong>Qu’est-ce que tu trouves de remarquable ou de touchant chez les personnes dont tu dresses les portraits?</strong></p> <p>Elles m’intéressent parce qu’elles sont proches du terrain. Parce qu’elles produisent. Soit des services de première nécessité, comme Romain Comte, soit de la marchandise, comme Denis Pommier. Pas comme les intermédiaires qui eux ne produisent rien mais touchent parfois beaucoup d’argent. Quand le laboratoire américain Pfizer annonce l’arrivée sur le marché d’un vaccin contre la Covid, moi, ce qui m’intéresse, c’est l’histoire du couple turco-allemand qui a découvert ce vaccin et non pas les cinq millions de stock-options que va empocher le PDG de Pfizer.</p> <p><strong>Les deux Allemands d’origine turque, un homme et une femme, sont eux-mêmes aujourd’hui milliardaires…</strong></p> <p>Ils sont peut-être devenus milliardaires avec leur PME, mais c’est leur parcours que j’ai envie de raconter et qui échappe jusqu’à un certain point au monde de la finance.</p> <h3><strong>«C’était la France qui fait rêver»</strong></h3> <p><strong>Il y a une dizaine d’années est apparue une lecture différente de la crise française avec la notion de «France périphérique» qu’on doit au géographe Christophe Guilluy et qui désigne un ensemble de territoires comme exclus des bénéfices de la mondialisation. Est-ce que tu es sensible à cette perception?</strong></p> <p>Oui, complètement. Je reprends l’exemple de la route de la mort, la RCEA. C’était celle des terroirs. Je me rappelle, enfant, de ces panneaux indiquant les grands vins de bourgogne et de bordeaux, les fromages, les églises romanes. C’était la France qui fait rêver. Quand j’ai repris cette route pour « L’appel des sirènes », d’autres panneaux avaient fait leur apparition : non à la fermeture de telle usine, non à la fermeture de telle maternité, non à la fermeture de telle gare, etc. En trente ans, cette France périphérique a changé, elle s’est abîmée. Ce récit d’une dégradation est plus présent dans les livres sur Montebourg et le chef pompier Romain Comte que dans celui consacré au viticulteur Denis Pommier.</p> <p><strong>On sent chez toi une part de nostalgie.</strong></p> <p>Oui, sans doute. Avec ma famille j’ai acheté une maison non loin de Chablis où je me suis lié d’amitié avec Denis Pommier. Cette partie de la Bourgogne me va bien parce qu’elle est située entre mon Jura natal et Paris où je travaille. Elle me va bien aussi parce qu’elle me rappelle l’époque où, venant de Suisse, je trouvais en France, sitôt la frontière franchie, cette atmosphère d’un terroir que je me remémore heureux dans mes souvenirs. Et puis, cette France des vignerons, ce que je vais dire va sembler affreusement réac, c’est une France qui travaille. On a en Suisse l’image d’une France rétive au travail, celle des 35 heures. Or, cela ne correspond pas à celle des vignerons que je côtoie.</p> <p><strong>En tant que journaliste à l’AFP, tu es tenu à une forme de devoir de réserve, mais on devine chez toi des valeurs plutôt de gauche, une gauche à la fois du salariat et de l’entrepreneuriat. Est-ce le cas ?</strong></p> <p>Permets-moi d’esquiver ta question. Je n’ai jamais demandé leurs couleurs politiques à Denis Pommier et Romain Comte. Montebourg, avec sa fibre protectionniste, a des idées qui peuvent être tout à fait acceptées par une partie de la droite. En ce sens, Macron a raison de dire qu’il n’y a plus ni de gauche ni de droite solidement ancrées et distinguables l’une de l’autre. L’opposition que je vois aujourd’hui est plus une opposition entre l’humain et ce qui l’est moins. Je reprends l’exemple des stock-options de Pfizer : apparemment c’est un algorithme qui devait les vendre à partir du moment où l’action montait énormément. Il y a un côté inhumain dans cette opération. L’autre opposition qui m’apparaît est celle entre ville et campagne, entre idéalisme ou utopisme d’une part, et une réalité parfois ingrate de l’autre. Le pompier de Saône-et-Loire, il n’intervient pas sur l’incendie de Notre-Dame mais sur des accidents de la route ou des voitures qui brûlent dans des quartiers difficiles. Paray-le-Monial, la ville de Romain Comte, c’est une petite ville de 12 000 habitants comme Delémont.</p> <h3><strong>«Mon père travaillait chez un caviste et ma mère travaillait comme couturière»</strong></h3> <p><strong>Est-ce que les personnages que tu décris sont représentatifs du mouvement des gilets jaunes?</strong></p> <p>Les ouvriers d’Alstom et de Florange, oui. Le chef pompier Romain Comte et le vigneron Denis Pommier, non. Romain Comte, en tant que pompier, est de plus en plus appelé au secours dans des zones rurales où l’Etat a disparu, mais son cas personnel, pas plus que celui de Denis Pommier ne témoignent d’une situation ou d’un sentiment de déclassement tel qu’observé chez les gilets jaunes rassemblés chaque samedi aux ronds-points de cette France périphérique.</p> <p><strong>Venons-en à ton histoire. Tu es né à Delémont en 1966, quand le Jura faisait encore partie du canton du Berne. D’où venaient tes parents?</strong></p> <p>Ils venaient tous les deux de Galice en Espagne mais ils se sont rencontrés à Delémont. Mon père travaillait chez un caviste et ma mère travaillait comme couturière. Elle a terminé sa vie professionnelle, et c’était pour elle une forme de consécration, concierge à Morépont, là où se réunissait le gouvernement jurassien, à Delémont. J’étais enfant unique.</p> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1607871375_antonio.pre.higinio.mre.maria.delmont.1970.jpeg" class="img-responsive img-fluid normal " width="382" height="381" /></p> <h4>Antonio Rodriguez et ses parents, Higinio et Maria, à Delémont en 1970. © Privé </h4> <p><strong>Dans les années 70 et 80, je n’ai pas souvenir de racisme en paroles ou en actes visant dans le Jura les Italiens, les Portugais et les Espagnols. Est-ce que toi, à l’enfance ou à l’adolescent, tu as été témoin de racisme?</strong></p> <p>Non, pas vraiment. Au contraire, même. Maintenant que je peux comparer les situations des deux côtés de la frontière franco-suisse, je dirais que j’ai plutôt eu la chance de grandir en vieille ville de Delémont dans un premier temps, pas très loin par la suite, et non pas dans un HLM construit en zone inondable. De la même façon, j’ai eu la chance d’être scolarisé dans une classe où nous étions peu de fils et filles d’étrangers, mélangés aux enfants de la bourgeoisie delémontaine. Il n’y avait pas de séparation de classe sociale.</p> <h3><strong>«Mon éditrice m’a dit: "Pense à la relation de l’homme avec la nature, relis Ramuz"»</strong></h3> <p><strong>Parlais-tu français tout petit?</strong></p> <p>Non. Je me souviens à ce propos que ma mère me rappelait, une fois devenu grand, que je ne parlais pas français quand elle m’emmena la première fois à l’école enfantine. J’avais 5 ans et j’avais grandi dans un cocon galicien. Tout le monde parlait galicien à la maison, y compris bien sûr mon grand-père, qui était là. C’est pour cette raison que je suis particulièrement sensible aux critiques qui relèvent la qualité du style de mon livre sur Denis Pommier – mon éditrice m’a dit: «Pense à la relation de l’homme avec la nature, relis Ramuz», ce que j’ai fait, notamment «La guerre dans le Haut-Pays» et «Jean-Luc persécuté». Parce que tout cela, à l’origine, ce n’était pas gagné. Il s’agissait pour moi de ne pas être tenté par le décrochage scolaire ou autre chose.</p> <p><strong>Il y a quand même eu des périodes pénibles au moment des initiatives xénophobes Schwarzenbach qui entendaient réduire le nombre d’étrangers présents en Suisse.</strong></p> <p>Oui, là, en effet, pour ma famille, ce fut l’inquiétude et l’angoisse. On avait suivi à la télévision, un poste noir et blanc, les résultats de l’initiative de 1974. C’était un contexte de récession économique, marqué par le premier choc pétrolier et le début de la crise dans la branche horlogère. Cette initiative, comme toutes les autres, avait été rejetée. J’ai eu, ado, un entraîneur de foot devenu membre de l’UDC par la suite, mais je n’ai jamais entendu de propos racistes dans sa bouche, mais d’autres, plutôt drôles avec le recul, du genre: «Antonio, si tu ne veux pas courir, fais de la marche!»</p> <h3><strong>«Je me suis dit alors que j’étais un gros con»</strong></h3> <p><strong>As-tu ressenti chez tes parents ou en toi une pression te poussant à réussir ta scolarité et tes études?</strong></p> <p>Oui, d’ailleurs je pense à mes parents ces jours-ci. Quand je lis une bonne critique des «Larmes de ma vigne», je pense à eux. Mon père est décédé en 1993, ma mère, il y a sept ans. On n’est pas toujours conscient des attentes des parents. J’en ai pris conscience lorsque je leur ai annoncé que je redoublais ma deuxième année de lycée. Je pensais pourtant les avoir préparés à cette mauvaise nouvelle. Eh bien non. J’ai vu mon père pleurer. Je me suis dit alors que j’étais un gros con. Si bien que me suis ressaisi. J’étais dans cette période insouciante de l’adolescence où j’aimais sortir, aller en boîte au 138*. Je me suis rendu compte qu’il ne fallait pas penser qu’à moi.</p> <p><strong><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1607871477_antonio.platini.interview.court.1990.jpg" class="img-responsive img-fluid normal " width="545" height="354" /></strong></p> <h4><strong>En 1990, Antonio Rodriguez interviewant le footballeur français Michel Platini. © Privé</strong></h4> <p><strong>Tu avais deux passions qui te prenaient du temps. Le foot et le rock.</strong></p> <p>J’ai même interviewé Michel Platini, ton idole, pour <em>Le Démocrate</em>, devenu <em>Le Quotidien Jurassien</em>. Au foot, j’ai joué en Inter A avec les SRD, le club delémontain. Comme ailier droit ou latéral droit. Ma meilleure saison (<em>rires</em>), c’était au poste d’avant-centre avec les Espagnols de Delémont. Je devais avoir 18 ou 19 ans, je marquais plein de buts. On s’était sauvé de la relégation dans un match de barrage contre Sonvilier, à côté de Saint-Imier. J’avais marqué le but vainqueur. Quant au rock, plutôt la pop anglaise en ce qui me concerne, j’appartenais à une équipe de passionnés qui faisait venir des groupes au Caveau, une salle de Delémont. Des formations qui étaient en tournée en France voisine, à Besançon ou en Alsace. On s’était mis dans la boucle. On faisait des échanges avec les Eurockéennes de Belfort.</p> <h3><strong>«Quand il y a une frontière, j’aime bien la traverser»</strong></h3> <p><strong>Qu’as-tu fait comme études? Comment t-es-tu retrouvé correspondant de l’AFP à Montevideo en Uruguay? </strong></p> <p>J’ai fait études de lettres à l’Université de Neuchâtel, avec espagnol, histoire et journalisme. En même temps, j’écrivais des articles pour la rubrique «sports» du<em> Démocrate</em>. En 1993, je suis entré à l’ATS, l’Agence télégraphique suisse, avant même d’avoir terminé mes études. En 1997, j’ai rejoint l’AFP, l’Agence France Presse et je suis effectivement parti comme correspondant à Montevideo, en Uruguay. J’avais noué auparavant des contacts avec le correspondant de l’AFP à Besançon. C’est un peu dans mon tempérament: quand il y a une frontière, j’aime bien la traverser. Partir en Uruguay, à 12 000 km, avec un salaire plus bas qu’en Suisse, laisser ma mère à Delémont – elle viendra me voir plusieurs fois à Montevideo… Tout cela n’était pas facile. J’ai tenté le coup. L’idée n’était pas nécessairement de faire carrière à l’AFP, d’y travailler maintenant depuis plus de 20 ans, mais les choses se sont faites comme ça.</p> <p><strong>Quels faits marquants gardes-tu de ton séjour en Amérique du Sud?</strong></p> <p>Il y a l’arrestation de Pinochet à Londres en octobre 1998. Je me suis rendu plusieurs fois à Santiago dans le cadre de cette affaire judiciaire. Et là je suis tombé sur des gens qui n’étaient pas contents que Pinochet ait été arrêté. J’ai découvert à cette occasion un Chili qui ne correspondait pas à l’image que j’en avais. A l’inverse, il y a eu une grande émotion à Santiago lorsqu’à Londres la Chambre des lords a estimé que l’action contre Pinochet était légale. Ça s’est joué à trois voix contre deux, un peu comme sur des tirs au but. Je me trouvais au siège de l’association des victimes de la dictature. Je ne parvenais à interviewer personne, tout le monde me sautait dans les bras.</p> <h3><strong>«Ne te mêle pas de ça, c’est des histoires de Suisses!»</strong></h3> <p><strong>Cela ressemble, dans un autre registre, à l’intense émotion du 23 juin 1974 à Delémont, quand une majorité des sept districts jurassiens a approuvé la création d’un canton du Jura. Tu avais 8 ans.</strong></p> <p>Oui, je m’en souviens. Je me souviens surtout de mes parents qui me disaient: «Ne te mêle pas de ça, c’est des histoires de Suisses!» Pour en revenir à l’Amérique du Sud, avec ma mère nous avons retrouvé des cousins galiciens qui avaient émigré en Argentine et en Uruguay dans les années 50 et que ma mère n’avait pas revus depuis.</p> <p><strong>Après l’Uruguay, te voilà correspondant de l’AFP à Washington.</strong></p> <p>J’y suis resté de 2004 à fin 2008 et la réélection d’Obama. Ce qui était intéressant, c’était de sortir de Washington, une ville qui vote démocrate à 90% et ne représente donc pas les Etats-Unis. C’était l’époque où l’Amérique profonde avait une dent contre la France parce que celle-ci n’avait pas rejoint la coalition armée contre l’Irak en 2003. En Caroline du Nord, il ne fallait pas commander des «French fries» mais des «freedom fries», les frites de la liberté, ainsi qu’elles avaient été renommées. Je me suis intéressé aux latinos, aussi parce que je m’identifiais à eux. Je voulais voir comment ils vivaient dans cette Amérique qui les faisait rêver. Je me souviens d’un reportage sur la Nouvelle-Orléans reconstruite après l’Ouragan Katrina de 2005. J’étais allé à la rencontre de ces latinos qui avaient pris part à l’ouvrage et qui après cela s’étaient retrouvés sans emploi. J’avais titré mon papier: «Les oubliés de Katrina». En 2009, j’ai été nommé au siège à Paris. J’étais affecté à l’économie. J’y ai suivi notamment les ministres Montebourg, Macron et Le Maire.</p> <p><strong>Beau parcours. A propos de ton livre «Les larmes de ma vigne», tu me disais dans une précédente conversation que l’essentiel des critiques, toutes bonnes, était le fait de la presse de droite. Comment l’expliques-tu?</strong></p> <p>Ça m’amuse un peu, parce que la presse qui fait le plus la promotion de l’écologie et du bio, c’est la presse de gauche, or c’est elle qui parle le moins de ce livre. Je ne sais pas vraiment à quoi c’est dû. Mais ce que je constate… Je ne sais pas comment te dire ça de manière journalistiquement neutre… Pour faire simple, le 10 mai 1981 quand François Mitterrand a été élu président de la République en France, j’ai été content. Dans l’immeuble où j’habitais avec mes parents logeait aussi Jean-Luc Vautravers, le rédacteur en chef du <em>Démocrate</em>, un quotidien de sensibilité libérale-radicale pour qui je pigerais par la suite. Jean-Luc Vautravers ne devait pas être content de l’élection de Mitterrand, lui (rires). Dans un autre contexte, il avait été la cible d’un barbouillage des séparatistes du groupe Bélier, au sol devant l’immeuble. Quelle époque!</p> <p><strong>Quel immeuble!</strong></p> <p>Il n’était de loin pas habité que par des étrangers. Outre le rédacteur en chef du <em>Démocrate</em>, on y trouvait le délégué épiscopal, ainsi que le directeur de l’usine de vélos Condor. Il y avait de la mixité sociale.</p> <p><strong>Tes sentiments d’ado en faveur de Mitterrand seront-ils par la suite un peu plus mélangés?</strong></p> <p>Oui, en quelque sorte. Je repense au parcours de ma mère, aux échelons qu’elle a gravis à Delémont pour terminer fonctionnaire. Les gens qui lui ont permis de les gravir sont des gens de droite. C’est bête pour la gauche, ce que je vais dire, mais les ministres (<em>les conseillers d’Etat jurassiens, ndlr.</em>) dont elle me disait du bien parce qu’ils avaient eu une attention pour elle, étaient des ministres de droite, alors que les socialistes étaient plutôt froids et distants. Maintenant, avec les échos favorables que rencontre mon livre dans les journaux de droite, je me dis que c’est peut-être une réalité qu’il faut accepter.</p> <h3><strong>«Je suis pour un protectionnisme environnemental»</strong></h3> <p><strong>Sur la question d’un certain protectionnisme économique, soutenu par des personnalités de gauche, posant des limites au libre-échange, comment te situes-tu?</strong></p> <p>C’est une conviction tout à fait personnelle: on ne peut pas fermer les usines en Europe pour aller polluer ailleurs, ce n’est plus possible. Si on veut améliorer notre environnement, il faut taxer de manière dissuasive les produits importés de pays ne répondant pas aux normes de l’Union européenne. A ce titre, une taxe carbone sur ces produits s’impose, comme le prévoit le «Pacte vert» au sein de l’UE. Je suis pour un protectionnisme de type environnemental.</p> <p><strong>Comment te positionnes-tu dans le débat sur l’immigration extra-européenne?</strong></p> <p>Il faut arrêter d’être hypocrite. Si des gens viennent en Europe, c’est parce qu’ils pensent qu’ils y vivront mieux que dans leur pays d’origine, mais c’est aussi parce qu’on a besoin d’eux. L’idéal serait que tout cela se fasse de manière ordonnée et légale. Quand, après la chute du mur la mondialisation a pris son essor, l’idée était d’aller produire dans d’autres pays, que cela contribuerait à l’élévation globale du niveau de vie partout sur la planète. Or trente ans plus tard, on s’aperçoit qu’on est allé produire ailleurs mais avec l’impératif de produire toujours moins cher. Je ne crois pas au crédo néolibéral de la stabilisation des populations dans leur pays par la création de classes moyennes. Pour moi, c’est un utopisme. C’est comme le ruissellement, ça n’existe pas. On pensait freiner l’immigration, elle s’est accélérée. Avec les conflits provoqués par les crises environnementales (sècheresse, montée des eaux), le nombre de réfugiés climatiques augmentera. Il y’a pas beaucoup de raisons d’être optimistes.</p> <p><strong>Te reconnais-tu plutôt dans un modèle universaliste à la française ou dans une organisation multiculturaliste à l’anglo-saxonne?</strong></p> <p>Disons que la laïcité française me va très bien. Ma femme est musulmane, je suis catholique. On vit sans problème dans un pays qui accepte et permet ce type d’union. Pour en revenir à mon histoire, je n’ai pas grandi dans un ghetto et j’en suis reconnaissant au Jura et à la Suisse.</p> <hr /> <h4>*La discothèque Le Club 138, ouverte en 1979 à Courrendlin, portait ce nom en référence à l’article 138 de la Constitution jurassienne prévoyant la réunification du Jura et du Jura bernois.</h4> <h4>Denis Pommier, Antonio Rodriguez, «Les larmes de ma vignes», Le Cherche Midi, 2020, 240 p.</h4> <h4>Romain Compte, avec Antonio Rodriguez, «L’appel des sirènes», Le Cherche Midi, 2019, 208 p.</h4> <h4>Antonio Rodriguez, «L’alternative Montebourg», Le Cherche Midi, 2016, 352 p.</h4>', 'content_edition' => null, 'slug' => 'je-n-ai-pas-grandi-dans-un-ghetto-j-en-suis-reconnaissant-au-jura-et-a-la-suisse', 'headline' => false, 'homepage' => 'col-md-12', 'like' => (int) 592, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 2717, 'homepage_order' => (int) 2957, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => 'Interview', 'poster' => null, 'category_id' => (int) 5, 'person_id' => (int) 830, 'post_type_id' => (int) 1, 'poster_attachment' => null, 'editions' => [[maximum depth reached]], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'attachments' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'comments' => [[maximum depth reached]], 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, 'relatives' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Post) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Post) {}, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Post) {}, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Post) {} ], 'embeds' => [], 'images' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'audios' => [], 'comments' => [], 'author' => 'Antoine Menusier', 'description' => 'Il a d’abord été correspondant de l’Agence télégraphique suisse à Neuchâtel. 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Puis de l’Agence France Presse à Montevideo, en Uruguay, suivi d’un poste à Washington au sein de la même maison. Il est aujourd’hui basé au siège, à Paris. Le Jurassien Antonio Rodriguez, né en 1966 à Delémont de parents venus de Galice en Espagne, a une pensée pour eux en découvrant, du «Figaro» à «Paris Match», le bon accueil réservé aux «Larmes de ma vigne», témoignage à vif d’un vigneron chablisien adepte de la production biologique, auquel il prête une plume toute ramuzienne.', 'subtitle_edition' => null, 'content' => '<p>Avant de plonger dans les heurs et malheurs de la viticulture bio, Antonio Rodriguez a écrit deux précédents ouvrages: l’un sur l’ancien ministre Arnaud Montebourg, «L’alternative Montebourg», l’autre sur un chef pompier de Saône-et-Loire, Romain Comte, «L’appel des sirènes». Marié, père de deux filles, celui qui d’habitude se retranche dans l’anonymat du journaliste agencier, raconte ici son beau parcours, de son enfance delémontaine au temps des initiatives Schwarzenbach et du combat jurassien, à sa vie d’adulte, livrant des souvenirs émus ou drôles, donnant sa vision, «à titre personnel», de la politique et de l’économie. Interview d’un ami d’école. </p> <p><strong>Tes trois livres nous parlent d’une France de l’intérieur, travailleuse, volontaire, modeste. Pourquoi t’es-tu intéressé à cette France-là?</strong></p> <p>Les notions de travail, de courage et d’engagement sont importantes à mes yeux. Dans la chronologie de ces trois livres, il y a une évolution et un changement de perspective entre le premier d’entre eux, «L’alternative Montebourg», paru en 2016, et les deux suivants, dédiés à des individus placés à l’écart des projecteurs, le chef pompier Romain Comte et le viticulteur Denis Pommier, auquel il faut associer sa femme Isabelle. Le livre sur Montebourg, avec les cas épineux des hauts-fourneaux en Moselle et du groupe Alstom à Belfort, a été pour moi une façon de me jeter à l’eau comme journaliste. Une fois terminé, je me suis rendu compte que j’avais écrit un livre épousant un schéma classique en France, quelque chose partant de Paris pour aller en province. Une façon de parler des gens de haut en bas.</p> <p><strong>Tu as tenu à rompre avec ce schéma.</strong></p> <p>Oui. Mon intention, après Montebourg, était de faire l’inverse: aller trouver des gens, pas forcément connus, mais qui avaient une fonction, un rôle. Ce faisant, de restituer leur quotidien, de faire remonter les enjeux. En côtoyant le chef pompier Romain Comte, j’ai découvert, je le dis ici avec une certaine naïveté, que partout en France, des individus équipés d’un bip sont prêts à venir vous secourir à tout moment du jour et de la nuit. Avec Denis Pommier le vigneron, mon propos était le même : sa bouteille de vin bio, on s’en régale dans les milieux urbains, à Paris, Delémont ou Neuchâtel, mais on est loin de se rendre compte de la somme de tracas, de doutes, de nuits d’angoisse qu’elle contient. Je me suis attelé à décrire cette nature que l’on vénère, mais qui peut être tellement ingrate avec ceux qui la respectent le plus.</p> <h3><strong>«La route de la mort»</strong></h3> <p><strong>Dans «L’appel des sirènes», tu évoques cette route de sinistre réputation passant par la Saône-et-Loire du chef pompier Romain Comte, la RCEA, la route Centre-Europe-Atlantique.</strong></p> <p>La route de la mort, c’est ainsi qu’on l’appelle. En 2017, l’accident d’un car transportant des Portugais qui rentraient en Suisse avait fait quatre morts. Romain Comte avait été l’un des premiers sur les lieux du drame. Ce tragique fait divers m’a replongé dans mon enfance. La RCEA était la route que je prenais avec mes parents pour aller en vacances en Galice. Un an plus tôt, sur le même axe, un précédent accident avait fait seize morts. C’étaient aussi des Portugais, partis de Suisse pour passer le week-end de Pâques au Portugal. Ils étaient entassés dans une camionnette sans vitres, comme des migrants voyageant clandestinement au sein de l’Union européenne. Eh bien là, ces conditions de transport inhumaines étaient le lot de ressortissants européens.</p> <p><strong>Qu’est-ce que tu trouves de remarquable ou de touchant chez les personnes dont tu dresses les portraits?</strong></p> <p>Elles m’intéressent parce qu’elles sont proches du terrain. Parce qu’elles produisent. Soit des services de première nécessité, comme Romain Comte, soit de la marchandise, comme Denis Pommier. Pas comme les intermédiaires qui eux ne produisent rien mais touchent parfois beaucoup d’argent. Quand le laboratoire américain Pfizer annonce l’arrivée sur le marché d’un vaccin contre la Covid, moi, ce qui m’intéresse, c’est l’histoire du couple turco-allemand qui a découvert ce vaccin et non pas les cinq millions de stock-options que va empocher le PDG de Pfizer.</p> <p><strong>Les deux Allemands d’origine turque, un homme et une femme, sont eux-mêmes aujourd’hui milliardaires…</strong></p> <p>Ils sont peut-être devenus milliardaires avec leur PME, mais c’est leur parcours que j’ai envie de raconter et qui échappe jusqu’à un certain point au monde de la finance.</p> <h3><strong>«C’était la France qui fait rêver»</strong></h3> <p><strong>Il y a une dizaine d’années est apparue une lecture différente de la crise française avec la notion de «France périphérique» qu’on doit au géographe Christophe Guilluy et qui désigne un ensemble de territoires comme exclus des bénéfices de la mondialisation. Est-ce que tu es sensible à cette perception?</strong></p> <p>Oui, complètement. Je reprends l’exemple de la route de la mort, la RCEA. C’était celle des terroirs. Je me rappelle, enfant, de ces panneaux indiquant les grands vins de bourgogne et de bordeaux, les fromages, les églises romanes. C’était la France qui fait rêver. Quand j’ai repris cette route pour « L’appel des sirènes », d’autres panneaux avaient fait leur apparition : non à la fermeture de telle usine, non à la fermeture de telle maternité, non à la fermeture de telle gare, etc. En trente ans, cette France périphérique a changé, elle s’est abîmée. Ce récit d’une dégradation est plus présent dans les livres sur Montebourg et le chef pompier Romain Comte que dans celui consacré au viticulteur Denis Pommier.</p> <p><strong>On sent chez toi une part de nostalgie.</strong></p> <p>Oui, sans doute. Avec ma famille j’ai acheté une maison non loin de Chablis où je me suis lié d’amitié avec Denis Pommier. Cette partie de la Bourgogne me va bien parce qu’elle est située entre mon Jura natal et Paris où je travaille. Elle me va bien aussi parce qu’elle me rappelle l’époque où, venant de Suisse, je trouvais en France, sitôt la frontière franchie, cette atmosphère d’un terroir que je me remémore heureux dans mes souvenirs. Et puis, cette France des vignerons, ce que je vais dire va sembler affreusement réac, c’est une France qui travaille. On a en Suisse l’image d’une France rétive au travail, celle des 35 heures. Or, cela ne correspond pas à celle des vignerons que je côtoie.</p> <p><strong>En tant que journaliste à l’AFP, tu es tenu à une forme de devoir de réserve, mais on devine chez toi des valeurs plutôt de gauche, une gauche à la fois du salariat et de l’entrepreneuriat. Est-ce le cas ?</strong></p> <p>Permets-moi d’esquiver ta question. Je n’ai jamais demandé leurs couleurs politiques à Denis Pommier et Romain Comte. Montebourg, avec sa fibre protectionniste, a des idées qui peuvent être tout à fait acceptées par une partie de la droite. En ce sens, Macron a raison de dire qu’il n’y a plus ni de gauche ni de droite solidement ancrées et distinguables l’une de l’autre. L’opposition que je vois aujourd’hui est plus une opposition entre l’humain et ce qui l’est moins. Je reprends l’exemple des stock-options de Pfizer : apparemment c’est un algorithme qui devait les vendre à partir du moment où l’action montait énormément. Il y a un côté inhumain dans cette opération. L’autre opposition qui m’apparaît est celle entre ville et campagne, entre idéalisme ou utopisme d’une part, et une réalité parfois ingrate de l’autre. Le pompier de Saône-et-Loire, il n’intervient pas sur l’incendie de Notre-Dame mais sur des accidents de la route ou des voitures qui brûlent dans des quartiers difficiles. Paray-le-Monial, la ville de Romain Comte, c’est une petite ville de 12 000 habitants comme Delémont.</p> <h3><strong>«Mon père travaillait chez un caviste et ma mère travaillait comme couturière»</strong></h3> <p><strong>Est-ce que les personnages que tu décris sont représentatifs du mouvement des gilets jaunes?</strong></p> <p>Les ouvriers d’Alstom et de Florange, oui. Le chef pompier Romain Comte et le vigneron Denis Pommier, non. Romain Comte, en tant que pompier, est de plus en plus appelé au secours dans des zones rurales où l’Etat a disparu, mais son cas personnel, pas plus que celui de Denis Pommier ne témoignent d’une situation ou d’un sentiment de déclassement tel qu’observé chez les gilets jaunes rassemblés chaque samedi aux ronds-points de cette France périphérique.</p> <p><strong>Venons-en à ton histoire. Tu es né à Delémont en 1966, quand le Jura faisait encore partie du canton du Berne. 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Maintenant que je peux comparer les situations des deux côtés de la frontière franco-suisse, je dirais que j’ai plutôt eu la chance de grandir en vieille ville de Delémont dans un premier temps, pas très loin par la suite, et non pas dans un HLM construit en zone inondable. De la même façon, j’ai eu la chance d’être scolarisé dans une classe où nous étions peu de fils et filles d’étrangers, mélangés aux enfants de la bourgeoisie delémontaine. Il n’y avait pas de séparation de classe sociale.</p> <h3><strong>«Mon éditrice m’a dit: "Pense à la relation de l’homme avec la nature, relis Ramuz"»</strong></h3> <p><strong>Parlais-tu français tout petit?</strong></p> <p>Non. Je me souviens à ce propos que ma mère me rappelait, une fois devenu grand, que je ne parlais pas français quand elle m’emmena la première fois à l’école enfantine. J’avais 5 ans et j’avais grandi dans un cocon galicien. Tout le monde parlait galicien à la maison, y compris bien sûr mon grand-père, qui était là. C’est pour cette raison que je suis particulièrement sensible aux critiques qui relèvent la qualité du style de mon livre sur Denis Pommier – mon éditrice m’a dit: «Pense à la relation de l’homme avec la nature, relis Ramuz», ce que j’ai fait, notamment «La guerre dans le Haut-Pays» et «Jean-Luc persécuté». Parce que tout cela, à l’origine, ce n’était pas gagné. Il s’agissait pour moi de ne pas être tenté par le décrochage scolaire ou autre chose.</p> <p><strong>Il y a quand même eu des périodes pénibles au moment des initiatives xénophobes Schwarzenbach qui entendaient réduire le nombre d’étrangers présents en Suisse.</strong></p> <p>Oui, là, en effet, pour ma famille, ce fut l’inquiétude et l’angoisse. On avait suivi à la télévision, un poste noir et blanc, les résultats de l’initiative de 1974. C’était un contexte de récession économique, marqué par le premier choc pétrolier et le début de la crise dans la branche horlogère. Cette initiative, comme toutes les autres, avait été rejetée. J’ai eu, ado, un entraîneur de foot devenu membre de l’UDC par la suite, mais je n’ai jamais entendu de propos racistes dans sa bouche, mais d’autres, plutôt drôles avec le recul, du genre: «Antonio, si tu ne veux pas courir, fais de la marche!»</p> <h3><strong>«Je me suis dit alors que j’étais un gros con»</strong></h3> <p><strong>As-tu ressenti chez tes parents ou en toi une pression te poussant à réussir ta scolarité et tes études?</strong></p> <p>Oui, d’ailleurs je pense à mes parents ces jours-ci. Quand je lis une bonne critique des «Larmes de ma vigne», je pense à eux. Mon père est décédé en 1993, ma mère, il y a sept ans. On n’est pas toujours conscient des attentes des parents. J’en ai pris conscience lorsque je leur ai annoncé que je redoublais ma deuxième année de lycée. Je pensais pourtant les avoir préparés à cette mauvaise nouvelle. Eh bien non. J’ai vu mon père pleurer. Je me suis dit alors que j’étais un gros con. Si bien que me suis ressaisi. J’étais dans cette période insouciante de l’adolescence où j’aimais sortir, aller en boîte au 138*. Je me suis rendu compte qu’il ne fallait pas penser qu’à moi.</p> <p><strong><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1607871477_antonio.platini.interview.court.1990.jpg" class="img-responsive img-fluid normal " width="545" height="354" /></strong></p> <h4><strong>En 1990, Antonio Rodriguez interviewant le footballeur français Michel Platini. © Privé</strong></h4> <p><strong>Tu avais deux passions qui te prenaient du temps. Le foot et le rock.</strong></p> <p>J’ai même interviewé Michel Platini, ton idole, pour <em>Le Démocrate</em>, devenu <em>Le Quotidien Jurassien</em>. Au foot, j’ai joué en Inter A avec les SRD, le club delémontain. Comme ailier droit ou latéral droit. Ma meilleure saison (<em>rires</em>), c’était au poste d’avant-centre avec les Espagnols de Delémont. Je devais avoir 18 ou 19 ans, je marquais plein de buts. On s’était sauvé de la relégation dans un match de barrage contre Sonvilier, à côté de Saint-Imier. J’avais marqué le but vainqueur. Quant au rock, plutôt la pop anglaise en ce qui me concerne, j’appartenais à une équipe de passionnés qui faisait venir des groupes au Caveau, une salle de Delémont. Des formations qui étaient en tournée en France voisine, à Besançon ou en Alsace. On s’était mis dans la boucle. On faisait des échanges avec les Eurockéennes de Belfort.</p> <h3><strong>«Quand il y a une frontière, j’aime bien la traverser»</strong></h3> <p><strong>Qu’as-tu fait comme études? Comment t-es-tu retrouvé correspondant de l’AFP à Montevideo en Uruguay? </strong></p> <p>J’ai fait études de lettres à l’Université de Neuchâtel, avec espagnol, histoire et journalisme. En même temps, j’écrivais des articles pour la rubrique «sports» du<em> Démocrate</em>. En 1993, je suis entré à l’ATS, l’Agence télégraphique suisse, avant même d’avoir terminé mes études. En 1997, j’ai rejoint l’AFP, l’Agence France Presse et je suis effectivement parti comme correspondant à Montevideo, en Uruguay. J’avais noué auparavant des contacts avec le correspondant de l’AFP à Besançon. C’est un peu dans mon tempérament: quand il y a une frontière, j’aime bien la traverser. Partir en Uruguay, à 12 000 km, avec un salaire plus bas qu’en Suisse, laisser ma mère à Delémont – elle viendra me voir plusieurs fois à Montevideo… Tout cela n’était pas facile. J’ai tenté le coup. L’idée n’était pas nécessairement de faire carrière à l’AFP, d’y travailler maintenant depuis plus de 20 ans, mais les choses se sont faites comme ça.</p> <p><strong>Quels faits marquants gardes-tu de ton séjour en Amérique du Sud?</strong></p> <p>Il y a l’arrestation de Pinochet à Londres en octobre 1998. Je me suis rendu plusieurs fois à Santiago dans le cadre de cette affaire judiciaire. Et là je suis tombé sur des gens qui n’étaient pas contents que Pinochet ait été arrêté. J’ai découvert à cette occasion un Chili qui ne correspondait pas à l’image que j’en avais. A l’inverse, il y a eu une grande émotion à Santiago lorsqu’à Londres la Chambre des lords a estimé que l’action contre Pinochet était légale. Ça s’est joué à trois voix contre deux, un peu comme sur des tirs au but. Je me trouvais au siège de l’association des victimes de la dictature. Je ne parvenais à interviewer personne, tout le monde me sautait dans les bras.</p> <h3><strong>«Ne te mêle pas de ça, c’est des histoires de Suisses!»</strong></h3> <p><strong>Cela ressemble, dans un autre registre, à l’intense émotion du 23 juin 1974 à Delémont, quand une majorité des sept districts jurassiens a approuvé la création d’un canton du Jura. Tu avais 8 ans.</strong></p> <p>Oui, je m’en souviens. Je me souviens surtout de mes parents qui me disaient: «Ne te mêle pas de ça, c’est des histoires de Suisses!» Pour en revenir à l’Amérique du Sud, avec ma mère nous avons retrouvé des cousins galiciens qui avaient émigré en Argentine et en Uruguay dans les années 50 et que ma mère n’avait pas revus depuis.</p> <p><strong>Après l’Uruguay, te voilà correspondant de l’AFP à Washington.</strong></p> <p>J’y suis resté de 2004 à fin 2008 et la réélection d’Obama. Ce qui était intéressant, c’était de sortir de Washington, une ville qui vote démocrate à 90% et ne représente donc pas les Etats-Unis. C’était l’époque où l’Amérique profonde avait une dent contre la France parce que celle-ci n’avait pas rejoint la coalition armée contre l’Irak en 2003. En Caroline du Nord, il ne fallait pas commander des «French fries» mais des «freedom fries», les frites de la liberté, ainsi qu’elles avaient été renommées. Je me suis intéressé aux latinos, aussi parce que je m’identifiais à eux. Je voulais voir comment ils vivaient dans cette Amérique qui les faisait rêver. Je me souviens d’un reportage sur la Nouvelle-Orléans reconstruite après l’Ouragan Katrina de 2005. J’étais allé à la rencontre de ces latinos qui avaient pris part à l’ouvrage et qui après cela s’étaient retrouvés sans emploi. J’avais titré mon papier: «Les oubliés de Katrina». En 2009, j’ai été nommé au siège à Paris. J’étais affecté à l’économie. J’y ai suivi notamment les ministres Montebourg, Macron et Le Maire.</p> <p><strong>Beau parcours. A propos de ton livre «Les larmes de ma vigne», tu me disais dans une précédente conversation que l’essentiel des critiques, toutes bonnes, était le fait de la presse de droite. Comment l’expliques-tu?</strong></p> <p>Ça m’amuse un peu, parce que la presse qui fait le plus la promotion de l’écologie et du bio, c’est la presse de gauche, or c’est elle qui parle le moins de ce livre. Je ne sais pas vraiment à quoi c’est dû. Mais ce que je constate… Je ne sais pas comment te dire ça de manière journalistiquement neutre… Pour faire simple, le 10 mai 1981 quand François Mitterrand a été élu président de la République en France, j’ai été content. Dans l’immeuble où j’habitais avec mes parents logeait aussi Jean-Luc Vautravers, le rédacteur en chef du <em>Démocrate</em>, un quotidien de sensibilité libérale-radicale pour qui je pigerais par la suite. Jean-Luc Vautravers ne devait pas être content de l’élection de Mitterrand, lui (rires). Dans un autre contexte, il avait été la cible d’un barbouillage des séparatistes du groupe Bélier, au sol devant l’immeuble. Quelle époque!</p> <p><strong>Quel immeuble!</strong></p> <p>Il n’était de loin pas habité que par des étrangers. Outre le rédacteur en chef du <em>Démocrate</em>, on y trouvait le délégué épiscopal, ainsi que le directeur de l’usine de vélos Condor. Il y avait de la mixité sociale.</p> <p><strong>Tes sentiments d’ado en faveur de Mitterrand seront-ils par la suite un peu plus mélangés?</strong></p> <p>Oui, en quelque sorte. Je repense au parcours de ma mère, aux échelons qu’elle a gravis à Delémont pour terminer fonctionnaire. Les gens qui lui ont permis de les gravir sont des gens de droite. C’est bête pour la gauche, ce que je vais dire, mais les ministres (<em>les conseillers d’Etat jurassiens, ndlr.</em>) dont elle me disait du bien parce qu’ils avaient eu une attention pour elle, étaient des ministres de droite, alors que les socialistes étaient plutôt froids et distants. Maintenant, avec les échos favorables que rencontre mon livre dans les journaux de droite, je me dis que c’est peut-être une réalité qu’il faut accepter.</p> <h3><strong>«Je suis pour un protectionnisme environnemental»</strong></h3> <p><strong>Sur la question d’un certain protectionnisme économique, soutenu par des personnalités de gauche, posant des limites au libre-échange, comment te situes-tu?</strong></p> <p>C’est une conviction tout à fait personnelle: on ne peut pas fermer les usines en Europe pour aller polluer ailleurs, ce n’est plus possible. Si on veut améliorer notre environnement, il faut taxer de manière dissuasive les produits importés de pays ne répondant pas aux normes de l’Union européenne. A ce titre, une taxe carbone sur ces produits s’impose, comme le prévoit le «Pacte vert» au sein de l’UE. Je suis pour un protectionnisme de type environnemental.</p> <p><strong>Comment te positionnes-tu dans le débat sur l’immigration extra-européenne?</strong></p> <p>Il faut arrêter d’être hypocrite. Si des gens viennent en Europe, c’est parce qu’ils pensent qu’ils y vivront mieux que dans leur pays d’origine, mais c’est aussi parce qu’on a besoin d’eux. L’idéal serait que tout cela se fasse de manière ordonnée et légale. Quand, après la chute du mur la mondialisation a pris son essor, l’idée était d’aller produire dans d’autres pays, que cela contribuerait à l’élévation globale du niveau de vie partout sur la planète. Or trente ans plus tard, on s’aperçoit qu’on est allé produire ailleurs mais avec l’impératif de produire toujours moins cher. Je ne crois pas au crédo néolibéral de la stabilisation des populations dans leur pays par la création de classes moyennes. Pour moi, c’est un utopisme. C’est comme le ruissellement, ça n’existe pas. On pensait freiner l’immigration, elle s’est accélérée. Avec les conflits provoqués par les crises environnementales (sècheresse, montée des eaux), le nombre de réfugiés climatiques augmentera. Il y’a pas beaucoup de raisons d’être optimistes.</p> <p><strong>Te reconnais-tu plutôt dans un modèle universaliste à la française ou dans une organisation multiculturaliste à l’anglo-saxonne?</strong></p> <p>Disons que la laïcité française me va très bien. Ma femme est musulmane, je suis catholique. On vit sans problème dans un pays qui accepte et permet ce type d’union. 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Jeudi, comme souvent dans ce rendez-vous formaté pour le buzz, il s’est passé <a href="https://twitter.com/LeDevBreton/status/1590817814059044864?s=20&t=4TWr6vsi3CFKbFwoMHZdVw" target="_blank" rel="noopener">quelque chose de fort</a> sur le plateau de «Touche pas à mon poste!», l’émission animée par Cyril Hanouna sur la chaîne C8 du groupe Bolloré – le nom à l’origine du clash de jeudi soir. Pour La France insoumise (LFI), ce parti de la gauche radicale siégeant à l’Assemblée nationale, un dilemme à présent se pose: faut-il encore aller à TPMP, là où bat le cœur de la France antisystème, où les électorats lepénistes et mélenchonistes s’invectivent, mais surtout, se parlent comme nulle part ailleurs?</p> <p>Que s’est-il passé de si grave ou plutôt de si révélateur? Alors que le débat portait sur l’accueil par la France de 234 migrants se trouvant à bord du bateau Ocean Viking, le jeune député LFI Louis Boyard, qui fut autrefois chroniqueur rétribué à TPMP, a mis les pieds dans son ancienne gamelle en parlant d’un procès menaçant «Bolloré» pour déforestation au Cameroun. Vincent Bolloré est ce milliardaire français propriétaire du groupe Canal, un catholique breton qu’on dit hanté par la crainte du «grand remplacement», ce concept d’extrême droite repris par son poulain Eric Zemmour lors de la dernière campagne présidentielle.</p> <p>Fidèle à son style «wesh-embrouille», où les différends se règlent en <em>battles</em> de tchatche, Cyril Hanouna a aussitôt mis un coup de pression au député Boyard, façon «qu’est-ce t’as dit?»: «Tu sais que t’es dans le groupe Bolloré, ici?», lui a-t-il lâché quand apparaissaient au même moment les résultats d’un sondage-téléspectateurs indiquant une proportion de 80% se prononçant contre l’accueil des 234 migrants et de 20% se disant pour.</p> <p>En sweat-capuche, Hanouna, tout à son personnage de caïd de la street chic rappelant au p’tit merdeux le respect dû au patron, le vrai, insiste alors: «Tu sais que t’es dans le groupe Bolloré?... Qu’est-ce que tu viens foutre ici, alors?... Bolloré t’a donné de l’argent, t’étais chroniqueur ici…»</p> <p>Boyard, qui avait visiblement préparé son coup, la joue grands principes: «Attends, Cyril, est-ce que tu es en train de me dire que je n’ai pas le droit de dire que Bolloré, il a un procès avec cent cinquante Camerounais parce qu’il a déforesté?» La suite: le député-LFI-ex-chroniqueur-TPMP, ne s’énervant pas, devant pressentir qu’il sortira gagnant de la <em>battle</em>, se prévaut de sa qualité de député. Hanouna piétine l’argument, estimant que Boyard, comme d’autres de son parti, doit son élection à TPMP. Après avoir donné du «mon chéri» à Boyard, il le traite d’«abruti» et de «merde», chacun accusant l’autre d’avoir fait monter l’extrême droite – le grand tabou de la politique française.</p> <p>Quelle suite LFI, plus largement la Nupes, la coalition de gauche à l’Assemblée nationale, donnera-t-elle à cet incident? Continuera-t-elle d’aller sur le plateau de TPMP? Qui, d’Hanouna ou de la gauche radicale, a-t-il le plus besoin de l’autre? Sans LFI, formation aux accents populistes, TPMP perdrait sa caution de gauche, risquant alors de ne plus réunir que des «anti-tout», souvent l’antichambre d’un parti de l’ordre. Mais en renonçant à ce forum, La France insoumise se priverait d’un lieu où elle peut porter des coups à «Macron», ce qui lui rapporte des voix. Ne plus se montrer dans «Touche pas à mon poste!» pourrait être interprété comme l’aveu qu’on appartient au «système», à cette «élite» qu’on prétend combattre.</p> <p>Dans le même temps, en participant à cette émission, LFI sait qu’elle contribue à saper la confiance dans les institutions démocratiques, dont on a vu jeudi soir le peu de cas qu’en faisait Cyril Hanouna en insultant le député Boyard. Il y a deux semaines, toujours à la barre de TPMP, Hanouna appelait à la tenue d’un procès expéditif, assortie d’une «perpétuité immédiate» pour la meurtrière présumée de la petite Lola. Tartuffe dans l’affaire, LFI est bel et bien confrontée à un dilemme, à moins que l’ambiguïté ne lui siée davantage que la clarté.</p> <p>Mais surtout, TPMP, qui remplit, quoi qu’on en pense, une fonction tribunitienne en offrant un exutoire aux passions de toutes sortes, peut-elle être supprimée? Sa disparition provoquerait-elle des troubles? Bolloré et sa créature Hanouna disposent là d’un certain pouvoir et d’une certaine responsabilité.</p>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'en-finir-avec-hanouna-mais-apres', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 549, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 2, 'person_id' => (int) 830, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [ [maximum depth reached] ], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 2892, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => true, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => null, 'readed' => null, 'subhead' => 'ANALYSE / France', 'title' => 'L’islamisme n’existe pas, il n’y a pas eu d’attentats', 'subtitle' => 'Loi confortant les principes républicains, actuellement débattue en France; rapport Stora sur la mémoire de la colonisation et de la guerre d’Algérie: quand la qualification des actes est enjeu de pouvoir, accessoirement de paix.', 'subtitle_edition' => 'Loi confortant les principes républicains, actuellement débattue en France; rapport Stora sur la mémoire de la colonisation et de la guerre d’Algérie: quand la qualification des actes est enjeu de pouvoir, accessoirement de paix.', 'content' => '<p>Le 20 janvier, l’historien français Benjamin Stora a remis au président Emmanuel Macron un rapport sur la mémoire de la colonisation et de la guerre d’Algérie. Né en 1950 à Constantine, issu de la communauté juive algérienne, partie avec les pieds-noirs à l’indépendance en 1962, Stora était investi d’une mission réconciliatrice par le président de la République. A la fin de son travail, l’historien émet une série de préconisations. Et l’on entre alors dans le vif du sujet: l’action.</p> <p>La première de ces préconisations, qui rappelle la Commission Vérité et Réconciliation en Afrique du Sud, l’Instance Vérité et Dignité en Tunisie, est la constitution d’une «Commission "Mémoires et vérité" chargée d’impulser des initiatives communes entre la France et l’Algérie sur les questions de mémoires». La <em>vérité</em>. Pas de réconciliation sans vérité sur les exactions passées, croit-on.</p> <p>Mais la vérité n’est pas seulement question de faits, elle intéresse aussi le sens. Or deux sens ne peuvent cohabiter. Pas d’en-même-temps possible: la douleur d’un camp ne peut valoir celle de l’autre. Celle de l’Allemand de la Seconde Guerre mondiale ne vaut pas celle de l’Allié. On touche probablement ici à la limite du rapport Stora: le colon ne peut pas faire valoir sa douleur au même titre que le colonisé. Sinon, toute la hiérarchie, établie selon une échelle de valeurs qui accorde au colonisé la légitimité de sa révolte, est rebattue. Et pourtant, se dit-on, il faut tendre vers la reconnaissance des souffrances de part et d’autre, pour pouvoir la faire, cette réconciliation. Comme c’est compliqué…</p> <h3>Les choses ont un sens que la paix peut ignorer</h3> <p>Seul le sens permet d’y voir clair. Mais le problème du sens, qui dit qui avait raison, qui avait tort, c’est qu’il ne permet pas toujours de refermer les plaies, puisque personne ne veut être en tort, ou avoir tous les torts. Le cas franco-algérien renvoie à la spécificité de la guerre d’Algérie, plus sensible sur un plan mémoriel que les guerres franco-allemandes.</p> <p>La guerre d’Algérie, combat décolonial, lutte pour la libération, fut probablement moins une guerre classique entre deux nations qu’une guerre civile à l’intérieur d’un même territoire. Opposant deux populations d’inégal statut, certes, et ce n’est pas rien, mais ayant toute deux un caractère civil. De là, sans doute, le refus, longtemps, de nommer par le terme de guerre ce qui était appelé sous le nom d’événements.</p> <p>C’est pourquoi la vérité (qui la dit? selon quels critères?) peut être, aussi, parfois, l’ennemi de la réconciliation, celle-ci étant par nature toujours un peu artificielle. Disons que l’intérêt de la paix l’emporte à un moment donné sur l’intérêt de la guerre, surtout dans une configuration de conflit civil.</p> <h3>Les pieds dans le plat</h3> <p>Très vite apparaît la nécessité de l’amnistie, pour étouffer des braises dont chacun a cependant conscience qu’elle ne seront jamais tout à fait éteintes. Ce fut vrai après une relative brève période d’épuration en France en 1944-45. Vrai entre la France et l’Algérie à l’indépendance en 1962. Vrai encore en 1999, lorsque le président algérien Abdelaziz Bouteflika fit voter la loi dite de concorde civile, qui mit fin par un plébiscite à la guerre civile.</p> <p>Cela nous amène à la France d’aujourd’hui, celle, d’après, espérons-le, les attentats islamistes. Attentats? Islamistes? D’emblée, les pieds dans le plat. La somme de «ce qui est arrivé en France ces dernières années» pèse son poids de non-dits. Cette situation présente des similitudes avec les conflits évoqués plus haut. Mais elle a comme quelque chose d’inextricable. Ce n’est pas encourageant.</p> <h3>Quand le bourreau redevient l'égal de la victime</h3> <p>Alors, quelles similitudes entre l’après-attentats et ces précédents après-guerres? La première de toutes, la plus importante: la nécessité de l’amnistie, avons-nous vu, par quoi on cesse de juger ceux qu’on sait coupables, par quoi on passe à autre chose. Comme la victime, le bourreau doit pouvoir reprendre une vie normale. Sauf que toute amnistie suppose un vainqueur reconnu comme tel, autrement dit un juste faisant offrande de son pardon au vaincu. L’amnistie, qui comporte une part d’amnésie volontaire, permet le retour à la paix dans des sociétés qui se sont entredéchirées.</p> <p>Toute la difficulté en France – on le voit avec les polémiques entourant l’adoption en cours de la loi confortant le respect des principes républicains, initialement intitulée contre le séparatisme islamiste – tient dans l’énoncé et dans le sens attribué à des faits qui ont ensanglanté la métropole comme jamais depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.</p> <h3>Déni de réalité</h3> <p>Dire ce qui s’est passé contient un enjeu de pouvoir politique et culturel pour le présent et pour l’avenir. Il y a là un rapport de force, d’autant plus à l’œuvre que la qualification de ces attentats n’est pas claire pour tous, ou doit rester équivoque, manière de manœuvre dilatoire. On est alors proche du déni de réalité. Laquelle? Oui, on peut jouer longtemps sur les mots.</p> <p>La meilleure façon de tirer un trait sur cette période serait effectivement de dire que l’islamisme n’existe pas et que par conséquent il n’y a pas eu d’attentats, tout attentat ayant une motivation idéologique. Il y aurait eu une sorte d’explosion de violence spontanée.</p> <h3>Désigner une idéologie, c'est désigner des idéologues</h3> <p>Retenir la qualification d’attentats, qui plus est islamistes, ce qu’ils ont bel et bien été, c’est désigner une idéologie. L’idéologie islamiste, donc: soit un projet de conquête civilisationnelle dirigé contre l’Occident jugé décadent et en bout de course. Toute la littérature djihadiste, s’inspirant de l’islamisme, est faite de cela.</p> <p>Désigner une idéologie potentiellement violente, c’est désigner des idéologues et des compagnons de route. C’est vouloir occuper le pouvoir à leur place, là où on pense qu’ils l’occupent, dans certaines parties de l’université, par exemple. C’est désigner un problème: «l’islamo-gauchisme», soit une convergence plus ou moins solide entre matérialisme et religion en vue de renverser l’ordre bourgeois, lequel s’oppose à la fois à l’égalité et à une saine vision de l’existence – notons que le fidèle musulman n’érigeant pas sa religion en cause politique, et cela fait du monde, n’a que faire de ces sollicitations révolutionnaires.</p> <h3>La France insoumise visée et visant à son tour</h3> <p>Sur la défensive, se sentant visée par une entreprise épuratrice post-islamiste, par quoi il s’agit d’empêcher, du moins de s’opposer frontalement aux conditions de production de l’islamisme, la France insoumise de Jean-Luc Mélenchon refuse de faire la différence entre islamisme et islam, accuse le gouvernement de persécution envers les musulmans. Comme si l’islamisme n’existait pas ou n’avait pas existé, en France et ailleurs, comme si – autre façon de hiérarchiser la donne historique – les coupables de ce qu’il faut quand même bien appeler des attentats, n’étaient pas à chercher parmi des musulmans, population opprimée, mais chez leurs oppresseurs, autrement dit dans l’Occident capitaliste, colon un jour, colon toujours…</p> <h3>La poursuite de la guerre d'Algérie</h3> <p>On retrouve ici la matière du rapport Stora sur les conséquences de la guerre d’Algérie. En quoi on pourrait affirmer que les attentats islamistes qui ont frappé la France ces dernières années sont en partie, en partie seulement, la poursuite d’une guerre d’Algérie qui n’a pas réellement pris fin. Tout comme la guerre civile algérienne des années 90 fut avant cela la poursuite, déjà, de cette même guerre, dont le terme fut sanctionné davantage par une forme d’armistice que par une paix durable.</p> <p>Les morts de Samuel Paty, le professeur égorgé l’an dernier, celle du commandant de gendarmerie Beltrame, en 2018, sont des morts encombrantes. Les maires, plutôt de droite, qui veulent donner leurs noms à des places et des rues, en inscrivant sous leurs patronymes: «Victimes du terrorisme islamiste», désignent implicitement une idéologie ennemie. Non pas extérieure à la France mais présente en France.</p> <p>Cette désignation un peu lourde de sens, c’est le cas de le dire, ne contribue pas à la recherche de la paix, dont l’oubli est l’une des composantes, pourrait-on penser. Mais «en face», là où tout est social et colonial, on ne baisse pas pavillon. La déconstruction du modèle occidental et capitaliste – visé par l’islamisme revanchard – doit se poursuivre. 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Pourquoi? On a tenté de répondre à cette question. Indice: l’image, pas terrible, du «voisin français». ', 'subtitle_edition' => null, 'content' => '<p>«C’est la petite Gilberte, Gilberte de Courgenay…» La Mob, c’était mieux avant. Il y avait alors de vraies frontières. Pas comme aujourd’hui avec Schengen qui les a toutes effacées, ce qui est bien pratique aussi, il faut le dire. Mais parfois une votation – ou une pandémie – suffit à les rétablir. C’est ce qui s’est passé dimanche avec la «burqa», l’initiative interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public, acceptée à 51,2% par le peuple. Un score relativement modeste qui cache de fortes disparités. Sans le vote des métropoles, favorables au non, le texte aurait été approuvé bien plus largement. En Suisse romande, les communes frontalières de la France ont plébiscité le oui. Qu’est-ce que cela révèle de ce vote, à cet endroit bien précis, celui des limites géographiques et politiques d’un pays, en sa partie francophone?</p> <p>A Courgenay, dans cette Ajoie s’enfonçant tel un saillant dans les départements français du Doubs et du Territoire de Belfort, 65,4% des habitants ont voté en faveur de l’initiative soutenue par l’UDC et une partie de la gauche (<a href="https://www.admin.ch/gov/fr/accueil/documentation/votations/20210307/initiative-populaire-oui-a-l-interdiction-de-se-dissimuler-le-visage.html" target="_blank" rel="noopener">cliquez ici</a> pour avoir accès à la carte interactive). Un score de cinq points supérieur à la moyenne cantonale jurassienne, 60,7% de oui, la plus élevée des dix-neuf cantons qui ont approuvé le texte.</p> <p>Des trois districts du canton du Jura, celui de Porrentruy, qui épouse la carte de l’Ajoie, dont la particularité est d’avoir avec la France le double de frontière qu’il n’en a avec la Suisse, affiche le plus haut taux d’acceptation, 64,7%. A la pointe du saillant, Bure, la commune qui héberge la place d’armes du même nom, se hisse à la première place du district avec 76% de oui. 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Bardonnex, localité munie d’un important poste-frontière, détient semble-t-il le record cantonal avec 57% de oui. A part la commune de Genève proprement dite (44,8% de oui) et de certaines localités en direction du canton de Vaud, peut-être un peu plus bourgeoises que le reste du canton de Genève, toutes les autres ou presque acceptent l’initiative.</p> <p>Le Valais, en partie frontalier avec la France, a voté oui à 58,3%, deuxième taux le plus élevé en Suisse romande derrière le Jura. La commune limitrophe de Saint-Gingolph, à la pointe sud-est du lac Léman, détient avec 70,5% des voix l’un des plus hauts scores du canton.</p> <p>Alors, pourquoi ce oui franc et souvent massif des communes frontalières à l’initiative dite anti-«burqa»? Notons au passage que de nombreuses localités de l’«intérieur» de la Suisse romande, spécialement dans la Broye, l’ont également fortement approuvée.</p> <p>Alors, est-ce par «islamophobie»? 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Un <i>mansplaining</i> en mode solidaire, bien sûr. Je serais même tenté d’y voir un peu plus que cela: un <i>manembracing</i> virant au <i>manembarrassing</i>. Autrement dit: une défense à ce point appuyée qu’elle en devient gênante.</p> <p>Gabriel Bender a le zèle du converti. Du converti au féminisme. C’est l’impression qu’il donne. Comme s’il devait montrer, à lui-même et au monde, qu’il est du bon côté. Celui des dominés, en l’occurrence des dominées. Militantisme et sociologie – sa discipline – ne font plus qu’un dans un certain nombre de domaines de recherche. En première année de «socio», on apprenait pourtant à distinguer le discours de l’acteur de celui de l’observateur.</p> <p>Ce précieux conseil, qui permet d’entretenir la veille démocratique, ne semble plus partagé par tous les observateurs des phénomènes de société. La prose «féministe» de Gabriel Bender rend compte d’une confusion des statuts certainement volontaire. 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Bref, le débat est un acquis précieux, et cette réponse à Gabriel Bender y participe.</p> <hr /> <p style="text-align: center;"><strong>Lire aussi</strong>: <em><a href="https://bonpourlatete.com/analyses/mise-au-pas-du-patriarcat-a-la-rts" target="_blank" rel="noopener">Mise au pas du patriarcat à la RTS</a></em></p> <hr /> <p>Alors, qu’est-ce que je pense du harcèlement? Comme la plupart des gens, je pense que c’est intolérable. Je pense aussi que la «drague» en entreprise, lourde ou légère, est une mauvaise chose. Je dénonce le machisme et la beauferie. Je me souviens, mais là on part sur #metoogay, de trois journalistes causant politique avant une échéance électorale: l’un d’eux avait usé du mot «pédoque» pour évoquer un élu romand. C’était moche, j’avais envie de l’insulter. Tout ça pour dire que je suis heureux qu’une certaine tenue comportementale et verbale – «un homme ça s’empêche», merci Albert Camus – devienne la règle. Ce changement, on le doit aux féministes. Voilà pour ce que je pense.</p> <p>Maintenant, ce que je comprends. C’est plus pudique et de mon point de vue, plus intéressant, même si je peux parfaitement concevoir la nécessité et l’intérêt de récits à la première personne. Mon article sur le site de <i>Marianne</i> ne porte pas sur les faits présumés de harcèlement révélés par <i>Le Temps</i>. Je renvoie d’ailleurs dès le premier paragraphe à l’enquête du quotidien romand datée du 29 octobre. Il me semble que beaucoup, en France aussi, savent de quoi il retourne avec cette «Tour».</p> <p>Non, l’angle de mon article porte sur une action politique, menée essentiellement par des femmes, lesquelles exercent une pression dans un rapport de force en vue de l’obtention d’un résultat. On dirait que cette approche universelle a rendu Gabriel Bender tout drôle. Que comprendre en creux de ses arguments à lui? 1) Qu’un combat mené par des femmes se doit d’être protégé, parce que tout combat féminin serait empreint de fragilité. 2) Que des femmes sont au fond incapables de tactique, qu’elles sont toujours «entières», comme si parler de manœuvre à leur sujet, c’était implicitement en référer aux vieux schémas de ruse, de rouerie, voire de sorcellerie associés aux femmes durant des siècles.</p> <p>Mais on est de son temps ou on ne l’est pas. Il s’agit bien pour des femmes de la RTS, et pour des hommes avec elles, de tirer parti, c’est-à-dire avantage d’une situation à l’origine défavorable. C’est ce qui s’appelle faire de la politique. Mais encore une fois, tout combat politique conduit par des femmes devrait-il être assimilé seulement à du «militantisme», notion contenant en elle un statut de dominé, et par-là échapper à la critique ordinaire? Ne serait-ce pas là jouer sur les «deux tableaux», celui de la victime à qui réparation est due et celui du citoyen à qui tout revient une fois la victoire acquise? Aussi je propose qu’on laisse la démocratie trancher sur les reformes sociétales voulues par le «collectif du 14 juin». Et que le droit remplisse son office pour les cas de harcèlement et mobbing présumés.</p> <p>Il y a de la mauvaise foi dans le texte de Gabriel Bender. A tout le moins des imprécisions. J’en veux pour preuve ce passage où il comprend de travers ce qui est pourtant clair: personne, parmi les salariés de la RTS, ne pousse, contrairement à ce qu’il affirme, la femme que je cite anonymement à produire un «faux témoignage», soit des accusations de harcèlement qu’elle n’aurait pas subi. J’écris qu’elle n’a pas suivi des collègues qui l’incitaient à témoigner, non de quelque chose dont ils auraient été convaincus de l’existence la concernant, mais de faits dont ils pouvaient penser qu’elle avait été victime, comme d’autres. La personne citée ne dénie d’ailleurs aucunement le droit aux femmes ayant vécu un traumatisme d’en avoir fait part à la «ligne d’écoute» mise en place par la direction de la RTS.</p> <p>A l’avenir, débattons d’idées.</p>', 'content_edition' => null, 'slug' => 'les-femmes-aussi-font-de-la-politique-vous-savez', 'headline' => false, 'homepage' => 'col-md-12', 'like' => (int) 582, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 24480, 'homepage_order' => (int) 3087, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => '', 'poster' => null, 'category_id' => (int) 5, 'person_id' => (int) 830, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [ [maximum depth reached] ], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' } ] $embeds = [] $images = [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) { 'id' => (int) 7691, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Antonio.Ado.Rue.Delémont.jpg', 'type' => 'image', 'subtype' => 'jpeg', 'size' => (int) 144848, 'md5' => '3578d2d8afb025d781774e4de4435d42', 'width' => (int) 855, 'height' => (int) 600, 'date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'title' => '', 'description' => 'Antonio Rodriguez, adolescent, dans une rue de Porrentruy.', 'author' => '', 'copyright' => '© Privé', 'path' => '1607871180_antonio.ado.rue.delmont.jpg', 'embed' => null, 'profile' => 'default', '_joinData' => object(Cake\ORM\Entity) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Attachments' } ] $audios = [] $comments = [] $author = 'Antoine Menusier' $description = 'Il a d’abord été correspondant de l’Agence télégraphique suisse à Neuchâtel. 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Avant de plonger dans les heurs et malheurs de la viticulture bio, Antonio Rodriguez a écrit deux précédents ouvrages: l’un sur l’ancien ministre Arnaud Montebourg, «L’alternative Montebourg», l’autre sur un chef pompier de Saône-et-Loire, Romain Comte, «L’appel des sirènes». Marié, père de deux filles, celui qui d’habitude se retranche dans l’anonymat du journaliste agencier, raconte ici son beau parcours, de son enfance delémontaine au temps des initiatives Schwarzenbach et du combat jurassien, à sa vie d’adulte, livrant des souvenirs émus ou drôles, donnant sa vision, «à titre personnel», de la politique et de l’économie. Interview d’un ami d’école.
Tes trois livres nous parlent d’une France de l’intérieur, travailleuse, volontaire, modeste. Pourquoi t’es-tu intéressé à cette France-là?
Les notions de travail, de courage et d’engagement sont importantes à mes yeux. Dans la chronologie de ces trois livres, il y a une évolution et un changement de perspective entre le premier d’entre eux, «L’alternative Montebourg», paru en 2016, et les deux suivants, dédiés à des individus placés à l’écart des projecteurs, le chef pompier Romain Comte et le viticulteur Denis Pommier, auquel il faut associer sa femme Isabelle. Le livre sur Montebourg, avec les cas épineux des hauts-fourneaux en Moselle et du groupe Alstom à Belfort, a été pour moi une façon de me jeter à l’eau comme journaliste. Une fois terminé, je me suis rendu compte que j’avais écrit un livre épousant un schéma classique en France, quelque chose partant de Paris pour aller en province. Une façon de parler des gens de haut en bas.
Tu as tenu à rompre avec ce schéma.
Oui. Mon intention, après Montebourg, était de faire l’inverse: aller trouver des gens, pas forcément connus, mais qui avaient une fonction, un rôle. Ce faisant, de restituer leur quotidien, de faire remonter les enjeux. En côtoyant le chef pompier Romain Comte, j’ai découvert, je le dis ici avec une certaine naïveté, que partout en France, des individus équipés d’un bip sont prêts à venir vous secourir à tout moment du jour et de la nuit. Avec Denis Pommier le vigneron, mon propos était le même : sa bouteille de vin bio, on s’en régale dans les milieux urbains, à Paris, Delémont ou Neuchâtel, mais on est loin de se rendre compte de la somme de tracas, de doutes, de nuits d’angoisse qu’elle contient. Je me suis attelé à décrire cette nature que l’on vénère, mais qui peut être tellement ingrate avec ceux qui la respectent le plus.
«La route de la mort»
Dans «L’appel des sirènes», tu évoques cette route de sinistre réputation passant par la Saône-et-Loire du chef pompier Romain Comte, la RCEA, la route Centre-Europe-Atlantique.
La route de la mort, c’est ainsi qu’on l’appelle. En 2017, l’accident d’un car transportant des Portugais qui rentraient en Suisse avait fait quatre morts. Romain Comte avait été l’un des premiers sur les lieux du drame. Ce tragique fait divers m’a replongé dans mon enfance. La RCEA était la route que je prenais avec mes parents pour aller en vacances en Galice. Un an plus tôt, sur le même axe, un précédent accident avait fait seize morts. C’étaient aussi des Portugais, partis de Suisse pour passer le week-end de Pâques au Portugal. Ils étaient entassés dans une camionnette sans vitres, comme des migrants voyageant clandestinement au sein de l’Union européenne. Eh bien là, ces conditions de transport inhumaines étaient le lot de ressortissants européens.
Qu’est-ce que tu trouves de remarquable ou de touchant chez les personnes dont tu dresses les portraits?
Elles m’intéressent parce qu’elles sont proches du terrain. Parce qu’elles produisent. Soit des services de première nécessité, comme Romain Comte, soit de la marchandise, comme Denis Pommier. Pas comme les intermédiaires qui eux ne produisent rien mais touchent parfois beaucoup d’argent. Quand le laboratoire américain Pfizer annonce l’arrivée sur le marché d’un vaccin contre la Covid, moi, ce qui m’intéresse, c’est l’histoire du couple turco-allemand qui a découvert ce vaccin et non pas les cinq millions de stock-options que va empocher le PDG de Pfizer.
Les deux Allemands d’origine turque, un homme et une femme, sont eux-mêmes aujourd’hui milliardaires…
Ils sont peut-être devenus milliardaires avec leur PME, mais c’est leur parcours que j’ai envie de raconter et qui échappe jusqu’à un certain point au monde de la finance.
«C’était la France qui fait rêver»
Il y a une dizaine d’années est apparue une lecture différente de la crise française avec la notion de «France périphérique» qu’on doit au géographe Christophe Guilluy et qui désigne un ensemble de territoires comme exclus des bénéfices de la mondialisation. Est-ce que tu es sensible à cette perception?
Oui, complètement. Je reprends l’exemple de la route de la mort, la RCEA. C’était celle des terroirs. Je me rappelle, enfant, de ces panneaux indiquant les grands vins de bourgogne et de bordeaux, les fromages, les églises romanes. C’était la France qui fait rêver. Quand j’ai repris cette route pour « L’appel des sirènes », d’autres panneaux avaient fait leur apparition : non à la fermeture de telle usine, non à la fermeture de telle maternité, non à la fermeture de telle gare, etc. En trente ans, cette France périphérique a changé, elle s’est abîmée. Ce récit d’une dégradation est plus présent dans les livres sur Montebourg et le chef pompier Romain Comte que dans celui consacré au viticulteur Denis Pommier.
On sent chez toi une part de nostalgie.
Oui, sans doute. Avec ma famille j’ai acheté une maison non loin de Chablis où je me suis lié d’amitié avec Denis Pommier. Cette partie de la Bourgogne me va bien parce qu’elle est située entre mon Jura natal et Paris où je travaille. Elle me va bien aussi parce qu’elle me rappelle l’époque où, venant de Suisse, je trouvais en France, sitôt la frontière franchie, cette atmosphère d’un terroir que je me remémore heureux dans mes souvenirs. Et puis, cette France des vignerons, ce que je vais dire va sembler affreusement réac, c’est une France qui travaille. On a en Suisse l’image d’une France rétive au travail, celle des 35 heures. Or, cela ne correspond pas à celle des vignerons que je côtoie.
En tant que journaliste à l’AFP, tu es tenu à une forme de devoir de réserve, mais on devine chez toi des valeurs plutôt de gauche, une gauche à la fois du salariat et de l’entrepreneuriat. Est-ce le cas ?
Permets-moi d’esquiver ta question. Je n’ai jamais demandé leurs couleurs politiques à Denis Pommier et Romain Comte. Montebourg, avec sa fibre protectionniste, a des idées qui peuvent être tout à fait acceptées par une partie de la droite. En ce sens, Macron a raison de dire qu’il n’y a plus ni de gauche ni de droite solidement ancrées et distinguables l’une de l’autre. L’opposition que je vois aujourd’hui est plus une opposition entre l’humain et ce qui l’est moins. Je reprends l’exemple des stock-options de Pfizer : apparemment c’est un algorithme qui devait les vendre à partir du moment où l’action montait énormément. Il y a un côté inhumain dans cette opération. L’autre opposition qui m’apparaît est celle entre ville et campagne, entre idéalisme ou utopisme d’une part, et une réalité parfois ingrate de l’autre. Le pompier de Saône-et-Loire, il n’intervient pas sur l’incendie de Notre-Dame mais sur des accidents de la route ou des voitures qui brûlent dans des quartiers difficiles. Paray-le-Monial, la ville de Romain Comte, c’est une petite ville de 12 000 habitants comme Delémont.
«Mon père travaillait chez un caviste et ma mère travaillait comme couturière»
Est-ce que les personnages que tu décris sont représentatifs du mouvement des gilets jaunes?
Les ouvriers d’Alstom et de Florange, oui. Le chef pompier Romain Comte et le vigneron Denis Pommier, non. Romain Comte, en tant que pompier, est de plus en plus appelé au secours dans des zones rurales où l’Etat a disparu, mais son cas personnel, pas plus que celui de Denis Pommier ne témoignent d’une situation ou d’un sentiment de déclassement tel qu’observé chez les gilets jaunes rassemblés chaque samedi aux ronds-points de cette France périphérique.
Venons-en à ton histoire. Tu es né à Delémont en 1966, quand le Jura faisait encore partie du canton du Berne. D’où venaient tes parents?
Ils venaient tous les deux de Galice en Espagne mais ils se sont rencontrés à Delémont. Mon père travaillait chez un caviste et ma mère travaillait comme couturière. Elle a terminé sa vie professionnelle, et c’était pour elle une forme de consécration, concierge à Morépont, là où se réunissait le gouvernement jurassien, à Delémont. J’étais enfant unique.
Antonio Rodriguez et ses parents, Higinio et Maria, à Delémont en 1970. © Privé
Dans les années 70 et 80, je n’ai pas souvenir de racisme en paroles ou en actes visant dans le Jura les Italiens, les Portugais et les Espagnols. Est-ce que toi, à l’enfance ou à l’adolescent, tu as été témoin de racisme?
Non, pas vraiment. Au contraire, même. Maintenant que je peux comparer les situations des deux côtés de la frontière franco-suisse, je dirais que j’ai plutôt eu la chance de grandir en vieille ville de Delémont dans un premier temps, pas très loin par la suite, et non pas dans un HLM construit en zone inondable. De la même façon, j’ai eu la chance d’être scolarisé dans une classe où nous étions peu de fils et filles d’étrangers, mélangés aux enfants de la bourgeoisie delémontaine. Il n’y avait pas de séparation de classe sociale.
«Mon éditrice m’a dit: "Pense à la relation de l’homme avec la nature, relis Ramuz"»
Parlais-tu français tout petit?
Non. Je me souviens à ce propos que ma mère me rappelait, une fois devenu grand, que je ne parlais pas français quand elle m’emmena la première fois à l’école enfantine. J’avais 5 ans et j’avais grandi dans un cocon galicien. Tout le monde parlait galicien à la maison, y compris bien sûr mon grand-père, qui était là. C’est pour cette raison que je suis particulièrement sensible aux critiques qui relèvent la qualité du style de mon livre sur Denis Pommier – mon éditrice m’a dit: «Pense à la relation de l’homme avec la nature, relis Ramuz», ce que j’ai fait, notamment «La guerre dans le Haut-Pays» et «Jean-Luc persécuté». Parce que tout cela, à l’origine, ce n’était pas gagné. Il s’agissait pour moi de ne pas être tenté par le décrochage scolaire ou autre chose.
Il y a quand même eu des périodes pénibles au moment des initiatives xénophobes Schwarzenbach qui entendaient réduire le nombre d’étrangers présents en Suisse.
Oui, là, en effet, pour ma famille, ce fut l’inquiétude et l’angoisse. On avait suivi à la télévision, un poste noir et blanc, les résultats de l’initiative de 1974. C’était un contexte de récession économique, marqué par le premier choc pétrolier et le début de la crise dans la branche horlogère. Cette initiative, comme toutes les autres, avait été rejetée. J’ai eu, ado, un entraîneur de foot devenu membre de l’UDC par la suite, mais je n’ai jamais entendu de propos racistes dans sa bouche, mais d’autres, plutôt drôles avec le recul, du genre: «Antonio, si tu ne veux pas courir, fais de la marche!»
«Je me suis dit alors que j’étais un gros con»
As-tu ressenti chez tes parents ou en toi une pression te poussant à réussir ta scolarité et tes études?
Oui, d’ailleurs je pense à mes parents ces jours-ci. Quand je lis une bonne critique des «Larmes de ma vigne», je pense à eux. Mon père est décédé en 1993, ma mère, il y a sept ans. On n’est pas toujours conscient des attentes des parents. J’en ai pris conscience lorsque je leur ai annoncé que je redoublais ma deuxième année de lycée. Je pensais pourtant les avoir préparés à cette mauvaise nouvelle. Eh bien non. J’ai vu mon père pleurer. Je me suis dit alors que j’étais un gros con. Si bien que me suis ressaisi. J’étais dans cette période insouciante de l’adolescence où j’aimais sortir, aller en boîte au 138*. Je me suis rendu compte qu’il ne fallait pas penser qu’à moi.
En 1990, Antonio Rodriguez interviewant le footballeur français Michel Platini. © Privé
Tu avais deux passions qui te prenaient du temps. Le foot et le rock.
J’ai même interviewé Michel Platini, ton idole, pour Le Démocrate, devenu Le Quotidien Jurassien. Au foot, j’ai joué en Inter A avec les SRD, le club delémontain. Comme ailier droit ou latéral droit. Ma meilleure saison (rires), c’était au poste d’avant-centre avec les Espagnols de Delémont. Je devais avoir 18 ou 19 ans, je marquais plein de buts. On s’était sauvé de la relégation dans un match de barrage contre Sonvilier, à côté de Saint-Imier. J’avais marqué le but vainqueur. Quant au rock, plutôt la pop anglaise en ce qui me concerne, j’appartenais à une équipe de passionnés qui faisait venir des groupes au Caveau, une salle de Delémont. Des formations qui étaient en tournée en France voisine, à Besançon ou en Alsace. On s’était mis dans la boucle. On faisait des échanges avec les Eurockéennes de Belfort.
«Quand il y a une frontière, j’aime bien la traverser»
Qu’as-tu fait comme études? Comment t-es-tu retrouvé correspondant de l’AFP à Montevideo en Uruguay?
J’ai fait études de lettres à l’Université de Neuchâtel, avec espagnol, histoire et journalisme. En même temps, j’écrivais des articles pour la rubrique «sports» du Démocrate. En 1993, je suis entré à l’ATS, l’Agence télégraphique suisse, avant même d’avoir terminé mes études. En 1997, j’ai rejoint l’AFP, l’Agence France Presse et je suis effectivement parti comme correspondant à Montevideo, en Uruguay. J’avais noué auparavant des contacts avec le correspondant de l’AFP à Besançon. C’est un peu dans mon tempérament: quand il y a une frontière, j’aime bien la traverser. Partir en Uruguay, à 12 000 km, avec un salaire plus bas qu’en Suisse, laisser ma mère à Delémont – elle viendra me voir plusieurs fois à Montevideo… Tout cela n’était pas facile. J’ai tenté le coup. L’idée n’était pas nécessairement de faire carrière à l’AFP, d’y travailler maintenant depuis plus de 20 ans, mais les choses se sont faites comme ça.
Quels faits marquants gardes-tu de ton séjour en Amérique du Sud?
Il y a l’arrestation de Pinochet à Londres en octobre 1998. Je me suis rendu plusieurs fois à Santiago dans le cadre de cette affaire judiciaire. Et là je suis tombé sur des gens qui n’étaient pas contents que Pinochet ait été arrêté. J’ai découvert à cette occasion un Chili qui ne correspondait pas à l’image que j’en avais. A l’inverse, il y a eu une grande émotion à Santiago lorsqu’à Londres la Chambre des lords a estimé que l’action contre Pinochet était légale. Ça s’est joué à trois voix contre deux, un peu comme sur des tirs au but. Je me trouvais au siège de l’association des victimes de la dictature. Je ne parvenais à interviewer personne, tout le monde me sautait dans les bras.
«Ne te mêle pas de ça, c’est des histoires de Suisses!»
Cela ressemble, dans un autre registre, à l’intense émotion du 23 juin 1974 à Delémont, quand une majorité des sept districts jurassiens a approuvé la création d’un canton du Jura. Tu avais 8 ans.
Oui, je m’en souviens. Je me souviens surtout de mes parents qui me disaient: «Ne te mêle pas de ça, c’est des histoires de Suisses!» Pour en revenir à l’Amérique du Sud, avec ma mère nous avons retrouvé des cousins galiciens qui avaient émigré en Argentine et en Uruguay dans les années 50 et que ma mère n’avait pas revus depuis.
Après l’Uruguay, te voilà correspondant de l’AFP à Washington.
J’y suis resté de 2004 à fin 2008 et la réélection d’Obama. Ce qui était intéressant, c’était de sortir de Washington, une ville qui vote démocrate à 90% et ne représente donc pas les Etats-Unis. C’était l’époque où l’Amérique profonde avait une dent contre la France parce que celle-ci n’avait pas rejoint la coalition armée contre l’Irak en 2003. En Caroline du Nord, il ne fallait pas commander des «French fries» mais des «freedom fries», les frites de la liberté, ainsi qu’elles avaient été renommées. Je me suis intéressé aux latinos, aussi parce que je m’identifiais à eux. Je voulais voir comment ils vivaient dans cette Amérique qui les faisait rêver. Je me souviens d’un reportage sur la Nouvelle-Orléans reconstruite après l’Ouragan Katrina de 2005. J’étais allé à la rencontre de ces latinos qui avaient pris part à l’ouvrage et qui après cela s’étaient retrouvés sans emploi. J’avais titré mon papier: «Les oubliés de Katrina». En 2009, j’ai été nommé au siège à Paris. J’étais affecté à l’économie. J’y ai suivi notamment les ministres Montebourg, Macron et Le Maire.
Beau parcours. A propos de ton livre «Les larmes de ma vigne», tu me disais dans une précédente conversation que l’essentiel des critiques, toutes bonnes, était le fait de la presse de droite. Comment l’expliques-tu?
Ça m’amuse un peu, parce que la presse qui fait le plus la promotion de l’écologie et du bio, c’est la presse de gauche, or c’est elle qui parle le moins de ce livre. Je ne sais pas vraiment à quoi c’est dû. Mais ce que je constate… Je ne sais pas comment te dire ça de manière journalistiquement neutre… Pour faire simple, le 10 mai 1981 quand François Mitterrand a été élu président de la République en France, j’ai été content. Dans l’immeuble où j’habitais avec mes parents logeait aussi Jean-Luc Vautravers, le rédacteur en chef du Démocrate, un quotidien de sensibilité libérale-radicale pour qui je pigerais par la suite. Jean-Luc Vautravers ne devait pas être content de l’élection de Mitterrand, lui (rires). Dans un autre contexte, il avait été la cible d’un barbouillage des séparatistes du groupe Bélier, au sol devant l’immeuble. Quelle époque!
Quel immeuble!
Il n’était de loin pas habité que par des étrangers. Outre le rédacteur en chef du Démocrate, on y trouvait le délégué épiscopal, ainsi que le directeur de l’usine de vélos Condor. Il y avait de la mixité sociale.
Tes sentiments d’ado en faveur de Mitterrand seront-ils par la suite un peu plus mélangés?
Oui, en quelque sorte. Je repense au parcours de ma mère, aux échelons qu’elle a gravis à Delémont pour terminer fonctionnaire. Les gens qui lui ont permis de les gravir sont des gens de droite. C’est bête pour la gauche, ce que je vais dire, mais les ministres (les conseillers d’Etat jurassiens, ndlr.) dont elle me disait du bien parce qu’ils avaient eu une attention pour elle, étaient des ministres de droite, alors que les socialistes étaient plutôt froids et distants. Maintenant, avec les échos favorables que rencontre mon livre dans les journaux de droite, je me dis que c’est peut-être une réalité qu’il faut accepter.
«Je suis pour un protectionnisme environnemental»
Sur la question d’un certain protectionnisme économique, soutenu par des personnalités de gauche, posant des limites au libre-échange, comment te situes-tu?
C’est une conviction tout à fait personnelle: on ne peut pas fermer les usines en Europe pour aller polluer ailleurs, ce n’est plus possible. Si on veut améliorer notre environnement, il faut taxer de manière dissuasive les produits importés de pays ne répondant pas aux normes de l’Union européenne. A ce titre, une taxe carbone sur ces produits s’impose, comme le prévoit le «Pacte vert» au sein de l’UE. Je suis pour un protectionnisme de type environnemental.
Comment te positionnes-tu dans le débat sur l’immigration extra-européenne?
Il faut arrêter d’être hypocrite. Si des gens viennent en Europe, c’est parce qu’ils pensent qu’ils y vivront mieux que dans leur pays d’origine, mais c’est aussi parce qu’on a besoin d’eux. L’idéal serait que tout cela se fasse de manière ordonnée et légale. Quand, après la chute du mur la mondialisation a pris son essor, l’idée était d’aller produire dans d’autres pays, que cela contribuerait à l’élévation globale du niveau de vie partout sur la planète. Or trente ans plus tard, on s’aperçoit qu’on est allé produire ailleurs mais avec l’impératif de produire toujours moins cher. Je ne crois pas au crédo néolibéral de la stabilisation des populations dans leur pays par la création de classes moyennes. Pour moi, c’est un utopisme. C’est comme le ruissellement, ça n’existe pas. On pensait freiner l’immigration, elle s’est accélérée. Avec les conflits provoqués par les crises environnementales (sècheresse, montée des eaux), le nombre de réfugiés climatiques augmentera. Il y’a pas beaucoup de raisons d’être optimistes.
Te reconnais-tu plutôt dans un modèle universaliste à la française ou dans une organisation multiculturaliste à l’anglo-saxonne?
Disons que la laïcité française me va très bien. Ma femme est musulmane, je suis catholique. On vit sans problème dans un pays qui accepte et permet ce type d’union. Pour en revenir à mon histoire, je n’ai pas grandi dans un ghetto et j’en suis reconnaissant au Jura et à la Suisse.
*La discothèque Le Club 138, ouverte en 1979 à Courrendlin, portait ce nom en référence à l’article 138 de la Constitution jurassienne prévoyant la réunification du Jura et du Jura bernois.
Denis Pommier, Antonio Rodriguez, «Les larmes de ma vignes», Le Cherche Midi, 2020, 240 p.
Romain Compte, avec Antonio Rodriguez, «L’appel des sirènes», Le Cherche Midi, 2019, 208 p.
Antonio Rodriguez, «L’alternative Montebourg», Le Cherche Midi, 2016, 352 p.
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Marié, père de deux filles, celui qui d’habitude se retranche dans l’anonymat du journaliste agencier, raconte ici son beau parcours, de son enfance delémontaine au temps des initiatives Schwarzenbach et du combat jurassien, à sa vie d’adulte, livrant des souvenirs émus ou drôles, donnant sa vision, «à titre personnel», de la politique et de l’économie. Interview d’un ami d’école. </p> <p><strong>Tes trois livres nous parlent d’une France de l’intérieur, travailleuse, volontaire, modeste. Pourquoi t’es-tu intéressé à cette France-là?</strong></p> <p>Les notions de travail, de courage et d’engagement sont importantes à mes yeux. Dans la chronologie de ces trois livres, il y a une évolution et un changement de perspective entre le premier d’entre eux, «L’alternative Montebourg», paru en 2016, et les deux suivants, dédiés à des individus placés à l’écart des projecteurs, le chef pompier Romain Comte et le viticulteur Denis Pommier, auquel il faut associer sa femme Isabelle. Le livre sur Montebourg, avec les cas épineux des hauts-fourneaux en Moselle et du groupe Alstom à Belfort, a été pour moi une façon de me jeter à l’eau comme journaliste. Une fois terminé, je me suis rendu compte que j’avais écrit un livre épousant un schéma classique en France, quelque chose partant de Paris pour aller en province. Une façon de parler des gens de haut en bas.</p> <p><strong>Tu as tenu à rompre avec ce schéma.</strong></p> <p>Oui. Mon intention, après Montebourg, était de faire l’inverse: aller trouver des gens, pas forcément connus, mais qui avaient une fonction, un rôle. Ce faisant, de restituer leur quotidien, de faire remonter les enjeux. En côtoyant le chef pompier Romain Comte, j’ai découvert, je le dis ici avec une certaine naïveté, que partout en France, des individus équipés d’un bip sont prêts à venir vous secourir à tout moment du jour et de la nuit. Avec Denis Pommier le vigneron, mon propos était le même : sa bouteille de vin bio, on s’en régale dans les milieux urbains, à Paris, Delémont ou Neuchâtel, mais on est loin de se rendre compte de la somme de tracas, de doutes, de nuits d’angoisse qu’elle contient. Je me suis attelé à décrire cette nature que l’on vénère, mais qui peut être tellement ingrate avec ceux qui la respectent le plus.</p> <h3><strong>«La route de la mort»</strong></h3> <p><strong>Dans «L’appel des sirènes», tu évoques cette route de sinistre réputation passant par la Saône-et-Loire du chef pompier Romain Comte, la RCEA, la route Centre-Europe-Atlantique.</strong></p> <p>La route de la mort, c’est ainsi qu’on l’appelle. En 2017, l’accident d’un car transportant des Portugais qui rentraient en Suisse avait fait quatre morts. Romain Comte avait été l’un des premiers sur les lieux du drame. Ce tragique fait divers m’a replongé dans mon enfance. La RCEA était la route que je prenais avec mes parents pour aller en vacances en Galice. Un an plus tôt, sur le même axe, un précédent accident avait fait seize morts. C’étaient aussi des Portugais, partis de Suisse pour passer le week-end de Pâques au Portugal. Ils étaient entassés dans une camionnette sans vitres, comme des migrants voyageant clandestinement au sein de l’Union européenne. Eh bien là, ces conditions de transport inhumaines étaient le lot de ressortissants européens.</p> <p><strong>Qu’est-ce que tu trouves de remarquable ou de touchant chez les personnes dont tu dresses les portraits?</strong></p> <p>Elles m’intéressent parce qu’elles sont proches du terrain. Parce qu’elles produisent. Soit des services de première nécessité, comme Romain Comte, soit de la marchandise, comme Denis Pommier. Pas comme les intermédiaires qui eux ne produisent rien mais touchent parfois beaucoup d’argent. Quand le laboratoire américain Pfizer annonce l’arrivée sur le marché d’un vaccin contre la Covid, moi, ce qui m’intéresse, c’est l’histoire du couple turco-allemand qui a découvert ce vaccin et non pas les cinq millions de stock-options que va empocher le PDG de Pfizer.</p> <p><strong>Les deux Allemands d’origine turque, un homme et une femme, sont eux-mêmes aujourd’hui milliardaires…</strong></p> <p>Ils sont peut-être devenus milliardaires avec leur PME, mais c’est leur parcours que j’ai envie de raconter et qui échappe jusqu’à un certain point au monde de la finance.</p> <h3><strong>«C’était la France qui fait rêver»</strong></h3> <p><strong>Il y a une dizaine d’années est apparue une lecture différente de la crise française avec la notion de «France périphérique» qu’on doit au géographe Christophe Guilluy et qui désigne un ensemble de territoires comme exclus des bénéfices de la mondialisation. Est-ce que tu es sensible à cette perception?</strong></p> <p>Oui, complètement. Je reprends l’exemple de la route de la mort, la RCEA. C’était celle des terroirs. Je me rappelle, enfant, de ces panneaux indiquant les grands vins de bourgogne et de bordeaux, les fromages, les églises romanes. C’était la France qui fait rêver. Quand j’ai repris cette route pour « L’appel des sirènes », d’autres panneaux avaient fait leur apparition : non à la fermeture de telle usine, non à la fermeture de telle maternité, non à la fermeture de telle gare, etc. En trente ans, cette France périphérique a changé, elle s’est abîmée. Ce récit d’une dégradation est plus présent dans les livres sur Montebourg et le chef pompier Romain Comte que dans celui consacré au viticulteur Denis Pommier.</p> <p><strong>On sent chez toi une part de nostalgie.</strong></p> <p>Oui, sans doute. Avec ma famille j’ai acheté une maison non loin de Chablis où je me suis lié d’amitié avec Denis Pommier. Cette partie de la Bourgogne me va bien parce qu’elle est située entre mon Jura natal et Paris où je travaille. Elle me va bien aussi parce qu’elle me rappelle l’époque où, venant de Suisse, je trouvais en France, sitôt la frontière franchie, cette atmosphère d’un terroir que je me remémore heureux dans mes souvenirs. Et puis, cette France des vignerons, ce que je vais dire va sembler affreusement réac, c’est une France qui travaille. On a en Suisse l’image d’une France rétive au travail, celle des 35 heures. Or, cela ne correspond pas à celle des vignerons que je côtoie.</p> <p><strong>En tant que journaliste à l’AFP, tu es tenu à une forme de devoir de réserve, mais on devine chez toi des valeurs plutôt de gauche, une gauche à la fois du salariat et de l’entrepreneuriat. Est-ce le cas ?</strong></p> <p>Permets-moi d’esquiver ta question. Je n’ai jamais demandé leurs couleurs politiques à Denis Pommier et Romain Comte. Montebourg, avec sa fibre protectionniste, a des idées qui peuvent être tout à fait acceptées par une partie de la droite. En ce sens, Macron a raison de dire qu’il n’y a plus ni de gauche ni de droite solidement ancrées et distinguables l’une de l’autre. L’opposition que je vois aujourd’hui est plus une opposition entre l’humain et ce qui l’est moins. Je reprends l’exemple des stock-options de Pfizer : apparemment c’est un algorithme qui devait les vendre à partir du moment où l’action montait énormément. Il y a un côté inhumain dans cette opération. L’autre opposition qui m’apparaît est celle entre ville et campagne, entre idéalisme ou utopisme d’une part, et une réalité parfois ingrate de l’autre. Le pompier de Saône-et-Loire, il n’intervient pas sur l’incendie de Notre-Dame mais sur des accidents de la route ou des voitures qui brûlent dans des quartiers difficiles. Paray-le-Monial, la ville de Romain Comte, c’est une petite ville de 12 000 habitants comme Delémont.</p> <h3><strong>«Mon père travaillait chez un caviste et ma mère travaillait comme couturière»</strong></h3> <p><strong>Est-ce que les personnages que tu décris sont représentatifs du mouvement des gilets jaunes?</strong></p> <p>Les ouvriers d’Alstom et de Florange, oui. Le chef pompier Romain Comte et le vigneron Denis Pommier, non. Romain Comte, en tant que pompier, est de plus en plus appelé au secours dans des zones rurales où l’Etat a disparu, mais son cas personnel, pas plus que celui de Denis Pommier ne témoignent d’une situation ou d’un sentiment de déclassement tel qu’observé chez les gilets jaunes rassemblés chaque samedi aux ronds-points de cette France périphérique.</p> <p><strong>Venons-en à ton histoire. Tu es né à Delémont en 1966, quand le Jura faisait encore partie du canton du Berne. D’où venaient tes parents?</strong></p> <p>Ils venaient tous les deux de Galice en Espagne mais ils se sont rencontrés à Delémont. Mon père travaillait chez un caviste et ma mère travaillait comme couturière. Elle a terminé sa vie professionnelle, et c’était pour elle une forme de consécration, concierge à Morépont, là où se réunissait le gouvernement jurassien, à Delémont. J’étais enfant unique.</p> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1607871375_antonio.pre.higinio.mre.maria.delmont.1970.jpeg" class="img-responsive img-fluid normal " width="382" height="381" /></p> <h4>Antonio Rodriguez et ses parents, Higinio et Maria, à Delémont en 1970. © Privé </h4> <p><strong>Dans les années 70 et 80, je n’ai pas souvenir de racisme en paroles ou en actes visant dans le Jura les Italiens, les Portugais et les Espagnols. Est-ce que toi, à l’enfance ou à l’adolescent, tu as été témoin de racisme?</strong></p> <p>Non, pas vraiment. Au contraire, même. Maintenant que je peux comparer les situations des deux côtés de la frontière franco-suisse, je dirais que j’ai plutôt eu la chance de grandir en vieille ville de Delémont dans un premier temps, pas très loin par la suite, et non pas dans un HLM construit en zone inondable. De la même façon, j’ai eu la chance d’être scolarisé dans une classe où nous étions peu de fils et filles d’étrangers, mélangés aux enfants de la bourgeoisie delémontaine. Il n’y avait pas de séparation de classe sociale.</p> <h3><strong>«Mon éditrice m’a dit: "Pense à la relation de l’homme avec la nature, relis Ramuz"»</strong></h3> <p><strong>Parlais-tu français tout petit?</strong></p> <p>Non. Je me souviens à ce propos que ma mère me rappelait, une fois devenu grand, que je ne parlais pas français quand elle m’emmena la première fois à l’école enfantine. J’avais 5 ans et j’avais grandi dans un cocon galicien. Tout le monde parlait galicien à la maison, y compris bien sûr mon grand-père, qui était là. C’est pour cette raison que je suis particulièrement sensible aux critiques qui relèvent la qualité du style de mon livre sur Denis Pommier – mon éditrice m’a dit: «Pense à la relation de l’homme avec la nature, relis Ramuz», ce que j’ai fait, notamment «La guerre dans le Haut-Pays» et «Jean-Luc persécuté». Parce que tout cela, à l’origine, ce n’était pas gagné. Il s’agissait pour moi de ne pas être tenté par le décrochage scolaire ou autre chose.</p> <p><strong>Il y a quand même eu des périodes pénibles au moment des initiatives xénophobes Schwarzenbach qui entendaient réduire le nombre d’étrangers présents en Suisse.</strong></p> <p>Oui, là, en effet, pour ma famille, ce fut l’inquiétude et l’angoisse. On avait suivi à la télévision, un poste noir et blanc, les résultats de l’initiative de 1974. C’était un contexte de récession économique, marqué par le premier choc pétrolier et le début de la crise dans la branche horlogère. Cette initiative, comme toutes les autres, avait été rejetée. J’ai eu, ado, un entraîneur de foot devenu membre de l’UDC par la suite, mais je n’ai jamais entendu de propos racistes dans sa bouche, mais d’autres, plutôt drôles avec le recul, du genre: «Antonio, si tu ne veux pas courir, fais de la marche!»</p> <h3><strong>«Je me suis dit alors que j’étais un gros con»</strong></h3> <p><strong>As-tu ressenti chez tes parents ou en toi une pression te poussant à réussir ta scolarité et tes études?</strong></p> <p>Oui, d’ailleurs je pense à mes parents ces jours-ci. Quand je lis une bonne critique des «Larmes de ma vigne», je pense à eux. Mon père est décédé en 1993, ma mère, il y a sept ans. On n’est pas toujours conscient des attentes des parents. J’en ai pris conscience lorsque je leur ai annoncé que je redoublais ma deuxième année de lycée. Je pensais pourtant les avoir préparés à cette mauvaise nouvelle. Eh bien non. J’ai vu mon père pleurer. Je me suis dit alors que j’étais un gros con. Si bien que me suis ressaisi. J’étais dans cette période insouciante de l’adolescence où j’aimais sortir, aller en boîte au 138*. Je me suis rendu compte qu’il ne fallait pas penser qu’à moi.</p> <p><strong><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1607871477_antonio.platini.interview.court.1990.jpg" class="img-responsive img-fluid normal " width="545" height="354" /></strong></p> <h4><strong>En 1990, Antonio Rodriguez interviewant le footballeur français Michel Platini. © Privé</strong></h4> <p><strong>Tu avais deux passions qui te prenaient du temps. Le foot et le rock.</strong></p> <p>J’ai même interviewé Michel Platini, ton idole, pour <em>Le Démocrate</em>, devenu <em>Le Quotidien Jurassien</em>. Au foot, j’ai joué en Inter A avec les SRD, le club delémontain. Comme ailier droit ou latéral droit. Ma meilleure saison (<em>rires</em>), c’était au poste d’avant-centre avec les Espagnols de Delémont. Je devais avoir 18 ou 19 ans, je marquais plein de buts. On s’était sauvé de la relégation dans un match de barrage contre Sonvilier, à côté de Saint-Imier. J’avais marqué le but vainqueur. Quant au rock, plutôt la pop anglaise en ce qui me concerne, j’appartenais à une équipe de passionnés qui faisait venir des groupes au Caveau, une salle de Delémont. Des formations qui étaient en tournée en France voisine, à Besançon ou en Alsace. On s’était mis dans la boucle. On faisait des échanges avec les Eurockéennes de Belfort.</p> <h3><strong>«Quand il y a une frontière, j’aime bien la traverser»</strong></h3> <p><strong>Qu’as-tu fait comme études? Comment t-es-tu retrouvé correspondant de l’AFP à Montevideo en Uruguay? </strong></p> <p>J’ai fait études de lettres à l’Université de Neuchâtel, avec espagnol, histoire et journalisme. En même temps, j’écrivais des articles pour la rubrique «sports» du<em> Démocrate</em>. En 1993, je suis entré à l’ATS, l’Agence télégraphique suisse, avant même d’avoir terminé mes études. En 1997, j’ai rejoint l’AFP, l’Agence France Presse et je suis effectivement parti comme correspondant à Montevideo, en Uruguay. J’avais noué auparavant des contacts avec le correspondant de l’AFP à Besançon. C’est un peu dans mon tempérament: quand il y a une frontière, j’aime bien la traverser. Partir en Uruguay, à 12 000 km, avec un salaire plus bas qu’en Suisse, laisser ma mère à Delémont – elle viendra me voir plusieurs fois à Montevideo… Tout cela n’était pas facile. J’ai tenté le coup. L’idée n’était pas nécessairement de faire carrière à l’AFP, d’y travailler maintenant depuis plus de 20 ans, mais les choses se sont faites comme ça.</p> <p><strong>Quels faits marquants gardes-tu de ton séjour en Amérique du Sud?</strong></p> <p>Il y a l’arrestation de Pinochet à Londres en octobre 1998. Je me suis rendu plusieurs fois à Santiago dans le cadre de cette affaire judiciaire. Et là je suis tombé sur des gens qui n’étaient pas contents que Pinochet ait été arrêté. J’ai découvert à cette occasion un Chili qui ne correspondait pas à l’image que j’en avais. A l’inverse, il y a eu une grande émotion à Santiago lorsqu’à Londres la Chambre des lords a estimé que l’action contre Pinochet était légale. Ça s’est joué à trois voix contre deux, un peu comme sur des tirs au but. Je me trouvais au siège de l’association des victimes de la dictature. Je ne parvenais à interviewer personne, tout le monde me sautait dans les bras.</p> <h3><strong>«Ne te mêle pas de ça, c’est des histoires de Suisses!»</strong></h3> <p><strong>Cela ressemble, dans un autre registre, à l’intense émotion du 23 juin 1974 à Delémont, quand une majorité des sept districts jurassiens a approuvé la création d’un canton du Jura. Tu avais 8 ans.</strong></p> <p>Oui, je m’en souviens. Je me souviens surtout de mes parents qui me disaient: «Ne te mêle pas de ça, c’est des histoires de Suisses!» Pour en revenir à l’Amérique du Sud, avec ma mère nous avons retrouvé des cousins galiciens qui avaient émigré en Argentine et en Uruguay dans les années 50 et que ma mère n’avait pas revus depuis.</p> <p><strong>Après l’Uruguay, te voilà correspondant de l’AFP à Washington.</strong></p> <p>J’y suis resté de 2004 à fin 2008 et la réélection d’Obama. Ce qui était intéressant, c’était de sortir de Washington, une ville qui vote démocrate à 90% et ne représente donc pas les Etats-Unis. C’était l’époque où l’Amérique profonde avait une dent contre la France parce que celle-ci n’avait pas rejoint la coalition armée contre l’Irak en 2003. En Caroline du Nord, il ne fallait pas commander des «French fries» mais des «freedom fries», les frites de la liberté, ainsi qu’elles avaient été renommées. Je me suis intéressé aux latinos, aussi parce que je m’identifiais à eux. Je voulais voir comment ils vivaient dans cette Amérique qui les faisait rêver. Je me souviens d’un reportage sur la Nouvelle-Orléans reconstruite après l’Ouragan Katrina de 2005. J’étais allé à la rencontre de ces latinos qui avaient pris part à l’ouvrage et qui après cela s’étaient retrouvés sans emploi. J’avais titré mon papier: «Les oubliés de Katrina». En 2009, j’ai été nommé au siège à Paris. J’étais affecté à l’économie. J’y ai suivi notamment les ministres Montebourg, Macron et Le Maire.</p> <p><strong>Beau parcours. A propos de ton livre «Les larmes de ma vigne», tu me disais dans une précédente conversation que l’essentiel des critiques, toutes bonnes, était le fait de la presse de droite. Comment l’expliques-tu?</strong></p> <p>Ça m’amuse un peu, parce que la presse qui fait le plus la promotion de l’écologie et du bio, c’est la presse de gauche, or c’est elle qui parle le moins de ce livre. Je ne sais pas vraiment à quoi c’est dû. Mais ce que je constate… Je ne sais pas comment te dire ça de manière journalistiquement neutre… Pour faire simple, le 10 mai 1981 quand François Mitterrand a été élu président de la République en France, j’ai été content. Dans l’immeuble où j’habitais avec mes parents logeait aussi Jean-Luc Vautravers, le rédacteur en chef du <em>Démocrate</em>, un quotidien de sensibilité libérale-radicale pour qui je pigerais par la suite. Jean-Luc Vautravers ne devait pas être content de l’élection de Mitterrand, lui (rires). Dans un autre contexte, il avait été la cible d’un barbouillage des séparatistes du groupe Bélier, au sol devant l’immeuble. Quelle époque!</p> <p><strong>Quel immeuble!</strong></p> <p>Il n’était de loin pas habité que par des étrangers. Outre le rédacteur en chef du <em>Démocrate</em>, on y trouvait le délégué épiscopal, ainsi que le directeur de l’usine de vélos Condor. Il y avait de la mixité sociale.</p> <p><strong>Tes sentiments d’ado en faveur de Mitterrand seront-ils par la suite un peu plus mélangés?</strong></p> <p>Oui, en quelque sorte. Je repense au parcours de ma mère, aux échelons qu’elle a gravis à Delémont pour terminer fonctionnaire. Les gens qui lui ont permis de les gravir sont des gens de droite. C’est bête pour la gauche, ce que je vais dire, mais les ministres (<em>les conseillers d’Etat jurassiens, ndlr.</em>) dont elle me disait du bien parce qu’ils avaient eu une attention pour elle, étaient des ministres de droite, alors que les socialistes étaient plutôt froids et distants. 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Marié, père de deux filles, celui qui d’habitude se retranche dans l’anonymat du journaliste agencier, raconte ici son beau parcours, de son enfance delémontaine au temps des initiatives Schwarzenbach et du combat jurassien, à sa vie d’adulte, livrant des souvenirs émus ou drôles, donnant sa vision, «à titre personnel», de la politique et de l’économie. Interview d’un ami d’école. </p> <p><strong>Tes trois livres nous parlent d’une France de l’intérieur, travailleuse, volontaire, modeste. Pourquoi t’es-tu intéressé à cette France-là?</strong></p> <p>Les notions de travail, de courage et d’engagement sont importantes à mes yeux. Dans la chronologie de ces trois livres, il y a une évolution et un changement de perspective entre le premier d’entre eux, «L’alternative Montebourg», paru en 2016, et les deux suivants, dédiés à des individus placés à l’écart des projecteurs, le chef pompier Romain Comte et le viticulteur Denis Pommier, auquel il faut associer sa femme Isabelle. 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Quand le laboratoire américain Pfizer annonce l’arrivée sur le marché d’un vaccin contre la Covid, moi, ce qui m’intéresse, c’est l’histoire du couple turco-allemand qui a découvert ce vaccin et non pas les cinq millions de stock-options que va empocher le PDG de Pfizer.</p> <p><strong>Les deux Allemands d’origine turque, un homme et une femme, sont eux-mêmes aujourd’hui milliardaires…</strong></p> <p>Ils sont peut-être devenus milliardaires avec leur PME, mais c’est leur parcours que j’ai envie de raconter et qui échappe jusqu’à un certain point au monde de la finance.</p> <h3><strong>«C’était la France qui fait rêver»</strong></h3> <p><strong>Il y a une dizaine d’années est apparue une lecture différente de la crise française avec la notion de «France périphérique» qu’on doit au géographe Christophe Guilluy et qui désigne un ensemble de territoires comme exclus des bénéfices de la mondialisation. Est-ce que tu es sensible à cette perception?</strong></p> <p>Oui, complètement. Je reprends l’exemple de la route de la mort, la RCEA. C’était celle des terroirs. Je me rappelle, enfant, de ces panneaux indiquant les grands vins de bourgogne et de bordeaux, les fromages, les églises romanes. C’était la France qui fait rêver. Quand j’ai repris cette route pour « L’appel des sirènes », d’autres panneaux avaient fait leur apparition : non à la fermeture de telle usine, non à la fermeture de telle maternité, non à la fermeture de telle gare, etc. En trente ans, cette France périphérique a changé, elle s’est abîmée. Ce récit d’une dégradation est plus présent dans les livres sur Montebourg et le chef pompier Romain Comte que dans celui consacré au viticulteur Denis Pommier.</p> <p><strong>On sent chez toi une part de nostalgie.</strong></p> <p>Oui, sans doute. Avec ma famille j’ai acheté une maison non loin de Chablis où je me suis lié d’amitié avec Denis Pommier. Cette partie de la Bourgogne me va bien parce qu’elle est située entre mon Jura natal et Paris où je travaille. Elle me va bien aussi parce qu’elle me rappelle l’époque où, venant de Suisse, je trouvais en France, sitôt la frontière franchie, cette atmosphère d’un terroir que je me remémore heureux dans mes souvenirs. Et puis, cette France des vignerons, ce que je vais dire va sembler affreusement réac, c’est une France qui travaille. On a en Suisse l’image d’une France rétive au travail, celle des 35 heures. Or, cela ne correspond pas à celle des vignerons que je côtoie.</p> <p><strong>En tant que journaliste à l’AFP, tu es tenu à une forme de devoir de réserve, mais on devine chez toi des valeurs plutôt de gauche, une gauche à la fois du salariat et de l’entrepreneuriat. Est-ce le cas ?</strong></p> <p>Permets-moi d’esquiver ta question. Je n’ai jamais demandé leurs couleurs politiques à Denis Pommier et Romain Comte. 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D’où venaient tes parents?</strong></p> <p>Ils venaient tous les deux de Galice en Espagne mais ils se sont rencontrés à Delémont. Mon père travaillait chez un caviste et ma mère travaillait comme couturière. Elle a terminé sa vie professionnelle, et c’était pour elle une forme de consécration, concierge à Morépont, là où se réunissait le gouvernement jurassien, à Delémont. J’étais enfant unique.</p> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1607871375_antonio.pre.higinio.mre.maria.delmont.1970.jpeg" class="img-responsive img-fluid normal " width="382" height="381" /></p> <h4>Antonio Rodriguez et ses parents, Higinio et Maria, à Delémont en 1970. © Privé </h4> <p><strong>Dans les années 70 et 80, je n’ai pas souvenir de racisme en paroles ou en actes visant dans le Jura les Italiens, les Portugais et les Espagnols. Est-ce que toi, à l’enfance ou à l’adolescent, tu as été témoin de racisme?</strong></p> <p>Non, pas vraiment. Au contraire, même. 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C’est pour cette raison que je suis particulièrement sensible aux critiques qui relèvent la qualité du style de mon livre sur Denis Pommier – mon éditrice m’a dit: «Pense à la relation de l’homme avec la nature, relis Ramuz», ce que j’ai fait, notamment «La guerre dans le Haut-Pays» et «Jean-Luc persécuté». Parce que tout cela, à l’origine, ce n’était pas gagné. Il s’agissait pour moi de ne pas être tenté par le décrochage scolaire ou autre chose.</p> <p><strong>Il y a quand même eu des périodes pénibles au moment des initiatives xénophobes Schwarzenbach qui entendaient réduire le nombre d’étrangers présents en Suisse.</strong></p> <p>Oui, là, en effet, pour ma famille, ce fut l’inquiétude et l’angoisse. On avait suivi à la télévision, un poste noir et blanc, les résultats de l’initiative de 1974. C’était un contexte de récession économique, marqué par le premier choc pétrolier et le début de la crise dans la branche horlogère. Cette initiative, comme toutes les autres, avait été rejetée. J’ai eu, ado, un entraîneur de foot devenu membre de l’UDC par la suite, mais je n’ai jamais entendu de propos racistes dans sa bouche, mais d’autres, plutôt drôles avec le recul, du genre: «Antonio, si tu ne veux pas courir, fais de la marche!»</p> <h3><strong>«Je me suis dit alors que j’étais un gros con»</strong></h3> <p><strong>As-tu ressenti chez tes parents ou en toi une pression te poussant à réussir ta scolarité et tes études?</strong></p> <p>Oui, d’ailleurs je pense à mes parents ces jours-ci. Quand je lis une bonne critique des «Larmes de ma vigne», je pense à eux. Mon père est décédé en 1993, ma mère, il y a sept ans. On n’est pas toujours conscient des attentes des parents. J’en ai pris conscience lorsque je leur ai annoncé que je redoublais ma deuxième année de lycée. Je pensais pourtant les avoir préparés à cette mauvaise nouvelle. Eh bien non. J’ai vu mon père pleurer. Je me suis dit alors que j’étais un gros con. Si bien que me suis ressaisi. J’étais dans cette période insouciante de l’adolescence où j’aimais sortir, aller en boîte au 138*. Je me suis rendu compte qu’il ne fallait pas penser qu’à moi.</p> <p><strong><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1607871477_antonio.platini.interview.court.1990.jpg" class="img-responsive img-fluid normal " width="545" height="354" /></strong></p> <h4><strong>En 1990, Antonio Rodriguez interviewant le footballeur français Michel Platini. © Privé</strong></h4> <p><strong>Tu avais deux passions qui te prenaient du temps. Le foot et le rock.</strong></p> <p>J’ai même interviewé Michel Platini, ton idole, pour <em>Le Démocrate</em>, devenu <em>Le Quotidien Jurassien</em>. Au foot, j’ai joué en Inter A avec les SRD, le club delémontain. Comme ailier droit ou latéral droit. Ma meilleure saison (<em>rires</em>), c’était au poste d’avant-centre avec les Espagnols de Delémont. Je devais avoir 18 ou 19 ans, je marquais plein de buts. On s’était sauvé de la relégation dans un match de barrage contre Sonvilier, à côté de Saint-Imier. J’avais marqué le but vainqueur. Quant au rock, plutôt la pop anglaise en ce qui me concerne, j’appartenais à une équipe de passionnés qui faisait venir des groupes au Caveau, une salle de Delémont. Des formations qui étaient en tournée en France voisine, à Besançon ou en Alsace. On s’était mis dans la boucle. On faisait des échanges avec les Eurockéennes de Belfort.</p> <h3><strong>«Quand il y a une frontière, j’aime bien la traverser»</strong></h3> <p><strong>Qu’as-tu fait comme études? Comment t-es-tu retrouvé correspondant de l’AFP à Montevideo en Uruguay? </strong></p> <p>J’ai fait études de lettres à l’Université de Neuchâtel, avec espagnol, histoire et journalisme. En même temps, j’écrivais des articles pour la rubrique «sports» du<em> Démocrate</em>. En 1993, je suis entré à l’ATS, l’Agence télégraphique suisse, avant même d’avoir terminé mes études. En 1997, j’ai rejoint l’AFP, l’Agence France Presse et je suis effectivement parti comme correspondant à Montevideo, en Uruguay. J’avais noué auparavant des contacts avec le correspondant de l’AFP à Besançon. C’est un peu dans mon tempérament: quand il y a une frontière, j’aime bien la traverser. Partir en Uruguay, à 12 000 km, avec un salaire plus bas qu’en Suisse, laisser ma mère à Delémont – elle viendra me voir plusieurs fois à Montevideo… Tout cela n’était pas facile. J’ai tenté le coup. L’idée n’était pas nécessairement de faire carrière à l’AFP, d’y travailler maintenant depuis plus de 20 ans, mais les choses se sont faites comme ça.</p> <p><strong>Quels faits marquants gardes-tu de ton séjour en Amérique du Sud?</strong></p> <p>Il y a l’arrestation de Pinochet à Londres en octobre 1998. Je me suis rendu plusieurs fois à Santiago dans le cadre de cette affaire judiciaire. Et là je suis tombé sur des gens qui n’étaient pas contents que Pinochet ait été arrêté. J’ai découvert à cette occasion un Chili qui ne correspondait pas à l’image que j’en avais. A l’inverse, il y a eu une grande émotion à Santiago lorsqu’à Londres la Chambre des lords a estimé que l’action contre Pinochet était légale. Ça s’est joué à trois voix contre deux, un peu comme sur des tirs au but. Je me trouvais au siège de l’association des victimes de la dictature. Je ne parvenais à interviewer personne, tout le monde me sautait dans les bras.</p> <h3><strong>«Ne te mêle pas de ça, c’est des histoires de Suisses!»</strong></h3> <p><strong>Cela ressemble, dans un autre registre, à l’intense émotion du 23 juin 1974 à Delémont, quand une majorité des sept districts jurassiens a approuvé la création d’un canton du Jura. Tu avais 8 ans.</strong></p> <p>Oui, je m’en souviens. Je me souviens surtout de mes parents qui me disaient: «Ne te mêle pas de ça, c’est des histoires de Suisses!» Pour en revenir à l’Amérique du Sud, avec ma mère nous avons retrouvé des cousins galiciens qui avaient émigré en Argentine et en Uruguay dans les années 50 et que ma mère n’avait pas revus depuis.</p> <p><strong>Après l’Uruguay, te voilà correspondant de l’AFP à Washington.</strong></p> <p>J’y suis resté de 2004 à fin 2008 et la réélection d’Obama. Ce qui était intéressant, c’était de sortir de Washington, une ville qui vote démocrate à 90% et ne représente donc pas les Etats-Unis. C’était l’époque où l’Amérique profonde avait une dent contre la France parce que celle-ci n’avait pas rejoint la coalition armée contre l’Irak en 2003. En Caroline du Nord, il ne fallait pas commander des «French fries» mais des «freedom fries», les frites de la liberté, ainsi qu’elles avaient été renommées. Je me suis intéressé aux latinos, aussi parce que je m’identifiais à eux. Je voulais voir comment ils vivaient dans cette Amérique qui les faisait rêver. Je me souviens d’un reportage sur la Nouvelle-Orléans reconstruite après l’Ouragan Katrina de 2005. J’étais allé à la rencontre de ces latinos qui avaient pris part à l’ouvrage et qui après cela s’étaient retrouvés sans emploi. J’avais titré mon papier: «Les oubliés de Katrina». En 2009, j’ai été nommé au siège à Paris. J’étais affecté à l’économie. J’y ai suivi notamment les ministres Montebourg, Macron et Le Maire.</p> <p><strong>Beau parcours. A propos de ton livre «Les larmes de ma vigne», tu me disais dans une précédente conversation que l’essentiel des critiques, toutes bonnes, était le fait de la presse de droite. Comment l’expliques-tu?</strong></p> <p>Ça m’amuse un peu, parce que la presse qui fait le plus la promotion de l’écologie et du bio, c’est la presse de gauche, or c’est elle qui parle le moins de ce livre. Je ne sais pas vraiment à quoi c’est dû. Mais ce que je constate… Je ne sais pas comment te dire ça de manière journalistiquement neutre… Pour faire simple, le 10 mai 1981 quand François Mitterrand a été élu président de la République en France, j’ai été content. Dans l’immeuble où j’habitais avec mes parents logeait aussi Jean-Luc Vautravers, le rédacteur en chef du <em>Démocrate</em>, un quotidien de sensibilité libérale-radicale pour qui je pigerais par la suite. Jean-Luc Vautravers ne devait pas être content de l’élection de Mitterrand, lui (rires). Dans un autre contexte, il avait été la cible d’un barbouillage des séparatistes du groupe Bélier, au sol devant l’immeuble. Quelle époque!</p> <p><strong>Quel immeuble!</strong></p> <p>Il n’était de loin pas habité que par des étrangers. Outre le rédacteur en chef du <em>Démocrate</em>, on y trouvait le délégué épiscopal, ainsi que le directeur de l’usine de vélos Condor. Il y avait de la mixité sociale.</p> <p><strong>Tes sentiments d’ado en faveur de Mitterrand seront-ils par la suite un peu plus mélangés?</strong></p> <p>Oui, en quelque sorte. Je repense au parcours de ma mère, aux échelons qu’elle a gravis à Delémont pour terminer fonctionnaire. Les gens qui lui ont permis de les gravir sont des gens de droite. C’est bête pour la gauche, ce que je vais dire, mais les ministres (<em>les conseillers d’Etat jurassiens, ndlr.</em>) dont elle me disait du bien parce qu’ils avaient eu une attention pour elle, étaient des ministres de droite, alors que les socialistes étaient plutôt froids et distants. Maintenant, avec les échos favorables que rencontre mon livre dans les journaux de droite, je me dis que c’est peut-être une réalité qu’il faut accepter.</p> <h3><strong>«Je suis pour un protectionnisme environnemental»</strong></h3> <p><strong>Sur la question d’un certain protectionnisme économique, soutenu par des personnalités de gauche, posant des limites au libre-échange, comment te situes-tu?</strong></p> <p>C’est une conviction tout à fait personnelle: on ne peut pas fermer les usines en Europe pour aller polluer ailleurs, ce n’est plus possible. Si on veut améliorer notre environnement, il faut taxer de manière dissuasive les produits importés de pays ne répondant pas aux normes de l’Union européenne. A ce titre, une taxe carbone sur ces produits s’impose, comme le prévoit le «Pacte vert» au sein de l’UE. Je suis pour un protectionnisme de type environnemental.</p> <p><strong>Comment te positionnes-tu dans le débat sur l’immigration extra-européenne?</strong></p> <p>Il faut arrêter d’être hypocrite. Si des gens viennent en Europe, c’est parce qu’ils pensent qu’ils y vivront mieux que dans leur pays d’origine, mais c’est aussi parce qu’on a besoin d’eux. L’idéal serait que tout cela se fasse de manière ordonnée et légale. Quand, après la chute du mur la mondialisation a pris son essor, l’idée était d’aller produire dans d’autres pays, que cela contribuerait à l’élévation globale du niveau de vie partout sur la planète. Or trente ans plus tard, on s’aperçoit qu’on est allé produire ailleurs mais avec l’impératif de produire toujours moins cher. Je ne crois pas au crédo néolibéral de la stabilisation des populations dans leur pays par la création de classes moyennes. Pour moi, c’est un utopisme. C’est comme le ruissellement, ça n’existe pas. On pensait freiner l’immigration, elle s’est accélérée. Avec les conflits provoqués par les crises environnementales (sècheresse, montée des eaux), le nombre de réfugiés climatiques augmentera. Il y’a pas beaucoup de raisons d’être optimistes.</p> <p><strong>Te reconnais-tu plutôt dans un modèle universaliste à la française ou dans une organisation multiculturaliste à l’anglo-saxonne?</strong></p> <p>Disons que la laïcité française me va très bien. Ma femme est musulmane, je suis catholique. On vit sans problème dans un pays qui accepte et permet ce type d’union. 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Alors que le débat portait sur l’accueil par la France de 234 migrants se trouvant à bord du bateau Ocean Viking, le jeune député LFI Louis Boyard, qui fut autrefois chroniqueur rétribué à TPMP, a mis les pieds dans son ancienne gamelle en parlant d’un procès menaçant «Bolloré» pour déforestation au Cameroun. 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Né en 1950 à Constantine, issu de la communauté juive algérienne, partie avec les pieds-noirs à l’indépendance en 1962, Stora était investi d’une mission réconciliatrice par le président de la République. A la fin de son travail, l’historien émet une série de préconisations. Et l’on entre alors dans le vif du sujet: l’action.</p> <p>La première de ces préconisations, qui rappelle la Commission Vérité et Réconciliation en Afrique du Sud, l’Instance Vérité et Dignité en Tunisie, est la constitution d’une «Commission "Mémoires et vérité" chargée d’impulser des initiatives communes entre la France et l’Algérie sur les questions de mémoires». La <em>vérité</em>. Pas de réconciliation sans vérité sur les exactions passées, croit-on.</p> <p>Mais la vérité n’est pas seulement question de faits, elle intéresse aussi le sens. Or deux sens ne peuvent cohabiter. Pas d’en-même-temps possible: la douleur d’un camp ne peut valoir celle de l’autre. Celle de l’Allemand de la Seconde Guerre mondiale ne vaut pas celle de l’Allié. On touche probablement ici à la limite du rapport Stora: le colon ne peut pas faire valoir sa douleur au même titre que le colonisé. Sinon, toute la hiérarchie, établie selon une échelle de valeurs qui accorde au colonisé la légitimité de sa révolte, est rebattue. Et pourtant, se dit-on, il faut tendre vers la reconnaissance des souffrances de part et d’autre, pour pouvoir la faire, cette réconciliation. Comme c’est compliqué…</p> <h3>Les choses ont un sens que la paix peut ignorer</h3> <p>Seul le sens permet d’y voir clair. Mais le problème du sens, qui dit qui avait raison, qui avait tort, c’est qu’il ne permet pas toujours de refermer les plaies, puisque personne ne veut être en tort, ou avoir tous les torts. Le cas franco-algérien renvoie à la spécificité de la guerre d’Algérie, plus sensible sur un plan mémoriel que les guerres franco-allemandes.</p> <p>La guerre d’Algérie, combat décolonial, lutte pour la libération, fut probablement moins une guerre classique entre deux nations qu’une guerre civile à l’intérieur d’un même territoire. Opposant deux populations d’inégal statut, certes, et ce n’est pas rien, mais ayant toute deux un caractère civil. De là, sans doute, le refus, longtemps, de nommer par le terme de guerre ce qui était appelé sous le nom d’événements.</p> <p>C’est pourquoi la vérité (qui la dit? selon quels critères?) peut être, aussi, parfois, l’ennemi de la réconciliation, celle-ci étant par nature toujours un peu artificielle. Disons que l’intérêt de la paix l’emporte à un moment donné sur l’intérêt de la guerre, surtout dans une configuration de conflit civil.</p> <h3>Les pieds dans le plat</h3> <p>Très vite apparaît la nécessité de l’amnistie, pour étouffer des braises dont chacun a cependant conscience qu’elle ne seront jamais tout à fait éteintes. Ce fut vrai après une relative brève période d’épuration en France en 1944-45. Vrai entre la France et l’Algérie à l’indépendance en 1962. Vrai encore en 1999, lorsque le président algérien Abdelaziz Bouteflika fit voter la loi dite de concorde civile, qui mit fin par un plébiscite à la guerre civile.</p> <p>Cela nous amène à la France d’aujourd’hui, celle, d’après, espérons-le, les attentats islamistes. Attentats? Islamistes? D’emblée, les pieds dans le plat. La somme de «ce qui est arrivé en France ces dernières années» pèse son poids de non-dits. Cette situation présente des similitudes avec les conflits évoqués plus haut. Mais elle a comme quelque chose d’inextricable. Ce n’est pas encourageant.</p> <h3>Quand le bourreau redevient l'égal de la victime</h3> <p>Alors, quelles similitudes entre l’après-attentats et ces précédents après-guerres? La première de toutes, la plus importante: la nécessité de l’amnistie, avons-nous vu, par quoi on cesse de juger ceux qu’on sait coupables, par quoi on passe à autre chose. Comme la victime, le bourreau doit pouvoir reprendre une vie normale. Sauf que toute amnistie suppose un vainqueur reconnu comme tel, autrement dit un juste faisant offrande de son pardon au vaincu. 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Oui, on peut jouer longtemps sur les mots.</p> <p>La meilleure façon de tirer un trait sur cette période serait effectivement de dire que l’islamisme n’existe pas et que par conséquent il n’y a pas eu d’attentats, tout attentat ayant une motivation idéologique. Il y aurait eu une sorte d’explosion de violence spontanée.</p> <h3>Désigner une idéologie, c'est désigner des idéologues</h3> <p>Retenir la qualification d’attentats, qui plus est islamistes, ce qu’ils ont bel et bien été, c’est désigner une idéologie. L’idéologie islamiste, donc: soit un projet de conquête civilisationnelle dirigé contre l’Occident jugé décadent et en bout de course. Toute la littérature djihadiste, s’inspirant de l’islamisme, est faite de cela.</p> <p>Désigner une idéologie potentiellement violente, c’est désigner des idéologues et des compagnons de route. C’est vouloir occuper le pouvoir à leur place, là où on pense qu’ils l’occupent, dans certaines parties de l’université, par exemple. 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Qu’est-ce que cela révèle de ce vote, à cet endroit bien précis, celui des limites géographiques et politiques d’un pays, en sa partie francophone?</p> <p>A Courgenay, dans cette Ajoie s’enfonçant tel un saillant dans les départements français du Doubs et du Territoire de Belfort, 65,4% des habitants ont voté en faveur de l’initiative soutenue par l’UDC et une partie de la gauche (<a href="https://www.admin.ch/gov/fr/accueil/documentation/votations/20210307/initiative-populaire-oui-a-l-interdiction-de-se-dissimuler-le-visage.html" target="_blank" rel="noopener">cliquez ici</a> pour avoir accès à la carte interactive). 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Ce terme, dont l’islam politique est féru, a plusieurs acceptions. C’est son problème comme sa force. Il englobe et confond la critique, la crainte et le rejet de l’islam. Mais on peut penser que le «vote des frontières» à l’initiative qui nous occupe renferme une part de crainte, voire de rejet de la religion musulmane, en tous les cas de ses formes apparaissant comme radicales ou intolérantes.</p> <p>Notre hypothèse, elle, est qu’il faut envisager ce vote frontalier romand comme le résultat d’une association d’idées: niqab=islam, islam=danger, danger=France. Cet enchaînement peut certainement valoir aussi, selon des modalités propres, avec d’autres pays limitrophes de la Suisse – la chose est frappante dans le canton de Saint-Gall, qui fait face à l’Autriche, visée le 12 novembre par un attentat djihadiste à Vienne.</p> <p>Ne nous cachons pas la réalité: nombreux sont les Suisses à avoir de la France une image cauchemardesque, ou du moins dégradée. Pour rien au monde, ils ne voudraient être français, ni connaître ce que la France, singulièrement cette «France voisine» – proche mais tenue à distance comme tout voisin – connaît: le chômage, la délinquance, un rapport exacerbé à l’islam, globalement, des problèmes paraissant insolubles.</p> <hr /> <p style="text-align: center;"><strong>Lire aussi</strong>: <em><a href="https://bonpourlatete.com/analyses/islamisme-france-suisse-le-vrai-sujet-qui-fache" target="_blank" rel="noopener">Islamisme France-Suisse: le vrai sujet qui fâche</a></em></p> <hr /> <p>Les communes romandes frontalières, spécialement celles de fort passage, spécialement celles situées en zones rurales, spécialement enfin celles qui n’ont pas avec la France de «barrière naturelle» – une rivière, un fort dénivelé forestier ou montagneux –, s’estiment aux premières loges d’un danger réel, exagéré ou fantasmé dont elles entendent se prémunir. Les habitants de ces localités se considèrent vulnérables, ils voient dans la frontière une protection contre des périls, le rôle même d’une frontière.</p> <p>Deux épisodes de délinquance remontant à l’été dernier renforcent cette hypothèse: l’un a touché la «<a href="https://bonpourlatete.com/actuel/la-suisse-c-est-un-autre-monde-faut-dire-la-verite" target="_blank" rel="noopener">piscine de Porrentruy</a>», en Ajoie, lorsque des «racailles» (terme chargé de sous-entendus) venues de quartiers sensibles de France voisine ont commis des incivilités dans l’enceinte du bassin bruntrutain; <a href="https://bonpourlatete.com/actuel/neuchatel-veut-que-l-algerie-reprenne-ses-delinquants-sans-papiers" target="_blank" rel="noopener">un autre</a> a fait grimper les chiffres de la délinquance semble-t-il comme rarement sur le littoral neuchâtelois, lorsque des mineurs ou jeunes majeurs isolés essentiellement originaires du Maghreb, certains d’entre eux étant en réalité originaires de France, ont commis des rapines.</p> <p>Les urnes électorales sont en quelque sorte nos lieux d’aisance démocratiques. 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Un <i>mansplaining</i> en mode solidaire, bien sûr. Je serais même tenté d’y voir un peu plus que cela: un <i>manembracing</i> virant au <i>manembarrassing</i>. Autrement dit: une défense à ce point appuyée qu’elle en devient gênante.</p> <p>Gabriel Bender a le zèle du converti. Du converti au féminisme. C’est l’impression qu’il donne. Comme s’il devait montrer, à lui-même et au monde, qu’il est du bon côté. Celui des dominés, en l’occurrence des dominées. Militantisme et sociologie – sa discipline – ne font plus qu’un dans un certain nombre de domaines de recherche. En première année de «socio», on apprenait pourtant à distinguer le discours de l’acteur de celui de l’observateur.</p> <p>Ce précieux conseil, qui permet d’entretenir la veille démocratique, ne semble plus partagé par tous les observateurs des phénomènes de société. La prose «féministe» de Gabriel Bender rend compte d’une confusion des statuts certainement volontaire. Chez lui, les termes du combat paraissent ne pas devoir être discutés, celui de patriarcat, par exemple. Or ce n’est pas parce que le patriarcat existe en tant que phénomène historique que le mot n’est pas utilisé dans la période actuelle comme une ressource discursive mise au service d’un intérêt.</p> <p>Contrairement à quelques-uns éprouvant le besoin d’exposer leur vertu, je n’ai pas pour habitude de dire dans un texte ce que je pense profondément. Parce que je me dis qu’un individu, au hasard, un lecteur, une lectrice, peut parfaitement faire crédit à un autre individu de son appartenance à la bonne part de l’humanité même si ce dernier dévie, autrement dit s’accorde le droit de questionner des tendances. Le fait de dévier, de pouvoir le faire, est gage de bonne santé démocratique. Cela ne veut pas dire qu’on est en droit d’imposer son point de vue aux autres. 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