Actuel / Feux d'artifice: pourvu que le Covid se prolonge
Cette année, pas de feux d'artifice... Mais finalement, ne pourrait-on pas s'en passer définitivement? Le 1er août à La Tour-de-Peilz, 2015. © Lucas Roubaka Martinez
Et si, une fois pour toutes, on supprimait ces feux d’artifice du 1er août… La question n’est pas nouvelle, mais elle se pose d’autant plus aujourd’hui que les cordons des bourses communales risquent d’être serrés, inutile de préciser pourquoi. Alors posons-nous la question: pourquoi envoyons-nous encore chaque année des dizaines de milliers de francs en l’air?
Cet article est paru le 1er août sur Le Regard Libre
«Par ce que c’est joli», diront certaines et certains. Joli… vraiment? Des lumières de couleurs qui explosent dans le ciel accompagnées de gros bruits. Joli? Tenez-vous devant les néons d’un cabaret vétuste quelques instants et admirez l’effet, votre 1er août se terminera peut-être également avec des papillons dans le ventre.
«Ahhh mademoiselle, ce n’est pas parce que les feux d’artifice ne sont pas utiles qu’ils n’ont pas leur place.» Vous avez raison. Je suis même une fervente défenseuse des choses inutiles. Je vous invite volontiers à rester prostré quelques instants devant ma bibliothèque pour observer l’étendue de mon inutilité. On pourra même boire ensemble un verre de vin inutilement bon, en tenant des théories inutilement longues. Mais pour que le futile ait du sens, il faut encore qu’il soit bien réalisé. Et chers artificiers, on peut parfois se demander dans quelle direction vous avez projeté votre conscience professionnelle.
Justement, à votre tour messieurs-dames les professionnels de la pyrotechnie. Oui, vous vous plaignez d’une baisse drastique des commandes pour cette fête nationale. Les principaux feux ont été annulés un peu partout. Votre chiffre d’affaires a chuté d’environ 80% en Suisse cette année. Ayons s’il vous plaît une seconde réflexive: au plus profond du confinement, un certain nombre d’activités professionnelles ou de loisir avaient été citées comme irremplaçables, bénéfiques à notre société, souhaitables même. Faites la liste. Elle était longue, si je me souviens bien. Que les personnes qui auraient nommé «les feux d’artifice» dans leur choix personnel m’écrivent. Vraiment. «Les feux d’artifice.» Et pas de mauvaise foi rétrospective: j’aimerais bien profiter de quelques activités inutiles ces prochains jours sans répondre à vos mails.
«Les enfants adorent.» Ils adorent aussi taper sur leur petite sœur, sucer leur pouce, miauler lorsqu’ils ont faim, sont fatigués, ont envie de faire pipi, veulent regarder une vidéo pseudo-éducative sur l’iPad de papa ou acheter le même pantalon qu’Angèle. Ce n’est pas pour autant que l’Etat finance leurs caprices. Bien heureusement, certains ont grandi et se rendent compte que le Vésuve est un volcan en Italie et les fusées, un joujou nord-coréen et non une prestation sociale. Et ne me lancez pas sur ces apprentis sorciers qui dépensent leur futur treizième salaire pour épater les copains et les copines entre les noix de cajou-wasabi et la salade d’avocat.
Alors oui, on espère tous garder notre âme d’enfant (l’insouciance qui va avec, la peau douce aussi et les bonbons aux anniversaires). D’ailleurs, maintenant que vous me le dites… c’est vrai, moi aussi ça m’est arrivé d’apprécier un feu d’artifice. Une fois. Je m’en rappelle. C’était un 14 juillet.
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Lors d’un voyage en Sibérie, j’avais naïvement demandé à ma logeuse pourquoi les Russes continuaient de voter pour Poutine. Elle m’avait simplement répondu: «Sinon qui?».</p> <p>Si Alexeï Navalny et son parti Russie du futur n’a jamais semblé être une alternative appétissante pour les habitantes et habitants de ce pays – qui ne se réduit pas aux deux villes Moscou et Saint-Pétersbourg – l’opposant numéro 1 (du moins vu comme tel depuis l’Occident), aura pourtant apporté une solution à cette femme dès 2018. A la question «Qui»? Navalny répond simplement: tous sauf Russie unie. En développant son «vote intelligent» et l’infrastructure qui va avec, l’opposant, désormais emprisonné, a compensé l’incapacité des partis d’opposition russes à former des coalitions, selon les chercheurs en science politique de l’Université européenne de Saint-Petersbourg Mickhaïl Turchenko et Grigorii Golosov qui publient les <a href="https://www.ridl.io/en/the-impact-of-smart-voting-on-the-2020-elections/" target="_blank" rel="noopener">résultats de leur étude sur ridl.io</a>. </p> <p>Rappelons le principe de ce «vote intelligent» ou «vote malin». Il consiste à inscrire sur son bulletin les candidates et candidats d’opposition, tous partis confondus, qui auraient le plus de chance de l’emporter contre Russie unie – qui détient trois quarts des sièges du parlement. Mais l’équipe de Navalny ne s’est pas contentée de donner ce mot d’ordre, elle a également développé toute une artillerie de ressources en ligne pour définir lesdites candidatures. Chaque électrice et chaque électeur a ainsi toutes les clefs en main pour centraliser son opposition sur la personne la plus «utile» dans sa circonscription.</p> <h3>Une augmentation du résultat des candidatures du «vote intelligent» en 2020</h3> <p>En 2020, cette stratégie a fonctionné. Il ne s’agit pas d’une révolution, mais les chercheurs estiment une augmentation des résultats pour les candidates et candidats du vote intelligent à près de 5%. Ce qui peut faire une différence, sachant que le système électoral courant est celui de la majorité relative; dans certaines régions, un parti obtenant 30%, 20% voire seulement 15% peut déjà peser dans le jeu électoral si les autres partis sont divisés. Ce mode de scrutin explique en partie pourquoi Russie unie détient encore autant de sièges alors que le parti n’a le soutien, selon l’institut Levada, que d’une personne sur trois.</p> <p><a href="https://www.monde-diplomatique.fr/2021/03/RICHARD/62870" target="_blank" rel="noopener">Selon le <i>Monde diplomatique</i></a>, les principaux bénéficiaires de cette stratégie de «cheval de Troie» sont le Parti communiste de la Fédération de Russie (le KPRF, considéré comme le premier parti d’opposition et héritier du parti communiste soviétique et des bolcheviks) et le Parti libéral-démocrate de Russie (le LDPR, conservateur, nationaliste et basé sur des idées de reconquête de la «Grande Russie»). Si le risque, assumé, est également de faire élire des candidates et candidats issus de formations dociles face à Russie unie, voire en désaccord avec ses propres idées, pour les deux politologues, ce vote intelligent a permis de «surmonter un sentiment d’isolement, d’apathie et d’impuissance en donnant à la population l’occasion de participer à un effort politique collectif» (traduction libre). </p> <p>Les chercheurs concluent que cette stratégie a ainsi permis d’offrir aux candidates et candidats d’opposition les meilleurs résultats depuis le début des années 2000. C’est donc bien pour cela que le parti au pouvoir voit ce vote intelligent comme une réelle menace et saccage méticuleusement la campagne. Le tribunal de Moscou a ainsi interdit à Google et Yandex de renvoyer les recherches vers les projets du vote intelligent. 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Le rebut n’est rien d’autre que «le produit d’un geste». </p><h3>«Tout-au-trou», «tout-à-l’égout» </h3><p>Si l’humain a de tout temps agencé sa vie selon diverses règles de vivre-ensemble, la tendance à l’ordre, à la catégorisation et à l’organisation sociale s’accentue autour du 19<sup>e</sup> siècle, notamment avec l’ère industrielle. «La saleté est une offense contre l’ordre. En l’éliminant, nous n’accomplissons pas un geste négatif; au contraire, nous nous efforçons, positivement, d’organiser notre milieu. Autrement dit, le nettoiement est un acte de fabrication du social, plus qu’une réaction au danger symbolique qu’il représente», précise le chercheur. Définir ce qui est «déchet» et ce qui ne l’est pas devient ainsi un acte fondateur de nos sociétés, au-delà des questions de santé publique. </p><p>Les politiques publiques convergent toutes vers un objectif: éliminer et cacher le rebut. Les excréments dans les égouts hors de vue; les ordures dans les poubelles (le nom vient d’ailleurs d’un préfet parisien hygiéniste du 19<sup>e</sup> siècle); nos résidus métalliques, plastiques, en verre moderne dans de grandes fosses; les surplus de ce que l’on ne veut plus, qui a été utilisé, dont on ne sait plus quoi faire, dans les océans, en attendant que le temps fasse son effet. «C’est comme si nous préférions rester aveugles à ces ombres incommodantes de la civilisation», écrit Monsaingeon. Mettre à la poubelle, fermer le couvercle et ne plus y penser. </p><h3>Prise de conscience ratée: l’écologisation de l’économie </h3><p>Coup de théâtre au milieu du siècle dernier. Les scientifiques découvrent avec stupéfaction l’ampleur de la situation. Repousser ce que l’on ne veut plus «hors de nous», loin de nos lieux sociaux comporte des limites. Nous sommes d’ores et déjà submergés. Certains postulent alors un changement radical de philosophie, mais ceux qui l’emportent sont les «environnementalistes». Pour eux, les déchets doivent être vus comme une chose à organiser, à gérer, à «manager». Ainsi, au lieu de créer une «écologisation de l’économie», c’est-à-dire remettre en cause la conception et la production du déchet, les autorités appliquent une stratégie de «mise en économie de l’environnement» que l’on peut résumer par «la bonne gestion des déchets et aussi celle qui est rentable». Et c’est là que le citoyen responsable (et culpabilisé) entre en scène.</p><h3>Le déchet ou le cheval de Troie du «waste managment» </h3><p>«Pour le valeureux soldat de l’armée verte, pour l’écocitoyen, il reste possible, moralement acceptable, d’acheter une bouteille d’eau minérale, car si elle est bien jetée, elle sera recyclée.» Cette réflexion a été intégrée par bon nombre de gens dans nos sociétés occidentales. Ainsi, «sous couvert d’un argumentaire orienté vers la protection de l’environnement, bien jeter est devenu un moyen pour pouvoir continuer à (mieux) consommer.» </p><p>Illustration du propos. Le groupe Coca-Cola s’est par exemple engagé à un monde sans déchets d’ici 2030. Pourtant, selon les découvertes de<em> Cash investigation </em>en 2018, dans la pratique, seul 7% du plastique contenu dans les bouteilles en PET provient du recyclage. Trier est donc un geste louable, mais il permet surtout à la marque de continuer à vendre ses produits sous couvert de bonne conscience. </p><p>Deuxième exemple: les campagnes de ramassages d’ordure sur les bords de lacs ou de mer, dans les montagnes, dans les forêts. Bon nombre d’entre elles ont été instiguées à la base par des consortiums liés aux industries de boissons ou d’emballages à usage unique, comme Keep Amercia Beautiful, fondé en 1953. La logique derrière? Rejeter, mine de rien, la responsabilité de la pollution sur le dos des citoyennes et citoyens. Une campagne marketing plus que réussie puisqu’aujourd’hui des écoles et des ONG organisent également ce genre d’action. </p><h3>Consommer & jeter: du programme économique à l’art de vivre </h3><p>«L’incorporation par les usagers de la réforme environnementale du geste de mise au rebut est emblématique de la façon dont s’est construit un déni des racines profondes de la crise écologique mettant en cause les fondements de l’industrialisation productive, du capitalisme mondialisé, et d’une façon générale d’un mode de vie 'moderne'», postule l’auteur de <em>Homo Detritus</em>. Bien jeter a créé une sorte de «rituel contemporain de dénégation.» Nous «faisons notre part» en triant, en recyclant et en inculquant ces valeurs à nos enfants. Jusqu’à dire que c’est la manipulation à large échelle, il n’y a qu’un pas. </p><p>«La naissance [il y a 50 ans] de la sensibilité écologique en France comme dans d’autres pays industrialisés aurait pu être l’occasion d’une révolution du quotidien qui n’est pas advenue», cite Monsaingeon. Aujourd’hui, alors que de nombreuses manifestations de jeunes éclatent dans toute l’Europe – manifestations que l’on peut d’ailleurs critiquer– les politiciennes et politiciens avancent timidement quelques solutions. «Économie circulaire»: tente une partie de la gauche. «Responsabilité et innovation» essayent quelques partis de droite. Toutes ces réponses sont pourtant empreintes d’«environnementalisme». Le déni est général, même chez beaucoup d’écologistes. Car il ne suffit plus de «manager» les déchets – qui reviendront toujours en plus grand nombre – mais bel et bien de remettre en cause le système productiviste. Et cela ne peut passer que par des politiques globales. Malheureusement, il serait illusoire de penser que trier les partis politiques en ne mettant que les bons dans l’urne – dans une logique du «bien voter» ressemblant au «bien jeter» – ne nous permette d’agir sur les réels impacts de nos modes de vie. Mais en attendant, trions et «faisons notre part», c’est toujours ça de pris. </p><p><hr></p><p><br><img class="img-responsive " src="https://media.bonpourlatete.com/default/w175/1556096692_515j071wtl._sx195_.jpg"></p><h4>Baptiste Monsaingeon, <em>Homo Detritus</em>, Ed. Seuil, 2017.</h4><p><hr></p><h2>Retrouvez d'autres articles sur le même thème dans notre <a href="https://bonpourlatete.com/serie/dossier-special-decroissance">dossier spécial Décroissance</a>.</h2>', 'content_edition' => null, 'slug' => 'bien-jeter-pour-mieux-oublier', 'headline' => false, 'homepage' => 'col-md-12', 'like' => (int) 957, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1655, 'homepage_order' => (int) 1917, 'original_url' => null, 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 5, 'person_id' => (int) 1501, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [ [maximum depth reached] ], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 1571, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'free' => true, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => 'NORMAL', 'readed' => null, 'subhead' => 'ACTUEL / Média', 'title' => 'Sextoys, publireportage et (un peu de) politique, le cocktail jeune de Konbini', 'subtitle' => 'Une envie de parler à sa génération et une certaine résignation à l’encontre du mode de consommation de l’actualité d’aujourd’hui: c’est ce que je retiendrai de ma rencontre avec Antoine Multone, rédacteur en chef du bureau veveysan de Konbini: un média qui réussit à captiver les jeunes, réputés se détourner de la presse. 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Toujours à sa façon, en tentant d’intéresser la catégorie qui semble le moins se préoccuper de ces thèmes grâce à des formats nouveaux, dynamiques, courts. Les vidéos «speech» (une prise de parole de quelques minutes face caméra de personnalités politiques ou non <a href="https://www.youtube.com/watch?v=bWvcmQVQEQA">ici par exemple de Jean Ziegler</a>) voient le jour. L’arrivée de la nouvelle star du journalisme Hugo Clément achève la transformation. 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La «verticale» helvète, créée en juillet 2017 démarre gentiment: «On peut compter environ à 3 millions d’utilisateurs non uniques en une année», annonce le trentenaire qui s’est formé à la RTS. Ce jour-là, les trois derniers articles publiés parlaient de l’ouverture de la Migros à la vente de sextoys, de l’utilisation du cannabis dans des EMS et d’un jeu dissimulé dans l’application des CFF. On est plus du côté de «infotainment» que de l’info pure.</p><p><em>Konbini</em> Suisse va-t-il aussi s’intéresser aux grands thèmes politiques 2019? «Certainement, répond Antoine Multone, mais il s’agit de trouver des angles qui touchent les jeunes.» Pour les élections fédérales, la petite rédaction veveysane compte se concentrer sur la pauvreté, le climat et les questions de genre, de sexualité et plus généralement des minorités. L’enjeu sera ensuite de trouver des «formats spécifiques» à <em>Konbini</em> qui permettront de montrer la diversité d’opinions dans une Suisse fédéraliste aux acteurs nombreux.</p><h3>Une dépendance aux réseaux sociaux</h3><p>Si la manière de présenter l’information est très variée chez <em>Konbini</em> (vidéos, textes, reportages, interviews, humour, etc.) le critère prioritaire est l’adaptation 1) à son public 2) à son canal de diffusion. Ce ne sont plus les lecteurs et lectrices qui s’adaptent au média, c’est le média qui doit coller au public et à sa manière de «consommer l’actu». Selon la formule bien connue des analystes, le véritable rédacteur en chef, c’est le clic: Antoine Multone assume cette nouvelle réalité.</p><p>Concrètement, ce qui fait les frais de cette nouvelle donne, c’est la surprise. Dans un journal traditionnel (papier ou Web), les lecteurs et lectrices se promènent dans le titre au gré des pages et des rubriques. Ils et elles peuvent ainsi être confrontés à des articles qui les sortent de leur zone de confort.</p><p>Les algorithmes des réseaux sociaux et des moteurs de recherches proposent une tout autre logique: au travers des clics ou des «likes» répétés sur un média le système de calcul informatique guide systématiquement les lecteurs et lectrices vers des articles «qui pourraient leur plaire»: c’est-à-dire, au bout du compte, vers ce qui leur a déjà plu dans le passé. Les conséquences de ce mécanisme sont souvent résumées sous l’appellation de «bulle filtrante» des réseaux sociaux. <br></p><h3>«La nouvelle diversité de la presse, c’est la diversité des algorithmes»</h3><p><em>Konbini</em> a bien un site internet. Mais il très peu fréquenté, car l’essentiel se passe ailleurs: la majorité de ses consommateurs et consommatrices sont sur les réseaux sociaux, le média joue à fond le jeu des plateformes qui utilisent les algorithmes. </p><p>Antoine Multone ne ménage pas ses critiques face aux réseaux sociaux. Non, il ne soutient pas les logiques de ce monde-là. Mais en même temps, il s’y résigne: si c’est la seule manière de parler à sa génération, il veut bien appréhender cette collaboration «tout au plus comme une contrainte» et non comme une perte de liberté. <em><strong><br></strong></em></p><blockquote><p><em><strong>«L’humain est paresseux, </strong></em>analyse-t-il, un peu fataliste.<em><strong> Il aime qu’on lui montre ce qu’il veut voir. Oui, c’est parfois frustrant. Mais dans tous les cas, on ne peut pas le forcer à porter de l’attention sur ce qui ne l’intéresse pas. Ce qu’il nous reste à faire, c’est diversifier les plateformes. 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En bon français: de la publicité et du publireportage sous forme numérique. Le mélange de contenu rédactionnel et publicitaire, une pratique qui fait bondir les consœurs et confrères soucieux d’éthique, mais qui se répand depuis quelques années jusque dans les titres les plus prestigieux. </p><p>Dans le cas précis de <em>Konbini</em>, il est certain que les revenus publicitaires sont liés au fort trafic que génèrent les publications du média. Plus il y aura de personnes touchées par le contenu éditorial, mais également par la mise en valeur de certaines marques – et le bât blesse lorsqu’il n’y a pas une différenciation claire des deux – plus les entreprises seront intéressées à investir dans du contenu <em>brandé</em>. </p><p>La question est donc primordiale: le rapport d’interdépendance entre le média, son canal de diffusion (majoritairement les réseaux sociaux) et les marques permet-il réellement de faire du «vrai journalisme», comme le déclarait Hugo Clément en 2017? Ou n’est-ce pas précisément au prix de l’indépendance journalistique que le succès se construit dans les médias émergents de type <em>Konbini</em>? 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Par ce terme, <a href="https://www.are.admin.ch/are/fr/home/developpement-durable/programmes-et-projets/quartiers-durables.html">l’Office fédéral du développement territorial (ARE) et l’Office fédéral de l’énergie (OFEN)</a> proposent plusieurs critères de définition, incluant la mobilité douce, l’efficacité énergétique, la réduction de la consommation des ressources, le maintien de la biodiversité, la mixité fonctionnelle et sociale, la présence d’espaces publics facilitant les rencontres et la détente.</p><p>Une vision évidemment idyllique de la densification, bien loin d’être la norme aujourd’hui en matière de réorganisation de quartiers. Qui n’a jamais entendu une collègue, un ami, un voisin dire: «T’as vu ces énormes immeubles dégueulasses qui se construisent derrière chez moi?» Et d’être bien soulagé d’habiter dans un petit bâtiment à 4 étages. La densification, donc oui, mais «not in my backyard», pas dans mon environnement immédiat. Et le fait de mettre les pieds aux murs face à ces évolutions révèle des craintes pas forcément injustifiées…</p><h3>Des petites villes animées aux métropoles anonymes</h3><p>Cap sur l’exemple de la petite ville d’Emmen énoncé dans un article du <em>Temps</em>. Une agglomération dont les habitants et les responsables politiques bloquent par tous les moyens la densification déjà en court un peu partout ailleurs. </p><p></p><hr><p></p><h4 style="text-align: right;">A noter que le nombre d’habitants par hectare <br> en Suisse est en constante augmentation <br> depuis les années 1990-2000, et les villes absorbent <br> de plus en plus le développement démographique:<br> 15% entre 1980-2000; 45% entre 2000-2017.</h4><p></p><hr><p></p><p>Pourquoi sont-ils réfractaires à cette politique généralisée de la densité urbaine, ces habitants d’Emmen? Parce qu’il est évident qu’une augmentation du nombre de personnes sur un territoire donné (souvent en périphérie des grandes villes, bien desservies par les transports publics) change la dynamique sociale. Certaines communes (qui étaient en réalité plutôt de grands villages) sont confrontées à un changement bouleversant: «Les indigènes se réveillent avec une âme de villageois dans un corps de ville», pouvait-on lire dans l’article du <em>Temps</em>, <em><a href="https://www.letemps.ch/suisse/communes-dagglomeration-ne-veulent-grandir">Ces communes d’agglomération qui ne veulent pas grandir</a></em>.</p><h3>Rénovations et nouvelles constructions inaccessibles</h3><p>Il n’y a pourtant pas que cet aspect «d’atmosphère» qui inquiète. En effet, la densification implique généralement la rénovation ou même la construction à neuf de nouveaux immeubles. Et ces deux éléments impliquent des augmentations (parfois considérables) de loyer. Ainsi, selon les chiffres d’une étude datant d’août dernier menée par Wüest Partner: «en moyenne, un logement locatif déclaré comme construction neuve coûtait (charges comprises) 2’050 francs par mois, soit 26% de plus que la moyenne des logements non déclarés comme neufs [en 2017]».</p><p></p><hr><p></p><h4 style="text-align: right;">L’augmentation démographique et les modifications de comportement <br> des Suissesses et des Suisses <br> sont des causes de l’étalement urbain.<br> En 2017, la surface habitable moyenne par personne <br> était de 46 m2 2017, alors qu’elle atteignait seulement 34m2 dans les années 1980.</h4><p></p><hr><p></p><p>La faute à qui? A la spéculation immobilière et foncière. Les propriétaires de terrain dans les centres-villes ont d’ailleurs probablement bien profité de l’augmentation de 200% de la valeur de leur bien (chiffre du <a href="https://uniondesvilles.ch/cmsfiles/180810_Etude%20urbanisation_f_1.pdf">rapport précité</a>). Attendre, spéculer et thésauriser: une stratégie bien plus rentable parfois que de simplement construire des logements abordables.</p><p>Même principe de rentabilité individuelle contre-productive pour les immeubles abritant des petits commerces. Alors qu’on assiste à un abandon des échoppes de centres-villes et de périphérie proche (15% de vacance par exemple à Fribourg) – en partie à cause de l’augmentation du commerce en ligne, mais également à cause des loyers toujours plus hauts – les régies immobilières préfèrent souvent laisser le local vide plutôt que de louer moins cher. La cause: la valeur d’un bien est jugée à son loyer. Plus rentable donc d’attendre qu’un commerçant plus fortuné puisse se permettre de renouveler le bail, même s’il s’agit d’une grande chaine internationale par exemple.</p><p>Revenons un instant à l’argumentaire contre «Stop mitage». Ses détracteurs martèlent que l’initiative ferait augmenter les loyers. S’il est probablement vrai que le projet ne va pas les faire baisser, il est pourtant malhonnête d’imputer les maux qui touchent l’immobilier suisse à la proposition mise en votation ce dimanche par les Jeunes Verts.</p><h3>Mixité fonctionnelle <em>wanted</em></h3><p>Une fois que tout cela est dit, penchons-nous à nouveau sur les objectifs des «quartiers durables» ici présentés par l’ATE (association transport et environnement, qui soutient le projet) et formulés comme suit: <em><strong><br></strong></em></p><blockquote><p><em><strong>«Le développement à l’intérieur du bâti avec des quartiers les plus durables possible est la seule façon de mettre fin au cercle vicieux de l’étalement urbain. Pouvoir se rendre au travail sans voiture ou faire ses achats dans l’épicerie du quartier doit redevenir la norme». </strong></em><br></p></blockquote><p>Comme on l’a vu plus haut, pour atteindre ces objectifs louables, la densification doit se faire avec une extrême précaution, sinon, il est évident que la mixité sociale et «fonctionnelle» attendue n’aura pas lieu: sans une politique volontaire, on se retrouvera dans des quartiers d’immeubles, certes minergie et pourvus de façades végétalisées, mais totalement vidés de vie sociale.</p><h3>Un débat en cache souvent un autre</h3><p>Cet article un peu anxieux quant à la gestion de notre territoire si restreint et non renouvelable ne s’engage pas corps et âme pour cette initiative Stop mitage, comme vous l’aurez compris. Et pourtant, en matière de politique d’aménagement du territoire, il paraît primordial de réagir maintenant afin de donner une direction claire en acceptant le gel des terrains à bâtir. 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Je veux parler ici de l’initiative sur les logements abordables (aujourd’hui en discussion au Parlement fédéral et refusée par la Commission de l’économie du Conseil des Etats). Ce débat sera primordial pour définir quelles sont les prérogatives des pouvoirs publics pour assurer des loyers accessibles. Si la question écologique est aujourd’hui dans toutes les bouches, il est nécessaire qu’elle soit appliquée de manière sociale. 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VOS RÉACTIONS SUR LE SUJET
2 Commentaires
@Lanclot 03.08.2020 | 14h07
«Bonjour,
Je suis resté très perplexe et penseur après avoir lu votre article sur les feux du 1er août .... Comment dire ?
Plusieurs questions me viennent à l'esprit. Tout d'abord, quel est le but avoué de ce fameux article presque anti-1er août ?
Ensuite, pourquoi aujourd'hui remettez-vous en cause l’existence même de cette tradition qui perdure depuis plus de 50 ans ?
Et, la dernière, vous parlez de l'inutilité de ces festivité de feux d'artifices. Je ne vois pas, là non plus, le rapport entre une éventuelle utilité et la façon dont nous honorons l'origine si particulière de notre pays ?
Car si la raison première de votre article se fonde sur le seul critère sur l'inutilité des choses, alors je pense que c'est bien plus que les feux du 1er août qu'il vous faudra réviser ou supprimer.
Entre autre, les millions de francs dépensé pour l'armée (alors que nous sommes censés être neutre),
Les centaines de milliers de francs pour les affiche politiques à chaque période d'élections,
Les autres millions brûlé au nom des spots publicitaires qui sont là pour nous confirmer que nous avons fait le bon choix d'achat, etc.. etc...
Bref, j'avoue ne pas comprendre cette hostilité à peine voilée envers ces fêtes toutes particulières. Mais peut-être que, toutes mes questions, sont finalement inutiles comme vous le dite si bien ?!
»
@Elizabeth 03.08.2020 | 15h55
«Les feux d'artifice ne sont ni utiles ni nécessaires, mais ils amènent plaisir et émerveillement à la plupart des gens, et c'est déjà beaucoup. Vous êtes libre de ne pas aimer, mais n'en dégoûtez pas les autres. En ce qui concerne l'inventaire de choses bien plus inutiles (et néfastes) qu'eux, je souscris entièrement à la liste établie par Lanclot dans son commentaire. »