Actuel / Balkans: le dangereux projet de redécoupage des frontières
Un nouveau découpage des frontières des États issus du démantèlement de la Yougoslavie ne se ferait pas sans heurts. Harvepino/shutterstock
A la mi-avril, le site slovène Necenzurino a publié un document-choc présenté comme un «non paper» relatif aux Balkans occidentaux provenant du gouvernement slovène et destiné au président du Conseil européen Charles Michel. Dans la pratique diplomatique, un «non paper» permet d’introduire une discussion sur une thématique sensible sans en endosser la responsabilité et de proposer des idées parfois provocantes sans se laisser enfermer dans un cadre de négociation.
Loïc Tregoures, Université de Lille
A la mi-avril, le site slovène Necenzurino a publié un document-choc présenté comme un «non paper» relatif aux Balkans occidentaux provenant du gouvernement slovène et destiné au président du Conseil européen Charles Michel. Dans la pratique diplomatique, un «non paper» permet d’introduire une discussion sur une thématique sensible sans en endosser la responsabilité et de proposer des idées parfois provocantes sans se laisser enfermer dans un cadre de négociation.
Si le principe même du «non papier» est de pouvoir en nier l’existence, ce que les autorités slovènes n’ont pas manqué de faire, et malgré l’étonnant silence du cabinet de Charles Michel, il semble que sa réalité soit avérée par les recoupements effectués par la presse locale et les confirmations de certains acteurs, parmi lesquels le premier ministre albanais Edi Rama. Le sujet a également pesé sur le tout récent sommet du groupe de Brdo-Brijuni, une initiative diplomatique lancée par la Croatie et la Slovénie en 2013 en vue de collaborer à la stabilisation la région et d’accélérer les processus d’adhésion dans l’Union européenne des pays de la région des Balkans occidentaux.
«Achever la dissolution de la Yougoslavie»
Dans les grandes lignes, ce document propose d’«achever la dissolution de la Yougoslavie» en résolvant les problèmes supposément laissés en suspens à la fin des années 1990.
Autrement dit, il propose, carte à l’appui, de redessiner totalement les frontières de la région pour constituer des Etats ethniquement homogènes en procédant à un dépeçage de la Bosnie-Herzégovine, à une partition du Kosovo et de la Macédoine du Nord, et à un rétrécissement du déjà petit Monténégro au profit de l’Albanie, de la Croatie et de la Serbie qui en sortiraient agrandies.
Le tout se ferait sans consultation des peuples concernés mais dans le cadre d’un grand accord diplomatique signé entre les gouvernements et parrainé par les Etats-Unis et l’Europe. Par exemple, la Bosnie ainsi dépecée, qui serait alors peuplée en très grande majorité de Bosniaques musulmans, procéderait à un référendum pour choisir entre un avenir européen ou «auprès de la Turquie» (sic).
La carte de la région si le projet slovène était mis en œuvre. News1.mk
Un tel big bang, alors que la Slovénie et son premier ministre, le très trumpiste Janez Jansa, prendront la présidence tournante de l’Union européenne le 1er juillet prochain, n’a pas manqué de faire réagir, à la fois dans la région, mais aussi au-delà, à Bruxelles et à Washington. D’où qu’elles viennent, ces réactions sont unanimes dans la condamnation de ces propositions dont on souligne l’inanité et la dangerosité.
Dès lors, puisque tout le monde semble opposé à ces idées, à tel point qu’on finit par se demander s’il s’est trouvé quelqu’un pour écrire ce document et tracer cette carte, quel intérêt y a-t-il à en discuter davantage? N’y a-t-il pas un risque d’en faire la promotion au prétexte de le combattre?
Une volonté d’homogénéisation ethnique des Etats
C’est pourtant un risque à prendre, pour plusieurs raisons. D’abord, Ljubljana entend faire des Balkans occidentaux l’une des priorités de sa présidence de l’UE. Pour des membres lointains de l’Union, il y a une tendance assez naturelle à s’en remettre à la Slovénie, elle-même issue de la Yougoslavie, pour traiter de ces questions, en considérant qu’elle en a la légitimité et les connaissances. Par conséquent, l’impact d’un document pareil n’est pas le même selon qu’il émane de la Slovénie ou, par exemple, de la Finlande ou du Portugal.
Ensuite, quand bien même le document est condamné de toutes parts, il part d’un constat avec lequel on peut difficilement être en désaccord : les États candidats à l’intégration européenne n’ont strictement aucune perspective d’y parvenir à court et moyen terme (2025-2030) – sauf, peut-être, le Monténégro qui pourrait être sauvé par sa petite taille.
Face à ce constat lucide, une approche consiste à considérer que le blocage est endogène au processus, en raison d’une double fatigue de la part de l’UE et des pays candidats, malgré le récent changement de méthodologie exigé par la France et dont on verra s’il produit des effets positifs. On peut en douter.
Une autre, défendue dans le fameux «non papier» slovène, estime que les Etats des Balkans occidentaux n’ont aucune chance de rejoindre l’UE parce qu’ils sont intrinsèquement dysfonctionnels car ethniquement hétérogènes, ce qui s’explique par le fait que le processus de dissolution de la Yougoslavie n’a pas été tout à fait mené à son terme. Le corollaire de cette hypothèse est que des États ethniquement homogènes (comme la Slovénie) seraient mieux à même de se développer, et donc de rattraper leur retard sur le plan économique et démocratique afin d’atteindre les standards européens. Une théorie qui ne repose sur rien de tangible, qui est balayée par la réalité même de l’UE, mais qui semble toujours intuitivement séduisante dans certains cercles identitaires.
Documentaire de France 3 sur la Yougoslavie.
Or, c’est dans le vide politique et géostratégique laissé par les Européens dans les Balkans qu’émergent à la fois les alternatives géopolitiques – en particulier l’idée d’un net rapprochement avec la Chine –, mais aussi les idées «out of the box» comme celles contenues dans ce «non papier», puisque rien d’autre ne semble fonctionner.
Et si personne n’endosse la paternité du document, la région ne manque pas de défenseurs de ces idées de redécoupage des frontières, à commencer par le premier ministre slovène Janez Jansa, trumpiste assumé, nous l’avons dit, dont le modèle européen est Viktor Orban. Il est appuyé en cela par plusieurs responsables et partis politiques de la région qui n’ont pas manqué de saisir l’opportunité de cette publication aller dans le même sens.
Milorad Dodik, l’homme fort de la Republika Srpska, l’entité serbe de Bosnie, ne cesse ainsi de répéter qu’il faut aller vers une dissolution pacifique de la Bosnie-Herzégovine, qui permettrait à la Republika Srpska de se rattacher in fine à la Serbie. L’actuel ministre de l’Intérieur serbe Aleksandar Vulin répète également que l’objectif stratégique de son pays est l’union des Serbes dans une même sphère.
Côté croate, les principaux responsables croates de Bosnie, aidés en cela par les autorités de Zagreb, poussent depuis longtemps pour créer une entité croate, prélude à un morcellement plus prononcé de la Bosnie.
Quant aux Albanais, si l’idée d’une réunification avec le Kosovo, à laquelle l’actuel premier ministre du Kosovo Albin Kurti est favorable, apparaît lointaine et irréaliste aujourd’hui, elle pourrait revenir si le chemin européen de l’Albanie et du Kosovo est durablement fermé.
On voit donc que la région ne manque pas d’ambitieux qui n’attendent qu’un signal pour littéralement reprendre les choses là où elles se sont arrêtées à la fin des années 1990 et «achever la dissolution de la Yougoslavie», c’est-à-dire ni plus ni moins qu’achever ce pour quoi eux ou leurs prédécesseurs se sont fait la guerre.
Car il ne faut pas s’y tromper: rien de tout cela ne pourrait advenir de façon pacifique et chacun le sait. On emploie donc des formules et des périphrases qui masquent de moins en moins une réalité simple: ni du côté croate, ni du côté serbe on n’a renoncé au but de guerre commun de 1992, à savoir dépecer la Bosnie et la réduire à un État croupion autour de Sarajevo dont on pointera à nouveau le caractère musulman, donc exogène à l’Europe chrétienne, donc illégitime, donc à éliminer. Cette rhétorique identitaire, déjà à l’œuvre dans les années 1990 dans le discours de propagande serbe touchant aussi bien les Bosniaques que les Albanais du Kosovo, a retrouvé de la vigueur ces derniers temps, que ce soit dans les inspirations d’un terroriste suprémaciste à l’autre bout du monde ou dans les discours de l’extrême droite française.
Un projet loin d’être enterré
Ce «non papier» a donc des effets performatifs immédiats puisqu’il crée des tensions dans la région en alimentant les craintes des uns et les fantasmes des autres. On aurait tort de croire que son rejet immédiat suffira à enterrer ce dessein.
Le précédent du débat sur le changement de frontière entre la Serbie et le Kosovo comme base d’un compromis en 2018 nous renseigne sur ce que deviennent des idées jetées en l’air, ou plus exactement sur des cartes. D’une idée marginale défendue dans certains cercles eux-mêmes marginaux, il n’a fallu que quelques mois pour qu’elle devienne la nouvelle martingale, défendue à la fois par les deux présidents de la Serbie et du Kosovo, mais aussi par une série de hauts responsables européens et américains (dont l’ancienne Haute Représentante Federica Mogherini), non sans susciter quelques interrogations sur les pratiques employées pour se faire, notamment en France. Seule l’Allemagne a alors campé sur sa position de principe qu’il ne fallait pas toucher aux frontières et que l’argument consistant à dire que « si tout le monde est d’accord sur place, qui sommes-nous pour l’empêcher ? » était purement rhétorique car ce « si » ne peut en aucun cas advenir.
Par conséquent, ce n’est pas parce que ce «non papier» et sa carte sont rejetés aujourd’hui que le sujet est fermé. Au contraire, il est désormais ouvert. Il suffira d’une crise sérieuse savamment orchestrée dans la région, d’une ouverture géopolitique avec un nouveau Trump à la Maison Blanche qui n’aura que faire des engagements historiques des Américains dans la région et raisonnera en termes ethnoreligieux, pour que les projets des années 1990, aujourd’hui ressuscités sous couvert de la prétendue possibilité de leur accomplissement pacifique, ne soient à nouveau considérés comme concevables par un plus grand nombre de décideurs.
Impossible? Loin de là, puisque les dirigeants occidentaux sont ceux qui ont raisonné en ces termes dans les années 1990, qui ont accepté d’emblée les narratifs ethno-nationalistes dans les plans de paix en Bosnie, qui ont essentialisé une région réduite dans leur vision à des haines ancestrales. Qu’on ne doute pas qu’il en serait à nouveau ainsi si la situation se représentait. Et c’est toute la stratégie d’un Dodik en Bosnie que de rendre le pays le plus dysfonctionnel possible, jusqu’à ce qu’une opportunité s’ouvre et que l’on se mette à accepter l’idée qu’après tout, si ça ne marche pas, il vaudrait peut-être mieux redécouper tout ça. À ceci près que, répétons-le, un tel développement déclenchera nécessairement un nouveau conflit armé.
Enfin, ce «non papier» est aussi un signe qu’au sein de l’Europe, les forces illibérales, sous couvert de défense de l’identité chrétienne, balaient sans ciller les valeurs de l’UE, ses textes, et l’héritage des Pères fondateurs. Les propositions de ce document sont un retour à la diplomatie du XIXe siècle si bien que, si l’on suit cette logique, il n’y a aucune raison de considérer que le raisonnement proposé ne s’appliquerait pas à d’autres régions du monde dont on dirait qu’elles dysfonctionnent parce qu’elles ne sont pas des États-nations homogènes. Un débat tranché en Afrique lors des indépendances des anciennes colonies, précisément parce qu’indépendamment des problèmes créés par les frontières héritées des puissances coloniales, on savait que se lancer dans un redécoupage qui correspondrait à des appartenances identitaires déboucherait sur des conflits sans fin.
Il faut donc voir dans ce «non papier» un avertissement. Ces idées sont encore vivantes, et nul doute que les mêmes causes produiraient les mêmes conséquences si elles venaient à être appliquées. Partant de là, il incombe à l’Europe de redonner une dimension stratégique à son action dans les Balkans, par-delà une rhétorique de l’intégration à laquelle personne ne croit plus vraiment de part et d’autre.
Loïc Tregoures, Docteur en science politique, Université Lille 2, spécialiste des Balkans, Université de Lille
Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.
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Le sujet a également pesé sur le tout récent <a href="https://europeanwesternbalkans.com/2021/05/17/brdo-brijuni-declaration-eu-is-able-to-absorb-the-wb-serbias-phrasing-of-the-point-on-regional-borders-rejected/">sommet du groupe de Brdo-Brijuni</a>, une initiative diplomatique lancée par la Croatie et la Slovénie en 2013 en vue de collaborer à la stabilisation la région et d’accélérer les processus d’adhésion dans l’Union européenne des pays de la région des Balkans occidentaux.</p> <h3>«Achever la dissolution de la Yougoslavie»</h3> <p>Dans les <a href="https://ba.n1info.com/english/news/alleged-non-paper-on-wb-leaks-out-merging-of-rs-and-serbia-kosovo-and-albania/">grandes lignes</a>, ce document propose d’«achever la dissolution de la Yougoslavie» en résolvant les problèmes supposément laissés en suspens à la fin des années 1990.</p> <p>Autrement dit, il propose, carte à l’appui, de redessiner totalement les frontières de la région pour constituer des Etats ethniquement homogènes en procédant à un dépeçage de la Bosnie-Herzégovine, à une partition du Kosovo et de la Macédoine du Nord, et à un rétrécissement du déjà petit Monténégro au profit de l’Albanie, de la Croatie et de la Serbie qui en sortiraient agrandies.</p> <p>Le tout se ferait sans consultation des peuples concernés mais dans le cadre d’un grand accord diplomatique signé entre les gouvernements et parrainé par les Etats-Unis et l’Europe. Par exemple, la Bosnie ainsi dépecée, qui serait alors peuplée en très grande majorité de Bosniaques musulmans, procéderait à un référendum pour choisir entre un avenir européen ou «auprès de la Turquie» (sic).</p> <h4><img src="https://images.theconversation.com/files/400997/original/file-20210517-13-1q2hjpy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" alt="" /><span>La carte de la région si le projet slovène était mis en œuvre.</span> <span><span>News1.mk</span></span></h4> <p>Un tel big bang, alors que la Slovénie et son premier ministre, le très trumpiste <a href="https://www.lexpress.fr/actualite/monde/europe/slovenie-la-derniere-bataille-du-marechal-tweeto-janez-jansa_2139149.html">Janez Jansa</a>, prendront la présidence tournante de l’Union européenne le 1<sup>er</sup> juillet prochain, n’a pas manqué de faire réagir, à la fois <a href="https://www.courrierdesbalkans.fr/changer-les-frontieres-des-balkans-un-non-paper-qui-bouleverse-la-region">dans la région</a>, mais aussi au-delà, à Bruxelles et à <a href="https://euobserver.com/world/151572">Washington</a>. D’où qu’elles viennent, ces réactions sont unanimes dans la condamnation de ces propositions dont on souligne l’inanité et la dangerosité.</p> <p>Dès lors, puisque tout le monde semble opposé à ces idées, à tel point qu’on finit par se demander s’il s’est trouvé quelqu’un pour écrire ce document et tracer cette carte, quel intérêt y a-t-il à en discuter davantage? N’y a-t-il pas un risque d’en faire la promotion au prétexte de le combattre?</p> <h3>Une volonté d’homogénéisation ethnique des Etats</h3> <p>C’est pourtant un risque à prendre, pour plusieurs raisons. D’abord, Ljubljana entend faire des Balkans occidentaux l’une des priorités de sa présidence de l’UE. Pour des membres lointains de l’Union, il y a une tendance assez naturelle à s’en remettre à la Slovénie, elle-même issue de la Yougoslavie, pour traiter de ces questions, en considérant qu’elle en a la légitimité et les connaissances. Par conséquent, l’impact d’un document pareil n’est pas le même selon qu’il émane de la Slovénie ou, par exemple, de la Finlande ou du Portugal.</p> <p>Ensuite, quand bien même le document est condamné de toutes parts, il part d’un constat avec lequel on peut difficilement être en désaccord : les États candidats à l’intégration européenne n’ont strictement aucune perspective d’y parvenir à court et moyen terme (2025-2030) – sauf, peut-être, le Monténégro qui pourrait être sauvé par sa petite taille.</p> <p>Face à ce constat lucide, une approche consiste à considérer que le blocage est endogène au processus, en raison d’une double fatigue de la part de l’UE et des pays candidats, malgré le récent <a href="https://ec.europa.eu/neighbourhood-enlargement/news_corner/news/revised-enlargement-methodology-questions-and-answers_en">changement de méthodologie</a> exigé par la France et dont on verra s’il produit des effets positifs. On peut en douter.</p> <p>Une autre, défendue dans le fameux «non papier» slovène, estime que les Etats des Balkans occidentaux n’ont aucune chance de rejoindre l’UE parce qu’ils sont intrinsèquement dysfonctionnels car ethniquement hétérogènes, ce qui s’explique par le fait que le processus de dissolution de la Yougoslavie n’a pas été tout à fait mené à son terme. Le corollaire de cette hypothèse est que des États ethniquement homogènes (comme la Slovénie) seraient mieux à même de se développer, et donc de rattraper leur retard sur le plan économique et démocratique afin d’atteindre les standards européens. 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Il est appuyé en cela par plusieurs responsables et partis politiques de la région qui n’ont pas manqué de saisir l’opportunité de cette publication aller dans le même sens.</p> <p>Milorad Dodik, l’homme fort de la Republika Srpska, l’entité serbe de Bosnie, ne cesse ainsi de <a href="https://ba.n1info.com/english/news/dodik-republika-srpska-entity-also-has-a-non-paper-on-bosnia/">répéter</a> qu’il faut aller vers une dissolution pacifique de la Bosnie-Herzégovine, qui permettrait à la Republika Srpska de se rattacher in fine à la Serbie. L’actuel ministre de l’Intérieur serbe Aleksandar Vulin <a href="https://www.klix.ba/vijesti/bih/vulin-o-srpskom-svetu-proces-ujedinjenja-je-poceo-i-to-se-vise-nece-moci-zaustaviti/210501066">répète</a> également que l’objectif stratégique de son pays est l’union des Serbes dans une même sphère.</p> <p>Côté croate, les principaux responsables croates de Bosnie, aidés en cela par les autorités de Zagreb, poussent depuis longtemps pour créer une entité croate, prélude à un morcellement plus prononcé de la Bosnie.</p> <p>Quant aux Albanais, si l’idée d’une réunification avec le Kosovo, à laquelle l’actuel premier ministre du Kosovo Albin Kurti est <a href="https://www.euronews.com/2021/02/16/i-would-vote-to-unify-albania-and-kosovo-election-winner-albin-kurti-tells-euronews">favorable</a>, apparaît lointaine et irréaliste aujourd’hui, elle pourrait revenir <a href="https://www.euronews.com/2021/04/15/how-eu-enlargement-apathy-could-push-kosovo-and-albania-to-join-forces">si le chemin européen de l’Albanie et du Kosovo est durablement fermé</a>.</p> <p>On voit donc que la région ne manque pas d’ambitieux qui n’attendent qu’un signal pour littéralement reprendre les choses là où elles se sont arrêtées à la fin des années 1990 et «achever la dissolution de la Yougoslavie», c’est-à-dire ni plus ni moins qu’achever ce pour quoi eux ou leurs prédécesseurs se sont fait la guerre.</p> <p>Car il ne faut pas s’y tromper: rien de tout cela ne pourrait advenir de façon pacifique et chacun le sait. On emploie donc des formules et des périphrases qui masquent de moins en moins une réalité simple: ni du côté croate, ni du côté serbe on n’a renoncé au but de guerre commun de 1992, à savoir dépecer la Bosnie et la réduire à un État croupion autour de Sarajevo dont on pointera à nouveau le caractère musulman, donc exogène à l’Europe chrétienne, donc illégitime, donc à éliminer. Cette rhétorique identitaire, déjà à l’œuvre dans les années 1990 dans le discours de propagande serbe touchant aussi bien les Bosniaques que les Albanais du Kosovo, a retrouvé de la vigueur ces derniers temps, que ce soit dans les <a href="https://www.lepoint.fr/monde/le-massacre-de-christchurch-ravive-les-blessures-des-balkans-17-03-2019-2301722_24.php">inspirations</a> d’un terroriste suprémaciste à l’autre bout du monde ou dans les <a href="https://www.francesoir.fr/politique-france/grand-remplacement-et-kosovo-le-fantasme-de-zemmour-et-marion-marechal">discours de l’extrême droite française</a>.</p> <h3>Un projet loin d’être enterré</h3> <p>Ce «non papier» a donc des effets performatifs immédiats puisqu’il <a href="https://www.euractiv.com/section/politics/short_news/effects-of-non-paper-dodik-wants-peaceful-split-izetbegovic-thinks-war-possible/">crée des tensions</a> dans la région en alimentant les craintes des uns et les fantasmes des autres. On aurait tort de croire que son rejet immédiat suffira à enterrer ce dessein.</p> <p>Le précédent du <a href="https://www.frstrategie.org/publications/notes/serbie-kosovo-options-scenarios-2018">débat</a> sur le changement de frontière entre la Serbie et le Kosovo comme base d’un compromis en 2018 nous renseigne sur ce que deviennent des idées jetées en l’air, ou plus exactement sur des cartes. D’une idée marginale défendue dans certains cercles eux-mêmes marginaux, il n’a fallu que quelques mois pour qu’elle devienne la nouvelle martingale, défendue à la fois par les deux présidents de la Serbie et du Kosovo, mais aussi par une série de hauts responsables européens et américains (<a href="https://www.politico.eu/article/federica-mogherini-kosovo-serbia-defends-border-change-talks/">dont l’ancienne Haute Représentante Federica Mogherini</a>), non sans susciter quelques interrogations sur les pratiques employées pour se faire, <a href="https://prishtinainsight.com/border-changes-promoted-with-taxpayer-money/">notamment en France</a>. Seule l’Allemagne a alors campé sur sa position de principe qu’il ne fallait pas toucher aux frontières et que l’argument consistant à dire que « si tout le monde est d’accord sur place, qui sommes-nous pour l’empêcher ? » était purement rhétorique car ce « si » ne peut en aucun cas advenir.</p> <figure><iframe frameborder="0" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/A9Ri9QMIxt8?wmode=transparent&start=0" width="440"></iframe></figure> <p>Par conséquent, ce n’est pas parce que ce «non papier» et sa carte sont rejetés aujourd’hui que le sujet est fermé. Au contraire, il est désormais ouvert. Il suffira d’une crise sérieuse savamment orchestrée dans la région, d’une ouverture géopolitique avec un nouveau Trump à la Maison Blanche qui n’aura que faire des engagements historiques des Américains dans la région et raisonnera en termes ethnoreligieux, pour que les projets des années 1990, aujourd’hui ressuscités sous couvert de la prétendue possibilité de leur accomplissement pacifique, ne soient à nouveau considérés comme concevables par un plus grand nombre de décideurs.</p> <p>Impossible? Loin de là, puisque les dirigeants occidentaux sont ceux qui ont raisonné en ces termes dans les années 1990, qui ont accepté d’emblée les narratifs ethno-nationalistes dans les plans de paix en Bosnie, qui ont <a href="https://www.iris-france.org/87849-pourquoi-les-balkans-comptent-partie-2/">essentialisé une région réduite dans leur vision à des haines ancestrales</a>. Qu’on ne doute pas qu’il en serait à nouveau ainsi si la situation se représentait. Et c’est toute la stratégie d’un Dodik en Bosnie que de rendre le pays le plus dysfonctionnel possible, jusqu’à ce qu’une opportunité s’ouvre et que l’on se mette à accepter l’idée qu’après tout, si ça ne marche pas, il vaudrait peut-être mieux redécouper tout ça. À ceci près que, répétons-le, un tel développement déclenchera nécessairement un nouveau conflit armé.</p> <p>Enfin, ce «non papier» est aussi un signe qu’au sein de l’Europe, les forces illibérales, sous couvert de défense de l’identité chrétienne, balaient sans ciller les valeurs de l’UE, ses textes, et l’héritage des Pères fondateurs. Les propositions de ce document sont un retour à la diplomatie du XIX<sup>e</sup> siècle si bien que, si l’on suit cette logique, il n’y a aucune raison de considérer que le raisonnement proposé ne s’appliquerait pas à d’autres régions du monde dont on dirait qu’elles dysfonctionnent parce qu’elles ne sont pas des États-nations homogènes. 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Le sujet a également pesé sur le tout récent <a href="https://europeanwesternbalkans.com/2021/05/17/brdo-brijuni-declaration-eu-is-able-to-absorb-the-wb-serbias-phrasing-of-the-point-on-regional-borders-rejected/">sommet du groupe de Brdo-Brijuni</a>, une initiative diplomatique lancée par la Croatie et la Slovénie en 2013 en vue de collaborer à la stabilisation la région et d’accélérer les processus d’adhésion dans l’Union européenne des pays de la région des Balkans occidentaux.</p> <h3>«Achever la dissolution de la Yougoslavie»</h3> <p>Dans les <a href="https://ba.n1info.com/english/news/alleged-non-paper-on-wb-leaks-out-merging-of-rs-and-serbia-kosovo-and-albania/">grandes lignes</a>, ce document propose d’«achever la dissolution de la Yougoslavie» en résolvant les problèmes supposément laissés en suspens à la fin des années 1990.</p> <p>Autrement dit, il propose, carte à l’appui, de redessiner totalement les frontières de la région pour constituer des Etats ethniquement homogènes en procédant à un dépeçage de la Bosnie-Herzégovine, à une partition du Kosovo et de la Macédoine du Nord, et à un rétrécissement du déjà petit Monténégro au profit de l’Albanie, de la Croatie et de la Serbie qui en sortiraient agrandies.</p> <p>Le tout se ferait sans consultation des peuples concernés mais dans le cadre d’un grand accord diplomatique signé entre les gouvernements et parrainé par les Etats-Unis et l’Europe. Par exemple, la Bosnie ainsi dépecée, qui serait alors peuplée en très grande majorité de Bosniaques musulmans, procéderait à un référendum pour choisir entre un avenir européen ou «auprès de la Turquie» (sic).</p> <h4><img src="https://images.theconversation.com/files/400997/original/file-20210517-13-1q2hjpy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" alt="" /><span>La carte de la région si le projet slovène était mis en œuvre.</span> <span><span>News1.mk</span></span></h4> <p>Un tel big bang, alors que la Slovénie et son premier ministre, le très trumpiste <a href="https://www.lexpress.fr/actualite/monde/europe/slovenie-la-derniere-bataille-du-marechal-tweeto-janez-jansa_2139149.html">Janez Jansa</a>, prendront la présidence tournante de l’Union européenne le 1<sup>er</sup> juillet prochain, n’a pas manqué de faire réagir, à la fois <a href="https://www.courrierdesbalkans.fr/changer-les-frontieres-des-balkans-un-non-paper-qui-bouleverse-la-region">dans la région</a>, mais aussi au-delà, à Bruxelles et à <a href="https://euobserver.com/world/151572">Washington</a>. D’où qu’elles viennent, ces réactions sont unanimes dans la condamnation de ces propositions dont on souligne l’inanité et la dangerosité.</p> <p>Dès lors, puisque tout le monde semble opposé à ces idées, à tel point qu’on finit par se demander s’il s’est trouvé quelqu’un pour écrire ce document et tracer cette carte, quel intérêt y a-t-il à en discuter davantage? N’y a-t-il pas un risque d’en faire la promotion au prétexte de le combattre?</p> <h3>Une volonté d’homogénéisation ethnique des Etats</h3> <p>C’est pourtant un risque à prendre, pour plusieurs raisons. D’abord, Ljubljana entend faire des Balkans occidentaux l’une des priorités de sa présidence de l’UE. Pour des membres lointains de l’Union, il y a une tendance assez naturelle à s’en remettre à la Slovénie, elle-même issue de la Yougoslavie, pour traiter de ces questions, en considérant qu’elle en a la légitimité et les connaissances. Par conséquent, l’impact d’un document pareil n’est pas le même selon qu’il émane de la Slovénie ou, par exemple, de la Finlande ou du Portugal.</p> <p>Ensuite, quand bien même le document est condamné de toutes parts, il part d’un constat avec lequel on peut difficilement être en désaccord : les États candidats à l’intégration européenne n’ont strictement aucune perspective d’y parvenir à court et moyen terme (2025-2030) – sauf, peut-être, le Monténégro qui pourrait être sauvé par sa petite taille.</p> <p>Face à ce constat lucide, une approche consiste à considérer que le blocage est endogène au processus, en raison d’une double fatigue de la part de l’UE et des pays candidats, malgré le récent <a href="https://ec.europa.eu/neighbourhood-enlargement/news_corner/news/revised-enlargement-methodology-questions-and-answers_en">changement de méthodologie</a> exigé par la France et dont on verra s’il produit des effets positifs. On peut en douter.</p> <p>Une autre, défendue dans le fameux «non papier» slovène, estime que les Etats des Balkans occidentaux n’ont aucune chance de rejoindre l’UE parce qu’ils sont intrinsèquement dysfonctionnels car ethniquement hétérogènes, ce qui s’explique par le fait que le processus de dissolution de la Yougoslavie n’a pas été tout à fait mené à son terme. Le corollaire de cette hypothèse est que des États ethniquement homogènes (comme la Slovénie) seraient mieux à même de se développer, et donc de rattraper leur retard sur le plan économique et démocratique afin d’atteindre les standards européens. 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On emploie donc des formules et des périphrases qui masquent de moins en moins une réalité simple: ni du côté croate, ni du côté serbe on n’a renoncé au but de guerre commun de 1992, à savoir dépecer la Bosnie et la réduire à un État croupion autour de Sarajevo dont on pointera à nouveau le caractère musulman, donc exogène à l’Europe chrétienne, donc illégitime, donc à éliminer. 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Seule l’Allemagne a alors campé sur sa position de principe qu’il ne fallait pas toucher aux frontières et que l’argument consistant à dire que « si tout le monde est d’accord sur place, qui sommes-nous pour l’empêcher ? » était purement rhétorique car ce « si » ne peut en aucun cas advenir.</p> <figure><iframe frameborder="0" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/A9Ri9QMIxt8?wmode=transparent&start=0" width="440"></iframe></figure> <p>Par conséquent, ce n’est pas parce que ce «non papier» et sa carte sont rejetés aujourd’hui que le sujet est fermé. Au contraire, il est désormais ouvert. Il suffira d’une crise sérieuse savamment orchestrée dans la région, d’une ouverture géopolitique avec un nouveau Trump à la Maison Blanche qui n’aura que faire des engagements historiques des Américains dans la région et raisonnera en termes ethnoreligieux, pour que les projets des années 1990, aujourd’hui ressuscités sous couvert de la prétendue possibilité de leur accomplissement pacifique, ne soient à nouveau considérés comme concevables par un plus grand nombre de décideurs.</p> <p>Impossible? Loin de là, puisque les dirigeants occidentaux sont ceux qui ont raisonné en ces termes dans les années 1990, qui ont accepté d’emblée les narratifs ethno-nationalistes dans les plans de paix en Bosnie, qui ont <a href="https://www.iris-france.org/87849-pourquoi-les-balkans-comptent-partie-2/">essentialisé une région réduite dans leur vision à des haines ancestrales</a>. Qu’on ne doute pas qu’il en serait à nouveau ainsi si la situation se représentait. 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Cette déclaration est catégorique : « La guerre non provoquée et injustifiable de la Russie contre l’Ukraine, soutenue par le gouvernement biélorusse, est répugnante et constitue une violation flagrante de ses obligations internationales. » Ainsi, du point de vue sportif et diplomatique, la Russie se retrouve isolée.</p> <h3>La création d’un nouvel ordre mondial du sport ?</h3> <p>Dans les paroles et les actions, le pouvoir russe privilégie depuis le début de l’invasion la création d’un pôle sportif alternatif à l’échelle mondiale pour contrer les institutions sportives internationales traditionnelles telles que le CIO ou la Fifa.</p> <p>En pratique, cela impliquerait de se passer du sport mondial, de le remplacer ou de rivaliser avec lui. En Russie, par exemple, l’idée de diviser le mouvement olympique gagne du terrain. Il s’agirait de séparer les Jeux en deux parties : à l’Ouest, les Jeux occidentaux, et à l’Est, les Jeux russes « traditionnels ». Ces Jeux à la russe se dérouleraient en été en Crimée et en hiver à Sotchi. Ils puiseraient leur légitimité dans les liens historiques plus ou moins confirmés de ces régions avec la Grèce antique. En 2007, pour obtenir les Jeux de Sotchi, Vladimir Poutine avait rappelé aux membres du CIO que « les Grecs anciens ont vécu près de Sotchi. J’ai vu le rocher près de Sotchi où, selon la légende, Prométhée était enchaîné. Prométhée qui a donné le feu aux hommes, le feu qui est finalement la flamme olympique ». Depuis, l’argument du mythe est souvent utilisé pour évoquer cette région russe, composée du Caucase et de la péninsule de Crimée. 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Concomitante à une dynamique plus générale de désoccidentalisation du monde, cette influence dépasse très largement le cadre sportif.</p> <h3>Le sport ukrainien, c’est la guerre avec les balles</h3> <p>Depuis le 24 février 2022, pour Volodymyr Zelensky et l’Ukraine, le sport, c’est la <a href="https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/culturesmonde/le-sport-c-est-la-guerre-les-fusils-en-moins-g-orwell-1945-2-4-la-guerre-un-sport-comme-les-autres-7282852">guerre avec les balles</a>. En effet, à l’heure du conflit russo-ukrainien, le domaine sportif en Ukraine a subi une transformation significative.</p> <p>Initialement, au lendemain de l’invasion et sur une période de moins de deux mois, les autorités nationales ont suspendu l’ensemble des activités sportives en Ukraine. L’accent était alors mis sur l’effort de guerre, et les installations sportives ont été utilisées par les militaires ukrainiens comme bases de repli ou de déploiement. Cela explique pourquoi les installations sportives, telles que les stades ou les gymnases, sont souvent la cible des forces russes, car elles pourraient potentiellement abriter des unités ukrainiennes entières.</p> <p>Par la suite, lorsque l’armée russe a commencé à faire du surplace voire à reculer sur le terrain, le secteur sportif ukrainien a pris une nouvelle orientation. Certains clubs de football ont obtenu la permission de jouer des matchs de charité à l’étranger, malgré la loi martiale interdisant aux hommes âgés de 18 à 60 ans de quitter le territoire. Ces matchs visaient à sensibiliser à la cause ukrainienne. De même, les athlètes en préparation pour d’importantes compétitions ont pu s’entraîner à l’étranger.</p> <p>Par exemple, l’équipe nationale de football a été autorisée à s’entraîner en Slovénie pendant un mois en mai 2022 en vue des qualifications pour la Coupe du monde de football 2022 au Qatar. Ainsi, le soft power sportif a contribué symboliquement à l’effort de guerre. Les autorités estimaient qu’un athlète ukrainien était plus utile sur le terrain sportif que sur le front militaire. Selon elles, il offrait un double avantage en donnant à l’Ukraine une visibilité internationale et en pouvant potentiellement rehausser le moral des troupes déployées sur le terrain. Cette dimension ne doit pas être sous-estimée : une victoire sportive pour un athlète ukrainien procurait aux soldats, qui suivaient régulièrement les matchs et les résultats, un certain espoir et un regain de moral.</p> <p>À partir de la mi-juin 2022, le sport à l’échelle nationale a progressivement retrouvé sa place, bien que dans des conditions exceptionnelles. Par exemple, la Première Ligue ukrainienne de football a obtenu l’autorisation de débuter la saison 2022-2023 fin août. Toutefois, les règles ont été adaptées à la situation du moment. Les spectateurs ne sont plus autorisés à assister aux matchs, et ceux-ci nécessitent une autorisation systématique de l’administration militaire pour avoir lieu. Si une alerte de raid aérien potentiel retentit dans un rayon de moins de 500 mètres, le match est interrompu et les joueurs se réfugient dans les vestiaires, ce qui se produit régulièrement. Après un an et demi de guerre, aucun footballeur ukrainien n’a été blessé. Cependant, certains matchs ont duré plus de cinq heures au total.</p> <p>Paradoxalement, l’Ukraine continue de participer activement aux événements sportifs européens et mondiaux. Chaque compétition internationale offre l’opportunité aux autorités de promouvoir les intérêts du pays dans un contexte de guerre. De plus, certains clubs ukrainiens sont accueillis par les alliés géopolitiques les plus proches de l’Ukraine. Par exemple, le Dynamo Kyiv s’entraîne et joue certains de ses matchs à Cracovie, en Pologne. Dnipro, quant à lui, joue et s’entraîne à Košice, en Slovaquie, de manière permanente. En général, de nombreux athlètes et entraîneurs ukrainiens, actifs ou non, ont choisi de rejoindre le front dans l’est de l’Ukraine, mettant leur carrière en suspens. Le cas emblématique est peut-être celui de Yuriy Vernydub, entraîneur ukrainien du Sheriff Tiraspol, qui est parti au front dès le lendemain de l’invasion. Il est important de noter que ces professionnels du sport proviennent souvent de divisions sportives moins importantes. En effet, les athlètes de renom préfèrent généralement contribuer à l’effort de guerre d’un point de vue sportif et symbolique.</p> <p>Le cas des supporters des clubs ukrainiens est également notable. Depuis 2014 et surtout depuis l’invasion russe en Ukraine, de nombreux ultras ont rejoint le front pour combattre ensemble, mettant de côté leur rivalité sportive. En temps de paix rivaux, les supporters du Shakhtar Donetsk et du Dynamo Kyiv combattent ensemble contre leur ennemi commun.</p> <h3>La stratégie politique et sportive de Volodymyr Zelensky après l’invasion russe</h3> <p>Depuis le 24 février 2022, la stratégie internationale de Volodymyr Zelensky s’est intensifiée dans le domaine sportif, trouvant écho dans l’espace médiatique mondial. Les ministères, les organisations privées et le comité olympique ukrainien, tous les organes politiques, économiques et sportifs du pays sont mobilisés pour transmettre un message : l’exclusion de la Russie doit durer tant que l’invasion se poursuit.</p> <figure><iframe frameborder="0" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/YQiSJ3AO5CI?wmode=transparent&start=0" width="440"></iframe></figure> <p>Le hashtag #boycottrussiansport en est devenu le symbole. De manière concrète, les arguments ukrainiens peuvent être résumés en cinq points. La Russie devrait être exclue des événements sportifs mondiaux et des Jeux olympiques de Paris 2024 car elle est un État envahisseur et terroriste ; les athlètes russes sont de quelque manière liés à l’État russe ou à l’armée russe ; le régime de Vladimir Poutine exploite le sport à des fins de propagande ; dans de telles conditions, l’équité des compétitions sportives (Jeux olympiques, Coupe du monde, etc.) ne peut être maintenue ; les athlètes ukrainiens perdent la vie au front ou ne peuvent pas s’entraîner convenablement pour les grandes compétitions internationales, par conséquent la Russie et la Biélorussie ne devraient pas être autorisés à y participer.</p> <p>Pour diffuser ces arguments, le gouvernement ukrainien utilise divers canaux. Tout comme Volodymyr Zelensky utilise son smartphone pour communiquer avec différentes générations, les principaux porte-parole du sport ukrainien exploitent les canaux et les codes contemporains pour diffuser leur message. Les réseaux sociaux tels que TikTok, Facebook ou Instagram sont fréquemment utilisés pour diffuser des propos politiques liés au sport. On peut souvent voir circuler des vidéos de quelques secondes transmettant un message percutant. Par exemple, l’une de ces vidéos virales montre un athlète russe lançant un javelot dans les airs. Le javelot se transforme ensuite en obus, suit la trajectoire de l’athlète et finit par s’écraser sur un bâtiment ukrainien. Un message s’affiche alors à l’écran : « Boycott Russian Sport. »</p> <h4 style="text-align: center;"><a href="https://images.theconversation.com/files/592021/original/file-20240503-16-h8q7b1.jpeg?ixlib=rb-4.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img src="https://images.theconversation.com/files/592021/original/file-20240503-16-h8q7b1.jpeg?ixlib=rb-4.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" alt="" /></a></h4> <h4 style="text-align: center;"><em><span>Ces extraits sont issus de « La Guerre du sport. Une nouvelle géopolitique » de Lukas Aubin et Jean-Baptiste Guégan, qui vient de paraître aux éditions Tallandier.</span></em></h4> <p>En général, tous les médias sont utilisés par l’Ukraine pour défendre ses intérêts. Par exemple, le site web du ministère ukrainien de la Jeunesse et des Sports est en ukrainien, mais une bannière en gras et en anglais apparaît en haut de la page, indiquant : <a href="https://mms.gov.ua/russian-and-belarusian-athletes-who-support-the-war-in-ukraine">« Russian and Belarusian athletes who support the war in Ukraine. »</a> la bannière, les internautes ont accès à une liste d’athlètes russes et biélorusses soutenant officiellement l’invasion russe en Ukraine. 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Lire l’<a href="https://theconversation.com/geopolitique-du-sport-laffrontement-entre-la-russie-et-lukraine-229262">article original</a>.</h4> <h4><em>Lukas Aubin, directeur de recherche à l’IRIS, spécialiste de la géopolitique de la Russie et du sport et membre associé du Centre de Recherches Pluridisciplinaires Multilingues (CRPM) à l’université Paris-Nanterre, et Jean-Baptiste Guégan, expert en géopolitique du sport et enseignant à Sciences Po Paris, viennent de publier aux éditions Tallandier</em> <a href="https://www.tallandier.com/livre/la-guerre-du-sport/">La Guerre du Sport, une nouvelle géopolitique</a>, <em>un ouvrage complet qui met en lumière l’influence des grands enjeux internationaux sur un un monde du sport à l’apolitisme de plus en plus illusoire. 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Il y voyait un moyen efficace de lutter contre les maladies dues à une carence en vitamine A, très répandues en Asie du Sud-Est et qui peuvent entraîner la cécité, voire la mort. Potrykus était alors loin de se douter qu'un tribunal philippin retoquerait son invention un an et demi après son autorisation.</p> <h3>Syngenta acquiert des droits de brevet</h3> <p>La route a été longue jusqu'à la première récolte du riz doré: en 1999 déjà, Potrykus et son collègue Peter Beyer avaient présenté un prototype. Celui-ci contenait des gènes de jonquille qui produisaient de la provitamine A dans le grain de riz et le faisaient ainsi briller d'un jaune doré. En 2005, les chercheurs avaient développé une deuxième variante en collaboration avec le géant de l'agroalimentaire Syngenta. 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En effet, le corps humain n'utiliserait la provitamine A que s'il dispose de suffisamment de graisse, ce qui, selon Greenpeace, n'est souvent pas le cas chez ces personnes. De plus, il y aurait un risque que le riz génétiquement modifié, une fois introduit dans le champ, se reproduise de manière autonome, se propage et contamine ainsi d'autres variétés de riz. En raison de ces doutes, il a fallu attendre 16 ans de plus pour que les autorités philippines en charge de la biosécurité donnent finalement le feu vert à la culture du riz doré en 2021.</p> <h3>Le tribunal révoque l’autorisation</h3> <p>Mais aujourd'hui, une nouvelle décision de justice met déjà un frein à la propagation de la variété de riz transgénique. Ainsi, une Cour d'appel philippine a révoqué l'autorisation le 17 avril dernier en se référant au principe de précaution: «En l'absence de consensus scientifique sur la sécurité du riz doré, il ne devrait plus être cultivé à des fins commerciales». L'interdiction s'étend en outre à la culture d'une aubergine génétiquement modifiée. La culture commerciale de ces variétés n'est pas autorisée «jusqu'à ce que les autorités gouvernementales concernées apportent la preuve de la sécurité et du respect de toutes les exigences légales», précise le tribunal.</p> <p>Le tribunal a aussi relevé que le gouvernement n'avait pas mis en place de mécanismes de surveillance pour assurer la sécurité de la culture et de la consommation du riz doré. Le jugement met donc pour l'instant à l’arrêt de nouveaux essais menés en plein champ, dans des serres ou des champs ouverts.</p> <p>Ce jugement intervient après que l'association d'agriculteurs philippins MASIPAG a porté plainte, avec d'autres organisations, contre l'autorisation de cultiver du riz doré. La plainte, déposée en 2022, se base sur un instrument juridique philippin appelé Writ of Kalikasan. 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Les hôteliers-restaurateurs qui ont reçu l’aide de la Confédération à travers les banques pendant la pandémie peinent à la rembourser. Moins de 40% ont pu le faire. Nombre d’entre eux ont dû mettre la clé sous la porte. Et d’autres faillites sont en vue.', 'subtitle_edition' => 'Tel est le titre de l’éditorial de «L’Agefi» qui révèle une panne de l’après-Covid. Les hôteliers-restaurateurs qui ont reçu l’aide de la Confédération à travers les banques pendant la pandémie peinent à la rembourser. Moins de 40% ont pu le faire. Nombre d’entre eux ont dû mettre la clé sous la porte. Et d’autres faillites sont en vue.', 'content' => '<p><span>L’explication? Les affaires ont repris mollement, les habitudes de la clientèle ont changé, le coût de l’énergie a grimpé, comme tant d’autres prix. Les grandes enseignes s’en tirent, mais les modestes pintes, les petits hôtels n’arrivent plus à dégager des profits suffisants pour payer cette dette. 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