Actuel / Au Sénégal, une révolution dans les urnes
Bassirou Diomaye Faye, à gauche de l'écran, donne son premier discours après avoir été élu président du Sénégal au premier tour, avec 54% des suffrages. Capture d'écran TV5 Monde
L’élection à la présidence d’un jeune opposant au régime en place, porteur d’un ambitieux programme de «rupture», montre qu’un changement est possible dans le cadre d’un processus démocratique. Sans recourir aux armes.
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Oubliant peut-être un peu vite qu’il s’agit avant tout du sens de l’Histoire et que des troupes françaises stationnées en permanence sur le continent africain relèvent davantage d’un anachronisme datant de la période coloniale plutôt que d’une situation immuable qu’il s’agirait de préserver à tout prix.</p> <p>Une nouvelle génération de chefs d’Etat, chacun à sa manière, demeure en tout cas soucieuse de poser des actes symboliques visant à recouvrer la souveraineté de leur pays et à redéfinir leurs relations avec l’ex puissance coloniale, comme l’expriment régulièrement leurs concitoyens. 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Lors d’un dîner organisé en 2017 en marge de l’Assemblée générale de l’ONU, il avait même interloqué ses invités en déclarant, devant un parterre de chefs d’Etat africains: «L’Afrique a un potentiel commercial énorme; j’ai plein d’amis qui vont dans vos pays pour devenir riches, je vous félicite: ils dépensent beaucoup d’argent». Au cours de la même soirée, il avait félicité le «Nambia» pour ses réussites dans le domaine de la santé, un pays inconnu au bataillon.</p> <h3>Pékin et Moscou à l'offensive</h3> <p>Aujourd’hui, Pékin comme Moscou sont à l’offensive. Début septembre, une cinquantaine de dirigeants africains avaient ainsi été reçus en grande pompe par Xi Jinping à l’occasion du Forum pour la coopération sino-africaine qui a lieu tous les 3 ans, point fort de relations diplomatiques et économiques qui n’ont cessé de se développer. Les entreprises chinoises investissent les mines de lithium du Zimbabwe, celles de coltan et de cobalt de la République démocratique du Congo (RDC), et multiplient les contrats de BTP. Quant au Sommet Russie-Afrique qui s’est déroulé le week-end dernier à Moscou, il a également enregistré un nombre record de participants au plus haut niveau. A cette occasion, Vladimir Poutine a assuré les pays africains d’un «soutien total».</p> <p>Lors de ces forums, Pékin comme Moscou rivalisent d’injonctions anti-occidentales, tout en se présentant comme des remparts au néo-colonialisme. Conséquences diplomatiques de ces bonnes relations: la plupart des pays africains refusent toujours de condamner l’invasion de l’Ukraine par la Russie, et se gardent de toute critique à l’égard de la Chine concernant le sort des Ouïghours ou celui de Hong Kong. La nouvelle administration américaine va-t-elle s’engager davantage en faveur du continent africain pour y contrer l’influence russe et chinoise? Un des points sur lesquels Donald Trump est particulièrement attendu est celui de la prolongation de l’AGOA, l’African Growth and Opportunity Act, qui permet à des pays «amis», respectant certains critères, d’exporter leurs produits vers les Etats-Unis sans payer de taxes. Or, lors de son premier mandat, il avait déclaré que le programme ne serait pas renouvelé à son expiration en 2025. Une perspective qui inquiète plusieurs pays, parmi lesquels l’Afrique du Sud, l’un des plus grands exportateurs vers les Etats-Unis dans le cadre de l’AGOA.</p> <h3>Quelles conséquences du retour de Trump?</h3> <p>L’Afrique du Sud fait en tout cas partie des pays africains qui voient avec appréhension un retour de Donald Trump à la Maison Blanche. Son président Cyril Ramaphosa est en effet mal vu de certains ténors du Parti républicain pour avoir déposé une plainte contre l’Etat d’Israël auprès de la Cour internationale de justice. Des tensions entre les deux pays étaient déjà apparues lors du premier mandat de Donald Trump, lequel avait dénoncé ce qu’il appelle la «confiscation des terres aux fermiers blancs», surfant sur les théories de «génocide des Blancs» également partagées par un certain...Elon Musk. </p> <p>La victoire éclatante de Donald Trump à la tête des Etats-Unis oblige l’Afrique, comme le reste du monde, à imaginer les conséquences que cela va entraîner. Le président américain se montrera-t-il par exemple plus conciliant que l’administration Biden à l’égard des régimes dictatoriaux et des présidents à vie, comme le font la Chine et la Russie? L’Ouganda, mis à l’indexe par les USA en raison d’une loi condamnant à la peine de mort l’«homosexualité aggravée», sera-t-il réhabilité par l’Oncle Sam? 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Des espoirs qui risquent cependant d’être déçus, tant il est peu probable que les Etats-Unis renoncent à leur soutien au Rwanda et à son président Paul Kagame. Peu de chance également que Donald Trump se préoccupe davantage que son prédécesseur de la guerre civile au Soudan.</p> <h3><em>Africa First</em>?</h3> <p>Mais l’ex-nouveau président américain est tellement imprévisible qu’il ne faut jurer de rien. Tout particulièrement dans ce contexte où la Chine et la Russie multiplient les initiatives en direction de l’Afrique. Reste que sur le continent, on entend également des voix qui se réjouissent de l’arrivée de Trump et de son «<em>America First</em>», en espérant que cela inspirera les présidents africains à promouvoir le slogan «<em>Africa First</em>», et renoncer, enfin, à compter sur l’extérieur pour résoudre ses problèmes.</p>', 'content_edition' => 'Aujourd’hui, Pékin comme Moscou sont à l’offensive. 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Pourtant, durant des décennies, des dictateurs ont mené la vie dure à leurs compatriotes, sans que ni les USA, ni les pays européens ne songent à les déloger. «C’est un salaud, mais c’est notre salaud»: la formule qui eut son heure de gloire durant la Guerre froide conserve toute son actualité. Durant cette période en effet, les pays occidentaux soutinrent sans vergogne des autocrates sanguinaires, dont le seul mérite était de leur rester fidèles, sans céder aux sirènes de Moscou.</p> <h3>Deux poids, deux mesures</h3> <p>Depuis l’agression de l’Ukraine par la Russie, c’est une sorte de retour vers le passé. Les pays du Sud sont sommés de choisir leur camp. S’ils refusent de condamner la Russie, favorisent ses intérêts au détriment de ceux des pays occidentaux, ils sont vite considérés comme «ennemis». Si les relations devaient encore se durcir entre les Etats-Unis et la Chine, les pays d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine auraient également à choisir leur camp. Ce n’est donc pas le «bilan démocratique» qui primerait pour savoir si un pays est fréquentable, mais bien plutôt des considérations géopolitiques. C’est ainsi qu’en Côte d’Ivoire, pays fidèle à l’Occident dans un environnement régional qui lui est de plus en plus hostile, son Président n’a guère de souci à se faire s’il souhaite briguer un 4ème mandat en 2025 - même si cela serait contraire à la Constitution. Il y a fort à parier que, dans le contexte actuel, ni la France, ni l’Union européenne, ni les Etats-Unis ne lui en tiendraient rigueur.</p> <p>Le sentiment du «deux poids deux mesures» ressenti par de nombreux pays s’est encore renforcé depuis l’invasion de l’Ukraine et la riposte totalement disproportionnée d’Israël dans la bande de Gaza. Pourquoi un traitement aussi différencié de la part de la «communauté internationale» à l’égard de la Russie et à l’égard d’Israël, qui piétine le droit international en toute impunité? 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Un retournement de situation spectaculaire pour cet homme discret, qui, moins de dix jours auparavant, croupissait encore en prison. Tout comme son mentor, la figure phare de l’opposition sénégalaise Ousmane Sonko, lequel fait l’objet, depuis plusieurs années, d’un acharnement de la part du pouvoir en place, bien décidé à neutraliser son immense popularité et à l’empêcher de se présenter aux élections. En position d’inéligibilité, pour des condamnations fabriquées de toute pièce selon lui, Ousmane Sonko avait alors apporté son soutien à Bassirou Diomaye Faye, inspecteur des impôts, numéro deux de sa formation politique, le Pastef (Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité), lequel vient d’être élu le jour de ses 44 ans, lors d’un scrutin qui s’est déroulé dans le calme, et sans contestation – une gageure.
Dégager des élites corrompues
Dans un contexte où les Présidents élus s’accrochent au pouvoir, dévoient les institutions, où de jeunes militaires putschistes dénoncent l’injonction qui leur est faite par la communauté internationale d’organiser des élections, cette victoire incarne parfaitement la vitalité de la démocratie au Sénégal. Ainsi que la volonté d’en finir avec un système dont les Sénégalais ne veulent plus, incarné par des élites dirigeantes pratiquant l’entre-soi pour s’enrichir de manière éhontée, au détriment du plus grand nombre.
Est-ce pour cela que le nouveau Président démocratiquement élu fut qualifié de «candidat anti-système, radical, de rupture»? Il a en tout cas promis de combattre la corruption, de rétablir la «souveraineté» nationale, bradée selon lui à l’étranger; de renégocier les contrats miniers, gaziers et pétroliers, souvent déséquilibrés, ainsi que les accords de pêche, qui privent tant de Sénégalais de leur gagne-pain et les contraignent à émigrer; de mener des concertations pour sortir du franc CFA et de questionner la présence permanente, depuis l’indépendance du pays en 1960, de quelque 400 soldats français sur son sol. La France, ex-puissance coloniale, dont les entreprises sont omniprésentes, et plus généralement les pays occidentaux, se sentiront-ils menacés dans leurs intérêts par ce programme? Ou au contraire apporteront-ils au nouvel homme fort du Sénégal leur appui pour mener à bien les changements auxquels aspire une population dont 70% a moins de 30 ans?
Un message fort aux autres pays
Ce qui vient de se passer au Sénégal montre en tout cas aux autres pays qu’un changement est possible par la voie des urnes, dans le cadre d’un processus démocratique, sans avoir recours aux armes et aux coups d’Etat. Ce qui, dans le contexte actuel de l’Afrique de l’Ouest, est loin d’être une évidence. C’est également la démonstration qu’un scrutin régulier et transparent permet de faire émerger une nouvelle génération d’hommes et de femmes politiques. On peut donc parler d’une véritable bouffée d’air frais démocratique, alors que dans le même temps, dans plusieurs pays d’Afrique francophone, tels le Tchad et le Togo, les manœuvres vont bon train pour modifier les Constitutions, et permettre aux Présidents actuels, Mahamat Idriss Deby et Faure Gnassingbé, fils de leurs Présidents de pères, de se maintenir indéfiniment au pouvoir.
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L’ex-président Laurent Gbagbo, 78 ans, vient en effet d’annoncer qu’il sera à nouveau candidat en 2025, tandis que des groupes de soutien appellent d’ores et déjà l’actuel Président Alassane Ouattara, 82 ans, à briguer un quatrième mandat; et que seul le décès d’Henri Konan Bédié, à 89 ans, a permis à l’ex-CEO du Crédit Suisse Tidjane Thiam, 61 ans, de lui succéder à la tête de son parti. 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Les entreprises chinoises investissent les mines de lithium du Zimbabwe, celles de coltan et de cobalt de la République démocratique du Congo (RDC), et multiplient les contrats de BTP. Quant au Sommet Russie-Afrique qui s’est déroulé le week-end dernier à Moscou, il a également enregistré un nombre record de participants au plus haut niveau. A cette occasion, Vladimir Poutine a assuré les pays africains d’un «soutien total».</p> <p>Lors de ces forums, Pékin comme Moscou rivalisent d’injonctions anti-occidentales, tout en se présentant comme des remparts au néo-colonialisme. Conséquences diplomatiques de ces bonnes relations: la plupart des pays africains refusent toujours de condamner l’invasion de l’Ukraine par la Russie, et se gardent de toute critique à l’égard de la Chine concernant le sort des Ouïghours ou celui de Hong Kong. La nouvelle administration américaine va-t-elle s’engager davantage en faveur du continent africain pour y contrer l’influence russe et chinoise? 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Ce mélange des genres est à l’origine des nombreuses critiques dont l’Organisation fait régulièrement l’objet; accusée d’être le bras diplomatique de la France, y compris lors de la nomination de la Secrétaire générale, la Rwandaise Louise Mushikiwabo, imposée par Emmanuel Macron, dans le souci d’améliorer des relations très tendues avec le Rwanda et son président Paul Kagame.</p> <p>Pour une organisation qui prône des «valeurs partagées» de démocratie, respect des droits humains et bonne gouvernance, comment expliquer par ailleurs que peu avant le Sommet, la Guinée ait été réintégrée au sein de l’OIF, trois ans après sa suspension dans la foulée du coup d’Etat du général Mamadi Doumbouya – lequel n’entend aucunement rendre le pouvoir aux civils et fait régner un régime de terreur. Autres généraux putschistes non sanctionnés par Paris ayant participé au Sommet de la Francophonie: le général gabonais Oligui Neguema, ainsi que le Tchadien Mahamat Idriss Déby, lequel a récemment légalisé son coup d’Etat par des élections très contestées. Les trois dirigeants se voient en quelque sorte «récompensés» d’adopter une attitude moins virulente à l’égard de la France que leurs collègues putschistes du Mali, du Burkina Faso et du Niger, lesquels, eux, en totale rupture avec Paris, n’ont pas été invités. Renforçant ainsi un sentiment de «deux poids deux mesures» et de sanctions «à géométrie variable». </p> <h3>La langue française victime des tensions avec Paris</h3> <p>Par les temps qui courent, où la France perd de son influence sur le continent africain, l’OIF semble se montrer plus conciliante à l’égard de régimes qui, bien qu’autoritaires, renoncent à une confrontation dure voire une rupture complète avec la France. La Secrétaire générale de la Francophonie Louise Mushikiwabo regrette cependant que les tensions avec la France se répercutent sur l’usage de la langue française. Car dans plusieurs pays en délicatesse avec l’ex-métropole, le français a perdu son statut de langue officielle enseignée dans les écoles. C’était déjà le cas, entre autres, en Algérie et au Rwanda; le Niger, le Burkina Faso et le Mali semblent désormais vouloir leur emboîter le pas.</p> <p>Une lutte d’influence qui rappelle le temps de la guerre froide, où les pays africains faisaient monter les enchères auprès des pays occidentaux, en brandissant la menace d’un ralliement à Moscou. Un rapport de force manipulé par les «vieux crocodiles» de la Françafrique qu’Emmanuel Macron, lors de son premier mandat, avait tenté de convaincre, sans succès, de quitter leur palais. Après avoir fait amende honorable auprès des «amis» de la France, le président français a même appelé personnellement le président congolais Denis Sassou N’Guesso, 80 ans, 36 ans de pouvoir, pour le presser à prendre part au Sommet de la Francophonie, sans que celui-ci ne daigne y participer. Pas plus que le président camerounais Paul Biya, 90 ans, 41 ans de pouvoir, pourtant annoncé, lequel vient de rentrer dans son pays après 50 jours d’absence, dont un séjour prolongé à Genève où il a ses habitudes à l’Intercontinental – et des rumeurs persistantes sur son état de santé.</p> <h3>Et la Suisse?</h3> <p>Et la Suisse dans tout ça? Notre pays joue sa partition, bien que le français y soit minoritaire, et se hisse même, avec quelque 4 millions d’euros, au 3ème rang des contributeurs. Au sein de cette enceinte, la Suisse est également appréciée pour son engagement en matière de coopération francophone, via la DDC. 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Cela amène sans conteste de l’eau au moulin des autocrates et autres présidents à vie qui s’attaquent sans répit à «l’arrogance occidentale» et à sa volonté d’imposer un système démocratique et des valeurs qui ne seraient, selon eux, qu’un moyen déguisé de servir leurs propres intérêts.</p> <p>A force d’entendre Washington, Paris, Londres ou Berlin menacer, condamner, déplorer les aléas de leurs vies politiques – sans que jamais l’inverse ne soit envisageable – s’est répandu dans les pays du Sud un sentiment de rejet de l’Occident et de ses grands principes démocratiques, à géométrie variable. On ne dira jamais assez à quel point l’invasion de l’Irak, l’assassinat de Kadhafi, entre autres, ont laissé de traces dans l’inconscient collectif. Au nom de la démocratie, les pays occidentaux ont mis à mort les dirigeants de l’Irak et de la Libye, condamnant ces deux pays à un chaos dont ils ne sont toujours pas remis. Pourtant, durant des décennies, des dictateurs ont mené la vie dure à leurs compatriotes, sans que ni les USA, ni les pays européens ne songent à les déloger. «C’est un salaud, mais c’est notre salaud»: la formule qui eut son heure de gloire durant la Guerre froide conserve toute son actualité. Durant cette période en effet, les pays occidentaux soutinrent sans vergogne des autocrates sanguinaires, dont le seul mérite était de leur rester fidèles, sans céder aux sirènes de Moscou.</p> <h3>Deux poids, deux mesures</h3> <p>Depuis l’agression de l’Ukraine par la Russie, c’est une sorte de retour vers le passé. Les pays du Sud sont sommés de choisir leur camp. S’ils refusent de condamner la Russie, favorisent ses intérêts au détriment de ceux des pays occidentaux, ils sont vite considérés comme «ennemis». Si les relations devaient encore se durcir entre les Etats-Unis et la Chine, les pays d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine auraient également à choisir leur camp. Ce n’est donc pas le «bilan démocratique» qui primerait pour savoir si un pays est fréquentable, mais bien plutôt des considérations géopolitiques. C’est ainsi qu’en Côte d’Ivoire, pays fidèle à l’Occident dans un environnement régional qui lui est de plus en plus hostile, son Président n’a guère de souci à se faire s’il souhaite briguer un 4ème mandat en 2025 - même si cela serait contraire à la Constitution. Il y a fort à parier que, dans le contexte actuel, ni la France, ni l’Union européenne, ni les Etats-Unis ne lui en tiendraient rigueur.</p> <p>Le sentiment du «deux poids deux mesures» ressenti par de nombreux pays s’est encore renforcé depuis l’invasion de l’Ukraine et la riposte totalement disproportionnée d’Israël dans la bande de Gaza. Pourquoi un traitement aussi différencié de la part de la «communauté internationale» à l’égard de la Russie et à l’égard d’Israël, qui piétine le droit international en toute impunité? Ce ressenti est en tout cas largement exploité par la Russie et la Chine pour convaincre les pays du Sud de les rejoindre dans leur croisade contre l’hégémonie occidentale. Et d’adhérer aux BRICS, ce regroupement politico-économique de pays dits émergents, qui ambitionne de faire contre-poids à la suprématie de l’Occident. Avec succès: aux membres historiques que sont le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud – dont la première lettre forme l’acronyme BRICS – sont venus s'ajouter en 2024 l’Arabie saoudite, l’Argentine, l’Egypte, les Emirats arabes unis, l’Ethiopie, l’Iran; le Pakistan devrait les rejoindre en 2025.</p> <h3>Un discours anti-occidental pour éviter les élections</h3> <p>Les pays qui composent les BRICS sont tous, peu ou prou, autoritaires, prompts à discréditer les systèmes démocratiques. C’est également le cas du Mali, du Burkina Faso et du Niger, où des militaires putschistes semblent peu pressés de rendre le pouvoir aux civils et d’organiser des élections, comme les en presse la «communauté internationale». Pour s’en débarrasser et bien marquer leur volonté de rupture totale, ces trois pays se sont regroupés au sein d’une Alliance des Etats du Sahel (AES) et se sont rapprochés de la Russie, de l’Iran, de la Corée du Nord – en gros, des pays mis au ban par les Etats-Unis et l’Union européenne. </p> <p>L’exemple du Niger est particulièrement éclairant. Lorsque les putschistes ont renversé le président Mohamed Bazoum, démocratiquement élu, dont ils supportaient mal les velléités d’améliorer la gouvernance et de lutter contre la corruption, ils ont repris à leur compte un discours anticolonialiste et anti-occidental pour expliquer leur geste, et séduire leurs concitoyens. Le Mali et le Burkina Faso les ont précédés sur la même voie. 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Pourtant, pour ne pas laisser le champ libre à des autocrates, qui font fi des libertés individuelles de leurs concitoyens, une voix crédible, forte, est plus que jamais nécessaire au niveau international. Les pays européens ne doivent en effet pas abandonner les hommes et les femmes qui résistent en Russie, en Afghanistan, en Iran, en Chine, en Guinée, en Erythrée, en Biélorussie, en Birmanie, ainsi que dans de nombreux autres pays où les droits les plus élémentaires sont bafoués. 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VOS RÉACTIONS SUR LE SUJET
1 Commentaire
@Alain Schaeffer 29.03.2024 | 12h34
«Beau retournement de situation pour la démocratie sénégalaise, porteur d'espérance pour une grande partie de la population jeune qui émet le désir de partir en Europe, en prenant des risques importants lorsque passant à l'acte (30% des personnes quittant le pays en pirogue pour l'Espagne mourraient en mer selon les estimations).
La fin de la corruption, des relations justes avec les puissances étrangères garantissant l'indépendance, une exploitation juste des ressources nationales, tel est leur programme. On leur souhaite de pouvoir le réaliser.
Ousman Sonko et Bassirou Diomaye Faye sortent de prison le 14 mars, le second nouveau président entre en fonction le 2 avril moins de 3 semaines après. Le premier discours du président élu a été porté sur la réconciliation. Prions pour que l'ancienne opposition suivent les pas de Nelson Mandala dans cette voie. Tous les hommes politiques n'ont pas la chance d'être emprisonné pour leurs idées...puisque c'est un test de la profondeur de leurs convictions et qu'ils peuvent en tirer du bon suivant leur comportement à leur sortie !»