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Analyse

Analyse / Islamisme-Covid-19: fenêtres de tir pour l’Europe

Jean-Noel Cuénod

2 novembre 2020

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Impressionnante, la séquence de cette quinzaine en France… Assassinat de Samuel Paty par un islamiste. Déferlement de haine anti-française orchestrée par Erdogan dans le monde musulman. Reconfinement pour tenter d’endiguer la deuxième vague de Covid-19. Nouvel attentat à Nice. Ingérables par un seul pays, ces fléaux en rafale… Impopulaire l’Europe? Quels moyens pour faire sans elle?



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Sur le front islamiste, les réactions qui ont suivi la décapitation du professeur d’histoire-géo ont marqué un inquiétant basculement dans les relations entre musulmans et non-musulmans.

Auparavant, l’islamoterrorisme ne concernait qu’un nombre très réduit de musulmans lesquels, d’ailleurs, figurent encore, parmi ses principales victimes. Or, depuis l’intervention du président Macron à la suite de l’assassinat du professeur Paty, le présityran Erdogan a entraîné d’autres potentats musulmans pour menacer la France et injurier le chef de l’Etat français, après avoir grossièrement travesti les propos présidentiels. Ces responsables musulmans ne se montrent guère offusqués par la décapitation du prof et ne l’ont réprouvée que du bout des lèvres, moins que le minimum syndical; une telle modestie dans le reproche pourrait même faire penser à une hypocrite caution donnée à l’assassin décapiteur.

La liberté comme objet de scandale

Ce qui les a scandalisés, ces despotes? Qu’Emmanuel Macron souligne l’importance essentielle de la liberté d’expression et le fait que les caricatures ne sauraient être interdites en France pour cause de blasphème. Il n’a fait là que réaffirmer un principe démocratique, sans insulter ni l’islam ni les musulmans.

La réaction hystérique à ces propos somme toute bénins illustre la profondeur et la largeur du fossé qui s’est creusé entre de nombreux dirigeants d’Etats musulmans et les pays d’Europe. Désormais, l’ordre démocratique n’est pas seulement contesté sur la scène politique mondiale par Daech, Al Qaïda et autres groupuscules islamistes, il l’est aussi par des potentats d’Etats qui sont représentés aux Nations-Unies.

Ce n’est pas encore le choc des civilisations prédit par Samuel Huntington mais en est-on si loin que cela? Surtout, lorsqu’on prend connaissance de l’appel à la violence lancée par Matahir Mohamad qui fut premier ministre de la Malaisie jusqu’au 24 février dernier: «Les musulmans ont le droit d'être en colère et de tuer des millions de Français pour les massacres commis dans le passé», a-t-il notamment twitté (lire aussi cet article du Monde).

La France n’est pas seule visée

Pour l’instant, la France est l’objet des attaques les plus directes. Mais c’est le mode de vie démocratique incarné par les pays européens qui est l’objet principal de cette agression. Incapables de gérer correctement leurs Etats, ces potentats musulmans craignent que leurs sujets se soulèvent contre eux. En désignant, la France, mais aussi la démocratie et l’Europe, ils canalisent ainsi la colère de leurs populations vers des rivages éloignés de leurs palais. Schéma on ne peut plus classique. Mais que l’usure du temps ne semble pas altérer.

Ce faisant, leurs appels à la haine antidémocrate ne reste pas sans échos auprès des ressortissants musulmans des pays européens. D’où l’importance de ne pas se couper d’eux par des lois discriminatoires et liberticides. Il faut faire des musulmans européens nos alliés et non nos adversaires.

Mais pour ce faire, les pays d’Europe doivent agir de façon concertée et mettre en commun toutes leurs expériences en matière de relations avec les musulmans afin de déterminer une politique européenne face à l’islamisme et coordonner les services de renseignements afin de faire circuler plus rapidement toutes les données nécessaires pour répliquer à l’islam politique.

Covid-19 a pris de vitesse tous les pays d’Europe

Sur le front du Covid-19 également, le stade des réponses contradictoires doit être dépassé. Le coronavirus se répand à une vitesse fulgurante qui a pris de cours tous les Etats européens et démontre qu’aucune de leurs mesures prises de façon non-concertées ne s’est montrée efficace pour parer à l’actuelle deuxième vague.

Face à une telle déferlante mondiale la bonne réponse ne peut être que globale. Autant commencer à faire front au sein de l’Europe. A quand un Conseil européen de défense sanitaire qui engloberait évidemment tous les pays européens et pas seulement ceux de l’UE[1]?

Outre l’islamoterrorisme et le coronavirus, un autre péril menace les Etats de notre continent: le déclin rapide des Etats-Unis. Trump n’en est pas la cause mais le symptôme. Même si le démocrate Biden est élu – ce qui est loin d’être acquis – la politique de retrait américain de l’Europe se poursuivra selon toute vraisemblance. Elle fut amorcée, non par Trump, mais par Barak Obama dont Jo Biden était le vice-président.

Rêves turcs et russes: un cauchemar européen

Or, les pays d’Europe sont confrontés aux rêves russe et turcs qui peuvent se muer en cauchemar. Poutine cherche à reconstituer l’empire soviétique et lorgne vers les pays baltes membres de l’Union européenne. Erdogan veut ouvrir à nouveau la Sublime Porte au vaste espace ottoman, quitte à menacer deux membres de l’UE, Chypre et la Grèce.

La faiblesse militaire de l’Europe a de quoi aiguiser les appétits russes et turcs, d’autant plus que l’armée française reste mobilisée au Sahel contre l’islamoterrorisme. Par conséquent, la question n’est plus de savoir s’il faut ou non créer une force armée européenne mais quand elle le sera. Pas trop tard, de préférence!

Par l’action des fléaux actuels, des fenêtres de tirs se sont donc ouvertes aux espoirs d’unité européenne. Le plus dur reste à faire: agir.


[1] Note à l’intention des médias français qui ne parviennent toujours pas à situer la Suisse sur une carte: le Covid-19 circule aussi dans les trams 17 et 3 qui relient en quelques minutes les villes helvétiques de Genève et Bâle à leurs voisines françaises d’Annemasse et de Saint-Louis.

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VOS RÉACTIONS SUR LE SUJET

1 Commentaire

@hermes 25.12.2020 | 16h44

«Les fléaux actuels mentionnés dans l'article sont l'illustration des risques qui pèsent sur le continent si chaque état européen agit seul dans son pré-carré. Les doutes sur la nécessité et l'utilité de l'UE n'habitent que ceux qui s'obstinent à ne pas réfléchir. Chaque fois que les états membres de l'UE ont refusé, par réflexe national, à déléguer à l'UE des tâches qu'elle pouvait accomplir avec plus d'efficacité, cela a conduit à l'affaiblissement du continent. Chacun a pu le vérifier lors des crises financière, migratoire ou même sanitaire jusqu'à ce que les pas nécessaires soient enfin franchis pour régler le problème au niveau de l'UE. A l'inverse, l'unité européenne autour du négociateur Barnier a montré toute son efficacité dans la gestion du Brexit pour désamorcer les tentatives de Londres de l'affaiblir. Enfin, face aux autocrates de tous poils qui rêvent de torpiller la démocratie, il paraît inévitable et nécessaire de réarmer le continent afin de montrer les muscles à ceux qui ne comprennent que la force.»


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