Histoire / De la chute de Rome au déclin de l'Occident
Thomas Couture, "Les Romains de la décadence" (détail),1847.
L'Histoire s'écrit au présent. A chaque époque, nous regardons le passé avec nos préoccupations du moment et dans le souci de justifier nos orientations éthiques et politiques. Ainsi en est-il du regard porté sur la chute de l'empire romain.
Article publié sur Herodote.net le 20 mai 2020
Au Siècle des Lumières, le très voltairien Edward Gibbon a naturellement voulu voir dans le christianisme le principal responsable de la chute de Rome. Au siècle suivant, dans une Europe impérialiste confrontée à des peuples «attardés», c'est la pression barbare qui est apparue comme le facteur principal. Au XXème siècle, en marge du conflit entre le capitalisme et le marxisme, on a plutôt privilégié la crise économique et sociale. Enfin, faut-il s'en étonner? en notre XXIème siècle tourmenté par la menace climatique, un historien américain, Kyle Harper, incrimine une éruption volcanique en Islande suivie d'une épidémie de peste au milieu du VIème siècle, sous le règne de Justinien.
Toutes ces explications ont leur part de vérité mais aucune ne saurait bien évidemment tout expliquer à elle seule...
Décadence? Vous avez dit décadence?
La chute de l'empire romain inspire les historiens depuis qu'en 1734, Charles de Montesquieu publia un premier essai: Considérations sur les causes de la grandeur des Romains et de leur décadence. Le philosophe analyse avec finesse l'évolution de Rome, la perte d'esprit civique dans les classes supérieures, le despotisme qui annihile l'esprit républicain, l'entretien de plus en plus coûteux de l'armée etc.
Une génération plus tard, dans une époque dominée par l'anticléricalisme militant, le voltairien Edward Gibbon montre moins de subtilité. Son père l'ayant envoyé en Suisse pour le guérir de sa conversion au catholicisme, il revient à la religion anglicane et surtout acquiert une culture encyclopédique qui l'amène à écrire une monumentale histoire de Rome: Le déclin et la chute de l'Empire romain (1776). C'est une réflexion bien dans l'esprit du temps qui lui vaut un beau succès en librairie. L'auteur aborde son sujet avec autant d'érudition que de flegme. «L'Histoire n'est au fond guère plus que le registre des crimes et des folies de l'humanité », écrit-il.
Il fait porter la responsabilité du déclin de Rome sur le triomphe du christianisme et la diffusion du monachisme: «On consacrait sans scrupule aux usages de la charité ou de la dévotion une grande partie des richesses du public et des particuliers ; et la paye des soldats était prodiguée à une multitude oisive des deux sexes, qui n'avait d'autres vertus que celles de l'abstinence et de la chasteté» (Histoire de la décadence et de la chute de l'empire romain, 1776).
A la suite de Gibbon, le XIXème siècle voit affleurer dans les milieux intellectuels et artistiques l'appréhension d'une décadence des mœurs. C'est ce que reflète en 1847 le succès de la grande toile de Thomas Couture: Les Romains de la décadence, saluée comme un chef-d’œuvre. Un cénacle littéraire est plus tard qualifié de Décadents (Octave Mirbeau, Jules Barbey d'Aurevilly, Auguste de Villiers de l'Isle-Adam...), dans un parallèle avec ces Romains de pacotille.
En 1919, après la Première Guerre mondiale, Paul Valéry écrit dans La Crise de l'Esprit:
«Nous autres, civilisations, nous savons maintenant que nous sommes mortelles. Nous avions entendu parler de mondes disparus tout entiers, d'empires coulés à pic avec tous leurs hommes et tous leurs engins ; descendus au fond inexplorable des siècles avec leurs dieux et leurs lois, leurs académies et leurs sciences pures et appliquées (...). Tout ne s'est pas perdu mais tout s'est senti périr. Un frisson extraordinaire a couru la moelle de l'Europe (...)», avec là aussi une référence implicite à Rome.
Trois ans plus tard, l'Allemand Oswald Spengler publie Le Déclin de l'Occident, une volumineuse réflexion d'actualité qui fait référence au sort tragique de l'empire romain et établit un parallèle avec le précédent conflit qui a brisé net l'essor de l'Europe.
En 1947, l'historien André Piganiol analyse la chute de l'empire romain d'après ce qu'il a vu de la France et de sa civilisation, qui frôlèrent la mort clinique suite à l'invasion de la Wehrmacht. Rétrospectivement, il frémit à la pensée de ce qu'il serait advenu de la France si les Germains l'avaient une nouvelle fois emporté: «Le Bas-Empire est habituellement considéré comme le type même d’une époque de décadence (…) Il est trop commode de prétendre qu’à l’arrivée des barbares dans l’empire tout était mort, c’était un corps épuisé, un cadavre étendu dans son sang (…) La civilisation romaine n’est pas morte de sa belle mort. Elle a été assassinée» (L'Empire chrétien, 1947).
Au milieu du XXème siècle, de 1934 à 1961, le grand historien britannique Arnold J. Toynbee publie une Etude de l'Histoire (A study of History) en douze volumes qui ramène l'Histoire universelle à un écheveau de civilisations qui naissent, croissent et meurent. Et que croyez-vous qu'il découvre? Que son époque dominée par le face-à-face entre les démocraties occidentales et les régimes totalitaires d'Allemagne et surtout d'URSS compte une «civilisation occidentale» qui réunit comme par hasard l'Europe occidentale et le Nouveau Monde et une «civilisation orthodoxe» qui réunit les pays du bloc communiste et quelques autres.
Avec la fin de la guerre froide et l'irruption de la Grande Crise européenne, changement de perspective. L'Europe et l'Amérique du Nord tombent de leur piédestal et se voient concurrencées avec succès par la Chine et l'Extrême-Orient. Ils connaissent aussi des vagues d'immigration sans précédent dans l'histoire humaine. La bienséance et l'obligation de faire bonne figure conduisent les historiens à revoir leur copie: le déclin de Rome et les grandes invasions ne sont plus perçues comme des catastrophes mais comme des renaissances!
Dans Le Monde de l'Antiquité tardive (1971), l'historien irlandais Peter Brown remet au goût du jour le concept allemand d'Antiquité tardive, plus convenable que celui de Bas-Empire, pour désigner les derniers siècles de l'empire d'Occident. Il étend même ce concept du IIIème au VIIIème siècle, de Caracalla à Charles Martel, et fait valoir que cette époque s'est accompagnée d'innovations notables dans les techniques et la pensée politique!
Peter Brown et ses disciples minorent parallèlement l'effondrement des conditions de vie dans cette longue période et évoquent non plus le «déclin» ou la «chute» de l'empire romain mais sa «transformation» ou son «accommodement». Ce dernier mot, employé par le Canadien Walter Goffart en 1980, est une façon de rassurer les Occidentaux qui pourraient s'inquiéter des phénomènes en cours en ce XXIème siècle, notamment le départ vers l'Asie de leur savoir-faire industriel et l'arrivée massive de populations démunies sur les rives de la Méditerranée...
L'historien français Henri-Irénée Marrou reprend le concept d'Antiquité tardive dans un essai posthume: Décadence romaine ou antiquité tardive ? IIIe-IVe siècle (1977) mais le limite sagement aux deux siècles précédant les grandes invasions du Vème siècle. Il montre que, de fait, ces deux siècles ont été à l'origine de nombreuses innovations techniques et intellectuelles: le vêtement cousu, le livre relié, le moulin à eau et le moulin à vent, le néo-platonicisme et les Pères de l'Église, etc.
Cette Antiquité tardive se prolonge bien au-delà du IVème siècle à Byzance. «Quelle grandeur manifeste cette romanité orientale! Ainsi dans l'art: prenons comme symbole Sainte-Sophie. Après tout, il n'y a pas tant de monuments qu'on puisse, comme celui-là, situer au même niveau de perfection que le Parthénon ou Notre-Dame de Chartres».
Ces innovations ne s'épanouirent pleinement que six siècles plus tard, aux alentours de l'An Mil, après que l'Occident eût retrouvé une certaine stabilité avec la fin des invasions.
Les Barbares ont bien existé
Aujourd'hui, l'archéologue britannique Bryan Ward-Perkins dénonce l'irénisme de Peter Brown et de ses disciples dans un essai décapant: La chute de Rome, Fin d'une civilisation (Oxford, 2005, traduction française: Alma, 2014). Il remet les pendules à l'heure... et les Barbares à leur place. «Dans la majeure partie de l'Orient méditerranéen et dans certaines parties de l'Occident, des fouilles et des prospections ont permis de conclure à l'existence d'une économie florissante de l'Empire tardif». Cette prospérité permet d'entretenir une armée professionnelle qui comprend pas moins de 600'000 soldats.
Mais les conditions relativement clémentes de la vie, en Occident, au IVème siècle, se dégradent considérablement au cours de la première décennie du Vème. «Du fait des invasions, c'est évident», souligne Bryan Ward-Perkins. Il a beau jeu de rappeler aussi les chroniques du Vème siècle, celui d'Alaric, de Saint Augustin, d'Attila et de Clovis. Elles mettent en évidence la violence des rapports entre Barbares et Romains dans la partie occidentale de l'Empire.
L'Orient romain échappe à ce mauvais sort, malgré la sévère défaite de l'empereur Valens face aux Goths, devant Andrinople, en 378. «Question de chance... et peut-être aussi de meilleure gestion politique».
Et l'archéologue de conclure: «Les Romains, avant la chute, étaient aussi convaincus que nous le sommes, nous aujourd'hui, que leur monde resterait pour l'essentiel, tel qu'il était. Ils avaient tort. A nous de ne pas répéter leur erreur et de ne pas nous bercer d'une fallacieuse assurance».
Des «Barbares» instrumentalisés par le pouvoir
Arnold Toynbee, s'inspirant de l'historien arabe Ibn Khaldoun (1332-1406), voyait dans la mort de l'empire romain et de toutes les grandes civilisations la conjonction entre l'assaut des «prolétaires extérieurs» – les Barbares – et la défection des «prolétaires intérieurs»... On croirait lire La France périphérique de Christophe Guilluy (Flammarion 2014). Géographe classé à gauche, Christophe Guilluy montre comment les classes dirigeantes actuelles ont conclu une alliance paradoxale avec les populations immigrées cependant que les classes populaires ont été reléguées dans les zones périurbaines. Sans évoquer l'Histoire et la chute de Rome, il apporte ainsi sa contribution au «déclinisme». L'historien français Gabriel Martinez-Gros, spécialiste d'Ibn Khaldoun, a de son côté remis au jour la thèse d'Arnold Toynbee dans un essai en tous points remarquable: Brève histoire des empires, comment ils surgissent, comment ils s'effondrent (Seuil, 2014). Il explique comment les «Empires», à commencer par l'empire romain, ont assuré leur pérennité en désarmant leurs sujets pour mieux les pressurer et en utilisant le produit des impôts pour recruter des troupes parmi les guerriers qui nomadisent aux frontières...
Petite chronologie de la Rome décadente
17 mars 180 : mort de l'empereur Marc-Aurèle
Fin du Siècle d'Or des Antonins, début du Bas Empire.
Septembre 270 : avènement d'Aurélien, premier des empereurs illyriens
Rome est ceinturée de remparts.
13 juin 313 : Constantin promulgue l'édit de Milan et légalise le christianisme.
9 août 378 : l'empereur Valens est battu et tué par les Wisigoths, à l'issue de la bataille d'Andrinople.
17 juin 395 : mort de Théodose 1er, dernier empereur romain
Après lui, l'Orient et l'Occident romains ne referont plus leur unité.
31 décembre 406 : les Barbares en armes franchissent le Rhin.
24 août 410 : sac de Rome par Alaric.
27 décembre 537 : l'empereur d'Orient Justinien inaugure Sainte-Sophie
À la fois une fin, celle de l'Antiquité païenne, et un commencement, celle de l'Orient byzantin.
Notice (8): Trying to access array offset on value of type null [APP/Template/Posts/view.ctp, line 147]Code Context<div class="col-lg-12 order-lg-4 order-md-4">
<? if(!$connected['active']): ?>
<div class="utils__spacer--default"></div>
$viewFile = '/data01/sites/bonpourlatete.com/dev/bonpourlatete.com/src/Template/Posts/view.ctp' $dataForView = [ 'referer' => '/', 'OneSignal' => '8a2ea76e-2c65-48ce-92e5-098c4cb86093', '_serialize' => [ (int) 0 => 'post' ], 'post' => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 4307, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => true, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => null, 'readed' => null, 'subhead' => null, 'title' => 'De la chute de Rome au déclin de l'Occident', 'subtitle' => 'L'Histoire s'écrit au présent. A chaque époque, nous regardons le passé avec nos préoccupations du moment et dans le souci de justifier nos orientations éthiques et politiques. Ainsi en est-il du regard porté sur la chute de l'empire romain.', 'subtitle_edition' => 'L'Histoire s'écrit au présent. A chaque époque, nous regardons le passé avec nos préoccupations du moment et dans le souci de justifier nos orientations éthiques et politiques. Ainsi en est-il du regard porté sur la chute de l'empire romain.', 'content' => '<p style="text-align: center;">Article publié sur <a href="https://www.herodote.net/De_la_chute_de_Rome_au_declin_de_l_Occident-synthese-1952-290.php" target="_blank" rel="noopener">Herodote.net</a> le 20 mai 2020</p> <hr /> <p>Au Siècle des Lumières, le très voltairien Edward Gibbon a naturellement voulu voir dans le christianisme le principal responsable de la chute de Rome. Au siècle suivant, dans une Europe impérialiste confrontée à des peuples <em>«attardés»</em>, c'est la pression barbare qui est apparue comme le facteur principal. Au XXème siècle, en marge du conflit entre le capitalisme et le marxisme, on a plutôt privilégié la crise économique et sociale. Enfin, faut-il s'en étonner? en notre XXIème siècle tourmenté par la menace climatique, un historien américain, Kyle Harper, incrimine une éruption volcanique en Islande suivie d'une épidémie de peste au milieu du VIème siècle, sous le règne de Justinien.</p> <p>Toutes ces explications ont leur part de vérité mais aucune ne saurait bien évidemment tout expliquer à elle seule... </p> <h3>Décadence? Vous avez dit décadence?</h3> <p>La chute de l'empire romain inspire les historiens depuis qu'en 1734, <a href="https://www.herodote.net/Charles_de_Montesquieu_1689_1755_-synthese-219.php">Charles de Montesquieu</a> publia un premier essai: <em>Considérations sur les causes de la grandeur des Romains et de leur décadence</em>. Le philosophe analyse avec finesse l'évolution de Rome, la perte d'esprit civique dans les classes supérieures, le despotisme qui annihile l'esprit républicain, l'entretien de plus en plus coûteux de l'armée etc.</p> <p>Une génération plus tard, dans une époque dominée par l'anticléricalisme militant, le voltairien Edward Gibbon montre moins de subtilité. Son père l'ayant envoyé en Suisse pour le guérir de sa conversion au catholicisme, il revient à la religion anglicane et surtout acquiert une culture encyclopédique qui l'amène à écrire une monumentale histoire de Rome: <em>Le déclin et la chute de l'Empire romain</em> (1776). C'est une réflexion bien dans l'esprit du temps qui lui vaut un beau succès en librairie. L'auteur aborde son sujet avec autant d'érudition que de flegme. <em>«L'Histoire n'est au fond guère plus que le registre des crimes et des folies de l'humanité »</em>, écrit-il.</p> <p>Il fait porter la responsabilité du déclin de Rome sur le triomphe du christianisme et la diffusion du <a href="https://www.herodote.net/Moines_et_abbayes-synthese-2060.php">monachisme</a>: <em>«On consacrait sans scrupule aux usages de la charité ou de la dévotion une grande partie des richesses du public et des particuliers ; et la paye des soldats était prodiguée à une multitude oisive des deux sexes, qui n'avait d'autres vertus que celles de l'abstinence et de la chasteté»</em> (<em>Histoire de la décadence et de la chute de l'empire romain</em>, 1776).</p> <p>A la suite de Gibbon, le XIXème siècle voit affleurer dans les milieux intellectuels et artistiques l'appréhension d'une décadence des mœurs. C'est ce que reflète en 1847 le succès de la grande toile de Thomas Couture: <em>Les Romains de la décadence</em>, saluée comme un chef-d’œuvre. Un cénacle littéraire est plus tard qualifié de <em>Décadents</em> (Octave Mirbeau, Jules Barbey d'Aurevilly, Auguste de Villiers de l'Isle-Adam...), dans un parallèle avec ces Romains de pacotille.</p> <p>En 1919, après la Première Guerre mondiale, Paul Valéry écrit dans <em>La Crise de l'Esprit</em>:<br /><em>«Nous autres, civilisations, nous savons maintenant que nous sommes mortelles. Nous avions entendu parler de mondes disparus tout entiers, d'empires coulés à pic avec tous leurs hommes et tous leurs engins ; descendus au fond inexplorable des siècles avec leurs dieux et leurs lois, leurs académies et leurs sciences pures et appliquées (...). Tout ne s'est pas perdu mais tout s'est senti périr. Un frisson extraordinaire a couru la moelle de l'Europe (...)»</em>, avec là aussi une référence implicite à Rome.</p> <p>Trois ans plus tard, l'Allemand Oswald Spengler publie <em>Le Déclin de l'Occident</em>, une volumineuse réflexion d'actualité qui fait référence au sort tragique de l'empire romain et établit un parallèle avec le précédent conflit qui a brisé net l'essor de l'Europe.</p> <p>En 1947, l'historien André Piganiol analyse la chute de l'empire romain d'après ce qu'il a vu de la France et de sa civilisation, qui frôlèrent la mort clinique suite à l'invasion de la <em>Wehrmacht</em>. Rétrospectivement, il frémit à la pensée de ce qu'il serait advenu de la France si les Germains l'avaient une nouvelle fois emporté: <em>«Le Bas-Empire est habituellement considéré comme le type même d’une époque de décadence (…) Il est trop commode de prétendre qu’à l’arrivée des barbares dans l’empire tout était mort, c’était un corps épuisé, un cadavre étendu dans son sang (…) La civilisation romaine n’est pas morte de sa belle mort. Elle a été assassinée»</em> (L'Empire chrétien, 1947).</p> <p>Au milieu du XXème siècle, de 1934 à 1961, le grand historien britannique Arnold J. Toynbee publie une <em>Etude de l'Histoire</em> (<em>A study of History</em>) en douze volumes qui ramène l'Histoire universelle à un écheveau de civilisations qui naissent, croissent et meurent. Et que croyez-vous qu'il découvre? Que son époque dominée par le face-à-face entre les démocraties occidentales et les régimes totalitaires d'Allemagne et surtout d'URSS compte une <em>«civilisation occidentale» </em>qui réunit comme par hasard l'Europe occidentale et le Nouveau Monde et une <em>«civilisation orthodoxe»</em> qui réunit les pays du bloc communiste et quelques autres.</p> <p>Avec la fin de la guerre froide et l'irruption de la <a href="https://www.herodote.net/Une_histoire_de_la_Grande_Crise-synthese-1766.php">Grande Crise européenne</a>, changement de perspective. L'Europe et l'Amérique du Nord tombent de leur piédestal et se voient concurrencées avec succès par la Chine et l'Extrême-Orient. Ils connaissent aussi des vagues d'immigration sans précédent dans l'histoire humaine. La bienséance et l'obligation de faire bonne figure conduisent les historiens à revoir leur copie: le déclin de Rome et les grandes invasions ne sont plus perçues comme des catastrophes mais comme des renaissances!</p> <p>Dans <em>Le Monde de l'Antiquité tardive</em> (1971), l'historien irlandais Peter Brown remet au goût du jour le concept allemand d'Antiquité tardive, plus convenable que celui de Bas-Empire, pour désigner les derniers siècles de l'empire d'Occident. Il étend même ce concept du IIIème au VIIIème siècle, de <a href="https://www.herodote.net/Bio/Caracalla-biographie-Q2FyYWNhbGxh.php">Caracalla</a> à <a href="https://www.herodote.net/25_octobre_732-evenement-7321025.php">Charles Martel</a>, et fait valoir que cette époque s'est accompagnée d'innovations notables dans les techniques et la pensée politique!</p> <p>Peter Brown et ses disciples minorent parallèlement l'effondrement des conditions de vie dans cette longue période et évoquent non plus le <em>«déclin»</em> ou la <em>«chute»</em> de l'empire romain mais sa <em>«transformation»</em> ou son <em>«accommodement»</em>. Ce dernier mot, employé par le Canadien Walter Goffart en 1980, est une façon de rassurer les Occidentaux qui pourraient s'inquiéter des phénomènes en cours en ce XXIème siècle, notamment le départ vers l'Asie de leur savoir-faire industriel et l'arrivée massive de populations démunies sur les rives de la Méditerranée...</p> <p>L'historien français Henri-Irénée Marrou reprend le concept d'Antiquité tardive dans un essai posthume: <em>Décadence romaine ou antiquité tardive ? IIIe-IVe siècle</em> (1977) mais le limite sagement aux deux siècles précédant les grandes invasions du Vème siècle. Il montre que, de fait, ces deux siècles ont été à l'origine de nombreuses innovations techniques et intellectuelles: le vêtement cousu, le livre relié, le moulin à eau et le moulin à vent, le néo-platonicisme et les Pères de l'Église, etc.</p> <p>Cette Antiquité tardive se prolonge bien au-delà du IVème siècle à Byzance. <em>«Quelle grandeur manifeste cette romanité orientale! Ainsi dans l'art: prenons comme symbole Sainte-Sophie. Après tout, il n'y a pas tant de monuments qu'on puisse, comme celui-là, situer au même niveau de perfection que le Parthénon ou Notre-Dame de Chartres»</em>.</p> <p>Ces innovations ne s'épanouirent pleinement que six siècles plus tard, aux alentours de l'An Mil, après que l'Occident eût retrouvé une certaine stabilité avec la fin des invasions.</p> <h3>Les Barbares ont bien existé</h3> <p>Aujourd'hui, l'archéologue britannique Bryan Ward-Perkins dénonce l'irénisme de Peter Brown et de ses disciples dans un essai décapant: <a href="https://www.herodote.net/La_chute_de_Rome-bibliographie-539.php"><em>La chute de Rome, Fin d'une civilisation</em></a> (Oxford, 2005, traduction française: Alma, 2014). Il remet les pendules à l'heure... et les Barbares à leur place. <em>«Dans la majeure partie de l'Orient </em><em>méditerranéen et dans certaines parties de l'Occident, des fouilles et des prospections ont permis de conclure à l'existence d'une économie florissante de l'Empire tardif»</em>. Cette prospérité permet d'entretenir une armée professionnelle qui comprend pas moins de 600'000 soldats.</p> <p>Mais les conditions relativement clémentes de la vie, en Occident, au IVème siècle, se dégradent considérablement au cours de la première décennie du Vème. <em>«Du fait des invasions, c'est évident»</em>, souligne Bryan Ward-Perkins. Il a beau jeu de rappeler aussi les chroniques du Vème siècle, celui d'Alaric, de Saint Augustin, d'Attila et de Clovis. Elles mettent en évidence la violence des rapports entre Barbares et Romains dans la partie occidentale de l'Empire.</p> <p>L'Orient romain échappe à ce mauvais sort, malgré la sévère défaite de l'empereur Valens face aux Goths, <a href="https://www.herodote.net/9_aout_378-evenement-3780809.php">devant Andrinople</a>, en 378. <em>«Question de chance... et peut-être aussi de meilleure gestion politique»</em>.</p> <p>Et l'archéologue de conclure: <em>«Les Romains, avant la chute, étaient aussi convaincus que nous le sommes, nous aujourd'hui, que leur monde resterait pour l'essentiel, tel qu'il était. Ils avaient tort. A nous de ne pas répéter leur erreur et de ne pas nous bercer d'une fallacieuse assurance»</em>.</p> <hr /> <h3>Des <em>«Barbares»</em> instrumentalisés par le pouvoir</h3> <p>Arnold Toynbee, s'inspirant de l'historien arabe Ibn Khaldoun (1332-1406), voyait dans la mort de l'empire romain et de toutes les grandes civilisations la conjonction entre l'assaut des <em>«prolétaires extérieurs»</em> – les Barbares – et la défection des <em>«prolétaires intérieurs»</em>... On croirait lire <a href="https://www.herodote.net/La_France_peripherique-bibliographie-538.php"><em>La France périphérique </em></a>de Christophe Guilluy (Flammarion 2014). Géographe classé à gauche, Christophe Guilluy montre comment les classes dirigeantes actuelles ont conclu une alliance paradoxale avec les populations immigrées cependant que les classes populaires ont été reléguées dans les zones périurbaines. Sans évoquer l'Histoire et la chute de Rome, il apporte ainsi sa contribution au <em>«déclinisme»</em>. L'historien français Gabriel Martinez-Gros, spécialiste d'Ibn Khaldoun, a de son côté remis au jour la thèse d'Arnold Toynbee dans un essai en tous points remarquable: <a href="https://www.herodote.net/Breve_Histoire_des_empires-bibliographie-540.php"><em>Brève histoire des empires, comment ils surgissent, comment ils s'effondrent</em></a> (Seuil, 2014). Il explique comment les <em>«Empires»</em>, à commencer par l'empire romain, ont assuré leur pérennité en désarmant leurs sujets pour mieux les pressurer et en utilisant le produit des impôts pour recruter des troupes parmi les guerriers qui nomadisent aux frontières...</p> <hr /> <h3>Petite chronologie de la Rome décadente</h3> <h4><a href="https://www.herodote.net/193_a_395-synthese-117.php">17 mars 180</a> : mort de l'empereur Marc-Aurèle<br />Fin du Siècle d'Or des Antonins, début du Bas Empire.<br />Septembre 270 : avènement d'Aurélien, premier des empereurs illyriens<br />Rome est ceinturée de remparts.<br /><a href="https://www.herodote.net/13_juin_313-evenement-3130613.php">13 juin 313</a> : Constantin promulgue l'édit de Milan et légalise le christianisme.<br /><a href="https://www.herodote.net/9_aout_378-evenement-3780809.php">9 août 378</a> : l'empereur Valens est battu et tué par les Wisigoths, à l'issue de la bataille d'Andrinople.<br />17 juin 395 : mort de Théodose 1er, dernier empereur romain<br />Après lui, l'Orient et l'Occident romains ne referont plus leur unité.<br /><a href="https://www.herodote.net/31_decembre_406-evenement-4061231.php">31 décembre 406</a> : les Barbares en armes franchissent le Rhin.<br /><a href="https://www.herodote.net/24_aout_410-evenement-4100824.php">24 août 410</a> : sac de Rome par Alaric.<br /><a href="https://www.herodote.net/27_decembre_537-evenement-5371227.php">27 décembre 537</a> : l'empereur d'Orient Justinien inaugure Sainte-Sophie<br />À la fois une fin, celle de l'Antiquité païenne, et un commencement, celle de l'Orient byzantin.</h4>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'de-la-chute-de-rome-au-declin-de-l-occident', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 125, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => 'https://www.herodote.net/De_la_chute_de_Rome_au_declin_de_l_Occident-synthese-1952-290.php', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 11, 'person_id' => (int) 13918, 'post_type_id' => (int) 1, 'poster_attachment' => null, 'editions' => [ [maximum depth reached] ], 'tags' => [[maximum depth reached]], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'attachments' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'comments' => [ [maximum depth reached] ], 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, 'relatives' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Post) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Post) {}, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Post) {}, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Post) {} ], 'embeds' => [], 'images' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'audios' => [], 'comments' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Comment) {} ], 'author' => 'André Larané', 'description' => 'L'Histoire s'écrit au présent. A chaque époque, nous regardons le passé avec nos préoccupations du moment et dans le souci de justifier nos orientations éthiques et politiques. Ainsi en est-il du regard porté sur la chute de l'empire romain.', 'title' => 'De la chute de Rome au déclin de l'Occident', 'crawler' => true, 'connected' => null, 'menu_blocks' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Block) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Block) {} ], 'menu' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 4 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 5 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 6 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 7 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 8 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 9 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 10 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 11 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 12 => object(App\Model\Entity\Category) {} ] ] $bufferLevel = (int) 1 $referer = '/' $OneSignal = '8a2ea76e-2c65-48ce-92e5-098c4cb86093' $_serialize = [ (int) 0 => 'post' ] $post = object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 4307, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => true, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => null, 'readed' => null, 'subhead' => null, 'title' => 'De la chute de Rome au déclin de l'Occident', 'subtitle' => 'L'Histoire s'écrit au présent. A chaque époque, nous regardons le passé avec nos préoccupations du moment et dans le souci de justifier nos orientations éthiques et politiques. Ainsi en est-il du regard porté sur la chute de l'empire romain.', 'subtitle_edition' => 'L'Histoire s'écrit au présent. A chaque époque, nous regardons le passé avec nos préoccupations du moment et dans le souci de justifier nos orientations éthiques et politiques. Ainsi en est-il du regard porté sur la chute de l'empire romain.', 'content' => '<p style="text-align: center;">Article publié sur <a href="https://www.herodote.net/De_la_chute_de_Rome_au_declin_de_l_Occident-synthese-1952-290.php" target="_blank" rel="noopener">Herodote.net</a> le 20 mai 2020</p> <hr /> <p>Au Siècle des Lumières, le très voltairien Edward Gibbon a naturellement voulu voir dans le christianisme le principal responsable de la chute de Rome. Au siècle suivant, dans une Europe impérialiste confrontée à des peuples <em>«attardés»</em>, c'est la pression barbare qui est apparue comme le facteur principal. Au XXème siècle, en marge du conflit entre le capitalisme et le marxisme, on a plutôt privilégié la crise économique et sociale. Enfin, faut-il s'en étonner? en notre XXIème siècle tourmenté par la menace climatique, un historien américain, Kyle Harper, incrimine une éruption volcanique en Islande suivie d'une épidémie de peste au milieu du VIème siècle, sous le règne de Justinien.</p> <p>Toutes ces explications ont leur part de vérité mais aucune ne saurait bien évidemment tout expliquer à elle seule... </p> <h3>Décadence? Vous avez dit décadence?</h3> <p>La chute de l'empire romain inspire les historiens depuis qu'en 1734, <a href="https://www.herodote.net/Charles_de_Montesquieu_1689_1755_-synthese-219.php">Charles de Montesquieu</a> publia un premier essai: <em>Considérations sur les causes de la grandeur des Romains et de leur décadence</em>. Le philosophe analyse avec finesse l'évolution de Rome, la perte d'esprit civique dans les classes supérieures, le despotisme qui annihile l'esprit républicain, l'entretien de plus en plus coûteux de l'armée etc.</p> <p>Une génération plus tard, dans une époque dominée par l'anticléricalisme militant, le voltairien Edward Gibbon montre moins de subtilité. Son père l'ayant envoyé en Suisse pour le guérir de sa conversion au catholicisme, il revient à la religion anglicane et surtout acquiert une culture encyclopédique qui l'amène à écrire une monumentale histoire de Rome: <em>Le déclin et la chute de l'Empire romain</em> (1776). C'est une réflexion bien dans l'esprit du temps qui lui vaut un beau succès en librairie. L'auteur aborde son sujet avec autant d'érudition que de flegme. <em>«L'Histoire n'est au fond guère plus que le registre des crimes et des folies de l'humanité »</em>, écrit-il.</p> <p>Il fait porter la responsabilité du déclin de Rome sur le triomphe du christianisme et la diffusion du <a href="https://www.herodote.net/Moines_et_abbayes-synthese-2060.php">monachisme</a>: <em>«On consacrait sans scrupule aux usages de la charité ou de la dévotion une grande partie des richesses du public et des particuliers ; et la paye des soldats était prodiguée à une multitude oisive des deux sexes, qui n'avait d'autres vertus que celles de l'abstinence et de la chasteté»</em> (<em>Histoire de la décadence et de la chute de l'empire romain</em>, 1776).</p> <p>A la suite de Gibbon, le XIXème siècle voit affleurer dans les milieux intellectuels et artistiques l'appréhension d'une décadence des mœurs. C'est ce que reflète en 1847 le succès de la grande toile de Thomas Couture: <em>Les Romains de la décadence</em>, saluée comme un chef-d’œuvre. Un cénacle littéraire est plus tard qualifié de <em>Décadents</em> (Octave Mirbeau, Jules Barbey d'Aurevilly, Auguste de Villiers de l'Isle-Adam...), dans un parallèle avec ces Romains de pacotille.</p> <p>En 1919, après la Première Guerre mondiale, Paul Valéry écrit dans <em>La Crise de l'Esprit</em>:<br /><em>«Nous autres, civilisations, nous savons maintenant que nous sommes mortelles. Nous avions entendu parler de mondes disparus tout entiers, d'empires coulés à pic avec tous leurs hommes et tous leurs engins ; descendus au fond inexplorable des siècles avec leurs dieux et leurs lois, leurs académies et leurs sciences pures et appliquées (...). Tout ne s'est pas perdu mais tout s'est senti périr. Un frisson extraordinaire a couru la moelle de l'Europe (...)»</em>, avec là aussi une référence implicite à Rome.</p> <p>Trois ans plus tard, l'Allemand Oswald Spengler publie <em>Le Déclin de l'Occident</em>, une volumineuse réflexion d'actualité qui fait référence au sort tragique de l'empire romain et établit un parallèle avec le précédent conflit qui a brisé net l'essor de l'Europe.</p> <p>En 1947, l'historien André Piganiol analyse la chute de l'empire romain d'après ce qu'il a vu de la France et de sa civilisation, qui frôlèrent la mort clinique suite à l'invasion de la <em>Wehrmacht</em>. Rétrospectivement, il frémit à la pensée de ce qu'il serait advenu de la France si les Germains l'avaient une nouvelle fois emporté: <em>«Le Bas-Empire est habituellement considéré comme le type même d’une époque de décadence (…) Il est trop commode de prétendre qu’à l’arrivée des barbares dans l’empire tout était mort, c’était un corps épuisé, un cadavre étendu dans son sang (…) La civilisation romaine n’est pas morte de sa belle mort. Elle a été assassinée»</em> (L'Empire chrétien, 1947).</p> <p>Au milieu du XXème siècle, de 1934 à 1961, le grand historien britannique Arnold J. Toynbee publie une <em>Etude de l'Histoire</em> (<em>A study of History</em>) en douze volumes qui ramène l'Histoire universelle à un écheveau de civilisations qui naissent, croissent et meurent. Et que croyez-vous qu'il découvre? Que son époque dominée par le face-à-face entre les démocraties occidentales et les régimes totalitaires d'Allemagne et surtout d'URSS compte une <em>«civilisation occidentale» </em>qui réunit comme par hasard l'Europe occidentale et le Nouveau Monde et une <em>«civilisation orthodoxe»</em> qui réunit les pays du bloc communiste et quelques autres.</p> <p>Avec la fin de la guerre froide et l'irruption de la <a href="https://www.herodote.net/Une_histoire_de_la_Grande_Crise-synthese-1766.php">Grande Crise européenne</a>, changement de perspective. L'Europe et l'Amérique du Nord tombent de leur piédestal et se voient concurrencées avec succès par la Chine et l'Extrême-Orient. Ils connaissent aussi des vagues d'immigration sans précédent dans l'histoire humaine. La bienséance et l'obligation de faire bonne figure conduisent les historiens à revoir leur copie: le déclin de Rome et les grandes invasions ne sont plus perçues comme des catastrophes mais comme des renaissances!</p> <p>Dans <em>Le Monde de l'Antiquité tardive</em> (1971), l'historien irlandais Peter Brown remet au goût du jour le concept allemand d'Antiquité tardive, plus convenable que celui de Bas-Empire, pour désigner les derniers siècles de l'empire d'Occident. Il étend même ce concept du IIIème au VIIIème siècle, de <a href="https://www.herodote.net/Bio/Caracalla-biographie-Q2FyYWNhbGxh.php">Caracalla</a> à <a href="https://www.herodote.net/25_octobre_732-evenement-7321025.php">Charles Martel</a>, et fait valoir que cette époque s'est accompagnée d'innovations notables dans les techniques et la pensée politique!</p> <p>Peter Brown et ses disciples minorent parallèlement l'effondrement des conditions de vie dans cette longue période et évoquent non plus le <em>«déclin»</em> ou la <em>«chute»</em> de l'empire romain mais sa <em>«transformation»</em> ou son <em>«accommodement»</em>. Ce dernier mot, employé par le Canadien Walter Goffart en 1980, est une façon de rassurer les Occidentaux qui pourraient s'inquiéter des phénomènes en cours en ce XXIème siècle, notamment le départ vers l'Asie de leur savoir-faire industriel et l'arrivée massive de populations démunies sur les rives de la Méditerranée...</p> <p>L'historien français Henri-Irénée Marrou reprend le concept d'Antiquité tardive dans un essai posthume: <em>Décadence romaine ou antiquité tardive ? IIIe-IVe siècle</em> (1977) mais le limite sagement aux deux siècles précédant les grandes invasions du Vème siècle. Il montre que, de fait, ces deux siècles ont été à l'origine de nombreuses innovations techniques et intellectuelles: le vêtement cousu, le livre relié, le moulin à eau et le moulin à vent, le néo-platonicisme et les Pères de l'Église, etc.</p> <p>Cette Antiquité tardive se prolonge bien au-delà du IVème siècle à Byzance. <em>«Quelle grandeur manifeste cette romanité orientale! Ainsi dans l'art: prenons comme symbole Sainte-Sophie. Après tout, il n'y a pas tant de monuments qu'on puisse, comme celui-là, situer au même niveau de perfection que le Parthénon ou Notre-Dame de Chartres»</em>.</p> <p>Ces innovations ne s'épanouirent pleinement que six siècles plus tard, aux alentours de l'An Mil, après que l'Occident eût retrouvé une certaine stabilité avec la fin des invasions.</p> <h3>Les Barbares ont bien existé</h3> <p>Aujourd'hui, l'archéologue britannique Bryan Ward-Perkins dénonce l'irénisme de Peter Brown et de ses disciples dans un essai décapant: <a href="https://www.herodote.net/La_chute_de_Rome-bibliographie-539.php"><em>La chute de Rome, Fin d'une civilisation</em></a> (Oxford, 2005, traduction française: Alma, 2014). Il remet les pendules à l'heure... et les Barbares à leur place. <em>«Dans la majeure partie de l'Orient </em><em>méditerranéen et dans certaines parties de l'Occident, des fouilles et des prospections ont permis de conclure à l'existence d'une économie florissante de l'Empire tardif»</em>. Cette prospérité permet d'entretenir une armée professionnelle qui comprend pas moins de 600'000 soldats.</p> <p>Mais les conditions relativement clémentes de la vie, en Occident, au IVème siècle, se dégradent considérablement au cours de la première décennie du Vème. <em>«Du fait des invasions, c'est évident»</em>, souligne Bryan Ward-Perkins. Il a beau jeu de rappeler aussi les chroniques du Vème siècle, celui d'Alaric, de Saint Augustin, d'Attila et de Clovis. Elles mettent en évidence la violence des rapports entre Barbares et Romains dans la partie occidentale de l'Empire.</p> <p>L'Orient romain échappe à ce mauvais sort, malgré la sévère défaite de l'empereur Valens face aux Goths, <a href="https://www.herodote.net/9_aout_378-evenement-3780809.php">devant Andrinople</a>, en 378. <em>«Question de chance... et peut-être aussi de meilleure gestion politique»</em>.</p> <p>Et l'archéologue de conclure: <em>«Les Romains, avant la chute, étaient aussi convaincus que nous le sommes, nous aujourd'hui, que leur monde resterait pour l'essentiel, tel qu'il était. Ils avaient tort. A nous de ne pas répéter leur erreur et de ne pas nous bercer d'une fallacieuse assurance»</em>.</p> <hr /> <h3>Des <em>«Barbares»</em> instrumentalisés par le pouvoir</h3> <p>Arnold Toynbee, s'inspirant de l'historien arabe Ibn Khaldoun (1332-1406), voyait dans la mort de l'empire romain et de toutes les grandes civilisations la conjonction entre l'assaut des <em>«prolétaires extérieurs»</em> – les Barbares – et la défection des <em>«prolétaires intérieurs»</em>... On croirait lire <a href="https://www.herodote.net/La_France_peripherique-bibliographie-538.php"><em>La France périphérique </em></a>de Christophe Guilluy (Flammarion 2014). Géographe classé à gauche, Christophe Guilluy montre comment les classes dirigeantes actuelles ont conclu une alliance paradoxale avec les populations immigrées cependant que les classes populaires ont été reléguées dans les zones périurbaines. Sans évoquer l'Histoire et la chute de Rome, il apporte ainsi sa contribution au <em>«déclinisme»</em>. L'historien français Gabriel Martinez-Gros, spécialiste d'Ibn Khaldoun, a de son côté remis au jour la thèse d'Arnold Toynbee dans un essai en tous points remarquable: <a href="https://www.herodote.net/Breve_Histoire_des_empires-bibliographie-540.php"><em>Brève histoire des empires, comment ils surgissent, comment ils s'effondrent</em></a> (Seuil, 2014). Il explique comment les <em>«Empires»</em>, à commencer par l'empire romain, ont assuré leur pérennité en désarmant leurs sujets pour mieux les pressurer et en utilisant le produit des impôts pour recruter des troupes parmi les guerriers qui nomadisent aux frontières...</p> <hr /> <h3>Petite chronologie de la Rome décadente</h3> <h4><a href="https://www.herodote.net/193_a_395-synthese-117.php">17 mars 180</a> : mort de l'empereur Marc-Aurèle<br />Fin du Siècle d'Or des Antonins, début du Bas Empire.<br />Septembre 270 : avènement d'Aurélien, premier des empereurs illyriens<br />Rome est ceinturée de remparts.<br /><a href="https://www.herodote.net/13_juin_313-evenement-3130613.php">13 juin 313</a> : Constantin promulgue l'édit de Milan et légalise le christianisme.<br /><a href="https://www.herodote.net/9_aout_378-evenement-3780809.php">9 août 378</a> : l'empereur Valens est battu et tué par les Wisigoths, à l'issue de la bataille d'Andrinople.<br />17 juin 395 : mort de Théodose 1er, dernier empereur romain<br />Après lui, l'Orient et l'Occident romains ne referont plus leur unité.<br /><a href="https://www.herodote.net/31_decembre_406-evenement-4061231.php">31 décembre 406</a> : les Barbares en armes franchissent le Rhin.<br /><a href="https://www.herodote.net/24_aout_410-evenement-4100824.php">24 août 410</a> : sac de Rome par Alaric.<br /><a href="https://www.herodote.net/27_decembre_537-evenement-5371227.php">27 décembre 537</a> : l'empereur d'Orient Justinien inaugure Sainte-Sophie<br />À la fois une fin, celle de l'Antiquité païenne, et un commencement, celle de l'Orient byzantin.</h4>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'de-la-chute-de-rome-au-declin-de-l-occident', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 125, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => 'https://www.herodote.net/De_la_chute_de_Rome_au_declin_de_l_Occident-synthese-1952-290.php', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 11, 'person_id' => (int) 13918, 'post_type_id' => (int) 1, 'poster_attachment' => null, 'editions' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Edition) {} ], 'tags' => [], 'locations' => [], 'attachment_images' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'attachments' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'comments' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Comment) {} ], 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ '*' => true, 'id' => false ], '[dirty]' => [], '[original]' => [], '[virtual]' => [], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [], '[invalid]' => [], '[repository]' => 'Posts' } $relatives = [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 4824, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => false, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => null, 'readed' => null, 'subhead' => null, 'title' => 'Les septuagénaires gouvernent le monde', 'subtitle' => 'Le dirigeant de la première puissance du monde a 81 ans et il n’est pas exclu qu’il soit reconduit le 5 novembre 2024. Le vieillissement de la classe dirigeante aux Etats-Unis et dans le reste du monde est tout à fait inédit mais il est appelé à s’étendre. Le plus surprenant, comme le montre notre enquête, est qu’il affecte en premier lieu le continent le plus jeune, l’Afrique subsaharienne, avec déjà huit octogénaires aux commandes de leur État sur un total de quatorze dans le monde... ', 'subtitle_edition' => 'Le dirigeant de la première puissance du monde a 81 ans et il n’est pas exclu qu’il soit reconduit le 5 novembre 2024. Le vieillissement de la classe dirigeante aux Etats-Unis et dans le reste du monde est tout à fait inédit mais il est appelé à s’étendre. Le plus surprenant, comme le montre notre enquête, est qu’il affecte en premier lieu le continent le plus jeune, l’Afrique subsaharienne, avec déjà huit octogénaires aux commandes de leur Etat sur un total de quatorze dans le monde...', 'content' => '<p style="text-align: center;">Cet article a été publié sur <a href="https://www.herodote.net/Inedit_les_septuagenaires_gouvernent_le_monde-article-2952.php" target="_blank" rel="noopener">Herodote.net</a> le 17 mars 2024</p> <hr /> <p>Les États-Unis sont aujourd’hui présidés par un octogénaire, Joe Biden, né le 20 novembre 1942. Selon toute probabilité, les citoyens américains se disposent soit à le réélire le 5 novembre 2024 soit à élire son rival Donald Trump qui n’est guère plus jeune, étant né le 14 juin 1946.</p> <p>C’est du jamais vu dans l’Histoire des États-Unis car avant le XXIe siècle, le pays était présidé par <a href="https://www.herodote.net/Les_presidents_des_Etats_Unis_d_Amerique-synthese-338-470.php">des hommes relativement jeunes</a> (moyenne d’âge d’environ 51 ans).</p> <p>C’est aussi inédit dans l’Histoire de l’humanité car jamais encore le chef en exercice de la principale puissance du monde n’avait plus de quatre-vingts ans (à l’exception de l’empereur chinois <a href="https://www.herodote.net/La_Chine_revee-synthese-557-13.php">Qianlong</a> qui a abdiqué en 1796 à l’âge raisonnable de 87 ans).</p> <p>Ce phénomène semble appelé à se renouveler du fait des progrès de l’hygiène et de la médecine qui ont permis de doubler en un siècle l’espérance de vie dans la plupart des pays du monde (au Japon, cette espérance de vie est aujourd’hui de 85 ans).</p> <p>Ne soyons donc pas étonnés qu’en cette même année 2024, la majorité des humains soit gouvernée par des septuagénaires, voire des octogénaires. C’est le cas des dix pays les plus peuplés de la planète (à l’exception de l’Indonésie) qui rassemblent 4,3 milliards d’humains sur un total de 8 milliards. Parmi tous ces pays, notons-le (tableaux ci-après), un seul, le Bangladesh, est dirigé par une femme ; il s’agit de la Première ministre Sheikh Hasina, né en 1947.</p> <p>Le changement est brusque. Il y a seulement dix ans, en 2014, aucun des dix pays susmentionnés n’était dirigé par un septuagénaire, soit qu’ils avaient un dirigeant plus jeune (Barack Obama aux États-Unis), soit qu’ils avaient le même dirigeant qu’aujourd’hui… avec dix ans de moins (Vladimir Poutine en Russie) !</p> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1710968934_capturedcran2024032022.07.11.png" class="img-responsive img-fluid center " width="589" height="388" /></p> <h4 style="text-align: center;"><em>Chefs d'État ou de gouvernement des 10 principaux pays (17 mars 2024)</em></h4> <h3>Pays jeune, dirigeant vieux (et vice-versa)</h3> <p>On pourrait croire ce phénomène corrélé au vieillissement général de la population et à l’élévation de l’âge médian. Il n’en est rien d’après la liste ci-dessous des dirigeants qui auront 70 ans ou plus cette année. Sur cette liste, nous avons retenu les personnes qui dirigent de fait leur pays ; soit le chef d’État (président, monarque…), soit le chef de gouvernement (Premier ministre, chancelier…) ; nous avons par exemple retenu le pape et le Guide de la Révolution (Iran) mais pas le roi d’Angleterre.</p> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1710969072_capturedcran2024032022.09.56.png" class="img-responsive img-fluid center " width="669" height="310" /></p> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1710969129_capturedcran2024032022.10.09.png" class="img-responsive img-fluid center " width="667" height="406" /></p> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1710969209_capturedcran2024032022.10.16.png" class="img-responsive img-fluid center " width="671" height="176" /></p> <h4 style="text-align: center;"><em>Chefs d'État ou de gouvernement de 70 ans et plus (2024). NB : pour chaque pays est indiquée la personne qui détient le pouvoir exécutif (chef de l'État ou chef de gouvernement).</em></h4> <p>Curieusement, sur ces 41 dirigeants, vingt-quatre, soit plus de la moitié, sont en Afrique saharienne, autrement dit dans la région la plus jeune du monde avec dix-huit ans d’âge médian (c’est l’âge auquel il y a autant de gens au-dessus qu’au-dessous).</p> <p>Dans le reste du monde, les régions qui conservent une population relativement jeune sont également en bonne partie dirigées par des septuagénaires ou des octogénaires. C’est le cas de l’Afrique du nord (Algérie) et du Moyen-Orient musulman avec dix représentants ainsi que du sous-continent indien avec quatre représentants.</p> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1710969414_capturedcran2024032022.15.58.png" class="img-responsive img-fluid center " width="587" height="436" /></p> <h4 style="text-align: center;"><em>Dirigeants de plus de 80 ans (17 mars 2024)</em></h4> <p>Le mystère s’épaissit quand nous considérons l’Occident chrétien (Europe et Amériques). Les pays qui ont les dirigeants les plus âgés sont aussi parmi ceux qui ont la démographie la plus dynamique ! Outre les États-Unis, il y a le Mexique et le Brésil (président : Lula, 79 ans).</p> <p>L’Union européenne et plus généralement l’Europe figurent parmi les régions du monde les plus vieilles avec un âge médian supérieur à 40 ans en dépit d’une immigration importante en provenance du Sud. Par extraordinaire, cette région n’a aucun dirigeant de 70 ans et plus (à part… Vladimir Poutine).</p> <p>Plus fort encore, c’est aussi dans cette région que l’on croise les dirigeants les plus jeunes de la planète : Daniel Noboa, élu en 2023 à 35 ans président de l’Équateur ; Gabriel Boric, élu en 2021 à 35 ans président du Chili ; Jakov Milatovic, élu en 2023 à 36 ans président du Monténégro ; Nayib Bukele, élu en 2019 à 37 ans président du Salvador ; Leo Varadkar, élu en 2017 à 38 ans Premier ministre d’Irlande ; Vjosa Osmani, élue en 2021 à 38 ans présidente du Kossovo ; enfin, Emmanuel Macron, élu en 2017 à 38 ans président de la République française (la liste n’est pas close).</p> <p>Nous laissons à d’autres le soin de décrypter ces paradoxes mais peut-être ne s’agit-il que d’une coïncidence inopinée.</p> <h3>L'âge ne fait rien à l'affaire</h3> <p>Au regard de cette actualité, nous pouvons nous demander s’il est bon ou mauvais d’avoir des dirigeants plus âgés que jeunes.</p> <p>Si les arts et les sciences sont souvent illustrés par des <a href="https://www.herodote.net/Gloires_precoces-synthese-2499-368.php">génies précoces</a>, il en va autrement de la politique. On n’a pas un Alexandre ou un Napoléon par génération… et l’on rencontre peu de dirigeants qui se soient illustrés en pleine jeunesse. Le plus notable reste <a href="https://www.herodote.net/18_decembre_1783-evenement-17831218.php">William Pitt <em>Le Jeune</em></a>, Premier ministre britannique en 1783, à 24 ans.</p> <p>En dépit de la triste prestation du maréchal Pétain à la tête de l’État français pendant l’Occupation, qui a fait dire au général de Gaulle : <em>« La vieillesse est un naufrage »</em>, les périodes les plus difficiles ont souvent été gérées par des hommes (ou des femmes) d’âge mûr ou avancé.</p> <p>En France, c’est en 1871 Adolphe Thiers (73 ans) qui relève la République (et réprime la Commune) ; en 1917, Georges Clemenceau (76 ans) qui sauve la France de la défaite ; en 1958, Charles de Gaulle (68 ans) qui rénove la République… Et gardons-nous d’oublier Churchill, qui sauve le monde libre en 1940 à 65 ans.</p> <p>Ces cas exceptionnels pour des situations exceptionnelles ne doivent pas dissuader les jeunes gens de s’engager en politique pour les causes qui leur paraissent justes.</p>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'les-septuagenaires-gouvernent-le-monde', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 42, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => 'https://www.herodote.net/Inedit_les_septuagenaires_gouvernent_le_monde-article-2952.php', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 8, 'person_id' => (int) 13918, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [[maximum depth reached]], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 4770, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => false, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => null, 'readed' => null, 'subhead' => null, 'title' => 'Le procès Manouchian et l'Affiche rouge', 'subtitle' => 'Le 21 février 1944, les murs de Paris se couvrent de grandes affiches rouges. Placardées à 15'000 exemplaires, elles exposent à la vindicte des Français dix hommes auxquels il est reproché plusieurs dizaines d'attentats sous couvert de libération. Cette «armée du crime» compte sept juifs dont quatre nés en Pologne et trois en Hongrie, un natif d'Espagne, un autre d'Italie, le dernier enfin d'Arménie.', 'subtitle_edition' => 'Le 21 février 1944, les murs de Paris se couvrent de grandes affiches rouges. Placardées à 15'000 exemplaires, elles exposent à la vindicte des Français dix hommes auxquels il est reproché plusieurs dizaines d'attentats sous couvert de libération. Cette «armée du crime» compte sept juifs dont quatre nés en Pologne et trois en Hongrie, un natif d'Espagne, un autre d'Italie, le dernier enfin d'Arménie.', 'content' => '<p style="text-align: center;">Article publié sur <em><a href="https://www.herodote.net/21_fevrier_1944-evenement-19440221.php" target="_blank" rel="noopener">Herodote.net</a></em> le 21 février 2024</p> <hr /> <p>Le même jour, ces résistants ainsi que douze autres compagnons d'infortune ont été fusillés au <a href="safari-reader://www.herodote.net/encyclopedie/mot.php?mot=Mont%20Val%E9rien">mont Valérien</a>. Leur chef militaire, Joseph Epstein, dit colonel Gilles, juif de Pologne, le sera un peu plus tard, le 11 avril 1944.</p> <p>La seule femme du groupe, Olga Bancic (32 ans), juive de Bessarabie, sera guillotinée à Stuttgart le 10 mai 1944. Tous, Français ou étrangers, sont communistes et appartiennent aux Francs-tireurs et partisans de la Main-d’Œuvre immigrée (FTP-MOI).</p> <p>Cette affiche complète la publication d'une brochure intitulée <em>« L'Armée du crime »</em> dans le cadre d'une campagne de propagande antisémite et xénophobe orchestrée par les nazis. Elle nourrira après la guerre la mémoire de la Résistance avec un poème de Louis Aragon publié dans L'Humanité du 5 mars 1955 sous le titre <em>« Le groupe Manouchian »</em>, d'après le nom de l'Arménien de l'affiche.</p> <p>Ce poème inspiré par la lettre bouleversante de Missak (Michel) Manouchian à son épouse Mélinée sera ensuite rebaptisé <em>Strophes pour se souvenir</em> et mis en musique et chanté en 1959 par Léo Ferré sous le titre <em>L'Affiche rouge</em>. Cette mémoire trouve son aboutissement ce 21 février 2024 avec l'entrée au <a href="https://www.herodote.net/Aux_grands_hommes_la_patrie_reconnaissante-article-14.php">Panthéon</a>(Paris) de Mélinée et Missak Manouchian. Les noms des vingt-quatre martyrs figurent sur une plaque à proximité de leur caveau...</p> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1708528580_capturedcran2024022116.14.26.png" class="img-responsive img-fluid center " width="525" height="710" /></p> <h3>Un réseau très recherché</h3> <p>C'est en 1925 que le jeune parti communiste français a réuni ses militants d'origine étrangère dans la section Main-d’Œuvre étrangère ou immigrée (MOI) avec autant de sous-sections que de langues usuelles (italienne, polonaise, hongroise, espagnole,... et yiddish). </p> <p>Suite à l'invasion de l'URSS par la <em>Wehrmacht</em>, le 22 juin 1941, le parti communiste se décide à entrer dans la Résistance active. À la fin de l'année 1941, il fond ses organisations de jeunesse au sein des Francs-tireurs et partisans.</p> <p>En mars 1942 est fondé le réseau des FTP-MOI par Boris Holban (34 ans), de son vrai nom Bruhman. Issu d'une famille juive qui a fui la Russie pour la Bessarabie puis la France, Boris Holban s'est engagé en 1939 dans un régiment de volontaires étrangers. Fait prisonnier, il a réussi à s'évader grâce au réseau d'une religieuse de Metz, Soeur Hélène (François Mitterrand bénéficiera du même réseau).</p> <p>Il constitue trois détachements (roumains, italiens et yiddish) sans compter un détachement spécialisé dans les déraillements et des services de renseignement, de liaison et de soins médicaux. Ce sont au total 30 combattants et une quarantaine de militants.</p> <p>Les FTP-MOI vont multiplier les actions en région parisienne contre l'occupant et les collaborateurs. On évalue leur nombre à 229 de juin 1942 à leur démantèlement en novembre 1943 par la Brigade Spéciale N°2 des Renseignements généraux (BS2), un organe de la préfecture de police de Paris chargé de la traque des communistes.</p> <p>La plus retentissante de leurs actions est l'assassinat, le 28 septembre 1943, du général SS Julius Ritter (51 ans), qui supervise le <a href="safari-reader://www.herodote.net/almanach-ID-310.php">Service du Travail Obligatoire (STO)</a>, responsable de l'envoi en Allemagne de centaines de milliers de jeunes travailleurs français.</p> <p>Ces actions se révèlent toutefois très coûteuses en hommes, de sorte que les FTP-MOI en viendront à recruter des résistants de plus en plus jeunes, à l'image de Thomas Elek, juif né à Budapest en 1924, élève au lycée Louis-le-Grand.</p> <p>En mars 1943 sont arrêtés cinquante-sept jeunes juifs de la MOI, dont leur chef, Henoch (Henri) Krasucki (né près de Varsovie en 1924, il deviendra secrétaire général de la CGT de 1982 à 1992). En juillet 1943 a lieu une deuxième arrestation de masse. Parmi la centaine de résistants arrêtés par la police française, certains sont déférés devant des tribunaux militaires allemands et fusillés au Mont-Valérien, d'autres sont déportés à <a href="https://www.herodote.net/27_janvier_1945-evenement-19450127.php">Auschwitz</a>.</p> <p>En août 1942, la direction nationale des FTP enlève la direction des FTP-MOI à Boris Holban car celui-ci refuse de sacrifier ses hommes dans des actions hasardeuses. Il juge non sans raison que le réseau est au bord de la rupture par manque d'hommes. Il est remplacé à la tête du groupe par Missak Manouchian.</p> <p>Le 12 novembre 1943, la dernière action des FTP-MOI, l'attaque d'un convoyeur de fonds allemand dans la rue Lafayette, se solde par un échec. Le jeune footballeur d'Argenteuil Rino delle Negra est blessé et arrêté ainsi que ses trois compagnons. </p> <p>C'est le début de la fin.</p> <p>Suite à une trahison, Missak Manouchian est à son tour arrêté avec son chef Joseph Epstein le 16 novembre 1943, à Évry Petit-Bourg, sur les berges de la Seine. Au total, la police procède à soixante-huit arrestations.</p> <p>Torturés puis livrés à la police militaire allemande, Manouchian et 22 de ses camarades sont jugés le 19 février 1944 dans un procès à grand spectacle, à l'hôtel Intercontinental, devant la presse collaborationniste qui s'appesantit sur leurs origines. Ils sont fusillés deux jours plus tard(sauf Olga Bancic), après avoir fait l'objet d'une séance de photos dans la cour de leur prison pour les besoins de la propagande : brochure et affiche.</p> <p><em>« Quel fut l'impact de l'affiche sur l'opinion publique française ? Force est de constater que nous n'en savons rien. À ce jour, aucune étude n'a été faite sur ce point »</em>, écrit l'historienne Annette Wieviorka (<em>Anatomie de l'Affiche rouge</em>, Seuil, février 2024).</p> <p>Mais dès mars 1944, selon les mots de l'historienne Margaret Atack, l'affiche va faire l'objet d'un <em>« processus narratif et idéologique »</em> dans la presse clandestine communiste qui occultera toutefois son caractère antisémite !</p> <p>Ainsi les 23 condamnés du 19 novembre 1944 deviendront-ils les porte-drapeaux symboliques de la Résistance communiste et étrangère en France. C'est à ce titre qu'ils ont aujourd'hui les honneurs du Panthéon.</p> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1708528705_capturedcran2024022116.15.09.png" class="img-responsive img-fluid center " width="526" height="287" /></p> <h3>Missak Manouchian: «Je n'ai aucune haine contre le peuple allemand»</h3> <p>Missak (Michel) Manouchian, chef déclaré de ce groupe de résistants, est né en Arménie 36 ans plus tôt et a perdu son père dans le <a href="safari-reader://www.herodote.net/histoire/evenement.php?jour=19150424">génocide arménien</a>.</p> <p>Après la Grande Guerre, il est recueilli ainsi que son frère aîné dans un orphelinat libanais où il s'initie à la menuiserie et se découvre une passion pour la littérature et des dispositions pour la poésie. Réalisant enfin son souhait le plus cher, il gagne la France en 1924. Il y apprend le métier de menuisier et travaille à la Seyne-sur-Mer puis à Paris. C'est là qu'il a la douleur de perdre en 1927 son frère, dernier membre de sa famille, victime de la tuberculose.</p> <p>Il fréquente les milieux arméniens et littéraires, suit des cours à la Sorbonne, écrit des poèmes et se consacre à la littérature et à l'étude, traduit enfin des poètes français tels que Baudelaire en arménien.</p> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1708529012_missak_manouchian_1940.png" class="img-responsive img-fluid center " width="321" height="626" /></p> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1708529037_bundesarchiv_bild_146198307709a_franzsischer_widerstandskmpfer.jpg" class="img-responsive img-fluid center " width="511" height="743" /></p> <p>En 1934, il adhère au parti communiste français puis, l'année suivante, au groupe MOI (Main-d'Oeuvre Immigrée), une antenne du syndicat communiste, la CGTU, dans laquelle il rejoint la section arménienne et y fonde une revue en arménien. Il y fait la rencontre d'une jeune rescapée du génocide, orpheline comme lui, Mélinée. Il l'épousera après une cour assidue de plusieurs mois.</p> <p>Pendant l'occupation allemande, Missak rejoint les FTP-MOI (Francs-Tireurs et Partisans-Main-d'Oeuvre Immigrée).</p> <p>En 1933 comme en 1940, Missak Manouchian a déposé une demande de naturalisation en exprimant le souhait de faire son service militaire. Mais sa demande est à chaque fois refusée. Il est néanmoins engagé volontaire au printemps 1940.</p> <p>Pendant l'Occupation, il entre dans le militantisme clandestin, rejoint les FTP-MOI et devient responsable de la section arménienne. Il vit avec son épouse 11 rue de Plaisance, dans le 14e arrondissement.</p> <p>À ses juges, le 19 février 1944, Missak Manouchian aurait lancé selon la presse collaborationniste : <em>« Vous avez hérité la nationalité française, nous l'avons méritée. »</em></p> <h3>La dernière lettre de Missak (Michel) Manouchian à sa femme</h3> <p>Comme tous les condamnés, Missak Manouchian est autorisé à écrire une lettre d'adieu à la personne de son choix. Notons qu'il signe cette lettre de son prénom francisé, <em>Michel.</em></p> <p><em><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1708529126_capturedcran2024022116.15.18.png" class="img-responsive img-fluid center " width="616" height="947" /></em></p> <p><em>Ma Chère Mélinée, ma petite orpheline bien-aimée,Dans quelques heures, je ne serai plus de ce monde. Nous allons être fusillés cet après-midi à 15 heures. Cela m’arrive comme un accident dans ma vie, je n’y crois pas mais pourtant je sais que je ne te verrai plus jamais.<br />Que puis-je t’écrire ? Tout est confus en moi et bien clair en même temps.<br />Je m’étais engagé dans l’Armée de Libération en soldat volontaire et je meurs à deux doigts de la Victoire et du but. Bonheur à ceux qui vont nous survivre et goûter la douceur de la Liberté et de la Paix de demain. Je suis sûr que le peuple français et tous les combattants de la Liberté sauront honorer notre mémoire dignement. Au moment de mourir, je proclame que je n’ai aucune haine contre le peuple allemand et contre qui que ce soit, chacun aura ce qu’il méritera comme châtiment et comme récompense. Le peuple allemand et tous les autres peuples vivront en paix et en fraternité après la guerre qui ne durera plus longtemps. Bonheur à tous… J’ai un regret profond de ne t’avoir pas rendue heureuse, j’aurais bien voulu avoir un enfant de toi, comme tu le voulais toujours. Je te prie donc de te marier après la guerre, sans faute, et d’avoir un enfant pour mon bonheur, et pour accomplir ma dernière volonté, marie-toi avec quelqu’un qui puisse te rendre heureuse. Tous mes biens et toutes mes affaires je les lègue à toi à ta sœur et à mes neveux. Après la guerre tu pourras faire valoir ton droit de pension de guerre en tant que ma femme, car je meurs en soldat régulier de l’armée française de la libération.<br />Avec l’aide des amis qui voudront bien m’honorer, tu feras éditer mes poèmes et mes écrits qui valent d’être lus. Tu apporteras mes souvenirs si possible à mes parents en Arménie. Je mourrai avec mes 23 camarades tout à l’heure avec le courage et la sérénité d’un homme qui a la conscience bien tranquille, car personnellement, je n’ai fait de mal à personne et si je l’ai fait, je l’ai fait sans haine. Aujourd’hui, il y a du soleil. C’est en regardant le soleil et la belle nature que j’ai tant aimée que je dirai adieu à la vie et à vous tous, ma bien chère femme et mes bien chers amis. Je pardonne à tous ceux qui m’ont fait du mal ou qui ont voulu me faire du mal sauf à celui qui nous a trahis pour racheter sa peau et ceux qui nous ont vendus. Je t’embrasse bien fort ainsi que ta sœur et tous les amis qui me connaissent de loin ou de près, je vous serre tous sur mon cœur. Adieu. Ton ami, ton camarade, ton mari.<br /><br />Manouchian Michel</em></p> <h3><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1708529323_capturedcran2024022116.15.27.png" class="img-responsive img-fluid center " width="509" height="508" /></h3> <h3>Epilogue</h3> <p>Rappelé par les FTP en décembre 1943, Holban retrouvera et exécutera le traître qui a livré le groupe. Après la Libération, il s'en retournera en Roumanie où il deviendra colonel puis général. Mais le dictateur Ceaucescu le déchoiera de son grade et l'enverra travailler dans une usine jusqu'à sa retraite. Revenu en France, il sera décoré de la Légion d'Honneur le 8 mai 1994 sous l'Arc de Triomphe de l'Étoile par le président <a href="safari-reader://www.herodote.net/histoire/synthese.php?ID=178">Francois Mitterrand</a>.</p> <p>Parmi les fondateurs des FTP-MOI figurent Artur London, juif né en Moravie, et Adam Rayski, juif de Pologne. L'un et l'autre rentreront dans leur pays natal après la guerre pour se mettre au service du gouvernement communiste. Artur London se fera connaître comme l'auteur de <em>L'Aveu</em>, une dénonciation des procès de Prague. Adam Rayski, qui a participé en 1943 à la fondation du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), reviendra en France en 1959.</p> <p>Mélinée, épouse de Missak Manouchia, a réussi à échapper à la police. Elle s'est réfugiée chez ses logeurs, les Aznavourian, dont l'un des enfants deviendra chanteur sous le nom de Charles Aznavour.</p> <p>À la Libération, elle regagnera l'Arménie soviétique avant de se faire rapatrier en France en 1954. Jusqu'à sa mort, le 6 décembre 1989, à 76 ans, elle cultivera la mémoire de son époux et de leurs compagnons de résistance (sans se remarier comme l'y invitait Missak).</p> <p>Le dernier survivant du groupe Manouchian, <a href="https://www.herodote.net/Dernier_surviva-actualite-338.php">Arsène Tchakarian</a>, est mort le 6 août 2018, après avoir survécu au génocide arménien et à la répression nazie.</p> <hr /> <h3>Strophes pour se souvenir</h3> <p><em>Vous n'avez réclamé la gloire ni les larmes<br />Ni l'orgue ni la prière aux agonisants<br />Onze ans déjà que cela passe vite onze ans<br />Vous vous étiez servi simplement de vos armes<br />La mort n'éblouit pas les yeux des Partisans.</em></p> <p><em>Vous aviez vos portraits sur les murs de nos villes<br />Noirs de barbe et de nuit hirsutes menaçants<br />L'affiche qui semblait une tache de sang<br />Parce qu'à prononcer vos noms sont difficiles<br />Y cherchait un effet de peur sur les passants</em></p> <p><em>Nul ne semblait vous voir Français de préférence<br />Les gens allaient sans yeux pour vous le jour durant<br />Mais à l'heure du couvre feu des doigts errants<br />Avaient écrit sous vos photos MORTS POUR LA FRANCE<br />Et les mornes matins en étaient différents.</em></p> <p><em>Tout avait la couleur uniforme du givre<br />A la fin février pour vos derniers moments<br />Et c'est alors que l'un de vous dit calmement<br />Bonheur à tous Bonheur à ceux qui vont survivre<br />Je meurs sans haine en moi pour le peuple allemand.</em></p> <p><em>Adieu la peine et le plaisir adieu les roses<br />Adieu la vie adieu la lumière et le vent<br />Marie toi sois heureuse et pense à moi souvent<br />Toi qui vas demeurer dans la beauté des choses<br />Quand tout sera fini plus tard en Erivan</em></p> <p><em>Un grand soleil d'hiver éclaire la colline<br />Que la nature est belle et que le coeur me fend<br />La justice viendra sur nos pas triomphants<br />Ma Mélinée ô mon amour mon orpheline<br />Et je te dis de vivre et d'avoir un enfant</em></p> <p><em>Ils étaient vingt et trois quand les fusils fleurirent<br />Vingt et trois qui donnaient leur cœur avant le temps<br />Vingt et trois étrangers et nos frères pourtant<br />Vingt et trois amoureux de vivre à en mourir<br />Vingt et trois qui criaient la France en s'abattant.</em></p> <p>Louis Aragon,<a> </a><em>Le roman inachevé</em>, 1956.</p> <p><iframe frameborder="0" height="315" src="https://www.youtube.com/embed/Tj5XwjOuq7s?si=17eDjX7Dwuz3R6Ls" title="YouTube video player" width="560"></iframe> <iframe frameborder="0" height="315" src="https://www.youtube.com/embed/t5R4o1JuO-k?si=VlSrfU2alnGbC0Oy" title="YouTube video player" width="560"></iframe></p>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'le-proces-manouchian-et-l-affiche-rouge', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 61, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 11, 'person_id' => (int) 13918, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [[maximum depth reached]], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 4616, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => false, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => null, 'readed' => null, 'subhead' => null, 'title' => 'Racisme: l'Histoire bafouée', 'subtitle' => 'L’Occident serait-il le mal absolu ? La thèse recueille un succès croissant dans les cénacles intellectuels. Elle vient d’être reprise par une romancière à succès, Léonora Miano, dans un essai où elle réduit l’humanité à une opposition « Blancs-Noirs ». Cette lecture raciste de l’Histoire ne résiste pas au tamis des faits mais ses partisans n’en restent pas moins déterminés à l’imposer. La surdité de la classe politique et de l’opinion publique face à cette menace fait craindre que la nation n'en vienne à se déchirer…', 'subtitle_edition' => 'L’Occident serait-il le mal absolu? La thèse recueille un succès croissant dans les cénacles intellectuels. Elle vient d’être reprise par une romancière à succès, Léonora Miano, dans un essai où elle réduit l’humanité à une opposition «Blancs-Noirs». Cette lecture raciste de l’Histoire ne résiste pas au tamis des faits mais ses partisans n’en restent pas moins déterminés à l’imposer. La surdité de la classe politique et de l’opinion publique face à cette menace fait craindre que la nation n'en vienne à se déchirer…', 'content' => '<p style="text-align: center;">Article publié sur <a href="https://www.herodote.net/Le_racisme_ne_se_cache_plus-article-2925.php" target="_blank" rel="noopener"><em>Herodote</em></a> le 26 novembre 2023</p> <hr /> <p>Peut-être connaissez-vous Léonora Miano ? Cette romancière d'origine camérounaise s’est attiré depuis quinze ans un succès appréciable par des récits qui mettent en scène une Afrique imaginaire avec une maîtrise rare de la langue française.</p> <p>En octobre 2023, elle est sortie de ce cadre avec un petit essai au titre provocateur : <em>L’opposé de la blancheur, Réflexions sur le problème blanc </em>(Seuil, 168 pages, 17,50 euros). En fait de réflexions, on a affaire à une construction déconnectée de l’histoire, de la culture et de la raison, qui réduit l’humanité à une opposition entre <em>« les Blancs »</em>, irrévocablement racistes, et <em>« les Subsahariens »</em>.</p> <p>Si nous en parlons aujourd’hui, c’est que cet essai reflète <a href="http://www.herodote.net/Faire_table_rase_de_l_Histoire_woke_et_cancel_culture-article-2886.php">les délires de certains cénacles</a> qui, sous prétexte d'<em>« antiracisme »</em>, replacent la race au coeur des enjeux politiques. </p> <p>Si marginaux soient-ils, ils sont repris par la classe politique, à l’extrême-gauche et jusqu’à la tête de l’État. Ils exaspèrent les Français de toutes origines qui aspirent à simplement <em>« faire nation » </em>dans le pays magnifique où ils sont nés ou qui les a accueillis et les poussent dans les bras des démagogues de tout poil. Plus gravement, ils désespèrent les jeunes gens issus d’unions mixtes, plus nombreux en France qu’en aucun autre pays, sommés de choisir entre père et mère. Ils produisent enfin du ressentiment et du racisme dans les populations déclassées jusqu’à les conduire à des actes abominables (<em>« planter du Blanc »</em>). </p> <p>Il est troublant que ces délires racistes en viennent à séduire une romancière au demeurant aimable, qui a les honneurs de Radio France et fait les couvertures des magazines de mode. Aussi nous paraît-il important de rappeler quelques faits élémentaires caractéristiques de l’aventure humaine. Nous nous demanderons ensuite pourquoi les intellectuels précités sont imperméables à ces réalités.</p> <h3>Négation de la diversité</h3> <p>Les premiers mots au dos de la couverture de <em>L’Opposé de la blancheur </em>résument la thèse du livre : <em>« La domination d’un Occident raciste, à l’intérieur de ses frontières et au-delà, n’a pu que renforcer les préjugés à l’encontre des personnes définies comme Noires »</em>.</p> <p>Cette formulation péremptoire a un fond de vérité. Il est notoire en effet que l’Occident a occupé une place dominante dans le monde pendant deux ou trois siècles ; qu’il connaît comme le reste du monde, à des degrés variables, des comportements que l’on peut qualifier de racistes ; que certaines personnes se disent à tort ou à raison victimes de préjugés eu égard à leur couleur de peau ou à tout autre caractéristique…</p> <p>Mais ces banalités ne justifient aucunement la formulation ci-dessus ! Léonora Miano attribue en effet à un groupe et lui seul – l’Occident – des traits – domination, racisme, préjugés – dont aucun groupe humain n’est exempt. Elle réduit l’humanité à une opposition Blancs-Noirs. C’est le même procédé rhétorique qu’employait par exemple <a href="https://www.herodote.net/Un_grand_ecrivain_en_depit_de_la_folie_antisemite-synthese-444.php">Louis-Ferdinand Céline</a> quand il affirmait que <em>« les Juifs »</em> étaient coupables de tout au prétexte que la haute finance et l’Internationale communiste comptaient des juifs en leur sein.</p> <p>Cette vision de l'Histoire n'est guère partagée dans le monde. Plus nombreux que les Africains, les Indiens, par exemple, tiennent <a href="https://www.herodote.net/De_la_John_Company_au_British_Raj_-synthese-399-157.php" target="_blank" rel="noopener">la colonisation britannique </a>pour un phénomène somme toute positif malgré sa brutalité : elle a quasi-unifié le pays et conduit à la renaissance hindoue. Aux États-Unis, ils se flattent d’avoir un revenu moyen plus élevé que tous les autres groupes ethniques, Anglo-Saxons inclus. Dans l’ancienne puissance coloniale, plusieurs des leurs (Rishi Sunak, Sadiq Khan, etc.) se sont hissés à la plus haute marche du pouvoir.</p> <p>Autant dire que les Indiens, pas plus que les Chinois et bien d'autres, ne se soucient pas de réécrire l'Histoire et diaboliser les Européens. Ils préfèrent emprunter à ceux-ci les outils qui leur ont valu le succès et les retourner contre eux. </p> <h3>Les crimes fantasmés de l'Europe</h3> <p>Une phrase de Léonora Miano résume la croyance sur laquelle l’extrême-gauche occidentale fonde aujourd’hui ses combats : <em>« Nul n’entreprendra ici d’énumérer les crimes commis à l’échelle de la planète par les nations occidentales, depuis plusieurs siècles. Même en ne se limitant qu’au XXe siècle, la tâche se révélerait vite déprimante »</em> (page 108).</p> <p>Énumérons-les justement, ces crimes !</p> <p><strong>- XVIe siècle : les Espagnols en Amérique</strong></p> <p>Quelques poignées d’aventuriers espagnols aux ordres des <em>conquistadores</em>Cortès et Pizarre abattent les puissants empires aztèque (Mexique) et inca (Pérou) en profitant des luttes internes à ces empires. Ils vont offrir aux Habsbourg d’Espagne un empire tissé non de colonies (un anachronisme) mais de vice-royautés qui associent avec plus ou moins de bonheur les vainqueurs et les vaincus.</p> <p>Ces conquêtes n’ont rien d’exceptionnel par leur violence. À la même époque, les Ottomans s’emparent de la Hongrie, le Maroc abat et soumet l’empire sahélien du Songhaï, la Perse et la Turquie se disputent le Moyen-Orient, les Moghols s’emparent d’une bonne partie de l’Inde, etc. </p> <p><strong>- XVIIe-XVIIIe siècles : la traite atlantique</strong></p> <p>Voilà le crime absolu : le <a href="https://www.herodote.net/La_traite_atlantique-synthese-14-123.php">trafic d’esclaves africains</a> vers les Amériques.</p> <p>L’esclavage est une pratique quasi-universelle en-dehors de l’Europe occidentale, qui s’en est préservée dès le Moyen Âge comme l’atteste un <a href="https://www.herodote.net/almanach-ID-3420.php">édit de Louis X le Hutin</a>. Il a atteint sa plus grande extension dans le monde arabo-islamique, d’abord avec l’exploitation de captifs slaves originaires d’Europe orientale (d’où le mot <em>« esclave »</em>, dérivé d’Esclavon ou Slave) puis avec le trafic de Noirs d’Afrique. En dix siècles, on estime que dix-sept millions ont ainsi traversé le Sahara, la mer Rouge ou l’océan Indien. S’ils n’ont pas eu de descendance, c’est du fait des mauvais traitements et de la castration systématique, ce que le chercheur Tidiane N’Diaye qualifie de <em><a href="https://www.herodote.net/Le_genocide_voile-bibliographie-214.php">« génocide voilé »</a>.</em></p> <p>À la différence du reste de l’Europe occidentale, l’Espagne du sud et le Portugal, qui ont été colonisés par les Arabes, n’ont jamais cessé d’employer des esclaves de toutes origines.</p> <p>Quand il s’est agi de valoriser le potentiel du Nouveau Monde (mines et plantations), Espagnols et Portugais ont emmené des esclaves de chez eux avant d’aller directement s’approvisionner auprès des marchands africains du golfe de Guinée.</p> <p>En 1619, une poignée d’Africains ont été conduits dans la colonie anglaise de Virginie avec le même contrat que les travailleurs européens <em>« engagés »</em> sur les plantations. Mais à mesure que leur nombre s’est accru, leur statut juridique s’est dégradé jusqu’à celui d’esclave.</p> <p>C’est en définitive au XVIIIe siècle avec le commerce du sucre puis au XIXe avec celui du coton que le trafic a pris sa plus grande extension jusqu’à déplacer un total de onze millions d’Africains. Les États européens, y compris bien sûr le <a href="https://www.herodote.net/Condamnations_en_haut_lieu_accommodements_locaux-synthese-2411-123.php">Saint-Siège</a>, ont toujours réprouvé cette pratique mais faute de pouvoir sévir outre-mer, ils ont choisi de l’encadrer autant que faire se peut avec par exemple le <em><a href="https://www.herodote.net/Louis_XIV_reaffirme_son_autorite_sur_les_colons-synthese-2108.php">« Code noir »</a></em>.</p> <p>À la fin du XVIIIe siècle, seuls dans le monde, les Occidentaux ont entrepris d’<a href="https://www.herodote.net/Heurs_et_malheurs_de_l_abolitionnisme-synthese-412-123.php">en finir avec la traite et l’esclavage</a> en dépit des intérêts financiers en jeu (songeons à la difficulté que nous avons aujourd’hui de lutter contre le dérèglement climatique !).</p> <p>Si la traite atlantique suscite autant de débats aujourd’hui en Occident, ce n’est donc pas qu’elle dépassât en horreur tout le reste mais que nous soyons aujourd’hui encore les seuls à nous émouvoir de ce genre de pratique.</p> <p>Sur tous les autres continents, l’esclavage peut perdurer en toute impunité et ne suscite qu’indifférence : en Afrique noire où il est massivement pratiqué depuis quelques millénaires, dans le monde islamique (songeons au traitement des migrants africains en Libye ou en Arabie), dans le sous-continent indien, en Amérique du sud et même en Chine d’après ce que nous savons du mauvais sort fait aux Ouïghours.</p> <p>En nous focalisant sur la traite européenne d’antan avec Léonora Miano et ses comparses, nous rendons un très mauvais service à tous ces malheureux encore bien vivants et abandonnés à leur sort.</p> <p><strong>- XIXe siècle : la colonisation</strong></p> <p>Voilà encore un mot ravageur : la colonisation.</p> <p>Du latin <em>colere</em>, <em>« cultiver »</em>, ce mot désigne en premier lieu le phénomène universel qui, depuis dix mille ans, conduit les peuples sédentaires à mettre en culture les terres vides d’hommes ou seulement parcourues par des chasseurs-cueilleurs. Ce phénomène se poursuit aujourd’hui en Amazonie, en Afrique centrale et en quelques autres contrées.</p> <p>Bien entendu, ce n’est pas à ce phénomène que pensent Léonora Miano et les <em>« décoloniaux »</em> quand ils dénoncent la colonisation. Ils font référence à l’occupation de l’Afrique subsaharienne par les puissances européennes. Celles-ci, dans un premier temps, se sont contentées de créer des <a href="https://www.herodote.net/12_decembre_1481-evenement-14811212.php">comptoirs littoraux</a> à des fins commerciales. Elles ne se sont pas souciées de conquérir des territoires (hormis l’Algérie que les Français ont occupée malgré eux pour mettre fin à la guerre d’Abd el-Kader).</p> <p>C’est seulement en 1872 que les gouvernants occidentaux (<a href="https://www.herodote.net/almanach-ID-1223.php">Disraeli, Gambetta</a>) se mettent en tête de <em>« civiliser »</em> le monde et notamment l’Afrique noire. Celle-ci est encore quasiment inconnue des Européens à l’exception des littoraux, de la vallée du Sénégal et de la pointe australe du continent. En moins de trois décennies, elle va être partagée entre la France et l’Angleterre ainsi que l’Allemagne, le Portugal et le roi des Belges.</p> <p>En 1912, le protectorat français sur le Maroc mettra un terme aux <a href="https://www.herodote.net/Une_poignee_d_hommes_a_la_conquete_d_un_continent-synthese-3084-134.php">conquêtes coloniales</a>, lesquelles auront mobilisé très peu de moyens, quelques milliers de soldats et d’administrateurs et si l’on met à part les méfaits de la <a href="https://www.herodote.net/20_avril_1899-evenement-18990420.php">colonne Voulet-Chanoine</a>, elles auront coûté relativement peu de vies en comparaison des guerres intra-africaines comme celles de Chaka.</p> <p>En 1960, la plupart des États créés par les Européens seront devenus indépendants. Pour une grande partie de l'Afrique, la <a href="https://www.herodote.net/La_parenthese_coloniale_1880_1960_-synthese-471-134.php">parenthèse coloniale</a> aura à peine duré une vie d’homme. Mais elle aura permis la constitution d’États relativement solides dotés d’une langue fédératrice (l’anglais ou le français) ainsi que d’une ébauche d’administration, ce dont lui ont été reconnaissants les leaders indépendantistes, Senghor, Houphouët-Boigny, Nkrumah, Nyerere, Ahidjo, etc.</p> <p>Si <a href="https://www.herodote.net/Illusions_et_desillusions_des_independances-synthese-642-347.php">l’Afrique indépendante</a> a trahi les espoirs placés en elle, la faute en revient à ces mêmes leaders et à leurs successeurs, qui n’ont pas su ou pu résister aux prédateurs en tous genres avides de s’approprier les ressources du sous-sol africain, d’abord les sociétés multinationales, aujourd’hui la Chine.</p> <p><strong>- XXe siècle : le racisme</strong></p> <p>Le terme de racisme est apparu dans les années 1930 pour désigner les systèmes de pensée qui hiérarchisent les groupes humains en fonction de leur phénotype (couleur de peau), de leur religion ou de leur nationalité.</p> <p>En Europe, ces systèmes de pensée sont apparus à la fin du XIXe siècle mais, jusqu’à l’avènement du nazisme, ils sont demeurés ultra-minoritaires, tout particulièrement en France, où se réfugièrent beaucoup d'artistes afro-américains après la Grande Guerre.</p> <p>En Amérique du nord, c’est au milieu du XVIIe siècle que les colons anglais ont formalisé dans la loi une différence de nature entre les Noirs et les Européens pour justifier l’esclavage !</p> <p>Ces colons, bons chrétiens par ailleurs, ont pour l’occasion ressorti de la naphtaline un commentaire de la Bible relatif à la <a href="https://www.herodote.net/Cham_malediction_de_Cham-mot-435.php">malédiction de Cham</a>. Elle avait déjà été employée pour les mêmes raisons par un exégète musulman du Xe siècle. Il avait prétendu que les Noirs étaient les descendants de Canaan, fils de Cham. Or, comme chacun est sensé le savoir, il est dit dans la Genèse que Noé a dit dans un moment de colère : <em>« Maudit soit Canaan, qu'il soit le dernier des serviteurs de ses frères ! »</em> C’est ainsi que les musulmans puis les colons anglais se sont autorisés à réduire les Noirs en esclavage.</p> <p>De fait, c’est dès les débuts de l’islam qu’est apparu le racisme anti-Noirs. Les <em><a href="https://www.herodote.net/Des_contes_immemoriaux_aureoles_de_mystere-synthese-1915.php">Mille et Une Nuits</a> </em>comme les écrits d’<a href="https://www.herodote.net/Un_penseur_pour_notre_temps-synthese-3163-482.php">Ibn Khaldoun</a>, historien du XIVe siècle, ne laissent aucun doute sur sa violence en terre d’islam, très supérieure à tout ce que l’on a pu connaître dans les colonies de plantation américaines.</p> <p>Cela dit, d’une manière générale, le racisme remonte aux débuts de l’Histoire et c’est, avec l’esclavage, l’un des travers les mieux partagés de l’humanité, chaque communauté humaine ayant la tentation de se prendre pour le centre du monde. Chez les chasseurs-cueilleurs, le qualificatif d'humain était souvent réservé aux membres de la tribu et, dans un esprit voisin, l'empire chinois se qualifiait d'<em>« Empire du Milieu »</em>. Plus gravement, le racisme du mépris se manifeste dans les rapports entre communautés voisines. Ce sont les Bantous qui oppriment les Aborigènes d'Afrique (Pygmées, Khoisans, etc.) ou encore les Touaregs et autre nomades du Sahel qui chassent et combattent les Noirs sédentaires. </p> <h3>La «haine du Blanc», une affaire de Blancs</h3> <p>L'argumentation ci-dessus, si fondée soit-elle, ne fera pas changer d'avis les personnes qui s'appliquent à dépeindre l'Occident comme le mal absolu. Elles iront chercher des contre-arguments plus absurdes les uns que les autres chez d'autres personnes qui partagent leur opinion, généralement diplômées comme elles, bien insérées dans la société comme elles et appartenant pour beaucoup d'entre elles à l'élite intellectuelle occidentale !</p> <p>Ainsi, dans son essai <em>L’Opposé de la blancheur</em>, Léonora Miano, sauf exception, ne fait référence à aucun historien ou anthropologue connu, ne fut-ce que pour les contredire. Elle s’en tient à citer quelques essayistes contemporains et méconnus qui partagent les mêmes convictions qu’elles. Elle s’appuie aussi sur des films engagés des trente dernières années qui racontent la ségrégation et l’esclavage. C’est un peu comme d’expliquer Napoléon en prenant pour référence le film fantaisiste de Ridley Scott, aujourd’hui sur les écrans !</p> <p>Ce phénomène d'enfermement mental est appelé <em>« dissonance cognitive »</em> par les spécialistes qui travaillent sur les sectes. Et de fait, il est de nature sectaire et rappelle la formule faussement prêtée à un théologien chrétien du IIe siècle, Tertullien (150-220) : <em>« Je crois parce que c'est absurde ! »</em> (<em>Credo quia absurdum</em>).</p> <p>Il se distingue fondamentalement des grandes religions car à leur différence, il n'unit pas les hommes dans l'espérance en un avenir meilleur avant ou après la mort. Rappelons à ce propos l'étymologie du mot religion qui a la faveur des linguistes est le latin <em>relegere</em> (<em>« relier »</em>) : la religion est à l'origine ce qui relie les hommes entre eux (<a href="https://www.herodote.net/religion_religions-mot-334.php">dico</a>). Et l'on peut noter que dans la Rome antique, le magistrat qui avait en charge l'organisation des cultes était aussi celui qui s'occupait de la gestion des ponts ! On l'appelait pour cela <em>pontife </em>et ce titre demeure attaché au pape, souverain de l'Église catholique !</p> <p>Rien de tel avec les propagandistes ci-dessus. En montant les Noirs contre les Blancs (sans égard pour les métis), mais aussi les antisionistes contre les juifs et même les féministes contre les <em>« trans »</em> (et réciproquement), ils visent à diviser les hommes, nourrir leur haine, susciter les attaques au couteau... sans autre horizon que la brutalisation de la société et la guerre civile.</p> <p>On peut se demander à quoi rime cette folie. Un essayiste ivoirien du nom de Kakou Ernest Tigori, découvert par notre ami l'historien Gabriel Martinez-Gros, nous apporte une grille d'explication surprenante et féconde dans un livre qui vient de sortir : <a href="https://www.herodote.net/L_Afrique_a_desintoxiquer-bibliographie-731.php"><em>Haine du blanc et monde noir</em></a> (Mature Afrik, 2023).</p> <p>La <em>« haine du Blanc »</em>, observe Tigori, n'est pas le fait des Noirs. C'est la poursuite du combat engagé il y a plus de cent ans par une fraction des Européens contre la société occidentale en vue de la renverser.<em> </em>La haine du Blanc est la tâche assignée aux Noirs par <a href="https://www.herodote.net/Droite_et_gauche_des_realites_toujours_actuelles-synthese-2249-492.php">le camp du mouvement</a> (l'extrême-gauche) dans la guerre civile européenne.</p> <p>Il n'est pas anodin que ce discours soit porté en premier lieu par des militants au patronyme <em>« bien de chez nous »</em> qui ont rêvé du <em>« Grand Soir »</em> communiste. Désespérant de changer les structures sociales de leur pays par la lutte des classes, ils jouent désormais la carte de la lutte des races et tentent pour ce faire d'embrigader dans leur combat nauséeux les intellectuels noirs et les laissés-pour-compte de l'immigration !</p> <p>Léonora Miano elle-même semble lucide sur cette mystification et laisse poindre son amertume quand elle constate que les Européens ont enseigné aux Africains des principes et des valeurs comme le renoncement à la nudité et, plus sérieusement, la foi en un Dieu rédempteur, et viennent aujourd'hui les sommer au nom du <em>« progrès »</em> de renoncer à ces principes et ces valeurs !</p> <p>Qu'y comprendre ? <em>« Ce n'est pas seulement le dieu chrétien qui est de nos jours mis au rebut, mais une bonne partie des valeurs, du mode de vie qui l'accompagnaient,</em> constate la romancière avec dépit.<em> La France de notre temps, qui se veut meilleure que celle de ses pères, en particulier par son progressisme, semble différente de celle qui s'abattit sur les Subsahariens, les forçant à un remodelage sans lequel ils se seraient condamnés à mort. »</em></p> <p><em>« À combien de mutations identitaires peut-on soumettre les autres, à quel rythme et au nom de quoi exactement, si ce n'est la supériorité de l'occidentalité ?</em> observe-t-elle avec justesse. <em>Ce que la France actuelle, très sécularisée, a conservé de l'époque où elle se faisait l'obligation d'évangéliser les sauvages, c'est la certitude de détenir des vérités révélées »</em></p> <p>Nous faisons nôtre sa conclusion. Quel enseignement en tirer ? Rien d'autre que de rester fermes sur nos savoirs et nos convictions morales, ne rien céder aux propagandistes de la haine et du racisme, fussent-ils <em>« progressistes »</em> et <em>« de gauche »</em>, nous garder d'endoctriner les autres peuples au nom d'une prétendue supériorité de nos valeurs.</p>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'racisme-l-histoire-bafouee', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 65, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => 'https://www.herodote.net/Le_racisme_ne_se_cache_plus-article-2925.php', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 8, 'person_id' => (int) 13918, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [[maximum depth reached]], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 4606, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => false, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => null, 'readed' => null, 'subhead' => null, 'title' => 'Instable Argentine: 2003-2023, heurts et malheurs du kirchnérisme', 'subtitle' => 'Les 19 et 20 décembre 2001, une foule de manifestants en colère investit le centre de Buenos Aires et la Casa Rosada (la Maison Rose), siège du président de la République argentine. Depuis plusieurs semaines, dans la capitale, la situation n'en finit pas de se tendre. Les grèves se multiplient ainsi que les pillages de supermarchés avec un cri partout répété: «Que se vayan todos!» (Qu'ils s'en aillent tous [les politiciens]!)...', 'subtitle_edition' => 'Les 19 et 20 décembre 2001, une foule de manifestants en colère investit le centre de Buenos Aires et la Casa Rosada (la Maison Rose), siège du président de la République argentine. Depuis plusieurs semaines, dans la capitale, la situation n'en finit pas de se tendre. Les grèves se multiplient ainsi que les pillages de supermarchés avec un cri partout répété: «Que se vayan todos!» (Qu'ils s'en aillent tous [les politiciens]!)...', 'content' => '<p style="text-align: center;">Article publié sur <a href="https://www.herodote.net/histoire/evenement.php?jour=20011220&ID_dossier=302" target="_blank" rel="noopener"><em>Herodote</em></a> le 20 novembre 2023</p> <hr /> <p>Le président radical Fernando de la Rúa, décrète alors l'état de siège et la police tente de dégager sa résidence. La répression fait une quarantaine de morts mais la pression ne faiblit pas. De guerre lasse, le chef de l'État s'enfuit en hélicoptère.</p> <p>Les émeutiers ont vaincu mais le pays est une nouvelle fois au bord du gouffre. C'est l'aboutissement douloureux d'une politique néolibérale entreprise par le précédent président, le flamboyant Carlos Menem, qui avait dû renoncer au pouvoir en 1999.</p> <p>En 2003, l'arrivée à la présidence de Néstor Kirchner, un péroniste <em>« de gauche »</em> va ramener le retour à la stabilité... sans que quiconque imagine toutefois que l'Argentine redevienne comme il y a un siècle ou seulement un demi-siècle l'un des pays les plus prospères de la planète. Vingt ans plus tard, l'élection d'un électron libre ultralibéral, Javier Milei, sonne le glas de cette embellie et la fin du <em>« kirchnérisme »</em>. Sera-ce pour autant la fin du péronisme, une doctrine sociale héritée de <a href="https://www.herodote.net/histoire/evenement.php?jour=19451017&ID_dossier=302">Juan Domingo Perón</a>, au pouvoir de 1945 à 1955 ? L'avenir le dira.</p> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1700675872_milei.jpg" class="img-responsive img-fluid center " width="256" height="323" /></p> <h3>L'Argentine dans l'ornière</h3> <p>Les données de la Banque mondiale attestent du décrochage économique de l'Argentine au cours des dernières décennies. En 1970, son PIB/habitant talonnait celui de la France et cinq à six fois supérieur à celui du Brésil. Aujourd'hui, il dépasse de moitié celui du Brésil mais est trois inférieur à celui de la France.<br />Toutefois, ces données économiques méritent d'être tempérées par les données sanitaires qui demeurent honorables, grâce en soit rendue au niveau éducatif de la population. L'espérance de vie en Argentine a progressé au même rythme qu'en France et la mortalité infantile (décès pour mille enfants de moins d'un an) est au même niveau qu'aux États-Unis (il est vrai que les États-Unis affichent des performances calamiteuses en matière de santé eu égard à leur puissance économique).</p> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1700675997_capturedcran2023112218.59.13.png" class="img-responsive img-fluid center " width="577" height="124" /></p> <h3>Les charmes factices de la «dollarisation»</h3> <p>Après les <a href="safari-reader://www.herodote.net/histoire/evenement.php?jour=19451017">déceptions du </a><em><a href="safari-reader://www.herodote.net/histoire/evenement.php?jour=19451017">péronisme</a> </em>et les <a href="safari-reader://www.herodote.net/histoire/evenement.php?jour=19820614">crimes de la dictature militaire</a>, les Argentins ont cherché à revenir dans la normalité en portant à la présidence le tranquille radical Raúl Alfonsín le 10 décembre 1983 puis le péroniste Carlos Menem le 8 juillet 1989. Le monde connaît alors la chute du système soviétique et le triomphe des États-Unis et de leur système économique.</p> <p>L'Argentine elle-même ne s'est pas remise de ses démons. Elle souffre d'hyperinflation et peine à exporter ses produits traditionnels (céréales, viande, vins...). Les classes possédantes craignent que l'inflation ne dissolve leurs capitaux et transfèrent ceux-ci à l'étranger.</p> <p>Le nouveau président se rallie à la doctrine monétariste de Milton Friedman, chef de file de l'école de Chicago, selon laquelle un État doit laisser <em>« le marché »</em> faire son office et se contenter de stabiliser sa monnaie.</p> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1700676210_menem.jpg" class="img-responsive img-fluid center " width="275" height="394" /></p> <p>Carlos Menem (photo) juge donc primordial d'enrayer l'inflation (<a href="safari-reader://www.herodote.net/inflation_deflation-mot-439.php">dico</a>) et pour cela aligne la monnaie sur le dollar. Le 1er janvier 1992, il crée un <em>« nouveau peso »</em> dont l'État garantit la parité avec le dollar américain (un peso = un dollar).</p> <p>Dans le même temps, il privatise le très important secteur public légué par Perón et libère les échanges. Le 26 mars 1991, à Asunción (Paraguay), il fonde avec ses homologues du Paraguay, du Brésil et de l'Uruguay un marché commun inspiré de l'expérience européenne. C'est le <em>Mercosur </em>(<em>Mercado Común del Sur</em>).</p> <p>Les résultats ne se font pas attendre : l'inflation retombe à des niveaux très bas et les investisseurs étrangers affluent et achètent à tour de bras les entreprises publiques (transports, énergie, eau...). Michel Camdessus, directeur général du Fonds Monétaire International, ne tarit pas d'éloges sur le <em>« miracle argentin »</em>. </p> <p>Mais les exportations s'effondrent du fait qu'exprimées en dollars, elles ne sont plus concurrentielles sur les marchés étrangers. Le déficit commercial devient abyssal.</p> <p>Les inégalités explosent très vite. Tandis que la bourgeoisie, riche de ses capitaux placés à l'étranger ou dans les entreprises de services, jouit sans entrave des produits et des technologies dernier cri, les chômeurs remplissent les bidonvilles des faubourgs de Buenos Aires. Le <em>« miracle économique »</em>, fondé sur la spéculation et non la production, n'est pas sans rappeler la situation de l'Espagne dans les années 2000 avec sa <em>bulle </em>immobilière.</p> <p>Son caractère factice apparaît très vite. À partir de 1998, le pays entre en récession et plus d'un cinquième de la population est bientôt touché par le chômage. La fuite des capitaux s'accélère jusqu'à atteindre les 200 milliards de dollars.</p> <p>Fernando de la Rúa, qui succède le 10 décembre 1999 à Carlos Menem, n'ose pas plus que ce dernier remettre en cause l'arrimage de la monnaie nationale au dollar. Il appelle le FMI au secours et reçoit une aide de 40 milliards de dollars. Lui-même lance un classique programme de relance de 20 milliards de dollars (grands travaux...).</p> <p>Mais rien n'y fait et l'Argentine s'enfonce dans la crise. Le taux d'intérêt auquel l'État doit rembourser sa dette devient prohibitif. Dans les rues, les ménagères en colère manifestent bruyamment avec des concerts de casseroles. Amère désillusion pour ce pays qui se flattait quelques années plus tôt d'être le plus riche du continent sud-américain.</p> <p>Le 1er novembre 2001, au bord de la crise de nerfs, le gouvernement exige de ses créanciers un rééchelonnement et une réduction de sa dette. Insuffisant. </p> <p>Début décembre 2001, pour limiter tant bien que mal la fuite des capitaux, il établit le contrôle des changes et limite les retraits bancaires à 250 euros par semaine. C'est le <em>« corralito »</em> (<em>petit enclos</em>), une vexation qui porte à son paroxisme la colère des classes moyennes. Après son soulèvement et la fuite piteuse du président, il ne reste plus qu'à reconstruire le pays dans l'improvisation.</p> <h3>Un sursaut inattendu</h3> <p>Dans les deux semaines qui suivent, l'Argentine change quatre fois de président. À la fin décembre, le gouvernement se résout à faire défaut sur sa dette publique extérieure. Le président par intérim Eduardo Duhalde se lamente : <em>« L'Argentine est en faillite. Notre modèle pervers a jeté 2 millions de compatriotes dans l'indigence, détruit la classe moyenne et nos industries »</em>(note).</p> <p>Le 6 janvier 2002, constatant avec retard que le contrôle des changes paralyse l'activité, il se résout à dévaluer le peso de 28 % par rapport au dollar. C'est la fin de la <em>« dollarisation »</em>. La monnaie nationale va pouvoir retrouver son cours naturel, tel que la valeur des importations (en devises étrangères) s'aligne sur la valeur des exportations (en pesos).</p> <p>La transition est extrêmement brutale et semble donner raison aux prophètes de malheur qui, à Washington, au FMI, dénonçaient le retour à une monnaie flexible. Rien qu'en 2002, le PIB (richesse nationale) s'effondre de 11% et les prix en pesos flambent d'environ 30%. </p> <p>Mais les Argentins se reprennent très vite et dans les années suivantes, la croissance économique repart de plus belle avec des taux à la chinoise de l'ordre de 6 à 8 % par an. Grâce à la dévaluation et à la libre fluctuation des monnaies, elle bénéficie d'un taux de change très avantageux (3,6 pesos pour un dollar), et aussi (et surtout) de l'explosion de la demande chinoise en produits de base (céréales, vin, soja, viande...).</p> <p>Fort de cette conjoncture, Roberto Lavagna, ministre de l'Économie, peut <em>« restructurer » </em>la dette publique de 100 milliards de dollars, autrement dit négocier avec ses créanciers une <em>« décote » </em>(réduction) de 75%. À prendre ou à laisser. </p> <p>Le 25 mai 2003, Néstor Kirchner, issu des Jeunesses péronistes, est élu à la présidence de la République. Il mène à bien la restructuration de la dette engagée par Roberto Lavagna et peut tranquillement gérer la prospérité retrouvée en s'affichant fidèle au <em>justicialisme</em>, <a href="https://www.herodote.net/histoire/evenement.php?jour=19451017&ID_dossier=302">la doctrine de Perón</a> (1945-1955).</p> <p>Revenue des illusions passées, l'Argentine multiplie les dispositions protectionnistes, jusqu'à vider de son contenu le traité de libre-échange du <em>Mercosur</em>. Elle est donnée en exemple par le Prix Nobel d'économie Paul Krugman. Encore doit-elle résister au péché populiste, avec une classe politique qui dilapide les ressources de l'État dans une fonction publique surdimensionnée...</p> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1700676301_kirchner.jpeg" class="img-responsive img-fluid center " width="488" height="325" /></p> <h3>Le retour de la tentation populiste</h3> <p>Le 10 décembre 2007, au terme des deux mandats autorisés par la Constitution, Néstor Kirchner s'est offert le luxe de transmettre la présidence à son épouse Cristina Fernández de Kirchner. Celle-ci a poursuivi son oeuvre tout en faisant face à partir de 2008 à la <a href="https://www.herodote.net/24_juin_2007-evenement-20070624.php">crise des </a><em><a href="https://www.herodote.net/24_juin_2007-evenement-20070624.php">subprimes</a> </em>et à l'effondrement de la demande chinoise. Les gains à l'exportation ont diminué sous l'effet de la crise mondiale de sorte que l'excédent commercial s'est réduit comme peau de chagrin.</p> <p>Après une décennie de prospérité qui n'a pas mis fin aux tentations clientélistes, le climat n'a pas tardé à s'assombrir de nouveau. Les habitants se voient privés des bénéfices de la croissance par une inflation de plus de 20% par an. L'État, revenu à ses anciens errements, ponctionne les exportations agro-alimentaires par de lourdes taxes pour financer la fonction publique. Dans l'industrie, pour ne rien arranger, les actionnaires, étrangers pour la plupart, choisissent de rapatrier leurs bénéfices plutôt que de les réinvestir sur place.</p> <p>Le 10 décembre 2019, à défaut de pouvoir se faire réélire, Christina Kirchner a cédé son fauteuil à Alberto Fernández tout en s'arrogeant une vice-présidence qui lui laissait la réalité du pouvoir.</p> <p>Las, en 2023, c'est dans une ambiance d’une grande instabilité et de désenchantement de la politique que l’Argentine commémore les 40 ans de démocratie, rétablie en 1983 après une des dictatures les plus violentes de son histoire...</p> <p>Avec l'accentuation de la crise économique, quarante pour cent de la population se trouve en 2023 au-dessous du seuil de pauvreté. Quatre travailleurs sur 10 ne sont pas déclarés. Presque 50% des gens reçoivent quelque forme d’aide sociale, telles que l'allocation universelle pour enfant (AUH), les programmes (subventions) <em>Potenciar Trabajo, Alimentar y Progresar</em>, <em>Más y mejor trabajo</em> ainsi que les pensions non contributives (celles qui ne nécessitent pas de cotisations pendant la vie active et qui fournissent un revenu de 80% de la pension minimale). Le pays est lourdement endetté et le Fonds Monétaire International exige une politique d’austérité difficile à mener dans ce contexte et surtout en période électorale.</p> <p>L’inflation a dépassé les 100% annuel (6,3% en juillet 2023) et les gens voient leur pouvoir d’achat s'effriter mois après mois. Dans ce pays magnifique, doté par la Nature de tous les dons, on en arrive à ce paradoxe consternant que la majorité des jeunes placent leurs espoirs dans un exil vers la vieille Europe, le continent qu'ont fui leurs aïeux !</p> <p>La <em>casta </em>(<em>« caste »</em>) au pouvoir se tient cependant éloignée de ces défis. Christina Kirchner s'en tient à dénoncer la <em>puja distributiva</em>, autrement dit la<em> « lutte pour l'accaparement des richesses »</em> menée par les riches. Quant au président Alberto Fernández, il multiplie les mesures sociétales à destination des minorités sexuelles et autres, notamment en prenant parti pour la <em>« théorie du genre »</em>, ce dont la masse des citoyens se contrefiche (d'autant que l'Argentine s'honore d'être depuis longtemps déjà le pays le moins machiste d'Amérique latine !).</p> <p>Il y a un sentiment de méfiance envers le système politique qui ne va pas jusqu’à mettre la démocratie en danger mais se traduit en abstention ou en vote pour un inconnu qui défie le statu quo. C'est ainsi que sorti de nulle part, Javier Milei est devenu l’instrument pour exprimer ce désenchantement, cette frustration répétée par rapport à des gestions politiques qui ont toutes mal tourné.</p> <p>Cet économiste ultralibéral de 53 ans, disciple de <a href="https://www.herodote.net/Bio/Friedman-biographie-RnJpZWRtYW4=.php">Milton Friedman</a>, qui se dit à la fois climatosceptique, fervent catholique (et hostile au pape argentin !), a été élu largement le 19 novembre 2023 avec 56% des suffrages face au ministre de l'économie du gouvernement sortant, le péroniste Sergio Massa. Reste à voir si ses recettes à l'emporte-pièce sortiront le pays de l'ornière.</p>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'instable-argentine-2003-2023-heurts-et-malheurs-du-kirchnerisme', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 72, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => 'https://www.herodote.net/histoire/evenement.php?jour=20011220&ID_dossier=302', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 8, 'person_id' => (int) 13918, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [ [maximum depth reached] ], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' } ] $embeds = [] $images = [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) { 'id' => (int) 10298, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'couture.jpg', 'type' => 'image', 'subtype' => 'jpeg', 'size' => (int) 79302, 'md5' => '7d7d79a1f6483db4b82330e102709295', 'width' => (int) 528, 'height' => (int) 400, 'date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'title' => '', 'description' => 'Thomas Couture, "Les Romains de la décadence" (détail),1847.', 'author' => '', 'copyright' => '', 'path' => '1686821915_couture.jpg', 'embed' => null, 'profile' => 'default', '_joinData' => object(Cake\ORM\Entity) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Attachments' } ] $audios = [] $comments = [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Comment) { 'id' => (int) 6279, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'status' => 'ACCEPTED', 'comment' => 'Très pertinent, merci !', 'post_id' => (int) 4307, 'user_id' => (int) 207, 'user' => object(App\Model\Entity\User) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Comments' } ] $author = 'André Larané' $description = 'L'Histoire s'écrit au présent. A chaque époque, nous regardons le passé avec nos préoccupations du moment et dans le souci de justifier nos orientations éthiques et politiques. Ainsi en est-il du regard porté sur la chute de l'empire romain.' $title = 'De la chute de Rome au déclin de l'Occident' $crawler = true $connected = null $menu_blocks = [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Block) { 'id' => (int) 56, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'active' => true, 'name' => '#Trends', 'subtitle' => null, 'description' => null, 'color' => null, 'order' => null, 'position' => null, 'type' => 'menu', 'slug' => 'menu_tags', 'extern_url' => null, 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'posts' => [[maximum depth reached]], '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Blocks' }, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Block) { 'id' => (int) 55, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'active' => true, 'name' => 'Les plus lus cette semaine', 'subtitle' => null, 'description' => null, 'color' => null, 'order' => null, 'position' => null, 'type' => 'menu', 'slug' => 'menu_highlight', 'extern_url' => null, 'tags' => [[maximum depth reached]], 'posts' => [ [maximum depth reached] ], '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Blocks' } ] $menu = [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 2, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'A vif', 'menu' => true, 'menu_order' => (int) 4, 'description' => 'Lorsque nos auteurs ont envie de réagir sur le vif à un événement, des concerts aux disparitions célèbres, ils confient leurs écrits à la rubrique "A vif", afin que ceux-ci soient publiés dans l’instant.', 'slug' => 'a-vif', 'attachment_id' => '0', 'lft' => null, 'rght' => null, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 3, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Chronique', 'menu' => true, 'menu_order' => (int) 5, 'description' => '<p>La réputation des chroniqueurs de Bon pour la tête n’est plus à faire: Tout va bien, Le billet du Vaurien, la chronique de JLK, ou encore Migraine et In#actuel, il y en a pour tous les goûts!</p>', 'slug' => 'chroniques', 'attachment_id' => '0', 'lft' => null, 'rght' => null, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 4, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Lu ailleurs', 'menu' => true, 'menu_order' => (int) 5, 'description' => 'Pourquoi ne pas mettre en avant nos collègues lorsque l'on est sensibles à leur travail? Dans la rubrique « Lu ailleurs » vous trouverez des reprises choisies par la rédaction et remaniées façon BPLT.', 'slug' => 'ailleurs', 'attachment_id' => '0', 'lft' => null, 'rght' => null, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 5, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Actuel', 'menu' => true, 'menu_order' => (int) 1, 'description' => 'Bon pour la tête n’a pas vocation à être un site d’actualité à proprement parler, car son équipe prend le temps et le recul nécessaire pour réagir à l’information.', 'slug' => 'actuel', 'attachment_id' => '0', 'lft' => null, 'rght' => null, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 4 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 6, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Culture', 'menu' => true, 'menu_order' => (int) 3, 'description' => '', 'slug' => 'culture', 'attachment_id' => '0', 'lft' => null, 'rght' => null, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 5 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 7, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Vos lettres', 'menu' => true, 'menu_order' => (int) 6, 'description' => 'Bon pour la tête donne la parole à ses lecteurs, qu’ils aient envie de partager leur avis, pousser un coup de gueule ou contribuer à la palette diversifiée d’articles publiés. A vous de jouer!', 'slug' => 'vos-lettres-a-bon-pour-la-tete', 'attachment_id' => '0', 'lft' => null, 'rght' => null, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 6 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 8, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Analyse', 'menu' => true, 'menu_order' => (int) 3, 'description' => '', 'slug' => 'analyse', 'attachment_id' => '0', 'lft' => null, 'rght' => null, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 7 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 10, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Science', 'menu' => true, 'menu_order' => null, 'description' => '', 'slug' => 'sciences', 'attachment_id' => '0', 'lft' => (int) 1, 'rght' => (int) 2, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 8 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 11, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Histoire', 'menu' => true, 'menu_order' => null, 'description' => '', 'slug' => 'histoire', 'attachment_id' => '0', 'lft' => (int) 3, 'rght' => (int) 4, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 9 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 12, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Humour', 'menu' => true, 'menu_order' => null, 'description' => '', 'slug' => 'humour', 'attachment_id' => '0', 'lft' => (int) 5, 'rght' => (int) 6, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 10 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 13, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Débat', 'menu' => true, 'menu_order' => null, 'description' => '', 'slug' => 'debat', 'attachment_id' => '0', 'lft' => (int) 7, 'rght' => (int) 8, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 11 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 14, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Opinion', 'menu' => true, 'menu_order' => null, 'description' => '', 'slug' => 'opinion', 'attachment_id' => '0', 'lft' => (int) 9, 'rght' => (int) 10, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 12 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 15, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Reportage', 'menu' => true, 'menu_order' => null, 'description' => '', 'slug' => 'reportage', 'attachment_id' => '0', 'lft' => (int) 11, 'rght' => (int) 12, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' } ] $edition = object(App\Model\Entity\Edition) { 'id' => (int) 118, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'num' => (int) 117, 'active' => true, 'title' => 'Edition 117', 'header' => null, '_joinData' => object(App\Model\Entity\EditionsPost) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ '*' => true, 'id' => false ], '[dirty]' => [], '[original]' => [], '[virtual]' => [], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [], '[invalid]' => [], '[repository]' => 'Editions' }include - APP/Template/Posts/view.ctp, line 147 Cake\View\View::_evaluate() - CORE/src/View/View.php, line 1435 Cake\View\View::_render() - CORE/src/View/View.php, line 1393 Cake\View\View::render() - CORE/src/View/View.php, line 892 Cake\Controller\Controller::render() - CORE/src/Controller/Controller.php, line 791 Cake\Http\ActionDispatcher::_invoke() - CORE/src/Http/ActionDispatcher.php, line 126 Cake\Http\ActionDispatcher::dispatch() - CORE/src/Http/ActionDispatcher.php, line 94 Cake\Http\BaseApplication::__invoke() - CORE/src/Http/BaseApplication.php, line 256 Cake\Http\Runner::__invoke() - CORE/src/Http/Runner.php, line 65 App\Middleware\IpMatchMiddleware::__invoke() - APP/Middleware/IpMatchMiddleware.php, line 28 Cake\Http\Runner::__invoke() - CORE/src/Http/Runner.php, line 65 Cake\Routing\Middleware\RoutingMiddleware::__invoke() - CORE/src/Routing/Middleware/RoutingMiddleware.php, line 164 Cake\Http\Runner::__invoke() - CORE/src/Http/Runner.php, line 65 Cors\Routing\Middleware\CorsMiddleware::__invoke() - ROOT/vendor/ozee31/cakephp-cors/src/Routing/Middleware/CorsMiddleware.php, line 32 Cake\Http\Runner::__invoke() - CORE/src/Http/Runner.php, line 65 Cake\Routing\Middleware\AssetMiddleware::__invoke() - CORE/src/Routing/Middleware/AssetMiddleware.php, line 88 Cake\Http\Runner::__invoke() - CORE/src/Http/Runner.php, line 65
Warning: file_put_contents(/data01/sites/bonpourlatete.com/dev/bonpourlatete.com/logs/debug.log) [function.file-put-contents]: failed to open stream: Permission denied in /data01/sites/bonpourlatete.com/dev/bonpourlatete.com/vendor/cakephp/cakephp/src/Log/Engine/FileLog.php on line 133
VOS RÉACTIONS SUR LE SUJET
1 Commentaire
@stef 30.07.2023 | 17h47
«Très pertinent, merci !»