Chronique / Tous ces jours de confinement à mieux vivre l’éveil du printemps…
© Matthias Rihs BPLT 2020
Où la 100e chronique de JL K s’allongea quelque peu, comme hors du temps, pour consigner les premiers jours d’une quarantaine imposée…
À la Maison bleue, ce mercredi 18 mars 2020. - Je me réveille la nuit dans le silence, le vague effroi que je ressens relève à la fois du dedans et du dehors, on ne sait plus où on en est, on est dans l’attente d’on ne sait quoi alors que les chiffres montent et que les experts évoquent des pics avec leurs airs graves de personnages institués sûrs et certains.
Les uns, qui se fient aux certitudes de la politique ou du commerce se gaussent des autres qui s’en tiennent aux convictions de la seule vraie foi en l’Unique, et d’autres décident de faire comme si de rien n’était, d’autres encore se cantonnent dans le pragmatique, et le débat silencieux fait rage; d’autres enfin vivent la chose et en bavent. Fin du délire extralucide d’avant l’aube...
Ce jeudi 19 mars. - Hier le merle de l’arrière-cour exultait à sa branche dessinée à l’encre de Chine sur le fond du ciel blanc; j’ai recommandé à Lady L. en visible souci pour tous de chanter elle aussi des airs allègres et suis sorti avec le Chien dont je vois qu’il continue lui aussi d’attendre quelque chose.
Peu avant sa mort, le vieux Théodore Monod me disait au téléphone qu’il ne voyait que les insectes pour s’en tirer à la longue, tout en prononçant chaque matin une Béatitude, et je me dis ce matin que l’âme humaine est une espèce d’immortelle abeille, et je me le répète sur la pelouse déserte descendant en douce pente vers le quai sans personne et le lac semblant lui aussi dans l’expectative silencieuse, tandis que partout et sans répit la rumeur océanique de la jactance nous sépare au lieu de nous lier.
Ce vendredi 20 mars. - Ce feu dans la gorge qui me réveille est de mauvais aloi sanitaire, me dit mon corps alors que tout dort dans la chambre blanche de la Maison bleue, et je me lève et prend un grand verre d’eau additionné de Dafalgan, puis un autre additionné de Resyl à la codéine. Cependant une horreur confuse m’a glacé hier soir en voyant les crânes jeunes gens onduler là-bas sous les magnolias en fleurs, le long du lac, tout enlacés en leur sensualité printanière et se baisant les lèvres en scandant le rap frondeur - et comme une tristesse m’a saisi devant leur possible panique un de ces jours prochains, la gorge en feu...
Ce samedi 21 mars. - On l’a dit après le 11 septembre, on l’a dit après les attentats de Charlie-Hebdo, on la répété après les attentats du Bataclan, on le serine aujourd’hui à tout-va: que rien ne sera jamais plus comme avant la pandémie, et chacun d’y aller, selon son bout de science ou son bout de croyance, sur les lendemains qui chanteront ou déchanteront, mais qui sait vraiment quoi?
Seul le Superman mondial de la Maison-Blanche prétend savoir l’Absolue Vérité en bonne logique orwellienne qui veut que ce qu’il veut soit vrai et qu’à chaque démenti des faits le faux qu’il a dit soit vrai, incarnation parfaite d’un aveuglement qui n’est pas que de son fait, ni que de sa bande, ni que de l’Occident, mais de toute une Espèce fuyant en avant comme une seule troupe affolée, obsédée par les trois instances du Progrès, du Pouvoir et du Profit?
Quant à moi je me ferais très bien à la décroissance, mais qui suis-je pour en appeler à un effondrement général du monde que nous connaissons? Qui sommes-nous pour jurer que nous nous accommoderons d’un monde soudain épuré de tout ce dont nous ne nous sommes jamais privés?
Tout à coup nous sommes au pied d’une sorte de mur invisible, mais est-ce nouveau? Certes, mais c’est nouveau depuis la nuit des âges, quand un enfant a découvert son premier oiseau mort. Il y a un avant l’éveil de la conscience, et un après. Le génie universel de l’enfant est de faire, de la mort d’un oiseau, un dessin à nul autre pareil: tel est le présent qui efface l'avant et l'après. Cela doit faire partie, je crois, des choses cachées depuis le début du monde, et le merle de notre arrière-cour y va de son triomphal chant de printemps, qui fait pièce à notre égarement.
Ce dimanche 22 mars .- Le goût mêlé, à la fois amer et rassurant, du Paracetamol et de la codéine, me restera peut-être, dans d’hypothétiques années à venir, tel celui de la petite madeleine proustienne, associé à ces jours où je me trouvais - comme des millions de mes congénères soudain voués au désoeuvrement forcé et à la songerie inquiète -, livré à l’observation du moindre de mes affects physiques jusque-là banalisés par l’expérience récurrente du rhume ou de ce que nous aurons appelé une bonne crève printanière, et c’est avec cette amertume aux lèvres que je me suis réveillé tout à l’heure de ma sieste quotidienne, après une matinée perturbée par force quintes de toux sèche, en me rappelant les moindres détails d’un rêve dans lequel l’état de guerre déclaré par les divers chefs nationaux advenait bel et bien dans le confinement où les tensions latentes éclataient bientôt en bulles d’agressivité, en anicroches verbales, en jets de salive ou de vaisselle, d’abord de façon sporadique ou ponctuelle (dans les familles dites dysfonctionnelles), puis, les jours passant, en gestes dépassant le cercle proche pour atteindre le voisinage, guerre aux étages et bientôt entre immeubles, mobilisation apparemment chaotique et pourtant obéissant à la logique brownienne observée en laboratoire entre les rats énervés, guerre en ville et par les campagnes aux humeurs exacerbées par l’éveil du printemps, guerre ensuite partout et avec toutes les armes les plus dangereuses arrachées à la quiétude domestique, couteaux et fourchettes, ciseaux et machettes, enfin inexorable montée aux extrêmes, tous se toussant soudain ouvertement au visage et justifiant les puissants et les profiteurs à reprendre la main - enfin ma sieste m’aura rappelé mes pires penchants imaginaires d’enfant paniqué devant un combat de scarabées…
Ce lundi 23 mars . - J’ai failli me laisser entraîner, hier soir tard, dans l’espèce de spirale morbide qui semble emporter le monde depuis quelque temps et se nourrit de la somme de nos anxiétés comme la Bête luxurieuse de Dante se repaît et gonfle sous l’effet de son inassouvissement même.
J’avais deux ou trois motifs de me compter parmi les sujets à risques de la pandémie - infarctus récent et souffle au cœur persistant, gorge en feu aggravée de courbatures musculaires un peu partout -, mais ce matin je dis non: assez de ce cinéma.
Le fait est que j’ai déjà signé deux formulaires explicites lors de mes récents séjours à l’hôpital, et je l’ai répété ce matin à Lady L. qui m’a prié d’en faire une note aussi claire qu’un codicille de testament: PAS D’ACHARNEMENT.
Ce qui signifie qu’on n’intubera pas mon corps immortel, je dis bien: mon corps immortel dont les cendres légères seront déposées au pied de l’épine noire de La Désirade, face au ciel et au lac, donc face aux montagnes qui s’en foutent - face à ceux que j’aime, donc face à l’Univers à jamais vibrant de mystère.
Ma conviction actuelle étant que je suis une Bible à moi seul, de la Genèse à l’Apocalypse, de même que les enfants de nos enfants sont des Bibles en train de s’écrire, je me fie tout entier à la sainte Écriture qui est celle de tous les savoirs et des non-savoirs, du Dieu caché et de ses multiples avatars, et la note que je laisse aux soignants de l’Urgence a valeur elle aussi de texte sacré: PAS D’ACHARNEMENT.
Je le dis assez joyeusement, quelque tristesse que j’éprouve de ne pas voir peut-être grandir nos petits enfants: PAS D’ACHARNEMENT, ce qui ne signifie aucunement que j’aie baissé les bras et vous abandonne à votre triste sort, mes pauvres vivants; j’étais réaliste à sept ans, je suis devenu idéaliste entre seize et vingt ans, et ce manque d’humilité m’a passé avec la reconnaissance clairvoyante de mes faiblesses et de celles de l’Espèce, pour me retrouver dur et doux comme en enfance, donc PAS D’ACHARNEMENT, mais rassurez-vous les enfants, rassure-toi ma bonne amie: le vieux sapajou s’accroche à la branche et trouve encore, miracle, la force têtue de se laver les mains…
Après quoi le jour se lève comme avant la pandémie, exigeant de notre espèce aussi bonne que mauvaise qu’elle fasse son job en pleine connaissance du fait que le virus fait partie de notre vie.
Ce mardi 24 mars. - Bien entendu la gauche de la gauche stigmatise la droite de la droite, et l’inverse à l’avenant, tous imbus de la même rage, tous jurant que seuls les autres sont responsables et répétant les TU DOIS et les IL FAUT le doigt levé prêt à punir faute d’avoir surveillé, et l’emballement des foules en houles décrit par Dante en ses girons infernaux de se déchaîner une fois de plus.
On aura entendu et lu tout et son contraire, depuis le début de ces jours étranges que nous vivons: jamais on n’aura entendu s’affirmer autant d’opinions expertes et péremptoires, autant de propos lénifiants ou provocants, et les uns et les autres de s'accuser mutuellement, et le serpent de se mordre la queue, mais encore?
Dans la foulée affolée, comme au-dessus de la mêlée, je me suis surpris à développer des vœux affreux relevant de fantasmes vengeurs, en me figurant l’effrondrement de l’édifice babélien de la richesse accaparée par la partie la plus rapace de nos semblables, la ruine de la maison Trump et la mise sous respirateur de son serial twitter, la ruine du tourisme et du sport de masse, la ruine en un mot du Système dont je m’exclus magiquement, moi et ceux que j’aime, comme si nous allions être épargnés par sélection divine spéciale, ainsi que se le figurent les élus des multiples églises dont les agglutinements récents ont pourtant contribué à la diffusion virale…
Bref, il y a celles et ceux que les circonstances vont peu à peu confiner dans une nouvelle forme exacerbée de haine, selon l’antique mécanique productrice de boucs émissaires (ce vieux dingo, l’autre jour sur le même quai, qui me disait que le virus allait enfin nous débarasser des basanés, ou ces voisins de soignants potentiellement contaminés enjoignant ceux-ci d’aller se faire voir ailleurs...) et sans doute éprouverons-nous tous peu ou prou cette pulsion panique en dépit de nos protestations au nom de la solidarité fraternelle et de la fratenité solidaire, mais encore?
Ce samedi 28 mars. - A Jean Ziegler qui me rappelle ce midi pour me demander des nouvelles de mes artères, je réponds qu’elles sont à moitié réparées et que je suis ces jours en pleine forme spirituelle, à vrai dire ravi de ce qui nous arrive, lui rappelant que la finalité de toute situation apocalyptique est une révélation et qu’à tous les degrés, à commencer par les instances du Pouvoir, et jusqu’aux plus infimes détails de la mesquinerie individuelle quotidienne, la pandémie à de quoi nous édifier ; mais c’est de ce qu’il vit, lui, que j’aimerais qu’il me parle...
Et bien entendu ce n’est pas de ses artères à lui qu’il me parle alors mais des gens en train de crever à Lesbos et dans les camps de réfugiés de partout, et des accusations d’irresponsabilité totale dont l’accablent les fonctionnaires de Bruxelles littéralement obnubilés par les effets collatéraux (racisme des populistes) des migrations et l’accusant, avec son livre défendant imperturbablement le droit d’asile, de faire du tort à l’Europe - et Jean de prononcer alors le nom de Munich.
Lequel nom me fait aussitôt rebondir aux années 1938-1940 telles que les raconte Julien Green dans son Journal dont je suis en train de finir la lecture des 1300 pages, quand l’Europe s’est couchée devant Hitler, où le jeune Américain voyait une manière de suicide et ce qu’il appellera «la fin d’un monde» dans le récit de ces années…
Alors Jean d’évoquer à son tour cette nouvelle forfaiture de l’Europe en invoquant le droit imprescriptible pour les réfugiés de passer les frontières, fondement de notre civilisation foulée aux pieds par les bureaucrates relançant bonnement la formule de la barque pleine, Das Boot ist voll, prononcé par le conseiller fédéral Eduard von Steiger en 1940 pour justifier la fermeture de nos frontières aux Juifs menacés par les nazis.
Certains de mes amis de droite voient en mon cher Jean un idiot utile, mais ce n’est pas par aveuglement «gauchiste», moins encore parce qu’il se soucie de mes artères, comme si c’étaient les siennes, que je me sens pleinement de son côté, mais du fait que, par delà toute idéologie, je sais que de ce qu’il défend dépend notre survie pour l’essentiel.
Et si ce qui nous arrive ces jours était la chance de notre vie,comme une révélation de tout ce qui est faux dans notre vie, et comme l’illumination de ce qu’est vraiment, mortelle, notre bonne et belle vie?
Le Passe-Muraille, invitation à la lecture…
Pour celles et ceux qui se trouvent en mal de lectures, je signale que nous sommes quelques-uns, avec l’aide du webmaster Joël Pizzotti, à relancer, sous forme numérique, le journal littéraire qui, pendant 20 ans, a été le passeur d’innombrables auteurs, de Suisse romande et de partout, mêlant textes inédits et entretiens, critiques et chroniques. Son accès est actuellement libre.
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Qui sommes-nous pour jurer que nous nous accommoderons d’un monde soudain épuré de tout ce dont nous ne nous sommes jamais privés?</p> <p>Tout à coup nous sommes au pied d’une sorte de mur invisible, mais est-ce nouveau? Certes, mais c’est nouveau depuis la nuit des âges, quand un enfant a découvert son premier oiseau mort. Il y a un avant l’éveil de la conscience, et un après. Le génie universel de l’enfant est de faire, de la mort d’un oiseau, un dessin à nul autre pareil: tel est le présent qui efface l'avant et l'après. 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Ainsi, dans la foulée proche d’une Aude Seigne (née en 1985) et de ses <em>Chroniques d’un Occident nomade</em>, Guillaume Gagnière trouve-t-il aussitôt son ton, pimenté d’humour, et son rythme allant, ses formules propres et la juste distance d’une écriture ni jetée comme dans un carnet de notes brutes ni trop fioriturée.</p> <p>Cela commence par un <em>Soliloque du corps </em>marqué par une première crise d’urticaire, entre la Malaisie et la Thaïlande, et qui subira plus tard force cloques et autres claquages de muscles, jusqu’à «une sorte de lupus» au fil de marches de plus de mille kilomètres, sans parler d’un épisode de pénible yoga soumis aux contorsions du caméléon écartelé ou du chameau asthmatique, entre autres coups de blues et de déprimes qui rappellent aussi celles du cher Nicolas à Ceylan… Cependant le corps exultera aussi en sa juvénile ardeur, de parties de surf en étreintes passagères, etc.</p> <h3><strong>Le cycle bouddhiste du pèlerinage, avec un grain de sel…</strong></h3> <p>Sans la candeur plus ou moins naïve, voire parfois jobarde, des routards des années 60-70 découvrant les spiritualités orientales, le pèlerin Guillaume, après s’être efforcé de ne penser à rien dans un centre de méditation thaïlandais proche de Chiang Mai (épisode comique finissant par « ça me gratte, qu’est-ce que c’est… un moustique, merde, concentre-toi, NE PENSEPAS! (…) Oh, une mésange !»), s’impose bel et bien les rigueurs de la longue marche japonaise, qu’il distingue clairement des chemins de Compostelle: «Dans le bouddhisme, le nirvana n’est pas l’équivalent de notre paradis: c’est le grand rien, la fin de tout désir. Le circuit des 88 temples de Shikoku, un cercle, se distingue des pèlerinages chrétiens qui tracent une droite. On ne marche pas du point A au point B en remportant à l’arrivée un prix de tombola spirituelle, on parcourt un cycle, partant de A pour revenir à A, puis l’on remet son ticket en jeu, encore et encore, jusqu’à ce que le concept de but ou de récompense s’épuise de lui-même».</p> <p>Or son livre reproduit pour ainsi dire le même tracé cyclique partant de la rue Indigo sri lankaise évoquée par Nicolas Bouvier, pour y revenir, non sans une pointe de mélancolie («la rue du récit, <em>sa </em>rue a sombré», avec une affectueuse lettre posthume du jeune homme à son modèle tutélaire. Rien pour autant de platement imitatif dans le récit du trentenaire, dont la poésie et la plasticité ont leur propre fraîcheur. Comme Bashô et Bouvier dans leur voyages respectifs, il multiplie ainsi les brèves notations, mais dans son langage à lui: «C’est alors qu’apparaissent les nuages, de larges masses d’un jaune de mégot froid», ou ceci: «Le soir, plat de curry en solitaire sous la Grande Ourse, les étoiles scintillent dans la casserole»…</p> <p>Parvenant au dernier des 88 temples, enfin, c’est avec un éclat de rire final qu’il fait ce constat: «Deux mois d’efforts sur plus de mille kilomètres, et à l’arrivée, un sommet baignant dans une épaisse purée de pois», ajoutant en sage mal rasé et puant sûrement le bouc: «Serait-ce un peu ça, le but: s’effacer à tel point que la notion de mort en devient naturelle». Et pour dépasser toute morosité nihiliste: «Finalement c’est peut-être ça, le «secret»: des montées, des descentes, des remontées et tout en haut, un grand calme: l’ataraxie. J’avais presque oublié à quel point cela pouvait être simple et beau, d’être en vie»…</p> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1591882458_unknown5.jpeg" class="img-responsive img-fluid normal " width="250" height="361" /></p> <h4><strong>Guillaume Gagnière, <em>Les Toupies d’Indigo Street</em>, Editions d’autre part, 2020. 110p.</strong></h4> <p> </p>', 'content_edition' => null, 'slug' => 'du-bonheur-d-etre-bien-vivant-sur-le-chemin-de-n-importe-ou', 'headline' => false, 'homepage' => 'col-md-12', 'like' => (int) 704, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 2406, 'homepage_order' => (int) 2646, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 3, 'person_id' => (int) 94, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [[maximum depth reached]], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 2378, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => true, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => 'NORMAL', 'readed' => null, 'subhead' => 'La chronique de JLK', 'title' => 'Les passions de Gemma Salem faisaient la pige à la mort ', 'subtitle' => 'Décédée à Vienne le 20 mai dernier, l’auteure du Roman de Monsieur Bulgakov et de quatre livres évoquant (superbement) la figure de Thomas Bernhard, entre autres autofictions et pièces de théâtre, était le contraire d’un bas-bleu. 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Les écrits de Gemma Salem sont autant de défis à toutes les détresses, des écrits comme qui dirait «pour la vie», donc des écrits qui chialent comme vous et qui rient pour tous - des écrits comme dictés par la vie et qui survivront parce qu’ils sont plus que de simples «récits de vie»; des écrits qui ne sont pas que de plates copies de la vie mais qui ajoutent à celle-ci la valeur ajoutée de ce qu’on appelle l’Art avec une grande aile, ou la Littérature à crâne majuscule, ou la Poésie mais sans chichis - et surtout musique à l’appui: la poésie de Schubert qui écrivait spécialement pour cette cinglée de Gemma - croyait-elle dur comme fer -, la poésie de Beethoven et son grand mouvement de rumba, la poésie de ce cœur de chien de Boulgakov, la folle poésie décavée de Jean Rhys en ses propres Tropiques passionnels, la poésie martelante et martelée de TB alias Thomas Bernhard à jamais inatteignable et bien avant qu’il l’eut précédée par delà les eaux sombres. Thomas Bernhard mort? Et quoi encore!</p> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1590690767_100073417_10223531313497816_3498760490526441472_n.jpg" class="img-responsive img-fluid normal " /></p> <h3><strong>Au commencent était l’Artiste</strong></h3> <p>Gemma, qui n’était pas encore Gemma Salem l’écrivain (jamais je n’arriverai à la dire «écrivaine» ou «autrice»), m’est apparue à la toute fin d’une soirée dans un caveau lausannois enfumé qui symbolisait alors la bohème locale, à l’enseigne des Faux-Nez, et tout aussitôt j’ai pensé: Princesse persane, Reine sarrasine, Shéhérazade à Gauloises bleues - et c’était parti pour un bout de comédie avec l’Actrice, vu qu’à l’époque Gemma Salem se croyait faite pour le théâtre.</p> <p>Or notre première engueulade, avec Gemma championne du genre, remonte à cet instant où elle a senti, sans que je ne lui dise rien, que je ne croyais pas qu’elle fût le moins du monde actrice, convaincu qu’elle était trop elle-même pour incarner jamais un autre personnage sur une scène, et du coup elle m’en voulut à mort de le penser sans le dire vu qu’elle-même le sentait sans oser le reconnaître; et je ne fus guère surpris de la retrouver, plus tard, dans un autre rôle où elle pouvait incarner tous les personnages qui lui chantaient à sa guise, rien qu’avec une plume et du sang vif (du sang bleu s’il vous plaît) pour l’exprimer.</p> <p>Cependant l’essentiel demeurait: Gemma Salem l’écrivain avait remplacé l’actrice au pied levé et l’Artiste demeurait. Pas étonnant d’ailleurs que <em>L’Artiste</em> (La Table ronde, 1991 - prix Schiller) soit le titre d’un de ses livres. Mais plus que surprenant, réellement stupéfiante: l’immédiate puissance de l’écrivain, brassant une vie entière à pleines mains et en tirant un premier roman dense et vibrant d’émotion, formidablement vivant.</p> <h3><strong>Des passions vécues et sublimées par l’écriture</strong></h3> <p>L’histoire du <em>Roman de Monsieur Boulgakov (L’Âge d’Homme, 1982) </em>est celle d’une passion «incendiaire» autant qu’imaginaire. Une jeune comédienne aux origines panachées d’Orient pimenté et de Suisse confite, installée dans le Midi et languissant un peu d’accéder à la gloire tous azimuts, tombe soudain sur le <em>specimen </em>masculin de ses rêves: un écrivain russe fascinant mais rayé du nombre des vivants dans le crépuscule sanglant des années 30. Rencontre, donc, de type occulte…<br />La comédienne s’appelle Gemma Salem. L’auteur est Mikhaïl Afanassiévitch Boulgakov, auteur du <em>Maître et Marguerite</em>, des <em>Oeufs fatidiques, </em>du <em>Roman théâtral </em>et de <em>Cœur de chie</em>n, mais aussi des <em>Récits d’un jeune médecin </em>qui l’apparentent à un certain Anton Pavlovitch Tchekhov, future autre passion de Gemma.</p> <p>Or le coup de foudre de celle-ci pour Boulgakov est tel que, non contente de dévorer tous ses écrits traduits en quelques mois, elle en investit et réfracte l’univers à la façon de <em>Diablerie</em>- nouvelle du même Boulgakov -, poussant l’observation mimétique de la discordance entre réalité et fiction jusqu’à l’absurde hallucinant.<br />Plus précisément, Gemma Salem, dans <em>Le Roman de Monsieur Bulgakov, </em>reconstitue des lieux et fait parler des personnages de chair et de sang, fondant tout cela dans le mouvement d’un temps fuyant, à la fois tangible et impalpable.</p> <p>C’est ainsi que, dès les premières pages du roman, nous nous transportons, aux côtés du jeune Micha, alors toubib débutant, dans le Kiev de son enfance, et dès ce moment se remarque l’habileté avec laquelle Gemma Salem tire parti d’éléments empruntés aux œuvres de l’écrivain, pour donner au roman son climat, ses couleurs et sa vraisemblance, et cela sans qu’on n’ait jamais l’impression de subir une compilation non plus qu’un relevé de filature.<br />Ensuite nous suivrons Boulgakov à travers les années, des lendemains de la Révolution à la fin des années 30, au fil d’une production littéraire très étroitement surveillée dès ses débuts, à cause de sa liberté de ton et de sa propension satirique, complètement interdite de publication et de représentation au tournant de 1928 (quand bien même Staline avait vu et revu dix–sept fois la pièce intitulée <em>Les Journées des Tourbine</em>!) et que l’acharnement de sa dernière compagne – le très beau personnage de Lena – fera sortir des tiroirs d’infamie après la mort de l’écrivain.</p> <p>De ce dernier, <em>Le Roman de Monsieur Boulgakov </em>nous donne une image attachante et nuancée. En évitant les pièges de l’idéalisation ou du sentimentalisme, si fréquents dans le genre, Gemma Salem a recomposé le portrait d’un Monsieur très porté sur la vie et les femmes, capable d’autant d’amitié chaleureuse que d’intransigeance têtue, qui tenait par-dessus tout à préserver ses œuvres de toute compromission. Or, d’une certaine manière, et ce sera vrai de tous ses livres, l’écrivain brosse son propre portrait en travaillant à celui de son modèle.<br />J’ai parlé de mimétisme à propos de la relation de Gemma Salem avec Boulgakov, dont le sort de David poétique en butte à l’écrasant Goliath soviétique ne pouvait qu’émouvoir la jeune femme blessée par la vie et en bisbille déclarée avec les pesanteurs de la famille et de la société, et c’est le même type de rapport - maintes fois décrit par un René Girard dans ses analyses de la passion mimétique -, qu’elle établira avec Thomas Bernhard, jusqu’à une identification redoutable du fait que l’imprécateur autrichien restait, lui, bien vivant…</p> <h3><strong>Que l’acte artistique relève de la conversion</strong></h3> <p>Tous les livres de Gemma Salem, jusqu’aux plus agressifs ou acides, comme <em>Mes amis et autres ennemis </em>(Zulma, 1995) ou <em>La Rumba de Beethoven </em>(Pierre-Guillaume de Roux, 2019) sont des histoires d’amour relevant de l’exorcisme et qui disent à la fois les beautés de la vie (les enfants et les animaux, la musique et les sentiments délicats) et le mal de vivre, l’exécration du mensonge sentimental ou «romantique», le mépris qu’elle partageait avec Thomas Bernhard de tous les simulacres sociaux ou culturels qu’elle pointe notamment dans ses tableaux au vitriol d’une certaine Suisse hypocritement convenable, notamment dans <em>Les exilés de Khorramshahr </em>(La Table ronde, 1986) et dans <em>Bétulia </em>(Flammarion, 1987), où la rage tonique de sa deuxième flamme littéraire se fait déjà sentir, qui se développera plus librement dans sa fameuse <em>Lettre à l’hermite autrichien </em>(La Table ronde, 1989), relancée dans <em>Thomas Bernhard et les siens </em>(La Table ronde 1993) et jusque dans son dernier livre, sur le ton plus apaisé d’un bilan existentiel très émouvant où elle «prend sur elle», comme on dit, en se reprochant son terrifiant amour propre…</p> <p>Il y a, de fait, chez Gemma Salem, comme chez le grand emmerdeur autrichien, un personnage à la fois solaire et son double farouchement ombrageux, pas loin des possédé(e)s de Dostoïevski, qui se rend parfois la vie aussi impossible qu’à son entourage, mais que l’Art, une fois encore, délivre - cela même qu’entend René Girard une fois encore, dans <em>Mensonge romantique et vérité romanesque</em>.</p> <p>La figure de Thomas Bernhard, assis sur un banc les mains aux poche, l’air de nous dire qu’il n’en a rien à fiche, trône sur la couverture d’<em>Où sont ceux que ton cœur aime </em>(Arléa, 2019), mais TB n’est qu’un truchement: le médiateur par excellence que Gemma n’a jamais pu enlacer «pour de vrai», une figure de la pureté dans un monde avachi par le kitsch, un contempteur de toutes les illusions à bon marché mais qui nous fait un clin d’œil amical comme Gemma, fumant son dernier pétard sur sa tombe, nous en vrille un plein d’amour…</p> <hr /> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1590611352_100086091_10223508363404078_2347364566893068288_n.jpg" class="img-responsive img-fluid normal " width="257" height="257" /></p> <h4><em>Où sont ceux que ton coeur aime, </em>Gemma Salem. 88 pages. 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De fait, l’historien américain combine tous les apports de l’histoire de l’art et de la connaissance scientifique accumulés à travers les siècles par ses prédécesseurs, autant que ceux des techniques actuelles en matière de recherche, pour aboutir à un récit fluide et chatoyant, riche de détails autant que de synthèses, avec une touche tout à fait personnelle et un allant communicatif.</p> <p>Mais alors quoi de commun avec Rose de Pinsec et l’enquêteur «mentaliste» de la fameuse série? J’y viens!</p> <h3><strong>Quand Rose de Pinsec disait de la télé: «Pas besoin!»</strong></h3> <p>La télévision - fenêtre sur le monde ou fabrique d’abrutis -, comme l’ordinateur - merveilleux instrument de connaissance et de communication ou puits sans fond de l’imbécillité -, ne seront jamais que ce que chacune et chacun en fait, comme il en va de notre «gestion» du confinement.</p> <p>Avant l’apparition de l’ordinateur et du smartphone dans nos vies, en 1977, Rose Monnet, solide paysanne de Pinsec répondait au réalisateur de la télévision romande Jacques Thévoz qui lui demandait, dans un reportage documentaire mémorable, si elle envisageait elle-même d’installer un jour la télévision dans son modeste mayen, d’un vigoureux et spontané «Pas besoin!»<strong>, </strong> réaction qui pourrait être interprétée comme l’expression d’une mentalité bornée, ou au contraire pleine de sagesse: j’ai la santé et mon parchet, j’ai ma vie et c’est tout bon…</p> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1589526010_images4.jpeg" class="img-responsive img-fluid normal " width="257" height="371" /></p> <p>Or je ne sais pourquoi ce «pas besoin!» me poursuit, moi qui ai toujours été curieux de tout, non comme un frein ni comme une résignation piteuse mais comme un rappel de notre chance d’être au monde et un signe d’humilité et de reconnaissance. Ce «pas besoin!» s’enracine dans notre culture séculaire auto-suffisante et je le retrouve, exprimé de façon plus subtilement lyrique, dans cette page de <em>L’Institut Benjamenta</em> de Robert Walser: «Si j’étais riche, je ne voudrais nullement faire le tour de la terre. Sans doute, ce ne serait déjà pas si mal. Mais je ne vois rien de bien exaltant à connaître l’étranger au vol. Je me refuserais à enrichir mes connaissances, comme on dit. Plutôt que l’espace et la distance, c’est la profondeur, l’âme qui m’attirerait.</p> <p>Examiner ce qui tombe sous le sens, je trouverais cela stimulant. D’ailleurs je ne m’achèterais rien du tout. Je n’acquerrais pas de propriétés. Des vêtements élégants, du linge fin, un haut-de-forme, de modestes boutons de manchettes en or, des souliers vernis pointus, ce serait à peu près tout, et avec cela je me mettrais en route. Pas de maison, pas de jardin, pas de valet. (…) Et je pourrais partir. J’irais me promener dans le brouillard fumant de la rue. 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Chacune et chacun sait que le Panopticon est ce dispositif précis, dans une prison, qui permet au gardien de voir d’un même point central tous les prisonniers soumis à sa surveillance, mais c’est sans cet aspect disciplinaire que je l’entends: comme une observation simultanée et aussi tourbillonnante que le sont les idées et les figures de certaines peintures de Leonardo, à commencer par son incroyable esquisse de <em>L’Adoration des mages</em>, magnifiqueement analysée par Issacson, et comme en témoignent les milliers de pages de ses carnets aux mêmes observations kaléidoscopiques.</p> <p>La singularité de l’enquêteur Patrick Jane, à part sa mémoire phénoménale, tient à sa façon de relier les traits physiques et moraux, les tics et les pensées, les moindres frémissements expressifs et les émotions d’un personnages, exactement de la même façon que Leonardo puise, dans sa connaissance approfondie de l’anatomie humaine, les liens entre tel muscle et tel mouvement, tel trait et telle expression, non point de façon platement mécanique ou linéaire mais avec les nuances de la lumière sur la chair et le jeu des transparences. Là aussi, Walter Isaacson excelle à distinguer la finesse sensible extrême des nuances apportées par Leonard de Vinci aux tableaux peints en collaboration avec ses divers maîtres plus conventionnels de touche, comme on le voit dans le <em>Baptême du Christ</em> travaillé conjointement par Verrocchio et son élève.</p> <h3><strong>Ce que les crises révèlent du Bien et du Mal</strong></h3> <p>Certaines situations sont particulièrement révélatrices en ce qui concerne le Mal, au sens biologique ou moral le plus large, et nous l’aurons vérifié à l’occasion de la pandémie en cours, comme Leonardo à pu l’observer après la peste de son temps qui a décimé la ville de Florence et lui fit jeter les bases d’une ville idéale hygiéniquement sécurisée quand il se transporta de Toscane à Milan, au début de sa stupéfiante carrière parallèle d’ingénieur-urbaniste-musicien-showman-artiste.</p> <p>Or l’intuition hypersensible et l’imagination déductive, mais aussi la révolte contre le Mal apparient aussi Leonard de Vinci et Patrick Jane impatient de punir le Méchant qui a tué sa femme et sa fille. Je sais bien que ça fait un peu vieux jeu de défendre le Bien contre le Mal, mais le choix n’a rien d’abstrait ou d’idéologique: question de survie, autant que de style, même si la comparaison des deux personnages relève,une fois encore, du grand écart apparemment loufoque. Cependant, le virus se fiche des partis et des appartenances de classes ou de races autant que des niveaux de culture: il est égalitaire au contraire de la médecine trop humaine, et s’il est exagéré de prétendre que le héros blondin d’une série américaine est égal par son mérite à l’un des plus grands génies de notre chère espèce, il est prouvé en période de crise que la lutte contre le Mal relève décidément de la ressemblance humaine, amen.</p> <p>Bref nous avons vaincu la peste et, en attendant, par delà d’autres défis viraux, la panacée transhumaniste que nous promettent les nouveaux prophètes de Dieu sait quelle ennuyeuse immortalité, la quarantaine nous a permis de lire de beaux livres et de voir ou revoir des tas de bons films et quelques séries qui valent peut-être les feuilletons que Rose de Pinsec lisait le soir avant de s’endormir sans somnifères - pas besoin!</p> <hr /> <h4><strong><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1589482331_unknown.jpeg" class="img-responsive img-fluid normal " width="259" height="389" />Walter Isaacson. Léonard de Vinci – La biographie. Traduit de l’anglais (USA) par Anne-Sophie De Clercq et Jérémie Gerlier. Quanto / Presses polytechniques et universitaires romandes, Lausanne, 2019.</strong></h4> <h4><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1589485311_1923857_18977019860_6515_n.jpg" class="img-responsive img-fluid normal " width="258" height="206" /><strong><em>Le Mentaliste.</em></strong><strong> Série télévisée de Bruno Heller en 151 épisodes et 7 saisons (2008-2013), reprise sur Prime Video.</strong></h4> <p> </p> <p> </p> <p> </p>', 'content_edition' => null, 'slug' => 'quand-leonard-de-vinci-luttait-contre-le-virus-du-mal', 'headline' => false, 'homepage' => 'col-md-12', 'like' => (int) 776, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 2348, 'homepage_order' => (int) 2588, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 3, 'person_id' => (int) 94, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [[maximum depth reached]], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 2293, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => true, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => 'NORMAL', 'readed' => null, 'subhead' => 'La chronique de JL K', 'title' => 'Voici le bon, le beau moment venu d’apprendre à parler à une pierre', 'subtitle' => 'Deux petits livres immenses signés Annie Dillard, géniale auteure américaine, nous rappellent cette évidence que la merveille du monde fut infectée de tout temps, que le Dieu parfait tolère la naissance d’enfants malformés et de massacres en son nom, enfin que nous vivons la plupart du temps aveuglés par des paupières de plomb, faute de nous éveiller comme ces gosses se levant tôt pour explorer notre terre qui, parfois, reste si jolie… ', 'subtitle_edition' => null, 'content' => '<p>Le moment que nous vivons est extraordinaire, mais ce n’est rien de le dire: il n’est que de le vivre et de mille façons diverses qui procèdent du même éveil et du même bond les yeux ouverts devant la merveille.</p> <p>«Merveille des merveilles sous le lilas fleuri, merveille: je m’éveille», écrivait le poète Jean-Pierre Schlunegger qui finit, désespéré, par se jeter d’un pont, non loin d’où nous vivons, pour se fracasser sur les rochers de la rivière, tout en bas.</p> <p>Or nous vivons tous ces jours sous la double instance de telle merveille et de son envers mortel, et ce n’est pas d’hier, nous l’oublions trop souvent, mais quelque temps nous voici comme au pied d’un mur et c’est le bon moment - le beau moment d’apprendre à voir le monde les yeux ouverts et d’apprendre à parler à une pierre.</p> <p>La merveille des merveilles est à la portée de chacune et chacun , et ma conviction s’en est trouvée confortée, l’autre jour, en notre quarantaine à tous, lorsque tel cher ami m’apprit au téléphone que tous les matins il conduisait son petit lascar Luca de dix ans et son compère Arthur de trois ans son aîné familier par son père argentin des colibris de la jungle de son pays, à la lisière des bois vaudois où ils s’enfoncent tout appareillés d’instruments d’observation et autres chasses subtiles - toute la journée rien qu’à eux, fous de ferveur curieuse et de joyeuse adulation des multiples espèces de végétaux ou d’animaux divers tels les castors d’un soir passé - en somme prédisposés à apprendre un jour a parler aux pierres à l’imitation de ce jeune Américain dans la trentaine exercant, dans sa cabane perdue en pleine nature, le rituel censé faire parler une «pierre à souhaits»…</p> <h3><strong>En osmose intime avec le cosmos</strong></h3> <p>Certains livres sont des départs et d'autres des arrivées. 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@Gio 06.04.2020 | 14h58
«J’ai relu avec intérêt votre journal, il ne pouvait en être autrement puisque nous vivons tous la même plaie. J’emploie le mot « plaie » car c’est celui que je ressens le plus et ces derniers temps une certaine accumulation d’événements me font penser aux plaies d’Egypte: entre les moustiques avec le chikungunya, la mort des troupeaux et la vache folle ou la grippe aviaire, les grenouilles par milliers en Floride, les criquets qui ont envahi une partie de l’Afrique et maintenant cette pandémie qui , Dieu merci, ne s’en prend pas aux premiers nés, mais aux anciens( ce qui est triste et fait peur, mais qui est plus logique),je me demande encore où me situer au milieu de tout ça et je m’accroche à l’espoir que je trouve aussi dans votre chronique, alors merci JLK.»