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Lu ailleurs / Javier Milei, six semaines au pouvoir et une grève


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Un mois et demi après son investiture, le président argentin Javier Milei semble tenir ses promesses de campagne. Des tailles dans les lois de protection sociale, des privatisations, et un cap: débarrasser les Argentins de l’Etat. Le FMI lui fait confiance, tandis que l’opposition a organisé ce mercredi la première manifestation de l’ère Milei. Désastre ultra-libéral ou cure d’assainissement pour l’économie argentine? Les avis divergent. Revue de presse et contradictoires pour tâcher d’y voir plus clair.



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Ce mercredi 24 janvier avait lieu la première manifestation en opposition à la politique de Javier Milei, le nouveau président argentin au pouvoir depuis un mois et demi. Même si le pays n’a pas été mis à l’arrêt, une grève générale était annoncée et des dizaines de milliers de personnes sont descendues dans les rues des grandes villes aux cris de «la patrie n’est pas à vendre», «manger n’est pas un privilège». La CGT, principal syndicat argentin comptant 7 millions de membres (le syndicalisme est obligatoire), avait appelé à la mobilisation, soutenue notamment par ses homologues français. 

Les opposants de Milei ont également déposé 60 recours en justice contre sa décision de gouverner par décrets. Plusieurs ont des chances d’aboutir, d’autant que le parti du Président n’est que la troisième force politique au Parlement

L’hebdomadaire économique Challenges donne quelques clés pour comprendre la situation. 

Libertarien et populaire

Cette mobilisation, que la ministre de l’Intérieur Patricia Bullrich a fustigée, pointant du doigt «des syndicats mafieux» est une réaction aux premières mesures prises par l’économiste, qui n’a pas tardé à mettre en œuvre son programme «libertarien». Milei avait fait campagne sur la promesse de tailler dans les dépenses publiques, tronçonneuse en main, et a été élu par 56% des votants. Son élection a créé une onde de choc dans le monde, et particulièrement dans le monde des médias. 

Challenges note ainsi que le président argentin «est devenu l’incarnation même du populisme politique, bien au-delà de l’Argentine». L'hebdomadaire rappelle également que les opinions de Milei sont bien tranchées, tel qu’il les a exposées dans son discours au Forum de Davos: il dénonçait «le collectivisme, le fascisme, le nazisme, le progressisme, la social-démocratie, la démocratie chrétienne, le mondialisme qui tous les mêmes visent à contrôler les gens». 

L’Argentine est désormais le «laboratoire d’une expérience» ultra-libérale. Le jour de son investiture, Milei avait en effet averti: «Il n’y a pas d’alternative au choc».

Jouissant d’une côte de popularité plutôt importante de 55%, Javier Milei fait face à des défis colossaux. En Argentine, 40% de la population vit sous le seuil de pauvreté, l’inflation atteint le chiffre record de 140%, c’est même plus qu’au Vénézuela. Le Président est particulièrement populaire chez les jeunes, chez qui le taux de pauvreté est de 60%, et qui ont massivement voté pour lui. Les Argentins, explique Challenges, ont opéré un virage à 180 degrés. Ils font un sort au péronisme, «un archétype de populisme latino-américain nationaliste, protectionniste et assistentiel»

A l’international, Milei a décidé l’alignement de l’Argentine sur la politique extérieure des Etats-Unis, offrant ainsi un soutien inconditionnel à Israël. Il a également annulé l’entrée de l’Argentine dans le groupe des BRICS, pourtant prévue, car il refuse de «s’associer à des pays qui ne respectent ni le libre-échange, ni la démocratie». 

Le libre-échange est son credo. Finalement, Challenges rappelle la promesse de Milei nouvellement élu à ses concitoyens: les «débarrasser de l’Etat».

Les lois sociales passées à la moulinette

L’hebdomadaire orienté à droite Valeurs Actuelles – ne cachant pas sa sympathie pour Javier Milei – se réjouit du «grand ménage» que le Président a effectué: «300 textes et règlements passés à la hache», privatisation de 41 entreprises publiques, réforme électorale, réforme du code des impôts... En revanche, la fin du peso et la fermeture de la Banque centrale, annoncées pendant la campagne, sont reportées à plus tard.

De cette taille sociale, Libération – à l'opposé de Valeurs Actuelles sur l'échiquier politique – retient surtout l’abrogation de la loi sur l’encadrement des loyers.

Dans les colonnes du quotidien, des locataires, paniqués, témoignent pour certains d’une hausse de 400% décidée par leur propriétaire, sur laquelle ils n’ont pas les moyens de s’aligner. D’autres envisagent d’occuper illégalement leur appartement, jusqu’à ce qu’advienne une procédure d’expulsion, qui peut trainer dans le temps. Car les loyers des appartements égalent ou dépassent les salaires de la classe moyenne. Selon la réforme décidée par Milei, les propriétaires peuvent modifier les loyers, résilier les contrats de location à tout moment et sans justifier d’aucun motif. Comme l’accès au crédit est quasiment nul en Argentine, souligne Libération, l’accession à la propriété est le privilège des plus riches, et les locataires sont fragilisés.

Mais cette réforme a eu un autre effet: l’augmentation de l’offre sur le marché locatif. Au point que Valeurs Actuelles considère l’immobilier comme «le grand gagnant» de ce début de mandat. 

La loi sur le gel du prix des loyers, votée en 2020, avait immobilisé le marché, l’offre était devenue quasi inexistante. Son abrogation a poussé certains propriétaires à remettre sur le marché des logements qu’ils laissaient vacants, car inquiets de la conjoncture économique. L’offre locative a doublé, et mécaniquement, les loyers ont baissé en moyenne de 20 à 30%.

Des résultats contrastés

Ainsi, d’un même mouvement, les premières mesures de dérégulation de l’économie ont permis à l’arbitraire des propriétaires de supplanter le droit locatif, mais celles-ci ont aussi dans l’ensemble amélioré l’état du marché immobilier. Il est difficile, à ce stade, de tirer des conclusions de «l’expérience».

Libération déplore tout de même que ces mesures soient «d’un anti-étatisme et libéralisme si extrême qu’elles n’ont pas d’antécédents», quand Valeurs Actuelles salue des réformes qui restent pourtant «timides».

On relève aussi des effets négatifs à la dérégulation. La fin de l’encadrement des prix, par exemple, a entrainé une hausse de 25% sur les étiquettes pour le seul mois de décembre. Mais Javier Milei avait prévenu, son traitement de choc vient avec des effets secondaires indésirables: «Pendant quelques mois, ce sera pire qu’avant». 

Signal fort, le Fonds Monétaire International voit d’un bon œil le projet de Milei, et prévoit que celui-ci conduira à terme à une stabilisation de l’économie. Le FMI a donc alloué 4,7 milliards de dollars d’aides à l'Argentine, un encouragement bienvenu.

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VOS RÉACTIONS SUR LE SUJET

2 Commentaires

@willoft 30.01.2024 | 11h09

«L'argentine qui devrait être un des pays les plus riches du monde est en permanence en défaut de paiement.

La raison en est simple, c'est une vache à lait que l'on traie et dont le gain est exporté, Milei, et tous les présidents précédent, avec ou sans tronçonneuse !»


@stef 17.02.2024 | 20h02

«C'est la fin de la solidarité »