Actuel / Poignée de main: à prendre ou à laisser?
Je pense qu’on ne devrait jamais plus se serrer la main.» La déclaration du docteur Anthony Fauci, directeur au sein du gouvernement américain de l’Institut national des allergies et des maladies infectieuses, est aussi grave que radicale. La poignée de main est fustigée depuis mars dernier, pour ne pas dire franchement interdite. C’est un changement d’importance dans une culture occidentale où ce geste est utilisé au quotidien. Est-il définitivement menacé? Devons-nous obéir à l’injonction de pratiquer un nouveau mode de salutation?
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Le film est bien décevant sous certains aspects, il comporte bien des problèmes tant au niveau du jeu que de la réalisation. <i>Et pourtant, pourtant…</i> ce film a du cœur.</p> <p>Aussi, être grincheux face à cette équipe de jeunes qui aiment sincèrement Aznavour et qui se sont donnés de la peine pour réaliser ce film, ce serait jouer les scribouillards qui critiquent tout sans avoir jamais rien fait par soi. La critique aurait eu de quoi se déchaîner si le film et son équipe étaient prétentieux. <i>Et pourtant, pourtant…</i> il n’en est rien. Etre grincheux, c’eût été encore faire le jeu de ces critiques qui s’en prenaient à Aznavour lui-même en écrivant, pour l’un d'eux cité dans le film, «comment peut-on laisser un infirme chanter?», avant de venir présenter ses excuses à un Aznavour bonhomme qui n’en tient pas rigueur et qui offre même une coupe de champagne à son détracteur.</p> <p><i>Et pourtant, pourtant…</i> disons ce qu’il y a à dire. 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Alors, cette bonne vieille poignée de main, est-elle à prendre ou laisser? A laisser, si l’on considère que les virus en tout genre, et pas seulement le SARS-CoV2, se transmettent également par les mains. A prendre, ou plutôt à conserver, si l’on considère qu’on se refuse à balancer aux oubliettes une pratique dont l’histoire remonte quasiment jusqu’à la nuit des temps. Pour preuve, le premier témoignage dont on dispose concrètement de la poignée de main remonte au IXe siècle avant J.-C. Il s’agit d’une stèle représentant le roi d’Assyrie Salmanazar III serrant la main d’un roi babylonien, en signe de paix.
La première représentation d'une poignée de main connue à ce jour: le roi d'Assyrie Salmanazar III (à droite) serre la main à Marduk-Zakir-shumi Ier, roi babylonien, en signe de paix. Stèle du IXème siècle avant J.C.. Musée de Bagdad, Irak.
Toujours dans l’Antiquité, le geste de la poignée de main apparaît sur de nombreuses gravures de la Grèce antique. Il est aussi mentionné dans des œuvres littéraires. Ainsi dans le chant X de l’Iliade, lorsqu’Ulysse et Diomède reviennent de leur expédition en camp ennemi avec le cadavre d’un espion troyen Dolon, l’accueil se fait en mains tendues: «Ils mettent pied à terre, et, joyeux, tous les accueillent avec des mains droites et de douces paroles.»
Il faut cependant rappeler que, selon les sources, cette pratique restait réservée à des usages bien particuliers, dans des cadres spécifiques, notamment en politique et en diplomatie. Chez les chevaliers par exemple qui, tous droitiers, tendaient la main pour saluer mais aussi pour rassurer l’autre: la tradition voulait que les chevaliers se tendent la main droite pour montrer qu’ils n’étaient pas sur le point de dégainer épée ou couteau.
Tout au long du Moyen Age et jusqu’au XVIIIe siècle, la pratique s’est perpétrée, mais toujours dans des contextes politiques ou diplomatiques. Le peuple n’était pas concerné: pour celui-ci les salutations prenaient des formes différentes en fonction de la hiérarchie et du statut de la personne à saluer. Ce genre de distinctions dans les salutation a demeuré jusqu’aujourd’hui d’ailleurs, même s’il tend à s’effacer. Jusqu’il y a peu, on saluait les hauts clercs par le baise-anneau, notamment pour saluer le pape dans la tradition catholique. Il en va de même pour la noblesse, avec les inclinations, ou dans le cadre militaire avec la main droite tendue à hauteur de front. Néanmoins, en religion, en aristocratie et en armée, la poignée de main est toujours plus fréquente au dépend des autres modes de salutations.
Mais revenons à ce fameux XVIIIe siècle, temps durant lequel la poignée de main a commencé à se démocratiser dans le monde occidentale. En Angleterre et surtout aux Etats-Unis, les membres de la Société religieuse des Amis, autrement appelés les quakers, ont imposé la poignée de main comme salutations pour leurs membres. En chefs de file des égalitaristes, ils considéraient tous les êtres humains, hommes et femmes, comme totalement égaux; pas de raison donc que l’un ou autre s’incline devant tel ou tel autre. La poignée de main, par sa simultanéité et son égalité stricte chez les deux personnes qui se saluent, est apparue comme la manière la plus égalitariste, respectueuse et fraternelle de se saluer.
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Ne pas conserver pour conserver, mais...
Le rappel historique était nécessaire: mais là n’est pas problème principal. La pratique de la poignée est riche d’une certaine tradition, certes, son histoire est même millénaire. Ce n’est pas pour autant qu’elle doit rester absolument fixée à nos habitudes. Lorsque le réflexe conservatif veut conserver rien que pour conserver, il n’a pas beaucoup de valeur, ni de sens. L’affaire de la poignée de main ne doit pas être l’apanage des conservateurs; à la rigueur, si l’on veut jouer un peu sur des notes d’ironie, les réactionnaires – à l’origine, les nostalgiques de l’Ancien Régime – devraient se réjouir de l’éventuelle disparition de la poignée de main, pour revenir à des salutations plus distinguées et moins tactiles. Pour l’anecdote, Baudelaire, éduqué à des «bonnes manières» déjà surannées pour son époque, était toujours répugné quand Victor Hugo concluait les lettres qu’il lui adressait par un «je vous serre la main», pour se monter progressiste et le provoquer aussi au passage.
S’il y a lieu de se battre pour défendre bec et ongle cette foutue poignée de main, ce n’est pas par conservatisme. Ce n’est même pas pour l’histoire du geste, mais pour ce qu’il représente. Pour l’inestimable richesse véhiculée à travers une bonne poigne: je te considère égal à moi, et je me présente à toi avec respect. Bernard-Henri Lévy, qu’on ne soupçonne pas en principe de conservatisme, regrette dans son dernier ouvrage, Ce virus qui rend fou (2020), lui aussi ce bannissement abrupt de la poignée main qu’il voit comme une menace à notre mode de vie.
«Et puis cette façon qui s’est imposée, semble-t-il sans trop de regret, de ne plus se serrer la main: n’était-ce pas un beau geste de civilité qui se voyait ainsi proscrit? un signe de solidarité républicaine, promu par la Révolution française et l’esprit de 1789, qui se trouvait mis au ban? et si la chose devait durer, si l’on s’avisait d’y prendre goût, si l’exception venait à périmer l’usage dans une époque où la méfiance de tous contre tous ne demande qu’à prospérer, ne serait-ce pas un triste recul?»
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La pratique de la poignée est riche d’une certaine tradition, certes, son histoire est même millénaire. Ce n’est pas pour autant qu’elle doit rester absolument fixée à nos habitudes. Lorsque le réflexe conservatif veut conserver rien que pour conserver, il n’a pas beaucoup de valeur, ni de sens. L’affaire de la poignée de main ne doit pas être l’apanage des conservateurs; à la rigueur, si l’on veut jouer un peu sur des notes d’ironie, les réactionnaires – à l’origine, les nostalgiques de l’Ancien Régime – devraient se réjouir de l’éventuelle disparition de la poignée de main, pour revenir à des salutations plus distinguées et moins tactiles. 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Quand on admire une personnalité, on aime partager, ou en l’occurrence repartager, ses joies dans ses conquêtes professionnelles ou amoureuses, et pleurer avec elle sur ses misères, comme le décès de son fils Patrick, qui a donné lieu d’ailleurs à «<a href="https://www.youtube.com/watch?v=Ll-C2ExMBXs" target="_blank" rel="noopener">L’aiguille</a>», l’une des chansons les plus émouvantes de son répertoire.</p> <p>Revenir sur la vie et l’œuvre d’Aznavour c’est accompagner chacune des étapes de sa propre vie par l’une de ses chansons. Et son répertoire est l’un des rares à offrir ce champ de textes propres à chaque occasion. Où est-ce qu’Aznavour me rejoint par son œuvre?</p> <p>J’abordais cette question dans une série d’articles rédigés en 2018, à l’occasion de son décès. Aznavour me rejoint dans ma <a href="https://leregardlibre.com/musique/la-dimension-chretienne-de-loeuvre-daznavour/" target="_blank" rel="noopener">vie spirituelle</a>, dans ma vie sexuelle – ou du moins telle que je la <a href="https://leregardlibre.com/musique/aznavour-un-chanteur-du-sexe/" target="_blank" rel="noopener">phantasme</a> – et surtout dans ma vie de <a href="https://leregardlibre.com/musique/aznavour-chante-les-loosers/" target="_blank" rel="noopener"><i>loser</i></a>. Aznavour chante les <i>losers</i>. Aznavour est un <i>loser</i>. J’en suis un aussi. <i>Et pourtant, pourtant…</i> le <i>loser</i> n’est pas celui qui a tout raté, loin de là. 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VOS RÉACTIONS SUR LE SUJET
5 Commentaires
@Lagom 04.09.2020 | 18h54
«Excellent article, bravo ! il serait moins dangereux de serrer la main que de porter un masque et l’enlever 10 fois le même par jour et le garder dans une poche. Cela fait 2 semaines que j'utilise le même masque que j'accroche sur une manette du tableau de bord. Par ce temps de pandémie la probabilité est grande que des virus se piègent dans le masque et se libère dans nos mains et vêtements. De plus, il semblerait que le port des masques en plastique pendant de longues durées dans la journée favorisent le cancer du sein chez les femmes. Ceux qui nous gouvernent ne savent pas tout le mal qu'ils font à la population avec cette hérésie. Depuis le mois de mars le Conseil fédéral ne fait que suivre la politique des pays limitrophes en matière de sécurité sanitaire, dommage.»
@christfourn 06.09.2020 | 09h32
«Le taux de mortalité du Coronavirus est nettement inférieur au taux de mortalité de la grippe saisonnière et aucune mesure de confinement n’a été prise pour la grippe saisonnière. Le taux de mortalité des accidents de la route est nettement supérieur au taux de mortalité du Coronavirus et la voiture n’est pas interdite. Le taux de mortalité du tabac est nettement plus élevé que le taux de mortalité du Coronavirus et le tabac n’est pas interdit. Le taux de mortalité de la Fast-food est nettement supérieur au taux de mortalité du Coronavirus et les Restaurants Fast-food ne sont pas interdits. Les mesures de confinement sont absolument ridicules. Nous nous dirigeons vers une dictature planétaire ! »
@lespuisses 06.09.2020 | 12h11
«Les gens ne sont que des moutons, ils se suivent n'importe où même en bas d'une falaise. Si seulement au moins une partie des gens qui penses que tout ces mesures sont des âneries, ne les appliqueraient pas, on reviendrait très vite à la normale. Pour ma part je refuse de mettre le masque, qui ne sers absolument rien contre les virus, c'est même inscrit sur les anciens emballages. Et je donne la main et fais la bise à tous ceux qui sont d'accord »
@lespuisses 06.09.2020 | 12h13
«Et celles qui sont d'accord et il y en a vraiment beaucoup !!!»
@LEFV024 26.09.2020 | 20h01
«Je trouve très frustrant de ne plus serrer la main de mes collègues de travail par exemple... On a besoin de contact!»