Actuel / Pierre Margot: «La vérité? Personne ne la saura jamais»
Portrait de Pierre Margot, l'expert, réalisé avec des empreintes digitales par l'artiste new-yorkaise Jennifer Hannaford.
© République du canton du Jura
Référence mondiale dans les sciences forensiques, expert dans les affaires du «petit Grégory» en France ou de «Bloody Sunday» en Irlande du Nord, le Jurassien Pierre Margot, Vaudois d'adoption, connaît l'affaire Seznec pour avoir été là encore mandaté comme expert international par la Cour de cassation de Paris. Interview de l'expert nonante-cinq ans après les faits alors que rebondit ces jours l'une des plus célèbres affaires du 20e siècle.
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Aujourd’hui, on peut faire toutes les constructions intellectuelles que l’on veut, mais on ne pourra pas refaire l’histoire...</p><p><strong>... une histoire, reconnaissez-le, passionnante.</strong></p><p>Une histoire fascinante.</p><p><hr></p><h2>Le film<br></h2><h4><br><iframe src="https://www.youtube.com/embed/zwTqppo5rTc" allow="autoplay; encrypted-media" allowfullscreen="" width="560" height="315" frameborder="0"></iframe></h4><br><h4><iframe src="https://www.youtube.com/embed/_P3UR1i_ViU" allow="autoplay; encrypted-media" allowfullscreen="" width="560" height="315" frameborder="0"></iframe>L'affaire Seznec (1992), d'Yves Boisset</h4><p><hr></p><h2>Le site et le livre</h2><h4><a href="http://pour-en-finir-avec-l-affaire-seznec.fr/spip.php?sommaire">Pour en finir avec l'affaire Seznec</a>, Denis Langlois </h4><p><hr></p>', 'content_edition' => null, 'slug' => 'pierre-margot-la-verite-personne-ne-la-saura-jamais', 'headline' => false, 'homepage' => 'col-md-12', 'like' => (int) 981, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 869, 'homepage_order' => (int) 1025, 'original_url' => null, 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 5, 'person_id' => (int) 3, 'post_type_id' => (int) 1, 'poster_attachment' => null, 'editions' => [], 'tags' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Tag) {} ], 'locations' => [], 'attachment_images' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'attachments' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'comments' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Comment) {} ], 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ '*' => true, 'id' => false ], '[dirty]' => [], '[original]' => [], '[virtual]' => [], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [], '[invalid]' => [], '[repository]' => 'Posts' } $relatives = [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 993, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'free' => false, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => 'NORMAL', 'readed' => null, 'subhead' => 'L'INTERVIEW IMAGINAIRE', 'title' => 'Amerigo, Christophe et Jacques sont sur un bateau', 'subtitle' => 'Altantique Nord. 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S</strong><strong><strong><strong><strong><strong>ans l'aide des Indiens, vous auriez succombé.</strong></strong></strong></strong></strong><br><strong><strong><strong><strong><strong></strong></strong></strong></strong></strong></p><p>Ceux qui aperçoivent la lumière avant les autres sont condamnés à la poursuivre en dépit des autres. <br></p><p><strong>Vous nous refaites une rechute?</strong><br></p><p>Rien de ce qui résulte du progrès humain ne s'obtient avec l'assentiment de tous.</p><p><strong>Puis-je passer à Jacques Cartier?</strong></p><p>Faites.</p><p><strong>Jacques Cartier, vous arrivez ce jeudi 10 mai 1534 dans les <em>Terres Neufves</em> après une traversée de seulement 20 jours depuis Saint-Malo. 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Il s'agissait de localiser les populations par groupes ethniques et aussi d'enseigner dans les langues autochtones au niveau de l'école primaire selon des critères ethniques. Ce fut un choc pour Ramaphosa et sa famille, car ses premières années ont été passées dans un environnement multiracial, à l'ouest de Johannesburg, avant que lui et sa famille soient installés de force à Soweto.</p><p>C'était un étudiant qui travaillait dur, très influencé par le christianisme. Tous les gens qui le connaissaient l'ont fortement ressenti. Ses amis disaient de lui qu'il est peut-être plus religieux que politique. Bien que la politique et la religion étaient inextricablement liées.</p><p><strong>Quand cela a-t-il commencé?</strong></p><p>Depuis son très jeune âge. Au début de son adolescence, Ramaphosa est déjà politisé tout en étant un excellent étudiant. Il s'habille élégamment, s'efforce d'être parmi le top trois ou quatre de sa classe. Un perfectionniste. Selon les amis de Cyril, l'un des épisodes qui l'a le plus blessé a été les préjugés ethniques qu'il a subis, les préjugés sur les personnes d'origine Venda – en particulier des enseignants parlant zoulou, mais aussi des enfants de l'école. Il n' y avait alors presque aucune interaction avec les Blancs. Ces préjugés émanaient d'organisations confessionnelles.</p><p><strong>Son leadership et son charisme se sont imposés très rapidement.</strong><br></p><p>Quand Cyril a eu 16 ans, ses parents l'ont envoyé au collège de Sibasa, la ville d'origine de son père <em>(tout au nord-est de l'Afrique du sud, à la frontière zimbabwéenne, non loin du Kruger Park, ndlr)</em>. Une des raisons était de le sortir d'un environnement politique très instable à Soweto, à une époque où la conscience noire émergeait comme un phénomène politique important. C'est là que Ramaphosa commence à montrer des caractéristiques inhabituelles: à peine arrivé, il est élu à la tête du mouvement chrétien étudiant, une position alors très stratégique. Ce poste aurait dû revenir à un étudiant <em>senior</em> mais les collégiens sont allés voir le proviseur pour lui dire: «Nous avons décidé d'élire ce nouveau garçon».</p><p>Cyril a utilisé cette position à diverses fins. Il s'est impliqué dans l'évangélisation des zones rurales, très pauvres autour de Sibasa. Il y a appris à interagir avec ces populations, chose qu'il n'aurait jamais pu faire s'il avait passé toute sa scolarité à Soweto. Il s'est familiarisé avec les problèmes auxquels ces familles faisaient face. Cela a été une expérience formatrice. Cyril s'est aussi montré très critique envers nombre de ses professeurs, paresseux et mal préparés. Ramaphosa se plaignait auprès d'eux leur disant que leur travail n'était pas de qualité. Il n'hésitait pas non plus à haranguer ses camarades et à leur faire refaire leur leçons. Cyril a toujours été le leader de leur groupe. Il n'a jamais perdu sa capacité à parler à des groupes religieux, et il a toujours conservé des liens avec l'église de Chiawelo à Soweto.</p><p><strong>Y a-t-il une analogie entre l'influence de la conscience noire sur Cyril Ramaphosa et <em>(le désormais ex-président)</em> Zuma?</strong><br>Probablement. La conscience noire était dans les années 1970 l'idéologie politique dominante chez les jeunes noirs radicaux, en particulier dans les classes moyennes, ceux qui fréquentait l'université. Et l'ANC (Congrès national africain) et le PAC (Congrès Panafricain) étaient alors plus ou moins invisibles. Quoique: le frère de Ramaphosa, Douglas, par exemple, plus jeune, était un militant de l'ANC. 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Ramaphosa est mal à l'aise lorsqu'il parle de questions d'ordre privé ou familial. Il aime compartimenter sa vie, de sorte qu'il a des amis de groupes différents et peut-être antagonistes de personnes en Afrique du Sud, y compris des gens d'affaires, des syndicalistes et des militants religieux, et il a tendance à les rencontrer séparément plutôt qu'ensemble. Il aime gérer les relations.</p><p><strong>Les informations que vous avez pu récolter viennent donc de son entourage et non de lui?</strong><br>Principalement, oui. Bien que je lui aie parlé depuis et que je l'ai rencontré à plusieurs reprises pendant la préparation du livre. Il a lu le manuscrit et a identifié quelques erreurs. 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Le compte à rebours a commencé, les moteurs sont allumés. Le milliardaire Elon Musk est là, vérifie la mise à feu de sa fusée. Starman, l'astronaute, le mannequin, s'accroche à son volant. Que Dieu soit avec eux. «Ground Control to Major Tom», tour de contrôle à Falcon Heavy: dix, neuf, huit, sept, six, cinq, quatre, trois, deux, un, décollage! ', 'subtitle_edition' => null, 'content' => '<iframe src="https://www.youtube.com/embed/m2p55BmwmJM" allow="autoplay; encrypted-media" allowfullscreen="" width="560" height="315" frameborder="0"></iframe><p><strong><br></strong></p><p><strong>Salut Starman, ça se passe comment là-haut?</strong></p><p>Je ne sais pas quelle heure il est, les lumières sont faibles. 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(1971)<br></h3><iframe src="https://www.youtube.com/embed/v--IqqusnNQ" allow="autoplay; encrypted-media" allowfullscreen="" width="560" height="315" frameborder="0"></iframe><br><h3>Space Oddity (1969)</h3><p><iframe src="https://www.youtube.com/embed/pXSGocWifAg" allow="autoplay; encrypted-media" allowfullscreen="" width="560" height="315" frameborder="0"></iframe></p><p></p><hr><p></p><h2>Précédemment dans Bon pour la tête</h2><p><a href="https://bonpourlatete.com/actuel/elvis">Elvis Presley: «Il n’y a qu’un "King", c’est Jésus-Christ»</a>, par Florence Perret<br></p><p><a href="https://bonpourlatete.com/actuel/salvador-dali-les-grands-artistes-sont-tous-des-impuissants">Salvador Dali: «Les génies ne doivent pas se reproduire»</a>, par Florence Perret</p><p><a href="https://bonpourlatete.com/culture/honore-de-balzac-une-nuit-d-amour-c-est-un-livre-de-moins">Balzac: «La résignation est un suicide quotidien»</a>, par Florence Perret<br></p>', 'content_edition' => null, 'slug' => 'spaceman', 'headline' => false, 'homepage' => 'col-md-12', 'like' => (int) 1000, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 790, 'homepage_order' => (int) 925, 'original_url' => null, 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 5, 'person_id' => (int) 3, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [ [maximum depth reached] ], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 794, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => true, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => 'NORMAL', 'readed' => null, 'subhead' => 'ACTUEL / Drame', 'title' => '«Moi, J., 17 ans, zombie de Perris, Californie»', 'subtitle' => 'L’enfer, c’est parfois une villa californienne. Une «maison de l'horreur», comme l'ont baptisée les médias américains après l'arrestation, un dimanche de janvier, de David et Louise Turpin, accusés d'avoir affamé et torturé leurs enfants. Par son courage, J., tout juste 17 ans, «Chose 8» de la famille Turpin, a délivré ses 12 frères et sœurs d’un cauchemar abyssal déguisé en bonheur disneyien. C’est une parfaite héroïne de roman dans l’Amérique déliquescente. Malheureusement, tout ce qu’elle dit est vrai, reconstitué à partir d’informations avérées. Ce texte ne fait que lui prêter une voix. Oui, cette voix pourrait être la sienne.', 'subtitle_edition' => null, 'content' => '<p>Je suis née il y a dix-sept ans. A Rio Vista, Texas. A 50 kilomètres, paraît-il, de Dallas et de l’univers impitoyable des Ewing. Je ne les ai jamais vus, ni à la TV (je ne peux pas la regarder) et encore moins de visu (je n’ai pas le droit de sortir de chez moi). Je ne sais pas qui sont Bobby, J.R., Cliff ou Sue Ellen. En même temps, ce n’est pas étonnant. Je n’ai pas l’âge de mes parents. Je n’ai que 17 ans. <br></p><p>Je ne peux même pas vous révéler mon propre prénom, c’est vous dire. Vous devrez vous contenter de mon initiale: J., la même que celle de mes douze frères et sœurs. J. comme Jesus? Josef? <u>Joshua</u>? Peut-être l’un de mes frères, âgé de 26 ans, le crack de la famille, est-il bien prénommé ainsi, mais je n’ai pas l’autorisation de vous le dire. Pour ce qui me concerne, en revanche, c’est bien le J. de Judas, même si ce n’est bien sûr pas ainsi que la fille que je suis a été baptisée. Mon vrai prénom provient du fleuve où Jésus-Christ, le fils du tout-puissant, a été baptisé il y a fort longtemps. Mais l'autre jour, le 14 janvier, douze jours exactement après mes 17 ans, il y a tout juste un mois, c'est en Judas que je me suis transformée, celui qui a fui, désobéi à Dieu. Dieu mon père. Dieu David. Oui, je suis ce Judas qui a trahi père et mère. Un père redoutable. Une mère qui à vrai dire ne l’était plus depuis bien longtemps, une mère qui depuis notre déménagement de nuit il y a huit ans vers la Californie pour son rêve hollywoodien (j’ignorais tout de ce projet mais je vous en parlerai après) n’a plus su, pu ou voulu nous protéger.</p><h4><img class="img-responsive " src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1518101049_turpinfamily.jpg">Moi, J., à la droite de ma mère, «chose 8» de la famille.<br></h4><p>J’ai appris qu’elle a souri quand la juge, l’autre jour, leur a interdit, à elle et à mon père, enchaînés au tribunal comme nous l’étions à la maison, d’essayer de nous contacter autrement que via leur avocat. Je ne sais pas ce qu’est un avocat. Mais j’ai compris qu’ils ne pourraient pas nous approcher jusqu’en 2021. Ça nous laisse 3 ans. <br></p><h4><img class="img-responsive " src="https://media.bonpourlatete.com/default/w800/1517620640_turpin_court.jpg">Mon père David et ma mère Louise enchaînés, comme nous l'étions à la maison, ont plaidé non coupable. <br></h4><h4><img class="img-responsive " src="https://bonpourlatete.comhttps://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1518098966_capturedecran20180208a14.56.38.png" width="805" height="271">La prochaine audience aura lieu le vendredi 23 février, dans douze jours.<br></h4><h3>Les chouchoux de mes geôliers<br></h3><p>J’ai 17 ans. Je viens de vous le dire. Contrairement à la plupart de mes frères et sœurs, qui ignorent tout de la vie et de l’extérieur, je savais moi ce qu’était un policier. J’avais compris, depuis deux ans, sans doute depuis plus longtemps (je ne saurai vous l’affirmer: le temps dans cette maison, vous vous en doutez, a perturbé nos réalités) que ma fratrie et moi subissions l’impensable. Et ne me demandez pas quand diable j’ai appris ces trois chiffres, ce numéro; comment, Seigneur, j’ai eu la présence d’esprit de retenir ces sons. Reste que je les ai gravés dans mon cœur. 9-1-1. <em>Tut-tit-tit</em>. Je savais qu’un jour ils inverseraient notre destin.</p><p>J’ai 17 ans, je vous le répète. Ma sœur cadette, J., a 2 ans et demi, elle se porte bien. De ce que j’ai pu voir tout au moins. Comme tous les petits derniers que j’ai vus défiler, c’est le chouchou de mes geôliers. Tout comme l’étaient les deux jeunes chiennes croisées Maltais qui ont rejoint la famille l’été dernier. Elles, contrairement à nous, étaient bien nourries. Bien mieux par exemple que l’aînée de notre fratrie, J., qui le 28 juillet prochain aura 30 ans. Cela fait belle lurette qu’elle n’a plus l’attention de mes parents. Elle pèse 37 kilos et n’a plus vraiment toute sa tête. Comme plusieurs de mes frères et sœurs. Moi? Je ne connais pas mon poids, je peux seulement vous dire que les officiers, en débarquant, l’autre jour à 160 Muir Woods road, ont cru que j’avais 10 ans. </p><p>Je ne l’ai pas mal pris. Ce n’est tellement pas important.</p><h3>Et dire que nous rêvions, nous aussi, d'y goûter<br></h3><p>David, 57 ans, celui qui m’a servi de père, n’est pas non plus en grande forme. Il est à la limite de l’«obésité», ne me demandez pas ce que cela signifie. Je sais seulement que ce n’est pas bon signe. Avec son 1.83 mètre, il flirte à 300 grammes près (l'équivalent d'une boîte de conserve, j'ai vérifié) avec les 100 kilos. Quant à ma mère, 49 ans, qui ne mesure qu’1.52 mètre – 31 centimètres de moins que notre père, sans doute l’un de nous avait-il consigné cette non-information dans son carnet secret, notre seule intimité – elle pesait 63,5 kilos le jour où j’ai volé le téléphone, le jour où j’ai attendu qu’ils s’endorment au petit matin peu après 5 heures (nous vivions la nuit, dormions le jour) pour m’enfuir par la fenêtre avec ce portable et composer les trois chiffres. Oui, le jour où toutes ces voitures de police ont surgi avant de nous libérer, avant de les menotter et les emmener, eux et leur incrédulité. <br></p><p>J'ai appris depuis que nous étions connus dans notre rue comme la «famille vampire»: les rares voisins qui ont pu nous apercevoir ont bien vu en effet que nous étions tous très pâles, «une peau aussi blanche qu'une feuille de papier», «comme s'ils n'avaient jamais vu le soleil», ont-ils déclaré. C'est vrai, nous ne voyions jamais le soleil et ne sortions que la nuit. Quand nous le pouvions. Pas très souvent.<br></p><p>J’ai appris depuis que Louise était elle aussi en surpoids, en «excès pondéral», disent les médecins. Un nouveau mot à retenir: je n’avais jamais croisé jusqu’ici de blouses blanches de ma vie. Comment dès lors aurais-je pu me douter que mes parents tout-puissants avaient des problèmes de santé? </p><p>Et dire que nous rêvions de goûter, nous aussi, aux tartes et autres pizzas dont ils se délectaient sous notre nez. Mais nous ne pouvions y toucher.</p><h3>Des cadeaux et des cartons<br></h3><p>Comme tous les J. de la maison, j’étais nourrie selon un calendrier précis. Impossible de vous le dévoiler, moi-même je ne saurai vous dire si logique il y avait, mais pour faire court, nous bénéficiions selon les jours ou les semaines sans punitions – rares pour ce qui me concerne – d’un repas quotidien froid: généralement des saucisses de Vienne que nos parents délivraient, selon notre docilité, de leur conserve. Peu importe si le fer blanc n’était pas à même la table de la cuisine, aussi <em>disgusting</em> que chaque cm<sup>2</sup> de la maison, peu importe si les saveurs n’étaient pas variées: nous mangions. Quand nous le méritions.</p><p>Tout comme les jouets que David et Louise nous achetaient quand ils n’étaient pas en virée adolescente, «sexuelle». C'est mal bien sûr, mais c'est arrivé au moins une fois, j'avais 8 ans, neuf ans de moins que maintenant. Louise qui n'avait connu que mon père, a voulu coucher avec un inconnu rencontré sur l'ordinateur. 4000 kilomètres pour rejoindre ce motel de Huntsville, Alabama. Mon père est resté sur le parking, ma mère a dormi avec ce monsieur. Un an plus tard, jour pour jour, David et Louise nous ont abandonnés à nouveau pour retourner, tous les deux, dans la même chambre de ce même motel. Cette fois en amoureux. <br></p><p>Comme chaque fois qu'ils quittaient 160 Muir Woods road, ils nous attachaient, selon leur humeur, avec des cordes ou des chaînes, dans l’une des quatre pièces de notre maison, de notre prison. Dans une chambre, dans le salon ou dans notre salle de classe (les six plus jeunes d'entre nous suivaient l’école à la maison, enregistrée officiellement le 21 mars 2011 sous le nom de Sandcastle Day School – château de sable dans votre langue). Alors oui, tout dépendait de leur humeur. Reste que des cadeaux, ils en achetaient mais sans que nous puissions jamais les déballer. Cela vaut pour les 12 vélos et pour mille autres jeux. Tous sont restés dans leurs cartons. Comme les pizzas. Le but n’était pas que nous en profitions mais que nous en rêvions. Alors oui, je le reconnais, quitte à leur faire plaisir (mais peut-être n'auront-ils pas accès à cette information depuis leur prison): nous en rêvions. Tous. Enormément.</p><h3>Disneyland, le parc de tous les prétextes<br></h3><p>Une ou deux fois l’an, toutefois, ils nous emmenaient. Tous ensemble dans le minibus Volkswagen (une marque européenne aux plaques Mickey comme leurs trois autres véhicules pour rappeler au monde, aux voisins, que les <em>Turpin </em>n’étaient pas n’importe qui). Un peu plus d’une heure de route pour rejoindre Disneyland, le parc de tous les possibles, de tous les prétextes. Disneyland, l’occasion de faire de nouvelles photos de la famille si unie, l’occasion de faire toujours plus semblant, de nous acheter à tous des vêtements identiques, d’exhiber sur facebook, à l’intention des proches, tous interdits de visite sous divers prétextes depuis au moins cinq ans, une famille heureuse, des enfants souriants. <br></p><p>Idem lors des trois renouvellements de vœux de mariage de nos parents. A Las Vegas, devant un monsieur qui ressemble au «King», une célébrité dont nous autres J. n'avions jamais entendu parler. La dernière fois, c'était il y a moins un peu plus de deux ans. Par trois fois, nous avons échangé puis revêtu ces mêmes robes roses à carreaux pour les dix filles et ces mêmes costumes noirs à cravates bordeaux pour les trois garçons, selon notre taille, notre développement. Nous étions leur décoration.<br></p><p>Alors oui, nos sourires étaient bien évidemment de mise, mais ils étaient si bien orchestrés: exigés. Ah oui? Vous pensez vraiment qu’à notre place vous auriez pu montrer, en leur présence inquiétante, le calvaire que depuis tant d’années vous enduriez? Non, je vous l’assure, vous n’avez tellement pas idée de la situation, jamais, ô grand jamais, vous ne l’auriez fait. Nous étions si conditionnés. Par des menaces incessantes, terrifiantes. Même si nous aurions eu apparemment mille occasions. A Disneyland, à l’école ou à l’université pour certains d’entre nous. Mais le monde nous était inconnu. Les pressions, les chantages – sans compter l'«acte obscène» que j'ai subi de la part de mon père – étaient tels qu’il nous était inimaginable de dénoncer nos parents et de passer outre leur pouvoir délirant. Et puis nous étions invisibles de toute façon.<br></p><p>Louise, surtout Louise, exultait en voyant ces images idylliques, si <em>fake</em>, de notre famille. Pensez donc, nous étions bien plus nombreux, bien plus convaincants que les Kate+8, ce programme TV d’une femme et de ses huit enfants, ce <em>reality show</em> ultraconnu ici aux Etats-Unis (à l’exception, bien sûr, de nous autres J.) que ma mère vénérait et jalousait à la fois. Elle avait toute la collection. Des DVD que les policiers ont retrouvés dans le garage parmi des centaines d'autres. Un jour, a-t-elle confié à mon oncle, elle aurait, elle aussi, son propre show, deviendrait célèbre et ferait fortune. «Des millions de dollars», se convainquait-elle. Grâce à nous. Grâce à nous treize. <br></p><p>Certains prétendent même que nous aurions été plus nombreux par le passé et que d’autres enfants seraient nés dans notre maison, mais je ne peux vous confirmer cette information malgré les suspicions. De la police notamment qui recherche avec ses chiens détecteurs de cadavres d'autres ADN dans la maison. Certains ont aussi mis en avant ces derniers jours le fait que sur les documents officiels de la faillite de mes parents, en 2011, un quatrième garçon était mentionné. Je crois pourtant n'avoir que trois frères. Enfin, aux dires même de Louise à son amie Eilene, une xième grossesse était bien en cours il y a sept ans (voir les messages ci-dessous). Mais je ne me souviens pas de ce bébé. Je sais en revanche qu'elle et David voulaient mettre en route <a href="https://bonpourlatete.com/actuel/david-et-louise-turpin-voulaient-encore-des-enfants">un nouvel enfant. </a>Le quatorzième. Le quatorzième officiel. <br></p><h4 style="text-align: justify;"><img class="img-responsive " src="https://media.bonpourlatete.com/default/w500/1517701977_capturedecran20180204a00.50.51.png" width="471" height="472">21 février 2011, ma mère confie à une amie qu'un nouveau bébé naîtra d'ici <br>la fin de l'année. Je ne peux vous dire si cela a été le cas, mais cet enfant <br>n'est pas parmi nous aujourd'hui en tout cas.<br></h4><p>Etait-elle enceinte au moment où j’ai fait échouer leurs plans? Je ne le crois pas, je prie – cela nous l’avons appris – pour que ce ne soit pas le cas. Ce qui est sûr, c’est qu’elle et lui s’apprêtaient, dans les jours, les heures en réalité, qui ont suivi ma fuite, à un nouveau déménagement. Vers Oklahoma City où Northrop Grumann était visiblement prêt à offrir un transfert à mon ingénieur de père. Les cartons étaient déjà prêts. Voilà pourquoi je n’avais plus le choix, c’était à ce moment-là ou jamais.</p><h3>Ce qui a sauvé nos vies<br></h3><p>Depuis l’arrestation de nos parents, nous sommes très cadrés (nous en avons l’habitude). Mais là, tout est différent. Plus de chaînes, plus de liens, des toilettes, des douches même. J’ai compté depuis mon arrivée dans ce lieu parfaitement immaculé – c’est un hôpital – le nombre de fois où j’ai pu me laver depuis ma naissance. Ça n’a pas été très difficile: j’en ai bénéficié comme tout le reste de ma fratrie, une fois l’an. Dix-sept bains donc pour ce qui me concerne. <br></p><p>Depuis quelques jours, les infirmières nous apprennent à nous brosser les dents. Ce n'est pas si difficile. Pour le reste, pour nos besoins naturels, nous devions faire sans. Sans toilettes donc. La plupart du temps. Ma sœur aînée J. et mon frère aîné J. en ont fait les frais à l’école et à l’université où ma mère les conduisait et faisait le piquet devant la porte de la classe jusqu’à la sortie des cours. Leurs camarades refusaient de les cotoyer tant ils étaient particuliers. Et puis, ils «sentaient le caca». Etait-ce pour nous protéger, nous, leurs frères et sœurs en captivité, qu’ils n’ont jamais osé parler, craignant des représailles à notre endroit de la part de nos parents? Ou étaient-ils effrayés par toute personne extérieure? Les deux, je crois.<br></p><h4><strike><img class="img-responsive " src="https://media.bonpourlatete.com/default/w235/1517591763_jennifer.jpg" width="298" height="375"></strike>J., l'aînée de notre fratrie lorsqu'elle fréquentait<br>la Meadowcreek elementary school, Texas.<br></h4><p>Depuis notre libération, depuis ce dimanche du mois de janvier 2018 plus exactement – je venais d'avoir 17 ans mais c'était un dimanche ordinaire, sans église, nous n'y allions plus depuis que mes parents n'avaient plus confiance en elle et voulaient expérimenter d'autres religions –, depuis ma fuite donc puis la décision des médecins, notre fratrie a été scindée en trois. Les plus de 18 ans d’un côté, les mineurs, dont je suis pour une année encore, de l’autre, dans deux établissements différents. J’aurais préféré rester avec les douze J. Adultes, ados et enfants, tous ensemble. Même avec J., la petite dernière. Se tenir les coudes est important: c’est cela qui a sauvé nos vies. <br></p><h3>Dieu que c'est long</h3><p>Du reste, aucun de nous ne comprend vraiment pourquoi tout le monde d’un coup est si attentionné et bienveillant avec nous. Pourquoi tous font tout aujourd’hui pour nous préserver. D’eux bien sûr, dont nous nous ne souhaitons aucune nouvelle – aucun de nous du reste n’en a demandée malgré les encouragements d’une certaine Kampusch, une Européenne qui elle aussi, disent les journaux, a vécu l’abominable – mais surtout de tout ce qui pourrait retarder notre rémission. Même si nous espérions cette libération, nous étions trop effrayés pour la provoquer. Les menaces étaient telles… Mais il a bien fallu que l’un de nous se lance. <br></p><p>Comme l'avait fait ma sœur aînée, J. en 2010 alors que nous vivions encore dans notre taudis texan où chaque armoire, chaque pièce, même le frigo étaient cadenassés et où les fenêtres étaient condamnées par des planches de bois. En fait non, je me souviens maintenant, nous ne vivions plus dans cette maison. Elle était devenue si puante que nos parents avaient acheté un camping-car qu'ils avaient planté sur le terrain, à l'arrière de la maison, à l'abri des regards. J’avais alors 9 ans. <br></p><p>Oui, <strike>Jennifer</strike>, – je n’ai rien dit, j’ai effacé – J. s’était lancée: elle avait fui. Seulement, notre voisine avait tout fait capoter en lui posant des questions impossibles: sur son âge (21 ans mais comment, en voyant cette enfant décharnée, aurait-elle pu la croire?) et sur le nom de notre président (J. – nous l’avons appris entretemps – aurait dû répondre «Obama» mais elle comme nous ignorions ce nom). Du coup, la voisine – elle s’en veut aujourd’hui, et nous lui en voulons aussi, même si c’est mal mais c’est ainsi – l’avait reconduite à la maison pensant sans doute que cette enfant était dérangée. Un douloureux épisode qui a provoqué l’immédiate décision de nos parents de déménager dans un autre Etat par crainte des services sociaux, abandonnant sur place nos deux chihuahuas, un chat ou deux ou trois (retrouvés morts) et prolongé notre calvaire de huit ans. 3000 jours environ. Dieu que c’est long.</p><h3>L'implacable décision<br></h3><p>Voilà, je m’en souviens maintenant! Je me rappelle comment j’ai su quel numéro composer: c’est J. ma sœur aînée qui nous l’a fait mémoriser. Ce 911 qu’elle avait appelé de ses vœux avec tant d’insistance lors de sa fuite texane, suppliant la voisine d’alerter la police pour nous sauver.</p><p>Alors à mon tour, l’autre jour, j’ai osé, osé surmonter ma peur. Avec l’une de mes sœurs, J., mais elle, contrairement à moi, a rebroussé chemin, tant elle était effrayée. Tout le monde, partout, dans les médias, dans le milieu médical, s’est dit depuis impressionné par mon courage. C’est vrai, il m’en a fallu. Car j’étais terrifiée. Je savais que David et Louise me tueraient – me tueraient pour de vrai – si ma tentative échouait.</p><p>Mais cette émotion au regard de l’angoisse dont j’ignorais jusqu’au nom qui m’a accompagnée depuis dix-sept ans (vous ai-je dit que j’avais 17 ans?) m’a permis d’aller au-delà de moi-même. Cet au-delà qui a surgi le jour où j’ai accepté de prendre cette implacable décision. Jusque là, je peux l’avouer aujourd’hui, je n’étais personne. Juste l’un des 12 zombies (j’excepte J., la petite) de Perris, Californie.</p><p>De ma chambre d’hôpital, je n’ai accès à aucune information qui pourrait perturber encore davantage la victime – l’héroïne, insistent-ils – que je suis.</p><p>Cependant. J’ai appris à m’informer. Appris à feindre, à contourner. Je n’ai pas d’avis sur ce qui suit, car pour avoir un avis il faut avoir vécu ce qui n’est pas (encore) mon cas, mais je sais ceci.</p><h3>Un amour d'enlèvement</h3><p>Mes parents, lorsqu’ils étaient enfants puis adolescents, comme nous le sommes aujourd’hui, vivaient tous deux en Virginie occidentale. A Princeton très exactement. Une grande ville, paraît-il, située à 4000 kilomètres de notre enfer de Perris.<br></p><h4><img class="img-responsive " src="https://media.bonpourlatete.com/default/w800/1517590693_turpin1979.png" style="width: 336px; height: 377px;">Mon père, David Allen Turpin, âgé de 18 ans en 1979. <br></h4><p>Leur histoire a commencé (je viens de l’apprendre mais elle n’étonne aucun de nous) par un enlèvement. Mon père, universitaire alors âgé de 23 ans,<em></em> a persuadé un jour de l’an 1984 les employés de l'école de Princeton de le laisser emmener Louise de 9 ans sa cadette, en 10<sup>e</sup> primaire. Direction le Texas. Ma mère était mineure. Rendez-vous compte, elle avait deux ans de moins que je n’ai maintenant! Vous ai-je dit que j’avais 17 ans? Leur fuite n’a pas duré. Sommés de revenir en Virgine occidentale, en raison des réticences, immenses, de mon grand-père maternel Allen quant à leur relation et grâce à la complicité de ma grand-mère Phyllis (paix ait leurs âmes, eux qui n’ont jamais plus été autorisés à nous rendre visite et à nous parler), mes parents ont finalement réussi à se marier le 11 février 1985, il y a exactement, jour pour jour, trente-trois ans. L’âge de la mort du Christ. <br></p><p>Peut-on renoncer à être croyant? <br></p><h4><img class="img-responsive " src="https://media.bonpourlatete.com/default/w600/1517590753_turpinimage.jpg" style="width: 329px; height: 480px;">Mes parents lors de leur mariage en 1985 en Virginie. <br>Mon père avait 24 ans, ma mère 16 ans.<br></h4><h3>Leur union<br></h3><p>A Pearisburg (VA), le pasteur Lee O. Ellison, toujours en fonction aujourd'hui, a uni ce jour-là David Allen Turpin, 24 ans, amateur d’échecs et rêvant, un peu tard, de devenir l’Edison du 19<sup>e</sup> siècle, et Louise Ann Robinette, jeune femme de 16 ans abusée durant son enfance, comme ma tante Elizabeth (je n’étais pas née lors de sa dernière visite chez nous en 1999) et ses cousines, par un «très proche» de la famille. Etait-ce mon grand-père? Celui que je n'ai plus jamais vu? Celui qui pose sur cette photo? Non, si j'en crois ce que la rumeur répand, c'était bien mon arrière grand-père qui abusait de toute la famille, de ma grand-mère Phyllis que l'on voit aussi sur cette photo, de ses petites-filles parmi lesquelles Louise. Louise qui était aussi le prénom de mon arrière grand-maman. <br></p><h4><img class="img-responsive " src="https://media.bonpourlatete.com/default/w634/1517620925_elizabethlouiseteresa.jpg" width="375" height="457">Ma tante Teresa, ma mère, ma grand-mère Phyllis, ma tante <br>Elizabeth et mon grand-père Allen.<br></h4><p>Je ne peux rien affirmer. Mais ce que je sais en revanche, c'est que ma mère, à son mariage, n’avait pas encore atteint l’âge que j’ai maintenant. Elle avait moins de 17 ans. <br></p><h4><img class="img-responsive " src="https://media.bonpourlatete.com/default/w800/1517590550_turpinmariageacte.jpg" width="928" height="876">L'acte de mariage de mes parents.<br></h4><p>Peu après leur union en Virginie occidentale, David et Louise sont retournés au Texas, là où ils avaient fui un an plus tôt. D’abord à Benbrook, à 70 kilomètres de Dallas, puis à Forth Worth, non loin du ranch des apparemment célèbres Ewing. Leur premier enfant, J., mon aînée, est née en 1988, quatre ans après leur mariage. Elle a neuf ans de moins que notre tante Elizabeth. Durant ses premières années, J. était une enfant comme les autres. Ça n’a pas duré.</p><h4><img class="img-responsive " src="https://media.bonpourlatete.com/default/w800/1517591062_elizabethaineeteresa.jpg" width="438" height="492">Ma mère Louise avec sa sœur Elizabeth et J. sa première fille en 1989, <br>sans doute lors des 1 an de l'aînée de notre fratrie.<br></h4><p>Car la famille s’est agrandie et les bébés se sont succédé. «C'est Dieu qui l'a voulu», s'est défendue Louise au tribunal. J. (1992), J. (1993), J. (1995), J. (1997), J.(1998), J. (1999), puis moi en 2001. Arrivèrent ensuite J. (2003), J. (2004), J. (2006), J. (2007) et J. (2015). Mes souvenirs, flous, me laissent croire que les premiers temps à Rio Vista se sont plutôt bien déroulés. Nous avions même trois petits cochons à la maison. C’est surtout depuis 2010, depuis l'évasion tentée par J., (le bébé sur la photo) que tout s’est dégradé. Des punitions, déjà lourdes, nos parents sont passés à la torture. Attaches, violences, étranglements, privations. </p><h3>Le début après la fin<br></h3><p>C'est tout. Je n’ai plus envie de dire. Mes frères et sœurs sont en vie. Je le suis aussi. Nous avons de la chance: entre 4 et 7 enfants meurent chaque jour ici, aux Etats-Unis, des suites d'abus et de négligence. Je ne sais pas ce qu’il adviendra de nous. Si nous serons adoptés, placés. Ensemble, comme nos chiennes, ou séparément. Mais là, permettez-moi de ne plus parler. <br></p><p>Ni de L. ni de D. <br></p><p>Ni de Jennifer, Joshua, Jessica, Johanthon, Joy, Julianne, Jeanetta, James, Joanna, Jolinda, Julissa et Janna. Ni de moi.</p><p>J'ai froid.<br></p><p>Jordan<br></p><p></p><hr><p></p><h2>Précédemment dans Bon pour la tête</h2><p><a href="https://bonpourlatete.com/actuel/david-et-louise-turpin-voulaient-encore-des-enfants">«David et Louise Turpin voulaient d'autres enfants»</a>, par Florence Perret</p>', 'content_edition' => null, 'slug' => 'moi-j-17ans-zombie-de-Perris', 'headline' => false, 'homepage' => 'col-md-12', 'like' => (int) 1320, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 800, 'homepage_order' => (int) 960, 'original_url' => null, 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 5, 'person_id' => (int) 3, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [ [maximum depth reached] ], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' } ] $embeds = [] $images = [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) { 'id' => (int) 3163, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'margot-new.jpg', 'type' => 'image', 'subtype' => 'jpeg', 'size' => (int) 66788, 'md5' => '76cb0fae98dc23515ffcfac4758ed180', 'width' => (int) 695, 'height' => (int) 545, 'date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'title' => null, 'description' => 'Portrait de Pierre Margot, l'expert, réalisé avec des empreintes digitales par l'artiste new-yorkaise Jennifer Hannaford.<br>', 'author' => null, 'copyright' => '© République du canton du Jura', 'path' => '1519661595_margotnew.jpg', 'embed' => null, 'profile' => 'default', '_joinData' => object(Cake\ORM\Entity) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Attachments' } ] $audios = [] $comments = [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Comment) { 'id' => (int) 501, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'status' => 'ACCEPTED', 'comment' => 'Pierre Margot avait raison : on ne saura probablement jamais la vérité . 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PRÉAMBULE
Seznec: les dates clés
Guillaume Seznec et Pierre Quémeneur.
30 juin 1923 Guillaume Seznec, 45 ans, est arrêté pour le meurtre de son ami (et associé?) Pierre Quémeneur, 46 ans, conseiller général du Finistère. La police le soupçonne d'avoir fait disparaître le corps (jamais retrouvé) au cours d'un voyage en voiture pour Paris un mois auparavant. Seznec ne cessera jusqu'à sa mort de clamer son innoncence.
Le Journal du 1er juillet 1923 annonce l'arrestation de «Sezenec» (2e depuis la gauche).
4 novembre 1924 Seznec est reconnu coupable et condamné aux travaux forcés à perpétuité. Le matricule 49.302 est embarqué le 7 avril 1927 avec 400 autres forçats sur La Martinière pour la Guyane. Sa peine sera commuée, onze ans plus tard, en vingt ans de réclusion.
Les forçats de La Martinière s'entassent à fond de cale, dans huit cages: les «bagnes».14 mai 1947 Après vingt ans de bagne, Guillaume Seznec, 69 ans, est débarqué au Havre le 1er juillet. Sa fille, Jeanne, et son beau-fils, l'accueillent chez eux.
Guillaume Seznec, après 20 ans de bagne.13 février 1954 Seznec, 76 ans, succombe à ses blessures trois mois après avoir été renversé accidentellement par une camionnette à Paris.
12 juillet 1995 Le collège d'experts internationaux, parmi lesquels Pierre Margot, professeur et directeur de l'Institut de police scientifique et de criminologie de l'université de Lausanne (IPSC) rend ses conclusions. Elles vont tout sauf dans le sens de la réhabilitation de Seznec.
24-25 février 2018 L'ancien avocat de la famille Seznec, David Langlois, décide d'entamer des fouilles privées dans l'ancienne maison des Seznec à Morlaix sur la base d'un témoignage livré en 1978 par le fils de Guillaume: c'est Marie-Jeanne, l'épouse de Seznec, qui aurait tué accidentellement Pierre Quémeneur après que ce dernier lui avait fait des avances. Un chandelier, un corps allongé. Un vrai souvenir? Langlois, pour qui l'affaire est devenue un sacerdoce, y croit dur comme fer. Les fouilles entamées samedi dernier dans le cellier de la maison, muré depuis lors (en 1923?), ont permis de retrouver deux os vraisemblablement humains, dont une tête de fémur. Et une pipe. Celle de Pierre Quémeneur?
La maison de la famille Seznec à Morlaix: 1923-2018. Le cellier aurait entretemps été muré.
Alors, professeur Margot, cette découverte, réaliste ou bidon?
Réaliste, car on n’a jamais retrouvé de corps. Mais est-ce celui de la victime de l’époque, Pierre Quémeneur, ou celui d’un autre?
L’ADN pourra-t-il encore parler 95 ans après les faits?
Cela dépend de l’état de l’ADN mitochondrial, de ce qu’il en reste.
Encore moins de chances donc que l'ADN théoriquement présent sur la pipe – de l’ADN de contact – soit utilisable.
En effet, il devrait être très dégradé après être resté au contact de l’eau, de la terre et des éléments.
Combien de temps avant de connaître les résultats?
Les médecins légistes de la police scientifique devraient pouvoir le déterminer assez rapidement. Une semaine environ, à moins bien sûr que d’autres affaires surgissent. On a attendu 95 ans pour celle-ci, ce n’est plus urgent.
Vont-ils enfin permettre de résoudre l’énigme Seznec?
Pas de réponse de Normand – on est ici Bretagne – mais une réponse à la suisse: JaNein. Ça ne résoudra pas en tout cas ce qu’il s’est passé. S’il s’agit bien du corps de Quémeneur, nous saurons qu’il est mort dans des circonstances criminelles mais nous ne connaîtrons pas les circonstances du cas. En fait, l’absence ou la présence de corps ne change rien à l’affaire.
Jamais des fouilles n’avaient été effectuées dans ce cellier?
Je ne peux pas imaginer que cela n'a pas été fait en 1924. Ils ont fouillé des lacs, des forêts, ils ont creusé. Mais sait-on jamais?
Nous avons trouvé un mètre cube de documents sur l’affaire!
La Cour de cassation de Paris vous a mandaté en 1994 pour une expertise préalable afin de savoir si cela valait la peine de rouvrir la procédure. Pourquoi vous?
Je n’étais pas seul (trois Français et un Allemand, ndlr). Mais outre le fait que j’étais francophone, ce qui était un avantage, nous avions passablement publié dans les domaines d’expertises à l'Institut.
Qu’avez-vous découvert dans les archives du Tribunal?
Presque un mètre cube de documents sur l’affaire! Des lettres de Marie-Jeanne Seznec, de Pierre Quémeneur, des documents pointant d’autres suspects, Pouliquen (beau-frère de Qémeneur, ndlr), Bonny (l’inspecteur controversé chargé de l’affaire). Mais tout ce que l’on a trouvé, c'était des documents à charge.
A l'instar du carnet du lait de Quémeneur …
Oui. L’un des éléments était ce carnet de notes. Pierre Quémeneur tenait un cahier de bord où il notait systématiquement tous ses rendez-vous, ses dépenses. Seulement, plusieurs pages manquaient dans le mois précédant (avril 1923, ndlr) sa disparition. En revanche, les notes sur son déplacement fin mai vers Paris étaient là. Les restaurants où il avait mangé, les frais de garage etc. Mais nous avons découvert que les noms des lieux avaient été effacés et remplacés. De plus, Seznec qui n’avait jamais tenu de carnet jusqu'alors, en a fait un pour ce voyage, mentionnant les mêmes lieux que ceux qui avaient été remplacés sur celui de Quémeneur…
Avez-vous trouvé au cours de ces trois années un élément majeur, un élément à décharge?
Nous avons trouvé toute une série de faits nouveaux, grâce notamment aux nouvelles techniques (infrarouge, ultraviolet, ndlr) mais jamais, à aucun moment, un élément à décharge.
Aviez-vous eu connaissance de ce témoignage de «Petit Guillaume», apparemment surgi de nulle part? Le fils de Guillaume et Marie-Jeanne aurait déclaré 1978, quatre ans avant sa mort, que sa mère avait tué accidentellement Quémeneur après que ce dernier lui avait fait des avances…
Non. Je n’en ai trouvé aucune mention dans les documents.
L’Affaire Seznec est un cas d’école. Vous y avez fait d’ailleurs maintes fois référence durant vos cours.
Oui, avec le film de Boisset notamment. Un bon film mais avec un parti pris: ici Seznec est innocent. Je l’ai visionné avec mes étudiants pour bien les biaiser. Et voir quels enseignements ils pouvaient en retirer.
Intéressant de voir comme on peut rendre crédible une histoire en l'absence de tout indice probant
Alors, Seznec, escroc ou assassin?
Aucune idée. Le tribunal l’a jugé assassin.
Et Pierre Quémeneur, tout blanc?
Non, c’était un homme très peu aimé dans la région, il n’avait pas été au front et lui aussi avait fait de l’argent durant la guerre. L’hypothèse que cet homme de droite ait pris un homme de paille (Seznec, ndlr) pour un trafic de Cadillac avec les Bolchéviques est vraisemblable.
Et ce rebondissement?
C’est un de ces rebondissements qui fait plaisir, ça fait du papier. Mais cela ne va rien changer sur le plan judiciaire. La vérité, j’en suis pratiquement certain, personne ne la saura jamais. A l’heure où on parle de fake news, il est intéressant de voir comme on peut construire une histoire et la rendre crédible en l’absence de tout indice probant. Aujourd’hui, on peut faire toutes les constructions intellectuelles que l’on veut, mais on ne pourra pas refaire l’histoire...
... une histoire, reconnaissez-le, passionnante.
Une histoire fascinante.
Le film
L'affaire Seznec (1992), d'Yves Boisset
Le site et le livre
Pour en finir avec l'affaire Seznec, Denis Langlois
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Il s'agissait de localiser les populations par groupes ethniques et aussi d'enseigner dans les langues autochtones au niveau de l'école primaire selon des critères ethniques. Ce fut un choc pour Ramaphosa et sa famille, car ses premières années ont été passées dans un environnement multiracial, à l'ouest de Johannesburg, avant que lui et sa famille soient installés de force à Soweto.</p><p>C'était un étudiant qui travaillait dur, très influencé par le christianisme. Tous les gens qui le connaissaient l'ont fortement ressenti. Ses amis disaient de lui qu'il est peut-être plus religieux que politique. Bien que la politique et la religion étaient inextricablement liées.</p><p><strong>Quand cela a-t-il commencé?</strong></p><p>Depuis son très jeune âge. Au début de son adolescence, Ramaphosa est déjà politisé tout en étant un excellent étudiant. Il s'habille élégamment, s'efforce d'être parmi le top trois ou quatre de sa classe. Un perfectionniste. Selon les amis de Cyril, l'un des épisodes qui l'a le plus blessé a été les préjugés ethniques qu'il a subis, les préjugés sur les personnes d'origine Venda – en particulier des enseignants parlant zoulou, mais aussi des enfants de l'école. Il n' y avait alors presque aucune interaction avec les Blancs. Ces préjugés émanaient d'organisations confessionnelles.</p><p><strong>Son leadership et son charisme se sont imposés très rapidement.</strong><br></p><p>Quand Cyril a eu 16 ans, ses parents l'ont envoyé au collège de Sibasa, la ville d'origine de son père <em>(tout au nord-est de l'Afrique du sud, à la frontière zimbabwéenne, non loin du Kruger Park, ndlr)</em>. Une des raisons était de le sortir d'un environnement politique très instable à Soweto, à une époque où la conscience noire émergeait comme un phénomène politique important. C'est là que Ramaphosa commence à montrer des caractéristiques inhabituelles: à peine arrivé, il est élu à la tête du mouvement chrétien étudiant, une position alors très stratégique. Ce poste aurait dû revenir à un étudiant <em>senior</em> mais les collégiens sont allés voir le proviseur pour lui dire: «Nous avons décidé d'élire ce nouveau garçon».</p><p>Cyril a utilisé cette position à diverses fins. Il s'est impliqué dans l'évangélisation des zones rurales, très pauvres autour de Sibasa. Il y a appris à interagir avec ces populations, chose qu'il n'aurait jamais pu faire s'il avait passé toute sa scolarité à Soweto. Il s'est familiarisé avec les problèmes auxquels ces familles faisaient face. Cela a été une expérience formatrice. Cyril s'est aussi montré très critique envers nombre de ses professeurs, paresseux et mal préparés. Ramaphosa se plaignait auprès d'eux leur disant que leur travail n'était pas de qualité. Il n'hésitait pas non plus à haranguer ses camarades et à leur faire refaire leur leçons. Cyril a toujours été le leader de leur groupe. Il n'a jamais perdu sa capacité à parler à des groupes religieux, et il a toujours conservé des liens avec l'église de Chiawelo à Soweto.</p><p><strong>Y a-t-il une analogie entre l'influence de la conscience noire sur Cyril Ramaphosa et <em>(le désormais ex-président)</em> Zuma?</strong><br>Probablement. La conscience noire était dans les années 1970 l'idéologie politique dominante chez les jeunes noirs radicaux, en particulier dans les classes moyennes, ceux qui fréquentait l'université. Et l'ANC (Congrès national africain) et le PAC (Congrès Panafricain) étaient alors plus ou moins invisibles. Quoique: le frère de Ramaphosa, Douglas, par exemple, plus jeune, était un militant de l'ANC. 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Ramaphosa est mal à l'aise lorsqu'il parle de questions d'ordre privé ou familial. Il aime compartimenter sa vie, de sorte qu'il a des amis de groupes différents et peut-être antagonistes de personnes en Afrique du Sud, y compris des gens d'affaires, des syndicalistes et des militants religieux, et il a tendance à les rencontrer séparément plutôt qu'ensemble. Il aime gérer les relations.</p><p><strong>Les informations que vous avez pu récolter viennent donc de son entourage et non de lui?</strong><br>Principalement, oui. Bien que je lui aie parlé depuis et que je l'ai rencontré à plusieurs reprises pendant la préparation du livre. Il a lu le manuscrit et a identifié quelques erreurs. 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Le compte à rebours a commencé, les moteurs sont allumés. Le milliardaire Elon Musk est là, vérifie la mise à feu de sa fusée. Starman, l'astronaute, le mannequin, s'accroche à son volant. Que Dieu soit avec eux. «Ground Control to Major Tom», tour de contrôle à Falcon Heavy: dix, neuf, huit, sept, six, cinq, quatre, trois, deux, un, décollage! ', 'subtitle_edition' => null, 'content' => '<iframe src="https://www.youtube.com/embed/m2p55BmwmJM" allow="autoplay; encrypted-media" allowfullscreen="" width="560" height="315" frameborder="0"></iframe><p><strong><br></strong></p><p><strong>Salut Starman, ça se passe comment là-haut?</strong></p><p>Je ne sais pas quelle heure il est, les lumières sont faibles. 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Une «maison de l'horreur», comme l'ont baptisée les médias américains après l'arrestation, un dimanche de janvier, de David et Louise Turpin, accusés d'avoir affamé et torturé leurs enfants. Par son courage, J., tout juste 17 ans, «Chose 8» de la famille Turpin, a délivré ses 12 frères et sœurs d’un cauchemar abyssal déguisé en bonheur disneyien. C’est une parfaite héroïne de roman dans l’Amérique déliquescente. Malheureusement, tout ce qu’elle dit est vrai, reconstitué à partir d’informations avérées. Ce texte ne fait que lui prêter une voix. Oui, cette voix pourrait être la sienne.', 'subtitle_edition' => null, 'content' => '<p>Je suis née il y a dix-sept ans. A Rio Vista, Texas. A 50 kilomètres, paraît-il, de Dallas et de l’univers impitoyable des Ewing. Je ne les ai jamais vus, ni à la TV (je ne peux pas la regarder) et encore moins de visu (je n’ai pas le droit de sortir de chez moi). Je ne sais pas qui sont Bobby, J.R., Cliff ou Sue Ellen. En même temps, ce n’est pas étonnant. Je n’ai pas l’âge de mes parents. Je n’ai que 17 ans. <br></p><p>Je ne peux même pas vous révéler mon propre prénom, c’est vous dire. Vous devrez vous contenter de mon initiale: J., la même que celle de mes douze frères et sœurs. J. comme Jesus? Josef? <u>Joshua</u>? Peut-être l’un de mes frères, âgé de 26 ans, le crack de la famille, est-il bien prénommé ainsi, mais je n’ai pas l’autorisation de vous le dire. Pour ce qui me concerne, en revanche, c’est bien le J. de Judas, même si ce n’est bien sûr pas ainsi que la fille que je suis a été baptisée. Mon vrai prénom provient du fleuve où Jésus-Christ, le fils du tout-puissant, a été baptisé il y a fort longtemps. Mais l'autre jour, le 14 janvier, douze jours exactement après mes 17 ans, il y a tout juste un mois, c'est en Judas que je me suis transformée, celui qui a fui, désobéi à Dieu. Dieu mon père. Dieu David. Oui, je suis ce Judas qui a trahi père et mère. Un père redoutable. Une mère qui à vrai dire ne l’était plus depuis bien longtemps, une mère qui depuis notre déménagement de nuit il y a huit ans vers la Californie pour son rêve hollywoodien (j’ignorais tout de ce projet mais je vous en parlerai après) n’a plus su, pu ou voulu nous protéger.</p><h4><img class="img-responsive " src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1518101049_turpinfamily.jpg">Moi, J., à la droite de ma mère, «chose 8» de la famille.<br></h4><p>J’ai appris qu’elle a souri quand la juge, l’autre jour, leur a interdit, à elle et à mon père, enchaînés au tribunal comme nous l’étions à la maison, d’essayer de nous contacter autrement que via leur avocat. Je ne sais pas ce qu’est un avocat. Mais j’ai compris qu’ils ne pourraient pas nous approcher jusqu’en 2021. Ça nous laisse 3 ans. <br></p><h4><img class="img-responsive " src="https://media.bonpourlatete.com/default/w800/1517620640_turpin_court.jpg">Mon père David et ma mère Louise enchaînés, comme nous l'étions à la maison, ont plaidé non coupable. <br></h4><h4><img class="img-responsive " src="https://bonpourlatete.comhttps://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1518098966_capturedecran20180208a14.56.38.png" width="805" height="271">La prochaine audience aura lieu le vendredi 23 février, dans douze jours.<br></h4><h3>Les chouchoux de mes geôliers<br></h3><p>J’ai 17 ans. Je viens de vous le dire. Contrairement à la plupart de mes frères et sœurs, qui ignorent tout de la vie et de l’extérieur, je savais moi ce qu’était un policier. J’avais compris, depuis deux ans, sans doute depuis plus longtemps (je ne saurai vous l’affirmer: le temps dans cette maison, vous vous en doutez, a perturbé nos réalités) que ma fratrie et moi subissions l’impensable. Et ne me demandez pas quand diable j’ai appris ces trois chiffres, ce numéro; comment, Seigneur, j’ai eu la présence d’esprit de retenir ces sons. Reste que je les ai gravés dans mon cœur. 9-1-1. <em>Tut-tit-tit</em>. Je savais qu’un jour ils inverseraient notre destin.</p><p>J’ai 17 ans, je vous le répète. Ma sœur cadette, J., a 2 ans et demi, elle se porte bien. De ce que j’ai pu voir tout au moins. Comme tous les petits derniers que j’ai vus défiler, c’est le chouchou de mes geôliers. Tout comme l’étaient les deux jeunes chiennes croisées Maltais qui ont rejoint la famille l’été dernier. Elles, contrairement à nous, étaient bien nourries. Bien mieux par exemple que l’aînée de notre fratrie, J., qui le 28 juillet prochain aura 30 ans. Cela fait belle lurette qu’elle n’a plus l’attention de mes parents. Elle pèse 37 kilos et n’a plus vraiment toute sa tête. Comme plusieurs de mes frères et sœurs. Moi? Je ne connais pas mon poids, je peux seulement vous dire que les officiers, en débarquant, l’autre jour à 160 Muir Woods road, ont cru que j’avais 10 ans. </p><p>Je ne l’ai pas mal pris. Ce n’est tellement pas important.</p><h3>Et dire que nous rêvions, nous aussi, d'y goûter<br></h3><p>David, 57 ans, celui qui m’a servi de père, n’est pas non plus en grande forme. Il est à la limite de l’«obésité», ne me demandez pas ce que cela signifie. Je sais seulement que ce n’est pas bon signe. Avec son 1.83 mètre, il flirte à 300 grammes près (l'équivalent d'une boîte de conserve, j'ai vérifié) avec les 100 kilos. Quant à ma mère, 49 ans, qui ne mesure qu’1.52 mètre – 31 centimètres de moins que notre père, sans doute l’un de nous avait-il consigné cette non-information dans son carnet secret, notre seule intimité – elle pesait 63,5 kilos le jour où j’ai volé le téléphone, le jour où j’ai attendu qu’ils s’endorment au petit matin peu après 5 heures (nous vivions la nuit, dormions le jour) pour m’enfuir par la fenêtre avec ce portable et composer les trois chiffres. Oui, le jour où toutes ces voitures de police ont surgi avant de nous libérer, avant de les menotter et les emmener, eux et leur incrédulité. <br></p><p>J'ai appris depuis que nous étions connus dans notre rue comme la «famille vampire»: les rares voisins qui ont pu nous apercevoir ont bien vu en effet que nous étions tous très pâles, «une peau aussi blanche qu'une feuille de papier», «comme s'ils n'avaient jamais vu le soleil», ont-ils déclaré. C'est vrai, nous ne voyions jamais le soleil et ne sortions que la nuit. Quand nous le pouvions. Pas très souvent.<br></p><p>J’ai appris depuis que Louise était elle aussi en surpoids, en «excès pondéral», disent les médecins. Un nouveau mot à retenir: je n’avais jamais croisé jusqu’ici de blouses blanches de ma vie. Comment dès lors aurais-je pu me douter que mes parents tout-puissants avaient des problèmes de santé? </p><p>Et dire que nous rêvions de goûter, nous aussi, aux tartes et autres pizzas dont ils se délectaient sous notre nez. Mais nous ne pouvions y toucher.</p><h3>Des cadeaux et des cartons<br></h3><p>Comme tous les J. de la maison, j’étais nourrie selon un calendrier précis. Impossible de vous le dévoiler, moi-même je ne saurai vous dire si logique il y avait, mais pour faire court, nous bénéficiions selon les jours ou les semaines sans punitions – rares pour ce qui me concerne – d’un repas quotidien froid: généralement des saucisses de Vienne que nos parents délivraient, selon notre docilité, de leur conserve. Peu importe si le fer blanc n’était pas à même la table de la cuisine, aussi <em>disgusting</em> que chaque cm<sup>2</sup> de la maison, peu importe si les saveurs n’étaient pas variées: nous mangions. Quand nous le méritions.</p><p>Tout comme les jouets que David et Louise nous achetaient quand ils n’étaient pas en virée adolescente, «sexuelle». C'est mal bien sûr, mais c'est arrivé au moins une fois, j'avais 8 ans, neuf ans de moins que maintenant. Louise qui n'avait connu que mon père, a voulu coucher avec un inconnu rencontré sur l'ordinateur. 4000 kilomètres pour rejoindre ce motel de Huntsville, Alabama. Mon père est resté sur le parking, ma mère a dormi avec ce monsieur. Un an plus tard, jour pour jour, David et Louise nous ont abandonnés à nouveau pour retourner, tous les deux, dans la même chambre de ce même motel. Cette fois en amoureux. <br></p><p>Comme chaque fois qu'ils quittaient 160 Muir Woods road, ils nous attachaient, selon leur humeur, avec des cordes ou des chaînes, dans l’une des quatre pièces de notre maison, de notre prison. Dans une chambre, dans le salon ou dans notre salle de classe (les six plus jeunes d'entre nous suivaient l’école à la maison, enregistrée officiellement le 21 mars 2011 sous le nom de Sandcastle Day School – château de sable dans votre langue). Alors oui, tout dépendait de leur humeur. Reste que des cadeaux, ils en achetaient mais sans que nous puissions jamais les déballer. Cela vaut pour les 12 vélos et pour mille autres jeux. Tous sont restés dans leurs cartons. Comme les pizzas. Le but n’était pas que nous en profitions mais que nous en rêvions. Alors oui, je le reconnais, quitte à leur faire plaisir (mais peut-être n'auront-ils pas accès à cette information depuis leur prison): nous en rêvions. Tous. Enormément.</p><h3>Disneyland, le parc de tous les prétextes<br></h3><p>Une ou deux fois l’an, toutefois, ils nous emmenaient. Tous ensemble dans le minibus Volkswagen (une marque européenne aux plaques Mickey comme leurs trois autres véhicules pour rappeler au monde, aux voisins, que les <em>Turpin </em>n’étaient pas n’importe qui). Un peu plus d’une heure de route pour rejoindre Disneyland, le parc de tous les possibles, de tous les prétextes. Disneyland, l’occasion de faire de nouvelles photos de la famille si unie, l’occasion de faire toujours plus semblant, de nous acheter à tous des vêtements identiques, d’exhiber sur facebook, à l’intention des proches, tous interdits de visite sous divers prétextes depuis au moins cinq ans, une famille heureuse, des enfants souriants. <br></p><p>Idem lors des trois renouvellements de vœux de mariage de nos parents. A Las Vegas, devant un monsieur qui ressemble au «King», une célébrité dont nous autres J. n'avions jamais entendu parler. La dernière fois, c'était il y a moins un peu plus de deux ans. Par trois fois, nous avons échangé puis revêtu ces mêmes robes roses à carreaux pour les dix filles et ces mêmes costumes noirs à cravates bordeaux pour les trois garçons, selon notre taille, notre développement. Nous étions leur décoration.<br></p><p>Alors oui, nos sourires étaient bien évidemment de mise, mais ils étaient si bien orchestrés: exigés. Ah oui? Vous pensez vraiment qu’à notre place vous auriez pu montrer, en leur présence inquiétante, le calvaire que depuis tant d’années vous enduriez? Non, je vous l’assure, vous n’avez tellement pas idée de la situation, jamais, ô grand jamais, vous ne l’auriez fait. Nous étions si conditionnés. Par des menaces incessantes, terrifiantes. Même si nous aurions eu apparemment mille occasions. A Disneyland, à l’école ou à l’université pour certains d’entre nous. Mais le monde nous était inconnu. Les pressions, les chantages – sans compter l'«acte obscène» que j'ai subi de la part de mon père – étaient tels qu’il nous était inimaginable de dénoncer nos parents et de passer outre leur pouvoir délirant. Et puis nous étions invisibles de toute façon.<br></p><p>Louise, surtout Louise, exultait en voyant ces images idylliques, si <em>fake</em>, de notre famille. Pensez donc, nous étions bien plus nombreux, bien plus convaincants que les Kate+8, ce programme TV d’une femme et de ses huit enfants, ce <em>reality show</em> ultraconnu ici aux Etats-Unis (à l’exception, bien sûr, de nous autres J.) que ma mère vénérait et jalousait à la fois. Elle avait toute la collection. Des DVD que les policiers ont retrouvés dans le garage parmi des centaines d'autres. Un jour, a-t-elle confié à mon oncle, elle aurait, elle aussi, son propre show, deviendrait célèbre et ferait fortune. «Des millions de dollars», se convainquait-elle. Grâce à nous. Grâce à nous treize. <br></p><p>Certains prétendent même que nous aurions été plus nombreux par le passé et que d’autres enfants seraient nés dans notre maison, mais je ne peux vous confirmer cette information malgré les suspicions. De la police notamment qui recherche avec ses chiens détecteurs de cadavres d'autres ADN dans la maison. Certains ont aussi mis en avant ces derniers jours le fait que sur les documents officiels de la faillite de mes parents, en 2011, un quatrième garçon était mentionné. Je crois pourtant n'avoir que trois frères. Enfin, aux dires même de Louise à son amie Eilene, une xième grossesse était bien en cours il y a sept ans (voir les messages ci-dessous). Mais je ne me souviens pas de ce bébé. Je sais en revanche qu'elle et David voulaient mettre en route <a href="https://bonpourlatete.com/actuel/david-et-louise-turpin-voulaient-encore-des-enfants">un nouvel enfant. </a>Le quatorzième. Le quatorzième officiel. <br></p><h4 style="text-align: justify;"><img class="img-responsive " src="https://media.bonpourlatete.com/default/w500/1517701977_capturedecran20180204a00.50.51.png" width="471" height="472">21 février 2011, ma mère confie à une amie qu'un nouveau bébé naîtra d'ici <br>la fin de l'année. Je ne peux vous dire si cela a été le cas, mais cet enfant <br>n'est pas parmi nous aujourd'hui en tout cas.<br></h4><p>Etait-elle enceinte au moment où j’ai fait échouer leurs plans? Je ne le crois pas, je prie – cela nous l’avons appris – pour que ce ne soit pas le cas. Ce qui est sûr, c’est qu’elle et lui s’apprêtaient, dans les jours, les heures en réalité, qui ont suivi ma fuite, à un nouveau déménagement. Vers Oklahoma City où Northrop Grumann était visiblement prêt à offrir un transfert à mon ingénieur de père. Les cartons étaient déjà prêts. Voilà pourquoi je n’avais plus le choix, c’était à ce moment-là ou jamais.</p><h3>Ce qui a sauvé nos vies<br></h3><p>Depuis l’arrestation de nos parents, nous sommes très cadrés (nous en avons l’habitude). Mais là, tout est différent. Plus de chaînes, plus de liens, des toilettes, des douches même. J’ai compté depuis mon arrivée dans ce lieu parfaitement immaculé – c’est un hôpital – le nombre de fois où j’ai pu me laver depuis ma naissance. Ça n’a pas été très difficile: j’en ai bénéficié comme tout le reste de ma fratrie, une fois l’an. Dix-sept bains donc pour ce qui me concerne. <br></p><p>Depuis quelques jours, les infirmières nous apprennent à nous brosser les dents. Ce n'est pas si difficile. Pour le reste, pour nos besoins naturels, nous devions faire sans. Sans toilettes donc. La plupart du temps. Ma sœur aînée J. et mon frère aîné J. en ont fait les frais à l’école et à l’université où ma mère les conduisait et faisait le piquet devant la porte de la classe jusqu’à la sortie des cours. Leurs camarades refusaient de les cotoyer tant ils étaient particuliers. Et puis, ils «sentaient le caca». Etait-ce pour nous protéger, nous, leurs frères et sœurs en captivité, qu’ils n’ont jamais osé parler, craignant des représailles à notre endroit de la part de nos parents? Ou étaient-ils effrayés par toute personne extérieure? Les deux, je crois.<br></p><h4><strike><img class="img-responsive " src="https://media.bonpourlatete.com/default/w235/1517591763_jennifer.jpg" width="298" height="375"></strike>J., l'aînée de notre fratrie lorsqu'elle fréquentait<br>la Meadowcreek elementary school, Texas.<br></h4><p>Depuis notre libération, depuis ce dimanche du mois de janvier 2018 plus exactement – je venais d'avoir 17 ans mais c'était un dimanche ordinaire, sans église, nous n'y allions plus depuis que mes parents n'avaient plus confiance en elle et voulaient expérimenter d'autres religions –, depuis ma fuite donc puis la décision des médecins, notre fratrie a été scindée en trois. Les plus de 18 ans d’un côté, les mineurs, dont je suis pour une année encore, de l’autre, dans deux établissements différents. J’aurais préféré rester avec les douze J. Adultes, ados et enfants, tous ensemble. Même avec J., la petite dernière. Se tenir les coudes est important: c’est cela qui a sauvé nos vies. <br></p><h3>Dieu que c'est long</h3><p>Du reste, aucun de nous ne comprend vraiment pourquoi tout le monde d’un coup est si attentionné et bienveillant avec nous. Pourquoi tous font tout aujourd’hui pour nous préserver. D’eux bien sûr, dont nous nous ne souhaitons aucune nouvelle – aucun de nous du reste n’en a demandée malgré les encouragements d’une certaine Kampusch, une Européenne qui elle aussi, disent les journaux, a vécu l’abominable – mais surtout de tout ce qui pourrait retarder notre rémission. Même si nous espérions cette libération, nous étions trop effrayés pour la provoquer. Les menaces étaient telles… Mais il a bien fallu que l’un de nous se lance. <br></p><p>Comme l'avait fait ma sœur aînée, J. en 2010 alors que nous vivions encore dans notre taudis texan où chaque armoire, chaque pièce, même le frigo étaient cadenassés et où les fenêtres étaient condamnées par des planches de bois. En fait non, je me souviens maintenant, nous ne vivions plus dans cette maison. Elle était devenue si puante que nos parents avaient acheté un camping-car qu'ils avaient planté sur le terrain, à l'arrière de la maison, à l'abri des regards. J’avais alors 9 ans. <br></p><p>Oui, <strike>Jennifer</strike>, – je n’ai rien dit, j’ai effacé – J. s’était lancée: elle avait fui. Seulement, notre voisine avait tout fait capoter en lui posant des questions impossibles: sur son âge (21 ans mais comment, en voyant cette enfant décharnée, aurait-elle pu la croire?) et sur le nom de notre président (J. – nous l’avons appris entretemps – aurait dû répondre «Obama» mais elle comme nous ignorions ce nom). Du coup, la voisine – elle s’en veut aujourd’hui, et nous lui en voulons aussi, même si c’est mal mais c’est ainsi – l’avait reconduite à la maison pensant sans doute que cette enfant était dérangée. Un douloureux épisode qui a provoqué l’immédiate décision de nos parents de déménager dans un autre Etat par crainte des services sociaux, abandonnant sur place nos deux chihuahuas, un chat ou deux ou trois (retrouvés morts) et prolongé notre calvaire de huit ans. 3000 jours environ. Dieu que c’est long.</p><h3>L'implacable décision<br></h3><p>Voilà, je m’en souviens maintenant! Je me rappelle comment j’ai su quel numéro composer: c’est J. ma sœur aînée qui nous l’a fait mémoriser. Ce 911 qu’elle avait appelé de ses vœux avec tant d’insistance lors de sa fuite texane, suppliant la voisine d’alerter la police pour nous sauver.</p><p>Alors à mon tour, l’autre jour, j’ai osé, osé surmonter ma peur. Avec l’une de mes sœurs, J., mais elle, contrairement à moi, a rebroussé chemin, tant elle était effrayée. Tout le monde, partout, dans les médias, dans le milieu médical, s’est dit depuis impressionné par mon courage. C’est vrai, il m’en a fallu. Car j’étais terrifiée. Je savais que David et Louise me tueraient – me tueraient pour de vrai – si ma tentative échouait.</p><p>Mais cette émotion au regard de l’angoisse dont j’ignorais jusqu’au nom qui m’a accompagnée depuis dix-sept ans (vous ai-je dit que j’avais 17 ans?) m’a permis d’aller au-delà de moi-même. Cet au-delà qui a surgi le jour où j’ai accepté de prendre cette implacable décision. Jusque là, je peux l’avouer aujourd’hui, je n’étais personne. Juste l’un des 12 zombies (j’excepte J., la petite) de Perris, Californie.</p><p>De ma chambre d’hôpital, je n’ai accès à aucune information qui pourrait perturber encore davantage la victime – l’héroïne, insistent-ils – que je suis.</p><p>Cependant. J’ai appris à m’informer. Appris à feindre, à contourner. Je n’ai pas d’avis sur ce qui suit, car pour avoir un avis il faut avoir vécu ce qui n’est pas (encore) mon cas, mais je sais ceci.</p><h3>Un amour d'enlèvement</h3><p>Mes parents, lorsqu’ils étaient enfants puis adolescents, comme nous le sommes aujourd’hui, vivaient tous deux en Virginie occidentale. A Princeton très exactement. Une grande ville, paraît-il, située à 4000 kilomètres de notre enfer de Perris.<br></p><h4><img class="img-responsive " src="https://media.bonpourlatete.com/default/w800/1517590693_turpin1979.png" style="width: 336px; height: 377px;">Mon père, David Allen Turpin, âgé de 18 ans en 1979. <br></h4><p>Leur histoire a commencé (je viens de l’apprendre mais elle n’étonne aucun de nous) par un enlèvement. Mon père, universitaire alors âgé de 23 ans,<em></em> a persuadé un jour de l’an 1984 les employés de l'école de Princeton de le laisser emmener Louise de 9 ans sa cadette, en 10<sup>e</sup> primaire. Direction le Texas. Ma mère était mineure. Rendez-vous compte, elle avait deux ans de moins que je n’ai maintenant! Vous ai-je dit que j’avais 17 ans? Leur fuite n’a pas duré. Sommés de revenir en Virgine occidentale, en raison des réticences, immenses, de mon grand-père maternel Allen quant à leur relation et grâce à la complicité de ma grand-mère Phyllis (paix ait leurs âmes, eux qui n’ont jamais plus été autorisés à nous rendre visite et à nous parler), mes parents ont finalement réussi à se marier le 11 février 1985, il y a exactement, jour pour jour, trente-trois ans. L’âge de la mort du Christ. <br></p><p>Peut-on renoncer à être croyant? <br></p><h4><img class="img-responsive " src="https://media.bonpourlatete.com/default/w600/1517590753_turpinimage.jpg" style="width: 329px; height: 480px;">Mes parents lors de leur mariage en 1985 en Virginie. <br>Mon père avait 24 ans, ma mère 16 ans.<br></h4><h3>Leur union<br></h3><p>A Pearisburg (VA), le pasteur Lee O. Ellison, toujours en fonction aujourd'hui, a uni ce jour-là David Allen Turpin, 24 ans, amateur d’échecs et rêvant, un peu tard, de devenir l’Edison du 19<sup>e</sup> siècle, et Louise Ann Robinette, jeune femme de 16 ans abusée durant son enfance, comme ma tante Elizabeth (je n’étais pas née lors de sa dernière visite chez nous en 1999) et ses cousines, par un «très proche» de la famille. Etait-ce mon grand-père? Celui que je n'ai plus jamais vu? Celui qui pose sur cette photo? Non, si j'en crois ce que la rumeur répand, c'était bien mon arrière grand-père qui abusait de toute la famille, de ma grand-mère Phyllis que l'on voit aussi sur cette photo, de ses petites-filles parmi lesquelles Louise. Louise qui était aussi le prénom de mon arrière grand-maman. <br></p><h4><img class="img-responsive " src="https://media.bonpourlatete.com/default/w634/1517620925_elizabethlouiseteresa.jpg" width="375" height="457">Ma tante Teresa, ma mère, ma grand-mère Phyllis, ma tante <br>Elizabeth et mon grand-père Allen.<br></h4><p>Je ne peux rien affirmer. Mais ce que je sais en revanche, c'est que ma mère, à son mariage, n’avait pas encore atteint l’âge que j’ai maintenant. Elle avait moins de 17 ans. <br></p><h4><img class="img-responsive " src="https://media.bonpourlatete.com/default/w800/1517590550_turpinmariageacte.jpg" width="928" height="876">L'acte de mariage de mes parents.<br></h4><p>Peu après leur union en Virginie occidentale, David et Louise sont retournés au Texas, là où ils avaient fui un an plus tôt. D’abord à Benbrook, à 70 kilomètres de Dallas, puis à Forth Worth, non loin du ranch des apparemment célèbres Ewing. Leur premier enfant, J., mon aînée, est née en 1988, quatre ans après leur mariage. Elle a neuf ans de moins que notre tante Elizabeth. Durant ses premières années, J. était une enfant comme les autres. Ça n’a pas duré.</p><h4><img class="img-responsive " src="https://media.bonpourlatete.com/default/w800/1517591062_elizabethaineeteresa.jpg" width="438" height="492">Ma mère Louise avec sa sœur Elizabeth et J. sa première fille en 1989, <br>sans doute lors des 1 an de l'aînée de notre fratrie.<br></h4><p>Car la famille s’est agrandie et les bébés se sont succédé. «C'est Dieu qui l'a voulu», s'est défendue Louise au tribunal. J. (1992), J. (1993), J. (1995), J. (1997), J.(1998), J. (1999), puis moi en 2001. Arrivèrent ensuite J. (2003), J. (2004), J. (2006), J. (2007) et J. (2015). Mes souvenirs, flous, me laissent croire que les premiers temps à Rio Vista se sont plutôt bien déroulés. Nous avions même trois petits cochons à la maison. C’est surtout depuis 2010, depuis l'évasion tentée par J., (le bébé sur la photo) que tout s’est dégradé. Des punitions, déjà lourdes, nos parents sont passés à la torture. Attaches, violences, étranglements, privations. </p><h3>Le début après la fin<br></h3><p>C'est tout. Je n’ai plus envie de dire. Mes frères et sœurs sont en vie. Je le suis aussi. Nous avons de la chance: entre 4 et 7 enfants meurent chaque jour ici, aux Etats-Unis, des suites d'abus et de négligence. Je ne sais pas ce qu’il adviendra de nous. Si nous serons adoptés, placés. Ensemble, comme nos chiennes, ou séparément. Mais là, permettez-moi de ne plus parler. <br></p><p>Ni de L. ni de D. <br></p><p>Ni de Jennifer, Joshua, Jessica, Johanthon, Joy, Julianne, Jeanetta, James, Joanna, Jolinda, Julissa et Janna. Ni de moi.</p><p>J'ai froid.<br></p><p>Jordan<br></p><p></p><hr><p></p><h2>Précédemment dans Bon pour la tête</h2><p><a href="https://bonpourlatete.com/actuel/david-et-louise-turpin-voulaient-encore-des-enfants">«David et Louise Turpin voulaient d'autres enfants»</a>, par Florence Perret</p>', 'content_edition' => null, 'slug' => 'moi-j-17ans-zombie-de-Perris', 'headline' => false, 'homepage' => 'col-md-12', 'like' => (int) 1320, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 800, 'homepage_order' => (int) 960, 'original_url' => null, 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 5, 'person_id' => (int) 3, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [ [maximum depth reached] ], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' } ] $embeds = [] $images = [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) { 'id' => (int) 3163, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'margot-new.jpg', 'type' => 'image', 'subtype' => 'jpeg', 'size' => (int) 66788, 'md5' => '76cb0fae98dc23515ffcfac4758ed180', 'width' => (int) 695, 'height' => (int) 545, 'date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'title' => null, 'description' => 'Portrait de Pierre Margot, l'expert, réalisé avec des empreintes digitales par l'artiste new-yorkaise Jennifer Hannaford.<br>', 'author' => null, 'copyright' => '© République du canton du Jura', 'path' => '1519661595_margotnew.jpg', 'embed' => null, 'profile' => 'default', '_joinData' => object(Cake\ORM\Entity) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Attachments' } ] $audios = [] $comments = [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Comment) { 'id' => (int) 501, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'status' => 'ACCEPTED', 'comment' => 'Pierre Margot avait raison : on ne saura probablement jamais la vérité . 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VOS RÉACTIONS SUR LE SUJET
1 Commentaire
@schindma37 28.02.2018 | 15h22
«Pierre Margot avait raison : on ne saura probablement jamais la vérité . Les os retrouvés sont ceux d'un animal. Beaucoup de bruit médiatique pour rien !»