Chronique / Dino Buzzati nous éclaire par son inquiète étrangeté
© 2019 Bon pour la tête / Matthias Rihs
Un recueil de «Nouvelles inquiètes» s’ajoute aux multiples publications qui ont marqué le centenaire de la naissance du grand conteur italien (1906-1972), rassemblant les brèves et fascinantes histoires qu'il publiait dans le «Corriere della sera». Tout le contraire de «fake news» loufoques ou gratuites: autant de vérités profondes dégagées des faits divers ou des multiples aspects de la vie ordinaire...
Notice (8): Trying to access array offset on value of type null [APP/Template/Posts/view.ctp, line 123]Code Context<div class="post__article">
<? if ($post->free || $connected['active'] || $crawler || defined('IP_MATCH') || ($this->request->getParam('prefix') == 'smd')): ?>
<?= $post->content ?>
$viewFile = '/data01/sites/bonpourlatete.com/dev/bonpourlatete.com/src/Template/Posts/view.ctp' $dataForView = [ 'referer' => 'https://dev.bonpourlatete.com/like/1547', 'OneSignal' => '8a2ea76e-2c65-48ce-92e5-098c4cb86093', '_serialize' => [ (int) 0 => 'post' ], 'post' => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 1547, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => false, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => 'NORMAL', 'readed' => null, 'subhead' => 'La chronique de JLK', 'title' => 'Dino Buzzati nous éclaire par son inquiète étrangeté ', 'subtitle' => 'Un recueil de «Nouvelles inquiètes» s’ajoute aux multiples publications qui ont marqué le centenaire de la naissance du grand conteur italien (1906-1972), rassemblant les brèves et fascinantes histoires qu'il publiait dans le «Corriere della sera». Tout le contraire de «fake news» loufoques ou gratuites: autant de vérités profondes dégagées des faits divers ou des multiples aspects de la vie ordinaire... ', 'subtitle_edition' => null, 'content' => '<p> C’est l’histoire d’un type qui vient de commettre, avec un compère, un rapt d’enfant qui va lui rapporter un pactole, et qui se met soudain à paniquer devant le mioche. Celui-ci, quatre ans, s’est laissé cueillir comme une fleur à l’insu de sa nurse, et ensuite s’est montré aussi gentil que ses ravisseurs, lesquels ont laissé un message à côté du toboggan, sur la place de jeux, précisant le montant de la rançon: 50 millions de francs, et gare si le père alerte la police! </p><p>Comme ledit paternel est richissime et décidé à ne prendre aucun risque, et que les malandrins ont su gagner la confiance du petiot en le gavant de friandises devant la télé allumée, tout devrait bien se passer, mais voici qu’une sainte terreur envahit peu à peu l’un des malfrats. </p><p>Peur à l’idée que la France en alerte soit à l’instant sur les dents? Pas du tout. «Si devant moi avait surgi un policier, deux policiers, cent, les agents de la police entière, en ordre de bataille, pistolet au poing prêts à tirer; s’il y avait eu le chef de la police, le ministre de l’Intérieur, le procureur général, je ne me serais pas senti aussi mal», avoue le kidnappeur en considérant le petit Eric endormi: «Un petit corps tendre et fragile, semblable à ce que j’avais d’ailleurs été, moi aussi, autrefois». </p><p>Et la peur de l'étreindre de plus en plus: «C’était un enfant, une créature stupide et innocente, et il ne savait rien de nous, il n’avait rien compris, et il n’avait pas peur. Pourtant je ne pouvais pas le supporter. Il était petit, mais minute après minute il grandissait démesurément, il n’y avait plus un coin de la maison qui ne fût pas empli de sa présence. Oui, de toutes mes forces je le haïssais»… </p><p>Au moment où Dino Buzzati rédigeait cette nouvelle inspirée par l’enlèvement du petit Eric Peugeot, en avril 1960, il savait déjà que le gosse avait été relâché par les deux truands qui l’avaient séquestré deux jours durant, désormais impatients, la rançon en poche, de mener grande vie ni vus ni connus – ils ne seraient arrêtés et jugés qu’une année plus tard... </p><p>Or, on aura compris que ce n’est pas le fait divers et son issue qui l’intéressait, mais, bien moins paradoxale qu’on ne pourrait l’imaginer: la terrifiante pétoche du «dur à cuire» qui se croyait «blindé» et qui avait beau se dire que le rapt, techniquement, avait été «un triomphe sur toute la ligne», sans parvenir pour autant à surmonter sa terreur: «Je ne suis pas expert en enfants», se disait-il ainsi, «je n’en ai jamais fréquenté, je ne pouvais pas supposer qu’ils représentaient un tel danger». Et de conclure tout misérable: «Depuis que cette maudite affaire a eu lieu, dans la rue tous les enfants me regardent. Avec une espèce de curiosité préoccupée – comment dire, comme si j’étais l’un d’entre eux et que je les avais trahis de manière ignoble. Quelles bêtises! Un type dégourdi comme moi s’arrêter à de telles pensées! Quoi qu’il en soit le phénomène persiste; même hier, même ce matin. Dans la rue, tous les enfants, je dis bien tous. Pourquoi me regardent-ils?» </p><h3><strong>Un regard décalé, souvent révélateur </strong></h3><p>Tout empreint de cette tendre malice humoristique marquant le regard de Dino Buzzati sur notre drôle d’espèce, <em>Le kidnappeur </em>est l’une des cinquante <em>Nouvelles inquiètes</em> réunies dans ce recueil, initialement publiées dans le journal auquel collaborait le journaliste-écrivain, à savoir le <em>Corriere della sera,</em> fameux quotidien milanais dans lequel Buzzati était entré en 1928, et le <em>Corriere d’informazione</em> constituant l’édition de l’après-midi du précédent. </p><p>Plus précisément, ces textes brefs à caractère littéraire, quoique souvent sans apprêts, paraissaient sous la forme de l’<em>elzeviro</em>, terme italien désignant des écrits (essais, critiques, réflexions, récits) publiés sur la première page culturelle du quotidien, sous la signature d’écrivains reconnus. Provenant d’une anthologie en deux volumes parue en 2003 sous le titre de <em>Cronache fantastiche,</em> le présent recueil, traduit et présenté par Delphine Gachet – dont il faut saluer le travail accompli pour la défense et l’illustration de Buzzati, notamment avec trois volumes de la collection Bouquins – tire précisément son intérêt, et son charme ou son mordant «sur le vif», de la contrainte de l’<em>elzeviro</em>, forçant l’auteur à la concision et à la limpidité. </p><p>Cependant, l’auteur du <em>Désert des Tartares </em>n’en est pas moins là avec son art proche de la fable ou du conte fantastique, et ceci dès <em>Le dernier combat,</em> où l’on voit certaine ombre noire «venue du fond des âges» se pointer au chevet d’un très vieux général à peu près moribond («comme une misérable petite araignée, une fiole fragile, une dentelle d’os minuscules») mais pas du tout décidé à rendre les armes… </p><p>Plus saisissante encore: la deuxième nouvelle du recueil développe le thème du Mal <em>à l’envers,</em> si l’on ose dire, puisqu’elle évoque la décision du Démon de faire la <em>Grève du mal</em>, titre de la nouvelle, pour s’opposer aux actions menés par le gouvernement contre les crimes, l’immoralité, les vices divers et les maladies. </p><p>Et que se passerait-il donc, nous demande incidemment Buzzati, si les hôpitaux, les médecins et les pharmaciens, les policiers et les juges se trouvaient soudain, demain, privés de leur clientèle? On imagine l’ennui que signifierait une vie sans vices ni crimes, frissons ni peurs! Une vie sans mort pour lui donner du sel? Quelle barbe! </p><h3><strong>Un conteur plus «pascalien» que «kafkaïen»… </strong></h3><p>Il y a du moraliste et du visionnaire chez Buzzati, dont l’imagination et l’art du conte plonge dans la tradition populaire des légendes et autres «menteries». Jeune reporter chargé de documenter la construction du métro de Milan, il en a tiré les affabulations futuristes de son<em> Voyage aux enfers du XX<sup>e</sup> siècle,</em> ou voici que telle observation, combien actuelle d’ailleurs, portée sur le rejet des «seniors», lui inspire sa mémorable <em>Chasse aux vieux…</em> </p><p>On a comparé, parfois, l’univers de Buzzati à celui de Kafka, mais le rapprochement, justifié à certains égards, ne l’est pas vraiment en profondeur, tant le fonds de culture des deux auteurs diffère. En revanche il me semble que Michel Suffran, biographe et commentateur très éclairé de cette œuvre parfois snobée par la critique ou l'Université, mais aussi populaire que celle d'un Marcel Aymé, et toujours à redécouvrir, composite voire inégale mais tenue ensemble par une vision centrale à caractère métaphysique plus que philosophique ou religieux, a raison de parler du ton «pascalien» de Dino Buzzati, conscient de l’extrême précarité de nos vies «entre deux infinis», et sondant le Mystère de l'existence avec la perplexité de son chien regardant Dieu ou d’un enfant se demandant si le soleil avalé ce soir par le lac va revenir demain par la fenêtre...</p><p></p><hr><p></p><p><br><img class="img-responsive " src="https://media.bonpourlatete.com/default/w175/1551285040_images.jpg"></p><h4>Dino Buzzati. <em style="">Nouvelles inquiètes.</em> Traduit de l’italien par Delphine Gachet. Laffont, coll. Pavillons poche, 453p. </h4>', 'content_edition' => null, 'slug' => 'les-contes-magiques-de-buzzati-sont-nourris-de-faits-quotidiens', 'headline' => false, 'homepage' => 'col-md-6', 'like' => (int) 586, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1565, 'homepage_order' => (int) 1832, 'original_url' => null, 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 3, 'person_id' => (int) 94, 'post_type_id' => (int) 1, 'poster_attachment' => null, 'editions' => [[maximum depth reached]], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'attachments' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'comments' => [ [maximum depth reached] ], 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, 'relatives' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Post) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Post) {}, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Post) {}, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Post) {} ], 'embeds' => [], 'images' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'audios' => [], 'comments' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Comment) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Comment) {} ], 'author' => 'JL K', 'description' => 'Un recueil de «Nouvelles inquiètes» s’ajoute aux multiples publications qui ont marqué le centenaire de la naissance du grand conteur italien (1906-1972), rassemblant les brèves et fascinantes histoires qu'il publiait dans le «Corriere della sera». Tout le contraire de «fake news» loufoques ou gratuites: autant de vérités profondes dégagées des faits divers ou des multiples aspects de la vie ordinaire... ', 'title' => 'Dino Buzzati nous éclaire par son inquiète étrangeté ', 'crawler' => true, 'connected' => null, 'menu_blocks' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Block) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Block) {} ], 'menu' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 4 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 5 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 6 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 7 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 8 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 9 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 10 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 11 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 12 => object(App\Model\Entity\Category) {} ] ] $bufferLevel = (int) 1 $referer = 'https://dev.bonpourlatete.com/like/1547' $OneSignal = '8a2ea76e-2c65-48ce-92e5-098c4cb86093' $_serialize = [ (int) 0 => 'post' ] $post = object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 1547, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => false, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => 'NORMAL', 'readed' => null, 'subhead' => 'La chronique de JLK', 'title' => 'Dino Buzzati nous éclaire par son inquiète étrangeté ', 'subtitle' => 'Un recueil de «Nouvelles inquiètes» s’ajoute aux multiples publications qui ont marqué le centenaire de la naissance du grand conteur italien (1906-1972), rassemblant les brèves et fascinantes histoires qu'il publiait dans le «Corriere della sera». Tout le contraire de «fake news» loufoques ou gratuites: autant de vérités profondes dégagées des faits divers ou des multiples aspects de la vie ordinaire... ', 'subtitle_edition' => null, 'content' => '<p> C’est l’histoire d’un type qui vient de commettre, avec un compère, un rapt d’enfant qui va lui rapporter un pactole, et qui se met soudain à paniquer devant le mioche. Celui-ci, quatre ans, s’est laissé cueillir comme une fleur à l’insu de sa nurse, et ensuite s’est montré aussi gentil que ses ravisseurs, lesquels ont laissé un message à côté du toboggan, sur la place de jeux, précisant le montant de la rançon: 50 millions de francs, et gare si le père alerte la police! </p><p>Comme ledit paternel est richissime et décidé à ne prendre aucun risque, et que les malandrins ont su gagner la confiance du petiot en le gavant de friandises devant la télé allumée, tout devrait bien se passer, mais voici qu’une sainte terreur envahit peu à peu l’un des malfrats. </p><p>Peur à l’idée que la France en alerte soit à l’instant sur les dents? Pas du tout. «Si devant moi avait surgi un policier, deux policiers, cent, les agents de la police entière, en ordre de bataille, pistolet au poing prêts à tirer; s’il y avait eu le chef de la police, le ministre de l’Intérieur, le procureur général, je ne me serais pas senti aussi mal», avoue le kidnappeur en considérant le petit Eric endormi: «Un petit corps tendre et fragile, semblable à ce que j’avais d’ailleurs été, moi aussi, autrefois». </p><p>Et la peur de l'étreindre de plus en plus: «C’était un enfant, une créature stupide et innocente, et il ne savait rien de nous, il n’avait rien compris, et il n’avait pas peur. Pourtant je ne pouvais pas le supporter. Il était petit, mais minute après minute il grandissait démesurément, il n’y avait plus un coin de la maison qui ne fût pas empli de sa présence. Oui, de toutes mes forces je le haïssais»… </p><p>Au moment où Dino Buzzati rédigeait cette nouvelle inspirée par l’enlèvement du petit Eric Peugeot, en avril 1960, il savait déjà que le gosse avait été relâché par les deux truands qui l’avaient séquestré deux jours durant, désormais impatients, la rançon en poche, de mener grande vie ni vus ni connus – ils ne seraient arrêtés et jugés qu’une année plus tard... </p><p>Or, on aura compris que ce n’est pas le fait divers et son issue qui l’intéressait, mais, bien moins paradoxale qu’on ne pourrait l’imaginer: la terrifiante pétoche du «dur à cuire» qui se croyait «blindé» et qui avait beau se dire que le rapt, techniquement, avait été «un triomphe sur toute la ligne», sans parvenir pour autant à surmonter sa terreur: «Je ne suis pas expert en enfants», se disait-il ainsi, «je n’en ai jamais fréquenté, je ne pouvais pas supposer qu’ils représentaient un tel danger». Et de conclure tout misérable: «Depuis que cette maudite affaire a eu lieu, dans la rue tous les enfants me regardent. Avec une espèce de curiosité préoccupée – comment dire, comme si j’étais l’un d’entre eux et que je les avais trahis de manière ignoble. Quelles bêtises! Un type dégourdi comme moi s’arrêter à de telles pensées! Quoi qu’il en soit le phénomène persiste; même hier, même ce matin. Dans la rue, tous les enfants, je dis bien tous. Pourquoi me regardent-ils?» </p><h3><strong>Un regard décalé, souvent révélateur </strong></h3><p>Tout empreint de cette tendre malice humoristique marquant le regard de Dino Buzzati sur notre drôle d’espèce, <em>Le kidnappeur </em>est l’une des cinquante <em>Nouvelles inquiètes</em> réunies dans ce recueil, initialement publiées dans le journal auquel collaborait le journaliste-écrivain, à savoir le <em>Corriere della sera,</em> fameux quotidien milanais dans lequel Buzzati était entré en 1928, et le <em>Corriere d’informazione</em> constituant l’édition de l’après-midi du précédent. </p><p>Plus précisément, ces textes brefs à caractère littéraire, quoique souvent sans apprêts, paraissaient sous la forme de l’<em>elzeviro</em>, terme italien désignant des écrits (essais, critiques, réflexions, récits) publiés sur la première page culturelle du quotidien, sous la signature d’écrivains reconnus. Provenant d’une anthologie en deux volumes parue en 2003 sous le titre de <em>Cronache fantastiche,</em> le présent recueil, traduit et présenté par Delphine Gachet – dont il faut saluer le travail accompli pour la défense et l’illustration de Buzzati, notamment avec trois volumes de la collection Bouquins – tire précisément son intérêt, et son charme ou son mordant «sur le vif», de la contrainte de l’<em>elzeviro</em>, forçant l’auteur à la concision et à la limpidité. </p><p>Cependant, l’auteur du <em>Désert des Tartares </em>n’en est pas moins là avec son art proche de la fable ou du conte fantastique, et ceci dès <em>Le dernier combat,</em> où l’on voit certaine ombre noire «venue du fond des âges» se pointer au chevet d’un très vieux général à peu près moribond («comme une misérable petite araignée, une fiole fragile, une dentelle d’os minuscules») mais pas du tout décidé à rendre les armes… </p><p>Plus saisissante encore: la deuxième nouvelle du recueil développe le thème du Mal <em>à l’envers,</em> si l’on ose dire, puisqu’elle évoque la décision du Démon de faire la <em>Grève du mal</em>, titre de la nouvelle, pour s’opposer aux actions menés par le gouvernement contre les crimes, l’immoralité, les vices divers et les maladies. </p><p>Et que se passerait-il donc, nous demande incidemment Buzzati, si les hôpitaux, les médecins et les pharmaciens, les policiers et les juges se trouvaient soudain, demain, privés de leur clientèle? On imagine l’ennui que signifierait une vie sans vices ni crimes, frissons ni peurs! Une vie sans mort pour lui donner du sel? Quelle barbe! </p><h3><strong>Un conteur plus «pascalien» que «kafkaïen»… </strong></h3><p>Il y a du moraliste et du visionnaire chez Buzzati, dont l’imagination et l’art du conte plonge dans la tradition populaire des légendes et autres «menteries». Jeune reporter chargé de documenter la construction du métro de Milan, il en a tiré les affabulations futuristes de son<em> Voyage aux enfers du XX<sup>e</sup> siècle,</em> ou voici que telle observation, combien actuelle d’ailleurs, portée sur le rejet des «seniors», lui inspire sa mémorable <em>Chasse aux vieux…</em> </p><p>On a comparé, parfois, l’univers de Buzzati à celui de Kafka, mais le rapprochement, justifié à certains égards, ne l’est pas vraiment en profondeur, tant le fonds de culture des deux auteurs diffère. En revanche il me semble que Michel Suffran, biographe et commentateur très éclairé de cette œuvre parfois snobée par la critique ou l'Université, mais aussi populaire que celle d'un Marcel Aymé, et toujours à redécouvrir, composite voire inégale mais tenue ensemble par une vision centrale à caractère métaphysique plus que philosophique ou religieux, a raison de parler du ton «pascalien» de Dino Buzzati, conscient de l’extrême précarité de nos vies «entre deux infinis», et sondant le Mystère de l'existence avec la perplexité de son chien regardant Dieu ou d’un enfant se demandant si le soleil avalé ce soir par le lac va revenir demain par la fenêtre...</p><p></p><hr><p></p><p><br><img class="img-responsive " src="https://media.bonpourlatete.com/default/w175/1551285040_images.jpg"></p><h4>Dino Buzzati. <em style="">Nouvelles inquiètes.</em> Traduit de l’italien par Delphine Gachet. Laffont, coll. Pavillons poche, 453p. </h4>', 'content_edition' => null, 'slug' => 'les-contes-magiques-de-buzzati-sont-nourris-de-faits-quotidiens', 'headline' => false, 'homepage' => 'col-md-6', 'like' => (int) 586, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1565, 'homepage_order' => (int) 1832, 'original_url' => null, 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 3, 'person_id' => (int) 94, 'post_type_id' => (int) 1, 'poster_attachment' => null, 'editions' => [], 'tags' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Tag) {} ], 'locations' => [], 'attachment_images' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'attachments' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'comments' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Comment) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Comment) {} ], 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ '*' => true, 'id' => false ], '[dirty]' => [], '[original]' => [], '[virtual]' => [], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [], '[invalid]' => [], '[repository]' => 'Posts' } $relatives = [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 2406, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => false, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => 'NORMAL', 'readed' => null, 'subhead' => 'La chronique de JLK', 'title' => 'Du bonheur d’être bien vivant sur le chemin de n’importe où...', 'subtitle' => ' À trente ans pile, sur les traces de Nicolas Bouvier auquel il rend un hommage explicite, Guillaume Gagnière signe son premier livre aux touches fines et justes, intitulé Les Toupies d’Indigo Street et retraçant un périple à valeur d’initiation parfois rude, entre Ceylan et l’île japonaise de Shikoku aux 88 temples. De quoi se libérer un instant du poids du monde… ', 'subtitle_edition' => null, 'content' => '<p>Il faisait l’autre matin un temps à se pendre et je trouvais le monde affreux, infâme le Président américain brandisant sa Bible comme une arme et méprisable la meute de ses larbins racistes; et j’avais beau savoir, le vivant tous les jours, que ce quart d’heure de noir absolu se dissiperait comme un brouillard dès que je me remettrais en chemin en souriant à mon ange gardien: l’image de ce pauvre George Floyd qu’un imbécile de flic haineux avait empêché de respirer m’accablait de tout le poids du monde quand une autre image de rien du tout, surgie d’un fin petit livre que je venais de traverser comme sur des pattes de colombe, m’est revenue et avec elle le chant du monde, l’image heureuse recyclée par un jeune homme de trente ans pile, du poète japonais de l’époque de Girolamo Frescobaldi, au nom de Bashô (1644-1694) et qui avait peint cet haïku sur le ciel de soie: «À un piment, ajoutez des ailes: une libellule rouge»…</p> <h4><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1591882396_103195206_10223709763158946_742325142093952186_o.jpeg" class="img-responsive img-fluid normal " /></h4> <h4>Guillaume Gagnière et son bâton de pèlerin sur l’ile de Shikoku. © DR </h4> <h3><strong>Un poème itinérant qui n’exclut ni cloques ni claques</strong></h3> <p>Un an après une année d’errance, Guillaume Gagnière accomplit à peu près le même travail d’orfèvre que celui de Nicolas Bouvier ciselant les phrases du <em>Poisson-scorpion, </em>au fil d’un récit visant à la simplicité et au naturel, jamais trop visiblement «voulu poétique», bien incarné mais sans graisse, qui rend scrupuleusement les changements de relief et de couleurs du décor évoqué par Bouvier avec les détails propres aux virée de sa génération, la troisième ou la quatrième après Blaise Cendrars et Charles-Albert Cingria, les périples d’Ella Maillart et des compères Bouvier et Vernet, le «trip» des routards partis pour Katmandou et plus ou moins échoués à Goa dont Lorenzo Pestelli, dans <em>Le Long été</em>, a laissé la trace la plus scintillante quant au verbe et la plus désenchantée quant à l’esprit, et jusqu’aux <em>backpackers </em>actuels. Ainsi, dans la foulée proche d’une Aude Seigne (née en 1985) et de ses <em>Chroniques d’un Occident nomade</em>, Guillaume Gagnière trouve-t-il aussitôt son ton, pimenté d’humour, et son rythme allant, ses formules propres et la juste distance d’une écriture ni jetée comme dans un carnet de notes brutes ni trop fioriturée.</p> <p>Cela commence par un <em>Soliloque du corps </em>marqué par une première crise d’urticaire, entre la Malaisie et la Thaïlande, et qui subira plus tard force cloques et autres claquages de muscles, jusqu’à «une sorte de lupus» au fil de marches de plus de mille kilomètres, sans parler d’un épisode de pénible yoga soumis aux contorsions du caméléon écartelé ou du chameau asthmatique, entre autres coups de blues et de déprimes qui rappellent aussi celles du cher Nicolas à Ceylan… Cependant le corps exultera aussi en sa juvénile ardeur, de parties de surf en étreintes passagères, etc.</p> <h3><strong>Le cycle bouddhiste du pèlerinage, avec un grain de sel…</strong></h3> <p>Sans la candeur plus ou moins naïve, voire parfois jobarde, des routards des années 60-70 découvrant les spiritualités orientales, le pèlerin Guillaume, après s’être efforcé de ne penser à rien dans un centre de méditation thaïlandais proche de Chiang Mai (épisode comique finissant par « ça me gratte, qu’est-ce que c’est… un moustique, merde, concentre-toi, NE PENSEPAS! (…) Oh, une mésange !»), s’impose bel et bien les rigueurs de la longue marche japonaise, qu’il distingue clairement des chemins de Compostelle: «Dans le bouddhisme, le nirvana n’est pas l’équivalent de notre paradis: c’est le grand rien, la fin de tout désir. Le circuit des 88 temples de Shikoku, un cercle, se distingue des pèlerinages chrétiens qui tracent une droite. On ne marche pas du point A au point B en remportant à l’arrivée un prix de tombola spirituelle, on parcourt un cycle, partant de A pour revenir à A, puis l’on remet son ticket en jeu, encore et encore, jusqu’à ce que le concept de but ou de récompense s’épuise de lui-même».</p> <p>Or son livre reproduit pour ainsi dire le même tracé cyclique partant de la rue Indigo sri lankaise évoquée par Nicolas Bouvier, pour y revenir, non sans une pointe de mélancolie («la rue du récit, <em>sa </em>rue a sombré», avec une affectueuse lettre posthume du jeune homme à son modèle tutélaire. Rien pour autant de platement imitatif dans le récit du trentenaire, dont la poésie et la plasticité ont leur propre fraîcheur. Comme Bashô et Bouvier dans leur voyages respectifs, il multiplie ainsi les brèves notations, mais dans son langage à lui: «C’est alors qu’apparaissent les nuages, de larges masses d’un jaune de mégot froid», ou ceci: «Le soir, plat de curry en solitaire sous la Grande Ourse, les étoiles scintillent dans la casserole»…</p> <p>Parvenant au dernier des 88 temples, enfin, c’est avec un éclat de rire final qu’il fait ce constat: «Deux mois d’efforts sur plus de mille kilomètres, et à l’arrivée, un sommet baignant dans une épaisse purée de pois», ajoutant en sage mal rasé et puant sûrement le bouc: «Serait-ce un peu ça, le but: s’effacer à tel point que la notion de mort en devient naturelle». Et pour dépasser toute morosité nihiliste: «Finalement c’est peut-être ça, le «secret»: des montées, des descentes, des remontées et tout en haut, un grand calme: l’ataraxie. J’avais presque oublié à quel point cela pouvait être simple et beau, d’être en vie»…</p> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1591882458_unknown5.jpeg" class="img-responsive img-fluid normal " width="250" height="361" /></p> <h4><strong>Guillaume Gagnière, <em>Les Toupies d’Indigo Street</em>, Editions d’autre part, 2020. 110p.</strong></h4> <p> </p>', 'content_edition' => null, 'slug' => 'du-bonheur-d-etre-bien-vivant-sur-le-chemin-de-n-importe-ou', 'headline' => false, 'homepage' => 'col-md-12', 'like' => (int) 600, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 2406, 'homepage_order' => (int) 2646, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 3, 'person_id' => (int) 94, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [[maximum depth reached]], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 2378, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => true, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => 'NORMAL', 'readed' => null, 'subhead' => 'La chronique de JLK', 'title' => 'Les passions de Gemma Salem faisaient la pige à la mort ', 'subtitle' => 'Décédée à Vienne le 20 mai dernier, l’auteure du Roman de Monsieur Bulgakov et de quatre livres évoquant (superbement) la figure de Thomas Bernhard, entre autres autofictions et pièces de théâtre, était le contraire d’un bas-bleu. Hommage reconnaissant à l'Amie et à l'Écrivain. ', 'subtitle_edition' => null, 'content' => '<p>C’est entendu: vous avez chialé un bon coup après vous être exclamé «non mais c’est pas vrai!», et quand vous avez compris que c’était vrai vous avez fait votre job de vivants qui est de se lamenter à la cantonade, saules pleureurs et pleureuse éplorées que vous êtes alors que déjà, là-bas, Gemma se rallumait une nouvelle clope dans son cimetière autrichien avant d’éclater de rire en s’imaginant, bande d’éclopés, ses fistons et leur smala, ses amis et autres ennemis, vos pauvres mines d’enterrement!</p> <p>Gemma Salem les pieds devant: non mais t’imagines! Bien plutôt, après le pied au cul de sa mère - elle l’avait écrit noir sur blanc -, cette dernière fois au derche de la mère du monde qui vous fauchera toutes et tous à la fin, ça aussi c’est écrit!</p> <p>Et c’est ça aussi qui nous reste: ce qui est écrit. Les écrits de Gemma Salem sont autant de défis à toutes les détresses, des écrits comme qui dirait «pour la vie», donc des écrits qui chialent comme vous et qui rient pour tous - des écrits comme dictés par la vie et qui survivront parce qu’ils sont plus que de simples «récits de vie»; des écrits qui ne sont pas que de plates copies de la vie mais qui ajoutent à celle-ci la valeur ajoutée de ce qu’on appelle l’Art avec une grande aile, ou la Littérature à crâne majuscule, ou la Poésie mais sans chichis - et surtout musique à l’appui: la poésie de Schubert qui écrivait spécialement pour cette cinglée de Gemma - croyait-elle dur comme fer -, la poésie de Beethoven et son grand mouvement de rumba, la poésie de ce cœur de chien de Boulgakov, la folle poésie décavée de Jean Rhys en ses propres Tropiques passionnels, la poésie martelante et martelée de TB alias Thomas Bernhard à jamais inatteignable et bien avant qu’il l’eut précédée par delà les eaux sombres. Thomas Bernhard mort? Et quoi encore!</p> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1590690767_100073417_10223531313497816_3498760490526441472_n.jpg" class="img-responsive img-fluid normal " /></p> <h3><strong>Au commencent était l’Artiste</strong></h3> <p>Gemma, qui n’était pas encore Gemma Salem l’écrivain (jamais je n’arriverai à la dire «écrivaine» ou «autrice»), m’est apparue à la toute fin d’une soirée dans un caveau lausannois enfumé qui symbolisait alors la bohème locale, à l’enseigne des Faux-Nez, et tout aussitôt j’ai pensé: Princesse persane, Reine sarrasine, Shéhérazade à Gauloises bleues - et c’était parti pour un bout de comédie avec l’Actrice, vu qu’à l’époque Gemma Salem se croyait faite pour le théâtre.</p> <p>Or notre première engueulade, avec Gemma championne du genre, remonte à cet instant où elle a senti, sans que je ne lui dise rien, que je ne croyais pas qu’elle fût le moins du monde actrice, convaincu qu’elle était trop elle-même pour incarner jamais un autre personnage sur une scène, et du coup elle m’en voulut à mort de le penser sans le dire vu qu’elle-même le sentait sans oser le reconnaître; et je ne fus guère surpris de la retrouver, plus tard, dans un autre rôle où elle pouvait incarner tous les personnages qui lui chantaient à sa guise, rien qu’avec une plume et du sang vif (du sang bleu s’il vous plaît) pour l’exprimer.</p> <p>Cependant l’essentiel demeurait: Gemma Salem l’écrivain avait remplacé l’actrice au pied levé et l’Artiste demeurait. Pas étonnant d’ailleurs que <em>L’Artiste</em> (La Table ronde, 1991 - prix Schiller) soit le titre d’un de ses livres. Mais plus que surprenant, réellement stupéfiante: l’immédiate puissance de l’écrivain, brassant une vie entière à pleines mains et en tirant un premier roman dense et vibrant d’émotion, formidablement vivant.</p> <h3><strong>Des passions vécues et sublimées par l’écriture</strong></h3> <p>L’histoire du <em>Roman de Monsieur Boulgakov (L’Âge d’Homme, 1982) </em>est celle d’une passion «incendiaire» autant qu’imaginaire. Une jeune comédienne aux origines panachées d’Orient pimenté et de Suisse confite, installée dans le Midi et languissant un peu d’accéder à la gloire tous azimuts, tombe soudain sur le <em>specimen </em>masculin de ses rêves: un écrivain russe fascinant mais rayé du nombre des vivants dans le crépuscule sanglant des années 30. Rencontre, donc, de type occulte…<br />La comédienne s’appelle Gemma Salem. L’auteur est Mikhaïl Afanassiévitch Boulgakov, auteur du <em>Maître et Marguerite</em>, des <em>Oeufs fatidiques, </em>du <em>Roman théâtral </em>et de <em>Cœur de chie</em>n, mais aussi des <em>Récits d’un jeune médecin </em>qui l’apparentent à un certain Anton Pavlovitch Tchekhov, future autre passion de Gemma.</p> <p>Or le coup de foudre de celle-ci pour Boulgakov est tel que, non contente de dévorer tous ses écrits traduits en quelques mois, elle en investit et réfracte l’univers à la façon de <em>Diablerie</em>- nouvelle du même Boulgakov -, poussant l’observation mimétique de la discordance entre réalité et fiction jusqu’à l’absurde hallucinant.<br />Plus précisément, Gemma Salem, dans <em>Le Roman de Monsieur Bulgakov, </em>reconstitue des lieux et fait parler des personnages de chair et de sang, fondant tout cela dans le mouvement d’un temps fuyant, à la fois tangible et impalpable.</p> <p>C’est ainsi que, dès les premières pages du roman, nous nous transportons, aux côtés du jeune Micha, alors toubib débutant, dans le Kiev de son enfance, et dès ce moment se remarque l’habileté avec laquelle Gemma Salem tire parti d’éléments empruntés aux œuvres de l’écrivain, pour donner au roman son climat, ses couleurs et sa vraisemblance, et cela sans qu’on n’ait jamais l’impression de subir une compilation non plus qu’un relevé de filature.<br />Ensuite nous suivrons Boulgakov à travers les années, des lendemains de la Révolution à la fin des années 30, au fil d’une production littéraire très étroitement surveillée dès ses débuts, à cause de sa liberté de ton et de sa propension satirique, complètement interdite de publication et de représentation au tournant de 1928 (quand bien même Staline avait vu et revu dix–sept fois la pièce intitulée <em>Les Journées des Tourbine</em>!) et que l’acharnement de sa dernière compagne – le très beau personnage de Lena – fera sortir des tiroirs d’infamie après la mort de l’écrivain.</p> <p>De ce dernier, <em>Le Roman de Monsieur Boulgakov </em>nous donne une image attachante et nuancée. En évitant les pièges de l’idéalisation ou du sentimentalisme, si fréquents dans le genre, Gemma Salem a recomposé le portrait d’un Monsieur très porté sur la vie et les femmes, capable d’autant d’amitié chaleureuse que d’intransigeance têtue, qui tenait par-dessus tout à préserver ses œuvres de toute compromission. Or, d’une certaine manière, et ce sera vrai de tous ses livres, l’écrivain brosse son propre portrait en travaillant à celui de son modèle.<br />J’ai parlé de mimétisme à propos de la relation de Gemma Salem avec Boulgakov, dont le sort de David poétique en butte à l’écrasant Goliath soviétique ne pouvait qu’émouvoir la jeune femme blessée par la vie et en bisbille déclarée avec les pesanteurs de la famille et de la société, et c’est le même type de rapport - maintes fois décrit par un René Girard dans ses analyses de la passion mimétique -, qu’elle établira avec Thomas Bernhard, jusqu’à une identification redoutable du fait que l’imprécateur autrichien restait, lui, bien vivant…</p> <h3><strong>Que l’acte artistique relève de la conversion</strong></h3> <p>Tous les livres de Gemma Salem, jusqu’aux plus agressifs ou acides, comme <em>Mes amis et autres ennemis </em>(Zulma, 1995) ou <em>La Rumba de Beethoven </em>(Pierre-Guillaume de Roux, 2019) sont des histoires d’amour relevant de l’exorcisme et qui disent à la fois les beautés de la vie (les enfants et les animaux, la musique et les sentiments délicats) et le mal de vivre, l’exécration du mensonge sentimental ou «romantique», le mépris qu’elle partageait avec Thomas Bernhard de tous les simulacres sociaux ou culturels qu’elle pointe notamment dans ses tableaux au vitriol d’une certaine Suisse hypocritement convenable, notamment dans <em>Les exilés de Khorramshahr </em>(La Table ronde, 1986) et dans <em>Bétulia </em>(Flammarion, 1987), où la rage tonique de sa deuxième flamme littéraire se fait déjà sentir, qui se développera plus librement dans sa fameuse <em>Lettre à l’hermite autrichien </em>(La Table ronde, 1989), relancée dans <em>Thomas Bernhard et les siens </em>(La Table ronde 1993) et jusque dans son dernier livre, sur le ton plus apaisé d’un bilan existentiel très émouvant où elle «prend sur elle», comme on dit, en se reprochant son terrifiant amour propre…</p> <p>Il y a, de fait, chez Gemma Salem, comme chez le grand emmerdeur autrichien, un personnage à la fois solaire et son double farouchement ombrageux, pas loin des possédé(e)s de Dostoïevski, qui se rend parfois la vie aussi impossible qu’à son entourage, mais que l’Art, une fois encore, délivre - cela même qu’entend René Girard une fois encore, dans <em>Mensonge romantique et vérité romanesque</em>.</p> <p>La figure de Thomas Bernhard, assis sur un banc les mains aux poche, l’air de nous dire qu’il n’en a rien à fiche, trône sur la couverture d’<em>Où sont ceux que ton cœur aime </em>(Arléa, 2019), mais TB n’est qu’un truchement: le médiateur par excellence que Gemma n’a jamais pu enlacer «pour de vrai», une figure de la pureté dans un monde avachi par le kitsch, un contempteur de toutes les illusions à bon marché mais qui nous fait un clin d’œil amical comme Gemma, fumant son dernier pétard sur sa tombe, nous en vrille un plein d’amour…</p> <hr /> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1590611352_100086091_10223508363404078_2347364566893068288_n.jpg" class="img-responsive img-fluid normal " width="257" height="257" /></p> <h4><em>Où sont ceux que ton coeur aime, </em>Gemma Salem. 88 pages. (Arléa Editions).</h4>', 'content_edition' => null, 'slug' => 'les-passions-de-gemma-salem-faisaient-la-pige-a-la-mort', 'headline' => false, 'homepage' => 'col-md-12', 'like' => (int) 544, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 2384, 'homepage_order' => (int) 2624, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 3, 'person_id' => (int) 94, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [[maximum depth reached]], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 2343, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => true, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => 'NORMAL', 'readed' => null, 'subhead' => 'La chronique de JL K', 'title' => 'Quand Léonard de Vinci luttait contre le virus du Mal… ', 'subtitle' => 'La fabuleuse biographie de Léonard de Vinci par Walter Isaacson, parue récemment en traduction à Lausanne, autant que les 151 épisodes de la série «culte» Le Mentaliste, apologie de l’intuition déductive d’un Gentil dans sa lutte contre le Méchant, auront égayé, non sans grand écart culturel, notre confinement jamais coupé du monde, avec un clin d’œil à la paysanne Rose de Pinsec incarnant le bon sens terrien… ', 'subtitle_edition' => null, 'content' => '<p>Quel rapport y a-t-il entre un certain Leonardo, bâtard notoire d’un notaire toscan au prénom de Piero et natif du bourg de Vinci, une paysanne de montagne râtelant le foin de son parchet sur les hauts du hameau valaisan de Pinsec, et le «mentaliste» californien Patrick Jane connu pour son sens de l’observation et sa mémoire exceptionnelle - quel rapport sinon la même touche d’humanité liant un génie «universel» et nos humbles et très diverses personnes plus ou moins talentueuses…</p> <p>Curieux de tout, doté d’une nature généreuse et d’un physique avenant de splendide athlète au charme délicat, très observateur dès son enfance et non moins impatient de tout apprendre et comprendre en autodidacte aussi fantaisiste à ses heures que rigoureux dans ses intuitions pré-scientifiques, Léonard de Vinci (1452-1516) développa les talents rares d’un artiste complet plus soucieux de perfection que de quantité (d’où le nombre relativement restreint de ses chefs-d’œuvre) et d’un «ingénieur» polyvalent, organisateur de fêtes folles et inventeur de machines de guerre ou d’instruments de musique, entre autres projets grandioses, comme cette ville idéale dont l’urbanisme permettrait de lutter contre les épidémies…</p> <p>Le portrait de l’homme que fut Léonard transparaît au fil des pages de la biographie de Walter Isaacson, notamment à partir des milliers de pages de notes et croquis de ses carnets révélant, malgré son peu de goût pour les aveux «intimes», un être à la fois puissant et hypersensible , voire mélancolique, parfois taraudé par ses démons et conscient du Mal inhérent à la condition humaine alors qu’il célébrait, en poète et en homme de bonne volonté, le Beau et le Bien.</p> <p>Sur près de 600 pages tassées et non moins captivantes, dont la traduction française – excusez du peu! - a paru à Lausanne à l’enseigne des Presses polytechniques et universitaires romandes, la biographie de Léonard de Vinci est le fruit d’un immense travail «collaboratif» en somme comparable à celui des artisans et artistes florentins du XVe siècle travaillant à de grands ouvrages communs tel le dôme de Florence. De fait, l’historien américain combine tous les apports de l’histoire de l’art et de la connaissance scientifique accumulés à travers les siècles par ses prédécesseurs, autant que ceux des techniques actuelles en matière de recherche, pour aboutir à un récit fluide et chatoyant, riche de détails autant que de synthèses, avec une touche tout à fait personnelle et un allant communicatif.</p> <p>Mais alors quoi de commun avec Rose de Pinsec et l’enquêteur «mentaliste» de la fameuse série? J’y viens!</p> <h3><strong>Quand Rose de Pinsec disait de la télé: «Pas besoin!»</strong></h3> <p>La télévision - fenêtre sur le monde ou fabrique d’abrutis -, comme l’ordinateur - merveilleux instrument de connaissance et de communication ou puits sans fond de l’imbécillité -, ne seront jamais que ce que chacune et chacun en fait, comme il en va de notre «gestion» du confinement.</p> <p>Avant l’apparition de l’ordinateur et du smartphone dans nos vies, en 1977, Rose Monnet, solide paysanne de Pinsec répondait au réalisateur de la télévision romande Jacques Thévoz qui lui demandait, dans un reportage documentaire mémorable, si elle envisageait elle-même d’installer un jour la télévision dans son modeste mayen, d’un vigoureux et spontané «Pas besoin!»<strong>, </strong> réaction qui pourrait être interprétée comme l’expression d’une mentalité bornée, ou au contraire pleine de sagesse: j’ai la santé et mon parchet, j’ai ma vie et c’est tout bon…</p> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1589526010_images4.jpeg" class="img-responsive img-fluid normal " width="257" height="371" /></p> <p>Or je ne sais pourquoi ce «pas besoin!» me poursuit, moi qui ai toujours été curieux de tout, non comme un frein ni comme une résignation piteuse mais comme un rappel de notre chance d’être au monde et un signe d’humilité et de reconnaissance. Ce «pas besoin!» s’enracine dans notre culture séculaire auto-suffisante et je le retrouve, exprimé de façon plus subtilement lyrique, dans cette page de <em>L’Institut Benjamenta</em> de Robert Walser: «Si j’étais riche, je ne voudrais nullement faire le tour de la terre. Sans doute, ce ne serait déjà pas si mal. Mais je ne vois rien de bien exaltant à connaître l’étranger au vol. Je me refuserais à enrichir mes connaissances, comme on dit. Plutôt que l’espace et la distance, c’est la profondeur, l’âme qui m’attirerait.</p> <p>Examiner ce qui tombe sous le sens, je trouverais cela stimulant. D’ailleurs je ne m’achèterais rien du tout. Je n’acquerrais pas de propriétés. Des vêtements élégants, du linge fin, un haut-de-forme, de modestes boutons de manchettes en or, des souliers vernis pointus, ce serait à peu près tout, et avec cela je me mettrais en route. Pas de maison, pas de jardin, pas de valet. (…) Et je pourrais partir. J’irais me promener dans le brouillard fumant de la rue. L’hiver et son froid mélancolique s’accorderaient merveilleusement avec mes pièces d’or».</p> <p>Pour archaïque qu’elle paraisse dans sa modestie plus ou moins jouée et rouée, cette vision de Walser, comme le «pas besoin!» de Rose de Pinsec, n’exclut pourtant ni l’humour terrien ni l’élégance, pas plus que les embrouilles de la vie. Or l’élégance de Patrick Jane, toujours en costume trois pièces et refusant de porter aucune arme, et sa gentillesse frottée d’insolence, sa bonté naturelle envers les animaux et les enfants n’ont cessé de me revenir à l’esprit en imaginant Léonard déambulant en beaux atours dans les ruelles de Florence, aimable avec tous et ne répondant point aux piques dures des jaloux ou des ombrageux à la Michel-Ange, conscient de son génie et triste sous l’agression des malveillants moralisants comme il y en a plus que jamais aujourd’hui, joyeux et non moins fragile en sa solitude éprise d’absolu esthétique.</p> <h3><strong>Une vision panoptique qui relie le détail à l’ensemble</strong></h3> <p>La vision de Léonard de Vinci, dans les petites et les grandes largeurs, relève d’une observation panoptique. Chacune et chacun sait que le Panopticon est ce dispositif précis, dans une prison, qui permet au gardien de voir d’un même point central tous les prisonniers soumis à sa surveillance, mais c’est sans cet aspect disciplinaire que je l’entends: comme une observation simultanée et aussi tourbillonnante que le sont les idées et les figures de certaines peintures de Leonardo, à commencer par son incroyable esquisse de <em>L’Adoration des mages</em>, magnifiqueement analysée par Issacson, et comme en témoignent les milliers de pages de ses carnets aux mêmes observations kaléidoscopiques.</p> <p>La singularité de l’enquêteur Patrick Jane, à part sa mémoire phénoménale, tient à sa façon de relier les traits physiques et moraux, les tics et les pensées, les moindres frémissements expressifs et les émotions d’un personnages, exactement de la même façon que Leonardo puise, dans sa connaissance approfondie de l’anatomie humaine, les liens entre tel muscle et tel mouvement, tel trait et telle expression, non point de façon platement mécanique ou linéaire mais avec les nuances de la lumière sur la chair et le jeu des transparences. Là aussi, Walter Isaacson excelle à distinguer la finesse sensible extrême des nuances apportées par Leonard de Vinci aux tableaux peints en collaboration avec ses divers maîtres plus conventionnels de touche, comme on le voit dans le <em>Baptême du Christ</em> travaillé conjointement par Verrocchio et son élève.</p> <h3><strong>Ce que les crises révèlent du Bien et du Mal</strong></h3> <p>Certaines situations sont particulièrement révélatrices en ce qui concerne le Mal, au sens biologique ou moral le plus large, et nous l’aurons vérifié à l’occasion de la pandémie en cours, comme Leonardo à pu l’observer après la peste de son temps qui a décimé la ville de Florence et lui fit jeter les bases d’une ville idéale hygiéniquement sécurisée quand il se transporta de Toscane à Milan, au début de sa stupéfiante carrière parallèle d’ingénieur-urbaniste-musicien-showman-artiste.</p> <p>Or l’intuition hypersensible et l’imagination déductive, mais aussi la révolte contre le Mal apparient aussi Leonard de Vinci et Patrick Jane impatient de punir le Méchant qui a tué sa femme et sa fille. Je sais bien que ça fait un peu vieux jeu de défendre le Bien contre le Mal, mais le choix n’a rien d’abstrait ou d’idéologique: question de survie, autant que de style, même si la comparaison des deux personnages relève,une fois encore, du grand écart apparemment loufoque. Cependant, le virus se fiche des partis et des appartenances de classes ou de races autant que des niveaux de culture: il est égalitaire au contraire de la médecine trop humaine, et s’il est exagéré de prétendre que le héros blondin d’une série américaine est égal par son mérite à l’un des plus grands génies de notre chère espèce, il est prouvé en période de crise que la lutte contre le Mal relève décidément de la ressemblance humaine, amen.</p> <p>Bref nous avons vaincu la peste et, en attendant, par delà d’autres défis viraux, la panacée transhumaniste que nous promettent les nouveaux prophètes de Dieu sait quelle ennuyeuse immortalité, la quarantaine nous a permis de lire de beaux livres et de voir ou revoir des tas de bons films et quelques séries qui valent peut-être les feuilletons que Rose de Pinsec lisait le soir avant de s’endormir sans somnifères - pas besoin!</p> <hr /> <h4><strong><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1589482331_unknown.jpeg" class="img-responsive img-fluid normal " width="259" height="389" />Walter Isaacson. Léonard de Vinci – La biographie. Traduit de l’anglais (USA) par Anne-Sophie De Clercq et Jérémie Gerlier. Quanto / Presses polytechniques et universitaires romandes, Lausanne, 2019.</strong></h4> <h4><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1589485311_1923857_18977019860_6515_n.jpg" class="img-responsive img-fluid normal " width="258" height="206" /><strong><em>Le Mentaliste.</em></strong><strong> Série télévisée de Bruno Heller en 151 épisodes et 7 saisons (2008-2013), reprise sur Prime Video.</strong></h4> <p> </p> <p> </p> <p> </p>', 'content_edition' => null, 'slug' => 'quand-leonard-de-vinci-luttait-contre-le-virus-du-mal', 'headline' => false, 'homepage' => 'col-md-12', 'like' => (int) 648, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 2348, 'homepage_order' => (int) 2588, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 3, 'person_id' => (int) 94, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [[maximum depth reached]], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 2293, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => true, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => 'NORMAL', 'readed' => null, 'subhead' => 'La chronique de JL K', 'title' => 'Voici le bon, le beau moment venu d’apprendre à parler à une pierre', 'subtitle' => 'Deux petits livres immenses signés Annie Dillard, géniale auteure américaine, nous rappellent cette évidence que la merveille du monde fut infectée de tout temps, que le Dieu parfait tolère la naissance d’enfants malformés et de massacres en son nom, enfin que nous vivons la plupart du temps aveuglés par des paupières de plomb, faute de nous éveiller comme ces gosses se levant tôt pour explorer notre terre qui, parfois, reste si jolie… ', 'subtitle_edition' => null, 'content' => '<p>Le moment que nous vivons est extraordinaire, mais ce n’est rien de le dire: il n’est que de le vivre et de mille façons diverses qui procèdent du même éveil et du même bond les yeux ouverts devant la merveille.</p> <p>«Merveille des merveilles sous le lilas fleuri, merveille: je m’éveille», écrivait le poète Jean-Pierre Schlunegger qui finit, désespéré, par se jeter d’un pont, non loin d’où nous vivons, pour se fracasser sur les rochers de la rivière, tout en bas.</p> <p>Or nous vivons tous ces jours sous la double instance de telle merveille et de son envers mortel, et ce n’est pas d’hier, nous l’oublions trop souvent, mais quelque temps nous voici comme au pied d’un mur et c’est le bon moment - le beau moment d’apprendre à voir le monde les yeux ouverts et d’apprendre à parler à une pierre.</p> <p>La merveille des merveilles est à la portée de chacune et chacun , et ma conviction s’en est trouvée confortée, l’autre jour, en notre quarantaine à tous, lorsque tel cher ami m’apprit au téléphone que tous les matins il conduisait son petit lascar Luca de dix ans et son compère Arthur de trois ans son aîné familier par son père argentin des colibris de la jungle de son pays, à la lisière des bois vaudois où ils s’enfoncent tout appareillés d’instruments d’observation et autres chasses subtiles - toute la journée rien qu’à eux, fous de ferveur curieuse et de joyeuse adulation des multiples espèces de végétaux ou d’animaux divers tels les castors d’un soir passé - en somme prédisposés à apprendre un jour a parler aux pierres à l’imitation de ce jeune Américain dans la trentaine exercant, dans sa cabane perdue en pleine nature, le rituel censé faire parler une «pierre à souhaits»…</p> <h3><strong>En osmose intime avec le cosmos</strong></h3> <p>Certains livres sont des départs et d'autres des arrivées. Certains livres ouvrent des fenêtres et d'autres explorent les multiples recoins qu'il y a dans la maison. Certains livres ne font que passer et d'autres vont rester. Certains livres ne sont que des aspects de la vie et d'autres en font la somme; et c'est un peu tout ça que je ressens en revenant sans cesse aux récits et aux réflexions, aux observations et aux intuitions émaillant l’œuvre incomparable d’Annie Dillard, à commencer par les deux recueils de fragments que représentent <em>Au présent</em> et <em>Apprendre à parler à une pierre.</em></p> <p>On est là dans la maison du monde en parcourant ce livre à la fois très physique et vertigineusement métaphysique, hyperréaliste et non moins réellement habité par l'Esprit qui s'intitule <em>Au présent</em> et conjugue les pires effrois et les plus hauts émois du cœur et de l’âme.</p> <p>Le théâtre actuel de la pandémie, avec ses milliards d’histoires individuelles bouleversantes ou affligeantes de médiocrité, ses rages et ses courages, ses bontés discrètes et ses vilenies étalées, n’est guère différent des univers explorés par Annie Dillard dans les archives illustrées des «troupes humaines» victimes des pires monstruosités congénitale (nains à têtes d’oiseaux ou nourrissons sirénomèles, entre autres produits de la fantaisie «divine» salués par autant d’hymnes par les diverses traditions religieuses) ou sur le terrain de nos contemporains chinois ou palestiniens, sur les traces du paléontologue Teilhard de Chardin aux rêveries mystiques ou le long des fossés à ciel ouvert révélant une armée de combattants chinois de terre cuite enterrés comme le furent, encore vivants, tant de sujets d’un certain empereur Qin adulé par son descendant Mao… </p> <p>Annie Dillard est ce qu’on pourrait dire une pure poétesse de la pensée dont le génie - sans le moindre des chichis de ce que j’appelle la «poésie poétique», souvent obscure et prétentieuse, ou bavarde comme les pies des réseaux sociaux -, procède par fulgurants rapprochements, parlant aussi bien de la stupéfaction qu’elle éprouve à la rencontre inopinée d’une fouine au coin d’un fourré ou à la vision de ce vieux lecteur du Coran assis contre le pilier d’une mosquée de Jérusalem filant discrètement des bonbons en papillotes aux gamins pieds nus, des prodiges émaillant les vies de saints hassidim ou d’un chevreuil piégé se débattant dans la jungle amazonienne, de la formation des déserts et des nuages ou de la naissance de tel enfant à longue queue et fentes brachiales au cou semblables à celle du requin qui nous incite à penser que «si l’homme devait appréhender pleinement la condition humaine il deviendrait fou». Et les énumérations d’aligner leurs chiffres avérés, et le rappel d’innombrables faits remarquables ou affolants (140.000 noyés ce jour-là au Bengladesh, etc.) d’alterner avec les statistiques même pas bonnes à soutirer des larmes aux pierres…</p> <p>De son propre aveu, l’auteure d’<em>Une enfance américaine</em>, de <em>Pèlerinage à Tinter Creek</em> - dont la verve naturaliste évoque si fort le «philosophe dans le bois» Henry Thoreau -, ou encore de la stupéfiante chronique de la conquête de la côte pacifique nord-ouest des States par les puritains amis ou ennemis des Indiens, intitulée <em>Les vivants </em>- fut une enfant si étonnamment étonnée et étonnante que sa propre mère se demandait ce qu’on pourrait jamais en faire dans ce monde...</p> <p>Et que faire des livres d’Annie Dillard, honneur littéraire d’une nation dont le Président est la honte; que faire de cette bonne fée dans un monde dont le personnage supposé le plus puissant présente tous les traits d’un mufle inculte, terrifiante incarnation d’un empire du vide et du faux?</p> <p>Simplement cela: les ouvrir et leur permettre de nous éveiller. </p> <p>Merveille des merveilles, les enfants: il vous reste un monde à explorer, il vous incombe d’apprendre à chanter aux pierres…</p> <hr /> <h4><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1588255173_anniedillard.jpeg" class="img-responsive img-fluid normal " width="219" height="373" /></h4> <h4><strong><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1588255241_christianbourgois.jpeg" class="img-responsive img-fluid normal " width="218" height="362" /></strong></h4> <h4><strong>Annie Dillard <em>Au présent</em>. Traduit de l’anglais par Sabine Porte.</strong></h4> <h4><strong>Christian Bourgois, 219p, 2001; <em>Apprendre à parler à une pierre</em>. Christian Bourgois, 202p, 2017.</strong></h4> <h4></h4>', 'content_edition' => null, 'slug' => 'voici-le-bon-le-beau-moment-venu-d-apprendre-a-parler-a-une-pierre', 'headline' => false, 'homepage' => 'col-md-6', 'like' => (int) 666, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 2303, 'homepage_order' => (int) 2543, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 3, 'person_id' => (int) 94, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [[maximum depth reached]], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' } ] $embeds = [] $images = [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) { 'id' => (int) 5276, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'BPLT_JLK_peugeot.jpg', 'type' => 'image', 'subtype' => 'jpeg', 'size' => (int) 3045253, 'md5' => '47ba8fec143411234125a7039f9d0bf3', 'width' => (int) 3067, 'height' => (int) 2379, 'date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'title' => '', 'description' => '', 'author' => '', 'copyright' => '© 2019 Bon pour la tête / Matthias Rihs', 'path' => '1551284725_bplt_jlk_peugeot.jpg', 'embed' => null, 'profile' => 'default', '_joinData' => object(Cake\ORM\Entity) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Attachments' } ] $audios = [] $comments = [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Comment) { 'id' => (int) 1566, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'status' => 'ACCEPTED', 'comment' => 'Vous nous aviez offert cette chronique sur Fb et suis ravie de la relire dans ce BPL , je n’ai pas lu “Nouvelles inquiètes” , j’aime beaucoup Buzzati et la description de l’une des nouvelles me donne vraiment envie de lire le recueil . C est toujours un réel plaisir de vous lire.', 'post_id' => (int) 1547, 'user_id' => (int) 3193, 'user' => object(App\Model\Entity\User) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Comments' }, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Comment) { 'id' => (int) 1582, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'status' => 'ACCEPTED', 'comment' => 'Envie de relire Buzzati. Merci pour votre article.', 'post_id' => (int) 1547, 'user_id' => (int) 1368, 'user' => object(App\Model\Entity\User) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Comments' } ] $author = 'JL K' $description = 'Un recueil de «Nouvelles inquiètes» s’ajoute aux multiples publications qui ont marqué le centenaire de la naissance du grand conteur italien (1906-1972), rassemblant les brèves et fascinantes histoires qu'il publiait dans le «Corriere della sera». Tout le contraire de «fake news» loufoques ou gratuites: autant de vérités profondes dégagées des faits divers ou des multiples aspects de la vie ordinaire... ' $title = 'Dino Buzzati nous éclaire par son inquiète étrangeté ' $crawler = true $connected = null $menu_blocks = [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Block) { 'id' => (int) 56, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'active' => true, 'name' => '#Trends', 'subtitle' => null, 'description' => null, 'color' => null, 'order' => null, 'position' => null, 'type' => 'menu', 'slug' => 'menu_tags', 'extern_url' => null, 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'posts' => [[maximum depth reached]], '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Blocks' }, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Block) { 'id' => (int) 55, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'active' => true, 'name' => 'Les plus lus cette semaine', 'subtitle' => null, 'description' => null, 'color' => null, 'order' => null, 'position' => null, 'type' => 'menu', 'slug' => 'menu_highlight', 'extern_url' => null, 'tags' => [[maximum depth reached]], 'posts' => [ [maximum depth reached] ], '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Blocks' } ] $menu = [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 2, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'A vif', 'menu' => true, 'menu_order' => (int) 4, 'description' => 'Lorsque nos auteurs ont envie de réagir sur le vif à un événement, des concerts aux disparitions célèbres, ils confient leurs écrits à la rubrique "A vif", afin que ceux-ci soient publiés dans l’instant.', 'slug' => 'a-vif', 'attachment_id' => '0', 'lft' => null, 'rght' => null, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 3, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Chronique', 'menu' => true, 'menu_order' => (int) 5, 'description' => '<p>La réputation des chroniqueurs de Bon pour la tête n’est plus à faire: Tout va bien, Le billet du Vaurien, la chronique de JLK, ou encore Migraine et In#actuel, il y en a pour tous les goûts!</p>', 'slug' => 'chroniques', 'attachment_id' => '0', 'lft' => null, 'rght' => null, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 4, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Lu ailleurs', 'menu' => true, 'menu_order' => (int) 5, 'description' => 'Pourquoi ne pas mettre en avant nos collègues lorsque l'on est sensibles à leur travail? Dans la rubrique « Lu ailleurs » vous trouverez des reprises choisies par la rédaction et remaniées façon BPLT.', 'slug' => 'ailleurs', 'attachment_id' => '0', 'lft' => null, 'rght' => null, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 5, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Actuel', 'menu' => true, 'menu_order' => (int) 1, 'description' => 'Bon pour la tête n’a pas vocation à être un site d’actualité à proprement parler, car son équipe prend le temps et le recul nécessaire pour réagir à l’information.', 'slug' => 'actuel', 'attachment_id' => '0', 'lft' => null, 'rght' => null, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 4 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 6, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Culture', 'menu' => true, 'menu_order' => (int) 3, 'description' => '', 'slug' => 'culture', 'attachment_id' => '0', 'lft' => null, 'rght' => null, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 5 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 7, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Vos lettres', 'menu' => true, 'menu_order' => (int) 6, 'description' => 'Bon pour la tête donne la parole à ses lecteurs, qu’ils aient envie de partager leur avis, pousser un coup de gueule ou contribuer à la palette diversifiée d’articles publiés. A vous de jouer!', 'slug' => 'vos-lettres-a-bon-pour-la-tete', 'attachment_id' => '0', 'lft' => null, 'rght' => null, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 6 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 8, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Analyse', 'menu' => true, 'menu_order' => (int) 3, 'description' => '', 'slug' => 'analyse', 'attachment_id' => '0', 'lft' => null, 'rght' => null, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 7 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 10, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Science', 'menu' => true, 'menu_order' => null, 'description' => '', 'slug' => 'sciences', 'attachment_id' => '0', 'lft' => (int) 1, 'rght' => (int) 2, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 8 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 11, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Histoire', 'menu' => true, 'menu_order' => null, 'description' => '', 'slug' => 'histoire', 'attachment_id' => '0', 'lft' => (int) 3, 'rght' => (int) 4, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 9 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 12, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Humour', 'menu' => true, 'menu_order' => null, 'description' => '', 'slug' => 'humour', 'attachment_id' => '0', 'lft' => (int) 5, 'rght' => (int) 6, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 10 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 13, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Débat', 'menu' => true, 'menu_order' => null, 'description' => '', 'slug' => 'debat', 'attachment_id' => '0', 'lft' => (int) 7, 'rght' => (int) 8, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 11 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 14, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Opinion', 'menu' => true, 'menu_order' => null, 'description' => '', 'slug' => 'opinion', 'attachment_id' => '0', 'lft' => (int) 9, 'rght' => (int) 10, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 12 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 15, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Reportage', 'menu' => true, 'menu_order' => null, 'description' => '', 'slug' => 'reportage', 'attachment_id' => '0', 'lft' => (int) 11, 'rght' => (int) 12, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' } ] $tag = object(App\Model\Entity\Tag) { 'id' => (int) 185, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'la chronique de jlk', 'slug' => 'la-chronique-de-jlk', '_joinData' => object(Cake\ORM\Entity) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ '*' => true, 'id' => false ], '[dirty]' => [], '[original]' => [], '[virtual]' => [], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [], '[invalid]' => [], '[repository]' => 'Tags' }include - APP/Template/Posts/view.ctp, line 123 Cake\View\View::_evaluate() - CORE/src/View/View.php, line 1435 Cake\View\View::_render() - CORE/src/View/View.php, line 1393 Cake\View\View::render() - CORE/src/View/View.php, line 892 Cake\Controller\Controller::render() - CORE/src/Controller/Controller.php, line 791 Cake\Http\ActionDispatcher::_invoke() - CORE/src/Http/ActionDispatcher.php, line 126 Cake\Http\ActionDispatcher::dispatch() - CORE/src/Http/ActionDispatcher.php, line 94 Cake\Http\BaseApplication::__invoke() - CORE/src/Http/BaseApplication.php, line 256 Cake\Http\Runner::__invoke() - CORE/src/Http/Runner.php, line 65 App\Middleware\IpMatchMiddleware::__invoke() - APP/Middleware/IpMatchMiddleware.php, line 28 Cake\Http\Runner::__invoke() - CORE/src/Http/Runner.php, line 65 Cake\Routing\Middleware\RoutingMiddleware::__invoke() - CORE/src/Routing/Middleware/RoutingMiddleware.php, line 164 Cake\Http\Runner::__invoke() - CORE/src/Http/Runner.php, line 65 Cors\Routing\Middleware\CorsMiddleware::__invoke() - ROOT/vendor/ozee31/cakephp-cors/src/Routing/Middleware/CorsMiddleware.php, line 32 Cake\Http\Runner::__invoke() - CORE/src/Http/Runner.php, line 65 Cake\Routing\Middleware\AssetMiddleware::__invoke() - CORE/src/Routing/Middleware/AssetMiddleware.php, line 88 Cake\Http\Runner::__invoke() - CORE/src/Http/Runner.php, line 65
Warning: file_put_contents(/data01/sites/bonpourlatete.com/dev/bonpourlatete.com/logs/debug.log) [function.file-put-contents]: failed to open stream: Permission denied in /data01/sites/bonpourlatete.com/dev/bonpourlatete.com/vendor/cakephp/cakephp/src/Log/Engine/FileLog.php on line 133
C’est l’histoire d’un type qui vient de commettre, avec un compère, un rapt d’enfant qui va lui rapporter un pactole, et qui se met soudain à paniquer devant le mioche. Celui-ci, quatre ans, s’est laissé cueillir comme une fleur à l’insu de sa nurse, et ensuite s’est montré aussi gentil que ses ravisseurs, lesquels ont laissé un message à côté du toboggan, sur la place de jeux, précisant le montant de la rançon: 50 millions de francs, et gare si le père alerte la police!
Comme ledit paternel est richissime et décidé à ne prendre aucun risque, et que les malandrins ont su gagner la confiance du petiot en le gavant de friandises devant la télé allumée, tout devrait bien se passer, mais voici qu’une sainte terreur envahit peu à peu l’un des malfrats.
Peur à l’idée que la France en alerte soit à l’instant sur les dents? Pas du tout. «Si devant moi avait surgi un policier, deux policiers, cent, les agents de la police entière, en ordre de bataille, pistolet au poing prêts à tirer; s’il y avait eu le chef de la police, le ministre de l’Intérieur, le procureur général, je ne me serais pas senti aussi mal», avoue le kidnappeur en considérant le petit Eric endormi: «Un petit corps tendre et fragile, semblable à ce que j’avais d’ailleurs été, moi aussi, autrefois».
Et la peur de l'étreindre de plus en plus: «C’était un enfant, une créature stupide et innocente, et il ne savait rien de nous, il n’avait rien compris, et il n’avait pas peur. Pourtant je ne pouvais pas le supporter. Il était petit, mais minute après minute il grandissait démesurément, il n’y avait plus un coin de la maison qui ne fût pas empli de sa présence. Oui, de toutes mes forces je le haïssais»…
Au moment où Dino Buzzati rédigeait cette nouvelle inspirée par l’enlèvement du petit Eric Peugeot, en avril 1960, il savait déjà que le gosse avait été relâché par les deux truands qui l’avaient séquestré deux jours durant, désormais impatients, la rançon en poche, de mener grande vie ni vus ni connus – ils ne seraient arrêtés et jugés qu’une année plus tard...
Or, on aura compris que ce n’est pas le fait divers et son issue qui l’intéressait, mais, bien moins paradoxale qu’on ne pourrait l’imaginer: la terrifiante pétoche du «dur à cuire» qui se croyait «blindé» et qui avait beau se dire que le rapt, techniquement, avait été «un triomphe sur toute la ligne», sans parvenir pour autant à surmonter sa terreur: «Je ne suis pas expert en enfants», se disait-il ainsi, «je n’en ai jamais fréquenté, je ne pouvais pas supposer qu’ils représentaient un tel danger». Et de conclure tout misérable: «Depuis que cette maudite affaire a eu lieu, dans la rue tous les enfants me regardent. Avec une espèce de curiosité préoccupée – comment dire, comme si j’étais l’un d’entre eux et que je les avais trahis de manière ignoble. Quelles bêtises! Un type dégourdi comme moi s’arrêter à de telles pensées! Quoi qu’il en soit le phénomène persiste; même hier, même ce matin. Dans la rue, tous les enfants, je dis bien tous. Pourquoi me regardent-ils?»
Un regard décalé, souvent révélateur
Tout empreint de cette tendre malice humoristique marquant le regard de Dino Buzzati sur notre drôle d’espèce, Le kidnappeur est l’une des cinquante Nouvelles inquiètes réunies dans ce recueil, initialement publiées dans le journal auquel collaborait le journaliste-écrivain, à savoir le Corriere della sera, fameux quotidien milanais dans lequel Buzzati était entré en 1928, et le Corriere d’informazione constituant l’édition de l’après-midi du précédent.
Plus précisément, ces textes brefs à caractère littéraire, quoique souvent sans apprêts, paraissaient sous la forme de l’elzeviro, terme italien désignant des écrits (essais, critiques, réflexions, récits) publiés sur la première page culturelle du quotidien, sous la signature d’écrivains reconnus. Provenant d’une anthologie en deux volumes parue en 2003 sous le titre de Cronache fantastiche, le présent recueil, traduit et présenté par Delphine Gachet – dont il faut saluer le travail accompli pour la défense et l’illustration de Buzzati, notamment avec trois volumes de la collection Bouquins – tire précisément son intérêt, et son charme ou son mordant «sur le vif», de la contrainte de l’elzeviro, forçant l’auteur à la concision et à la limpidité.
Cependant, l’auteur du Désert des Tartares n’en est pas moins là avec son art proche de la fable ou du conte fantastique, et ceci dès Le dernier combat, où l’on voit certaine ombre noire «venue du fond des âges» se pointer au chevet d’un très vieux général à peu près moribond («comme une misérable petite araignée, une fiole fragile, une dentelle d’os minuscules») mais pas du tout décidé à rendre les armes…
Plus saisissante encore: la deuxième nouvelle du recueil développe le thème du Mal à l’envers, si l’on ose dire, puisqu’elle évoque la décision du Démon de faire la Grève du mal, titre de la nouvelle, pour s’opposer aux actions menés par le gouvernement contre les crimes, l’immoralité, les vices divers et les maladies.
Et que se passerait-il donc, nous demande incidemment Buzzati, si les hôpitaux, les médecins et les pharmaciens, les policiers et les juges se trouvaient soudain, demain, privés de leur clientèle? On imagine l’ennui que signifierait une vie sans vices ni crimes, frissons ni peurs! Une vie sans mort pour lui donner du sel? Quelle barbe!
Un conteur plus «pascalien» que «kafkaïen»…
Il y a du moraliste et du visionnaire chez Buzzati, dont l’imagination et l’art du conte plonge dans la tradition populaire des légendes et autres «menteries». Jeune reporter chargé de documenter la construction du métro de Milan, il en a tiré les affabulations futuristes de son Voyage aux enfers du XXe siècle, ou voici que telle observation, combien actuelle d’ailleurs, portée sur le rejet des «seniors», lui inspire sa mémorable Chasse aux vieux…
On a comparé, parfois, l’univers de Buzzati à celui de Kafka, mais le rapprochement, justifié à certains égards, ne l’est pas vraiment en profondeur, tant le fonds de culture des deux auteurs diffère. En revanche il me semble que Michel Suffran, biographe et commentateur très éclairé de cette œuvre parfois snobée par la critique ou l'Université, mais aussi populaire que celle d'un Marcel Aymé, et toujours à redécouvrir, composite voire inégale mais tenue ensemble par une vision centrale à caractère métaphysique plus que philosophique ou religieux, a raison de parler du ton «pascalien» de Dino Buzzati, conscient de l’extrême précarité de nos vies «entre deux infinis», et sondant le Mystère de l'existence avec la perplexité de son chien regardant Dieu ou d’un enfant se demandant si le soleil avalé ce soir par le lac va revenir demain par la fenêtre...
Dino Buzzati. Nouvelles inquiètes. Traduit de l’italien par Delphine Gachet. Laffont, coll. Pavillons poche, 453p.
Notice (8): Trying to access array offset on value of type null [APP/Template/Posts/view.ctp, line 147]Code Context<div class="col-lg-12 order-lg-4 order-md-4">
<? if(!$connected['active']): ?>
<div class="utils__spacer--default"></div>
$viewFile = '/data01/sites/bonpourlatete.com/dev/bonpourlatete.com/src/Template/Posts/view.ctp' $dataForView = [ 'referer' => 'https://dev.bonpourlatete.com/like/1547', 'OneSignal' => '8a2ea76e-2c65-48ce-92e5-098c4cb86093', '_serialize' => [ (int) 0 => 'post' ], 'post' => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 1547, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => false, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => 'NORMAL', 'readed' => null, 'subhead' => 'La chronique de JLK', 'title' => 'Dino Buzzati nous éclaire par son inquiète étrangeté ', 'subtitle' => 'Un recueil de «Nouvelles inquiètes» s’ajoute aux multiples publications qui ont marqué le centenaire de la naissance du grand conteur italien (1906-1972), rassemblant les brèves et fascinantes histoires qu'il publiait dans le «Corriere della sera». Tout le contraire de «fake news» loufoques ou gratuites: autant de vérités profondes dégagées des faits divers ou des multiples aspects de la vie ordinaire... ', 'subtitle_edition' => null, 'content' => '<p> C’est l’histoire d’un type qui vient de commettre, avec un compère, un rapt d’enfant qui va lui rapporter un pactole, et qui se met soudain à paniquer devant le mioche. Celui-ci, quatre ans, s’est laissé cueillir comme une fleur à l’insu de sa nurse, et ensuite s’est montré aussi gentil que ses ravisseurs, lesquels ont laissé un message à côté du toboggan, sur la place de jeux, précisant le montant de la rançon: 50 millions de francs, et gare si le père alerte la police! </p><p>Comme ledit paternel est richissime et décidé à ne prendre aucun risque, et que les malandrins ont su gagner la confiance du petiot en le gavant de friandises devant la télé allumée, tout devrait bien se passer, mais voici qu’une sainte terreur envahit peu à peu l’un des malfrats. </p><p>Peur à l’idée que la France en alerte soit à l’instant sur les dents? Pas du tout. «Si devant moi avait surgi un policier, deux policiers, cent, les agents de la police entière, en ordre de bataille, pistolet au poing prêts à tirer; s’il y avait eu le chef de la police, le ministre de l’Intérieur, le procureur général, je ne me serais pas senti aussi mal», avoue le kidnappeur en considérant le petit Eric endormi: «Un petit corps tendre et fragile, semblable à ce que j’avais d’ailleurs été, moi aussi, autrefois». </p><p>Et la peur de l'étreindre de plus en plus: «C’était un enfant, une créature stupide et innocente, et il ne savait rien de nous, il n’avait rien compris, et il n’avait pas peur. Pourtant je ne pouvais pas le supporter. Il était petit, mais minute après minute il grandissait démesurément, il n’y avait plus un coin de la maison qui ne fût pas empli de sa présence. Oui, de toutes mes forces je le haïssais»… </p><p>Au moment où Dino Buzzati rédigeait cette nouvelle inspirée par l’enlèvement du petit Eric Peugeot, en avril 1960, il savait déjà que le gosse avait été relâché par les deux truands qui l’avaient séquestré deux jours durant, désormais impatients, la rançon en poche, de mener grande vie ni vus ni connus – ils ne seraient arrêtés et jugés qu’une année plus tard... </p><p>Or, on aura compris que ce n’est pas le fait divers et son issue qui l’intéressait, mais, bien moins paradoxale qu’on ne pourrait l’imaginer: la terrifiante pétoche du «dur à cuire» qui se croyait «blindé» et qui avait beau se dire que le rapt, techniquement, avait été «un triomphe sur toute la ligne», sans parvenir pour autant à surmonter sa terreur: «Je ne suis pas expert en enfants», se disait-il ainsi, «je n’en ai jamais fréquenté, je ne pouvais pas supposer qu’ils représentaient un tel danger». Et de conclure tout misérable: «Depuis que cette maudite affaire a eu lieu, dans la rue tous les enfants me regardent. Avec une espèce de curiosité préoccupée – comment dire, comme si j’étais l’un d’entre eux et que je les avais trahis de manière ignoble. Quelles bêtises! Un type dégourdi comme moi s’arrêter à de telles pensées! Quoi qu’il en soit le phénomène persiste; même hier, même ce matin. Dans la rue, tous les enfants, je dis bien tous. Pourquoi me regardent-ils?» </p><h3><strong>Un regard décalé, souvent révélateur </strong></h3><p>Tout empreint de cette tendre malice humoristique marquant le regard de Dino Buzzati sur notre drôle d’espèce, <em>Le kidnappeur </em>est l’une des cinquante <em>Nouvelles inquiètes</em> réunies dans ce recueil, initialement publiées dans le journal auquel collaborait le journaliste-écrivain, à savoir le <em>Corriere della sera,</em> fameux quotidien milanais dans lequel Buzzati était entré en 1928, et le <em>Corriere d’informazione</em> constituant l’édition de l’après-midi du précédent. </p><p>Plus précisément, ces textes brefs à caractère littéraire, quoique souvent sans apprêts, paraissaient sous la forme de l’<em>elzeviro</em>, terme italien désignant des écrits (essais, critiques, réflexions, récits) publiés sur la première page culturelle du quotidien, sous la signature d’écrivains reconnus. Provenant d’une anthologie en deux volumes parue en 2003 sous le titre de <em>Cronache fantastiche,</em> le présent recueil, traduit et présenté par Delphine Gachet – dont il faut saluer le travail accompli pour la défense et l’illustration de Buzzati, notamment avec trois volumes de la collection Bouquins – tire précisément son intérêt, et son charme ou son mordant «sur le vif», de la contrainte de l’<em>elzeviro</em>, forçant l’auteur à la concision et à la limpidité. </p><p>Cependant, l’auteur du <em>Désert des Tartares </em>n’en est pas moins là avec son art proche de la fable ou du conte fantastique, et ceci dès <em>Le dernier combat,</em> où l’on voit certaine ombre noire «venue du fond des âges» se pointer au chevet d’un très vieux général à peu près moribond («comme une misérable petite araignée, une fiole fragile, une dentelle d’os minuscules») mais pas du tout décidé à rendre les armes… </p><p>Plus saisissante encore: la deuxième nouvelle du recueil développe le thème du Mal <em>à l’envers,</em> si l’on ose dire, puisqu’elle évoque la décision du Démon de faire la <em>Grève du mal</em>, titre de la nouvelle, pour s’opposer aux actions menés par le gouvernement contre les crimes, l’immoralité, les vices divers et les maladies. </p><p>Et que se passerait-il donc, nous demande incidemment Buzzati, si les hôpitaux, les médecins et les pharmaciens, les policiers et les juges se trouvaient soudain, demain, privés de leur clientèle? On imagine l’ennui que signifierait une vie sans vices ni crimes, frissons ni peurs! Une vie sans mort pour lui donner du sel? Quelle barbe! </p><h3><strong>Un conteur plus «pascalien» que «kafkaïen»… </strong></h3><p>Il y a du moraliste et du visionnaire chez Buzzati, dont l’imagination et l’art du conte plonge dans la tradition populaire des légendes et autres «menteries». Jeune reporter chargé de documenter la construction du métro de Milan, il en a tiré les affabulations futuristes de son<em> Voyage aux enfers du XX<sup>e</sup> siècle,</em> ou voici que telle observation, combien actuelle d’ailleurs, portée sur le rejet des «seniors», lui inspire sa mémorable <em>Chasse aux vieux…</em> </p><p>On a comparé, parfois, l’univers de Buzzati à celui de Kafka, mais le rapprochement, justifié à certains égards, ne l’est pas vraiment en profondeur, tant le fonds de culture des deux auteurs diffère. En revanche il me semble que Michel Suffran, biographe et commentateur très éclairé de cette œuvre parfois snobée par la critique ou l'Université, mais aussi populaire que celle d'un Marcel Aymé, et toujours à redécouvrir, composite voire inégale mais tenue ensemble par une vision centrale à caractère métaphysique plus que philosophique ou religieux, a raison de parler du ton «pascalien» de Dino Buzzati, conscient de l’extrême précarité de nos vies «entre deux infinis», et sondant le Mystère de l'existence avec la perplexité de son chien regardant Dieu ou d’un enfant se demandant si le soleil avalé ce soir par le lac va revenir demain par la fenêtre...</p><p></p><hr><p></p><p><br><img class="img-responsive " src="https://media.bonpourlatete.com/default/w175/1551285040_images.jpg"></p><h4>Dino Buzzati. <em style="">Nouvelles inquiètes.</em> Traduit de l’italien par Delphine Gachet. Laffont, coll. Pavillons poche, 453p. </h4>', 'content_edition' => null, 'slug' => 'les-contes-magiques-de-buzzati-sont-nourris-de-faits-quotidiens', 'headline' => false, 'homepage' => 'col-md-6', 'like' => (int) 586, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1565, 'homepage_order' => (int) 1832, 'original_url' => null, 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 3, 'person_id' => (int) 94, 'post_type_id' => (int) 1, 'poster_attachment' => null, 'editions' => [[maximum depth reached]], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'attachments' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'comments' => [ [maximum depth reached] ], 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, 'relatives' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Post) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Post) {}, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Post) {}, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Post) {} ], 'embeds' => [], 'images' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'audios' => [], 'comments' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Comment) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Comment) {} ], 'author' => 'JL K', 'description' => 'Un recueil de «Nouvelles inquiètes» s’ajoute aux multiples publications qui ont marqué le centenaire de la naissance du grand conteur italien (1906-1972), rassemblant les brèves et fascinantes histoires qu'il publiait dans le «Corriere della sera». Tout le contraire de «fake news» loufoques ou gratuites: autant de vérités profondes dégagées des faits divers ou des multiples aspects de la vie ordinaire... ', 'title' => 'Dino Buzzati nous éclaire par son inquiète étrangeté ', 'crawler' => true, 'connected' => null, 'menu_blocks' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Block) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Block) {} ], 'menu' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 4 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 5 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 6 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 7 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 8 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 9 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 10 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 11 => object(App\Model\Entity\Category) {}, (int) 12 => object(App\Model\Entity\Category) {} ] ] $bufferLevel = (int) 1 $referer = 'https://dev.bonpourlatete.com/like/1547' $OneSignal = '8a2ea76e-2c65-48ce-92e5-098c4cb86093' $_serialize = [ (int) 0 => 'post' ] $post = object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 1547, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => false, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => 'NORMAL', 'readed' => null, 'subhead' => 'La chronique de JLK', 'title' => 'Dino Buzzati nous éclaire par son inquiète étrangeté ', 'subtitle' => 'Un recueil de «Nouvelles inquiètes» s’ajoute aux multiples publications qui ont marqué le centenaire de la naissance du grand conteur italien (1906-1972), rassemblant les brèves et fascinantes histoires qu'il publiait dans le «Corriere della sera». Tout le contraire de «fake news» loufoques ou gratuites: autant de vérités profondes dégagées des faits divers ou des multiples aspects de la vie ordinaire... ', 'subtitle_edition' => null, 'content' => '<p> C’est l’histoire d’un type qui vient de commettre, avec un compère, un rapt d’enfant qui va lui rapporter un pactole, et qui se met soudain à paniquer devant le mioche. Celui-ci, quatre ans, s’est laissé cueillir comme une fleur à l’insu de sa nurse, et ensuite s’est montré aussi gentil que ses ravisseurs, lesquels ont laissé un message à côté du toboggan, sur la place de jeux, précisant le montant de la rançon: 50 millions de francs, et gare si le père alerte la police! </p><p>Comme ledit paternel est richissime et décidé à ne prendre aucun risque, et que les malandrins ont su gagner la confiance du petiot en le gavant de friandises devant la télé allumée, tout devrait bien se passer, mais voici qu’une sainte terreur envahit peu à peu l’un des malfrats. </p><p>Peur à l’idée que la France en alerte soit à l’instant sur les dents? Pas du tout. «Si devant moi avait surgi un policier, deux policiers, cent, les agents de la police entière, en ordre de bataille, pistolet au poing prêts à tirer; s’il y avait eu le chef de la police, le ministre de l’Intérieur, le procureur général, je ne me serais pas senti aussi mal», avoue le kidnappeur en considérant le petit Eric endormi: «Un petit corps tendre et fragile, semblable à ce que j’avais d’ailleurs été, moi aussi, autrefois». </p><p>Et la peur de l'étreindre de plus en plus: «C’était un enfant, une créature stupide et innocente, et il ne savait rien de nous, il n’avait rien compris, et il n’avait pas peur. Pourtant je ne pouvais pas le supporter. Il était petit, mais minute après minute il grandissait démesurément, il n’y avait plus un coin de la maison qui ne fût pas empli de sa présence. Oui, de toutes mes forces je le haïssais»… </p><p>Au moment où Dino Buzzati rédigeait cette nouvelle inspirée par l’enlèvement du petit Eric Peugeot, en avril 1960, il savait déjà que le gosse avait été relâché par les deux truands qui l’avaient séquestré deux jours durant, désormais impatients, la rançon en poche, de mener grande vie ni vus ni connus – ils ne seraient arrêtés et jugés qu’une année plus tard... </p><p>Or, on aura compris que ce n’est pas le fait divers et son issue qui l’intéressait, mais, bien moins paradoxale qu’on ne pourrait l’imaginer: la terrifiante pétoche du «dur à cuire» qui se croyait «blindé» et qui avait beau se dire que le rapt, techniquement, avait été «un triomphe sur toute la ligne», sans parvenir pour autant à surmonter sa terreur: «Je ne suis pas expert en enfants», se disait-il ainsi, «je n’en ai jamais fréquenté, je ne pouvais pas supposer qu’ils représentaient un tel danger». Et de conclure tout misérable: «Depuis que cette maudite affaire a eu lieu, dans la rue tous les enfants me regardent. Avec une espèce de curiosité préoccupée – comment dire, comme si j’étais l’un d’entre eux et que je les avais trahis de manière ignoble. Quelles bêtises! Un type dégourdi comme moi s’arrêter à de telles pensées! Quoi qu’il en soit le phénomène persiste; même hier, même ce matin. Dans la rue, tous les enfants, je dis bien tous. Pourquoi me regardent-ils?» </p><h3><strong>Un regard décalé, souvent révélateur </strong></h3><p>Tout empreint de cette tendre malice humoristique marquant le regard de Dino Buzzati sur notre drôle d’espèce, <em>Le kidnappeur </em>est l’une des cinquante <em>Nouvelles inquiètes</em> réunies dans ce recueil, initialement publiées dans le journal auquel collaborait le journaliste-écrivain, à savoir le <em>Corriere della sera,</em> fameux quotidien milanais dans lequel Buzzati était entré en 1928, et le <em>Corriere d’informazione</em> constituant l’édition de l’après-midi du précédent. </p><p>Plus précisément, ces textes brefs à caractère littéraire, quoique souvent sans apprêts, paraissaient sous la forme de l’<em>elzeviro</em>, terme italien désignant des écrits (essais, critiques, réflexions, récits) publiés sur la première page culturelle du quotidien, sous la signature d’écrivains reconnus. Provenant d’une anthologie en deux volumes parue en 2003 sous le titre de <em>Cronache fantastiche,</em> le présent recueil, traduit et présenté par Delphine Gachet – dont il faut saluer le travail accompli pour la défense et l’illustration de Buzzati, notamment avec trois volumes de la collection Bouquins – tire précisément son intérêt, et son charme ou son mordant «sur le vif», de la contrainte de l’<em>elzeviro</em>, forçant l’auteur à la concision et à la limpidité. </p><p>Cependant, l’auteur du <em>Désert des Tartares </em>n’en est pas moins là avec son art proche de la fable ou du conte fantastique, et ceci dès <em>Le dernier combat,</em> où l’on voit certaine ombre noire «venue du fond des âges» se pointer au chevet d’un très vieux général à peu près moribond («comme une misérable petite araignée, une fiole fragile, une dentelle d’os minuscules») mais pas du tout décidé à rendre les armes… </p><p>Plus saisissante encore: la deuxième nouvelle du recueil développe le thème du Mal <em>à l’envers,</em> si l’on ose dire, puisqu’elle évoque la décision du Démon de faire la <em>Grève du mal</em>, titre de la nouvelle, pour s’opposer aux actions menés par le gouvernement contre les crimes, l’immoralité, les vices divers et les maladies. </p><p>Et que se passerait-il donc, nous demande incidemment Buzzati, si les hôpitaux, les médecins et les pharmaciens, les policiers et les juges se trouvaient soudain, demain, privés de leur clientèle? On imagine l’ennui que signifierait une vie sans vices ni crimes, frissons ni peurs! Une vie sans mort pour lui donner du sel? Quelle barbe! </p><h3><strong>Un conteur plus «pascalien» que «kafkaïen»… </strong></h3><p>Il y a du moraliste et du visionnaire chez Buzzati, dont l’imagination et l’art du conte plonge dans la tradition populaire des légendes et autres «menteries». Jeune reporter chargé de documenter la construction du métro de Milan, il en a tiré les affabulations futuristes de son<em> Voyage aux enfers du XX<sup>e</sup> siècle,</em> ou voici que telle observation, combien actuelle d’ailleurs, portée sur le rejet des «seniors», lui inspire sa mémorable <em>Chasse aux vieux…</em> </p><p>On a comparé, parfois, l’univers de Buzzati à celui de Kafka, mais le rapprochement, justifié à certains égards, ne l’est pas vraiment en profondeur, tant le fonds de culture des deux auteurs diffère. En revanche il me semble que Michel Suffran, biographe et commentateur très éclairé de cette œuvre parfois snobée par la critique ou l'Université, mais aussi populaire que celle d'un Marcel Aymé, et toujours à redécouvrir, composite voire inégale mais tenue ensemble par une vision centrale à caractère métaphysique plus que philosophique ou religieux, a raison de parler du ton «pascalien» de Dino Buzzati, conscient de l’extrême précarité de nos vies «entre deux infinis», et sondant le Mystère de l'existence avec la perplexité de son chien regardant Dieu ou d’un enfant se demandant si le soleil avalé ce soir par le lac va revenir demain par la fenêtre...</p><p></p><hr><p></p><p><br><img class="img-responsive " src="https://media.bonpourlatete.com/default/w175/1551285040_images.jpg"></p><h4>Dino Buzzati. <em style="">Nouvelles inquiètes.</em> Traduit de l’italien par Delphine Gachet. Laffont, coll. Pavillons poche, 453p. </h4>', 'content_edition' => null, 'slug' => 'les-contes-magiques-de-buzzati-sont-nourris-de-faits-quotidiens', 'headline' => false, 'homepage' => 'col-md-6', 'like' => (int) 586, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1565, 'homepage_order' => (int) 1832, 'original_url' => null, 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 3, 'person_id' => (int) 94, 'post_type_id' => (int) 1, 'poster_attachment' => null, 'editions' => [], 'tags' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Tag) {} ], 'locations' => [], 'attachment_images' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'attachments' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'comments' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Comment) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Comment) {} ], 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ '*' => true, 'id' => false ], '[dirty]' => [], '[original]' => [], '[virtual]' => [], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [], '[invalid]' => [], '[repository]' => 'Posts' } $relatives = [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 2406, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => false, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => 'NORMAL', 'readed' => null, 'subhead' => 'La chronique de JLK', 'title' => 'Du bonheur d’être bien vivant sur le chemin de n’importe où...', 'subtitle' => ' À trente ans pile, sur les traces de Nicolas Bouvier auquel il rend un hommage explicite, Guillaume Gagnière signe son premier livre aux touches fines et justes, intitulé Les Toupies d’Indigo Street et retraçant un périple à valeur d’initiation parfois rude, entre Ceylan et l’île japonaise de Shikoku aux 88 temples. De quoi se libérer un instant du poids du monde… ', 'subtitle_edition' => null, 'content' => '<p>Il faisait l’autre matin un temps à se pendre et je trouvais le monde affreux, infâme le Président américain brandisant sa Bible comme une arme et méprisable la meute de ses larbins racistes; et j’avais beau savoir, le vivant tous les jours, que ce quart d’heure de noir absolu se dissiperait comme un brouillard dès que je me remettrais en chemin en souriant à mon ange gardien: l’image de ce pauvre George Floyd qu’un imbécile de flic haineux avait empêché de respirer m’accablait de tout le poids du monde quand une autre image de rien du tout, surgie d’un fin petit livre que je venais de traverser comme sur des pattes de colombe, m’est revenue et avec elle le chant du monde, l’image heureuse recyclée par un jeune homme de trente ans pile, du poète japonais de l’époque de Girolamo Frescobaldi, au nom de Bashô (1644-1694) et qui avait peint cet haïku sur le ciel de soie: «À un piment, ajoutez des ailes: une libellule rouge»…</p> <h4><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1591882396_103195206_10223709763158946_742325142093952186_o.jpeg" class="img-responsive img-fluid normal " /></h4> <h4>Guillaume Gagnière et son bâton de pèlerin sur l’ile de Shikoku. © DR </h4> <h3><strong>Un poème itinérant qui n’exclut ni cloques ni claques</strong></h3> <p>Un an après une année d’errance, Guillaume Gagnière accomplit à peu près le même travail d’orfèvre que celui de Nicolas Bouvier ciselant les phrases du <em>Poisson-scorpion, </em>au fil d’un récit visant à la simplicité et au naturel, jamais trop visiblement «voulu poétique», bien incarné mais sans graisse, qui rend scrupuleusement les changements de relief et de couleurs du décor évoqué par Bouvier avec les détails propres aux virée de sa génération, la troisième ou la quatrième après Blaise Cendrars et Charles-Albert Cingria, les périples d’Ella Maillart et des compères Bouvier et Vernet, le «trip» des routards partis pour Katmandou et plus ou moins échoués à Goa dont Lorenzo Pestelli, dans <em>Le Long été</em>, a laissé la trace la plus scintillante quant au verbe et la plus désenchantée quant à l’esprit, et jusqu’aux <em>backpackers </em>actuels. Ainsi, dans la foulée proche d’une Aude Seigne (née en 1985) et de ses <em>Chroniques d’un Occident nomade</em>, Guillaume Gagnière trouve-t-il aussitôt son ton, pimenté d’humour, et son rythme allant, ses formules propres et la juste distance d’une écriture ni jetée comme dans un carnet de notes brutes ni trop fioriturée.</p> <p>Cela commence par un <em>Soliloque du corps </em>marqué par une première crise d’urticaire, entre la Malaisie et la Thaïlande, et qui subira plus tard force cloques et autres claquages de muscles, jusqu’à «une sorte de lupus» au fil de marches de plus de mille kilomètres, sans parler d’un épisode de pénible yoga soumis aux contorsions du caméléon écartelé ou du chameau asthmatique, entre autres coups de blues et de déprimes qui rappellent aussi celles du cher Nicolas à Ceylan… Cependant le corps exultera aussi en sa juvénile ardeur, de parties de surf en étreintes passagères, etc.</p> <h3><strong>Le cycle bouddhiste du pèlerinage, avec un grain de sel…</strong></h3> <p>Sans la candeur plus ou moins naïve, voire parfois jobarde, des routards des années 60-70 découvrant les spiritualités orientales, le pèlerin Guillaume, après s’être efforcé de ne penser à rien dans un centre de méditation thaïlandais proche de Chiang Mai (épisode comique finissant par « ça me gratte, qu’est-ce que c’est… un moustique, merde, concentre-toi, NE PENSEPAS! (…) Oh, une mésange !»), s’impose bel et bien les rigueurs de la longue marche japonaise, qu’il distingue clairement des chemins de Compostelle: «Dans le bouddhisme, le nirvana n’est pas l’équivalent de notre paradis: c’est le grand rien, la fin de tout désir. Le circuit des 88 temples de Shikoku, un cercle, se distingue des pèlerinages chrétiens qui tracent une droite. On ne marche pas du point A au point B en remportant à l’arrivée un prix de tombola spirituelle, on parcourt un cycle, partant de A pour revenir à A, puis l’on remet son ticket en jeu, encore et encore, jusqu’à ce que le concept de but ou de récompense s’épuise de lui-même».</p> <p>Or son livre reproduit pour ainsi dire le même tracé cyclique partant de la rue Indigo sri lankaise évoquée par Nicolas Bouvier, pour y revenir, non sans une pointe de mélancolie («la rue du récit, <em>sa </em>rue a sombré», avec une affectueuse lettre posthume du jeune homme à son modèle tutélaire. Rien pour autant de platement imitatif dans le récit du trentenaire, dont la poésie et la plasticité ont leur propre fraîcheur. Comme Bashô et Bouvier dans leur voyages respectifs, il multiplie ainsi les brèves notations, mais dans son langage à lui: «C’est alors qu’apparaissent les nuages, de larges masses d’un jaune de mégot froid», ou ceci: «Le soir, plat de curry en solitaire sous la Grande Ourse, les étoiles scintillent dans la casserole»…</p> <p>Parvenant au dernier des 88 temples, enfin, c’est avec un éclat de rire final qu’il fait ce constat: «Deux mois d’efforts sur plus de mille kilomètres, et à l’arrivée, un sommet baignant dans une épaisse purée de pois», ajoutant en sage mal rasé et puant sûrement le bouc: «Serait-ce un peu ça, le but: s’effacer à tel point que la notion de mort en devient naturelle». Et pour dépasser toute morosité nihiliste: «Finalement c’est peut-être ça, le «secret»: des montées, des descentes, des remontées et tout en haut, un grand calme: l’ataraxie. J’avais presque oublié à quel point cela pouvait être simple et beau, d’être en vie»…</p> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1591882458_unknown5.jpeg" class="img-responsive img-fluid normal " width="250" height="361" /></p> <h4><strong>Guillaume Gagnière, <em>Les Toupies d’Indigo Street</em>, Editions d’autre part, 2020. 110p.</strong></h4> <p> </p>', 'content_edition' => null, 'slug' => 'du-bonheur-d-etre-bien-vivant-sur-le-chemin-de-n-importe-ou', 'headline' => false, 'homepage' => 'col-md-12', 'like' => (int) 600, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 2406, 'homepage_order' => (int) 2646, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 3, 'person_id' => (int) 94, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [[maximum depth reached]], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 2378, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => true, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => 'NORMAL', 'readed' => null, 'subhead' => 'La chronique de JLK', 'title' => 'Les passions de Gemma Salem faisaient la pige à la mort ', 'subtitle' => 'Décédée à Vienne le 20 mai dernier, l’auteure du Roman de Monsieur Bulgakov et de quatre livres évoquant (superbement) la figure de Thomas Bernhard, entre autres autofictions et pièces de théâtre, était le contraire d’un bas-bleu. Hommage reconnaissant à l'Amie et à l'Écrivain. ', 'subtitle_edition' => null, 'content' => '<p>C’est entendu: vous avez chialé un bon coup après vous être exclamé «non mais c’est pas vrai!», et quand vous avez compris que c’était vrai vous avez fait votre job de vivants qui est de se lamenter à la cantonade, saules pleureurs et pleureuse éplorées que vous êtes alors que déjà, là-bas, Gemma se rallumait une nouvelle clope dans son cimetière autrichien avant d’éclater de rire en s’imaginant, bande d’éclopés, ses fistons et leur smala, ses amis et autres ennemis, vos pauvres mines d’enterrement!</p> <p>Gemma Salem les pieds devant: non mais t’imagines! Bien plutôt, après le pied au cul de sa mère - elle l’avait écrit noir sur blanc -, cette dernière fois au derche de la mère du monde qui vous fauchera toutes et tous à la fin, ça aussi c’est écrit!</p> <p>Et c’est ça aussi qui nous reste: ce qui est écrit. Les écrits de Gemma Salem sont autant de défis à toutes les détresses, des écrits comme qui dirait «pour la vie», donc des écrits qui chialent comme vous et qui rient pour tous - des écrits comme dictés par la vie et qui survivront parce qu’ils sont plus que de simples «récits de vie»; des écrits qui ne sont pas que de plates copies de la vie mais qui ajoutent à celle-ci la valeur ajoutée de ce qu’on appelle l’Art avec une grande aile, ou la Littérature à crâne majuscule, ou la Poésie mais sans chichis - et surtout musique à l’appui: la poésie de Schubert qui écrivait spécialement pour cette cinglée de Gemma - croyait-elle dur comme fer -, la poésie de Beethoven et son grand mouvement de rumba, la poésie de ce cœur de chien de Boulgakov, la folle poésie décavée de Jean Rhys en ses propres Tropiques passionnels, la poésie martelante et martelée de TB alias Thomas Bernhard à jamais inatteignable et bien avant qu’il l’eut précédée par delà les eaux sombres. Thomas Bernhard mort? Et quoi encore!</p> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1590690767_100073417_10223531313497816_3498760490526441472_n.jpg" class="img-responsive img-fluid normal " /></p> <h3><strong>Au commencent était l’Artiste</strong></h3> <p>Gemma, qui n’était pas encore Gemma Salem l’écrivain (jamais je n’arriverai à la dire «écrivaine» ou «autrice»), m’est apparue à la toute fin d’une soirée dans un caveau lausannois enfumé qui symbolisait alors la bohème locale, à l’enseigne des Faux-Nez, et tout aussitôt j’ai pensé: Princesse persane, Reine sarrasine, Shéhérazade à Gauloises bleues - et c’était parti pour un bout de comédie avec l’Actrice, vu qu’à l’époque Gemma Salem se croyait faite pour le théâtre.</p> <p>Or notre première engueulade, avec Gemma championne du genre, remonte à cet instant où elle a senti, sans que je ne lui dise rien, que je ne croyais pas qu’elle fût le moins du monde actrice, convaincu qu’elle était trop elle-même pour incarner jamais un autre personnage sur une scène, et du coup elle m’en voulut à mort de le penser sans le dire vu qu’elle-même le sentait sans oser le reconnaître; et je ne fus guère surpris de la retrouver, plus tard, dans un autre rôle où elle pouvait incarner tous les personnages qui lui chantaient à sa guise, rien qu’avec une plume et du sang vif (du sang bleu s’il vous plaît) pour l’exprimer.</p> <p>Cependant l’essentiel demeurait: Gemma Salem l’écrivain avait remplacé l’actrice au pied levé et l’Artiste demeurait. Pas étonnant d’ailleurs que <em>L’Artiste</em> (La Table ronde, 1991 - prix Schiller) soit le titre d’un de ses livres. Mais plus que surprenant, réellement stupéfiante: l’immédiate puissance de l’écrivain, brassant une vie entière à pleines mains et en tirant un premier roman dense et vibrant d’émotion, formidablement vivant.</p> <h3><strong>Des passions vécues et sublimées par l’écriture</strong></h3> <p>L’histoire du <em>Roman de Monsieur Boulgakov (L’Âge d’Homme, 1982) </em>est celle d’une passion «incendiaire» autant qu’imaginaire. Une jeune comédienne aux origines panachées d’Orient pimenté et de Suisse confite, installée dans le Midi et languissant un peu d’accéder à la gloire tous azimuts, tombe soudain sur le <em>specimen </em>masculin de ses rêves: un écrivain russe fascinant mais rayé du nombre des vivants dans le crépuscule sanglant des années 30. Rencontre, donc, de type occulte…<br />La comédienne s’appelle Gemma Salem. L’auteur est Mikhaïl Afanassiévitch Boulgakov, auteur du <em>Maître et Marguerite</em>, des <em>Oeufs fatidiques, </em>du <em>Roman théâtral </em>et de <em>Cœur de chie</em>n, mais aussi des <em>Récits d’un jeune médecin </em>qui l’apparentent à un certain Anton Pavlovitch Tchekhov, future autre passion de Gemma.</p> <p>Or le coup de foudre de celle-ci pour Boulgakov est tel que, non contente de dévorer tous ses écrits traduits en quelques mois, elle en investit et réfracte l’univers à la façon de <em>Diablerie</em>- nouvelle du même Boulgakov -, poussant l’observation mimétique de la discordance entre réalité et fiction jusqu’à l’absurde hallucinant.<br />Plus précisément, Gemma Salem, dans <em>Le Roman de Monsieur Bulgakov, </em>reconstitue des lieux et fait parler des personnages de chair et de sang, fondant tout cela dans le mouvement d’un temps fuyant, à la fois tangible et impalpable.</p> <p>C’est ainsi que, dès les premières pages du roman, nous nous transportons, aux côtés du jeune Micha, alors toubib débutant, dans le Kiev de son enfance, et dès ce moment se remarque l’habileté avec laquelle Gemma Salem tire parti d’éléments empruntés aux œuvres de l’écrivain, pour donner au roman son climat, ses couleurs et sa vraisemblance, et cela sans qu’on n’ait jamais l’impression de subir une compilation non plus qu’un relevé de filature.<br />Ensuite nous suivrons Boulgakov à travers les années, des lendemains de la Révolution à la fin des années 30, au fil d’une production littéraire très étroitement surveillée dès ses débuts, à cause de sa liberté de ton et de sa propension satirique, complètement interdite de publication et de représentation au tournant de 1928 (quand bien même Staline avait vu et revu dix–sept fois la pièce intitulée <em>Les Journées des Tourbine</em>!) et que l’acharnement de sa dernière compagne – le très beau personnage de Lena – fera sortir des tiroirs d’infamie après la mort de l’écrivain.</p> <p>De ce dernier, <em>Le Roman de Monsieur Boulgakov </em>nous donne une image attachante et nuancée. En évitant les pièges de l’idéalisation ou du sentimentalisme, si fréquents dans le genre, Gemma Salem a recomposé le portrait d’un Monsieur très porté sur la vie et les femmes, capable d’autant d’amitié chaleureuse que d’intransigeance têtue, qui tenait par-dessus tout à préserver ses œuvres de toute compromission. Or, d’une certaine manière, et ce sera vrai de tous ses livres, l’écrivain brosse son propre portrait en travaillant à celui de son modèle.<br />J’ai parlé de mimétisme à propos de la relation de Gemma Salem avec Boulgakov, dont le sort de David poétique en butte à l’écrasant Goliath soviétique ne pouvait qu’émouvoir la jeune femme blessée par la vie et en bisbille déclarée avec les pesanteurs de la famille et de la société, et c’est le même type de rapport - maintes fois décrit par un René Girard dans ses analyses de la passion mimétique -, qu’elle établira avec Thomas Bernhard, jusqu’à une identification redoutable du fait que l’imprécateur autrichien restait, lui, bien vivant…</p> <h3><strong>Que l’acte artistique relève de la conversion</strong></h3> <p>Tous les livres de Gemma Salem, jusqu’aux plus agressifs ou acides, comme <em>Mes amis et autres ennemis </em>(Zulma, 1995) ou <em>La Rumba de Beethoven </em>(Pierre-Guillaume de Roux, 2019) sont des histoires d’amour relevant de l’exorcisme et qui disent à la fois les beautés de la vie (les enfants et les animaux, la musique et les sentiments délicats) et le mal de vivre, l’exécration du mensonge sentimental ou «romantique», le mépris qu’elle partageait avec Thomas Bernhard de tous les simulacres sociaux ou culturels qu’elle pointe notamment dans ses tableaux au vitriol d’une certaine Suisse hypocritement convenable, notamment dans <em>Les exilés de Khorramshahr </em>(La Table ronde, 1986) et dans <em>Bétulia </em>(Flammarion, 1987), où la rage tonique de sa deuxième flamme littéraire se fait déjà sentir, qui se développera plus librement dans sa fameuse <em>Lettre à l’hermite autrichien </em>(La Table ronde, 1989), relancée dans <em>Thomas Bernhard et les siens </em>(La Table ronde 1993) et jusque dans son dernier livre, sur le ton plus apaisé d’un bilan existentiel très émouvant où elle «prend sur elle», comme on dit, en se reprochant son terrifiant amour propre…</p> <p>Il y a, de fait, chez Gemma Salem, comme chez le grand emmerdeur autrichien, un personnage à la fois solaire et son double farouchement ombrageux, pas loin des possédé(e)s de Dostoïevski, qui se rend parfois la vie aussi impossible qu’à son entourage, mais que l’Art, une fois encore, délivre - cela même qu’entend René Girard une fois encore, dans <em>Mensonge romantique et vérité romanesque</em>.</p> <p>La figure de Thomas Bernhard, assis sur un banc les mains aux poche, l’air de nous dire qu’il n’en a rien à fiche, trône sur la couverture d’<em>Où sont ceux que ton cœur aime </em>(Arléa, 2019), mais TB n’est qu’un truchement: le médiateur par excellence que Gemma n’a jamais pu enlacer «pour de vrai», une figure de la pureté dans un monde avachi par le kitsch, un contempteur de toutes les illusions à bon marché mais qui nous fait un clin d’œil amical comme Gemma, fumant son dernier pétard sur sa tombe, nous en vrille un plein d’amour…</p> <hr /> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1590611352_100086091_10223508363404078_2347364566893068288_n.jpg" class="img-responsive img-fluid normal " width="257" height="257" /></p> <h4><em>Où sont ceux que ton coeur aime, </em>Gemma Salem. 88 pages. (Arléa Editions).</h4>', 'content_edition' => null, 'slug' => 'les-passions-de-gemma-salem-faisaient-la-pige-a-la-mort', 'headline' => false, 'homepage' => 'col-md-12', 'like' => (int) 544, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 2384, 'homepage_order' => (int) 2624, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 3, 'person_id' => (int) 94, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [[maximum depth reached]], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 2343, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => true, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => 'NORMAL', 'readed' => null, 'subhead' => 'La chronique de JL K', 'title' => 'Quand Léonard de Vinci luttait contre le virus du Mal… ', 'subtitle' => 'La fabuleuse biographie de Léonard de Vinci par Walter Isaacson, parue récemment en traduction à Lausanne, autant que les 151 épisodes de la série «culte» Le Mentaliste, apologie de l’intuition déductive d’un Gentil dans sa lutte contre le Méchant, auront égayé, non sans grand écart culturel, notre confinement jamais coupé du monde, avec un clin d’œil à la paysanne Rose de Pinsec incarnant le bon sens terrien… ', 'subtitle_edition' => null, 'content' => '<p>Quel rapport y a-t-il entre un certain Leonardo, bâtard notoire d’un notaire toscan au prénom de Piero et natif du bourg de Vinci, une paysanne de montagne râtelant le foin de son parchet sur les hauts du hameau valaisan de Pinsec, et le «mentaliste» californien Patrick Jane connu pour son sens de l’observation et sa mémoire exceptionnelle - quel rapport sinon la même touche d’humanité liant un génie «universel» et nos humbles et très diverses personnes plus ou moins talentueuses…</p> <p>Curieux de tout, doté d’une nature généreuse et d’un physique avenant de splendide athlète au charme délicat, très observateur dès son enfance et non moins impatient de tout apprendre et comprendre en autodidacte aussi fantaisiste à ses heures que rigoureux dans ses intuitions pré-scientifiques, Léonard de Vinci (1452-1516) développa les talents rares d’un artiste complet plus soucieux de perfection que de quantité (d’où le nombre relativement restreint de ses chefs-d’œuvre) et d’un «ingénieur» polyvalent, organisateur de fêtes folles et inventeur de machines de guerre ou d’instruments de musique, entre autres projets grandioses, comme cette ville idéale dont l’urbanisme permettrait de lutter contre les épidémies…</p> <p>Le portrait de l’homme que fut Léonard transparaît au fil des pages de la biographie de Walter Isaacson, notamment à partir des milliers de pages de notes et croquis de ses carnets révélant, malgré son peu de goût pour les aveux «intimes», un être à la fois puissant et hypersensible , voire mélancolique, parfois taraudé par ses démons et conscient du Mal inhérent à la condition humaine alors qu’il célébrait, en poète et en homme de bonne volonté, le Beau et le Bien.</p> <p>Sur près de 600 pages tassées et non moins captivantes, dont la traduction française – excusez du peu! - a paru à Lausanne à l’enseigne des Presses polytechniques et universitaires romandes, la biographie de Léonard de Vinci est le fruit d’un immense travail «collaboratif» en somme comparable à celui des artisans et artistes florentins du XVe siècle travaillant à de grands ouvrages communs tel le dôme de Florence. De fait, l’historien américain combine tous les apports de l’histoire de l’art et de la connaissance scientifique accumulés à travers les siècles par ses prédécesseurs, autant que ceux des techniques actuelles en matière de recherche, pour aboutir à un récit fluide et chatoyant, riche de détails autant que de synthèses, avec une touche tout à fait personnelle et un allant communicatif.</p> <p>Mais alors quoi de commun avec Rose de Pinsec et l’enquêteur «mentaliste» de la fameuse série? J’y viens!</p> <h3><strong>Quand Rose de Pinsec disait de la télé: «Pas besoin!»</strong></h3> <p>La télévision - fenêtre sur le monde ou fabrique d’abrutis -, comme l’ordinateur - merveilleux instrument de connaissance et de communication ou puits sans fond de l’imbécillité -, ne seront jamais que ce que chacune et chacun en fait, comme il en va de notre «gestion» du confinement.</p> <p>Avant l’apparition de l’ordinateur et du smartphone dans nos vies, en 1977, Rose Monnet, solide paysanne de Pinsec répondait au réalisateur de la télévision romande Jacques Thévoz qui lui demandait, dans un reportage documentaire mémorable, si elle envisageait elle-même d’installer un jour la télévision dans son modeste mayen, d’un vigoureux et spontané «Pas besoin!»<strong>, </strong> réaction qui pourrait être interprétée comme l’expression d’une mentalité bornée, ou au contraire pleine de sagesse: j’ai la santé et mon parchet, j’ai ma vie et c’est tout bon…</p> <p><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1589526010_images4.jpeg" class="img-responsive img-fluid normal " width="257" height="371" /></p> <p>Or je ne sais pourquoi ce «pas besoin!» me poursuit, moi qui ai toujours été curieux de tout, non comme un frein ni comme une résignation piteuse mais comme un rappel de notre chance d’être au monde et un signe d’humilité et de reconnaissance. Ce «pas besoin!» s’enracine dans notre culture séculaire auto-suffisante et je le retrouve, exprimé de façon plus subtilement lyrique, dans cette page de <em>L’Institut Benjamenta</em> de Robert Walser: «Si j’étais riche, je ne voudrais nullement faire le tour de la terre. Sans doute, ce ne serait déjà pas si mal. Mais je ne vois rien de bien exaltant à connaître l’étranger au vol. Je me refuserais à enrichir mes connaissances, comme on dit. Plutôt que l’espace et la distance, c’est la profondeur, l’âme qui m’attirerait.</p> <p>Examiner ce qui tombe sous le sens, je trouverais cela stimulant. D’ailleurs je ne m’achèterais rien du tout. Je n’acquerrais pas de propriétés. Des vêtements élégants, du linge fin, un haut-de-forme, de modestes boutons de manchettes en or, des souliers vernis pointus, ce serait à peu près tout, et avec cela je me mettrais en route. Pas de maison, pas de jardin, pas de valet. (…) Et je pourrais partir. J’irais me promener dans le brouillard fumant de la rue. L’hiver et son froid mélancolique s’accorderaient merveilleusement avec mes pièces d’or».</p> <p>Pour archaïque qu’elle paraisse dans sa modestie plus ou moins jouée et rouée, cette vision de Walser, comme le «pas besoin!» de Rose de Pinsec, n’exclut pourtant ni l’humour terrien ni l’élégance, pas plus que les embrouilles de la vie. Or l’élégance de Patrick Jane, toujours en costume trois pièces et refusant de porter aucune arme, et sa gentillesse frottée d’insolence, sa bonté naturelle envers les animaux et les enfants n’ont cessé de me revenir à l’esprit en imaginant Léonard déambulant en beaux atours dans les ruelles de Florence, aimable avec tous et ne répondant point aux piques dures des jaloux ou des ombrageux à la Michel-Ange, conscient de son génie et triste sous l’agression des malveillants moralisants comme il y en a plus que jamais aujourd’hui, joyeux et non moins fragile en sa solitude éprise d’absolu esthétique.</p> <h3><strong>Une vision panoptique qui relie le détail à l’ensemble</strong></h3> <p>La vision de Léonard de Vinci, dans les petites et les grandes largeurs, relève d’une observation panoptique. Chacune et chacun sait que le Panopticon est ce dispositif précis, dans une prison, qui permet au gardien de voir d’un même point central tous les prisonniers soumis à sa surveillance, mais c’est sans cet aspect disciplinaire que je l’entends: comme une observation simultanée et aussi tourbillonnante que le sont les idées et les figures de certaines peintures de Leonardo, à commencer par son incroyable esquisse de <em>L’Adoration des mages</em>, magnifiqueement analysée par Issacson, et comme en témoignent les milliers de pages de ses carnets aux mêmes observations kaléidoscopiques.</p> <p>La singularité de l’enquêteur Patrick Jane, à part sa mémoire phénoménale, tient à sa façon de relier les traits physiques et moraux, les tics et les pensées, les moindres frémissements expressifs et les émotions d’un personnages, exactement de la même façon que Leonardo puise, dans sa connaissance approfondie de l’anatomie humaine, les liens entre tel muscle et tel mouvement, tel trait et telle expression, non point de façon platement mécanique ou linéaire mais avec les nuances de la lumière sur la chair et le jeu des transparences. Là aussi, Walter Isaacson excelle à distinguer la finesse sensible extrême des nuances apportées par Leonard de Vinci aux tableaux peints en collaboration avec ses divers maîtres plus conventionnels de touche, comme on le voit dans le <em>Baptême du Christ</em> travaillé conjointement par Verrocchio et son élève.</p> <h3><strong>Ce que les crises révèlent du Bien et du Mal</strong></h3> <p>Certaines situations sont particulièrement révélatrices en ce qui concerne le Mal, au sens biologique ou moral le plus large, et nous l’aurons vérifié à l’occasion de la pandémie en cours, comme Leonardo à pu l’observer après la peste de son temps qui a décimé la ville de Florence et lui fit jeter les bases d’une ville idéale hygiéniquement sécurisée quand il se transporta de Toscane à Milan, au début de sa stupéfiante carrière parallèle d’ingénieur-urbaniste-musicien-showman-artiste.</p> <p>Or l’intuition hypersensible et l’imagination déductive, mais aussi la révolte contre le Mal apparient aussi Leonard de Vinci et Patrick Jane impatient de punir le Méchant qui a tué sa femme et sa fille. Je sais bien que ça fait un peu vieux jeu de défendre le Bien contre le Mal, mais le choix n’a rien d’abstrait ou d’idéologique: question de survie, autant que de style, même si la comparaison des deux personnages relève,une fois encore, du grand écart apparemment loufoque. Cependant, le virus se fiche des partis et des appartenances de classes ou de races autant que des niveaux de culture: il est égalitaire au contraire de la médecine trop humaine, et s’il est exagéré de prétendre que le héros blondin d’une série américaine est égal par son mérite à l’un des plus grands génies de notre chère espèce, il est prouvé en période de crise que la lutte contre le Mal relève décidément de la ressemblance humaine, amen.</p> <p>Bref nous avons vaincu la peste et, en attendant, par delà d’autres défis viraux, la panacée transhumaniste que nous promettent les nouveaux prophètes de Dieu sait quelle ennuyeuse immortalité, la quarantaine nous a permis de lire de beaux livres et de voir ou revoir des tas de bons films et quelques séries qui valent peut-être les feuilletons que Rose de Pinsec lisait le soir avant de s’endormir sans somnifères - pas besoin!</p> <hr /> <h4><strong><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1589482331_unknown.jpeg" class="img-responsive img-fluid normal " width="259" height="389" />Walter Isaacson. Léonard de Vinci – La biographie. Traduit de l’anglais (USA) par Anne-Sophie De Clercq et Jérémie Gerlier. Quanto / Presses polytechniques et universitaires romandes, Lausanne, 2019.</strong></h4> <h4><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1589485311_1923857_18977019860_6515_n.jpg" class="img-responsive img-fluid normal " width="258" height="206" /><strong><em>Le Mentaliste.</em></strong><strong> Série télévisée de Bruno Heller en 151 épisodes et 7 saisons (2008-2013), reprise sur Prime Video.</strong></h4> <p> </p> <p> </p> <p> </p>', 'content_edition' => null, 'slug' => 'quand-leonard-de-vinci-luttait-contre-le-virus-du-mal', 'headline' => false, 'homepage' => 'col-md-12', 'like' => (int) 648, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 2348, 'homepage_order' => (int) 2588, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 3, 'person_id' => (int) 94, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [[maximum depth reached]], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 2293, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => true, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => 'NORMAL', 'readed' => null, 'subhead' => 'La chronique de JL K', 'title' => 'Voici le bon, le beau moment venu d’apprendre à parler à une pierre', 'subtitle' => 'Deux petits livres immenses signés Annie Dillard, géniale auteure américaine, nous rappellent cette évidence que la merveille du monde fut infectée de tout temps, que le Dieu parfait tolère la naissance d’enfants malformés et de massacres en son nom, enfin que nous vivons la plupart du temps aveuglés par des paupières de plomb, faute de nous éveiller comme ces gosses se levant tôt pour explorer notre terre qui, parfois, reste si jolie… ', 'subtitle_edition' => null, 'content' => '<p>Le moment que nous vivons est extraordinaire, mais ce n’est rien de le dire: il n’est que de le vivre et de mille façons diverses qui procèdent du même éveil et du même bond les yeux ouverts devant la merveille.</p> <p>«Merveille des merveilles sous le lilas fleuri, merveille: je m’éveille», écrivait le poète Jean-Pierre Schlunegger qui finit, désespéré, par se jeter d’un pont, non loin d’où nous vivons, pour se fracasser sur les rochers de la rivière, tout en bas.</p> <p>Or nous vivons tous ces jours sous la double instance de telle merveille et de son envers mortel, et ce n’est pas d’hier, nous l’oublions trop souvent, mais quelque temps nous voici comme au pied d’un mur et c’est le bon moment - le beau moment d’apprendre à voir le monde les yeux ouverts et d’apprendre à parler à une pierre.</p> <p>La merveille des merveilles est à la portée de chacune et chacun , et ma conviction s’en est trouvée confortée, l’autre jour, en notre quarantaine à tous, lorsque tel cher ami m’apprit au téléphone que tous les matins il conduisait son petit lascar Luca de dix ans et son compère Arthur de trois ans son aîné familier par son père argentin des colibris de la jungle de son pays, à la lisière des bois vaudois où ils s’enfoncent tout appareillés d’instruments d’observation et autres chasses subtiles - toute la journée rien qu’à eux, fous de ferveur curieuse et de joyeuse adulation des multiples espèces de végétaux ou d’animaux divers tels les castors d’un soir passé - en somme prédisposés à apprendre un jour a parler aux pierres à l’imitation de ce jeune Américain dans la trentaine exercant, dans sa cabane perdue en pleine nature, le rituel censé faire parler une «pierre à souhaits»…</p> <h3><strong>En osmose intime avec le cosmos</strong></h3> <p>Certains livres sont des départs et d'autres des arrivées. Certains livres ouvrent des fenêtres et d'autres explorent les multiples recoins qu'il y a dans la maison. Certains livres ne font que passer et d'autres vont rester. Certains livres ne sont que des aspects de la vie et d'autres en font la somme; et c'est un peu tout ça que je ressens en revenant sans cesse aux récits et aux réflexions, aux observations et aux intuitions émaillant l’œuvre incomparable d’Annie Dillard, à commencer par les deux recueils de fragments que représentent <em>Au présent</em> et <em>Apprendre à parler à une pierre.</em></p> <p>On est là dans la maison du monde en parcourant ce livre à la fois très physique et vertigineusement métaphysique, hyperréaliste et non moins réellement habité par l'Esprit qui s'intitule <em>Au présent</em> et conjugue les pires effrois et les plus hauts émois du cœur et de l’âme.</p> <p>Le théâtre actuel de la pandémie, avec ses milliards d’histoires individuelles bouleversantes ou affligeantes de médiocrité, ses rages et ses courages, ses bontés discrètes et ses vilenies étalées, n’est guère différent des univers explorés par Annie Dillard dans les archives illustrées des «troupes humaines» victimes des pires monstruosités congénitale (nains à têtes d’oiseaux ou nourrissons sirénomèles, entre autres produits de la fantaisie «divine» salués par autant d’hymnes par les diverses traditions religieuses) ou sur le terrain de nos contemporains chinois ou palestiniens, sur les traces du paléontologue Teilhard de Chardin aux rêveries mystiques ou le long des fossés à ciel ouvert révélant une armée de combattants chinois de terre cuite enterrés comme le furent, encore vivants, tant de sujets d’un certain empereur Qin adulé par son descendant Mao… </p> <p>Annie Dillard est ce qu’on pourrait dire une pure poétesse de la pensée dont le génie - sans le moindre des chichis de ce que j’appelle la «poésie poétique», souvent obscure et prétentieuse, ou bavarde comme les pies des réseaux sociaux -, procède par fulgurants rapprochements, parlant aussi bien de la stupéfaction qu’elle éprouve à la rencontre inopinée d’une fouine au coin d’un fourré ou à la vision de ce vieux lecteur du Coran assis contre le pilier d’une mosquée de Jérusalem filant discrètement des bonbons en papillotes aux gamins pieds nus, des prodiges émaillant les vies de saints hassidim ou d’un chevreuil piégé se débattant dans la jungle amazonienne, de la formation des déserts et des nuages ou de la naissance de tel enfant à longue queue et fentes brachiales au cou semblables à celle du requin qui nous incite à penser que «si l’homme devait appréhender pleinement la condition humaine il deviendrait fou». Et les énumérations d’aligner leurs chiffres avérés, et le rappel d’innombrables faits remarquables ou affolants (140.000 noyés ce jour-là au Bengladesh, etc.) d’alterner avec les statistiques même pas bonnes à soutirer des larmes aux pierres…</p> <p>De son propre aveu, l’auteure d’<em>Une enfance américaine</em>, de <em>Pèlerinage à Tinter Creek</em> - dont la verve naturaliste évoque si fort le «philosophe dans le bois» Henry Thoreau -, ou encore de la stupéfiante chronique de la conquête de la côte pacifique nord-ouest des States par les puritains amis ou ennemis des Indiens, intitulée <em>Les vivants </em>- fut une enfant si étonnamment étonnée et étonnante que sa propre mère se demandait ce qu’on pourrait jamais en faire dans ce monde...</p> <p>Et que faire des livres d’Annie Dillard, honneur littéraire d’une nation dont le Président est la honte; que faire de cette bonne fée dans un monde dont le personnage supposé le plus puissant présente tous les traits d’un mufle inculte, terrifiante incarnation d’un empire du vide et du faux?</p> <p>Simplement cela: les ouvrir et leur permettre de nous éveiller. </p> <p>Merveille des merveilles, les enfants: il vous reste un monde à explorer, il vous incombe d’apprendre à chanter aux pierres…</p> <hr /> <h4><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1588255173_anniedillard.jpeg" class="img-responsive img-fluid normal " width="219" height="373" /></h4> <h4><strong><img src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1588255241_christianbourgois.jpeg" class="img-responsive img-fluid normal " width="218" height="362" /></strong></h4> <h4><strong>Annie Dillard <em>Au présent</em>. Traduit de l’anglais par Sabine Porte.</strong></h4> <h4><strong>Christian Bourgois, 219p, 2001; <em>Apprendre à parler à une pierre</em>. Christian Bourgois, 202p, 2017.</strong></h4> <h4></h4>', 'content_edition' => null, 'slug' => 'voici-le-bon-le-beau-moment-venu-d-apprendre-a-parler-a-une-pierre', 'headline' => false, 'homepage' => 'col-md-6', 'like' => (int) 666, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 2303, 'homepage_order' => (int) 2543, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 3, 'person_id' => (int) 94, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [[maximum depth reached]], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' } ] $embeds = [] $images = [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) { 'id' => (int) 5276, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'BPLT_JLK_peugeot.jpg', 'type' => 'image', 'subtype' => 'jpeg', 'size' => (int) 3045253, 'md5' => '47ba8fec143411234125a7039f9d0bf3', 'width' => (int) 3067, 'height' => (int) 2379, 'date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'title' => '', 'description' => '', 'author' => '', 'copyright' => '© 2019 Bon pour la tête / Matthias Rihs', 'path' => '1551284725_bplt_jlk_peugeot.jpg', 'embed' => null, 'profile' => 'default', '_joinData' => object(Cake\ORM\Entity) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Attachments' } ] $audios = [] $comments = [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Comment) { 'id' => (int) 1566, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'status' => 'ACCEPTED', 'comment' => 'Vous nous aviez offert cette chronique sur Fb et suis ravie de la relire dans ce BPL , je n’ai pas lu “Nouvelles inquiètes” , j’aime beaucoup Buzzati et la description de l’une des nouvelles me donne vraiment envie de lire le recueil . C est toujours un réel plaisir de vous lire.', 'post_id' => (int) 1547, 'user_id' => (int) 3193, 'user' => object(App\Model\Entity\User) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Comments' }, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Comment) { 'id' => (int) 1582, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'status' => 'ACCEPTED', 'comment' => 'Envie de relire Buzzati. Merci pour votre article.', 'post_id' => (int) 1547, 'user_id' => (int) 1368, 'user' => object(App\Model\Entity\User) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Comments' } ] $author = 'JL K' $description = 'Un recueil de «Nouvelles inquiètes» s’ajoute aux multiples publications qui ont marqué le centenaire de la naissance du grand conteur italien (1906-1972), rassemblant les brèves et fascinantes histoires qu'il publiait dans le «Corriere della sera». Tout le contraire de «fake news» loufoques ou gratuites: autant de vérités profondes dégagées des faits divers ou des multiples aspects de la vie ordinaire... ' $title = 'Dino Buzzati nous éclaire par son inquiète étrangeté ' $crawler = true $connected = null $menu_blocks = [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Block) { 'id' => (int) 56, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'active' => true, 'name' => '#Trends', 'subtitle' => null, 'description' => null, 'color' => null, 'order' => null, 'position' => null, 'type' => 'menu', 'slug' => 'menu_tags', 'extern_url' => null, 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'posts' => [[maximum depth reached]], '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Blocks' }, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Block) { 'id' => (int) 55, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'active' => true, 'name' => 'Les plus lus cette semaine', 'subtitle' => null, 'description' => null, 'color' => null, 'order' => null, 'position' => null, 'type' => 'menu', 'slug' => 'menu_highlight', 'extern_url' => null, 'tags' => [[maximum depth reached]], 'posts' => [ [maximum depth reached] ], '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Blocks' } ] $menu = [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 2, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'A vif', 'menu' => true, 'menu_order' => (int) 4, 'description' => 'Lorsque nos auteurs ont envie de réagir sur le vif à un événement, des concerts aux disparitions célèbres, ils confient leurs écrits à la rubrique "A vif", afin que ceux-ci soient publiés dans l’instant.', 'slug' => 'a-vif', 'attachment_id' => '0', 'lft' => null, 'rght' => null, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 3, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Chronique', 'menu' => true, 'menu_order' => (int) 5, 'description' => '<p>La réputation des chroniqueurs de Bon pour la tête n’est plus à faire: Tout va bien, Le billet du Vaurien, la chronique de JLK, ou encore Migraine et In#actuel, il y en a pour tous les goûts!</p>', 'slug' => 'chroniques', 'attachment_id' => '0', 'lft' => null, 'rght' => null, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 4, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Lu ailleurs', 'menu' => true, 'menu_order' => (int) 5, 'description' => 'Pourquoi ne pas mettre en avant nos collègues lorsque l'on est sensibles à leur travail? Dans la rubrique « Lu ailleurs » vous trouverez des reprises choisies par la rédaction et remaniées façon BPLT.', 'slug' => 'ailleurs', 'attachment_id' => '0', 'lft' => null, 'rght' => null, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 5, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Actuel', 'menu' => true, 'menu_order' => (int) 1, 'description' => 'Bon pour la tête n’a pas vocation à être un site d’actualité à proprement parler, car son équipe prend le temps et le recul nécessaire pour réagir à l’information.', 'slug' => 'actuel', 'attachment_id' => '0', 'lft' => null, 'rght' => null, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 4 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 6, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Culture', 'menu' => true, 'menu_order' => (int) 3, 'description' => '', 'slug' => 'culture', 'attachment_id' => '0', 'lft' => null, 'rght' => null, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 5 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 7, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Vos lettres', 'menu' => true, 'menu_order' => (int) 6, 'description' => 'Bon pour la tête donne la parole à ses lecteurs, qu’ils aient envie de partager leur avis, pousser un coup de gueule ou contribuer à la palette diversifiée d’articles publiés. A vous de jouer!', 'slug' => 'vos-lettres-a-bon-pour-la-tete', 'attachment_id' => '0', 'lft' => null, 'rght' => null, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 6 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 8, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Analyse', 'menu' => true, 'menu_order' => (int) 3, 'description' => '', 'slug' => 'analyse', 'attachment_id' => '0', 'lft' => null, 'rght' => null, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 7 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 10, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Science', 'menu' => true, 'menu_order' => null, 'description' => '', 'slug' => 'sciences', 'attachment_id' => '0', 'lft' => (int) 1, 'rght' => (int) 2, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 8 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 11, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Histoire', 'menu' => true, 'menu_order' => null, 'description' => '', 'slug' => 'histoire', 'attachment_id' => '0', 'lft' => (int) 3, 'rght' => (int) 4, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 9 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 12, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Humour', 'menu' => true, 'menu_order' => null, 'description' => '', 'slug' => 'humour', 'attachment_id' => '0', 'lft' => (int) 5, 'rght' => (int) 6, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 10 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 13, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Débat', 'menu' => true, 'menu_order' => null, 'description' => '', 'slug' => 'debat', 'attachment_id' => '0', 'lft' => (int) 7, 'rght' => (int) 8, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 11 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 14, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Opinion', 'menu' => true, 'menu_order' => null, 'description' => '', 'slug' => 'opinion', 'attachment_id' => '0', 'lft' => (int) 9, 'rght' => (int) 10, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' }, (int) 12 => object(App\Model\Entity\Category) { 'id' => (int) 15, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'Reportage', 'menu' => true, 'menu_order' => null, 'description' => '', 'slug' => 'reportage', 'attachment_id' => '0', 'lft' => (int) 11, 'rght' => (int) 12, 'parent_id' => null, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Categories' } ] $tag = object(App\Model\Entity\Tag) { 'id' => (int) 185, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'name' => 'la chronique de jlk', 'slug' => 'la-chronique-de-jlk', '_joinData' => object(Cake\ORM\Entity) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ '*' => true, 'id' => false ], '[dirty]' => [], '[original]' => [], '[virtual]' => [], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [], '[invalid]' => [], '[repository]' => 'Tags' }include - APP/Template/Posts/view.ctp, line 147 Cake\View\View::_evaluate() - CORE/src/View/View.php, line 1435 Cake\View\View::_render() - CORE/src/View/View.php, line 1393 Cake\View\View::render() - CORE/src/View/View.php, line 892 Cake\Controller\Controller::render() - CORE/src/Controller/Controller.php, line 791 Cake\Http\ActionDispatcher::_invoke() - CORE/src/Http/ActionDispatcher.php, line 126 Cake\Http\ActionDispatcher::dispatch() - CORE/src/Http/ActionDispatcher.php, line 94 Cake\Http\BaseApplication::__invoke() - CORE/src/Http/BaseApplication.php, line 256 Cake\Http\Runner::__invoke() - CORE/src/Http/Runner.php, line 65 App\Middleware\IpMatchMiddleware::__invoke() - APP/Middleware/IpMatchMiddleware.php, line 28 Cake\Http\Runner::__invoke() - CORE/src/Http/Runner.php, line 65 Cake\Routing\Middleware\RoutingMiddleware::__invoke() - CORE/src/Routing/Middleware/RoutingMiddleware.php, line 164 Cake\Http\Runner::__invoke() - CORE/src/Http/Runner.php, line 65 Cors\Routing\Middleware\CorsMiddleware::__invoke() - ROOT/vendor/ozee31/cakephp-cors/src/Routing/Middleware/CorsMiddleware.php, line 32 Cake\Http\Runner::__invoke() - CORE/src/Http/Runner.php, line 65 Cake\Routing\Middleware\AssetMiddleware::__invoke() - CORE/src/Routing/Middleware/AssetMiddleware.php, line 88 Cake\Http\Runner::__invoke() - CORE/src/Http/Runner.php, line 65
Warning: file_put_contents(/data01/sites/bonpourlatete.com/dev/bonpourlatete.com/logs/debug.log) [function.file-put-contents]: failed to open stream: Permission denied in /data01/sites/bonpourlatete.com/dev/bonpourlatete.com/vendor/cakephp/cakephp/src/Log/Engine/FileLog.php on line 133
VOS RÉACTIONS SUR LE SUJET
2 Commentaires
@Gio 02.03.2019 | 18h58
«Vous nous aviez offert cette chronique sur Fb et suis ravie de la relire dans ce BPL , je n’ai pas lu “Nouvelles inquiètes” , j’aime beaucoup Buzzati et la description de l’une des nouvelles me donne vraiment envie de lire le recueil . C est toujours un réel plaisir de vous lire.»
@Sidonie 10.03.2019 | 12h38
«Envie de relire Buzzati. Merci pour votre article.»