Culture / Corinne Desarzens est tout ce qu’elle rencontre. Sauf une endive

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Les odeurs, les sons d’une langue étrangère, les voyages, les amours ou les citations: tout ça et plus encore, passionnément. Elle cueille, recueille, part en parenthèse, revient avec des dessins et des histoires. Assemble. Pas tout à fait. Des récits riches en épis. Elle écrit et vit comme on saute d’une falaise. Et, dans la descente, de phrases en images, elle raccommode le parachute.*
«Ma mère aurait voulu nous enterrer dans le sable comme des endives». Corinne Desarzens le dit souvent quand elle parle de son enfance, de sa famille et de la plage de Sète. De ce bord de mer où elle a grandi, sans craindre la lumière, le soleil ou le sel. Elle.
Elle aurait pu ressembler à une endive, blonde, mince et pâle. Elle est blonde et mince, mais c’est une flamme. Si vive, qu’elle semble en perpétuel mouvement. Silhouette filante. Pensée qui l’est aussi, filante et bondissante, d’une histoire à l’autre, passant d’une citation (comment les retient-elle?) à la fulgurance et la précision d’un détail, qui n’en est souvent pas un. Elle parle comme elle écrit, entre sensualité et poésie. Jamais gentille ou convenue, toujours au-delà. «Je suis passionnée par les odeurs, je les collectionne. Connaissez-vous le caca de zèbre? Il y a tout dedans. Comme dans l’odeur de la mer.»
Evidemment, elle n’écrit pas droit. Et dans un pays qui aime les tableaux noirs et les maîtres d’école, elle surprend, détonne. Etonne, au mieux, dans les soupers ou les librairies. Pour la rencontrer, la connaître au moins un peu, il faut la lire, l’écouter, comme on nage dans les vagues: suivre le mouvement de fond, mais aussi l’écume. Se perdre parfois entre les deux, se laisser submerger, savoir qu’on reprendra pieds. Ici ou là. Avec le tournis, peut-être, mais après avoir senti la houle et savouré les étincelles.
Monique et Joszef, l’amour au long cours
Il en est ainsi avec Le soutien-gorge noir. Une histoire d’amour au long cours. Celle de Monique et Jozsef, ou Jozsef et Monique, qui se sont écrit pendant 55 ans. Elle était laborantine. N’aimait pas la lumière. Lui faisait partie de ces types de l’Est dérangeant ceux d’ici, «jaloux de ces étrangers, parce qu’ils étaient passés par le feu. Même leurs pas laissaient dans l’air une odeur de fumée». Presque un western, déplacé en pays vaudois, un eastern… Mais elle ne s’arrête pas là, Corinne Desarzens. Elle ne s’arrête jamais à la première impression. Leurs pas laissent donc une odeur de fumée, mais aussi «de parchemin, de cardamome». Les gars d’ici étaient jaloux parce qu’éblouis: «Ces gens des pays de l’Est qui arrivaient chez eux après la guerre avaient de la classe. Des étrangers trop bien élevés. Ils avaient des manières parfaites. Cette politesse désarmante de grands seigneurs qu’ont certains garçons qui circulent dans les wagons-restaurants».
Avec Le Gris du Gabon, puis Un roi, Corinne Desarzens évoquait les exilés d’aujourd’hui, commençant aussi par décrire leur présence, leur prestance. Et le bouleversement d’une femme, d’une vie, face à des requérants d’asile érythréens. Avant la découverte de l’Ethiopie, où elle est partie pour comprendre ou au moins raconter leur monde, cet ailleurs, qu’ils fuient et qui l’interpelle, elle, l’attire. Avant d’écrire Le soutien-gorge noir, Corinne Desarzens est aussi partie, en Hongrie, à la rencontre de Jozsef, l’homme qui s’en est retourné, s’est comme replié, chez lui, pour ne jamais cesser d’écrire. A l’amour qu’il avait laissé ici. Monique lui avait dit non: «C’était un prince et elle ne désirait qu’un mari». Monique c’était sa mère.
Corinne Desarzens aime dire: «La vie, c’est les choses qui ont existé, qui se sont produites, peuvent être vérifiées, mais aussi, en miroir et tout aussi importantes, les choses qu’on aurait pu faire». Alors, évidemment, Jozsef et son histoire hongroise... Même si c’est le miroir de la vie de sa mère et non directement de la sienne, comme ce fut le cas en Ethiopie, elle le traverse, le miroir, à la rencontre des vies qui se croisent. Corinne Desarzens est fascinée par les points où se rejoignent les destinées, dans la vie comme dans la géométrie.
A Budapest, elle est accrochée par des mots hongrois, comme elle le fut alors par le tigrinia. Des mots hongrois «qui ont l’air de buissons d’épines, hérissés d’accents penchés et de circonflexes à l’envers. Quelque chose d’ajouté, de bizarre, comme la rouille sur le métal, le lichen sur un rocher.» Elle aime les mots, Corinne Desarzens, leur son mais aussi leur posture sur le papier. Et son parcours littéraire est aussi riche que son vocabulaire: c’est un feu d’artifice sans artifice. Où qu’elle soit, quoi qu’elle vive, regarde, goûte, entende, elle pêche des mots, des images, des bribes d’histoires. Sirènes d’Engadine, Dévorer les pages, Je suis tout ce que je rencontre ou Je voudrais être l’herbe de cette prairie: des titres qui la racontent. C’est sans doute parce qu’elle est tout ce qu’elle rencontre et qu’elle entre dans une prairie, comme dans une langue étrangère, un fruit, une odeur, que ses parenthèses partent en tout sens, avec tous les sens. Mais pas n’importe comment.
Danger: écriture
Toujours, il y a l’amorce, puissante, puis l’échappée dans un détail, surgi comme un éclair. Ou inversément. Toujours la surprise, avant le retour rapide. Evidemment, ça bouscule. Quand un chapitre commence comme ça: « Ils allaient s’écrire toute leur vie. Pendant cinquante-cinq ans. Des lièvres au pelage rendu, en taille douce, poil à poil. Des orchestres d’anges avec un halo à la feuille d’or derrière chacune de leurs têtes. Des chevreuils au cul blanc, en forme de cœur. Des grappes de piments luisants à piquer la langue rien que de les regarder. Des vignes au point de croix. Des pietà brodées. Tous ces timbres.»
Tout y est non? L’égarement et l’émotion en bascule. Jusqu’au rire ou aux larmes. Comme dans la vie. Parce qu’il y a les romans, les récits et la vie. Dans la famille de Corinne Desarzens, il est des drames à répétition. Des dates d’anniversaires qui sont aussi celles d’un décès. Cette vie, ni romance ni romantique, elle l’évoque, parfois, comme dans Poisson-tambour après la disparition d’un de ses frères jumeaux. Dans Le soutien-gorge noir, aussi, mais l’éclairage est oblique. Avec Jozsef, elle parle de cinéma italien pour dire l’amour qui aurait pu...
«Les points de suspension sont les empreintes que laissent les mots partis sur la pointe des pieds.» Corinne Desarzens cite Nabokov en épigraphe. Son père, Jean-Pierre, le mari de Monique, faisait des listes, d’un peu tout, il parlait bien, en société, mais n’expliquait pas tout. Elle me l’a raconté un jour. Cela lui a peut-être donné le sens des mots et l’envie de raconter ou de demander. Je pense à cela, en lisant les mots de Jozsef, l’amoureux hongrois: «Seules ont de l’intérêt les questions sans réponse». Il lui apprend à faire reculer ses questions. «Les questions insiste-t-il, tu dois prendre soin d’elles comme des fleurs, sinon elles se fanent et ça donne des gens tout pourris de l’intérieur.»
Corinne Desarzens n’est plus journaliste depuis longtemps. Dans la vie, comme dans l’écriture, ses questions ne sont jamais attendues. Elles surgissent soudain dans la conversation, comme des fleurs dans les failles du pavement. Les drames ne donnent pas de talent. Mais le libèrent, parfois, comme un barrage qui finit par lâcher, laissant jaillir le verbe, danser le pinceau.
Afrique, Hongrie, Albanie
A vif, toujours, vive, oh oui, Corinne Desarzens est tout ce qu’elle rencontre sauf une endive, protégée de tout, même du soleil. Quand elle part en Afrique, en Hongrie, à la rencontre des Sirènes d’Engadine, elle vit comme on saute de la falaise. Elle aime cette image empruntée à James Cameron et Richard Branson… Un cinéaste, un entrepreneur: elle ne chipote pas, ne limite pas son inspiration aux sources estampillées littéraires. Elle vit donc et écrit, comme on saute de la falaise. Et elle raccommode le tout avec des mots pendant la chute. Alors ça va vite, au fil des pages, ses images, ses fulgurances.
Voici un instant de gouffre partagé, quand son père, Jean-Pierre, et Jozsef, l’autre, partagent un vin hongrois. Des années après leur demande en mariage parallèle à Monique. Le vin a le goût de tous les fruits noirs de l’été. «Avec en finale un goût de rose, de rose, de rose. De rose. Un goût de chagrin et de vieux jardin. – Nous avons bu votre femme, avait dit Jozsef et ses yeux fixaient son hôte d’un air interrogateur. – Notre femme, précisa Jean-Pierre qui observa un silence.»
Corinne Desarzens connaît «la nostalgie du possible». Et «les cailloux des jours», quand le deuil est immense. Ses récits inspirés de l’intime se répondent étrangement au fil des années, d’Aubeterre à Un Roi jusqu’au Soutien-gorge noir. Sœur et mère de jumeaux elle dit que «souvent chez nous les choses vont par deux». Mais c’est au présent qu’elle le voit et le vit. Avec, souvent, en création puis en parution simultanée, un autre livre. Cette fois-ci tout à fait différent, apparemment.
Parce qu’il y a celle qui cherche dans les destinées croisées. Et, en parallèle, celle qui semble se contenter de voyager, tous les sens en éveil. De l’Engadine à l’Arménie, elle a su lire les façades, les paysages et les visages. Elle ne croit pas au hasard, donc ce n’est pas un hasard si, plus ou moins en même temps que la Hongrie, elle découvrait l’Albanie. Un nouvel horizon où Corinne Desarzens se prend pour Boucle d’or chez les ours, quand, arrivée un soir avec un groupe, dans une grande maison, entourée d’un marécage, derrière Shkodra, le générateur lâche: «Surgissent deux jeunes hommes et leur mère, espiègle, de 73 ans, pour nous guider vers des chambres avec au moins trois lits, parfois cinq, par personne». Après le repas, elle se retrouve évidemment en cuisine, à sa demande, pour échanger quelques mots d’albanais. Dont visage, forêt, fossette…
Quand elle voyage Corinne Desarzens goûte les mots comme des friandises et joue à la marelle dans les alphabets. Mais les mots de ces langues nouvelles qu’elle pénètre au fil des ans, elle en prépare toujours quelques uns dans ses bagages. Avant les premiers échanges. Ces mots, elle les offrira à ses hôtes, émus et ravis par cette blonde apparition, si différente des touristes, jusque dans le choix du vocabulaire de base: fossette!
Captivante Edith Durham
La femme plume se dit parfois sorcière. Pour l’avoir croisée dans les Balkans, je sais que ses questions, sa passion lui ouvrent les portes et libèrent les histoires longtemps retenues. « Honorée Mademoiselle » est ainsi probablement le premier livre «albanais». Elle y présente un choix de textes d’Edith Durham. Une Anglaise débarquée à 37 ans, en 1900, dans des confins, qui de Dubrovnik à Skopje, du Kosovo au Monténégro, de la Macédoine à l’Albanie, vont la captiver, au point d’y revenir tant et tant. Ils vont aussi la libérer, l’ex-vieille fille. Confidente du roi du Monténégro puis correspondante de guerre, elle apprendra à monter à cheval et à sentir ses tripes, pour écrire des textes qui ont enflammé Corinne Desarzens. Elle les a découverts dans un recueil rouge, au fond d’une librairie de Tirana.
«Aux dessinateurs de frontières», «La secte de la seiche mystique», «Au pays du passé vivant», «l’âme de la guerre»: les chapitres d’Edith Durham disent les Balkans d’il y a un siècle vus par une Britannique. Avant Tintin, mais entre le récit d’aventure exotique, les notes ethnologiques, diplomatiques et l’envolée surréaliste ou satirique, ces écrits surgissent aujourd’hui en français. Corinne Desarzens les a choisis et traduits en libertaire littéraire. Passionnée désormais par ces confins, qu’elle n’a pas encore fait siens. Mais qui l’attirent comme une eau tourbillonnante.
Pour Budapest, et autre, elle a écrit: «Parcourir une ville en voulant contourner la déception exige de lever la tête, de faire comme si on se promenait au bord de la mer, le menton vers le haut en respirant par les yeux ». Pour ne rien perdre des façades et oublier ce qui se vend en bas. L’Albanie, elle la présente comme «un coffre mystérieux, avec une plume d’aigle dedans, la photo d’un agent double communiste et le sceptre d’Ottokar… Le dernier secret d’Europe». Ses yeux brillent. Elle trouvera les mots pour aller plus loin.
Couilles de velours
Elle trouve toujours les mots. Pour tout. Pour «Couilles de velours», aussi. Un recueil le nez en l’air et ailleurs, fin et truculent. Troisième parution de saison! De petits textes et scènes, pour saluer «la trinité de chair», le dindon, la grappe, cette membrane qui mérite un nom «albuginée». Décrire, avec le geste pour mieux voir: «Mon index suit la ligne qui court sur ces fruits souples, ces petits sacs malléables emplis de billes glissantes ont la texture des câpres, du caviar qui roule sans s’écraser, de la figue et de la grenade, leurs grains confondus.» Là aussi, la beauté et le rire, face au «double zéro génital. Jumeaux poilus bien plus grands que le nez des personnages de Reiser». La tendresse pour le «duo timide gaufré d’un labyrinthe» et la passion surgie face à celui qui sait jouer avec le béton, le frotter, le talocher. «Par les étapes de la coloration du béton, tu avais décrit la montée du plaisir, en donnant d’autres noms à ses instruments». Elle ose Corinne Desarzens. Pas seulement crue, avec celui qui fait surgir la couleur de ses instruments de maçonnerie: «Tu étais un pont bleu au dessus du précipice vert. J’étais un pont vert au dessus du précipice bleu.»
Des rencontres, encore. Celle de rois mages à la peau sombre, celle d’un vin velouté. Ni coing, ni prune, pas de sous-bois, non, ce vin mérite mieux, «Samteier », couilles de velours. La trouvaille est de Monique, la mère de Corinne, l’amour de Jozsef, celle au soutien-gorge noir. Desarzens ose et joue de l’écho. Une triple parution pour la poésie en prose.
* Cet article de Sonia Zoran a été écrit pour la toute nouvelle revue La cinquième saison dont le 1er numéro est à paraître en octobre (lire encadré ci-dessous)
Couilles de velours, éd. d’autre part, 2017.
Honorée Mademoiselle, L’Aire, 2017.
Le soutien-gorge noir, L’Aire, 2017.
Dévorer les pages, éd. d’autre part, 2013.
Un roi, Grasset & Fasquelle, 2011.
Le gris du Gabon, L’Aire, 2010.
Poisson-tambour, Bernard Campiche éditeur, 2006.
Sirènes d’Engadine, éd. du Laquet, 2003.
Je suis tout ce que je rencontre, L’Aire 2002.
Je voudrais être l’herbe de cette prairie, L’Aire, 2002.
La cinquième saison, une nouvelle revue littéraire
Foisonnante, la littérature romande se heurte souvent à l’indifférence – voire pire, à la complaisance – de médias en crise. Tous les livres ne se valent pas, tout ne mérite pas attention, mais encore faut-il pouvoir le dire. Née d’enthousiasmes et d’inquiétudes, La cinquième saison se propose de combler le vide et de brasser les cartes, et pourquoi pas de bousculer les auteurs? Paraissant quatre fois par an, elle veut concilier l’exigence et la légèreté pour offrir aux lettres romandes la scène qu’elles méritent: un espace de création, de jeu, de critique et de débat – un défouloir constructif. Xochitl Borel
Un financement participatif pour la revue est en cours et c'est ici.
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Elle ne croit pas au hasard, donc ce n’est pas un hasard si, plus ou moins en même temps que la Hongrie, elle découvrait l’Albanie. Un nouvel horizon où Corinne Desarzens se prend pour Boucle d’or chez les ours, quand, arrivée un soir avec un groupe, dans une grande maison, entourée d’un marécage, derrière Shkodra, le générateur lâche: «Surgissent deux jeunes hommes et leur mère, espiègle, de 73 ans, pour nous guider vers des chambres avec au moins trois lits, parfois cinq, par personne». Après le repas, elle se retrouve évidemment en cuisine, à sa demande, pour échanger quelques mots d’albanais. Dont visage, forêt, fossette… </p><p> Quand elle voyage Corinne Desarzens goûte les mots comme des friandises et joue à la marelle dans les alphabets. Mais les mots de ces langues nouvelles qu’elle pénètre au fil des ans, elle en prépare toujours quelques uns dans ses bagages. Avant les premiers échanges. Ces mots, elle les offrira à ses hôtes, émus et ravis par cette blonde apparition, si différente des touristes, jusque dans le choix du vocabulaire de base: fossette! </p><h3>Captivante Edith Durham</h3><p>La femme plume se dit parfois sorcière. Pour l’avoir croisée dans les Balkans, je sais que ses questions, sa passion lui ouvrent les portes et libèrent les histoires longtemps retenues. « Honorée Mademoiselle » est ainsi probablement le premier livre «albanais». Elle y présente un choix de textes d’Edith Durham. Une Anglaise débarquée à 37 ans, en 1900, dans des confins, qui de Dubrovnik à Skopje, du Kosovo au Monténégro, de la Macédoine à l’Albanie, vont la captiver, au point d’y revenir tant et tant. Ils vont aussi la libérer, l’ex-vieille fille. Confidente du roi du Monténégro puis correspondante de guerre, elle apprendra à monter à cheval et à sentir ses tripes, pour écrire des textes qui ont enflammé Corinne Desarzens. 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Pensée qui l’est aussi, filante et bondissante, d’une histoire à l’autre, passant d’une citation (comment les retient-elle?) à la fulgurance et la précision d’un détail, qui n’en est souvent pas un. Elle parle comme elle écrit, entre sensualité et poésie. Jamais gentille ou convenue, toujours au-delà. «Je suis passionnée par les odeurs, je les collectionne. Connaissez-vous le caca de zèbre? Il y a tout dedans. Comme dans l’odeur de la mer.»</p><p> Evidemment, elle n’écrit pas droit. Et dans un pays qui aime les tableaux noirs et les maîtres d’école, elle surprend, détonne. Etonne, au mieux, dans les soupers ou les librairies. Pour la rencontrer, la connaître au moins un peu, il faut la lire, l’écouter, comme on nage dans les vagues: suivre le mouvement de fond, mais aussi l’écume. Se perdre parfois entre les deux, se laisser submerger, savoir qu’on reprendra pieds. Ici ou là. Avec le tournis, peut-être, mais après avoir senti la houle et savouré les étincelles. </p><h3>Monique et Joszef, l’amour au long cours</h3><p> Il en est ainsi avec <em>Le soutien-gorge noir</em>. Une histoire d’amour au long cours. Celle de Monique et Jozsef, ou Jozsef et Monique, qui se sont écrit pendant 55 ans. Elle était laborantine. N’aimait pas la lumière. Lui faisait partie de ces types de l’Est dérangeant ceux d’ici, «jaloux de ces étrangers, parce qu’ils étaient passés par le feu. Même leurs pas laissaient dans l’air une odeur de fumée». Presque un western, déplacé en pays vaudois, un eastern… Mais elle ne s’arrête pas là, Corinne Desarzens. Elle ne s’arrête jamais à la première impression. Leurs pas laissent donc une odeur de fumée, mais aussi «de parchemin, de cardamome». Les gars d’ici étaient jaloux parce qu’éblouis: «Ces gens des pays de l’Est qui arrivaient chez eux après la guerre avaient de la classe. Des étrangers trop bien élevés. 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Monique c’était sa mère.</p><p>Corinne Desarzens aime dire: «La vie, c’est les choses qui ont existé, qui se sont produites, peuvent être vérifiées, mais aussi, en miroir et tout aussi importantes, les choses qu’on aurait pu faire». Alors, évidemment, Jozsef et son histoire hongroise... Même si c’est le miroir de la vie de sa mère et non directement de la sienne, comme ce fut le cas en Ethiopie, elle le traverse, le miroir, à la rencontre des vies qui se croisent. Corinne Desarzens est fascinée par les points où se rejoignent les destinées, dans la vie comme dans la géométrie. </p><p> A Budapest, elle est accrochée par des mots hongrois, comme elle le fut alors par le <em>tigrinia</em>. Des mots hongrois «qui ont l’air de buissons d’épines, hérissés d’accents penchés et de circonflexes à l’envers. Quelque chose d’ajouté, de bizarre, comme la rouille sur le métal, le lichen sur un rocher.» Elle aime les mots, Corinne Desarzens, leur son mais aussi leur posture sur le papier. Et son parcours littéraire est aussi riche que son vocabulaire: c’est un feu d’artifice sans artifice. Où qu’elle soit, quoi qu’elle vive, regarde, goûte, entende, elle pêche des mots, des images, des bribes d’histoires. <em>Sirènes d’Engadine</em>, <em>Dévorer les pages</em>, <em>Je suis tout ce que je rencontre</em> ou <em>Je voudrais être l’herbe de cette prairie</em>: des titres qui la racontent. C’est sans doute parce qu’elle est tout ce qu’elle rencontre et qu’elle entre dans une prairie, comme dans une langue étrangère, un fruit, une odeur, que ses parenthèses partent en tout sens, avec tous les sens. Mais pas n’importe comment. </p><h3> Danger: écriture </h3><p>Toujours, il y a l’amorce, puissante, puis l’échappée dans un détail, surgi comme un éclair. Ou inversément. Toujours la surprise, avant le retour rapide. Evidemment, ça bouscule. Quand un chapitre commence comme ça: « Ils allaient s’écrire toute leur vie. Pendant cinquante-cinq ans. 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Avec Jozsef, elle parle de cinéma italien pour dire l’amour qui aurait pu...</p><p> «Les points de suspension sont les empreintes que laissent les mots partis sur la pointe des pieds.» Corinne Desarzens cite Nabokov en épigraphe. Son père, Jean-Pierre, le mari de Monique, faisait des listes, d’un peu tout, il parlait bien, en société, mais n’expliquait pas tout. Elle me l’a raconté un jour. Cela lui a peut-être donné le sens des mots et l’envie de raconter ou de demander. Je pense à cela, en lisant les mots de Jozsef, l’amoureux hongrois: «Seules ont de l’intérêt les questions sans réponse». Il lui apprend à faire reculer ses questions. «Les questions insiste-t-il, tu dois prendre soin d’elles comme des fleurs, sinon elles se fanent et ça donne des gens tout pourris de l’intérieur.» </p><p><span style="font-size: 1.6rem; color: inherit;">Corinne Desarzens n’est plus journaliste depuis longtemps. Dans la vie, comme dans l’écriture, ses questions ne sont jamais attendues. 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Passionnée désormais par ces confins, qu’elle n’a pas encore fait siens. Mais qui l’attirent comme une eau tourbillonnante. </p><p>Pour Budapest, et autre, elle a écrit: «Parcourir une ville en voulant contourner la déception exige de lever la tête, de faire comme si on se promenait au bord de la mer, le menton vers le haut en respirant par les yeux ». Pour ne rien perdre des façades et oublier ce qui se vend en bas. L’Albanie, elle la présente comme «un coffre mystérieux, avec une plume d’aigle dedans, la photo d’un agent double communiste et le sceptre d’Ottokar… Le dernier secret d’Europe». Ses yeux brillent. Elle trouvera les mots pour aller plus loin. </p><h3>Couilles de velours </h3><p> Elle trouve toujours les mots. Pour tout. Pour «Couilles de velours», aussi. Un recueil le nez en l’air et ailleurs, fin et truculent. Troisième parution de saison! De petits textes et scènes, pour saluer «la trinité de chair», le dindon, la grappe, cette membrane qui mérite un nom «albuginée». 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En mai, c’est le pic des travaux et rénovations. Il faut finir vite, les touristes ne doivent pas être dérangés. Ils viennent chercher le calme. Pour s’y agiter autrement.</p> <p>En pleine saison, le matin, à la pointe de l’île, on se croit au bord d’une route: les yachts passent par dizaines pour rejoindre les îlots du large. Les virées des jet-ski suivront dans la journée. Au loin. L’île est heureusement protégée par des limitations de vitesse et le fond sonore des cigales et des petites vagues poussées par le <em>maestral</em>. Le soir, quand les martinets font des virées et crient sur les toits, les enfants ambiancent le port: foot, trottinette, cache-cache, courate. Remplacés ensuite, sur les terrasses, par des éclats de voix, et, parfois, les chants d’une <em>klapa</em> improvisée. Les insulaires aiment cet art local de la chorale: «Nous sommes comme les grillons, on chante plus fort quand la nuit est chaude».</p> <p>L’été c’est une bande-son qui va crescendo. </p> <p> </p> <p><strong>Bain de lumière. </strong>En été, une île de Dalmatie, c’est un peu de blanc et d’or, dans un bain turquoise.</p> <p>Blancs, les rochers et les maisons de pierre, aux toits de tuile rouge brique. Dorée la colline quand les coquelicots et les herbes ont brûlé. Vert, quand même, les pins et les oliviers s’il y en a. Et turquoise, <em>of course</em>, la mer, près du bord. Mais l’Adriatique est aussi bleu foncé, violette ou argent, suivant le vent, surtout hors-saison. Et en hiver, les ruelles sont teintées de beige, grisâtre ou verdâtre, quand il a plu longtemps.</p> <p>Si les Grecs peignent avec soin leurs terrasses en bleu et blanc, en Croatie, les goûts sont souvent rustiques: bois vernis et massif, parasols avec pub pour la bière. Ici, c’est la lumière qui lisse le décor. Lessive les ombres sur les roches et les maisons. Dore le bleu de l’aube. Sature le blanc aveuglant de midi et lâche un voile rose le soir.</p> <p>L’été c’est la réalité revue en technicolor </p> <p> </p> <p><strong>Ail, pastèque et dorade. </strong>Si les îles font rêver sur papier glacé, elles inquiètent souvent les vacanciers. Au point qu’ils préfèrent souvent s’entasser sur la côte. Pour les rassurer, les sites de location d’appartements indiquent parfois la distance jusqu’à la prochaine pharmacie. Ce qui ne veut rien dire, en mer. Et sans l’horaire des bateaux. S’il y en a.</p> <p>C’est comme ça, plus une île est petite, plus elle est… insulaire. Donc riche en vues sur le bleu et pauvre pour le reste. Sauf en été: sur mon île de deux kilomètres carrés, des légumes et poissons frais arrivent tous les matins. Un marchand se pointe en barque avec salades, pastèques et tresses d’ail. Et deux jeunes font de même avec les dorades, crevettes et sardines attrapées au retour d’un chalutier, dans un port voisin. Grâce à cette organisation, l’ascétisme devient divinement simple. Rien à voir avec les dizaines de personnes groupées autour du seul pêcheur du village, en automne, quand il a pu ressortir, enfin, après une semaine de gros temps.</p> <p>L’été c’est jouer à la vie insulaire. </p> <p> </p> <p><strong>L’autre Europe…</strong> Cette année, un sale doute s’exprime, jusque dans les îles: l’Europe compte-t-elle des consommateurs de seconde zone?</p> <p>«Je dois vite changer la petite, tout a débordé», m’a dit un jour Ivana. «Tu sais, chez nous les Pampers sont différents, on dirait qu’ils ont des creux ou des trous dans le rembourrage. Les produits vendus ici sont de moins bonne qualité et on commence à s’en rendre compte». Sa fille est très grande pour ses trois mois, mais c’était peut-être bien la bonne taille. A l’Est, les journaux ont multiplié depuis l'hiver les enquêtes, tests et commentaires, sur certains produits de marque des multinationales: ils seraient légèrement différents, moins bons, mais plus chers dans les anciens pays communistes. En Slovaquie, Bulgarie et maintenant en Croatie, la rumeur enfle. Au point de susciter des interventions au Parlement européen. Le premier ministre bulgare parle même d’apartheid et accuse les multinationales de traiter l’Est comme la poubelle de l’Europe.</p> <p>Je ne sais pas encore si les langes ont des fuites, les sodas plus d’édulcorants, les conserves moins de viande. J’ai déjà jeté des olives importées d’Espagne, totalement immangeables et des boîtes de thon contenant une purée orange. En me disant que j’avais mal choisi. Parano ou vrai scandale, on le saura dans quelques mois si l’UE prend l’affaire au sérieux. Reste qu’en Croatie, alors que la plus grande entreprise agro-alimentaire, Agrokor, est en déroute, les produits des multinationales, y compris des produits laitiers de base, font exploser les dépenses d’une famille. Surtout avec un smic et des retraites autour des 400 euros.</p> <p>Mais l’été, on ravale ses soucis. En regardant les rayons où surgissent les truffes d’Istrie et les bouteilles de Champagne. L’été on fait comme si. </p> <p> </p> <p><strong>… entre deux mondes. </strong>En Croatie, des supermarchés à l’immobilier, tous les prix ont grimpé sans interruption depuis la fin de la guerre, il y a plus de vingt ans. Aujourd’hui ils avoisinent ou dépassent ceux pratiqués en Suisse. Pas les salaires. Surtout pas dans une île où ils sont nombreux, ceux qui n’ont que des temps partiels ou saisonniers.</p> <p>Mais certains insulaires parviennent encore à vivre en quasi-autarcie. Ils ont un potager, font des conserves, accumulent des réserves de figues. Ils vont à la pêche. Produisent leur huile d’olive, leur vin, leur liqueur. Savent réparer un bateau ou construire un mur de pierres. Et ils s’entraident. Dans cette économie qui n’est pas tant parallèle qu’essentielle, on vit presque sans argent: quand une vieille a trop de concombres, elle en donne au voisin. A l’occasion elle recevra un poisson.</p> <p>Et certains biens locaux, eux aussi essentiels, semblent résister et demeurer accessibles pour tous. A la boulangerie de l’île, le pain coûte un franc le kilo, le croissant géant 50 centimes. A la pizzeria, le café – sacré, le café au café – vaut 90 centimes. Et, vendu au port, le kilo de sardines plafonne à 3 francs.</p> <p>J’ai essayé de demander au boulanger et au pêcheur, comment ils faisaient pour vivre, s’acheter un jean, payer un loyer: «Pourquoi? Vous trouvez que ce n’est pas assez cher?» En insistant, j’ai obtenu un sourire et un haussement d’épaules: «C’est comme ça, faut que les gens d’ici puissent se nourrir. Quand il n’y a plus de touristes, il reste qui?».</p> <p>L’été, les insulaires préparent l’hiver. </p> <p> </p> <p><strong>Privatiser la mer?</strong> S’il y a près de 700 îles en Croatie, et plus de 400 îlots et récifs, il vaut mieux savoir nager et plonger. Les plages sont rares. Les baies abritées et en pente douce aussi. Du coup elles sont surpeuplées. Vu autrement, elles valent de l’or. Ou des espèces précieuses, pour le gouvernement et de potentiels investisseurs. Un gouvernement qui espère faire passer une loi pour attribuer des concessions privées sur la côte et dans les îles.</p> <p>Des concessions, il en a déjà, ça s’est fait, discrètement, par-ci, par-là, depuis la fin de la guerre. A Dubrovnik, ou ailleurs. Devant les restaurants et les hôtels, des pontons privés et des plages surveillées ont surgi. Des îles ont été vendues ou privatisées. Mais en gros, tout le monde a encore le droit de se baigner partout. Voire d’accoster si nécessaire. C’est la loi de la mer et des tempêtes. Mais ce printemps, une concession a failli être attribuée pour la célébrissime plage de Bol, sur l’île de Brac. C’est une pointe de sable blond (<em>Zlatni Rat</em>) variant suivant le vent et les courants, qui fut apparemment promise à une société, basée à Zagreb et… dépourvue d’employés! Mais la mobilisation locale fut telle, avec des manifestations colorées, des serviettes de bains installés par centaines et de nombreux échos sur internet, que l’Etat a fait marche arrière. Depuis, le mouvement des îles (<a href="https://www.otoci.eu"><em>pokret otoka </em>ou<em> the island movement</em>)</a> donne de la voix. Avec des manifestations un peu partout début juin, au point de parvenir à faire repousser le projet de loi, dont le vote était prévu juste avant l’été. Jusqu’à quand? La question agite les réseaux sociaux*.</p> <p>C'est l’esprit de l’Adriatique insulaire qui est en jeu.</p> <p>Si les plages et baies sont surpeuplées et prises d’assaut, partout de petits pontons ou de mini terrasses de béton coulé entre les rochers animent la rive. Ces petits espaces interdisant de facto le surnombre sont parfaits. Ils appartiennent à quelqu’un, celui qui les a construits, celui dont la maison est posée au bord de l’eau. Mais contrairement à ce qui se passe autour Léman, les rives sont en principe ouvertes à tous. Quand j’ai demandé à Ante si je pouvais me baigner devant chez lui, il a tempêté: «Quelle question. Elle est à qui la mer? A personne!» </p> <p> </p> <p><strong>Moustiques et vacanciers. </strong>Les insulaires parlent beaucoup, par petites touches. Y compris pour dire leur rapport ambivalent au tourisme. Un matin, je me réveille chiffonnée et piquée: «Eh oui, les moustiques sont arrivés, les touristes ne vont pas tarder». L’épicière sourit. Les affaires vont reprendre. En septembre, c’est elle qui sera chiffonnée.</p> <p> </p> <p><strong>Avec ou sans carte postale. </strong>Dans le journal régional,<em> Slobodna Dalmacija</em>, une photo: une corde à linge dans une ruelle, entre deux fenêtres, exposant des caleçons à l’ancienne avec dentelles. Et un article pour dire la joie des touristes dans un centre ville de Split photographiant cette apparition si typique. Une mise en scène. Dans un centre antique où, autour du Palais de Dioclétien, de faux légionnaires et des terrasses à tapas, des boutiques de luxe et des appartements climatisés pour séjour de courte durée ont remplacé depuis longtemps les grands-mères et les tsiganes. Les habitants ont vendu ou louent eux-mêmes leur ancien nid et se retrouvent à la périphérie. Mais, comme le souligne l’article, le vieux Split réapparaît le temps d’une photo.</p> <p>Sur mon île, c’est différent: tout sèche dehors, les sous-vêtements, les draps, les filets et les cirés des pêcheurs, mais aussi les baskets passées à la machine, les doudous passés au jus, les nappes et tapis. Mais il n’y a pas de cartes postales. Sauf à la poste. Quelques mélanges à l’ancienne, avec vues du village posées de guingois. Cinq ou six, toujours les mêmes.</p> <p><strong> </strong></p> <p><strong>L’été des grands-mères. </strong>Tout le monde aime l’été. Sur l’île comme ailleurs. Les vacanciers ont besoin d’un break, les insulaires ont besoin de cash. De chaleur aussi: la mer en hiver et au printemps, c’est une humidité qui pénètre les os. Un vent qui transforme les passants en virgules arc-boutées. Des courants d’air dedans et dehors. Et des jours trop courts pour faire la sieste.</p> <p>L’été c’est précieux. Il s’installe et on le met en scène. Puis la saison se termine. Mais, oh miracle, après c’est encore l’été, autrement. Jure a écrit, très jeune, un poème pour dire la beauté de ce qu’on appelle ici l’été des grands-mères:</p> <p>«Il est arrivé l’été des grands-mères. Chaude est la nuit, chaud le matin. Beau le temps. Le soleil brille. La mer somnole. Personne ne vendange. Personne ne démêle ses filets. Une légère brise souffle, sérénité et bien-être. Dans la crique des nudistes slovènes, ce sont maintenant les figues qui bronzent et sèchent». </p> <p> </p> <hr /> <p> </p> <blockquote> <p>*Post-scriptum: Comme le craignait le Mouvement des îles, la loi sur les concessions a bel et bien été adoptée le 1er juillet. En douce et en force: glissée dans l'ordre du jour peu avant la session du parlement, elle a été votée avec une courte majorité. Les représentants de l'opposition quittant la salle en signe de protestation. En pleine saison touristique les insulaires sont-ils réduits au silence? </p> </blockquote> <p> </p> <hr /> <p> </p> <p><a href="/actuel/1-6-le-tijat-revient-le-voilaaa">Le 1<sup>er</sup> épisode du feuilleton dalmate: Le Tijat revient: «Le voilààà!»</a></p> <p><a href="/actuel/2-6-yoga-ou-poissons-rave-party-ou-mouflons">Le 2<sup>e</sup> épisode du feuilleton dalmate: «Yoga ou poissons? 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Mais il y en a tant d'autres, de ces mots qui disent un ailleurs, autrement: <em>zalazak sunca</em>, pour le coucher du soleil, <em>otok</em>, l'île, <em>riba</em>, le poisson... </p><p>Ces quelques exemples suffisent à rappeler que la langue parlée au sud de Trieste n'est pas latine. Et quasiment dépourvue de racines grecques, sauf exceptions maritimes telles que <em>dupini</em> ou <em>delfini</em>, pour les dauphins. Sinon, l'eau c'est <em>voda</em>, inutile de chercher du côté d'<em>hydro </em>ou <em>aqua</em>. S'il vous plaît, <em>molim</em>, merci, <em>hvala</em>. Même sans connaissance d'une autre langue slave, ce qui ne mène d'ailleurs pas très loin, il peut être non seulement utile mais joyeux de nager un peu dans les mots en usage sur la rive orientale de l'Adriatique. </p><h3>Bain à remous linguistique </h3><p>Cet été encore, les touristes seront des millions à séjourner en Croatie. Trois ou quatre fois plus nombreux que les 4 millions d'habitants. Et quand les Autrichiens côtoient les Slovaques, les Anglais ou les Français, quand les Italiens croisent les Sud-Américains et les Japonais, comme à Hvar ou Dubrovnik, on peut s'amuser de ce bain à remous linguistiques. S'étonner ou compatir devant la mine déconfite des vendeuses de charcuterie au supermarché. Ou décider de plonger, au moins un peu, dans la couleur locale. Histoire de faire surgir un sourire. </p><p>En effet, en pleine saison, les gens de la côte et des îles sont rarement hilares. D'abord, la politesse affectée n'est pas de mise dans les Balkans, sauf sens commercial suraigu, et puis on scanne volontiers l'interlocuteur, c'est comme ça. Mais les regards directs, s'ils peuvent paraître sombres, s'éclairent volontiers si le visiteur fait un essai linguistique. Des décennies de «Hallo!», «Thanks», «Bier bitte!», «Vous parlez français?», ont fait des dégâts. Les Croates ont beau savoir que leur langue est complexe – ils en sont d'ailleurs fiers – ils comprennent difficilement qu'on n'essaie même pas. </p><p>Tous les guides donnent pourtant les règles, très simples, pour savoir lire et prononcer correctement... tout! Une lettre correspondant à un son, un seul, il devrait être possible de commander <em>rižot</em>, <em>kalamari</em> (en fait c'est <em>lignje</em>) et <em>salata</em>. Avant de se lancer avec les <em>ražnići</em>, les brochettes, cousines des <em>ćevapčići</em>. Cette spécialité de viande hâchée grillée est riche de ces lettres avec accent à repérer. «Ć» c'est «tch» comme dans «Tchernobyl». Le «č» étant similaire mais un peu mouillé (ce qui est une nuance dispensable). Le «c» tout nu, se prononce «ts», comme dans «tsé-tsé». En ajoutant le «š» pour «ch», comme chat. Le «ž», pour «j» ou «ge» dans «jaune» ou «large». Le «nj» pour «gn», «gnocchi». Et le «dž» comme dans «jeans». Vous voilà armé pour déchiffrer le nom des villes et les menus. </p><p>Puisqu'il n'y a pas d'article, aligner les mots dans le désordre, au pire fera sourire. Tout comme l'oubli des sept cas déclinés en trois genres... </p><h3>Les consonnes en paysage</h3><p> La découverte d'une langue, même de quelques mots, c'est un voyage. Toutes ces consonnes qui se suivent sans voyelles, comme dans Krk ou Vrbnik (noms d'une île et d'un village au nord), ou dans <em>crno</em> (noir), pour <em>crno vino</em> (vin rouge!), toutes ces consonnes donc, disent une façon particulière de jouer avec les obstacles. D'abord on peut les approcher en rajoutant un mini «e», là où c'est indispensable, donc avant le «r». Mais ces «k» et ces syllabes en cascade racontent la géographie, celle des pierres (<em>kamen</em>, la pierre) avec des villes (<em>grad</em>) riches en escaliers comme Šibenik ou Dubrovnik. Alors que la mer est douce dans la baie (<em>uvala</em>, <em>plaža</em>). Doux aussi le ciel bleu <em>plavo nebo</em>. </p><p>Si la tablée s'y prête, avec la présence de plusieurs langues, rien de tel qu'une virée dans le vocabulaire pour situer cette partie excentrée de la Méditerranée. Toute proche de l'Autriche et de ces mots allemands si utiles pour les outils: un tournevis c'est ainsi le plus souvent un <em>šrafciger</em> (pour <em>Schraubenzieher</em> en allemand), même si les variantes plus italienne, <em>kacavida,</em> ou slave, <em>odvijač,</em> existent. </p><h3>Géographie et poésie </h3><p>Plus on s'éloigne de la côte, plus les mots s'ancrent dans la Méditerranée. Sur mon île, on dit <em>fumari</em>, au lieu de <em>dimjak</em>, pour la cheminée. Marija me demande si je suis allée <em>banjati</em>, me baigner, et non <em>plivati</em>. Neno dit <em>kapiti</em>, pour comprendre... Les faux amis existent, évidemment. Si le <em>maestral</em> est bien un vent, ce n'est ainsi pas un mistral, mais un thermique marin, plus ou moins puissant, alors que <em>tramontana</em>, elle vient bien du nord-ouest et souffle fort! </p><p>Le décalage vers une langue vraiment différente est une source permanente de zigzags dans les sons et les sens. «Šugaman...», crie ainsi Zorica à son mari, quand la houle nous secoue. La première fois que je l'ai entendu, ce <em>sugarman</em> je me suis demandée ce que le reggae venait faire dans ce bateau. Mais quand j'ai reçu un linge pour m'essuyer, j'ai compris: <em>šugamani</em>, ce sont les serviettes de bain en dialecte, en lien direct et oral avec l’italien <em>asciugamani</em>. Moi je connaissais <em>peškir</em>, <em>frotir</em> ou <em>ručnik</em>, ce qui évidemment, ne signifie rien pour des francophones, mais révèle au moins la variété du vocabulaire selon qu’on vit sur une île, à la montagne, plus au nord ou au sud de la Croatie. </p><p>J’ai eu la chance d’entendre, très peu, le serbo-croate dès le berceau, comme on disait à l’époque. Je me débrouille assez mal, de quoi douter de tout et assez bien pour m’amuser des variantes différentes selon les régions. Aujourd’hui on dit BCMS, abréviation de «bosnien-croate-monténégrin-serbe», pour ménager les susceptibilités et évoquer le fond commun de quatre langues devenues nationales. Mais c’est un autre sujet. Les différences étant notables à l’intérieur des pays aussi, cela enrichit d’autant le vocabulaire et les conversations. </p><p>Parce que la curiosité linguistique c’est d’abord le plaisir de la rencontre. Et une porte ouverte à la poésie, ou l’absurde. Comme cette soirée passée avec Neno qui tentait de me dire «ne želim ni ribu na zidu a kamoli pasa...». Je comprenais les mots mais pas le sens. Tout le bistrot s'y est mis pour insister: «Il ne désire même pas un poisson sur le mur, alors un chien...» Là-bas, au milieu du bleu, chacun semble partager le désir puissant d'avoir un poisson sur son mur. <br></p><p></p><hr><p></p><p><a href="https://bonpourlatete.com/actuel/1-6-le-tijat-revient-le-voilaaa">Le 1<sup>er</sup> épisode du feuilleton dalmate: Le Tijat revient: «Le voilààà!»</a></p><br><p><a href="https://bonpourlatete.com/actuel/2-6-yoga-ou-poissons-rave-party-ou-mouflons">Le 2<sup>e</sup> épisode du feuilleton dalmate: «Yoga ou poissons? 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C’est un jour comme ça, à la fin d’un bon repas, que Tomo a dit: «Sonia, tu connais la soupe à la pierre?» Nous avions partagé quelques mulets, ces poissons blancs qui voyagent mal mais sont délicieux frais. Avec du vin et de l’huile de la maison. Nous avions croisé des dauphins, la veille. Tout allait bien, ou presque: «Tu as vu la taille des sardines, ramenées par les chalutiers? Elles sont beaucoup trop petites, avant il y en avait douze ou quinze par kilo, maintenant il en faut cinquante. Qu’est-ce qui va se passer? » La situation est si critique dans l’Adriatique que l’Europe a limité le nombre de jours de pêche avec le filet à sardines. L’inquiétude est lancinante. Mais parfois on n’a pas envie de penser à ce qui se passe au fond du miroir bleu. Alors Tomo répète: «Non, mais eh, tu connais la soupe à la pierre?»</p> <h3>Légende ou gag? </h3> <p>Tomo est jeune, il a été matelot pendant des années, pour la compagnie nationale de ferry. Il veut ouvrir un petit bar cet été. Et il est passionné de cuisine. Les autres le regardent avec un demi-sourire. Moi je lui dis que la soupe, j’en ai entendu parler voici des années, dans l’archipel des Kornati, au large, mais j’ai cru à un gag. «Non, non, si tu veux, un jour, je te la prépare. Mais bon, d’abord faut trouver la pierre…» </p> <p>Je ne veux vexer personne, alors je ne leur raconte pas tout de suite la légende de la soupe au caillou. Celle du mendiant qui, arrivant dans un village de pauvres montagnards, sort son caillou magique en proposant une soupe miraculeuse, pour autant qu’on lui donne un chaudron et un peu de sel. Puis quelques épluchures de pommes de terre, un reste de carottes et de poireau, une gousse d’ail, du persil ou du pain sec… Bref, tout ce qu’il faut pour réussir une soupe du chalet. Je ne leur dis pas qu’au Portugal, apparemment, la soupe à la pierre est particulièrement riche, avec lard, haricots et chorizo. </p> <p>Quand on a la chance de partager du temps et des mots, on joue le jeu. Alors je demande à Tomo si je peux aller chercher une pierre: «C’est pas si facile, il faut en trouver une variété particulière, qui ait des trous, des habitants et aussi des algues. Une pierre riche en goûts!» Manifestement, si gag ou légende il y a, ce sera dans une version très différente. En Valais, même si l’on peut imaginer une version avec des herbes des Alpes, il paraît que la pierre doit être particulièrement lisse et plate pour bien écraser les légumes dans le chaudron. Comme le galet du mendiant dans le conte. Et dans les sites avec recettes portugaises, on parle d’une pierre qui doit surtout être bien propre. </p> <h3>Le choix, quelle affaire </h3> <p>Au bout de quelques jours, après avoir insisté, tenaillée par la curiosité, j’ai pu partir avec Milka chercher une pierre à soupe. Tomo était trop occupé par l’installation de son nouveau café. Nous avons marché longtemps, au bord de l’eau, à la pointe de l’île. J’ai compris alors que c’était sérieux: seules certaines pierres ont cette structure particulière, pleine de cavités. Elles abritent alors non seulement de nombreux petits crabes, des escargots, une mini-crevette, mais se retrouvent aussi porteuses de petites moules et chapeaux chinois. «L’eau n’est pas assez basse, dit cependant Milka, il faudrait en prendre une plus loin de la rive». Mais elle refuse que je plonge dans l’eau encore fraîche. Je crois qu’elle doute de ma perspicacité sous-marine et moi je me demande comment on fait pour remonter une bonne grosse pierre et ses habitants… </p> <p>En tout cas Milka avait raison: choisir la bonne pierre, c’est toute une affaire. D’ailleurs nous en avons ramené trois et oui c’est lourd. Mais aucune n’était vraiment top, selon Tomo. Qui a fini par accepter de se lancer avec la plus grosse: «Ce sera pour demain. La soupe doit reposer. Et je dois aller chercher des herbes dans la colline». Là, impossible de le suivre et plus encore de l’observer en train de cuisiner. «Ah non, c’est ma recette, j’ai passé des années à regarder le chef cuisinier sur le bateau, pour apprendre ses trucs. C’est lui qui a fini par me donner sa recette de soupe à la pierre». </p> <h3>Sel et garrigue </h3> <p>Je ne pourrai donc rien révéler. Si ce n’est que ce fut délicieux. La soupe, filtrée, fut servie légèrement tiède, le lendemain à midi, puis froide, le soir. Elle avait un goût de mer et de garrigue, avec de la sarriette, du thym, de l’ail… «Ah, peu à peu tu vas tout trouver», s’est inquiété Goran. Non je ne cherche même pas, pour quoi faire? Sans la pierre et la tablée, autant dire qu’elle aurait perdu son âme, cette soupe claire. Translucide et subtile. Quoique un peu salée: «J’ai oublié que la pierre et ses cavités, pleines d’eau de mer, l’étaient bien assez», a concédé le jeune Tomo. </p> <p>Une soupe à la pierre imparfaite, c’est encore mieux. On va pouvoir recommencer. A la fin de l’été, quand il y aura de nouveau un temps long à partager. D’ici là, la soupe alimentera aussi les conversations au village. «Quoi? Tomo a fait une soupe à la pierre?», s’est exclamé Ante. «Avec des herbes, de la sarriette? Moi je n’aurais mis que de l’ail et un peu de vin blanc, comme pour une soupe de poisson», a rétorqué Nadia. «Avec tout juste de l’oignon, voire de la tomate, mais ce ne serait déjà plus une vraie soupe à la pierre», ajoute Marina. Une fine cuisinière. Qui tient la pizzeria et lit beaucoup la presse : «Tu sais, ces histoires de soupes, je ne sais pas quoi t’en dire. A mon avis, les anciens, ils avaient toujours du poisson. Ils n’allaient pas s’embêter avec des pierres. Mais maintenant, c’est différent. Ils la servent même dans des restaurants à la mode à Split. Et c’est pas donné…» </p> <p>Moi, entre la disette sur un rocher et la légende pour menu branché, je nage. Mais je peux bien imaginer qu’au bout de trois jours de tempête, empêchant toute sortie en mer ou le retour des pêcheurs, les femmes posées sur les Kornati, à des heures de navigation au large, aient eu une idée géniale pour donner du goût à la soupe. Les spaghettis cuits à l’eau de mer, par exemple, avec trois moules ou deux crevettes, c’est divin. </p> <p>Et sur une toute petite île, rien de tel qu’une marche matinale avec pêche à la pierre, avant la dégustation et les causeries, pour se sentir en mer. Quant à savoir si ça marche en ville… Disons que plus la nappe est blanche, plus les ingrédients sont probablement nombreux et coûteux, pour animer l’assiette et la tablée. </p> <p><a href="/actuel/1-6-le-tijat-revient-le-voilaaa">Le 1<sup>er </sup>épisode du feuilleton dalmate:«Le Tijat revient: "Le voilààà!"»</a></p> <p><a href="/actuel/2-6-yoga-ou-poissons-rave-party-ou-mouflons">Le 2<sup>e</sup> épisode du feuilleton dalmate: «Yoga ou poissons? 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L’eau est immobile, à la fois bleue et dorée, tout juste animée par une barque effilée, blanche comme le maillot immaculé du pêcheur. On s’exclame alors: bonaca! (Prononcer bonatsa, presque comme bonazza, en italien). En français, les dictionnaires disent que le mot bonace pour qualifier la mer est rare et vieilli. Pas en Dalmatie.</p> <p>Les matins de bonaca, la paix semble née de la Méditerranée. Même si on sait que ça ne dure pas. Alors on en profite pour partir en mer, comme Goran et Milka qui veulent récolter des câpres. Nous voici donc cap au sud, vers un nouvel îlot. Parce qu’ils sont nombreux les îlots déserts, dans cet archipel. Et tous différents.</p> <h3>L’île des goélands et cormorans</h3> <p>Pour les câpres, le top, c’est apparemment Sokol. Un petit rond de pierres, à peine quelques centaines de mètres carrés. Dépourvu d’arbres, donc parfait pour les câpriers qui adorent, la roche, le sel et le soleil. <em>Sokol</em> signifie faucon. 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Dans la baie, Goran ralentit devant de vastes terrasses de pierres: «C’était une île de scouts au temps de Tito. On l’appelait l’île de la jeunesse». Même l’amphithéâtre date des années 70.</p> <p>Des ouvriers s’affairent autour d’un camion-bétonneuse. Ils construisent de nouvelles terrasses sur cet îlot privatisé pour plus de 40 ans et dont les promoteurs annoncent fièrement qu’il n’accueille jamais plus de 500 personnes. C’est quand même beaucoup pour jouer au Robinson sur une superficie de 1,5 km<sup>2</sup> de pinède et rochers... mais juste assez pour les soirées avec méga <em>party</em> et concerts électro. Je dois penser à haute voix, parce que Goran répond tout à coup: «Ils étaient beaucoup plus nombreux les réfugiés, pendant la guerre. Plus de 1000».</p> <p>Le son de l’eau animée par une légère brise, celui du moteur. Un silence.</p> <h3>Des réfugiés entre parenthèse</h3> <p>On ne parle plus de la guerre en ex-Yougoslavie, ni sur mon île ni ailleurs. Ou alors à mots mesurés, avec de longs silences. Je peine à imaginer des réfugiés installés en pleine mer. «Des Bosniaques. On leur apportait à manger parfois. Des hommes, des femmes, des enfants. Il paraît qu’un jour, certains se sont jetés à l’eau, quand les autorités croates sont venues chercher de jeunes hommes pour les renvoyer en Bosnie». Goran se tait à nouveau.</p> <p>Je regarde les parasols de bois et de paille, déjà en place pour l’été…je retrouve ce que tout le monde veut oublier, cette ombre, ce trou noir, entre les scouts du titisme et le néo-balnéaire bio le jour, rave la nuit. «Certains se seraient noyés, ils ne savaient pas nager. Enfin c’est ce qu’on dit», conclut Goran. Et les autres ? «Ils sont repartis, plus loin, jusque chez vous ou jusqu’en Amérique, au Canada».</p> <p>Nous rentrons. Sans poulpe. La <em>bonaca</em> a disparu: le vent s’est levé, de petites vagues agitent la mer. Le mouvement du bateau est léger, parfait pour penser. Que faire de cette histoire ? Faut-il la taire, pour parfaire la carte postale ? Alors que la période «île de la jeunesse», avec les scouts de Tito, est fièrement présentée sur le site d’<a href="https://obonjan-island.com">Obonjan-Island</a>, le passage des réfugiés y est tout simplement effacé.</p> <p>L’automne dernier, au retour de Sicile, une amie est rentrée un peu troublée du paradis: «C’était merveilleux, quelle culture, quelle nature. Sauf le dernier jour, tout d’un coup on a trouvé des gilets de sauvetage éparpillés sur une plage avec des chaussures et des trucs qu’on a pas trop regardés. Ça tue un peu la fin du séjour». En Méditerranée, les naufrages se comptent par centaines, les noyés par milliers, mais les vacances devraient être immaculées. Parfaitement hors de la réalité.</p> <h3>En barque vers l’Australie</h3> <p>En prenant le rythme de la Dalmatie, j’apprends le temps long, égrené en bribes de conversations. L’exil est ainsi un sujet récurrent, dans une île où les noms évoquent l’Est, témoins d’un déplacement ancien de Slaves fuyant les Turcs. Quand j’ai voulu savoir pourquoi de si nombreux insulaires se sont retrouvés en Australie, Milka m’a raconté une autre histoire: «Les nôtres partaient en barque, à la fin des années 50. Vers l’Italie. Ils n’y arrivaient pas toujours, la marine yougoslave patrouillait. Certains revenaient et recommençaient. D’autres ont disparu.» </p> <p>Elle me montre le large, le couchant: «Ceux qui atteignaient l’Italie étaient placés dans des camps, comme les réfugiés d’aujourd’hui. D’autres se cachaient pour rejoindre la France. Et tenter d’aller plus loin, jusqu’en Australie, oui, là où il y avait déjà de la famille et des chalutiers où travailler comme pêcheurs».</p> <p>En fin de journée, Milka, repart au jardin. Moi au village. Dans la ruelle, j’entends les martinets, je lève les yeux, et vois un buisson de câprier, installé dans le trou d’une façade. 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