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Chronique

Chronique / Reconnaissance faciale pour tous

Anna Lietti

18 septembre 2017

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Un rendez-vous hebdomadaire pour raconter comment le sérieux n'est pas toujours là où l'on croit. Cette chronique d'Anna Lietti paraît le samedi dans 24 heures.



Alors comme ça, la technologie de la reconnaissance faciale avance à grands pas. Et sous prétexte de nous fluidi-sécuriser la vie, elle nous prépare un avenir de surveillance généralisée, de viol d’anonymat et de bradage de nos vies privées.

Je sais. C’est grave. Et l’arrivée d’une fonction de reconnaissance faciale sur le dernier modèle d’iPhone devrait me faire frissonner d’horreur. Mais, comment l’avouer? J’applaudis. Je frissonne, mais d’impatience. Car si, pour le moment, l’engin ne reconnaît que son propriétaire, je peux raisonnablement espérer, dans un avenir proche, posséder le smartphone magique capable de répondre à la question récurrente qui me pourrit la vie: «Mais qui est cet inconnu qui me fait la bise avec un grand sourire?»

Je me suis longtemps crue seule à souffrir, je sais aujourd’hui qu’il n’en est rien: la non-reconnaissance des gens que l’on est censé connaître est un fléau social d’ampleur sous-estimée. Forcément: on n’en parle pas, on a honte.

J’ai bricolé des stratégies pour faire face. Les questions génériques lancées dans le brouillard en quête d’une réponse qui livrera le nom, l’image, le détail déclencheur du retour de mémoire. En ce moment, je fais durer le «Tu as passé un bel été?» en attendant de revenir à l’acratopège: «Et toi, tu en es où?» C’est que, quand le blanc est total, on prend des risques même avec un banal «Comment va la famille?». Les familles vont parfois très mal, sans compter ceux qui n’en ont pas. Pareil pour le travail. J’ai rayé de ma liste «Et le boulot, ça roule?» 

Le problème avec les questions bidon, c’est qu’une fois embarqué, vous ne pouvez pas revenir en arrière: vous avez fait semblant de reconnaître la personne et, si elle persiste à ne pas vous livrer l’indice libérateur, vous êtes condamné à vous enfoncer dans le mensonge jusqu’à la catastrophe. Quand je peux, j’évite. Je dis d’emblée: «Je vous reconnais parfaitement mais je n’arrive pas à vous resituer…» Des fois, c’est même vrai.

Le pire fléau

Mais la formule n’est plausible qu’en mode «vous». Le pire fléau, c’est l’inconnu qui me fait la bise avec un grand sourire. Qu’ai-je donc fait avec: partagé un open space professionnel? Réveillonné chez une cousine ? Plus si entente?

Assez, je veux que cesse cette torture. Je cherche le salut auprès de la fée technologie. J’attends avec impatience le smartphone que je pourrai dégainer discrètement face à l’inconnu au grand sourire et qui me livrera sa fiche. Attention, je veux tous les détails: pas seulement nom, prénom, profession, amis communs. Mais depuis combien de temps on se connaît et ce que je lui ai fait à manger en cas d’invitation. Evidemment, côté récolte de données, ça va demander quelques avancées supplémentaires et quelques violations ultérieures de la sphère intime.

Il y aurait bien sûr une solution alternative et cent pour cent bio: s’autoriser à dire, même après une demi-heure de sourires factices: «Pouce! T’es qui?» Si tout le monde ose ensemble, je me lance. Tout le monde, ensemble, donc. Mmm….vraiment pas?

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