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Actuel / Poutine réélu: une farce, vraiment?

Jacques Pilet

15 mars 2018

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Pour la plupart des médias occidentaux, la question est réglée: l’élection présidentielle du 18 mars en Russie est une farce. Poutine sera réélu. Ses rivaux ne sont que des marionnettes. Et si c’était un peu court? La journaliste Anne Nivat qui connaît ce pays en profondeur vient de le parcourir pendant trois mois. Elle en tire un livre (1) et un film qui sera diffusé le 18 mars à 17h sur France5. Elle a apporté sur France-Inter des nuances utiles (2).



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La démocratie, la Russie ne l’a guère connue dans son histoire. Elle la pratique aujourd’hui dans une forme peu comparable à la nôtre. L’opposition y est brimée mais pas totalement étouffée. L’élection présidentielle n’est pas aussi caricaturale qu’on le dit. En rien comparable à celle qui aura lieu le 26 mars où le seul «rival» du président Al Sissi est son ami, son partisan, Mostafa Moussa, où toute voix critique est étouffée. Rien de comparable non plus avec la décision du parti communiste chinois qui permet au tout-puissant Xi Jinping de rester indéfiniment au pouvoir. Un dictateur qui suspend toutes les libres expressions mais moins diabolisé que Poutine dans nos gazettes.

La bête noire de «Platov»

En Russie, les trois candidats en lice face à Poutine n’ont aucune chance, c’est vrai. Un entrepreneur millionnaire sous les couleurs du parti communiste, un ultra-nationaliste en course depuis 27 ans. Et une jeune femme, Xenia Sobtchak, fille du maire décédé de Saint-Petersbourg qui fut le mentor de Poutine. Cette ancienne vedette de la téléréalité est devenue journaliste, elle est fort intelligente et courageuse: elle mène en campagne en attaquant vigoureusement le maître du Kremlin, sur une ligne pro-occidentale. Avant de la tourner en ridicule, il vaut la peine de voir l’interview qu’elle a donnée… à la Télévision russe en anglais (3). La jeune femme (36 ans) ne recueillera pas plus de 1 ou 2 % des voix. Son discours passe mal hors des milieux libéraux de la capitale. Mais on reparlera d’elle à l’avenir. D’autant qu’elle est proche du principal opposant, Alexei Nawalny.

Bête noire de Poutine, il a été interdit de se présenter sous des prétextes judiciaires. Il mène cependant une active campagne sur les réseaux sociaux – ils restent accessibles à la différence de la Chine! –, sur les derniers journaux et magazines qui échappent au contrôle de l’Etat. Il a une carrure, de l’énergie, il sait trouver les mots qu’il faut. Son cheval de bataille: la corruption. Son programme  Il reste flou. Pas trop d’accents libéraux (bien qu'il ait étudié Yale). Mais il affirme un solide nationalisme (il ne désapprouve pas l’annexion de la Crimée). Son atout: il a réussi à mobiliser des groupes de jeunes et de mécontents très actifs dans de nombreuses villes. Les manifestations qu’il a organisées ont eu un certain succès. Le portrait qu’en a fait Arte, très favorable, en apprend beaucoup sur lui (4) et aussi sur la marge de manœuvre qui subsiste pour l’opposition. Nawalny et ses amis prônent l’abstention. Ce score-là sera aussi révélateur… sous réserve de la fiabilité des chiffres. Quoi qu’il en soit, ce politicien doué ne lâchera pas le morceau.

Un homme las qui pourrait quitter le pouvoir avant la fin de son mandat?

Anne Nivat dont il faut saluer l’indépendance d’esprit et la connaissance du terrain assure que la majorité des Russes votera Poutine mais pas dans la contrainte. Dans la peur de l’inconnu. Ils sont encore traumatisés par la terrible période qui a suivi l’effondrement de l’URSS. Ils ne sont de loin pas tous des admirateurs du leader mais ils lui reconnaissent d‘avoir apporté une certaine stabilité, dans la précarité pour la grande masse mais dans une relative sécurité. Et surtout, il a rendu la fierté au pays. Et dans sa tradition, cela compte. Comment, au regard du passé, s’étonner de ce sursaut patriotique? Intéressant aussi: intuitive, Anne Nivat voit en Poutine un homme las qui pourrait quitter le pouvoir avant la fin de son mandat.

Le retour d’un climat de guerre froide entretenu de part et d’autre après que l’Occident n’a pas saisi la main tendue par Poutine à ses débuts, présente moult dangers. Dont un trop peu évoqué: le ravage intellectuel dû au feu croisé des propagandes, ouvertes ou camouflées, au triomphe des slogans, à l’aveuglement devant les réalités complexes de l’Histoire en train de se dérouler sous nos yeux.


(1) «Un continent derrière Poutine?» Ed. Seuil. 192 pages.
(2) Anne Nivat sur France Inter
(3) L’interview que Xenia Sobtchak a donnée… à la Télévision russe en anglais
(4) Le portrait d'Alexei Nawalny par Arte

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VOS RÉACTIONS SUR LE SUJET

2 Commentaires

@Gorbounova 15.03.2018 | 23h11

«M. Pilet nous avait habitués à beaucoup mieux. Cet article est beaucoup trop sommaire. Certes la complexité du problème de l'instauration et de l'exercice d'un pouvoir vraiment démocratique en Russie est connue. Reste que le clan Poutine s'obstine à vouloir présenter cette élection comme démocratique... C'est cette attitude qui mériterait une analyse fouillée ! »


@yvesmagat 20.03.2018 | 16h59

«Le système Poutine n'est en effet pas comparable à la dictature chinoise par exemple. Et les Russes sont toujours traumatisés par la période de la fin de l'URSS. Le traumatisme était à la fois psychologique (la mort du père et la médiocre sécurité qu'il représentait) et matérielle (la perte de leurs modestes économies). Il est vrai aussi que les Russes n'ont connu la démocratie que de février à octobre 1917 et pendant une partie de la présidence de Eltsine. Et dans ces deux cas le chaos l'a emporté sur la liberté. Mais la stratégie de Poutine s'est toujours située en amont. Elle consiste à empêcher toute alternative, tout changement et toute remise en question de l'histoire russe. Du coup il reste en effet le seul homme providentiel, le seul qui soit à même de rassurer les Russes. La population n'est pas dupe: les Russes en ont vu d'autres. On ne leur laisse simplement pas le choix.»


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