Actuel / L'usine du monde produit des cancers à la chaîne
Des ouvriers d'une usine fabriquant des vitres de smartphone sortent de l’usine à 7 heures du matin, après avoir travaillé toute la nuit. © Julie Zaugg
Des millions de jeunes Chinois travaillent dans des usines fabriquant les biens de consommation vendus dans le monde occidental. Ils y sont exposés quotidiennement à une multitude de substances toxiques qui les rendent malades. Témoignage de ces ouvriers damnés.
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Résultat, lorsqu’ils tombent malades, ils ne savent pas pourquoi.» <br></p><br><p><img class="img-responsive img-center " src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1519108986_9.bielcrystal_bplt.jpg"></p><h4 style="text-align: center;"><img class="img-responsive img-center " src="https://bonpourlatete.comhttps://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1519108925_4.bielcrystal_bplt.jpg">Des ouvriers d’une usine fabriquant des vitres de smartphone sortent de l’usine à 7 heures du matin, après avoir travaillé toute la nuit.</h4><p>L’équipement qui leur est fourni est également indigent. «Des masques de chirurgien jetables et des gants en latex», note le militant. Un tiers d’entre eux ne reçoit rien du tout, selon un sondage réalisé par Labour Action China. Certains adoptent des moyens de fortune, comme s’envelopper les mains dans de l’emballage en plastique. D’autres renoncent à se servir des maigres protections offertes, car cela les ralentit trop dans leur travail. </p><p>«Pour éviter que de la poussière ne se dépose sur le verre, l’usine avait renoncé à installer un système de ventilation», se remémore Li Jingfei, une petite femme de 40 ans avec de grands yeux rieurs, qui a travaillé durant quatre ans dans une fabrique de Shenzhen fabriquant des objectifs de caméra et souffre aujourd’hui de leucopénie. Elle était chargée de les essuyer avec une solution à base de benzène. «Nous n’avions pas de masques, seulement des coques en plastique sur les doigts, pour ne pas égratigner les pièces», livre-t-elle.</p><h4 style="text-align: center;"><img class="img-responsive " src="https://bonpourlatete.comhttps://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1519123432_4.ouvrierschine_bpltnew.jpg">L’ouvrière Li Jingfei souffre de leucopénie après avoir travaillé plusieurs années dans la fabrication d’objectifs de caméras.</h4><h3 style="text-align: center;">«Just in time manufacturing»</h3><p>Si les usines du Delta de la rivière des Perles négligent à ce point la santé de leurs travailleurs, c’est essentiellement pour des raisons de coûts. Leurs clients, les multinationales, font pression sur leurs marges et leur imposent des délais impossibles à tenir, dans le cadre d’une stratégie appelée<em> just in time manufacturing </em>qui a pour but de réduire au maximum la durée – et les coûts – d’entreposage des biens. Cela les oblige à rogner sur les mesures de sécurité.</p><p>Quant aux autorités locales, elles hésitent à intervenir, craignant de provoquer le départ de ces employeurs et contribuables de taille. «Les usines appartiennent souvent aux fils de notables locaux, ce qui décourage une surveillance trop active», précise Garrett Brown, un spécialiste américain des mesures de protection au travail. La Chine manque en outre d’inspecteurs sanitaires: le pays n’en compte que 22'000.</p><h4 style="text-align: center;"><img class="img-responsive img-center " src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1519108800_3.shenzhen_bplt.jpg">Des passants au centre-ville de Shenzhen.</h4><p>Et même lorsque des inspections ont lieu, elles sont mises en scène. «Elles ont souvent lieu le dimanche, lorsque peu d’ouvriers sont présents», révèle Rena Lau, de l’ONG Globalization Monitor. Chen Baozhai se souvient d’une visite des autorités dans son usine, lors de laquelle son patron avait remplacé tous les produits de nettoyage à base de benzène par de l’alcool.</p><h3>Réparations impossibles</h3><p>Le calvaire des victimes d’intoxication ne s’arrête pas à la maladie. Elles affrontent également un véritable parcours du combattant pour obtenir réparation. «La charge de la preuve repose entièrement sur l’ouvrier, précise Zhai Yujuan, professeur de droit du travail à l’Université de Shenzhen. Il doit démontrer que sa maladie a été causée par les produits chimiques manipulés dans le cadre de son travail.»</p><h4 style="text-align: center;"><img class="img-responsive img-center " src="https://bonpourlatete.comhttps://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1519108811_4.shenzhen_bplt.jpg">Des usines désaffectées dans le quartier d’OCT Loft.</h4><p>Cela implique de disposer d’un certificat de travail valable, ainsi que d’un diagnostic officiel, qui prouve qu’il souffre bien d’une maladie professionnelle, deux documents durs à obtenir. Sans cela, l’Etat ne remboursera pas ses frais médicaux. La démonstration est d’autant plus difficile à apporter que la maladie ne se déclare souvent pas avant des années. La durée moyenne de latence d’une leucémie causée par le benzène est de 11 ans.</p><p>La procédure est aussi extrêmement longue. «Dans le meilleur des cas, elle prend quelques mois, mais elle dure souvent quatre à cinq ans», note Zhai Yujuan. Dans l’intervalle, l’ouvrier malade doit avancer l’argent pour payer les frais liés à son traitement médical.</p><h3 style="text-align: center;">«J’ai dû emprunter de l’argent»<br></h3><p>Tung Hung, un jeune homme de 28 ans aux traits poupins surmontés d’une coupe en brosse, n’avait que 17 ans lorsqu’il a quitté son Hubei natal pour Shenzhen avec sa grande sœur. «Mon premier emploi était dans une fabrique produisant des clubs de golf pour des marques comme Nike, Mizuno et Callaway, se rappelle-t-il. J’étais chargé de les tremper dans un bac rempli de xylène et de benzène, pour les nettoyer.»</p><p>Il quitte l’usine après trois ans et n’a plus affaire à des produits chimiques. «Un jour, en 2014, je me suis soudain senti très faible et j’ai commencé à avoir des vertiges», raconte-t-il. Il se rend à l’hôpital et apprend qu’il a un taux de leucocytes quinze fois trop élevé. On lui diagnostique une leucémie. Après deux ans de traitement, il est désormais guéri. Mais il a dû mener une longue bataille juridique en parallèle.</p><h4 style="text-align: center;"><img class="img-responsive img-center " src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1543222532_doublephotochine2.jpg">L’ouvrier Tung Hung à Hong Kong</h4><p>«Le propriétaire de l’usine a refusé de reconnaître que ma maladie était liée aux produits chimiques auxquels j’avais été exposé», raconte-t-il. L’enjeu était de taille: si un ouvrier tombe malade au travail, son employeur doit lui verser deux ans de salaire. Malgré un premier jugement en sa faveur, l’ex-patron de Tung Hung refuse de lui verser son dû. Ce n’est qu’en janvier 2016 qu’il s’y résigne, après avoir perdu un second procès initié par les services sociaux. Le jeune homme ne touchera les fonds qu’en septembre 2017.</p><p>En Chine, tomber malade se transforme rapidement en catastrophe financière. Tung Hung a dû débourser 90'000 yuans (13'500 francs) de sa poche pour soigner sa leucémie, une petite fortune pour ce migrant pauvre qui doit subvenir aux besoins de ses parents, restés au village. «J’ai dû emprunter de l’argent à des amis, m’endetter et dépenser toutes mes économies», soupire-t-il.</p><h3 style="text-align: center;">Victoire amère<br></h3><p>Si les conditions de travail décrites ci-dessus sont en général le fait de petits ateliers, les produits qui y sont fabriqués sont fournis à de grandes marques et finissent souvent dans les poches du consommateur occidental. Parmi les grands noms identifiés par diverses ONG de défense des ouvriers figurent des multinationales comme Acer, Canon, Asus, Fuji, Huawei, LG Ekectronics, Motorola, Nokia, Philips, Samsung, Sharp, Siemens, Sony, Maersk, Disney, Mattel, Hasbro, Nike et Timberland.</p><p>Et auprès des entreprises a priori éthiques, comme Apple qui a interdit l’usage du benzène et du n-Hexane en 2014, des problèmes subsistent. «Si vous consultez les rapports de responsabilité sociale d’Apple, vous constaterez que 20% à 30% de ses fournisseurs ne respectent pas les conditions contenues dans cette charte», note Garrett Brown.</p><p>Pour Tung Hung, la vie a désormais un goût amer. «Comme j’ai été déclaré invalide par les services sociaux, je n’ai plus aucune chance de décrocher un emploi, lâche-t-il. A 28 ans, je suis bien trop jeune pour être à la retraite.» Il sait aussi qu’il aura de la peine à trouver une épouse. «Aucune femme ne voudra d’un invalide», murmure-t-il. Et il devra continuer à prendre du Glivec, un médicament anticancéreux qui provoque des problèmes gastro-intestinaux, des nausées et des maux de tête, jusqu’à la fin de sa vie.</p>', 'content_edition' => null, 'slug' => 'l-usine-du-monde-produit-des-cancers-a-la-chaine', 'headline' => false, 'homepage' => 'col-md-12', 'like' => (int) 629, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1378, 'homepage_order' => (int) 1610, 'original_url' => null, 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 5, 'person_id' => (int) 85, 'post_type_id' => (int) 1, 'poster_attachment' => null, 'editions' => [[maximum depth reached]], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'attachments' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'comments' => [[maximum depth reached]], 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, 'relatives' => [ (int) 0 => object(App\Model\Entity\Post) {}, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Post) {}, (int) 2 => object(App\Model\Entity\Post) {}, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Post) {} ], 'embeds' => [], 'images' => [ (int) 0 => object(Cake\ORM\Entity) {} ], 'audios' => [], 'comments' => [], 'author' => 'Bon pour la tête', 'description' => 'Des millions de jeunes Chinois travaillent dans des usines fabriquant les biens de consommation vendus dans le monde occidental. 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L’hôpital lui diagnostique une intoxication au benzène, un puissant solvant à l’odeur doucereuse dont l’usage industriel est strictement limité en Europe et aux Etats-Unis en raison de sa toxicité.</p><h3 style="text-align: center;">Intoxications au benzène<br></h3><p>Liu Ge appartient à une cohorte grandissante de travailleurs qui ont sacrifié leur santé sur l’autel du développement économique chinois. Nés dans les campagnes défavorisées du centre du pays, ils ont émigré en masse vers les côtes en quête d’une vie meilleure. Ils y ont trouvé de l’emploi dans les usines de vêtements, d’électronique ou de meubles qui fabriquent la majorité des biens consommés en Occident, notamment dans le Delta de la rivière des Perles, une région du sud de la Chine qui englobe les pôles manufacturiers de Shenzhen, Canton et Dongguan. Mais il y ont aussi trouvé la maladie, sous la forme d’intoxications à une multitude de produits chimiques.</p><p>«En Chine, le benzène reste largement utilisé pour nettoyer les pièces entrant dans la composition de smartphones et de circuits électroniques, détaille Jason Chan, le directeur de Labor Action China, une ONG de défense des ouvriers. Il est aussi inclus dans certaines colles utilisées par les fabricants de chaussures et dans la peinture qui recouvre les jouets ou les meubles.» Il pourrait aisément être remplacé par des substances moins nocives, mais les industriels chinois aiment s’en servir car il coûte moins cher et sèche plus vite. Le benzène est aujourd’hui responsable de la majorité des intoxications subies par les ouvriers chinois.</p><p style="text-align: left;">Mais ce n’est pas la seule substance toxique à laquelle ils sont exposés. «Lorsque je fais une bavure sur le verre, j’utilise de l’huile de banane pour l’effacer, dit Da Jiao, une jeune femme de 21 ans originaire du Hubei qui imprime des liserés de couleur sur des vitres de smartphone et des glaces de montre. Même avec un masque, je ne me sens pas bien.» <br></p><p>L’huile de banane est l’euphémisme communément utilisé par les travailleurs du Delta de la rivière des perles pour parler du n-Hexane, un produit nettoyant très nocif. 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Le verdict des médecins est sans appel: sa moelle osseuse ne produit plus assez de globules blancs, un effet secondaire du benzène contenu dans les produits qu’elle manipulait au travail, et lui prescrit un cocktail de médicaments et d’injections qu’elle continue à prendre aujourd’hui.</p><h4 style="text-align: center;"><img class="img-responsive " src="https://bonpourlatete.comhttps://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1519123702_poll3.jpg">Malgré ses bijoux de jade, une pierre censée avoir des vertus médicinales, Chen Bhaozgai doit aujourd’hui ingurgiter une batterie de médicaments pour se soigner.</h4><p>L’exposition prolongée au benzène, à partir d’une année environ, provoque une régression de la moelle osseuse. Cela inhibe la production de globules blancs et peut mener à des anémies, des leucopénies (affaiblissement du système immunitaire) ou des leucémies. Les experts estiment que sur 1000 personnes exposées au benzène de façon chronique, cinq en décèderont. Cette substance a également été lié à des troubles reproductifs et peut affecter le fœtus.</p><p>Le n-Hexane génère pour sa part divers maux du système nerveux. «Le patient commence par ressentir un engourdissement et une sensation de brûlure au niveau de ses extrémités, détaille Jo-Hui Pan, un chercheur taïwanais qui a étudié ces effets. Progressivement, cela se transforme en faiblesse musculaire généralisée. Dans les cas les plus graves, on aboutit à une paralysie.» Quant au cadmium, interdit dans l’Union européenne depuis 2006, il endommage les reins.</p><h3 style="text-align: center;">Ni masques, ni gants<br></h3><p>Les ouvriers ne sont souvent pas au courant des dangers posés par les produits toxiques qu’ils manipulent au quotidien. «On ne leur fournit aucune information sur les risques auxquels ils s’exposent et les étiquettes sur les bouteilles sont souvent fausses ou en anglais, détaille Jason Chan. Résultat, lorsqu’ils tombent malades, ils ne savent pas pourquoi.» <br></p><br><p><img class="img-responsive img-center " src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1519108986_9.bielcrystal_bplt.jpg"></p><h4 style="text-align: center;"><img class="img-responsive img-center " src="https://bonpourlatete.comhttps://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1519108925_4.bielcrystal_bplt.jpg">Des ouvriers d’une usine fabriquant des vitres de smartphone sortent de l’usine à 7 heures du matin, après avoir travaillé toute la nuit.</h4><p>L’équipement qui leur est fourni est également indigent. «Des masques de chirurgien jetables et des gants en latex», note le militant. Un tiers d’entre eux ne reçoit rien du tout, selon un sondage réalisé par Labour Action China. Certains adoptent des moyens de fortune, comme s’envelopper les mains dans de l’emballage en plastique. D’autres renoncent à se servir des maigres protections offertes, car cela les ralentit trop dans leur travail. </p><p>«Pour éviter que de la poussière ne se dépose sur le verre, l’usine avait renoncé à installer un système de ventilation», se remémore Li Jingfei, une petite femme de 40 ans avec de grands yeux rieurs, qui a travaillé durant quatre ans dans une fabrique de Shenzhen fabriquant des objectifs de caméra et souffre aujourd’hui de leucopénie. Elle était chargée de les essuyer avec une solution à base de benzène. «Nous n’avions pas de masques, seulement des coques en plastique sur les doigts, pour ne pas égratigner les pièces», livre-t-elle.</p><h4 style="text-align: center;"><img class="img-responsive " src="https://bonpourlatete.comhttps://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1519123432_4.ouvrierschine_bpltnew.jpg">L’ouvrière Li Jingfei souffre de leucopénie après avoir travaillé plusieurs années dans la fabrication d’objectifs de caméras.</h4><h3 style="text-align: center;">«Just in time manufacturing»</h3><p>Si les usines du Delta de la rivière des Perles négligent à ce point la santé de leurs travailleurs, c’est essentiellement pour des raisons de coûts. Leurs clients, les multinationales, font pression sur leurs marges et leur imposent des délais impossibles à tenir, dans le cadre d’une stratégie appelée<em> just in time manufacturing </em>qui a pour but de réduire au maximum la durée – et les coûts – d’entreposage des biens. Cela les oblige à rogner sur les mesures de sécurité.</p><p>Quant aux autorités locales, elles hésitent à intervenir, craignant de provoquer le départ de ces employeurs et contribuables de taille. «Les usines appartiennent souvent aux fils de notables locaux, ce qui décourage une surveillance trop active», précise Garrett Brown, un spécialiste américain des mesures de protection au travail. La Chine manque en outre d’inspecteurs sanitaires: le pays n’en compte que 22'000.</p><h4 style="text-align: center;"><img class="img-responsive img-center " src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1519108800_3.shenzhen_bplt.jpg">Des passants au centre-ville de Shenzhen.</h4><p>Et même lorsque des inspections ont lieu, elles sont mises en scène. «Elles ont souvent lieu le dimanche, lorsque peu d’ouvriers sont présents», révèle Rena Lau, de l’ONG Globalization Monitor. Chen Baozhai se souvient d’une visite des autorités dans son usine, lors de laquelle son patron avait remplacé tous les produits de nettoyage à base de benzène par de l’alcool.</p><h3>Réparations impossibles</h3><p>Le calvaire des victimes d’intoxication ne s’arrête pas à la maladie. Elles affrontent également un véritable parcours du combattant pour obtenir réparation. «La charge de la preuve repose entièrement sur l’ouvrier, précise Zhai Yujuan, professeur de droit du travail à l’Université de Shenzhen. Il doit démontrer que sa maladie a été causée par les produits chimiques manipulés dans le cadre de son travail.»</p><h4 style="text-align: center;"><img class="img-responsive img-center " src="https://bonpourlatete.comhttps://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1519108811_4.shenzhen_bplt.jpg">Des usines désaffectées dans le quartier d’OCT Loft.</h4><p>Cela implique de disposer d’un certificat de travail valable, ainsi que d’un diagnostic officiel, qui prouve qu’il souffre bien d’une maladie professionnelle, deux documents durs à obtenir. Sans cela, l’Etat ne remboursera pas ses frais médicaux. La démonstration est d’autant plus difficile à apporter que la maladie ne se déclare souvent pas avant des années. La durée moyenne de latence d’une leucémie causée par le benzène est de 11 ans.</p><p>La procédure est aussi extrêmement longue. «Dans le meilleur des cas, elle prend quelques mois, mais elle dure souvent quatre à cinq ans», note Zhai Yujuan. Dans l’intervalle, l’ouvrier malade doit avancer l’argent pour payer les frais liés à son traitement médical.</p><h3 style="text-align: center;">«J’ai dû emprunter de l’argent»<br></h3><p>Tung Hung, un jeune homme de 28 ans aux traits poupins surmontés d’une coupe en brosse, n’avait que 17 ans lorsqu’il a quitté son Hubei natal pour Shenzhen avec sa grande sœur. «Mon premier emploi était dans une fabrique produisant des clubs de golf pour des marques comme Nike, Mizuno et Callaway, se rappelle-t-il. J’étais chargé de les tremper dans un bac rempli de xylène et de benzène, pour les nettoyer.»</p><p>Il quitte l’usine après trois ans et n’a plus affaire à des produits chimiques. «Un jour, en 2014, je me suis soudain senti très faible et j’ai commencé à avoir des vertiges», raconte-t-il. Il se rend à l’hôpital et apprend qu’il a un taux de leucocytes quinze fois trop élevé. On lui diagnostique une leucémie. Après deux ans de traitement, il est désormais guéri. Mais il a dû mener une longue bataille juridique en parallèle.</p><h4 style="text-align: center;"><img class="img-responsive img-center " src="https://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1543222532_doublephotochine2.jpg">L’ouvrier Tung Hung à Hong Kong</h4><p>«Le propriétaire de l’usine a refusé de reconnaître que ma maladie était liée aux produits chimiques auxquels j’avais été exposé», raconte-t-il. L’enjeu était de taille: si un ouvrier tombe malade au travail, son employeur doit lui verser deux ans de salaire. Malgré un premier jugement en sa faveur, l’ex-patron de Tung Hung refuse de lui verser son dû. Ce n’est qu’en janvier 2016 qu’il s’y résigne, après avoir perdu un second procès initié par les services sociaux. Le jeune homme ne touchera les fonds qu’en septembre 2017.</p><p>En Chine, tomber malade se transforme rapidement en catastrophe financière. Tung Hung a dû débourser 90'000 yuans (13'500 francs) de sa poche pour soigner sa leucémie, une petite fortune pour ce migrant pauvre qui doit subvenir aux besoins de ses parents, restés au village. «J’ai dû emprunter de l’argent à des amis, m’endetter et dépenser toutes mes économies», soupire-t-il.</p><h3 style="text-align: center;">Victoire amère<br></h3><p>Si les conditions de travail décrites ci-dessus sont en général le fait de petits ateliers, les produits qui y sont fabriqués sont fournis à de grandes marques et finissent souvent dans les poches du consommateur occidental. Parmi les grands noms identifiés par diverses ONG de défense des ouvriers figurent des multinationales comme Acer, Canon, Asus, Fuji, Huawei, LG Ekectronics, Motorola, Nokia, Philips, Samsung, Sharp, Siemens, Sony, Maersk, Disney, Mattel, Hasbro, Nike et Timberland.</p><p>Et auprès des entreprises a priori éthiques, comme Apple qui a interdit l’usage du benzène et du n-Hexane en 2014, des problèmes subsistent. «Si vous consultez les rapports de responsabilité sociale d’Apple, vous constaterez que 20% à 30% de ses fournisseurs ne respectent pas les conditions contenues dans cette charte», note Garrett Brown.</p><p>Pour Tung Hung, la vie a désormais un goût amer. «Comme j’ai été déclaré invalide par les services sociaux, je n’ai plus aucune chance de décrocher un emploi, lâche-t-il. A 28 ans, je suis bien trop jeune pour être à la retraite.» Il sait aussi qu’il aura de la peine à trouver une épouse. «Aucune femme ne voudra d’un invalide», murmure-t-il. 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Ils y travaillent depuis 7 ans maintenant, mais à part les coûts effroyables, on ne peut pas compter grand-chose.»</p> <hr /> <h4><a href="https://insideparadeplatz.ch/2024/03/27/ohne-bank-schreibt-die-migros-128-millionen-verlust/" target="_blank" rel="noopener">Lire l'article original</a></h4>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'migros-le-trou-pire-qu-on-l-a-dit', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 3, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => '', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 4, 'person_id' => (int) 85, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [[maximum depth reached]], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, (int) 1 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 4836, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => true, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => null, 'readed' => null, 'subhead' => null, 'title' => 'Le géant des mers est genevois', 'subtitle' => 'Dans «l'Agefi», Xavier Comtesse et Philippe Labouchère évoquent le succès peu connu d’une entreprise familiale établie à Genève: MSC (Mediterraneau Shopping Company). 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En effet, le <em>sakura</em>, nom donné au cerisier en japonais, est un <a href="https://www.google.com/books/edition/Mizue_Sawano_The_Art_of_the_Cherry_Tree/nHf8lxLOYsUC?hl=en">symbole de l’impermanence</a> reconnu au Japon et ailleurs.</p> <p>Divers festivals sont régulièrement organisés partout dans le monde pour célébrer cette floraison.</p> <p>En tant que <a href="https://wlc.utk.edu/?people=malgorzata-k-citko-duplantis">spécialiste de la littérature et de la culture japonaises prémodernes</a>, j’ai été initiée très tôt à la coutume d’admirer les cerisiers en fleurs. Il s’agit d’un rituel ancien qui a été célébré et décrit au Japon pendant des siècles et qui continue d’être un élément indispensable pour accueillir le printemps. Aux États-Unis, la tradition du <em>hanami</em> a commencé avec la plantation des premiers cerisiers à Washington DC en 1912 en tant que <a href="https://www.nps.gov/subjects/cherryblossom/history-of-the-cherry-trees.htm">cadeau d’amitié du Japon</a>.</p> <h3>Poésie sur la nature</h3> <p>La coutume d’observer les arbres en fleurs au printemps est arrivée au Japon en provenance du continent asiatique. L’observation des pruniers en fleurs, souvent au clair de lune, comme symbole de <a href="https://www.archwaypublishing.com/en/bookstore/bookdetails/799255-The-Plum-Blossom-of-Luojia-Mountain">force, vitalité et fin de l’hiver</a> était pratiquée en Chine depuis l’antiquité. 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Les anthologies impériales de <em>waka</em> compilées au Japon entre 905 et 1439 de l’ère chrétienne contiennent généralement plus de poèmes printaniers composés sur les cerisiers en fleurs que sur les pruniers en fleurs.</p> <h3>Au cœur de la composition des <em>waka</em></h3> <p><a href="https://www.penguinrandomhouse.com/books/558474/the-sakura-obsession-by-naoko-abe/">La première exposition de cerisiers en fleurs</a> a été organisée par l’empereur Saga en 812 de l’ère chrétienne et est rapidement devenue un événement régulier à la cour impériale, souvent accompagné de musique, de nourriture et d’écriture de poèmes.</p> <p>Les cerisiers en fleurs sont devenus l’un des sujets habituels de composition des <em>waka</em>. En fait, j’ai commencé à étudier la poésie japonaise grâce à un poème sur le thème du <em>sakura</em> écrit par une poétesse classique, Izumi Shikibu, dont on pense qu’elle a activement composé des <em>waka</em> vers l’an 1000 de notre ère. Le poème est préfacé par la <a href="http://www.misawa-ac.jp/drama/daihon/genji/bunken/zoku.html">mémoire de son auteur</a>. Ce poème parle de son ancien amant qui souhaite revoir les cerisiers en fleurs avant qu’ils ne tombent.</p> <blockquote> <p>tō o koyo<br />saku to miru ma ni<br />chirinu beshi<br />tsuyu to hana to no<br />naka zo yo no naka</p> <p>Viens vite !<br />À peine commencent-elles à s’ouvrir<br />qu’elles doivent tomber.<br />Notre monde réside<br />dans la rosée au sommet des fleurs de cerisier.</p> </blockquote> <p>Ce poème n’est pas l’exemple le plus célèbre de <em>waka</em> sur les cerisiers en fleurs dans la poésie japonaise prémoderne, mais il contient des couches d’imagerie traditionnelle symbolisant l’impermanence. Il souligne qu’une fois écloses, les fleurs de cerisier sont destinées à tomber. 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Une telle interprétation révèle que le poème est une allusion à une relation amoureuse, qui est aussi fragile que la rosée qui s’évapore sur les fleurs de cerisier qui tombent bientôt ; elle ne dure pas longtemps, il faut donc l’apprécier tant qu’elle existe.</p> <h4 style="text-align: center;"><img src="https://images.theconversation.com/files/579998/original/file-20240305-18-vujctw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" alt="Un arbre japonais en fleurs chargé de grappes de fleurs roses dans un jardin" /><em><span>Au Japon, les cerisiers en fleurs symbolisent l’impermanence ». zoomable=</span> <span><a href="https://www.flickr.com/photos/25228175@N08/4549363374">Elvin/Flickr</a>, <a href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc/4.0/">CC BY-NC</a></span></em></h4> <p>Le poème peut également être interprété de manière plus générale : La rosée est un symbole de la vie humaine, et la chute des cerisiers en fleurs une métaphore de la mort.</p> <h3>Militarisé par l’Empire du Japon</h3> <p>La notion de chute des fleurs de cerisier a été utilisée par <a href="https://www.bloomsbury.com/us/imperial-japan-and-defeat-in-the-second-world-war-9781350246799/">l’Empire du Japon</a>, un État historique qui a existé de la restauration meiji en 1868 jusqu’à la promulgation de la Constitution du Japon en 1947. L’empire est connu pour la <a href="https://www.bloomsbury.com/uk/japanese-taiwan-9781472576743/">colonisation de Taïwan</a> et l’<a href="https://www.peterlang.com/document/1049131">annexion de la Corée</a> afin d’étendre ses territoires.</p> <p><a href="https://kokubunken.repo.nii.ac.jp/records/4747">Sasaki Nobutsuna</a>, un érudit des classiques japonais ayant des liens étroits avec la cour impériale, était un partisan de l’idéologie nationaliste de l’empire. En 1894, il a composé un long poème, <a href="https://dl.ndl.go.jp/pid/873478/1/10">« Shina seibatsu no uta »</a>, ou « Le chant de la conquête des Chinois », pour coïncider avec la première guerre sino-japonaise, qui a duré de 1894 à 1895. 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Fleurissant autour du <a href="https://www.nbcbayarea.com/news/national-international/lunar-new-year-2024-how-to-celebrated/3447961/">Nouvel An lunaire</a> célébré dans le Japon prémoderne depuis des siècles, elles symbolisent les nouveaux départs dans tous les domaines de la vie.</p> <p>À l’époque contemporaine, les vendeurs ont transformé les cerisiers en fleurs en vendant du <a href="https://stories.starbucks.com/asia/stories/2024/sakura-season-starts-at-starbucks-japan-on-thursday-february-15/">thé, café</a>, de la <a href="https://japantoday.com/category/features/food/haagen-dazs-releases-two-new-seasonal-flavors">crème glacée</a>, des <a href="https://www.oenon.jp/news/2020/0205-1.html">boissons</a> ou des <a href="https://www.fujingaho.jp/gourmet/sweets/g43015580/fujingahonootoriyose-sakura-sweets20240215/">biscuits</a> aromatisés au <em>sakura</em>, transformant ainsi l’image de l’arbre en fleurs en une marque saisonnière. Les <a href="https://sakura.weathermap.jp/en.php">prévisions météorologiques</a> suivent la floraison des cerisiers pour s’assurer que tout le monde a une chance de participer à l’ancien rituel de l’observation.</p> <p>L’obsession des cerisiers en fleurs peut sembler triviale, mais le <em>hanami</em> rassemble les gens à une époque où la plupart des communications se font virtuellement et à distance, réunissant des membres de la famille, des amis, des collègues de travail et parfois même des étrangers, comme cela m’est arrivé lorsque je vivais au Japon.</p> <p>L’observation des <em>sakura</em> témoigne également de la relation unique que le Japon moderne entretient avec sa propre histoire. En même temps, cela nous rappelle que l’impermanence est peut-être la seule constante de la vie.</p> <h4 style="text-align: center;"><a href="https://images.theconversation.com/files/580005/original/file-20240305-23810-vdbysn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img src="https://images.theconversation.com/files/580005/original/file-20240305-23810-vdbysn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" alt="Deux rangées de grands arbres avec des grappes de fleurs roses de part et d’autre d’une allée" /></a><em><span>Les cerisiers, avec leurs jolies fleurs, sont arrivés à Washington D.C. comme un cadeau du Japon.</span> <span><a href="https://www.flickr.com/photos/dannyfowler/4469426717">Danny Navarro/Flickr</a>, <a href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></em></h4> <p>Aujourd’hui, les cerisiers en fleurs sont célébrés au printemps <a href="https://localadventurer.com/places-to-see-cherry-blossoms-in-the-world/">partout dans le monde</a>, encourageant l’appréciation de l’impermanence par l’observation de la nature.<img src="https://counter.theconversation.com/content/225513/count.gif?distributor=republish-lightbox-basic" alt="The Conversation" width="1" height="1" /></p> <hr /> <h4><span><a href="https://theconversation.com/profiles/malgorzata-gosia-k-citko-duplantis-1515126">Małgorzata (Gosia) K. 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Mais puisque la RTS estime nécessaire d’exprimer des «regrets» pour les «propos outranciers» tenus par Slobodan Despot, quelques questions s’imposent:</p> <p><strong>1.</strong> Pourquoi, si les propos n’y sont pas si libres que ça, l'émission «Les Beaux Parleurs» est-elle toujours présentée comme un «talk show» sur le site de la RTS?</p> <p><strong>2.</strong> Si la RTS juge bon d’exprimer ses «regrets» pour des «propos outranciers», il est à supposer que sa charte a été enfreinte par Slobodan Despot. Dans ce cas, il serait bon de spécifier aux <a href="https://www.24heures.ch/la-rts-regrette-les-propos-outranciers-de-slobodan-despot-739244121528" target="_blank" rel="noopener">lecteurs de <em>24 Heures</em></a> quels passages plus précisément. La charte de la RTS dit notamment ceci: «une responsabilité particulière dans la recherche de la vérité, l’impartialité, la pluralité et le respect de la personne.» En décrivant des éléments factuels, Slobodan Depot a fait preuve de recherche de la vérité. Il représente l’un des éléments nécessaires à la pluralité d’opinion censément chère à la RTS et n’a manqué de respect envers personne au travers de ses propos. Où est donc le problème? 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Certaines des personnes visées (notamment les 23'000 parents ayant signé la pétition du Collectif Parents) ont potentiellement pu se sentir agressées par ces propos. Elles n’en ont pas fait toute une histoire car elles savent que «Les Beaux Parleurs» est une émission de débat et que la liberté d’expression est (pardon, devrait être) l’un des piliers de toute démocratie qui se respecte.</p> <p><strong>5.</strong> Comment la RTS peut-elle justifier qu’elle remplit toujours son mandat de service public si elle décide de manière aléatoire (ou partiale?) de s’excuser pour certains propos, prétendument d’extrême droite, alors qu’elle ne s’excuse pas pour certains propos semblant relever de l’extrême gauche? Qui, au sein de la RTS, décide du moment auquel il faut ou non exprimer des «regrets»? 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Le battage médiatique fait autour des propos d'un chroniqueur interroge donc sur l'état de cette démocratie.</p> <p>Toute cette histoire est une non-affaire, qui me rappelle tristement deux autres non-affaires arrivées il y a pile trois ans et ressemblant en de nombreux points à celle-ci: quelqu’un a été payé pour effectuer un travail précis. Il accomplit ce travail selon les termes du contrat. Qu’on le laisse faire ce travail. 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Texte et photos: Julie Zaugg et Clément Bürge
Liu Ge se souvient surtout de l’odeur. «Cela prenait à la gorge, comme les herbicides qu’on utilise à la ferme pour tuer les mauvaises herbes», raconte cet homme de 33 ans vêtu d’un polo rayé et de jeans. A l’époque, ce natif de la province rurale du Hunan travaillait pour une usine d’habits. Il était chargé d’opérer une machine qui imprimait des logos sur les vêtements. Il gagnait 4000 yuans (600 francs) par mois. Ce sont les encres utilisées qui sentaient si fort.
L’ouvrier Liu Ge, 33 ans, Canton
Il nous a donné rendez-vous dans une chambre d’hôtel de Panyu, une banlieue industrielle de la ville de Canton. Par souci de discrétion: il craignait que des oreilles indiscrètes ne captent son récit. Il nous demandera aussi de ne pas montrer son visage et de modifier son nom, comme tous nos autres interlocuteurs.
En 2015, lors d’un contrôle de santé de routine, Liu Ge apprend qu’il souffre d’un nombre anormalement bas de globules blancs. «Je me sentais faible et fatigué, relate ce père de deux enfants âgés de 5 et 10 ans. Je tombais aussi malade tout le temps.» Son système immunitaire était compromis. L’hôpital lui diagnostique une intoxication au benzène, un puissant solvant à l’odeur doucereuse dont l’usage industriel est strictement limité en Europe et aux Etats-Unis en raison de sa toxicité.
Intoxications au benzène
Liu Ge appartient à une cohorte grandissante de travailleurs qui ont sacrifié leur santé sur l’autel du développement économique chinois. Nés dans les campagnes défavorisées du centre du pays, ils ont émigré en masse vers les côtes en quête d’une vie meilleure. Ils y ont trouvé de l’emploi dans les usines de vêtements, d’électronique ou de meubles qui fabriquent la majorité des biens consommés en Occident, notamment dans le Delta de la rivière des Perles, une région du sud de la Chine qui englobe les pôles manufacturiers de Shenzhen, Canton et Dongguan. Mais il y ont aussi trouvé la maladie, sous la forme d’intoxications à une multitude de produits chimiques.
«En Chine, le benzène reste largement utilisé pour nettoyer les pièces entrant dans la composition de smartphones et de circuits électroniques, détaille Jason Chan, le directeur de Labor Action China, une ONG de défense des ouvriers. Il est aussi inclus dans certaines colles utilisées par les fabricants de chaussures et dans la peinture qui recouvre les jouets ou les meubles.» Il pourrait aisément être remplacé par des substances moins nocives, mais les industriels chinois aiment s’en servir car il coûte moins cher et sèche plus vite. Le benzène est aujourd’hui responsable de la majorité des intoxications subies par les ouvriers chinois.
Mais ce n’est pas la seule substance toxique à laquelle ils sont exposés. «Lorsque je fais une bavure sur le verre, j’utilise de l’huile de banane pour l’effacer, dit Da Jiao, une jeune femme de 21 ans originaire du Hubei qui imprime des liserés de couleur sur des vitres de smartphone et des glaces de montre. Même avec un masque, je ne me sens pas bien.»
L’huile de banane est l’euphémisme communément utilisé par les travailleurs du Delta de la rivière des perles pour parler du n-Hexane, un produit nettoyant très nocif. Les usines chinoises continuent à l’utiliser car il s’évapore trois fois plus vite que l’alcool.
Un représentant du syndicat à Canton
Les ouvriers qui travaillent dans l’industrie du cuir sont pour leur part confrontés au chrome hexavalent, ceux qui produisent des piles au cadmium et ceux qui font des puces informatiques à l’acide fluorhydrique. D’autres ont affaire au toluène, au plomb, au trichloréthylène, au diméthylformamide et au chloroforme. Des substances tour à tour cancérigènes, neurotoxiques ou urticantes. Au total, on estime qu’en Chine plus de 200 millions de travailleurs sont régulièrement exposés à des produits chimiques dangereux.
Maux de tête et vertiges
Chen Bhaozhai aime le jade, une pierre prisée en Chine pour ses vertus médicinales. Cette petite dame de 40 ans au visage rond encadré par des cheveux noués en une queue de cheval stricte l’arbore sous la forme d’un bracelet et d’un pendentif vert pâle. Sa santé lui vaut bien des soucis. «Tout a commencé au printemps 2014 avec des maux de tête et des vertiges, raconte-t-elle. Puis, j’ai perdu l’appétit et j’ai commencé à avoir de la nausée.» Trois mois plus tard, son état était devenu intenable. «J’étais si faible que je parvenais à peine à tenir debout, relate-t-elle. J’ai eu mes règles durant deux semaines, sans interruption.»
En août, son employeur, une usine de Shenzhen fabriquant des bornes wi-fi qu’elle était chargée de peindre et de nettoyer, lui accorde trois mois de congé. Elle se fait hospitaliser. Le verdict des médecins est sans appel: sa moelle osseuse ne produit plus assez de globules blancs, un effet secondaire du benzène contenu dans les produits qu’elle manipulait au travail, et lui prescrit un cocktail de médicaments et d’injections qu’elle continue à prendre aujourd’hui.
Malgré ses bijoux de jade, une pierre censée avoir des vertus médicinales, Chen Bhaozgai doit aujourd’hui ingurgiter une batterie de médicaments pour se soigner.
L’exposition prolongée au benzène, à partir d’une année environ, provoque une régression de la moelle osseuse. Cela inhibe la production de globules blancs et peut mener à des anémies, des leucopénies (affaiblissement du système immunitaire) ou des leucémies. Les experts estiment que sur 1000 personnes exposées au benzène de façon chronique, cinq en décèderont. Cette substance a également été lié à des troubles reproductifs et peut affecter le fœtus.
Le n-Hexane génère pour sa part divers maux du système nerveux. «Le patient commence par ressentir un engourdissement et une sensation de brûlure au niveau de ses extrémités, détaille Jo-Hui Pan, un chercheur taïwanais qui a étudié ces effets. Progressivement, cela se transforme en faiblesse musculaire généralisée. Dans les cas les plus graves, on aboutit à une paralysie.» Quant au cadmium, interdit dans l’Union européenne depuis 2006, il endommage les reins.
Ni masques, ni gants
Les ouvriers ne sont souvent pas au courant des dangers posés par les produits toxiques qu’ils manipulent au quotidien. «On ne leur fournit aucune information sur les risques auxquels ils s’exposent et les étiquettes sur les bouteilles sont souvent fausses ou en anglais, détaille Jason Chan. Résultat, lorsqu’ils tombent malades, ils ne savent pas pourquoi.»
Des ouvriers d’une usine fabriquant des vitres de smartphone sortent de l’usine à 7 heures du matin, après avoir travaillé toute la nuit.
L’équipement qui leur est fourni est également indigent. «Des masques de chirurgien jetables et des gants en latex», note le militant. Un tiers d’entre eux ne reçoit rien du tout, selon un sondage réalisé par Labour Action China. Certains adoptent des moyens de fortune, comme s’envelopper les mains dans de l’emballage en plastique. D’autres renoncent à se servir des maigres protections offertes, car cela les ralentit trop dans leur travail.
«Pour éviter que de la poussière ne se dépose sur le verre, l’usine avait renoncé à installer un système de ventilation», se remémore Li Jingfei, une petite femme de 40 ans avec de grands yeux rieurs, qui a travaillé durant quatre ans dans une fabrique de Shenzhen fabriquant des objectifs de caméra et souffre aujourd’hui de leucopénie. Elle était chargée de les essuyer avec une solution à base de benzène. «Nous n’avions pas de masques, seulement des coques en plastique sur les doigts, pour ne pas égratigner les pièces», livre-t-elle.
L’ouvrière Li Jingfei souffre de leucopénie après avoir travaillé plusieurs années dans la fabrication d’objectifs de caméras.
«Just in time manufacturing»
Si les usines du Delta de la rivière des Perles négligent à ce point la santé de leurs travailleurs, c’est essentiellement pour des raisons de coûts. Leurs clients, les multinationales, font pression sur leurs marges et leur imposent des délais impossibles à tenir, dans le cadre d’une stratégie appelée just in time manufacturing qui a pour but de réduire au maximum la durée – et les coûts – d’entreposage des biens. Cela les oblige à rogner sur les mesures de sécurité.
Quant aux autorités locales, elles hésitent à intervenir, craignant de provoquer le départ de ces employeurs et contribuables de taille. «Les usines appartiennent souvent aux fils de notables locaux, ce qui décourage une surveillance trop active», précise Garrett Brown, un spécialiste américain des mesures de protection au travail. La Chine manque en outre d’inspecteurs sanitaires: le pays n’en compte que 22'000.
Des passants au centre-ville de Shenzhen.
Et même lorsque des inspections ont lieu, elles sont mises en scène. «Elles ont souvent lieu le dimanche, lorsque peu d’ouvriers sont présents», révèle Rena Lau, de l’ONG Globalization Monitor. Chen Baozhai se souvient d’une visite des autorités dans son usine, lors de laquelle son patron avait remplacé tous les produits de nettoyage à base de benzène par de l’alcool.
Réparations impossibles
Le calvaire des victimes d’intoxication ne s’arrête pas à la maladie. Elles affrontent également un véritable parcours du combattant pour obtenir réparation. «La charge de la preuve repose entièrement sur l’ouvrier, précise Zhai Yujuan, professeur de droit du travail à l’Université de Shenzhen. Il doit démontrer que sa maladie a été causée par les produits chimiques manipulés dans le cadre de son travail.»
Des usines désaffectées dans le quartier d’OCT Loft.
Cela implique de disposer d’un certificat de travail valable, ainsi que d’un diagnostic officiel, qui prouve qu’il souffre bien d’une maladie professionnelle, deux documents durs à obtenir. Sans cela, l’Etat ne remboursera pas ses frais médicaux. La démonstration est d’autant plus difficile à apporter que la maladie ne se déclare souvent pas avant des années. La durée moyenne de latence d’une leucémie causée par le benzène est de 11 ans.
La procédure est aussi extrêmement longue. «Dans le meilleur des cas, elle prend quelques mois, mais elle dure souvent quatre à cinq ans», note Zhai Yujuan. Dans l’intervalle, l’ouvrier malade doit avancer l’argent pour payer les frais liés à son traitement médical.
«J’ai dû emprunter de l’argent»
Tung Hung, un jeune homme de 28 ans aux traits poupins surmontés d’une coupe en brosse, n’avait que 17 ans lorsqu’il a quitté son Hubei natal pour Shenzhen avec sa grande sœur. «Mon premier emploi était dans une fabrique produisant des clubs de golf pour des marques comme Nike, Mizuno et Callaway, se rappelle-t-il. J’étais chargé de les tremper dans un bac rempli de xylène et de benzène, pour les nettoyer.»
Il quitte l’usine après trois ans et n’a plus affaire à des produits chimiques. «Un jour, en 2014, je me suis soudain senti très faible et j’ai commencé à avoir des vertiges», raconte-t-il. Il se rend à l’hôpital et apprend qu’il a un taux de leucocytes quinze fois trop élevé. On lui diagnostique une leucémie. Après deux ans de traitement, il est désormais guéri. Mais il a dû mener une longue bataille juridique en parallèle.
L’ouvrier Tung Hung à Hong Kong
«Le propriétaire de l’usine a refusé de reconnaître que ma maladie était liée aux produits chimiques auxquels j’avais été exposé», raconte-t-il. L’enjeu était de taille: si un ouvrier tombe malade au travail, son employeur doit lui verser deux ans de salaire. Malgré un premier jugement en sa faveur, l’ex-patron de Tung Hung refuse de lui verser son dû. Ce n’est qu’en janvier 2016 qu’il s’y résigne, après avoir perdu un second procès initié par les services sociaux. Le jeune homme ne touchera les fonds qu’en septembre 2017.
En Chine, tomber malade se transforme rapidement en catastrophe financière. Tung Hung a dû débourser 90'000 yuans (13'500 francs) de sa poche pour soigner sa leucémie, une petite fortune pour ce migrant pauvre qui doit subvenir aux besoins de ses parents, restés au village. «J’ai dû emprunter de l’argent à des amis, m’endetter et dépenser toutes mes économies», soupire-t-il.
Victoire amère
Si les conditions de travail décrites ci-dessus sont en général le fait de petits ateliers, les produits qui y sont fabriqués sont fournis à de grandes marques et finissent souvent dans les poches du consommateur occidental. Parmi les grands noms identifiés par diverses ONG de défense des ouvriers figurent des multinationales comme Acer, Canon, Asus, Fuji, Huawei, LG Ekectronics, Motorola, Nokia, Philips, Samsung, Sharp, Siemens, Sony, Maersk, Disney, Mattel, Hasbro, Nike et Timberland.
Et auprès des entreprises a priori éthiques, comme Apple qui a interdit l’usage du benzène et du n-Hexane en 2014, des problèmes subsistent. «Si vous consultez les rapports de responsabilité sociale d’Apple, vous constaterez que 20% à 30% de ses fournisseurs ne respectent pas les conditions contenues dans cette charte», note Garrett Brown.
Pour Tung Hung, la vie a désormais un goût amer. «Comme j’ai été déclaré invalide par les services sociaux, je n’ai plus aucune chance de décrocher un emploi, lâche-t-il. A 28 ans, je suis bien trop jeune pour être à la retraite.» Il sait aussi qu’il aura de la peine à trouver une épouse. «Aucune femme ne voudra d’un invalide», murmure-t-il. Et il devra continuer à prendre du Glivec, un médicament anticancéreux qui provoque des problèmes gastro-intestinaux, des nausées et des maux de tête, jusqu’à la fin de sa vie.
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L’hôpital lui diagnostique une intoxication au benzène, un puissant solvant à l’odeur doucereuse dont l’usage industriel est strictement limité en Europe et aux Etats-Unis en raison de sa toxicité.</p><h3 style="text-align: center;">Intoxications au benzène<br></h3><p>Liu Ge appartient à une cohorte grandissante de travailleurs qui ont sacrifié leur santé sur l’autel du développement économique chinois. Nés dans les campagnes défavorisées du centre du pays, ils ont émigré en masse vers les côtes en quête d’une vie meilleure. Ils y ont trouvé de l’emploi dans les usines de vêtements, d’électronique ou de meubles qui fabriquent la majorité des biens consommés en Occident, notamment dans le Delta de la rivière des Perles, une région du sud de la Chine qui englobe les pôles manufacturiers de Shenzhen, Canton et Dongguan. 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Le benzène est aujourd’hui responsable de la majorité des intoxications subies par les ouvriers chinois.</p><p style="text-align: left;">Mais ce n’est pas la seule substance toxique à laquelle ils sont exposés. «Lorsque je fais une bavure sur le verre, j’utilise de l’huile de banane pour l’effacer, dit Da Jiao, une jeune femme de 21 ans originaire du Hubei qui imprime des liserés de couleur sur des vitres de smartphone et des glaces de montre. Même avec un masque, je ne me sens pas bien.» <br></p><p>L’huile de banane est l’euphémisme communément utilisé par les travailleurs du Delta de la rivière des perles pour parler du n-Hexane, un produit nettoyant très nocif. 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D’autres renoncent à se servir des maigres protections offertes, car cela les ralentit trop dans leur travail. </p><p>«Pour éviter que de la poussière ne se dépose sur le verre, l’usine avait renoncé à installer un système de ventilation», se remémore Li Jingfei, une petite femme de 40 ans avec de grands yeux rieurs, qui a travaillé durant quatre ans dans une fabrique de Shenzhen fabriquant des objectifs de caméra et souffre aujourd’hui de leucopénie. 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Cette petite dame de 40 ans au visage rond encadré par des cheveux noués en une queue de cheval stricte l’arbore sous la forme d’un bracelet et d’un pendentif vert pâle. Sa santé lui vaut bien des soucis. «Tout a commencé au printemps 2014 avec des maux de tête et des vertiges, raconte-t-elle. Puis, j’ai perdu l’appétit et j’ai commencé à avoir de la nausée.» Trois mois plus tard, son état était devenu intenable. «J’étais si faible que je parvenais à peine à tenir debout, relate-t-elle. J’ai eu mes règles durant deux semaines, sans interruption.»</p><p>En août, son employeur, une usine de Shenzhen fabriquant des bornes wi-fi qu’elle était chargée de peindre et de nettoyer, lui accorde trois mois de congé. Elle se fait hospitaliser. Le verdict des médecins est sans appel: sa moelle osseuse ne produit plus assez de globules blancs, un effet secondaire du benzène contenu dans les produits qu’elle manipulait au travail, et lui prescrit un cocktail de médicaments et d’injections qu’elle continue à prendre aujourd’hui.</p><h4 style="text-align: center;"><img class="img-responsive " src="https://bonpourlatete.comhttps://media.bonpourlatete.com/default/w1200/1519123702_poll3.jpg">Malgré ses bijoux de jade, une pierre censée avoir des vertus médicinales, Chen Bhaozgai doit aujourd’hui ingurgiter une batterie de médicaments pour se soigner.</h4><p>L’exposition prolongée au benzène, à partir d’une année environ, provoque une régression de la moelle osseuse. Cela inhibe la production de globules blancs et peut mener à des anémies, des leucopénies (affaiblissement du système immunitaire) ou des leucémies. Les experts estiment que sur 1000 personnes exposées au benzène de façon chronique, cinq en décèderont. 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Leurs clients, les multinationales, font pression sur leurs marges et leur imposent des délais impossibles à tenir, dans le cadre d’une stratégie appelée<em> just in time manufacturing </em>qui a pour but de réduire au maximum la durée – et les coûts – d’entreposage des biens. Cela les oblige à rogner sur les mesures de sécurité.</p><p>Quant aux autorités locales, elles hésitent à intervenir, craignant de provoquer le départ de ces employeurs et contribuables de taille. «Les usines appartiennent souvent aux fils de notables locaux, ce qui décourage une surveillance trop active», précise Garrett Brown, un spécialiste américain des mesures de protection au travail. 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Le poème est préfacé par la <a href="http://www.misawa-ac.jp/drama/daihon/genji/bunken/zoku.html">mémoire de son auteur</a>. Ce poème parle de son ancien amant qui souhaite revoir les cerisiers en fleurs avant qu’ils ne tombent.</p> <blockquote> <p>tō o koyo<br />saku to miru ma ni<br />chirinu beshi<br />tsuyu to hana to no<br />naka zo yo no naka</p> <p>Viens vite !<br />À peine commencent-elles à s’ouvrir<br />qu’elles doivent tomber.<br />Notre monde réside<br />dans la rosée au sommet des fleurs de cerisier.</p> </blockquote> <p>Ce poème n’est pas l’exemple le plus célèbre de <em>waka</em> sur les cerisiers en fleurs dans la poésie japonaise prémoderne, mais il contient des couches d’imagerie traditionnelle symbolisant l’impermanence. Il souligne qu’une fois écloses, les fleurs de cerisier sont destinées à tomber. 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Une telle interprétation révèle que le poème est une allusion à une relation amoureuse, qui est aussi fragile que la rosée qui s’évapore sur les fleurs de cerisier qui tombent bientôt ; elle ne dure pas longtemps, il faut donc l’apprécier tant qu’elle existe.</p> <h4 style="text-align: center;"><img src="https://images.theconversation.com/files/579998/original/file-20240305-18-vujctw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" alt="Un arbre japonais en fleurs chargé de grappes de fleurs roses dans un jardin" /><em><span>Au Japon, les cerisiers en fleurs symbolisent l’impermanence ». zoomable=</span> <span><a href="https://www.flickr.com/photos/25228175@N08/4549363374">Elvin/Flickr</a>, <a href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc/4.0/">CC BY-NC</a></span></em></h4> <p>Le poème peut également être interprété de manière plus générale : La rosée est un symbole de la vie humaine, et la chute des cerisiers en fleurs une métaphore de la mort.</p> <h3>Militarisé par l’Empire du Japon</h3> <p>La notion de chute des fleurs de cerisier a été utilisée par <a href="https://www.bloomsbury.com/us/imperial-japan-and-defeat-in-the-second-world-war-9781350246799/">l’Empire du Japon</a>, un État historique qui a existé de la restauration meiji en 1868 jusqu’à la promulgation de la Constitution du Japon en 1947. L’empire est connu pour la <a href="https://www.bloomsbury.com/uk/japanese-taiwan-9781472576743/">colonisation de Taïwan</a> et l’<a href="https://www.peterlang.com/document/1049131">annexion de la Corée</a> afin d’étendre ses territoires.</p> <p><a href="https://kokubunken.repo.nii.ac.jp/records/4747">Sasaki Nobutsuna</a>, un érudit des classiques japonais ayant des liens étroits avec la cour impériale, était un partisan de l’idéologie nationaliste de l’empire. En 1894, il a composé un long poème, <a href="https://dl.ndl.go.jp/pid/873478/1/10">« Shina seibatsu no uta »</a>, ou « Le chant de la conquête des Chinois », pour coïncider avec la première guerre sino-japonaise, qui a duré de 1894 à 1895. 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Citko-DuPlantis</a>, Assistant Professor in Japanese Literature and Culture, <em><a href="https://theconversation.com/institutions/university-of-tennessee-688">University of Tennessee</a></em></span></h4> <h4>Cet article est republié à partir de <a href="https://theconversation.com">The Conversation</a> sous licence Creative Commons. Lire l’<a href="https://theconversation.com/celebrer-les-fleurs-de-cerisier-ou-la-poesie-de-limpermanence-225513">article original</a>.</h4>', 'content_edition' => '', 'slug' => 'celebrer-les-fleurs-de-cerisier-ou-la-poesie-de-l-impermanence', 'headline' => null, 'homepage' => null, 'like' => (int) 20, 'editor' => null, 'index_order' => (int) 1, 'homepage_order' => (int) 1, 'original_url' => 'https://theconversation.com/celebrer-les-fleurs-de-cerisier-ou-la-poesie-de-limpermanence-225513', 'podcast' => false, 'tagline' => null, 'poster' => null, 'category_id' => (int) 5, 'person_id' => (int) 85, 'post_type_id' => (int) 1, 'post_type' => object(App\Model\Entity\PostType) {}, 'comments' => [[maximum depth reached]], 'tags' => [ [maximum depth reached] ], 'locations' => [[maximum depth reached]], 'attachment_images' => [ [maximum depth reached] ], 'person' => object(App\Model\Entity\Person) {}, 'category' => object(App\Model\Entity\Category) {}, '[new]' => false, '[accessible]' => [ [maximum depth reached] ], '[dirty]' => [[maximum depth reached]], '[original]' => [[maximum depth reached]], '[virtual]' => [[maximum depth reached]], '[hasErrors]' => false, '[errors]' => [[maximum depth reached]], '[invalid]' => [[maximum depth reached]], '[repository]' => 'Posts' }, (int) 3 => object(App\Model\Entity\Post) { 'id' => (int) 4823, 'created' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'modified' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'publish_date' => object(Cake\I18n\FrozenTime) {}, 'notified' => null, 'free' => true, 'status' => 'PUBLISHED', 'priority' => null, 'readed' => null, 'subhead' => null, 'title' => 'Dérapage de la RTS?', 'subtitle' => 'Après l'émission «Les Beaux Parleurs» du 17 mars dernier, la RTS a exprimé des «regrets» pour les propos «outranciers» du chroniqueur Slobodan Despot, tenus à propos des pays baltes. 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Mais puisque la RTS estime nécessaire d’exprimer des «regrets» pour les «propos outranciers» tenus par Slobodan Despot, quelques questions s’imposent:</p> <p><strong>1.</strong> Pourquoi, si les propos n’y sont pas si libres que ça, l'émission «Les Beaux Parleurs» est-elle toujours présentée comme un «talk show» sur le site de la RTS?</p> <p><strong>2.</strong> Si la RTS juge bon d’exprimer ses «regrets» pour des «propos outranciers», il est à supposer que sa charte a été enfreinte par Slobodan Despot. Dans ce cas, il serait bon de spécifier aux <a href="https://www.24heures.ch/la-rts-regrette-les-propos-outranciers-de-slobodan-despot-739244121528" target="_blank" rel="noopener">lecteurs de <em>24 Heures</em></a> quels passages plus précisément. La charte de la RTS dit notamment ceci: «une responsabilité particulière dans la recherche de la vérité, l’impartialité, la pluralité et le respect de la personne.» En décrivant des éléments factuels, Slobodan Depot a fait preuve de recherche de la vérité. Il représente l’un des éléments nécessaires à la pluralité d’opinion censément chère à la RTS et n’a manqué de respect envers personne au travers de ses propos. Où est donc le problème? 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Le battage médiatique fait autour des propos d'un chroniqueur interroge donc sur l'état de cette démocratie.</p> <p>Toute cette histoire est une non-affaire, qui me rappelle tristement deux autres non-affaires arrivées il y a pile trois ans et ressemblant en de nombreux points à celle-ci: quelqu’un a été payé pour effectuer un travail précis. Il accomplit ce travail selon les termes du contrat. Qu’on le laisse faire ce travail. 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